République et canton de Genève

Grand Conseil

No 42

Jeudi 17 novembre 1994,

nuit

Présidence :

Mme Françoise Saudan,présidente

La séance est ouverte à 21 h.

Assistent à la séance : MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Jean-Philippe Maitre, Philippe Joye, Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

La présidente donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Olivier Vodoz, Guy-Olivier Segond et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. René Ecuyer, Catherine Fatio et Jean-Pierre Rigotti, députés.

Je saisis l'occasion pour saluer la présence à la tribune de notre ancien collègue, M. François Grosjean, maire de Chêne-Bougeries. (Applaudissements.)

3. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

La présidente. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :

I 1917
de M. René Longet (S) : Quelle est la position du Conseil d'Etat sur la procédure pénale fédérale ? ( )  I1917

Cosignataires : Micheline Calmy-Rey, Dominique Hausser, Mireille Gossauer-Zurcher, Liliane Charrière Urben, Claire Torracinta-Pache.

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance. 

e) de questions écrites.

La présidente. Nous avons reçu la question écrite suivante :

Q 3527
de Mme Maria Roth-Bernasconi (S) : L'amour entre les médecins et les industries pharmaceutiques. ( )  Q3527

Elle sera transmise au Conseil d'Etat. 

E 738
4. Prestation de serment de M. Jean-Nicolas Roten, élu juge d'instruction. ( -1) E738
Mémorial 1994 : Election, 5245.

M. Jean-Nicolas Roten est assermenté. (Applaudissements.) 

PL 7180
5. Projet de loi du Conseil d'Etat approuvant les budgets de fonctionnement et d'investissement de l'entreprise des Transports publics genevois pour l'exercice 1995. ( )PL7180

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 160 A, alinéa 3, de la constitution genevoise, du 24 mai1847;

vu les articles 28, 29, alinéa 2, et 36, lettre a, de la loi sur les Transports publics genevois, du 21 novembre 1975,

Décrète ce qui suit:

Article 1

Budget de fonctionnement

Le budget de fonctionnement des Transports publics genevois pour l'année 1995 est approuvé conformément aux chiffres suivants:

a) charges

200 237 500 F

b) produits

198 694 000 F

Art. 2

Budget d'investisse-ment

Le budget d'investissement des Transports publics genevois pour l'année 1995, comprenant 2 868 000 F de dépenses nouvelles, est approuvé.

Art. 3

Contribution de l'Etat

1 L'Etat participe à la couverture des charges de fonctionnement des Transports publics genevois par le versement d'une contribution forfaitaire, incluant les indemnités dues au titre de la loi fédérale sur le transport public, inscrite au budget de fonctionnement de l'Etat sous le département de justice et police et des transports.

2 Le montant de la contribution de l'Etat pour l'exercice 1995 s'élève à 102 000 000 F.

Art. 4

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Nous vous remettons, en annexe, le budget de fonctionnement et le budget des investissements des Transports publics genevois pour l'année 1995. Ces budgets ont été adoptés par le conseil d'administration de l'entreprise le 5 septembre 1994.

L'enveloppe des contributions de l'Etat au budget de fonctionnement de l'entreprise s'établit, pour 1995, à 102 000 000 F (1994: 106 024 841 F; 1993: 105 300 000 F; 1992: 109 686 095 F). L'exercice se caractérise par un déficit de fonctionnement (1 543 500 F) à la charge du fonds de réserve alimenté par les bénéfices des années précédentes.

L'ensemble des explications relatives à ces budgets se trouve dans le document annexé.

L'exercice 1995 devrait marquer en quelque sorte la transition entre le régime financier actuel des Transports publics genevois et le régime futur, puisqu'il sera également le premier exercice de la période quadriennale 1995-1998 sur laquelle portera le contrat de prestations qui sera désormais conclu entre l'Etat et l'entreprise des Transports publics genevois et soumis à l'approbation du Grand Conseil.

Ce contrat donnera à l'autorité politique un instrument pour définir des objectifs sur une période réaliste et en contrôler les effets, et à l'entreprise la sécurité de disposer sur la durée des moyens qui lui seront accordés et l'autonomie nécessaire pour en maximiser l'efficacité dans le cadre du service public qu'elle remplit. Parallèlement, cette nouvelle manière de faire pourrait permettre à l'entreprise d'optimiser la récupération de l'impôt préalable en matière de TVA. Ce nouveau régime implique des modifications de la constitution genevoise et de la loi sur les TPG sur lesquelles le Grand Conseil sera appelé prochainement à se prononcer et qui pourront entrer en vigueur au cours du premier semestre 1995.

Nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à approuver le présent projet de loi.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission des transports. 

PL 7181
6. a) Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le code de procédure pénale. (Motivation des arrêts de la Cour d'assises et de la Cour correctionnelle) (E 3 5). ( )PL7181
M 817-A
b) Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Christine Sayegh, Claire Torracinta-Pache, Monique Vali, Françoise Saudan, Anne Chevalley, Michel Jacquet, Bénédict Fontanet, Bernard Lusti et Nicolas Brunschwig concernant l'institution du jury. ( -) M817
Mémorial 1992 : Annoncée, 4971. Développée, 5124. Motion, 5155.

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

Le code de procédure pénale, du 29 septembre 1977, est modifié comme suit:

Art. 200, al. 2 (nouveau)

2 Les réquisitions du procureur général contiennent:

a) l'identité de l'accusé;

b) la description des faits constitutifs des infractions reprochées à l'accusé;

c) les dispositions légales réprimant ces faits.

Art. 210, al. 1 (nouvelle teneur)

Contenu de l'ordonnance de renvoi

1 L'ordonnance de renvoi doit indiquer dans son dispositif la description des faits constitutifs des infractions reprochées à l'accusé, avec leurs caractéristiques légales, ainsi que les dispositions légales justifiant le renvoi.

Art. 249 (nouvelle teneur)

Tirage au sort des jurés

1 Au moins 21 jours avant l'ouverture d'une session, le président tire au sort, en audience publique, les noms de 35 jurés pris sur la liste des jurés choisis par le Grand Conseil.

2 Il communique au procureur général les noms des jurés désignés par le tirage au sort.

Art. 256 (nouvelle teneur)

Dépôt des listesde témoins

1 Les listes des témoins que les parties désirent faire entendre doivent être déposées au greffe de la cour dans les 15 jours de la notification de l'ordonnance de renvoi par la Chambre d'accusation, en autant d'exemplaires qu'il y a de parties.

2 Le président cite les témoins par huissier, par un agent de la force publique ou par voie postale.

Art. 258 (nouvelle teneur)

Tirage au sort des jurés

1 Au moins 21 jours avant l'ouverture d'une session, le président tire au sort, en audience publique, les noms de 70 jurés pris sur la liste des jurés choisis par le Grand Conseil.

2 Pour l'élaboration de la liste des jurés appelés à siéger, il procède selon les règles des articles 249, alinéa 2, à 253.

Art. 296, al. 3 (nouvelle teneur)

3 Le président ne prononce la clôture des débats qu'après avoir demandé à l'accusé s'il a quelque chose à ajouter.

Art. 297 à 302 (abrogés)

Art. 303 (nouvelle teneur)

Remise du dossier au jury

Le président remet la procédure écrite au chef du jury et fait retirer l'accusé de la salle des débats.

Art. 304 (nouvelle teneur)

Entrée en délibération

1 Le jury se retire immédiatement pour délibérer.

2 Le président et, sur demande de ce dernier, le greffier assistent à cette délibération; ils n'y participent que pour renseigner le jury, sans formuler d'appréciation sur la culpabilité.

Art. 305, al. 1 (nouvelle teneur)

Mode de délibération et vote

1 Le jury décide successivement, par vote, de la culpabilité et des circonstances s'y rapportant pour chaque fait constitutif d'infraction, contenu dans l'ordonnance de renvoi ou évoqué à l'audience.

Art. 306 à 308 (abrogés)

Art. 313 (nouvelle teneur)

Signature et lecture du verdict

1 Le président communique aux parties en séance publique le verdict du jury sur les faits indiqués dans l'ordonnance de renvoi ou évoqués à l'audience conformément à l'article 283. Ces faits peuvent recevoir une autre qualification juridique que celle prévue par l'ordonnance de renvoi pour autant que cela n'aggrave pas la situation de l'accusé. Le président expose les considérants essentiels.

2 Le greffier prend note du verdict du jury.

Art. 318, al. 1 et 4 (nouvelle teneur)

Délibération sur l'application de la peine

1 La cour et le jury se retirent pour délibérer. Le greffier assiste à cette délibération si la cour le lui demande.

4 La cour et le jury statuent sur les peines accessoires, mesures de sûreté et autres mesures.

Art. 319 à 323 (abrogés)

Art. 325 (abrogé)

Art. 326 (nouvelle teneur)

Prononcé de l'arrêt

1 En présence de l'accusé, le président, en se référant aux articles de loi sur lesquels l'arrêt est fondé, prononce celui-ci en audience publique.

2 Il expose sommairement les circonstances qui ont déterminé la quotité de la peine, le prononcé de toute mesure, l'octroi ou le refus du sursis.

3 Si le condamné est mis au bénéfice du sursis, le président l'avertit des conséquences qu'entraînerait pour lui une nouvelle condamnation ou l'inobservation des conditions mises à l'octroi du sursis.

Art. 327 (nouvelle teneur)

Forme et contenu de l'arrêt

1 L'arrêt est rendu en la forme écrite. Il contient:

a) les infractions retenues par l'accusation et les conclusions des parties;

b) les motifs en fait et en droit du verdict du jury et de la décision de la cour et du jury relative à la peine ou au prononcé d'une mesure;

c) l'indication des voies de recours, y compris le recours en grâce auprès du Grand Conseil.

2 Dans les limites de l'article 69 du code pénal, la cour et le jury déduisent la détention préventive de la peine prononcée et déterminent la durée de la peine qui reste à subir.

3 La cour ordonne que les biens enlevés ou saisis soient restitués à leur propriétaire lorsque l'arrêt est devenu définitif.

4 Lorsque des actes authentiques ont été déclarés faux, en tout ou en partie, la cour ordonne qu'ils soient rétablis, rayés ou réformés. Elle ordonne également que les pièces de comparaison soient sur-le-champ renvoyées d'où elles ont été tirées ou qu'elles soient remises aux personnes qui en ont fait la communication.

5 La cour statue sur les dommages-intérêts réclamés par la partie civile, s'il y a condamnation ou constatation de l'irresponsabilité, après que les parties ont fait valoir leurs moyens et que le procureur général a été entendu. La cour peut, si elle le juge convenable, renvoyer l'examen de la demande à une audience ultérieure pour prendre connaissance des pièces, recevoir les observations des parties et entendre le procureur général. Il est procédé alors conformément aux règles de la procédure civile.

6 La cour, dans son arrêt, statue sur les frais et les dépens, ainsi que sur le sort des biens saisis en garantie du paiement des frais qui ne sont ni confisqués, ni dévolus à l'Etat. La saisie peut être levée nonobstant condamnation, si l'équité l'exige, notamment pour tenir compte de la situation des personnes lésées.

Art. 328 (abrogé)

Art. 329 (nouvelle teneur)

Procès-verbal,communication à l'autorité fédérale et publication

1 Le greffier rédige le procès-verbal de l'audience pour constater que les formalités prescrites ont été observées.

2 Le procès-verbal est signé par le président et le greffier.

3 L'arrêt est notifié aux parties par le greffier au plus tard 15 jours après l'audience. En cas de jugement par défaut, l'avis de jugement mentionne le délai de l'opposition, la forme et la juridiction compétente.

4 Le greffier communique à l'autorité fédérale compétente toute décision prise en application du droit fédéral lorsque cette communication est obligatoire.

5 Un extrait de tout arrêté définitif comportant confiscation d'objets de valeur dont la destruction n'est pas ordonnée est publiée dans la Feuille d'avis officielle.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Introduction

Les présentes modifications de la loi, élaborées en collaboration avec le Pouvoir judiciaire, ont pour but de permettre à la Cour d'assises et à la Cour correctionnelle de rendre des arrêts qui soient conformes à la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de motivation. Elles répondent à la motion 817 renvoyée au Conseil d'Etat à l'issue du vote relatif à la dernière modification de l'article 308 du code de procédure pénale sur la forme des réponses du jury. Cette motion invitait le Conseil d'Etat à étudier de quelle manière il serait possible de réformer l'institution du jury de façon à ce qu'elle soit conforme aux exigences de motivation du Tribunal fédéral et à présenter, le cas échéant, un projet de loi à cet effet (Mémorial du 25 septembre 1992, p. 5155).

Dans un arrêt du 12 juin 1992, le Tribunal fédéral a relevé en particulier:

«Ces considérations ont amené le jury depuis quelques années à ajouter de brèves motivations dans la mesure jugée nécessaire après la réponse par oui ou par non. Il en résulte souvent une impression de morcellement artificiel de la décision et il n'est pas rare qu'une explication nécessaire ne se trouve pas à l'endroit où on l'attendait mais qu'elle soit plutôt formulée à l'occasion d'une question ou encore dans le cadre de la motivation de la peine.

Il semblerait plus simple et plus logique que les arrêts de la Cour d'assises comme toute autre décision judiciaire exposent d'une part les faits retenus et d'autre part le raisonnement en droit en indiquant à chacun de ces stades les motifs qui dictent les choix sur les questions délicates ou contestées.»

Les juges de la Cour de justice qui président les Cours correctionnelles et les Cours d'assises partagent le point de vue du Tribunal fédéral. Au surplus, ils soulignent que, dans tous les cas où la cause présente une certaine complexité, il est difficile de rendre sitôt après la délibération du jury un arrêt correctement motivé en fait et en droit. Un délai minimum doit être concédé au président pour motiver les décisions du jury ainsi que l'arrêt final prononçant une peine ou ordonnant une mesure.

Le système proposé ne s'écarte que très peu du système actuel sur le fond. Par contre, il s'en écarte considérablement quant à la forme. En effet, tout le système des questions ou des questions subsidiaires posées au jury disparaît.

Ces propositions reposent sur l'idée que la thèse de l'accusation est contenue dans l'ordonnance de renvoi de l'accusé devant la Cour correctionnelle ou devant la Cour d'assises et que le jury se prononce sur les infractions qui y sont décrites. C'est l'arrêt rédigé et motivé qui constituera la réponse du jury aux questions soulevées par les parties pendant les débats.

Il y a lieu de souligner que ce système n'a rien de révolutionnaire dès lors qu'il est appliqué dans les autres cantons suisses, il est vrai souvent par des juridictions siégeant sans le concours du jury. Toutefois, la réglementation proposée est adaptée à l'institution du jury, ce dernier gardant toutes ses prérogatives; elle constitue en fait une contribution à la survie de cette institution, menacée par les contraintes que la loi actuelle fait peser sur elle en matière de motivation.

** *

Il vous est en outre proposé de faciliter la convocation et l'organisation des audiences de la Cour d'assises et de la Cour correctionnelle, au travers de modifications apportées aux articles relatifs au tirage au sort des jurés (249 et 258), et au dépôt des listes de témoins (256).

Commentaire article par article

Il s'agit d'une précision, la loi actuelle étant muette sur le contenu des réquisitions.

Cet alinéa est reformulé en termes plus exacts.

Les commentaires se rapportant à ces articles sont regroupés ci-après, à la fin de l'exposé des motifs.

La référence à l'article 301 est supprimée, vu l'abrogation de ce dernier (cf. ci-dessous).

Le système des questions et des réponses par «oui» ou «non» du jury, le cas échéant assorties d'une motivation succincte (art. 308), source des difficultés rencontrées actuellement en matière de motivation des verdicts, disparaît.

Désormais, c'est l'arrêt rédigé et motivé (cf. ci-dessous, ad art. 327, nouvelle teneur) qui constitue la réponse du jury à la thèse de l'accusation contenue dans l'ordonnance de renvoi (art. 210) et aux questions soulevées par les parties dans le cadre des débats (art. 283).

Il n'est plus fait référence aux questions.

Al. 1: il n'est plus fait référence aux questions.

Al. 2: cette disposition est à mettre en parallèle avec l'article 318, alinéa 1 nouvelle teneur. Le président, qui a la tâche de rédiger la motivation des verdicts et des décisions relatives à la peine ou au prononcé d'une mesure (art. 327 nouvelle teneur) peut, s'il l'estime souhaitable, recourir à la collaboration du greffier. C'est pourquoi la loi lui permet de demander au greffier d'être présent lors des délibérations sur le verdict et sur la peine, au cours desquelles la motivation de ces décisions est exprimée.

Dans la pratique, le président ne fera usage de cette faculté que pour les causes d'une certaine importance ou complexité, afin d'éviter d'immobiliser inutilement un greffier juriste pouvant être affecté à d'autres tâches.

Par souci d'économie, le Pouvoir judiciaire et le Conseil d'Etat ont en effet renoncé à prévoir la présence systématique du greffier lors des délibérations, ce qui aurait impliqué l'engagement d'un greffier juriste supplémentaire par la Cour de justice. Le président de la Cour de justice est néanmoins d'avis que, dans la situation actuelle et prévisible du volume de travail des tribunaux, la collaboration nécessaire du greffier, plus particulièrement dans les affaires complexes, nécessitera, à vues humaines, de prévoir un demi-poste supplémentaire de juriste au sein de cette juridiction.

A noter que la rédaction de projets d'arrêts par des greffiers juristes n'est pas une nouveauté, mais existe depuis de nombreuses années tant à Genève que dans les autres cantons et au Tribunal fédéral. L'engagement de ces collaborateurs a notamment permis de ne pas augmenter le nombre des juges nonobstant l'accroissement de celui des causes.

La référence aux questions est supprimée. Les faits sur lesquels le jury prononce son verdict sont ceux indiqués dans l'ordonnance de renvoi ou évoqués à l'audience, conformément à l'article 283 (cf. ci-dessous, ad art. 313, al.1 nouvelle teneur).

L'abrogation de ces dispositions, relatives aux réponses aux questions, découle de celle des articles 297 à 302, relatifs aux questions elles-mêmes.

Al. 1: la communication du verdict et de ses considérants essentiels est faite par le président et non plus par le chef du jury. Le verdict se rapporte aux faits retenus dans l'ordonnance de renvoi ou évoqués au cours des débats, comme c'est le cas avec le système actuel des questions (art. 297 à 300). La possibilité de retenir une qualification juridique autre que celle prévue par l'ordonnance de renvoi si cette qualification n'aggrave pas la situation de l'accusé existe déjà actuellement (art. 283, al. 2 et 300).

Al. 2: sans commentaire.

Al. 1: cf. ci-dessus, ad art. 304, al. 2 nouvelle teneur.

Al. 4: les termes «à l'exception de celles qui sont de la compétence de la Cour» sont supprimés, afin de permettre au jury de statuer avec le président sur toutes les mesures, fondées sur un texte légal, sans exception. Actuellement, au nombre des mesures de la compétence exclusive de la Cour on trouve, par exemple, celles visées aux articles 316 (confiscation) et 319 (traitement, internement ou hospitalisation en cas de responsabilité restreinte). Il n'y a en effet pas de raison de tenir les jurés à l'écart de telles décisions et il arrive déjà en fait que le président les consulte à ce sujet même si, formellement, il est seul à statuer.

Les mesures évoquées par cette disposition sont prévues par le code pénal (art. 11, in fine). La seule utilité de cet article est de conférer à la Cour seule le pouvoir de les ordonner. Vu la modification apportée à l'article 318, alinéa 4, l'article 319 peut être purement et simplement abrogé.

Le contenu de ces dispositions est repris à l'article 327, alinéas 2 à 6.

Al. 1: sans changement.

Al. 2: la référence à la motivation proprement dite de l'arrêt disparaît, cette dernière étant désormais réglée par l'article 327, alinéa 1, nouvelle teneur.

Al. 3: il s'agit de la reprise de l'article 328.

L'alinéa 3 actuel disparaît, vu l'article 327, alinéa 1, nouvelle teneur. L'alinéa 4 fait de même, car il est inutile vu l'article 104 de la loi sur l'organisation judiciaire. Les alinéas 5 et 6 sont remplacés par l'article 329, alinéa 3 nouvelle teneur.

Al. 1, lettres a) et b): un arrêt contenant une motivation en bonne et due forme tant du verdict du jury que de la peine ou des mesures prononcées remplace un arrêt contenant une motivation succincte, voire inexistante, du verdict (art. 308) et sommaire de la peine. Le risque, inhérent au système actuel, d'annulation de l'arrêt par la Cour de cassation ou le Tribunal fédéral pour défaut de motivation disparaît en même temps que le paradoxe qui veut qu'en droit genevois les décisions judiciaires les plus graves pour l'individu, puisqu'elles touchent à sa liberté., soient les moins motivées. Rappelons en effet, à titre de comparaison, que les jugements du Tribunal de police infligeant une amende ou une peine d'arrêts doivent, eux, être motivés en fait et en droit (art. 229, al. 1) et peuvent de surcroît être librement revus en fait et en droit par la Cour de justice (art. 239), alors que le pouvoir de cognition de la Cour de cassation est beaucoup plus restreint (art. 340).

Al. 1, lettre c): il s'agit de la reprise de l'article 327, reformulé. Cependant, le condamné est désormais informé des voies de recours par la notification de l'arrêt qui interviendra au plus tard dans les 15 jours après l'audience (art. 329, al. 3 nouvelle teneur), alors qu'actuellement cette indication est donnée lors de l'audience, ce qui fait immédiatement courir les délais pour la déclaration du pourvoi en cassation.

Al. 2 à 6: il s'agit de la reprise des articles 320 à 323 et 325.

Le texte de cette disposition figure désormais à l'article 326, alinéa 3.

Al.1 et 2: sans changement.

Al. 3: 15 jours est un délai approprié pour la rédaction de l'arrêt. Pour le surplus, cet alinéa reprend le texte de l'article 326, alinéa 6 en cas de défaut de l'accusé.

Al. 4 et 5: il s'agit de la reprise des alinéas 3 et 4 actuels.

** *

Le nombre des jurés tirés au sort pour les sessions correctionnelles (25, conformément à l'article 249) et de la Cour d'assises (35, conformément à l'article 258) s'avère dans la pratique insuffisant. En effet, les jurés s'excusent très fréquemment pour des raisons diverses et variées et le président est de ce fait contraint d'en compléter la liste au dernier moment, ce qui provoque des perturbations dans l'organisation des audiences. Pour y remédier, il vous est proposé de porter à 35 et 70 le nombre des jurés tirés au sort pour les sessions correctionnelles, respectivement criminelles.

Actuellement, les parties peuvent déposer des listes de témoins jusqu'à 3 jours avant le début de la session correctionnelle ou criminelle. Dans les faits, une certaine pratique semble s'être instaurée selon laquelle les listes sont déposées 3 jours avant l'ouverture de l'audience.

Une telle manière de faire n'est plus possible. Le greffe de la Cour correctionnelle et de la Cour d'assises reçoit très fréquemment des listes de plusieurs dizaines de témoins, dont certains sont domiciliés à l'étranger et devraient être convoqués par voie diplomatique, 3 ou 4 jours avant l'ouverture des débats.

Outre que cela provoque un gros travail en pleine session, il se révèle le plus souvent que ce travail est inutile car les témoins ne sont évidemment pas atteints en raison de la brièveté des délais. Au surplus, le système contraint le président de la Cour à faire le planning de ses audiences sans avoir connaissance du nombre de témoins qui devront être entendus. Cela provoque souvent des problèmes d'horaire très difficiles à maîtriser.

Pour éviter que de telles situations se présentent à l'avenir, il convient d'exiger des parties qu'elles déposent la liste des témoins qu'elles souhaitent faire entendre à l'audience de jugement, 15 jours au plus tard après que leur a été notifiée l'ordonnance de renvoi de la Chambre d'accusation. A ce stade, il ne fait aucun doute que l'accusé sait exactement de quoi il devra répondre devant la juridiction de jugement. Il établira alors sa liste de témoins et la communiquera à la Cour. Cela permettra à cette dernière de mieux planifier les audiences.

Au cas où un témoin essentiel serait découvert après ce délai, rien n'empêcherait la Cour d'ordonner son audition en vertu de son pouvoir discrétionnaire.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à approuver le projet de loi qui vous est soumis.

Préconsultation

M. Bernard Lescaze (R). Il est évident que le groupe radical est favorable au renvoi en commission de ce projet de loi modifiant le code de procédure pénale. Toutefois, il me paraît important de dire que cette mesure, qui est conforme notamment à la jurisprudence du Tribunal fédéral et qui nous semble bonne en soi, n'est pas exclusive - ou ne devrait pas l'être - d'une réflexion de la commission sur le rôle du jury, de façon à ne pas être pris au dépourvu le jour où il faudrait le supprimer. Cela dit, je tiens à souligner que la grande majorité de mon groupe est favorable au maintien du jury en Cour d'assises et, dans certains cas, en Cour correctionnelle.

A l'heure actuelle, une partie importante de la justice pénale a tendance à être administrée par ordonnances. Cette situation, probablement adaptée à l'évolution de notre société, n'est pas forcément une bonne situation, et nous pensons qu'il faut rester très prudents face à cette évolution. A notre avis, le jury a encore son rôle à jouer.

En revanche, il serait judicieux d'examiner de manière plus approfondie en commission l'avenir du jury, peut-être dans son mode de recrutement, qui devrait être laissé moins au hasard qu'il ne l'est actuellement. Peut-être aussi devrait-on limiter la compétence d'appréciation du jury à la culpabilité et non plus à la fixation de la peine, même si celle-ci se fait désormais en accord avec la Cour. Nous souhaiterions que la commission examine également ces propositions. Cette évolution, malheureusement souhaitée par de nombreux pénalistes, tend à la suppression du jury. Pourtant, je le rappelle, le jury est une des grandes conquêtes de la justice de la fin du XVIIIème siècle et du XIXème siècle, et je pense qu'il faudrait le maintenir.

M. Christian Ferrazino (AdG). J'ai été très heureux d'entendre M. Lescaze nous indiquer que le groupe radical était très attaché à l'institution du jury. Notre groupe l'est aussi, pour les mêmes raisons qu'il a évoquées.

Mais je rappelle que le projet qui nous est soumis ce soir vise avant tout à donner la compétence au président de la Cour de motiver le verdict du jury en lieu et place, précisément, du jury lui-même et à supprimer le système des questions posées par le jury. Dès lors, il est légitime de se demander si ce projet ne vise pas, en réalité, à vider de sa substance l'institution que représente aujourd'hui le système du jury.

Il faut savoir que, déjà actuellement, dans le système que nous connaissons, le rôle du président de la Cour est énorme puisqu'il participe aux délibérations du jury. Avec ce projet de loi, tel qu'il nous est proposé, le rôle du président serait encore plus important, puisque le président de la Cour pourrait, avec l'aide du greffier - puisque le projet de loi permet, sur demande du président, au greffier d'assister également aux délibérations - motiver la décision du jury. Nous savons que l'institution du jury populaire ne rencontre pas forcément un grand enthousiasme au Palais de justice, mais il s'agit - M. Lescaze l'a rappelé tout à l'heure - d'une conquête importante des droits de la justice dont nous pouvons être fiers aujourd'hui et qui permet à des juges laïques de rendre sereinement la justice.

Dans le projet de loi qui nous est soumis, le président de la Cour pourra substituer sa propre motivation à la motivation qui aura été retenue par les membres du jury, puisque le président de la Cour aura un délai de quinze jours pour rendre sa décision par écrit. C'est dire qu'il n'y a absolument aucune garantie que la motivation retenue par les membres du jury soit celle qui, en définitive, sera donnée par le président du jury. Alors, accepter ce projet de loi tel qu'il est libellé reviendrait à réduire considérablement le rôle du jury et risquerait probablement - M. Lescaze l'a laissé entendre tout à l'heure - d'amener le pouvoir judiciaire à proposer, dans un second temps, tout simplement la suppression du système du jury. En effet, finalement, l'application de cette loi, si elle devait entrer en vigueur, ne laisserait plus un grand rôle au jury, puisqu'elle lui enlèverait une de ses compétences importantes.

Cela étant, nous n'ignorons pas les décisions du Tribunal fédéral concernant l'exigence de motivations des jugements rendus par la Cour correctionnelle et par la Cour d'assises. Pour cette raison, et bien que nous ne soyons pas d'accord avec la solution proposée par ce projet de loi, notre groupe ne s'opposera pas au renvoi en commission, afin d'étudier une solution plus adéquate.

M. Michel Halpérin (L). Il est bien trop tôt, aujourd'hui, pour prendre une position définitive sur le projet de loi qui nous est soumis. Nous devons donc en débattre en commission, parce qu'il pose, en somme, en face à face, deux problèmes assez fondamentaux auxquels, les uns et les autres, nous sommes vraisemblablement attachés de manière égale.

D'une part, il y a l'institution du jury qui est, en quelque sorte, pour le pouvoir judiciaire, l'incarnation de la souveraineté populaire dans son expression, puisque finalement le jury est la forme supérieure de la justice. Un jury, par définition, tranche, en intime conviction dans notre système, de la culpabilité ou de l'innocence d'un accusé.

D'autre part, nous avons, à l'opposé de ce principe de la souveraineté populaire, un deuxième principe, né du développement des droits de l'homme dans nos consciences et sous nos latitudes, je veux parler de la motivation des décisions judiciaires. Il ne s'agit pas ici d'un caprice de juriste, mais bien d'une nécessité réputée fondamentale. L'homme ou la femme que l'on condamne a le droit de savoir pourquoi ! Or, dans le système du jury qui tranche par sa propre compétence suprême, en âme et en conscience et sans explication, celui que l'on condamne n'en connaît pas les raisons. Mais, depuis plusieurs années, le Tribunal fédéral casse régulièrement des arrêts de la Cour d'assises ou de la Cour correctionnelle qui ne sont pas suffisamment motivés.

Nous devons donc essayer de faire cohabiter cette exigence de justice et cette exigence de souveraineté, et ce n'est pas le moindre des exercices que nous aurons à faire au cours de la législature. Y parviendrons-nous ? C'est la question que la commission judiciaire s'efforcera de résoudre !

M. Laurent Moutinot (S). Le principe de toute souveraineté réside dans le peuple. Cela est déjà dans la déclaration universelle de 1789, et c'est certainement la raison pour laquelle le jury prend une place à laquelle nous attachons une extrême importance au sein du pouvoir judiciaire.

Le jury populaire représente le contrepoids du peuple à ce que j'appellerai un pouvoir peut-être trop technocratique. C'est, paraît-il, en tout cas en théorie, la garantie du bon sens et de l'indépendance. A l'heure des médias, vous me permettrez d'en douter ! C'est en tout cas la garantie d'une proximité entre la justice et les citoyens, ce qui est primordial. Par conséquent, le projet de loi qui nous est soumis doit être compris comme visant à protéger le jury et à lui permettre d'exercer son rôle, tout en respectant les exigences posées aujourd'hui par le Tribunal fédéral.

Si nous n'améliorons pas le fonctionnement de la justice avec jury, nous courons le risque de la mort de ce dernier, parce que le Tribunal fédéral, en imposant que les décisions de justice soient motivées, oblige à ce qu'elles soient bien motivées. Et nous courons le risque, si nous ne répondons pas à cette injonction, que l'institution même du jury soit finalement remise en cause. Il est vrai qu'il n'est plus admissible, de nos jours, qu'un individu soit envoyé en prison pour quinze ou dix-huit ans sur la seule base du mot «oui», après dix ou quinze jours de débats et des heures de plaidoiries et de réquisitoires : il a le droit d'en connaître les raisons !

Le problème est de savoir comment il doit connaître le motif de la décision. De ce point de vue, je ne suis pas absolument certain que la solution proposée par ce projet de loi soit la seule possible. Il faut en trouver une qui respecte cette nécessité de motiver et qui, tout à la fois, garantisse la pérennité du jury. Cette pérennité est d'autant plus difficile à garantir que - vous le savez - c'est une exception dans le système juridique des cantons suisses. Il importe donc de le conserver.

Nous sommes bien entendu pour le renvoi de ce projet de loi en commission afin de l'améliorer, de le discuter et - je l'espère - de trouver une solution qui permette de maintenir le système du jury.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Les remarques qui viennent d'être formulées montrent, à satisfaction, que la justice n'est pas sur la voie de la simplification.

Pendant longtemps, les jurys devaient répondre par oui ou par non. Puis le Tribunal fédéral a estimé que, le justiciable devant savoir pourquoi il était condamné, on devait motiver ces décisions. Le projet qui nous est soumis va plus loin, puisqu'il propose non seulement que les décisions soient motivées mais encore que le jury se prononce sur l'état de fait et que le président fournisse une première motivation suivie d'un second texte plus complet. Je fais observer que chacun des préopinants pense protéger, à divers titres, l'institution du jury, ce qui nous promet des débats intéressants en commission.

Bien entendu, nous sommes ravis de débattre de ce projet de loi en commission et je vous remercie de bien vouloir l'y renvoyer.

PL 7181

Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.

M 817-A

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

 

I 1914
7. Interpellation de Mme Anita Cuénod sur la situation très précaire du personnel administratif, technique et de service des missions permanentes accréditées auprès de l'ONU et du personnel de service des fonctionnaires internationaux. ( )I1914

Mme Anita Cuénod (AdG). A Genève, derrière les murs de certaines représentations diplomatiques, se déroule, dans l'ombre et le silence, une exploitation impensable et intolérable de travailleurs et de travailleuses.

Des personnes travaillent quinze heures par jour, sept jours sur sept, pour leur seule nourriture et un argent insignifiant, sans couverture sociale. Il s'agit de certains employés des missions diplomatiques et des fonctionnaires internationaux.

Qu'ils s'appellent Pushpa, Anouar, Alfred, Rebecca ou Dencides et viennent du Bangladesh, des Philippines, d'Inde, ils ont en commun d'avoir travaillé ici à Genève dans des conditions de quasi-esclavage, au sens de la définition du BIT. Les critères qui définissent l'esclavage, pour cette institution, sont, je le rappelle :

- d'être sans papier : ils sont parfois en Suisse sans carte de légitimation ou ont leur passeport confisqué, sous prétexte d'être mis en lieu sûr;

- sans salaire : ils gagnent rarement un salaire décent, c'est-à-dire équivalent au contrat type des travailleurs de l'économie domestique de ce canton;

- sans liberté : ils vivent souvent sur leur lieu de travail et, parfois, ils sont même séquestrés;

- sans nourriture suffisante, avec des mauvais traitements, ce qui a été le cas pour plusieurs d'entre eux.

Malgré les directives de la Mission suisse, qui prévoient une affiliation obligatoire de ces employés à l'AVS/AI, et facultative à la LAA, les employeurs omettent trop souvent d'affilier leurs employés à l'une ou l'autre de ces assurances.

Ils seraient encore aujourd'hui quelques centaines en situation précaire, avec des salaires dérisoires, une sécurité sociale inexistante, sans parler de chantages intolérables à l'emploi.

Or, l'employé qui trouve le courage de revendiquer ses droits perd pratiquement automatiquement son emploi et risque d'être expulsé de Suisse.

Mais, puisque la prolongation du délai d'expulsion dépend de l'office cantonal de la population, nous saisissons cette occasion, Monsieur le conseiller d'Etat, pour vous inviter à faire en sorte, dorénavant, que tout employé qui décide de faire valoir ses droits auprès du Tribunal des prud'hommes puisse rester légalement à Genève pendant toute la durée du litige et jusqu'au paiement de sa créance.

Nous devons améliorer le sort réservé à ces hommes et ces femmes, sort que nous ne saurions tolérer s'il s'agissait de nos ressortissants. Nous devons agir au niveau qui nous incombe, puisque c'est la Convention de Vienne qui régit le statut de ces employés, ainsi que les directives de la Mission suisse. Nous devons contribuer à endiguer ces abus scandaleux et faire cesser une situation très délicate pour Genève, capitale mondiale des droits de l'homme et siège du Bureau international du travail.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je remercie Mme Cuénod d'avoir eu l'amabilité de me fournir le texte de son interpellation. Cela me permet d'y répondre presque complètement.

Je vous rappelle que la Suisse est liée par les engagements internationaux qu'elle a pris. Elle se doit donc de faire respecter les conventions de Vienne de 1961 portant sur les relations diplomatiques, ainsi que les accords de siège qu'elle a conclus avec toutes les organisations internationales installées sur son territoire à Genève. Ces instruments prévoient, en particulier, l'octroi de privilèges et immunités aux agents diplomatiques et aux fonctionnaires internationaux.

Ainsi, si la Convention de Vienne stipule que les agents diplomatiques, qui ont à leur service des personnes salariées, sont tenus de respecter les obligations découlant de la législation locale, elle permet également aux bénéficiaires de privilèges et immunités diplomatiques d'opposer l'immunité de juridiction à toute convocation judiciaire qui leur serait notifiée, indépendamment du bien-fondé de la demande.

A ce propos, la Confédération vient de confirmer à M. le Procureur général qu'elle considérait que la notification d'un acte judiciaire faite directement par l'autorité concernée à une personne bénéficiant des privilèges et immunités diplomatiques devait se faire par la voie diplomatique.

Nous nous trouvons, dès lors, dans une situation où l'application du droit national se heurte à des normes de droit international qui priment. Je rappelle que certains syndicats s'intéressent de près à ce problème et que leurs interventions suscitent des réactions très vives de la communauté diplomatique de sorte que les missions étrangères demandent aux autorités suisses et genevoises de respecter la Convention de Vienne. S'il appartient certainement à l'Etat hôte de veiller à la dignité des travailleurs qui oeuvrent sur son sol au service des missions permanentes, de leurs membres, ou des fonctionnaires internationaux, il doit également éviter que des méthodes dommageables, allant à l'encontre de ses engagements internationaux du respect de son ordre public et de ses intérêts, soient utilisées.

Madame la députée, je vous informe que le Conseil d'Etat a décidé, d'entente avec la Confédération, de mettre sur pied, à court terme, une nouvelle structure sur laquelle je reviendrai ultérieurement.

J'ajoute aux considérations qui précèdent les deux remarques suivantes :

Les délais jusqu'à la première comparution devant les prud'hommes sont actuellement beaucoup trop longs; ils atteignent maintenant presque une année. De plus, cette première comparution ne règle souvent que le seul problème de l'immunité de juridiction. Il n'est donc pas possible de prolonger les délais de départ de personnes démunies d'autorisation pour une période aussi longue. Par contre, l'autorité permettra le retour en Suisse des plaignants, pour qu'ils puissent comparaître personnellement devant les juridictions concernées. La structure nouvelle dont je viens de parler, Madame la députée, permettrait, précisément, de remédier à un état de fait qui, je le concède, est regrettable.

Cette interpellation est close. 

P 1044-A
8. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour un numerus clausus des taxis. ( -)P1044
Rapport de Mme Michèle Wavre (R), commission des pétitions

Le Grand Conseil a reçu, le 15 septembre 1994, la pétition suivante, munie de 229 signatures:

PÉTITION

concernant l'accroissement du nombre des autorisations-taxis

Faisant suite à l'acceptation par le peuple de l'initiative dite «Pour des taxis égaux», force nous est de constater que le nombre d'autorisations-taxis ne cesse de croître.

Afin de ne pas tuer notre profession, les soussignés vous demandent de légiférer afin d'instaurer un «numerus clausus», sans quoi, à court terme, le métier mourra de trop de combattants.

N.B.: 229 signatures

Walter Bauer

Avenue de Crozet 58

1219 Châtelaine

Sous la présidence de M. B. Lescaze, la commission des pétitions a entendu MM. Bauer (pétitionnaire) et Rosenbusch. Tous deux sont chauffeurs de taxi à leur compte. Ils exposent que, depuis l'acceptation de l'initiative sur les taxis (IN26) le 27 septembre 1992, la situation des petits patrons de la branche s'est considérablement détériorée. Ils aimeraient donc que le Grand Conseil y remédie. Précisons qu'ils se sont toujours opposés à l'initiative, prévoyant les désastreuses conséquences qu'on voit se produire aujourd'hui. Mais avant d'entrer dans le vif du sujet, peut-être vaut-il la peine d'ouvrir une parenthèse historique

A la fin des années 80 a été lancée une initiative, l'IN 26, dite « Pour des taxis égaux ». Elle avait pour but de libéraliser la profession, dans laquelle régnait une certaine inégalité de traitement, car deux catégories de chauffeurs y étaient recensées. A côté des taxis « officiels », dûment patentés, donc disposant d'un droit de stationnement, il y avait des taxis « sauvages », appelés aussi Mau Mau, qui n'avaient pas droit à une place de stationnement et qui en exigeaient une. Cette initiative, on se le rappelle, a eu un succès extraordinaire. Et, si, dans un premier temps, on pouvait être séduit par l'idée de déréglementation et d'égalité pour tous, il a bien fallu se rendre à certains arguments de poids: le fait que la profession de taxi ait été réglementée, et le nombre de chauffeurs concessionnés limité, avait pour conséquence un « trafic » des concessions (en fait, des droits de stationnement) accordées, qui s'achetaient et se vendaient, comme des pas-de-porte et à des prix quelque- fois excessifs. L'Etat a d'ailleurs dû intervenir en limitant à 90.000 francs le prix de vente d'une concession, qu'il accordait, lui, gratuitement, avec une obligation d'exploiter de 15 ans et d'assurer une permanence 24 heures sur 24. Au cas où l'initiative aurait été acceptée, certains chauffeurs « officiels » qui avaient payé leur concession parfois fort cher, se seraient retrouvés avec quelque chose qui n'avait plus aucune valeur marchande. Beaucoup s'étaient lourdement endettés. D'autres, qui comptaient sur le produit de la vente de leur « patente » pour étoffer leur retraite, seraient restés les mains vides. La faillite ou une maigre pension allaient être le lot de gens qui avaient fondé beaucoup d'espoirs dans un « trafic » autorisé par la situation juridique d'alors.

Tout ceci avait été très bien vu par nos collègues du Grand Conseil à la précédente législature. Pourtant, l'initiative a été massivement acceptée par le peuple genevois. Le contreprojet proposé en alternative a été rejeté.

Le Conseil d'Etat, dans les explications envoyées aux électeurs pour accompagner le texte du contreprojet, combattait une déréglementation trop drastique, car il craignait que les entreprises de taxi ne se trouvent face à une concurrence débridée, contre laquelle elles ne pourraient lutter. Des emplois seraient alors menacés. Il redoutait une explosion du nombre des taxis, un renchérissement des tarifs et une dégradation du service. Les initiants, eux, promettaient une baisse des prix, par le jeu de la concurrence, et une plus grande disponibilité des véhicules, donc un meilleur service.

Aujourd'hui, on constate, au lieu d'une baisse des prix, une hausse, et, au lieu d'une plus grande disponibilité des taxis, même la nuit, même en fin de semaine, même en cas d'affluence, il semble que cela soit pire qu'avant, car les chauffeurs, qui sont devenus maîtres de leur emploi du temps, tiennent, on le comprend, à avoir les mêmes horaires que tout le monde. Tous ces inconvénients existent alors que le nombre des véhicules en circulation est passé d'environ 400 à plus de 700.

La déréglementation a fait que, à présent, chacun peut « s'improviser » chauffeur de taxi. A côté du permis de conduire professionnel, qui est naturellement exigé et relève du droit fédéral, les candidats-conducteurs peuvent, en deux mois d'une formation accélérée, apprendre le métier, puis devenir employés d'un grand garage qui leur fournira une voiture. En fonction du kilométrage effectué quotidiennement, ils paient le soir son dû au propriétaire du véhicule. Au bout d'un an, ils peuvent se mettre à leur compte. Chaque mois, actuellement, 30 nouveaux chauffeurs achèvent leur formation et Genève dénombre à présent environ 1200 conducteurs de taxi certifiés. A cause du nombre important de taxis en circulation, les places d'arrêt et d'attente manquent de façon dramatique.

Si tant de personnes sont intéressées à la formation de chauffeur de taxi, c'est, bien sûr, à cause de la montée du chômage. L'Office cantonal de l'emploi, cependant, ne conseille ce parcours de recyclage qu'aux gens qui ont déjà un contrat d'engagement dans un garage.

Discussion

La situation, telle qu'elle est décrite ci-dessus, n'est certainement pas celle qu'avait voulue la majorité des votants en 1992. Elle est largement insatisfaisante, à la fois pour le public et pour les chauffeurs qui sont devenus pléthoriques, trop nombreux à se partager un marché qui n'a pas augmenté, au contraire. Le Conseil d'Etat en est bien conscient, qui l'a écrit à M. Bauer (voir lettre en annexe). Mais tout de même, on ne peut pas, après si peu de temps, aller exactement à l'encontre d'une volonté populaire si clairement exprimée (même si le peuple s'est peut-être déterminé sur un malentendu). Le Conseil d'Etat cherche actuellement des solutions, en collaboration avec la commission consultative des taxis. MM. Bauer et Rosenbusch n'ont pas, quant à eux, de solution miracle à proposer mais préconisent le retour à un « numerus clausus », c'est-à-dire une limitation du nombre des taxis, une application stricte de la loi en ce qui concerne le nombre des places d'arrêtet une plus grande exigence dans le domaine des compétences « géographiques » des candidats-chauffeurs. Ils proposent donc de réintroduire le système des concessions obligatoires, accordées par l'Etat, mais que le bénéficiaire, à la fin de son activité, rende sa patente à l'administration et non la vende.

Cette pétition aura eu le mérite d'attirer l'attention du Grand Conseil sur un problème qui devient véritablement préoccupant. Des réflexions sont menées de plusieurs côtés, des solutions se dessinent. Aussi, la commission des pétitions vous recommande-t-elle, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité moins une abstention, de bien vouloir déposer la pétition 1044 sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement.

ANNEXE

Débat

M. Bernard Clerc (AdG). Le rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la question du numerus clausus des taxis me paraît intéressant dans le sens où c'est un bel exemple de ce que signifie la déréglementation, terme très à la mode. Certes, la situation antérieure n'était pas satisfaisante, notamment en raison de la spéculation sur les patentes mais, actuellement, la situation n'est pas meilleure, puisque - le rapport de la commission le constate - il y a hausse des prix et pléthore de taxis, sans amélioration du service.

Dans les théories classiques des partisans de la déréglementation, l'augmentation de la concurrence devrait conduire à une baisse des prix et à un meilleur service. Résultat dans la pratique, actuellement, il n'en est rien ! Pourquoi ? parce qu'en fait laisser faire le marché lorsque celui-ci est dominé par une ou deux grosses entreprises conduit à la séparation en deux du marché : d'un côté, les grandes entreprises qui, de par leur volume, contrôlent de fait le secteur et, de l'autre, les petits indépendants qui sont toujours plus nombreux à se partager une part de marché plus restreinte, et qui ne peuvent donc baisser les prix sans risquer de disparaître.

Certes, le peuple a voté, mais cela ne doit pas nous empêcher de dire quelles sont les conséquences de ce choix qui s'avère aujourd'hui insatisfaisant. Dans ce domaine, comme dans d'autres, apparaît finalement la nécessité du rôle régulateur de l'Etat.

C'est pour cela qu'à mon avis le problème posé par cette pétition mérite plus que le dépôt sur le bureau du Grand Conseil. Je propose donc de la renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je formulerai quelques remarques et je vous donnerai quelques informations à propos de cette pétition.

Est-il juste de prétendre que le nombre des exploitants de taxi ne cesse de croître ? Avant la votation de 1992, on dénombrait quatre cent nonante-sept exploitants de taxi pour six cent quatre actuellement, soit une augmentation de 22%. Il y avait six cent quatre-vingt-deux véhicules et il y en a maintenant sept cent septante-six, soit une augmentation de 14%. C'est donc bel et bien une hausse, mais elle n'est pas aussi importante que d'aucuns veulent le laisser entendre.

Ma deuxième remarque a trait au service à la clientèle. Depuis environ une année, les examens pour les chauffeurs de taxi ont été modifiés. C'est ainsi que l'examen pratique porte également sur les connaissances géographiques, mais on a admis l'utilisation d'un plan pendant l'examen. Par contre, de manière générale, on estime que l'examen est actuellement plus difficile qu'à l'époque, en particulier parce que l'on a rajouté aux examens pratiques la connaissance de l'utilisation des voies bus et les règles spéciales afférentes à celles-ci. Mais si le service à la clientèle, selon d'aucuns, a baissé, c'est essentiellement parce que nombre de chômeurs se sont vu proposer des places de chauffeur de taxi, notamment par l'assurance-invalidité. Ces personnes n'étant pas des professionnels, elles n'ont pas la même vocation de leur métier que leurs confrères.

Monsieur Clerc, il reste une autre remarque qui me paraît évidente. Il n'est pas possible de faire maintenant machine arrière après l'initiative qui a rencontré, comme vous le savez, un très vif succès dans notre canton. Par conséquent, le département étudie, en étroite collaboration avec la commission consultative des taxis, qui représente toutes les associations professionnelles et toutes les centrales, différentes propositions susceptibles d'améliorer la situation sans recourir au numerus clausus.

La profession de chauffeur de taxi est en perpétuelle ébullition. J'ai déjà déployé une énergie farouche pour tenter de les amener à la table des négociations et leur faire accepter le principe d'un tarif unique. Et nous sommes repartis pour un tour, parce que Berne n'est toujours pas capable de nous dire comment et à qui doit s'appliquer la TVA ! La profession est de nouveau sur le point d'exploser, parce qu'il y a deux poids deux mesures pour la profession suivant que l'on est chauffeur dans un grand garage ou à titre indépendant.

Ma dernière remarque, Monsieur Clerc, vous donne partiellement raison. Est-ce le rôle de l'Etat de Genève, et singulièrement de mon département, d'organiser une profession ? Je ne le pense pas, mais je constate avec vous - et c'est en cela que je vous donne partiellement raison - que ce problème risque de s'aggraver si l'autorité politique ne s'en mêle pas. C'est pour cela, d'une certaine manière, que je vous remercie d'être intervenu comme vous l'avez fait.

La présidente. M. Bernard Clerc ayant formulé une demande de renvoi au Conseil d'Etat, nous considérons celle-ci comme un amendement aux conclusions des travaux de la commission. Nous allons donc voter sur la proposition de M. Clerc, soit le renvoi de la pétition 1044 au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat est rejetée.

Mises aux voix, les conclusions de la commission (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

IU 49
9. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Luc Gilly concernant les interventions de la police. ( ) IU49
Mémorial 1994 : Développée, 5252.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Avec une régularité touchante, M. Gilly nous rappelle que, dans ce canton, il y a de gentils manifestants et de vilains représentants des forces de l'ordre. Votre première remarque, Monsieur le député, relevait le fait que vos occupations sont non violentes.

Je vous signale, Monsieur le député, qu'il n'est stipulé nulle part qu'une occupation est a priori non violente, a fortiori si les occupants oublient de demander les autorisations, comme c'est devenu la règle ! Alors, dans ces conditions, dites-moi comment je peux deviner que vous êtes non violent ! Monsieur le député, vous étiez au Palais Wilson avec quelques manifestants enchaînés à des piliers; vous étiez au sommet de la cathédrale où des planches avaient été clouées sur le plancher du clocher, de sorte qu'il a été nécessaire d'ouvrir un chemin. J'ajoute qu'à la cathédrale vous lanciez des feux de Bengale sur une toiture ancienne et que le danger d'incendie était réel. Je fais remarquer également que vous avez fait sonner les cloches au milieu de la nuit, ce qui n'est pas spécialement sécurisant pour les passants, et je vous rappelle que vous avez diffusé des slogans depuis le clocher de Saint-Pierre.

Monsieur Gilly, ce n'était pas l'aimable «sit in» dont vous parlez, mais c'était bel et bien une manifestation. La manifestation de Contratom, qui avait été annoncée comme non violente, a tout de même coûté la bagatelle de 10 000 F de dégâts devant le consulat de France !

Votre deuxième remarque, Monsieur le député, fait état de ce que vous n'avez opposé aucune résistance. Ayant été prié poliment de quitter les lieux, vous n'avez pourtant pas obtempéré. Dans votre première casquette, vous aviez effectivement la tenue de «Greenpeace». Je me plais à relever que «Greenpeace» est une association qui n'a effectivement jamais causé de dommage à la propriété, du moins à ma connaissance. Il n'empêche que, ce jour-là, M. le président de la Confédération était en visite à Genève et que, par conséquent, il fallait prendre les mesures de protection ordinaires, d'où la présence de quarante policiers au Palais Wilson. Quant à la cathédrale, je vous laisse juger si la notion de «aucune résistance» peut être admise ! J'ajoute, à l'intention de ceux qui ne l'auraient pas saisi en lisant la presse, que vous aviez hissé au sommet de la cathédrale un invalide, ce qui est une manière un peu cavalière de considérer les choses !

Enfin, vous avez évoqué la disproportion entre les forces de police et la manifestation. Quarante personnes étaient détachées pour la protection de M. Stich et autant pour la cathédrale, pour tenter de mettre fin à cette manifestation. Je précise encore qu'hier soir cent policiers étaient mobilisés pour la manifestation à laquelle vous participiez également, je crois.

Vous m'avez demandé, Monsieur Gilly, si je n'avais pas le sentiment que certaines démonstrations de la police étaient hors de proportion avec les dangers encourus. Je le répète, nous pouvons mesurer l'étendue d'un problème lorsque vous demandez une autorisation. Si vous ne le faites pas, eh bien, évidemment, nous devons aller sur place avec certains moyens pour voir de quoi il retourne !

Pour terminer, la police ne fait jamais preuve d'ostentation. Ce n'est surtout pas elle qui ameute la presse, et je vous demande poliment si vous pouvez en dire autant ! (Applaudissements sur les bancs de la droite.)

(M. Gilly manifeste son désir de répliquer.)

La présidente. Je regrette, Monsieur Gilly, vous avez choisi la voie de l'interpellation urgente, il n'y a pas de duplique possible.

Cette interpellation urgente est close. 

IU 50
10. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Jean-Pierre Lyon concernant la privatisation des contractuels. ( ) IU50
Mémorial 1994 : Développée, 5253.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je répondrai très brièvement, car j'ai déjà répondu à une interpellation de ce genre.

Monsieur le député, la Ville de Genève a voté un texte exprimant son désir de s'approprier des revenus qui reviennent à l'Etat en fonction de dispositions légales. De son côté, l'Etat de Genève étudie le transfert des contractuels à la Fondation des parkings, qui est une fondation de droit public. Bien entendu, les apports en matière de stationnement de cette fondation reviennent à l'Etat, sous déduction des frais d'obtention de ces revenus, c'est l'objet d'une convention à venir. La discussion actuellement en cours - M. Ferrazino l'a évoquée et je l'en remercie - a pour but de régler, avec la Fondation des parkings, les conditions sous lesquelles les contractuels deviennent les employés de cette fondation. Sitôt cet accord intervenu, la commission judiciaire sera informée de son contenu. Elle sera également informée du contenu du contrat à passer entre la Fondation des parkings et l'Etat de Genève. Elle devra, en outre, voter une modification législative en fonction de la modification d'appartenance des contractuels, d'un employeur qui était l'Etat à un employeur nouveau qui est la Fondation des parkings.

Monsieur le député, ma conclusion est donc la suivante. Il n'est pas question pour l'Etat de renoncer à l'apport représenté par le stationnement au profit de qui que ce soit. La modification envisagée tient à l'appartenance, en tant qu'employés, des contractuels et je précise, pour être très clair, qu'il n'est pas question d'imaginer que l'affectation de ces revenus puisse être modifiée, puisqu'il s'agit d'une disposition légale.

Voilà, Monsieur le député, ce que je pouvais vous répondre.

Cette interpellation urgente est close. 

La présidente. M. Jean-Philippe Maitre devant participer demain à une séance de travail importante au GATT, il nous demande de bien vouloir traiter les points liés à son département encore ce soir. (L'assemblée ne manifeste aucune opposition.) Puisqu'il n'y a pas d'opposition, il en sera fait ainsi !

P 1041-A
11. Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la pétition : Avenir de Tavaro. ( -)P1041
Rapport de majorité de M. Pierre Kunz (R), commission de l'économie
Rapport de minorité de M. Gilles Godinat (AG), commission de l'économie

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

C'est au cours de ses séances des 5 et 12 septembre 1994 que la commission de l'économie, sous la présidence successivement deMme M. Spoerri et de M. Cl. Blanc, ont traité la pétition 1041. Lors de la première des deux séances consacrées à ce sujet, la commission a auditionné les pétitionnaires, à savoir la commission des ateliers et celle des employés de la société Tavaro.

Audition

Au cours de leur audition, les pétitionnaires ont souligné qu'à la suite des 74 suppressions d'emplois, annoncées par Tavaro au printemps dernier, ils ont tenu d'une part à faire connaître aux autorités politiques du canton leur inquiétude quant à l'avenir de l'entreprise. Ils ont par ailleurs précisé qu'ils attendent de l'Etat que celui-ci se penche sur la situation de Tavaro et qu'il participe, avec l'aide des écoles professionnelles, du CERN et du personnel de l'entreprise à la mise sur pied et à la réalisation d'un plan de reconversion du secteur militaire en des activités civiles et qu'il contribue, notamment par des mesures de reformation du personnel, au redéploiement de la fabrication et de la distribution des produits de consommation de Tavaro.

L'inquiétude et la motivation des pétitionnaires ont été résumées ainsi par l'un deux: «Un accord aurait été signé avec les Japonais, accord au sujet duquel les employés n'ont reçu aucune information. Quant aux contrats militaires, ils arrivent au bout».

Discussion

M. M. J.-Cl. Manghardt, secrétaire général du département de l'économie publique, a été invité par la commission à rappeler la politique suivie par le Conseil d'Etat en matière de soutien aux entreprises. Cette politique se résume ainsi:

 les efforts déployés concernent aussi bien les entreprises nouvelles que celles, déjà établies, rencontrant des difficultés;

 les aides apportées forment une large palette, allant de l'intendance (recherche de locaux, obtention de permis de travail, arrangements fiscaux, etc.) aux interventions les plus lourdes admissibles aux yeux de la loi (participation à l'élaboration de plan de sauvetage, recherche d'investisseurs, soutien à des reprises d'activités par les employés d'entreprises en difficulté).

Quant au chef du département, M. J.-Ph. Maitre, il a rappelé qu'il n'est pas dans les attributions de l'Etat de gérer des entreprises à la place de leurs propriétaires ou de leur servir de banquier. Il ne lui est pas davantage possible d'agir sur l'environnement économique, notamment sur le phénomène de tertiarisation des activités du monde occidental en général, de Genève en particulier. Dans une économie de marché, il revient aux agents économiques d'affronter ces problèmes.

Tous les commissaires se sont pourtant déclarés sensibles à l'inquiétude du personnel de l'entreprise Tavaro, inquiétude fondée. En effet, depuis des décennies la situation de la société, pour autant qu'on puisse en juger sur la base des informations grapillées par les médias, n'a cessé de se détériorer. Mais il est apparu clairement à la majorité de ces commissaires qu'il n'appartient pas au Grand Conseil de se prononcer sur les moyens à mettre en oeuvre par le conseil d'administration et la direction de Tavaro afin de permettre à cette entreprise de faire face à sa situation difficile. Contre l'avis de ceux qui le demandaient, la majorité de la commission a donc conclu qu'il n'était pas souhaitable que dans cette affaire soient auditionnés encore la direction de la société et les syndicats de travailleurs concernés. C'est en effet au sein de Tavaro que les uns et les autres doivent nouer ou renouer un dialogue ouvert et constructif.

Il n'en reste pas moins que la quasi-totalité des commissaires ont tenu à souligner que la démarche des pétitionnaires est révélatrice d'un déficit de dialogue interne regrettable au sein d'une société aussi prestigieuse que Tavaro. Ils se sont étonnés qu'en ces temps de précarité croissante et à une époque où l'avenir industriel de ce pays, de Genève en particulier, dépend tant de l'engagement enthousiaste de toutes les forces humaines des entreprises, où par conséquent la plus large ouverture et la plus grande transparence sont de mise, il subsiste tellement d'opacité dans la politique de communication de la société.

Qu'on permette au rapporteur de citer ici ce que notre concitoyenM. Charles Tavel, l'un des meilleurs spécialistes mondiaux de l'économie d'entreprise, a écrit sur la question: «Communiquer c'est, bien sûr, informer: du haut vers le bas et du bas vers le haut. C'est informer sur la vie et sur la marche de l'entreprise, c'est en donner l'image la plus complète possible. Ce n'est pas tout. Car communiquer, c'est faire passer le flux: entre chefs et collaborateurs, entre membres du personnel, entre cadres. Si l'on veut créer une atmosphère où chacun apporte à l'entreprise le meilleur de soi-même, cela se fait dans un mouvement collectif. Son lien sera ce flux de communication. C'est plus un état d'esprit qu'une technique».

Conclusion

La commission ayant en résumé:

 relevé que d'une manière générale les services du département de l'économie publique apportent l'aide administrative la plus efficace possible aux entreprises constituant le tissu économique genevois, notamment lorsque celles-ci rencontrent des difficultés financières;

 considéré l'attitude non interventionniste, la neutralité que doit conserver l'Etat par rapport au fonctionnement de notre système économique;

 constaté que les demandes formulées par les pétitionnaires sortaient des compétences du Grand Conseil, notamment parce qu'elles concernent la gestion d'une entrepirse privée, et que celui-ci ne pouvait donc entrer en matière;

 rappelé qu'il revient aux partenaires sociaux de régler en commun les problèmes relationnels et d'information pouvant surgir au sein des entreprises,

elle a décidé, par 7 voix contre 4, de mettre un terme à ses travaux sur la pétition 1041 et de vous inviter, Mesdames et Messieurs les députés, à déposer cette dernière sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

PÉTITION

sur l'avenir de Tavaro

Au nom du personnel de Tavaro SA, suite aux 74 sup-pressions d'emploi, nous vous exprimons notre inquiétude face à l'avenir de notre entreprise. Ces licenciements signifient-ils que Tavaro repart sur des bases saines et qu'il y a de réelles perspectives ou, au contraire, que ce n'est que le début d'un démantèlement de l'entreprise?

Selon nos sources, deux commandes du Département militaire fédéral dans le secteur Technique/Défense, qui représentent 80% de ce secteur, arriveront à leur terme ces prochains mois.

Dans le secteur électroménager, l'accord signé avec le géant japonais Janome nous fait craindre la disparition de la recherche(R & D) et de la fabrication de machines à coudre Elna et des presses à repasser (Elnapress).

Nous craignons que seule la diffusion de la marque Elna apposée sur des produits du sud-est asiatique subsiste.

Nous demandons que cette situation soit examinée et que, si nos craintes sont fondées, l'Etat participe, avec l'aide des écoles professionnelles, du CERN et du personnel de l'entreprise, à un plan de reconversion du secteur militaire au secteur civil. Qu'il participe également au redéploiement des produits de consommation durables (BCD).

La disparition de Tavaro, ce n'est pas seulement une perte de plus de 300 emplois à Genève. C'est aussi des places d'apprentissage, des développements techniques intéressants, un réseau de sous-traitants et un savoir-faire.

Tavaro, c'est un capital humain, c'est un capital machine, c'est un site industriel.

Tavaro est un des derniers grands de la fabrication mécanique. Nous pensons que l'Etat a un rôle à jouer pour le maintien de l'industrie dans ce canton.

N.B.: 11 signatures

Commission des ateliers

et Commission des employés Tavaro

1-5, avenue de Châtelaine

1211 Genève 13

RAPPORT DE LA MINORITÉ

1. La succession de crises qui a frappé l'industrie genevoise a abouti à une situation de désindustrialisation avancée. Ce ne sont pas les rapports réguliers sur les progrès accomplis dans un secteur ou un autre qui contredisent cette tendance de fond.

En novembre 1983, le rapport de la Conférence économique sur l'avenir du secteur secondaire industriel à Genève (rapport du Groupe pilote) affirmait: «L'histoire économique enseigne qu'il est pratiquement très difficile de créer de toutes pièces des industries mécaniques ou électromécaniques innovatrices, par conséquent porteuses d'avenir, là où la tradition n'existe pas ou là où elle s'est perdue. Il faut donc retenir le capital humain (ouvriers, techniciens et ingénieurs), dont il faut craindre la dispersion si Genève perd son potentiel industriel... Il y a nécessité de maintenir et de préserver l'industrie pour ne pas perdre une accumulation de savoir-faire et de relations commerciales, dont la reconstitution, si besoin était, demanderait des décennies et serait d'un coût prohibitif à maints égards». Nous partageons cette analyse. L'avenir incertain de Tavaro, de la SIP, de Gardy, ne peut qu'accroître les préoccupations des salarié/es et de la population genevoise.

Une contraction importante ou une disparition de ces entreprises serait une étape cruciale dans un processus qui est allé déjà beaucoup trop loin. Lorsque nous parlons de désindustrialisation, nous l'entendons dans un sens précis. Les entreprises créatrices de produits de haut niveau technologique, capables de les produire et de les commercialiser en quantité optimum, disparaissent ou leur nombre se réduit qualitativement. Dès lors, deux processus se développent:

1) les possibles interactions innovatrices entre les entreprises s'affaiblissent ou disparaissent (cela est d'autant plus vrai quand les centres de décision sont géographiquement éloignés);

2) l'effet d'entraînement sur les entreprises sous-traitantes disparaît lui aussi non seulement en terme de commandes, mais aussi en terme d'exigences et d'élévation technologique de la sous-traitance.

Tout le réseau et le milieu innovateur est ainsi mis en question.

Les services liés à l'industrie, en amont et en aval, forment une part importante du secteur tertiaire dans les pays industriels développés. C'est ce qui fait la force d'une région comme celle du «triangle d'or» en Suisse alémanique. Cette réalité a pu être masquée pendant des années, car un segment du tertiaire se développait à Genève avec un fort degré d'indépendance face au tissu industriel. Or aujourd'hui, comme l'indique leno 97 de Aspects statistiques de l'OCSTAT, les rationalisations sont à l'ordre du jour dans le secteur bancaire comme dans le secteur des assurances, pour en améliorer la rentabilité. Cela passe par une stagnation ou un recul des emplois. La crise structurelle du tertiaire a commencé. Ce dernier ne jouera plus, au même niveau, le rôle de substitut à la disparition des emplois dans l'industrie comme il l'a fait dans les trois décennies précédentes.

Contrairement à certains mythes diffusés par les médias, il ne peut y avoir de dichotomie, de séparation, entre d'un côté la recherche et le développement et de l'autre la production. Il est nécessaire qu'un lien existe entre la R&D, le savoir-faire et la production. L'expérience allemande ou japonaise est là pour le prouver. Au même titre, nous pourrions invoquer l'expérience d'un grand nombre d'entreprises suisses alémaniques.

Enfin tous les spécialistes de l'industrie savent pertinemment qu'il y a un seuil critique dans le domaine de l'industrie mécanique, électromécanique ou micromécanique. On ne peut remplacer un tissu d'entreprises ayant plus de 100 salarié/es par une addition de micro-entreprises ayant moins de15 personnes. Même si cela permet à la presse sur papier glacé de rendre hommage à l'inventivité helvétique. De nombreuses petites entreprises, technologiquement avancées, auraient besoin pour développer leur production, leurs projets, etc., d'un environnement d'entreprises plus grandes. Il n'y aura donc pas de substitution à la disparition des entreprises de tailles moyennes, par des pépinières de micro-entreprises. Tout au plus, ces dernières nourriront des projets novateurs qui seront accaparés par des acteurs industriels du triangle d'or, de pays européens ou japonais.

En conclusion, nous pouvons reprendre le rapport précité de 1983 qui affirmait: «l'appauvrissement du secteur industriel» a pour effet de «déséquilibrer gravement l'économie genevoise à court et à moyen terme» et pourrait «déboucher sur un marasme économique». Plus exactement sur une balkanisation de l'emploi à Genève, dans le sens d'une palette d'emplois, allant d'emplois très précarisés, mal payés, en passant par des emplois qui ne connaissent plus de croissance salariale, ni de progression professionnelles, pour se terminer vers un sommet fort bien rémunérés et stables. Il y a un phénomène nouveau par rapport aux années 70 et 80, une déstabilisation conjointe de l'emploi dans le privé et dans le public.

2. Toute politique industrielle apte à répondre à la crise présente doit partir de l'établissement de deux registres, de deux cadastres.

Le premier porte sur le milieu économique, c'est-à-dire sur l'espace géographique pertinent dans lequel peut s'exercer une action concertée et où existe une certaine culture industrielle et technique homogène. L'identification dans cet espace des entreprises, des institutions de recherche, des organismes de formation, des interventions liés aux pouvoirs publics ou multipartites (tels que FONGIT/AGIT) et des relations déjà existantes, qui sont en mutation permanente doit être remise à jour. A cela s'ajoute un véritable cadastre des éléments matériels (infrastructures) et immatériels (savoir-faire). Enfin, un bilan doit être établi de la capacité des différents acteurs dans cet espace d'avoir des liens, des interactions et des logiques d'apprentissage, nécessaires à toute modification et à toute innovation. Sur ce plan, la faiblesse des résultats concrets sont criants pour Genève et la région lémanique, ainsi que pour la région frontalière, malgré les multiples conférences et rapports depuis dix ans. Monsieur le conseiller d'Etat Jean-Philippe Maitre est peut-être satisfait, pour l'image publique, mais un fossé existe entre cette image et la réalité.

Le deuxième porte sur les réseaux d'innovation, c'est-à-dire sur l'ensemble des échanges - au-delà des échanges de biens et services - établis par les entreprises au plan de l'échange d'informations, de savoir-faire qui sont des sources indispensables pour développer des produits et assurer une élévation de la valeur ajoutée. Ces réseaux d'innovation impliquent une multiplicité d'acteurs, incluant non seulement les entreprises, les bureaux d'ingénieurs, mais les organismes de formation et de recherche (Ecole d'ingénieurs de Genève, Ecole de mécanique, CEPIA, CERN, etc.). Sur ce plan aussi, il n'y a pas de résultats concrets à la hauteur des promesses, et des bilans détaillés n'existent pas. Ceci devient un obstacle à la définition d'une stratégie de réindustrialisation et de redéploiement industriel à Genève, dans la région lémanique et frontalière. Enfin, un cadastre mis à jour du milieu économique et des réseaux d'innovation permet de saisir l'interaction existant entre les deux, ce qui est déterminant pour définir une politique industrielle, une politique de l'emploi et une politique de formation. Au moment où chacun a sur les lèvres le mot formation, comment peut-on dessiner les lignes de force des formations futures nécessaires lorsque la maîtrise de ces deux champs (milieu économique et réseau d'innovation) est aussi faible?

Sans une détermination de l'Etat sur ce plan, la crise de désindustrialisation connaîtra ses derniers soubresauts.

En conclusion, nous exigeons que soient sérieusement envisagées des études de qualité, régulièrement remises à jour, afin d'éclairer les deux domaines essentiels que nous avons définis. L'office de promotion de l'industrie pourrait peut-être consacrer plus de force et de moyens à de tel travaux, sans que cela mette en péril la distribution de permis B à des investisseurs potentiels à Genève.

3. Une occasion nous est offerte par ce qui se passe chez Tavaro et grâce aux initiatives prises par les salarié/es de l'entreprise en jonction avec la FTMH de poser de manière concrète les questions mentionnées brièvement auparavant. La commission des ateliers et la commission des employés ont rencontré la commission de l'économie du Grand Conseil, le 5 septembre 1994.

Il ne nous appartient pas ici d'écrire dans le détail les difficultés que traverse Tavaro - difficultés qui se retrouvent aussi à la SIP. Toutefois, la rencontre entre les membres de la commission de l'économie du Grand Conseil et les salarié/es de Tavaro a indiqué combien la situation réelle de l'industrie genevoise était quasi inconnue pour une part importante de la Commission. Cela devrait attirer l'attention de l'ensemble du Grand Conseil et particulièrement de sa majorité; à moins de vouloir déléguer à l'exécutif l'ensemble des décisions en ce domaine.

Les résultats obtenus jusqu'à aujourd'hui devraient au contraire inciter les membres du législatif, qui ne considèrent pas qu'automatiquement le secteur privé a réponse à tout, à établir une jonction plus étroite avec les salarié/es et leurs organisations à divers échelons directement intéressés à l'avenir de l'industrie et des postes de travail, aussi en amont et en aval.

4. La fragilité actuelle de Tavaro est directement liée à deux éléments.

Le premier peut être illustré par l'éditorial de Tavaro Flash de mars 1994: «Notre priorité absolue, c'est d'ici au 30 avril prochain, la sortie en série et avec zéro défaut de l'Elna 4000. Ce n'est qu'ainsi que nous serons crédibles sur les marchés qui attendent avec impatience notre machine. Nous demandons à toutes et à tous un effort particulier pour tenir ce délai impératif et nous savons que nous pouvons compter sur vous.» C'est la direction qui s'exprime.

La commission des employés, dans le même numéro, manifestait déjà ses doutes quant à la possibilité d'atteindre cette priorité dite absolue. Aussi bien la commission des employés que la commission des ateliers avaient raison. La machine à coudre Elna 4000 ne sera pas produite en série avant février 1995.

C'est un grave échec industriel, de développement qui reflète le dysfonctionnement non seulement au sein de l'entreprise, mais aussi la faiblesse du réseau d'innovation. En effet, une série de problèmes de mécanique et, surtout, d'utilisation de polymères techniques pour la fabrication novatrice du châssis auraient pu être résolus dans des délais de temps plus bref si une fluidité du réseau innovateur existait. On ne peut résoudre, dans des délais brefs, imposés par cette concurrence internationale sans cesse courtisée par la droite, des questions techniques sans que soit organisé un réseau d'innovation et de tests d'innovation. Tout autre vue relève d'une vision idéaliste de ce qu'est la réalité même d'une économie de marché aujourd'hui. Au fond, les défenseurs, les plus acharnés de cette économie au plan politique en connaissent fort mal les arcanes, puisqu'ils ne cessent de proclamer que le rôle de l'Etat doit être subsidiaire.

Le deuxième a trait à la production militaire de Tavaro. Cette dernière, qui a joué un rôle important dans le financement de l'entreprise, touche à sa fin. Son futur n'est pas assuré. Et son présent est en panne. En effet la production de la fusée 975 a dû être interrompue le 8 septembre dernier suit a un problème technique. Le DMF exige avec l'appui de l'Ecole polytechnique fédérale et du GDA (Groupement de l'armement) des garanties avant toute reprise de la production et donc toute reprise des payements. Les conséquences sont graves, car cette production assurait un revenu financier régulier. Un report de production va peser sur les finances et donc les projets de développement des produits civils, dont le principal (Elna 4000) est déjà en forte difficulté, comme nous l'avons mentionné.

Dans ce cadre ressort la faiblesse de gestion de l'entreprise au plan de la modernisation de son appareil de production. Toutefois, le potentiel de Tavaro reste important. Son savoir-faire dans divers domaines (département mécanique, usinage et traitement de surface, injection plastique, expérience de robotisation, compétences dans le domaine de l'électricité et de l'électronique) est élevé. De plus, il a l'avantage d'être concentré dans une entreprise.

Les faiblesses d'investissement ne sont donc pas un obstacle majeur, pour autant que les conditions de financement soient réunies. Ici, le rôle garant de l'Etat peut être important au même titre que la politique de la Banque cantonale.

Quant à la formation permanente du personnel, y compris du personnel qui a été mis au chômage partiel à 100% en juin 1994, elle est un objectif auquel il est possible de répondre si sont mobilisées les ressources existant à Genève. C'est une question de choix politique et économique.

5. Dans ce contexte, un facteur nouveau intervient: l'accord entre Tavaro et la firme japonaise JANOME. Tavaro est à la croisée des chemins. Soit un effort réel est effectué au niveau de la Recherche et Développement non seulement pour la sortie de la machine à coudre Elna 4000, mais aussi pour le développement de nouveaux produits. Soit le département R&D reste stagnant. Alors s'affirmera la tendance à ce que la division ELNA de l'entreprise devienne à la longue un service commercial pour la diffusion en Europe de produits japonais sous le nom d'Elna (préparation de matériel publicitaire, de modes d'emploi, d'instructions aux techniciens, etc.). C'est le risque évident de l'accord avec le géant qu'est Janome. Si cette hypothèse se réalise, c'est le savoir-faire de Tavaro qui va dépérir avec les répercussions qui en découleront pour l'ensemble du tissu industriel à Genève. La désindustrialisation aura gagné, Genève aura perdu.

En dehors de l'Elna 4000, il y a des développements dans les presses à repasser. Mais ils restent incertains. L'instabilité financière de l'entreprise se répercute déjà au plan de la production. Des goulots d'étranglement dans l'approvisionnement existent, en partie parce que les fournisseurs tardent à livrer car les payements prennent du retard.

Il ne s'agit pas ici de faire du catastrophisme. Mais les descriptions et hypothèses donnant un futur à Tavaro grâce à l'accord avec la firme Janome nous semblent fallacieuses. Si la ligne directrice de la gestion de l'entreprise reste ce qu'elle est, Tavaro pourrait au mieux devenir un sous-traitant de Janome, voire quelques produits que Tavaro a développés être délocalisés pour leurs productions dans un futur pas trop éloigné. Ceci d'autant plus qu'une fois mis au point, un produit comme la machine à coudre Elna 4000 réunit les conditions pour être sorti en série dans le sud-est asiatique. Le nom Elna compte pour Janome, pour vendre ses produits, pour acquérir une renommée de marque. Il n'est pas sûr qu'un gain inverse proportionnel existe pour Tavaro, si les choses sont laissées en l'état.

En conclusion, il nous apparaît absolument nécessaire qu'une transparence plus grande soit faite sur les projets à moyen terme de la direction de Tavaro. Il ne s'agit pas d'une affaire privée au sens étroit du terme. L'avenir de Tavaro, l'avenir de ses emplois, l'avenir de son savoir-faire accumulé sont du domaine public. Sauf à considérer que le destin industriel et social de Genève relève de critères proches du secret bancaire.

C'est la raison pour laquelle nous demandons:

1. qu'en collaboration avec la direction de Tavaro et avec les organismes représentant l'ensemble des salarié/es et des cadres (commission des employés, commission des ateliers, FTMH, etc.) un audit soit fait sur la situation de Tavaro. Cet audit ne peut être détaché de celui mené par la société Emesco (Zoug) sur la SIP. D'ailleurs, ce dernier audit devrait être porté à la connaissance de la commission de l'économie du Grand Conseil. L'un des deux propriétaires d'Emesco , M. Kurt Rudolph, est ou était le principal actionnaire de Ski Authier SA par le biais d'Emeski. Il ne s'agit pas de mettre en doute les qualités d'industriel de M. Rudolph, mais la conduite de l'entreprise Authier dont il était l'actionnaire principal laisse songeur;

2. qu'en jonction avec les organismes existants (FONGIT, AGIT) et en relation avec les instituts de recherche et formation, une étude soit établie sur les possibilités de diversifier Tavaro à partir de son potentiel de savoir-faire, au delà des problèmes spécifiques liés à la reconversion (voir annexes fournies par les pétitionnaires). Tavaro pourrait jouer un rôle important dans des opérations de cotraitance pour des produits développés dans la zone économique de Genève, mais qui trouvent difficilement le cadre de production adéquat;

3. que les demandes de formation et recyclage professionnels - sur le lieu de travail même - émises par les salarié/es de Tavaro soient soutenues par les autorités. Il y a là un des rares exemples d'implication directe des salarié/es dans la bataille pour la survie et le développement d'une entreprise;

4. que les autorités donnent toutes les informations sur les tractations concernant l'utilisation de terrains industriels appartenant à Tavaro pour la construction de bâtiments publics. L'Etat ne peut devenir acquéreur d'une partie du patrimoine foncier de Tavaro sans qu'il devienne aussi un acteur et non un spectateur face aux problèmes et à l'avenir de l'entreprise Tavaro.

Toute ces raisons nous amènent Mesdames et Messieurs les députés à vous proposer de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, à notre avis seule mesure à la hauteur des enjeux soulevés par les pétitionnaires.

(Annexes à disposition au secrétariat du Grand Conseil.)

Débat

M. Gilles Godinat (AdG), rapporteur. En préambule, je vous informe que la délégation des pétitionnaires a donné une annexe qui est disponible au secrétariat du Grand Conseil. Elle va dans le sens de cette pétition.

Cette pétition pose les questions vitales pour l'avenir de Tavaro. Nous avons la responsabilité dans ce Grand Conseil de prendre cette pétition au sérieux, comme la majorité de la commission l'a exprimé, par ailleurs. Il faudrait distinguer deux niveaux : une réflexion générale sur le contexte économique de l'industrie genevoise et une réflexion particulière sur la situation de Tavaro, avec les propositions et les pistes que les représentants du personnel ont abordées en commission.

Sans vouloir entrer dans les détails et pour situer le contexte à grands traits, dans la phase de récession prolongée que nous vivons avec quelques lueurs de reprise de l'activité économique, qui sont encore bien sombres dans le domaine de l'industrie, on observe une globalisation des activités économiques au plan mondial avec la mondialisation des marchés, la délocalisation des activités vers les régions à bas salaires, y compris la délocalisation de la recherche de développement. Sur ce point, je voudrais citer un article récent du 11 novembre dans lequel l'Office fédéral de la statistique a relevé qu'en six ans, de 1986 à 1992, les dépenses en recherche et en développement réalisées par l'industrie suisse à l'étranger ont crû quatre fois plus qu'en Suisse. Ce phénomène est encore plus prononcé dans l'industrie suisse des machines. La proportion réalisée à l'étranger s'élevait à 40% en 1989 et elle a atteint 53% en 1992.

Nous assistons également à une domination du capital financier sur le capital industriel avec les incertitudes liées aux bulles spéculatives sur les marchés boursiers, une tertiarisation de fond accentuée également dans la production de biens et des services, une interdépendance accrue dans ces différents secteurs, une concentration des entreprises et des services, une obsolescence accélérée des produits, une fragilisation des PME, sans parler des conséquences sociales, à savoir un chômage accru, conjoncturel et structurel, un accroissement de la pauvreté et une fragilisation des emplois.

L'industrie genevoise a connu un recul important ce dernier quart de siècle, passant de 28% de l'ensemble des emplois en 1965 à 18% en 1994, avec des vagues successives de licenciements, de restructurations, voire de disparitions d'entreprises au profit du tertiaire. La première partie de notre rapport insiste sur les problèmes généraux liés à la diminution du secteur secondaire industriel à Genève.

J'ai souligné dans le rapport l'existence du groupe pilote qui avait été mis sur pied dans la conférence économique sur l'avenir industriel en 1983 et qui disait - je trouve important de le citer :

«L'histoire économique enseigne qu'il est pratiquement très difficile de créer de toutes pièces des industries mécaniques ou électromécaniques innovatrices, par conséquent porteuses d'avenir, là où la tradition n'existe pas ou là où elle s'est perdue. Il faut donc retenir le capital humain, ouvriers, techniciens et ingénieurs, dont il faut craindre la dispersion si Genève perd son potentiel industriel...».

Ce phénomène de désindustrialisation est défini plus précisément - je ne vais donc pas y revenir - mais nous pouvons encore relever que l'appauvrissement du secteur industriel a pour effet de déséquilibrer gravement l'économie genevoise à court et moyen terme et pourrait déboucher sur un marasme économique général.

En réponse à cette situation, nous pensons que pour favoriser une politique industrielle active - c'est l'autre élément au niveau des généralités - il est nécessaire d'établir un cadastre sur le milieu économique, comme cela est décrit dans le rapport - et un cadastre des réseaux d'innovation, réseaux qui d'ailleurs se mettent en place en Suisse, plus particulièrement au niveau régional, dans le canton de Vaud en particulier. A Genève, l'existence de la FONGIT et l'existence du Centre d'information et de documentation brevet à l'OPI doivent développer la mise en place de ces réseaux, sur la base des registres cités. Enfin, un bilan doit être établi sur la capacité d'établir des liens, des interactions et des logiques d'apprentissage nécessaires à toute modification et à toute innovation.

En ce qui concerne Tavaro, actuellement situé sur trois sites, qui employait quatre cents personnes à Genève à la veille des licenciements de juin 1994, on évalue à trois cents le nombre de travailleurs restant occupés jusqu'à la fin de l'année. Je ne veux pas revenir en détail sur la crise de Tavaro qui est décrite dans le rapport, mais si vous allez dans un grand magasin de la place, aujourd'hui, vous verrez que les machines Elna exposées sont toutes fabriquées au Japon ou dans l'Est asiatique. L'Elna 4000, le produit «made in Geneva» n'est pas OK. La production militaire est en bout de course. Les Japonais arrivent : «JANOME». Le danger que Tavaro ne devienne qu'un service commercial de JANOME est bien réel, avec la perte du savoir-faire industriel de Tavaro. C'est cette situation qui inquiète les travailleurs à juste titre, car les emplois sont menacés.

Les propositions faites par les pétitionnaires nous paraissent prioritaires :

1) la reconversion du secteur militaire en civil;

2) la diversification vers de nouveaux produits en relation avec la FONGIT, l'école d'ingénieurs, etc.;

3) la formation et le recyclage dans l'entreprise.

A notre avis, ces demandes liées à la participation des travailleurs, à la transparence sur les transactions concernant les terrains industriels et à l'audit sur Tavaro, nous paraissent être les conditions sociales cadres pour sauver les emplois de cette entreprise. Ce sont les raisons pour lesquelles nous estimons que la responsabilité des pouvoirs publics doit être engagée dans cette situation de sauvetage. Par conséquent, cette pétition doit être adressée au Conseil d'Etat par notre Grand Conseil, soucieux de l'avenir industriel de Genève.

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. Monsieur le rapporteur de la minorité, vous partez - semble-t-il - d'un cas particulier, celui de Tavaro et vous l'utilisez pour justifier une bureaucratie, un interventionnisme généralisé de l'Etat dans la vie industrielle de ce canton.

Dans cette démarche, vous faites erreur. Vous tirez de la mauvaise gestion d'une entreprise des conclusions générales et pessimistes. Or, il faut le souligner, à Genève, les exemples d'entreprises industrielles qui ont su se développer et qui rencontrent encore aujourd'hui un grand succès restent nombreux. Cela dit, il faut souligner qu'il est illusoire et contradictoire de s'accrocher au secteur industriel et de réclamer en même temps des salaires élevés, des horaires de travail réduits, des prestations sociales de plus en plus lourdes pour les entreprises.

Pourquoi ? Eh bien, à l'évidence, l'avenir du secteur secondaire est sombre, pour une bonne partie non seulement de Genève mais de l'Occident tout entier, parce qu'il y a dans le monde des pays dont la population est aussi intelligente et plus laborieuse que la nôtre. Ces personnes se contentent, en outre, de salaires bien inférieurs aux nôtres, avec très peu de couverture sociale, la plupart du temps. Alors, ces pays, qu'on le veuille ou non, nous prennent peu à peu notre secteur secondaire en raison de leur compétitivité sur les marchés internationaux. Monsieur Godinat, il faut l'admettre, ou Genève sera tertiaire à terme ou alors nous serons un peu plus pauvres !

M. Armand Lombard (L).

«Tavaro, c'est un capital humain, c'est un capital machine, c'est un site industriel. Tavaro est un des derniers grands de la fabrication mécanique. Nous pensons que l'Etat a un rôle à jouer pour le maintien de l'industrie dans ce canton.».

C'est la conclusion de la pétition, et c'est certainement vrai. Voilà pourquoi nous avons salué en commission les efforts du Conseil d'Etat pour suivre cette situation, pour coordonner les efforts de dynamique et de développement de cette entreprise. Ces efforts ont été très positifs jusqu'à maintenant, nous l'avons appris en commission de la bouche du chef du département de l'économie publique et de celles de ses adjoints. Cette pétition est tout à fait utile pour s'assurer que le nécessaire est fait. Nous vous recommandons donc le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

J'aimerais revenir sur trois points du rapport de M. Godinat qui appelle quelques remarques.

Tout d'abord, je remets en cause votre sagesse de jugement, voire même votre déontologie, puisque vous étalez les détails de l'opération Tavaro contre l'accord de la commission, contre la demande du chef du département de l'économie publique, qui avait souligné qu'en divulguant ces détails en public devant les députés, vous prépariez les bénéfices de Bernina, qui peut ainsi mieux désigner son concurrent romand et ses difficultés.

D'autre part, je mets en doute votre position sur les PME et sur le tissu industriel. Vous prétendez, Monsieur Godinat, que l'«on ne peut remplacer un tissu d'entreprises de cent personnes par une addition de micro-entreprises de moins de quinze personnes». Cela prouve votre totale méconnaissance de la croissance et du développement, docteur ! On ne peut commencer par être grand, dans la vie : il faut d'abord être petit ! L'enfant doit apprendre et acquérir de l'expérience; il doit devenir sage avec l'âge ! Les grands concepts communistes de la Hongrie sont détruits et «inefficients»; son économie ne repart que par de minuscules petites entreprises, mais elle repart avec une formidable dynamique. Lee Wilson, seul dans un garage de Milwaukee, pendant trois ans, a inventé le produit Xerox et une formidable entreprise s'est développée ensuite. On ne crée pas des entreprises déjà grandes, Monsieur Godinat ! Elles commencent petites, avec des projets tels que ceux que l'on peut lire dans la presse, de pépinière d'entreprises, de soutien à de nouvelles entreprises, de formation et d'accompagnement. De cette manière, on crée lentement, mais sûrement !

Enfin, troisième et dernier point. Je ne suis pas du tout d'accord avec votre proposition d'un réseau d'innovations créé pour la Cité, cadastré en double, avec infrastructure et savoir-faire, avec, sans doute, une étude de qualité des différentes innovations, études centralisées, étatisées, de façon à être plus sûr que vraiment l'innovation soit bonne !

Vous n'êtes pas Dieu pour juger ou condamner, Monsieur Godinat ! L'Etat n'est pas un prince omniscient et providentiel qui peut raviver ou solutionner la vie des entreprises. L'entreprise vit par ses acteurs, par son flair, par ses expériences, par sa compétence. On peut l'aider, comme le département de l'économie publique l'a fait pour Tavaro, dans la limite de ses moyens; on peut attirer l'attention des autorités, comme l'ont fait les pétitionnaires à juste titre, mais on serait fou de chercher à la conduire sous notre autorité !

C'est la raison pour laquelle je vous recommande de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Max Schneider (Ve). J'ai accepté de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil par crainte de faire une mauvaise publicité à Tavaro. Je rejoins M. Lombard sur sa réflexion à ce sujet.

Néanmoins, les pétitionnaires étaient animés d'une bonne volonté. Ce sont des employés - M. Kunz l'a souligné dans son rapport - qui demandaient le dialogue avec la direction, qui est aujourd'hui inexistante chez Tavaro. Il n'y a pas un directeur, mais, apparemment, il y en a trois ou quatre. Les employés de Tavaro sont dans le secret le plus absolu. Nous n'aurons pas les moyens, dans ce Grand Conseil, de lutter contre ce secret maintenu par les actionnaires bâlois de Tavaro.

Par contre, la situation actuelle de l'industrie, au niveau de la Suisse romande, et notamment de Genève, n'est plus du tout acceptable. Alors là on ne parle plus de Tavaro, mais de ce qui se passe entre la Suisse romande et la Suisse allemande. Une nouvelle barrière de rösti se construit chaque jour, due à l'inefficacité de notre gouvernement, et le discours de M. Kunz de ce soir ne reflète pas son rapport. C'est ignoble, Monsieur Kunz, de prétendre que ces employés sont trop bien payés ! Vous rigolez, vous avez un bon poste, vous avez un bon salaire, mais sachez, Monsieur Kunz, que certaines personnes, dans cette République, ont de graves problèmes ! Demander à ces personnes de gagner moins, alors que les loyers ne baissent pas et que le coût de la vie est élevé à Genève, me paraît inadmissible !

Il me semble donc qu'il faut réfléchir - comme M. Lombard l'a fait - au moyen de créer et d'innover. Cette barrière de rösti existe bel et bien; la mentalité est très différente entre la Suisse romande et la Suisse allemande : cela se remarque même pour les questions de limitation de vitesse ! Lors d'un séminaire du parti écologiste, où M. Barde, secrétaire du FSP, était présent, M. Pierre Luigi Giovannini nous a déclaré - et il peut le prouver - que la différence du taux de chômage existant entre la Suisse allemande et la Suisse romande tient à l'esprit d'innovation des entreprises suisses allemandes dans le domaine des technologies de l'environnement, ainsi que les investissements consentis dans ce secteur.

Voilà pourquoi je m'adresse à M. Maitre, qui est également conseiller national, pour qu'il agisse en collaboration avec les autres Romands, car la situation actuelle n'est plus du tout acceptable. Tous les textes d'innovations technologiques qui pourraient intéresser les industries romandes sont malheureusement écrits en allemand. Nous avons toujours six mois, voire un an et demi de décalage dans tout ce qui se fait au niveau de la Confédération. L'information destinée aux entreprises romandes exige une traduction de ces textes dans un délai rapide, pour qu'elles puissent également participer aux marchés de la Confédération.

Mais ce n'est pas tout. Un deuxième challenge - c'est pour cela que j'ai accepté de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil - se présente. Nous devrons présenter une motion sur la nécessité d'obtenir des fonds de la Confédération - comme les pays d'Europe l'ont actuellement - dans le but de reconvertir les usines d'armement, qui sont sur le déclin - heureusement - au service d'une nouvelle technologie civile, notamment une technologie de l'environnement. Nous devons donc agir dans ce sens.

M. Bernard Clerc (AdG). Nous voilà devant un exemple très concret de la manière dont une pétition signée par onze personnes met le doigt sur la politique économique menée dans ce canton.

Faut-il rappeler que, de 1975 à 1991, le secteur secondaire à Genève a perdu quatre mille huit cent quarante-neuf emplois, soit une baisse de 9,3% ? En 1975, les emplois du secondaire représentaient encore 25,6% du total des emplois. En 1991, ils ne représentent que 17,9% du total ! Voilà pour le secondaire.

Mais si nous regardons de plus près l'objet de la pétition de ce soir, la situation est encore plus grave pour l'industrie et les arts et métiers. De 1975 à 1991, six mille deux cent vingt-deux emplois ont été perdus, soit une baisse de 18,4% ! Si en 1975 les emplois de l'industrie et des arts et métiers représentaient encore 16,6% du total des emplois pour le canton, en 1991, ce pourcentage est tombé à 10%.

Voilà vingt ans au moins que, dans ce parlement, régulièrement, à chaque disparition de grande entreprise, sur tous les bancs, on se lamente et on compatit, bien sûr, au triste sort des travailleurs licenciés ! Considérer que la tertiarisation à outrance de l'économie genevoise est un phénomène quasi naturel, Monsieur Kunz - excusez-moi de vous le dire - est une malhonnêteté ! C'est un choix économique et politique dont les conséquences se font largement sentir sur l'emploi. En effet, le secteur tertiaire est, par définition, beaucoup plus volatile que le secteur secondaire, vous le savez bien. En fait, la tertiarisation à outrance c'est la fragilisation de l'économie genevoise. C'est le choix qui a été fait de laisser les forces du marché évoluer, de laisser les entreprises du secondaire mourir pour se spécialiser dans la gestion de fortune, le système bancaire, dans les organisations internationales et dans le tourisme. Ne dites pas que c'est un phénomène naturel du marché; c'est un choix économique et politique !

Le chef du département de l'économie publique ferait bien de lire attentivement - s'il ne l'a pas fait - l'excellent rapport de minorité de Gilles Godinat concernant cette pétition et de s'en inspirer pour défendre et développer le secteur industriel de Genève. Monsieur Lombard, laissez-moi vous dire que vous êtes un peu «gonflé» - pardonnez-moi l'expression - pour dire qu'il faut d'abord être petit pour devenir grand, en considérant les chiffres que je vous ai donnés tout à l'heure. Le secteur secondaire de l'industrie et des arts et métiers n'augmente pas, au contraire il diminue comme une peau de chagrin ! Je trouve votre discours pour le moins lénifiant !

Vous dites que l'entreprise vit par ses acteurs. Oui, en effet ! Les travailleurs de Tavaro, qui ont signé cette pétition, vous démontrent qu'ils sont des acteurs responsables, qu'ils ont réfléchi au problème et que la plupart d'entre eux ont été bloqués dans toute une série de travaux à l'intérieur de l'entreprise par une direction - en tout cas pour la plus récente - qui a été incapable de diriger cette entreprise. Celle dernière ne serait pas dans la situation dans laquelle elle se trouve aujourd'hui si les acteurs principaux, sur le terrain, c'est-à-dire les travailleurs, avaient la faculté d'agir. Il faut être clair...

Tavaro n'est malheureusement pas la dernière entreprise dans cette situation, il y a aussi la SIP. Cela demande un changement de politique. Le moins que l'on puisse faire - et je dis bien «le moins» - est de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, car elle donne des pistes pour modifier le cours des choses. Je sais que tout à l'heure M. Maitre nous dira probablement qu'il comprend l'inquiétude des travailleurs de Tavaro - comme il comprenait celle des travailleurs de «La Suisse» - et qu'il a fait tout ce qu'il pouvait depuis des années pour apporter son appui à Tavaro - comme il l'a fait pour «La Suisse».

Ce type de discours ne nous convainc plus. Nous ne voulons plus de discours, nous voulons un changement de politique !

Mme Claire Chalut (AdG). Monsieur Kunz, tout à l'heure vous avez évoqué la compétitivité des entreprises dans les pays du tiers-monde. Vous semblez dire que les gens de ces pays souhaitent ou acceptent des bas salaires en vivant dans la pauvreté. Je ne crois pas que l'on puisse parler de souhait ou d'acceptation. Je pense que c'est bel et bien quelque chose qu'on leur impose, par la force, si nécessaire !

Il ne faut pas oublier que ces personnes sont aussi nos partenaires. On doit malheureusement constater que le Nord se nourrit de la misère des gens du Sud.

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. Je ne pourrai certainement jamais convaincre M. Clerc et M. Schneider de changer d'avis. Mais peut-être pourrais-je les amener à réfléchir - allez, un quart de seconde, seulement ! - à la question suivante : le monde étant désormais ouvert - le problème n'est pas helvétique, il est mondial - n'est-il pas logique et inéluctable que les entreprises les moins compétitives rencontrent le plus de difficultés sur les marchés mondiaux ? N'est-il pas normal que ces entreprises soient amenées, peu à peu, soit à fermer soit à délocaliser ?

Or, il faut bien voir que les entreprises industrielles sont les plus exposées : pourquoi ? Je l'ai déjà dit, parce que ce sont les entreprises qui peuvent être le plus facilement copiées par la main-d'oeuvre des pays en développement. Madame Chalut, contrairement à ce que vous croyez, si vous alliez dans ces pays sous-développés vous verriez que ces gens ne sont pas exploités, comme vous le dites. Ils ont simplement envie d'améliorer leur sort, et pour cela ils sont prêts à faire des efforts considérables et à profiter du libéralisme des marchés mondiaux, pour nous prendre nos postes de travail.

Cela ne dépend pas du pouvoir de décision du Conseil d'Etat, ni des entrepreneurs suisses, c'est un fait, et vous feriez mieux de tirer les conclusions de cette situation, plutôt que de vouloir à tout prix déplacer des montagnes qui ne sont pas «déplaçables» !

M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Je n'ai de leçon à donner à personne, et personne ne doit m'en donner !

J'aimerais aborder le problème de la diversification des activités qui est absolument nécessaire pour un canton comme Genève. Il faut se préoccuper du tissu industriel par rapport à la disparition d'importantes entreprises.

Je ne vais pas être sectaire, je vais citer un paragraphe du rapporteur de majorité qui peut rallier un certain nombre de personnes :

«Tous les commissaires se sont pourtant déclarés sensibles à l'inquiétude du personnel de l'entreprise Tavaro, inquiétude fondée. En effet, depuis des décennies, la situation de la société, pour autant qu'on puisse en juger sur la base des informations grappillées par les médias, n'a cessé de se détériorer.».

Nous avons des raisons d'être inquiets. En effet, d'un point de vue technique, les machines à coudre et les presses à repasser ont marqué l'industrie genevoise, comme la SIP, la TAREX, etc. Si le département de l'économie peut faire quelque chose pour remédier à la situation, il faut qu'il le fasse. Je dirai simplement - je suis mécanicien de profession - mon attachement à cette industrie technologique de pointe. Le personnel de Tavaro s'inquiète non seulement du risque des licenciements - plus de trois cents emplois - mais aussi de la disparition des places d'apprentissage, des développements techniques intéressants, du réseau de sous-traitance et du savoir-faire.

Après avoir écouté toutes les parties concernées, il est ressorti de la discussion un manque évident d'information. La direction se trouve à Zurich, ce qui est ressenti comme une barrière par le personnel et même par le département de l'économie. Dans les années 70, l'Union syndicale suisse avait proposé la participation des travailleurs. Cela ne va peut-être pas faire plaisir à tout le monde, mais si elle avait été acceptée on n'en serait pas là aujourd'hui ! L'investissement des travailleurs dans leur entreprise aurait été plus grand. Ce soir, que vous déposiez cette pétition sur le bureau du Conseil d'Etat ou que vous la renvoyiez au Conseil d'Etat, le problème ne sera pas résolu, car s'ils ont décidé de fermer ils fermeront !

M. Gilles Godinat (AdG), rapporteur. Sur le plan général, Monsieur Kunz, les échanges commerciaux de la Suisse sont essentiellement intra-communautaires à plus de 75%. Il y a peu d'échanges avec le tiers-monde. Le problème de la délocalisation touche essentiellement la production étant donné les bas salaires pratiqués dans ces pays. Si le BIT examine la clause sociale, c'est bien pour tenter de protéger les personnes de ces pays et pour interdire le travail des enfants. Certaines entreprises européennes utilisent leur production à des conditions inacceptables du point de vue humain et du point de vue éthique et la commercialisent en Europe.

Il faut rappeler que la Suisse est le pays d'Europe - des pays industrialisés de la CEE - où le temps de travail est le plus important, l'absentéisme le plus bas, le taux d'heures supplémentaires le plus grand, le temps de présence devant les machines le plus élevé et le quota de la part fiscale des entreprise le plus bas. J'en veux pour preuve une étude de l'OCDE, citée par la «Vie économique» de 1992, qui dit :

«Les impôts pesant sur les entreprises en Suisse sont largement dans la moyenne des pays de l'OCDE. De plus, les coûts unitaires salariaux dans la production, c'est-à-dire la part du salaire et des charges sociales par unité produite, sont plus bas en Suisse que dans les principaux pays concurrents de l'industrie suisse, principalement l'Allemagne.».

Enfin, on travaille, comparativement à l'Allemagne, six semaines de plus par an.

Vous m'avez reproché de ne pas avoir respecté une certaine éthique en divulguant des informations sur la situation de Tavaro. Je l'ai fait à la demande des représentants du personnel de Tavaro...

M. Armand Lombard. Qu'est-ce que tu veux que ça me fasse !

M. Gilles Godinat. Mais, j'explique !

Mon éthique personnelle me dicte, effectivement, lorsque trois cents emplois sont en jeu dans une entreprise importante de la place, de donner une priorité à la défense des personnes concernées.

Plusieurs rapports confirment que la montée des PME en 1985 était liée à une phase économique et à la progression des investissements, mais la plupart de ces PME étaient fragiles. Au moment de la crise, ces PME se sont fragilisées, quand elles n'ont pas disparu ! Or, nous savons que si ces PME n'ont pas un soutien bancaire dans des phases difficiles, et si il n'est pas possible de produire et de commercialiser à plus grande échelle, elles ne peuvent pas se développer. Pour devenir grand, parfois il faut l'appui des grands !

La responsabilité de l'Etat à ce sujet est importante. Une étude présentée à l'université de Fribourg en juin 1994 disait qu'en Suisse les inégalités économiques sont croissantes. Le poids du triangle d'or qui représente 38% de l'activité économique en Suisse engendre un déséquilibre. M. Gaston Godard, le professeur qui a présenté cette étude, dit :

«La Confédération doit intensifier sa politique économique régionale, lorsque les mécanismes de marché ne peuvent assurer des rapports économiques tolérables en Suisse.».

Monsieur Maitre, vous-même l'avez dit lors de la campagne «Genève gagne» ! Vous avez insisté, alors, sur le rôle des pouvoirs publics à chaque échelon de l'activité économique dans la formation et dans le soutien aux économies industrielles en difficulté. Toute l'activité de l'OPI qui est remarquable - je tiens à le souligner - notamment le travail de documentation et de brevet, doit être renforcée et développée. Les orientations et les moyens existent déjà, il suffit de les développer. C'est le message de nos propos.

Mme Marlène Dupraz (AdG). J'ai écouté attentivement les arguments des uns et des autres. Face à ceux de nos camarades de gauche, j'ai entendu, des bancs d'en face, des remarques qui me laissent absolument pantoise !

Le personnel de Tavaro se fait entendre au travers d'une pétition, vu la situation dramatique. Autrefois, lorsque les entreprises fonctionnaient bien, on n'appelait pas le personnel à participer. A quoi voulez-vous qu'il participe, maintenant, alors que cela va mal ? Aux faillites, aux liquidations des entreprises ! M. Kunz a parlé de compétitivité. Il a dit que le syndicalisme est absent dans les pays du tiers-monde, que les coûts de production sont nettement plus bas et que la misère sociale, humaine et économique peut aider les entreprises à se porter beaucoup mieux. Franchement, ce discours fait vomir ! Faut-il vraiment compter sur la misère du tiers-monde ? De quelle compétitivité parlez-vous ? De la compétitivité des bénéfices ou des produits ? De quels produits ? Le personnel des entreprises demande une participation à l'innovation et aux décisions : à cela on leur oppose une fin de non-recevoir !

Cela fait environ quinze ans, pour prendre l'exemple de la SIP, que l'incapacité des gestionnaires rendait la situation endémique et a engendré des restructurations. Hayegh avait même été mandatée pour voir ce qui n'allait pas. Dans son audit et son analyse, cette société avait constaté que la hiérarchie était lourde, rendant le fonctionnement difficile et stérile en innovation. L'entreprise SIP était très attachée à la production de précision, sans faire la part des choses, rendant les produits suisses trop cher, voire inexportables. Certains pays avaient préféré d'autres produits peut-être moins précis. Il me semble qu'une discussion doit avoir lieu à ce niveau. Ce genre de problèmes ne se résolvent pas dans un parlement.

Le classement pur et simple d'une pétition de ce genre signifie que le parlement lui-même est impuissant à agir. Après avoir déposé la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement, on se contentera de prendre acte du fait que la compétitivité que vous prônez est celle des bénéfices ! Le quart-monde se développe - vous le savez - et, malgré tout, vous n'arrêtez pas de nous vanter votre économie qui n'est pas la nôtre. Vous avez même dit que dans ces pays la couverture sociale est presque nulle. C'est absolument ignoble !

M. Pierre Kunz. Mais, je n'y suis pour rien, moi !

Mme Marlène Dupraz. C'est un aveu, n'est-ce pas ! En disant qu'en Suisse les coûts sont trop élevés et qu'ils sont très bas dans les pays du tiers-monde, vous avouez implicitement que votre but est de gonfler vos bénéfices ! Beaucoup d'entreprises du tertiaire, du secondaire et du primaire ont disparu à cause de cette volonté de faire toujours plus de bénéfices. Elles se sont installées non seulement en Suisse allemande, mais surtout à l'étranger. Nous remarquons l'absence de recherche d'innovation et de participation avec les travailleurs. Pour vous, l'innovation concerne le secteur de la recherche et reste en vase clos. C'est vous qui décidez où, quand et comment les produits doivent être commercialisés, exportés, etc. Votre préoccupation majeure ne porte pas sur les produits, mais sur les bénéfices qu'ils peuvent résulter !

Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Pour moi, Tavaro c'est une autre histoire ! C'est notamment une assemblée de chômeurs : une septantaine de personnes qui sont là. Je vais vous les décrire, parce que je ne pense pas que vous les connaissiez ni que vous ayez l'habitude de les fréquenter. Ils ont plus de la cinquantaine, ils sont habillés simplement, ils ont les traits du visage marqués, ils ont passé quarante ans de leur vie à travailler dans cette usine... (M. Lombard fait des mimiques et des remarques ironiques.) Ça vous fait peut-être «marrer», Monsieur Lombard, mais c'est la vérité ! ...et ils s'expriment avec difficulté actuellement, parce qu'ils attendent leur lettre de licenciement; vous savez, le courrier qui risque d'arriver fin novembre...

Il n'y a aucune comparaison avec vous qui, bien que surchargé par votre tâche, êtes passionné par votre activité, même si elle est complexe. La complexité, pour eux, va résider dans la recherche d'un emploi et les fins de mois difficiles. Un ouvrier à la sortie de l'assemblée me disait qu'il avait commencé à travailler en usine à l'âge de 14 ans, qu'il avait 63 ans et 5 000 F d'économies ! Il m'a demandé si je croyais qu'il pourrait sauver son deuxième pilier...

L'entreprise Tavaro a été créée dans les années 30 et a misé d'emblée, malheureusement, sur les pièces d'armement. Prévoyant qu'une reconversion était indispensable, elle s'est tournée vers les produits de consommation tels que les brosses à dents électriques, les planches à repasser et ce qui fut notre machine à coudre, la fameuse Elna. Si ces produits sont plus respectueux de la société civile, force est de constater qu'ils sont moins solides face à la concurrence internationale.

Lire dans le rapport de majorité qu'il n'est pas concevable que l'Etat s'immisce dans la gestion de l'entreprise, alors que visiblement celle-ci pratique une politique de gestion du personnel pour le moins opaque, est un signe alarmant de désengagement vis-à-vis d'un gros employeur du canton. C'est aussi un signe de désengagement vis-à-vis des salariés, car n'oublions pas que les grosses entreprises peuvent être de grandes «fournisseuses» de chômeurs. Elles prennent ce risque quand leur direction ne pratique pas une gestion du personnel transparente, ce qui est le cas de Tavaro.

La direction de cette entreprise a fait fi, et fait fi depuis plusieurs années, de devoirs élémentaires. Elle n'a pas montré le respect qu'on attendait d'elle vis-à-vis des règles prévues dans la convention collective, prévoyant des informations régulières à la commission du personnel en matière de politique économique. Elle ne s'est pas non plus montrée très attentive au respect de la loi sur la participation.

Le rapport de majorité conseille, de manière assez paternaliste, la restauration de la communication entre la direction et le personnel, alors que, visiblement, si le personnel en appelle au Grand Conseil par l'intermédiaire d'une pétition, c'est bien parce qu'il n'y a plus de communication possible avec sa direction depuis belle lurette. Ceci revient à conseiller à un muet de se faire entendre d'un sourd !

Cette manière de répondre aux pétitionnaires de Tavaro est de bien mauvais augure. Les ouvriers de Tavaro ont bien raison de s'inquiéter, car rien ne sera fait pour tenter de redonner un élan à leur entreprise et rien ne semble se décider pour favoriser la présence d'entreprises qui soient génératrices d'emplois, qui innovent dans des technologies nouvelles. C'est bien ce qui nous inquiète aussi. Car se contenter d'une décision de non-ingérence dans les entreprises privées ne résoudra ni la mise en place de l'articulation indispensable entre des programmes de recherche et le savoir-faire existant, ni le futur de l'industrie genevoise. La pétition Tavaro dépasse largement le cadre d'une entreprise en difficulté. Elle annonce de funestes présages : l'effondrement du secteur industriel genevois et de nombreuses assemblées futures de chômeurs et chômeuses.

C'est pour cela que nous vous recommandons le renvoi de cette pétition, véritable fusée d'alarme, au Conseil d'Etat, afin qu'il la traite dans une perspective positive et non pas par des concepts en communication.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Lorsque cette pétition a été traitée dans le cadre de la commission de l'économie et du Grand Conseil, on a eu le sentiment qu'un débat serein et constructif pouvait s'engager. Il s'est effectivement engagé et cela nous a permis, dans un climat de confiance qui s'était instauré, de donner un certain nombre d'informations, dans la mesure de nos possibilités. En effet, un certain nombre de données restent confidentielles, et nous ne devons pas les communiquer.

Nous avons donc décrit la situation de Tavaro en donnant des renseignements précis sur ce qui avait été fait par mon département, en concertation avec les syndicats, puisque, dans ce domaine, nous avons coopéré de manière positive, en particulier avec la FTMH. Nous avons très clairement indiqué que l'émergence d'un tel débat, dans le cadre d'une commission parlementaire, n'était possible que pour autant que les uns et les autres s'engagent à respecter une sorte de règle du jeu consistant à se saisir de la situation d'une entreprise en difficulté, avec un sens minimum des responsabilités pour ne pas politiser ce type de dossiers, au sens de la politique partisane. Si c'est au sens de la politique générale, c'est une autre chose.

Dans ce contexte, le gouvernement a tout lieu d'être déçu, car le débat qui s'est instauré en commission, objectivement de qualité et responsable, a malheureusement donné lieu, in extremis, à la fin des travaux, à une sorte de blocage dont il ne m'appartient pas de juger les responsabilités des uns et des autres. Mais ce blocage a produit l'émergence d'un débat de politique politicienne, alors que nous avions, me semble-t-il, créé tous ensemble les conditions d'un débat de politique économique, posant notamment la situation de certains secteurs de l'industrie, et en particulier de Tavaro.

Première observation. Celles et ceux qui ont pris la responsabilité de ce débat et qui sont, à mon avis, incarnés par les deux rapports dans lesquels je ne me reconnais pas, ni dans l'un ni dans l'autre - je dirai pourquoi tout à l'heure - ont probablement fort mal joué. En effet, c'est la dernière fois qu'en ce qui nous concerne nous donnerons des informations sur la situation d'une entreprise, parce que nous constatons qu'elles ont été utilisées à des fins de débats de politique politicienne.

Deuxième observation. Ces deux rapports sont évidemment de veine fort différente. Le rapport de M. Godinat livre un certain nombre de considérations générales qui, en partie, ne manquent pas de pertinence, mais qu'on aimerait voir appliquées dans tous les milieux et sur tous les bancs du parlement. J'y reviendrai dans un instant au travers de quelques exemples, parce que les considérations générales, les grands discours un peu livresques sur la situation économique et les perspectives de notre industrie, lorsqu'ils ne sont pas traduits par des efforts concrets sur le terrain et des concessions sur l'autel des dogmes politiques, ne servent strictement à rien et ne font, en tout cas, pas avancer la cause.

Cela dit, je ne me retrouve pas non plus dans le rapport de M. Kunz, qui est une sorte d'ode au tout tertiaire qui ne correspond pas à la situation économique de notre canton.

Mesdames et Messieurs, nous l'avons dit et nous le répétons encore, la garantie de la stabilité, de la prospérité économique à long terme de notre canton se trouve dans la diversification. Celle-ci doit faire la part large de la gamme extrêmement ouverte de l'ensemble des activités de notre canton. Il suffit de se souvenir que, contrairement à ce qu'on croit, le premier employeur de notre canton n'est pas la banque ou la finance, mais le commerce de détail qui regroupe à lui seul moins de 8% du total des emplois. C'est une preuve de la diversification des activités économiques. Mais dans cette diversification le secteur secondaire a un rôle essentiel à jouer.

Sur ce plan-là, faisons ensemble un exercice de modestie. La grande distinction classique entre le secondaire et le tertiaire devient dans certains cas extrêmement difficile à établir. Savez-vous que dans des entreprises typiquement secondaires, dans le cadre de notre nomenclature, par exemple dans le secteur de la chimie, plus de la moitié des emplois aujourd'hui sont en réalité des emplois du tertiaire, je veux parler des emplois du marketing, de la gestion, de développement commercial.

Inversement, quelle est l'entreprise tertiaire qui pourrait correctement fonctionner sans un support de production très vif qui lui permette de développer ses propres activités ? Croyez-vous que les banques pourraient se passer du secteur secondaire ? Regardez ce que vous faites lorsque vous faites des opérations bancaires avec les «contomats» ! Ce sont des productions industrielles de notre pays absolument classiques et dont nous avons tout lieu d'être fiers. Elles sont, à l'heure actuelle, l'un des supports essentiels d'un élément de l'activité tertiaire évident : le secteur bancaire. On voit donc bien que tout est enchevêtré et qu'il faut arrêter ces débats de territoires. En réalité, ce qui compte est de maintenir dans notre canton des activités extrêmement diversifiées à l'intérieur desquelles on trouve de la production de biens manufacturés, qui expriment un savoir-faire sur le plan technologique. L'ode au tout tertiaire dans ce contexte est absolument inconcevable ! C'est la fragilisation de notre économie cantonale et nationale.

La recherche est fondamentale. Je vous rappelle qu'en matière de programme de formation, en matière de programme de développement technologique, notamment par l'université, par l'école d'ingénieurs, Genève est le canton qui dépense le plus de fonds publics par tête d'habitant de toute la Suisse. Alors, ne venez pas dire que rien ne se fait !

Je ne me reconnais pas non plus dans le pessimisme général qui se dégage du rapport de M. Godinat, exprimé de manière théorique sur l'avenir de notre industrie.

L'office pour la promotion de l'industrie a permis - cette opération qui se veut être une opération de communication n'exprime pas le tout de l'industrie - que le prix de l'industrie du canton de Genève - qui est délivré chaque année - soit délivré à une entreprise dont le nom est Orbisphère. Monsieur Schneider, vous devriez mieux connaître le terreau industriel de ce canton ! De très nombreuses entreprises de ce canton, notamment dans les PME, sont des entreprises actives dans les technologies liées à la protection de l'environnement. Tel est le cas d'Orbisphère, qui est une entreprise leader mondial, dont le domaine est très directement lié aux technologies de protection de l'environnement et que nous avons le privilège d'accueillir sur notre territoire. Grâce aux actions conduites dans ce canton, elle a pu développer son potentiel, et elle se trouve être aujourd'hui une PME multinationale présente dans de nombreux pays. Elle a également pu prendre des participations dans un certain nombre d'entreprises, c'est dire qu'elle est en plein développement.

Hier, le Crédit suisse délivrait son traditionnel prix en faveur de l'industrie à une entreprise très prometteuse dans le domaine des technologies médicales, autre domaine qui est en train de devenir un centre d'excellence à Genève. Alors, arrêtez, s'il vous plaît, de noircir le tableau et de cultiver la «Schadenfreude» de manière aussi insensée ! Cela est faux ! Avec vos discours pessimistes - on n'a tout de même pas que des «Neinsager» dans ce parlement - vous colportez une image négative de l'industrie de notre canton, alors qu'elle ne le mérite pas.

Un exemple est posé au travers d'une délibération du Conseil municipal de la commune de Collonge-Bellerive. L'industrie des télécommunications est un domaine d'excellence à Genève; elle s'y est développée de manière remarquable. Alors, j'attends votre réaction ! Au-delà de vos grands discours, je me réjouis de voir - je m'adresse aux groupes qui donnent volontiers des leçons - quel est le soutien que vous apporterez à l'entreprise Reuters. C'est une entreprise remarquable qui génère beaucoup d'emplois, puisque le nombre va atteindre six cents. Elle a besoin d'un peu de compréhension pour que quelques arpents de terre agricole soient déclassés, pour lui permettre de s'implanter. Je précise que les programmes de compensation écologique et en matière d'amélioration foncière agricole ont été obtenus. L'endroit où elle doit s'implanter est un des rares endroits où l'on trouve des boucles de réseau de fibre optique qui lui permettent d'exercer son activité. Alors, après vos beaux discours, je vous donne rendez-vous, en vous remerciant d'avance de l'appui concret que vous nous apporterez dans cette affaire ! (Vifs applaudissements de la droite.)

M. Gilles Godinat (AdG), rapporteur. Effectivement, vous nous aviez demandé en commission de ne pas transmettre les informations que vous nous aviez données. Je n'en ai transmis aucune; j'ai seulement repris les informations communiquées par les salariés de l'entreprise.

S'agissant de la politique politicienne, je suis favorable à un débat sur la politique du département de l'économie publique en matière de politique industrielle. Cela me paraît légitime !

Pour ce qui est de la connaissance de la situation de l'environnement économique, j'ai simplement situé des données générales sur lesquelles nous n'avons pas de prise.

Pour en revenir au cadre concret de la situation genevoise - on ne va pas parler de la situation de la chimie bâloise dont l'évolution est de délocaliser la production dans le tiers-monde, Bâle devenant un centre administratif de gestion, voire une holding...

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. La France voisine, ce n'est pas le tiers-monde pour la chimie bâloise !

M. Gilles Godinat, rapporteur de la minorité. ...nous sommes bien évidemment favorables à la collaboration avec les différents services pour la formation. Je dis même dans mon rapport qu'il faut la renforcer. Je ne dis pas que rien ne se fait. Je montre dans quelle direction il faut aller, et je le souligne.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Monsieur Godinat, nous avons eu un débat constructif en commission qui, malheureusement, a été politisé par le biais des rapport de majorité et de minorité qui sont très éloignés des débats de la commission.

J'attire votre attention sur un seul fait très concret. Dans l'affaire Tavaro, le département de l'économie publique, par son action, a permis de sauver un certain nombre d'emplois sans lesquels l'entreprise n'existerait plus aujourd'hui. Nous avons pu le faire dans le cadre d'un dialogue et d'une coopération très positive avec la FTMH, qui a apporté son appui pour mettre en place un plan social convenable, pour les emplois qui ne pouvaient pas être sauvés. Ce n'est d'ailleurs pas terminé, il y a encore du travail !

Deux états de fait : par une action discrète sur le terrain, mais extrêmement engagée, nous avons contribué à sauver autant d'emplois qu'il était possible - nous aurions aimé en sauver plus. Par votre rapport et votre discours de ce soir, vous n'avez pas sauvé un emploi supplémentaire de Tavaro. Tout le problème est là ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. Je voudrais préciser une ou deux choses.

Monsieur Maitre, c'est bien beau de dire que l'avenir de Genève réside dans un équilibre industrialo-tertiaire, mais on ne peut quand même pas nier que le secteur secondaire diminue d'année en année. On ne peut pas nier non plus les réalités économiques de ce canton, et cela ne sert à rien de prétendre qu'on va créer un état industriel à Genève, dans les vingt ans à venir ! Nous avons simplement voulu dire que nous devons, tous ensemble, tenir compte des réalités, je veux parler d'une tertiarisation inéluctable de l'économie. (Le rapporteur, énervé, retourne à sa place sous les rires des députés.)

La présidente. Monsieur Kunz, je vous en prie, restez à la table des rapporteurs jusqu'à ce que ce Grand Conseil ait voté !

M. Christian Grobet (AdG). (L'orateur est accueilli par des quolibets et quelques huées.) La seconde intervention de M. Maitre m'a poussé à prendre la parole.

Déjà tout à l'heure, Monsieur Maitre, vous avez tenu des propos que vous n'auriez pas dû tenir sur les débats de politique politicienne. (L'orateur est contesté par M. Blanc.) Bien sûr, chacun peut penser ce qu'il veut, Monsieur Blanc, mais je pense qu'il est anormal que l'on ne puisse pas débattre dans cette enceinte de problèmes aussi graves que ceux qui sont évoqués à travers cette pétition. Vous avez évoqué le problème de l'emploi lors des dernières élections; nous aussi, et il est normal d'en débattre ici ! Si aujourd'hui nous ne le faisons pas, eh bien je me demande à quoi sert ce parlement ! Le fait qu'un rapport ne vous plaise pas ne vous permet pas pour autant de le discréditer par des phrases vides de sens !

Monsieur Maitre, vous avez déclaré que vous avez sauvé des emplois à Tavaro. Je n'en doute pas, et je vous félicite, dont acte ! Mais ne dites pas que le rapport de M. Godinat n'a pas permis de sauver un emploi ! Le but du rapport de la commission des pétitions n'est pas de sauver des emplois. (Exclamations de la droite.) Ce n'est pas la tâche des députés ici présents, c'est votre travail au gouvernement de sauver les emplois ! (L'orateur a de la peine à parler, car il est très chahuté par la droite. La présidente fait tinter sa cloche. Huées.) Bien sûr, je comprends qu'après certaines promesses électorales, vous soyez gênés !

M. Daniel Ducommun. Fossoyeur ! (Applaudissements, bravos et quolibets s'entremêlent.)

Mises aux voix, les conclusions du rapport de majorité de la commission de l'économie (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées. 

RD 230
12. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur l'exercice 1993 de la Fondation du Palais des expositions - Genève. ( )RD230

1. ORGANES DE LA FONDATION

Conseil d'administration

Président:

M. .

. .

chef du département de l'économie publique

Vice-président:

Me

Jean-Marie Revaz

Membres:

MM.

Armand Bossard

Gabriel Catillaz

René Chapel

Kurt Emch

Jacky Farine

Claude Fischer

Jean-Paul Gargantini

Marcel Monney

Alex Portianucha

. .

Madeleine Rossi

MM.

Denis Roy

Roland Schwendimann

André Vial

Roger Wutrich

Assiste ou

Remplace

le président:

M. .

Robert Hensler, Directeur auprès du secrétariat

général du département de l'économie publique

Conseil de direction

Président:

M. .

Jean-Philippe Maitre

Vice-président:

Me

Jean-Marie Revaz

Membres:

MM.

René Chapel

Roland Schwendimann

Assiste ou

remplace

le président:

M. .

Robert Hensler

* * *

Secrétaire général:

M. .

Pierre Egger

Organe de contrôle:

BFB Société fiduciaire

Bourquin Frères & Béran S.A., Genève

2.1. Exploitation de Palexpo

La Fondation du Palais des Expositions a confié, par convention, la gestion et l'exploitation de Palexpo à la Fondation Orgexpo (Fondation pour la promotion et l'organisation d'expositions et de congrès).

La liaison entre la Fondation du Palais des Expositions et la Fondation Orgexpo a été assurée par MM. Kurt Emch et Robert Hensler, membres du Conseil de direction d'Orgexpo.

En outre, une commission de gestion composée de MM. Roland Schwendimann, membre du Conseil de direction, Pierre Egger, secrétaire général, et Charly Sapin, architecte-technicien, a notamment examiné avec le service technique d'Orgexpo sous la direction de M. Willi Staehli les points suivants, lors de séances hebdomadaires:

· les travaux d'entretien du bâtiment et des installations techniques;

· les études et l'exécution de travaux d'amélioration;

· l'entretien du parc et des voies d'accès;

· l'entretien et la gestion de la villa Sarrasin;

· les contacts périodiques avec la commune du Grand-Saconnex concernant l'entretien du parc et des voies d'accès.

Comme chaque année, des améliorations au bâtiment et aux installations techniques ont pu être réalisées d'un commun accord, telles que:

· construction d'une rampe définitivie entre le niveau B du parking couvert et la voie d'accès marchandises;

· réfection du secrétariat no 1 pour les organisateurs d'expositions;

· réfection et amélioration des salles A, B, C;

· modification accès livraison pour les restaurants (quai de déchargement) et création d'un bureau pour contrôle arrivages;

· modifications et rénovations partielles des cuisines permanentes, réfection du sol (chapes et revêtement);

· réfection décorations murales (tissus) des restaurants;

· réfection des boîtes de sol sanitaires dans les halles 1, 2 et 4;

· création d'un panneau de signalisation de la halle 7;

· installation de 6 transformateurs supplémentaires en vue de Telecom 95;

· réfection des bureaux dans le bâtiment administratif.

La collaboration étroite entre les deux fondations permet la gestion de Palexpo dans des conditions optimales.

En 1993, Palexpo a accueilli 23 expositions dont 14 internationales, qui ont couvert près de 178 000 m2 de surface nette de stands et ont attiré 1 540 000 visiteurs du monde entier, de même que quelque 100 000 participants aux divers congrès, conférences et autres manifestations.

Le cap du million et demi de visiteurs a été à nouveau franchi en 1993. C'est ainsi que le Salon de l'automobile (685 000), le Salon des inventions et techniques nouvelles (114 000), celui du livre et de la presse (130 000) et la Foire de Genève (273 000) ont pratiquement atteint, voire dépassé leurs résultats précédents.

Organisée pour la première fois à Genève, Semicon Europe - exposition internationale de matériel et d'équipement semi-conducteur - a surpris de nombreux observateurs par son importance et ses retombées.

Parmi les salons professionnels EIBTM - exposition consacrée aux «incentives» et voyages d'affaires - continue sa courbe ascendante, sur un marché dont Genève doit savoir profiter au mieux puisque près de 5 000 professionnels du tourisme viennent à Palexpo.

Outre les conférences organisées parallèlement à certains salons, le Centre de congrès a pour sa part accueilli des congrès et symposia médicaux ainsi que de nombreuses manifestations diverses, telles qu'assemblées générales ou sessions d'examens par exemple.

La variété des manifestations mises sur pied à Palexpo confirme la vocation à la fois internationale et régionale de cette infrastructure d'accueil de qualité permettant une grande diversification.

La Fondation du Palais des Expositions, propriétaire des bâtiments, poursuit ainsi ses efforts en étroite collaboration avec les autorités et Orgexpo pour adapter constamment cette infrastructure essentielle à la vie économique, culturelle et sociale de notre canton.

Le rapport de gestion d'Orgexpo, présentant la synthèse de ses activités pour l'exercice 1993 avec les comptes y relatifs, a été soumis à la Fondation du Palais des Expositions, pour approbation, conformément à la convention.

2.2. Halle 7

La construction de la halle 7, sous la direction du département des travaux publics et de l'énergie, maître de l'ouvrage, se poursuit selon le planning en vue de sa mise en exploitation au début de l'année 1995 pour le Salon de l'automobile.

Le restaurant, indispensable pour le fonctionnement de la halle, sera terminée en septembre en vue de Telecom '95.

La Fondation du Palais des Expositions versera sa participation de20 millions de francs par mensualités dès le mois d'août 1994 (18 millions de francs pour la halle et 2 millions de francs comme participation à la construction du restaurant).

2.3. Villa Sarasin

Après adjudication du 90% des travaux, le coût de la rénovation reste compris dans l'enveloppe financière de 6 millions de francs.

Les travaux avancent selon le programme. La Fondation, propriétaire de la villa, en sa qualité d'institution dépendent de l'Etat, bénéficiera du bonus d'investissement de 700 000 F. La ville sera aussi à disposition de l'Etat pour y organiser des réceptions et réunions.

2.4. Centre de congrès

Les grandes salles ont fait partie de la première étape de rajeunissement du centre de congrès de Palexpo. Le revêtement des parois latérales et mobiles et le plafond avec un éclairage incorporé ont été refaits. L'accès au centre de congrès fera l'objet d'une deuxième étape à réaliser en 1994.

Avec ce nouveau complexe de bâtiments, constitué par la halle 7, la salle de spectacles, la halle de liaison (passerelle) et la villa Sarasin, Palexpo sera encoreplus attractif pour des manifestations dans tous les domaines: plus de surface pour les grands salons, plus de flexibilité pour les manifesttions parallèles, plus de places assises pour les grands congrès, plus de confort pour les manifestations sportives et les concerts.

3. COMPTES

Orgexpo ayant pu dégager les moyens financiers nécessaires, la Fondation du Palais des Expositions a payé la totalité des intérêts sur le prêt de 25 millions de francs de l'Etat, d'un montant de 1 218 750 F, au lieu d'un minimum de 800 000 F. La totalité des charges financières versé par Orgexpo à la Fondation du Palais des Expositions s'élève pour l'année 1993 à 8 637 571,45 F.

Les comptes de l'exercice 1993 et le bilan de la Fondation du Palais des Expositions, approuvés par le Conseil d'administration dans sa séance du19 avril 1994, figurent en annexe.

Les comptes de l'exercice 1993 ont été approuvés par le Conseil d'Etat en date du 2 novembre 1994.

Annexes:

No 1 - Comptes de l'exercice 1993.

No 2 - Bilans comparés 1992/1993.

ANNEXE 1

ANNEXE 2

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport. 

IU 45
13. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. John Dupraz : Terrasses de café. ( ) IU45
Mémorial 1994 : Développée, 5248.

(Un énorme charivari suit l'annonce de ce point de l'ordre du jour. Les remarques et les quolibets fusent. La présidente tente de ramener le calme, mais les députés, peu désireux d'obtempérer, entonnent, à tue-tête, le fameux : «C'est à boire, à boire, à boire, c'est à boire qu'il nous faut, oohh, oohh, oohh !».) (La présidente reprend la parole après un moment de découragement.)

La présidente. Mesdames et Messieurs, nous attendrons que le calme revienne ! (Les remarques continuent à voler.)

M. John Dupraz. Pour une fois que ce n'est pas moi qui dérange !

La présidente. Moi, j'ai toute la nuit devant moi !

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Monsieur Dupraz, vous avez évoqué le problème des terrasses parisiennes de Genève, qui sont gérées par le service du domaine public de la Ville de Genève. En effet, certaines terrasses sont ouvertes en été et devraient pouvoir être exploitées aussi longtemps que les conditions météorologiques le permettent. C'est une simple question de bon sens et de souplesse.

Le Conseil d'Etat n'a pas la gestion du domaine public de la Ville de Genève, mais nous disons très clairement que nous regrettons que la Ville de Genève applique de façon aussi restreinte et réglementée l'usage du domaine public. Malheureusement, en effet, les règlements qui régissent l'exploitation des terrasses en plein air sont appliqués de telle manière qu'ils ignorent les bienfaits de la clémence du temps. On voit mal pourquoi ces terrasses ne pourraient pas être exploitées lorsque le temps le permet. Nous le regrettons, car c'est une possibilité d'expression économique, tant pour le chiffre d'affaires que pour l'emploi.

Nous en sommes désolés, mais nous n'avons pas les moyens d'intervenir, la gestion du domaine public de la Ville de Genève étant du ressort du Conseil administratif.

Cette interpellation urgente est close.

 

PL 7178
14. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Versoix (création d'une zone de développement 4 A destinée à un établissement d'enseignement). ( )PL7178

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28661-541, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 28 janvier 1994, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Versoix (création d'une zone de développement 4A destinée à un établissement d'enseignement), est approuvé.

2 La surface brute des constructions ne doit pas excéder 900 m2 de plancher.

3 Les plans de zones annnexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens -fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Un exemplaire du plan no 28661-541 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de modification du régime des zones concerne la parcelle no 3878, feuille no 17, du cadastre de la commune de Versoix. Cette parcelle, d'une superficie de 2 491 m2, est actuellement située en 5e zone (villas); elle est entourée par la zone de développement 4A destinée à un établissement d'enseignement (Collège du Léman) votée par le Grand Conseil en date du 25 juin 1993 (PL 6967).

Cette parcelle n'avait pas été comprise dans le projet de loi précité car elle n'était pas propriété du Collège du Léman. C'est aujourd'hui chose faite, raison pour laquelle le présent projet est présenté afin de compléter le périmètre voté le 25 juin 1993, ce qui permettra un aménagement plus cohérent de l'ensemble du domaine du Collège du Léman entre la route de Sauverny, le chemin de Montfleury et le canal de Versoix. Par analogie avec la loi votée, l'indice d'utilité du sol est fixé à 0.4.

Pour de plus amples informations sur le Collège du Léman, nous vous prions de vous référer à l'exposé des motifs élaboré à l'appui du projet de loi 6967 susmentionné.

Il est donc proposé la création d'une zone de développement 4A destinée à un établissement d'enseignement d'une superficie de 2 491 m2.

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 4a destinée à un établissement d'enseignement créée par le présent projet de loi.

L'enquête publique ouverte du 30 mai au 29 juin 1994 n'a suscité aucune observation et le présent projet de loi a fait l'objet d'un préavis favorable, à l'unanimité, du Conseil municpal de la commune de Versoix, en date du19 septembre 1994.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le présent projet de loi à votre bienveillante attention.

PREVOIR LA PREMIERE PAGE DU PLAN DE VERSOIXSANS FOLIOS NI TITRE COURANT

PREVOIR LA DEUXIèME PAGE DU PLAN DE VERSOIXSANS FOLIOS NI TITRE COURANT

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton. 

PL 7179
15. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Meyrin (création d'une zone 4 B protégée). ( )PL7179

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28636A-526, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 24 novembre 1993, modifié le 10 juin 1994, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Meyrin (création d'une zone 4B protégée, au hameau de Mategnin), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans la zone de développement 4B créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Un exemplaire du plan no 28636A-526 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de loi a pour but la création d'une zone à bâtir pour le hameau de Mategnin (feuille no 2 de la commune de Meyrin).

Le hameau de Mategnin se trouve actuellement en zone agricole. Au cours des années, ce hameau a perdu l'essentiel de ses activités agricoles; néanmoins, il a conservé ses caractéristiques principales et un environnement rural de qualité, tant du côté du Jura que de Meyrin. Situé à proximité de la cité nouvelle, il représente un repère historique de l'ancien territoire communal.

Depuis de nombreuses années, la commune de Meyrin a entrepris diverses études, en liaison avec le département des travaux publics et de l'énergie, en vue d'un déclassement du hameau en zone à bâtir.

Les dispositions de l'article 22, alinéa 2, LALAT prévoient, notamment lorsqu'une partie importante d'un hameau situé en zone agricole n'est manifestement plus affectée à l'agriculture, la possibilité d'entreprendre un déclassement en 4e zone rurale, ce qui a amené le département des travaux publics et de l'énergie et le Conseil administratif de Meyrin à proposer la création d'une telle zone pour le hameau de Mategnin.

Sur la base de l'étude d'aménagement du hameau, un projet de plan localisé a été établi pour définir plus précisément l'aménagement de cette nouvelle zone. Ce projet de plan est mis simultanément à l'enquête publique avec le projet de plan de zone, ce qui permet de percevoir l'image future du hameau. Le taux d'utilisation du sol est limité à un maximum de 0,4.

Le plan localisé de quartier proposé prévoit la possibilité d'établir des constructions nouvelles, principalement dans les secteurs suivants:

1. à l'entrée ouest du hameau;

2. au carrefour de l'avenue de Mategnin et du chemin du Roussillon;

3. au centre du hameau, côté Jura.

Ces secteurs destinés à des constructions nouvelles sont situés en bordure des voies existantes et ne nécessitent donc pas l'établissement de dévestitures supplémentaires.

En conformité aux article 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre du plan concerné par le présent projet de loi.

Au cours de l'enquête publique, qui s'est déroulée du 1er décembre 1993 au 14 janvier 1994, plusieurs observations ont été formulées. Celles-ci ont été l'objet d'un examen attentif par le département des travaux publics et de l'énergie et la commune de Meyrin; à la suite de quoi, plusieurs modifications ont été apportées aux projets de plan de zone et de plan localisé de quartier. Ainsi, le sous-périmètre ABCD, frappé d'un taux d'utilisation du sol de 0,2, a été supprimé; le taux maximum de 0,4 s'applique dès lors à l'ensemble de la nouvelle zone. Dans le plan localisé de quartier, un nouveau droit à bâtir a été accordé dans la partie nord-ouest du hameau. Par ailleurs, outre quelques corrections mineures, le texte du règlement a été modifié pour réserver l'installation de constructions de peu d'importance et l'agrandissement mineur des bâtiments existants hors des aires de constructions nouvelles prévues au plan (art. 4, al. 3).

Ces projets modifiés ont été approuvés, par 16 oui, 8 non et 3 absten-tions, par le Conseil municipal de la commune de Meyrin en date du13 septembre 1994.

Le dossier des observations sera transmis à la commission chargée de l'examen du projet de loi.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le présent projet de loi à votre bienveillante attention.

Cette page sera une page blanche

Cette page doit impérativement être une page paire prévue pour le plan de MEYRIN. SUPPRIMER LE FOLIO ET LE TITRE COURANT

Cette page doit impérativement être une page impaire pour le départ du plan en accordéon. SUPPRIMER LE FOLIO ET LE TITRE COURANT.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.

 

PL 6983-A
16. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de M. Jean-Luc Richardet, repris par Mmes Liliane Maury Pasquier et Sylvie Châtelain modifiant la loi sur les constructions et les installations diverses (L 5 1). ( -) PL6983
Mémorial 1993 : Projet, 4128. Renvoi en commission, 4146. Divers, 7270.
Rapport de M. Florian Barro (L), commission d'aménagement du canton

La commission d'aménagement du canton sous les présidences deMM. Jean-Luc Richardet et Hervé Dessimoz a étudié ce projet de loi au cours des séances des 25 août, 8 septembre, 13 et 20 octobre 1993, ainsi que les22 juin, 31 août et 7 septembre 1994.

Assistaient également aux travaux: MM. C. Grobet et P. Joye, conseillers d'Etat successifs au département des travaux publics et de l'énergie, G. Gainon, chef de la division des plans d'affectation, J.-C. Pauli et Mottiez, juristes au département des travaux publics, P. Brun, chef de service des plans de zones, Mme S. Lin, chef du service du plan directeur.

1. Généralités et historique

Le présent projet de loi a pour but de porter, sous certaines conditions exceptionnelles, l'indice d'utilisation du sol en zone 5 de 0.3 à 0.4. Nous vous renvoyons à l'exposé des motifs qui traite de l'historique de la densification de la zone villas (zone 5A, puis zone 5) au mémorial 1993, no 29, pages 4128 et suivantes.

2. Travaux de la commission

Lors d'un premier tour de table les commissaires s'accordent à dire que la zone villas n'est pas toujours rationnellement utilisée et que ce projet de loi peut s'inscrire dans son principe comme un outil simple de densification sans passer par le déclassement. Toutefois, le taux proposé fera dire à certains que les communes, peu enclines à la densification par déclassement, notamment de la zone 5 aux zones 4A ou 4B, voire 3, se contenteront de cette mesure d'aménagement.

Audition de la société de propriétaires de villas (SPV)

La SPV, bien que comprenant le souhait de l'auteur du projet de loi visant à encourager la forme d'habitat groupé, ne peut souscrire à la dénaturation de la zone villa. Si elle admet que les constructions de villas mitoyennes peuvent être opportunes et ont rencontré un vif succès, l'indice de 0.4 est exagéré et est contraire à la définition de la zone. Elle rejette donc ce projet de loi et recommande d'en rester au texte de loi actuel.

Audition de l'Association des promoteurs constructeurs genevois (APCG)

L'APCG accueille favorablement ce projet de loi au nom de l'utilisation rationnelle du terrain. Par contre, elle ne peut pas suivre l'auteur du projet de loi sur l'obligation du PLQ préalable.

Cette densification devrait avoir lieu sur des périmètres d'importance, sur lesquels, de cas en cas, après réflexion, l'idée d'envisager la possibilité d'un PLQ pourrait être éventuellement étudiée. Elle rappelle que le Conseil d'Etat a toujours la faculté de demander un PLQ préalablement à toute autorisation de construire.

3. Conclusion

A l'issue des auditions, les commissaires s'interrogent sur l'obligation ou non du PLQ, sur l'article 75 LCI fixant le nombre de logements par bâtiment, sur les gabarits identiques des zones 5 et 4B et sur la surface des parcelles touchées par ce projet. L'idée du PLQ obligatoire est refusée, la commune devant obligatoirement procéder à une délibération avant l'octroi de la dérogation, ce qui n'est pas nécessaire pour un PLQ; le Conseil d'Etat pourrait très bien voter un PLQ sans l'avis favorable de la commune. D'autre part, le propriétaire, embarqué dans une telle procédure, se satisfera des taux actuels évitant de se perdre dans les lenteurs administratives, privant ainsi la collectivité d'une meilleure utilisation des zones à bâtir. La commission renonce également à quantifier le nombre de logements ou la taille des surfaces de terrains minimums concernés par ce projet.

A la suite d'une discussion sur la forme rédactionnelle des articles de loi, la commission vote, par 12 oui (dc - lib- peg- rad - soc), 1 abstention (adg) et 2 oppositions (adg) le projet de loi amendé ci-dessous et recommande au Grand Conseil d'en faire de même.

Premier débat

M. Florian Barro, rapporteur. Je voudrais apporter deux petites précisions.

Dans le vote, bien sûr, il y avait deux oppositions de l'Alliance de gauche, ce qui ne figure pas dans le rapport.

Pour ce qui est de la faculté du Conseil d'Etat qui pourrait voter un PLQ sans avoir pour autant obtenu l'assentiment de la commune, la loi sur les voies de communication et de l'urbanisme prévoit toutefois qu'il faut également l'assentiment du Grand Conseil, dans le cas où le Conseil d'Etat entend voter un PLQ contre l'avis de sa commune. C'est aussi pour cela que la majorité de la commission a considéré que la forme amendée du projet de loi tel qu'il vous est soumis, sans l'obligation du PLQ, était une forme suffisamment intéressante pour contraindre la commune à un vote favorable à un projet de densification jusqu'à 40% de la surface de terrain.

M. Pierre Meyll (AdG). Il me semble nécessaire qu'un PLQ soit rendu obligatoire et c'est la raison pour laquelle j'ai fait une demande d'amendement pour revenir sur le projet de loi tel qu'il avait été proposé par nos collègues socialistes. Nous demandons que le projet de loi ne soit pas changé dans sa première partie. On pourrait parler de : «...forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 30% - au lieu de 40%, comme cela est indiqué sur le projet de loi - de la surface du terrain.» Ensuite, il devrait être rajouté, cela afin que les choses soient clairement établies :

«Ce taux peut être porté à 40% de la surface du terrain moyennant l'adoption préalable d'un PLQ en conformité à la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers et localités du 9 mars 1929.».

Contrairement à ce que dit M. Barro dans son rapport, je ne pense pas que cette possibilité retarde considérablement les travaux. En tout cas, elle aurait le mérite de la clarté. De toute manière, j'imagine mal des promoteurs perdre ce pourcentage accordé en supplément, sous prétexte que cela occasionne des formalités supplémentaires ! Dans certains endroits, il est absolument nécessaire qu'un plan localisé de quartier soit établi et rendu obligatoire, compte tenu des circonstances et des lieux où les voies de communication ne sont pas toujours aussi larges qu'on veut bien le dire.

Mme Liliane Maury Pasquier (S). Le projet de loi qui vous est soumis après passage et toilettage en commission poursuit deux buts.

Le premier concerne la zone villa, qui, comme le rappelle l'exposé des motifs accompagnant le projet de loi 6983, représente 46% des zones à bâtir et même 55% des terrains destinés à la construction de logements dans ce canton. C'est beaucoup, cela d'autant plus que, vu sa configuration et les taux d'utilisation du sol qui y sont autorisés, la zone villa accueillait - mes chiffres datent de 1982 - 11% de la population seulement. Il n'est pas question ici de remettre en cause cette zone villa, mais bien, vu l'exiguïté du territoire cantonal, d'en permettre une densification modérée, là où cela est possible, après accord du conseil municipal sous la forme d'une délibération et préavis de la commission d'architecture, soit des garde-fous suffisants pour empêcher - je l'espère - la réalisation de mauvais projets.

Cette loi nous permettra également de faire de l'aménagement du territoire en cinquième zone. Nous pourrons ainsi utiliser la possibilité qu'offre l'indice de 0,4 pour servir de zone de transition entre une vraie zone villa et une zone de construction plus dense. Nous pourrons ainsi négocier, par exemple, des passages pour piétons.

Les modifications apportées par la commission au projet initial de M. Richardet - que nous avons repris, Mme Châtelain et moi-même - ne nous paraissent pas - je parle au nom du groupe socialiste - le modifier fondamentalement. C'est pourquoi nous n'avons pas jugé nécessaire de maintenir notre proposition de PLQ, puisque, justement, les garde-fous auxquels je faisais allusion nous paraissent suffisants.

Notre groupe vous recommande donc de voter ce projet de loi.

M. John Dupraz (R). Monsieur le président...

Une voix. Madame !

M. John Dupraz. Madame la présidente ! Veuillez m'excuser ! (Rires.) La force de l'habitude est terrible !

Le groupe radical, bien sûr, votera ce projet de loi. Permettez-moi tout de même d'émettre une première réserve. Je trouve judicieux de donner cette possibilité de densifier certaines zones villa, dans certaines conditions, jusqu'à 0,4, mais cela ne doit pas devenir la règle. Cette densification ne doit pas conduire à une forme d'urbanisation qui conduirait à faire de la zone villa une mini-zone immeuble.

Deuxième réserve : il ne faudrait pas que ce projet de loi soit pour les communes ou pour le Conseil d'Etat un échappatoire...

Une voix. Une échappatoire !

M. John Dupraz. ...une solution facile pour éviter les problèmes de densification parfois délicats de certaines zones. Je m'explique. Jusqu'à maintenant, dans le plan directeur cantonal - je ne sais pas ce que nous réservera le prochain - la politique menée par le Conseil d'Etat et par le Grand Conseil a consisté à utiliser au maximum les zones à bâtir. Cela veut dire que toutes les fois que l'on a eu affaire à de grandes surfaces en zone villa, libres de construction, on tentait, après discussion avec les communes et les intéressés, de trouver une meilleure utilisation pour ériger des bâtiments correspondant notamment à la zone 4 A.

Je ne voudrais pas, et je ne souhaite pas, que ce projet de loi empêche l'utilisation judicieuse et optimum des terrains, comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant. Il est vrai qu'à certaines occasions les déclaration de M. Joye m'ont inquiété, notamment en ce qui concerne les terrains situés à la périphérie de la ville de Genève, et là, je crois que nous devons veiller, vu l'exiguïté du territoire, à son utilisation optimum.

M. René Koechlin (L). Voici la raison pour laquelle nous estimons qu'il serait dangereux d'introduire l'obligation de passer par un plan localisé de quartier en appliquant ce projet de loi.

La zone 5 affectée aux villas existe et permet déjà de construire avec un coefficient d'utilisation du sol de 0,2 et, de façon dérogatoire, avec un taux d'occupation allant jusqu'à 0,3. Si l'on veut accroître légèrement cette densité et la porter à 0,4, il ne faut pas trop compliquer les procédures, parce qu'alors les propriétaires ne seront plus enclins à utiliser cette possibilité, et ce projet de loi restera lettre morte. C'est la raison pour laquelle, puisqu'il faut mettre des garde-fous, la solution qui est proposée nous paraît suffisante. En effet, elle préserve contre les velléités spéculatives, notamment par le biais d'une résolution de la commune, sans risquer de dissuader les propriétaires d'utiliser cette possibilité. Or, le sens de cette loi consiste bien à inciter ces derniers à l'appliquer, pas le contraire.

M. Christian Grobet (AdG). Je suis en désaccord - cela ne vous étonnera pas - avec les propos de M. Koechlin. Je suis frappé de la manière avec laquelle certains constructeurs continuent à ne pas se rendre compte, et plus particulièrement dans ce cas, de l'intérêt que peut représenter un plan localisé de quartier.

M. Dupraz a bien fait d'évoquer tout à l'heure les problèmes de densification qui se posent, surtout en zone villa. Depuis que la loi sur les constructions a été modifiée, sauf erreur en 1984, pour introduire la possibilité de porter le coefficient d'utilisation du sol à 0,3, les projets qui ont bénéficié de cette possibilité par les communes d'aller entre 0,25 et 0,30 se comptent sur les doigts de la main. Cette proposition avait été acceptée à l'époque avec beaucoup d'hésitation par le Grand Conseil, car le taux de 0,3 donne lieu à un type de construction très différent des villas contiguës. Précisément, l'impact de ces projets à 0,3 est très fort. Vous verrez, Monsieur Koechlin, que porter ce taux à 0,4 ne représente qu'une augmentation modeste au niveau de la zone villa. Au contraire, au niveau constructif l'impact sera considérable. Cela n'aura plus rien à voir avec le type de projet à 0,3 que l'on a connu avec des pseudo-villas contiguës, cela ressemblera plutôt à des petits immeubles.

Il est évident que ces constructions, à l'intérieur d'un quartier de villas, vont provoquer des oppositions de la part des voisins. Sur ce point, le plan localisé de quartier sera précisément un moyen de faciliter la construction, car - vous le savez en tant que constructeur - une fois qu'un plan localisé de quartier a été adopté, l'autorisation de construire, si elle est conforme au plan, ne peut pas être remise en cause. De fait, le plan localisé de quartier pour nombre de projets a permis de les réaliser plus rapidement que s'il n'y en avait pas eu, comme par exemple le triangle de Villereuse qui a donné lieu à des contestations à n'en plus finir pendant des années et des années, ce qui a amené les promoteurs à demander un plan localisé de quartier.

Mais, indépendamment de cet intérêt des promoteurs, que vous ne semblez pas saisir vous-même, il faut, malgré la disproportion entre des maisons individuelles et des petits bâtiments, arriver à élaborer un projet aussi cohérent que possible. C'est là, me semble-t-il, qu'un plan localisé de quartier est indispensable.

J'ai été frappé par les propos de Mme Maury Pasquier. Lorsqu'on porte la densification à un tel taux en zone villa, il est nécessaire de créer des cheminements. M. Meyll a raison de proposer un élargissement des dessertes pour accéder à ces nouveaux lotissements. En effet, les chemins en zones villa sont étroits. Le plan localisé de quartier est précisément l'instrument par excellence qui permet non seulement de procéder à l'élargissement des voies, d'imposer des passages piétons ou autres à travers un lotissement, mais encore - ce qui n'est pas négligeable pour les communes - d'obtenir gratuitement les cessions nécessaires.

Je le dis d'autant plus volontiers - mais peut-être que cela ne vous intéresse pas sur les bancs d'en face - que chaque fois que les communes devaient élargir un chemin communal, à l'occasion d'une requête en autorisation de construire, elles demandaient une cession gratuite du propriétaire. Mais il est évident que cette cession gratuite ne peut pas être imposée dans le cadre d'une autorisation de construire ordinaire. Il fallait donc constamment expliquer aux communes que c'était une exigence à laquelle elles ne pouvaient pas prétendre. Par contre, dans le cadre d'un plan localisé de quartier, l'élargissement des dessertes, qui sera certainement nécessaire pour des projets de cette importance, peut se faire sous forme de cession gratuite. L'intérêt est donc évident pour les communes.

Il y a un moment où le dogmatisme de certains dans ce domaine devrait être dépassé pour penser aux intérêts collectifs que représente le plan localisé de quartier !

M. Pierre Meyll (AdG). (L'orateur est annoncé par la présidente.)

M. Claude Blanc. Encore !

M. Pierre Meyll. Encore, Monsieur Blanc ! On vous supporte bien ! Il faut que vous me supportiez aussi ! Après ce petit «blanc», nous allons passer à quelque chose de plus sérieux !

Je voudrais vous citer les propos de M. Gainon, cela sans violer les secrets de fonction d'une commission. Je lis textuellement ce que dit le rapport du 7 septembre 1994, je cite :

«Un projet à 0,4 en zone villa provoquerait des réactions pouvant déclencher des recours de longue durée, ce qui ne se produirait pas avec un PLQ. C'est donc un gain de temps pour la suite de la procédure.».

C'est donc une réponse aux propos de M. Koechlin qui prétend que cette mesure risquerait de retarder les projets et que ce ne serait pas supportable. Cette réponse me paraît suffisamment convaincante pour que le plan localisé de quartier soit adopté !

M. René Koechlin (L). A entendre M. Grobet, j'ai cru qu'il était le seul à se nourrir d'illusions, mais je me rends compte que c'est aussi le cas de M. Meyll ! Cela ne m'étonne pas ! M. Grobet croit, à tort, qu'un plan localisé de quartier résout tous les problèmes et qu'il permet de gagner du temps. Vous êtes pourtant bien placé, Monsieur, pour savoir que ces plans localisés de quartier subissent des procédures qui durent des années et qu'ils sont de la sorte dissuasifs pour les propriétaires qui doivent s'y plier. C'est une évidence. Pas un seul constructeur dans cette salle ne pourrait me contredire, Monsieur !

Nous sommes confrontés à un cas particulier dans lequel la zone n'est pas modifiée et où le plan localisé de quartier n'est pas obligatoire. Dès lors, pour quelques différences de densité, le propriétaire, plutôt que d'attendre les interminables procédures engendrées par un plan localisé de quartier, préférera construire avec une densité moindre, mais rapidement. Le projet de loi que nous proposons ce soir risque de rester lettre morte. C'est donc une illusion de croire que les propriétaires seront incités à utiliser cette possibilité si on leur impose un plan localisé de quartier.

Un tel plan se justifie pleinement, Monsieur Grobet, dans les zones de développement qui ont subi un déclassement et dans lesquelles les densités sont fondamentalement modifiées, où l'on passe d'un 0,2 d'une zone villa, ou d'un 0,0 d'une zone agricole, au 1,2 ou 1,5 d'une zone de développement. C'est évidemment une énorme différence qui implique nécessairement une mesure d'urbanisation radicale, laquelle n'est possible qu'à travers un plan localisé de quartier. Dans un tel cas, il est normal qu'il soit obligatoire. Par contre, dans le cas que nous traitons ce soir, cela est superflu et serait dissuasif, allant à fins contraires du projet de loi. Je comprends que vous le préconisiez, car, probablement, vous voudriez que cette loi ne soit jamais appliquée !

Monsieur Meyll, si vous croyez qu'un plan localisé de quartier vous prémunit d'éventuels recours, vous vous trompez ! C'est exactement le contraire qui se passe. Les plans localisés de quartier ne cessent de les provoquer tous azimuts. Les recourants contre un plan localisé de quartier, s'ils n'ont pas obtenu satisfaction après des mois et des années de procédure, interjettent un nouveau recours au moment de l'autorisation de construire pour des questions de détail qui n'ont plus trait au plan localisé de quartier; ils trouvent toujours moyen de le faire pour un simple abattage d'arbre, ou autre.

Le plan localisé de quartier est souvent une occasion supplémentaire pour des voisins «mal embouchés» de recourir contre un projet. Vous vous nourrissez d'illusions en croyant qu'un tel plan permet d'éviter des recours !

M. Pierre Meyll (AdG). Je suis navré, Madame la présidente, de m'adresser à M. Koechlin, mais il m'a directement interpellé !

Monsieur Koechlin, soyez logique ! Je ne crois pas qu'un promoteur refuserait la possibilité d'augmenter, voire de doubler, son taux d'occupation des sols, ou même, dans le plus mauvais des cas, de l'augmenter d'un tiers. Pourtant, c'est ce qui se produirait d'après vous. Il nous est arrivé, à la commune de Versoix, d'avoir des problèmes très sérieux en remontant le taux d'occupation des sols à 0,3 seulement, et vous le savez fort bien ! Un plan localisé de quartier permet de travailler en toute connaissance de cause, mais vous voulez l'ignorer ! Je me demande bien pourquoi, car c'est la condition sine qua non qui permet un développement normal, régulier et qui soit contrôlé sans léser les intérêts communaux.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Il faut d'abord souligner que ce projet de loi a été approuvé par la commission d'aménagement du canton par 12 oui, 2 non et 1 abstention, et qu'il a rencontré l'adhésion de notre département et de la direction de l'aménagement.

En ce qui concerne le problème de la densification, il est connu que la densité 0,3 n'est pas très rentable dans le rapport/terrain construction et que la meilleure densité pour des immeubles intermédiaires entre la villa et des blocs locatifs est de 0,4. Il existe de très beaux exemples d'habitats qui ont été réalisés dans ce domaine, dans toute la Suisse et aussi en Suisse romande. Ce taux de 0,4 correspond à un seuil de rapport/qualité entre le terrain et la construction qui est optimal pour tout le monde, puisqu'il permet de garder la substance et l'habitabilité dans le quartier de villas, tout en augmentant notablement le nombre d'appartements créés.

Depuis mon entrée en fonctions, tous les plans de quartier, tous les changements d'affectation que l'on a voulu faire pour passer d'une densité de 0,2 à 1,2 se heurtent à une opposition farouche de tous les habitants, quel que soit le quartier. Il est donc utile - le député Richardet avait raison de faire cette proposition de motion - de chercher une forme d'urbanisme transitoire à trente ans qui permette de faire cohabiter des constructions un peu plus importantes que de simples villas et de passer ainsi à une urbanisation différente. La thèse selon laquelle on peut construire des immeubles sur des terrains importants, comme l'a dit M. Dupraz, est tout à fait juste, même s'ils sont situés en zone villa. Malheureusement, la réalité est toute autre. Dès qu'un promoteur possède trois ou quatre terrains et des parcelles de l'ordre de 4 000 m2, il veut construire un bahut de 1,2 de densité, c'est-à-dire deux rez, plus sept étages, plus attique, ce qui donne les chocs et les oppositions que nous connaissons.

Pour ces raisons, je vous propose de voter le projet de loi tel qu'il vous a été soumis.

M. Pierre Meyll (AdG). Je dois contester...

Une voix. C'est la quatrième fois !

M. Pierre Meyll. Ce serait même la sixième, ce ne serait pas suffisant pour arriver à vous convaincre. Je continuerai tout de même !

Monsieur Joye, vous répondez à côté de la question. Vous ne parlez pas des plans localisés de quartier. Il est clair, d'autant plus après ce que vous avez dit, qu'il faudra des plans localisés de quartier dans les zones situées à proximité des grands ensembles, lorsque les voies de communication ne sont plus conformes, et, de ce fait, il sera nécessaire d'intervenir. J'ai abordé les «petits» problèmes communaux - vous ne répondez pas à ma question - mais c'est le développement de la commune qui en souffre dans beaucoup de circonstances. Les plans localisés de quartier sont d'autant plus nécessaires pour les terrains proches des zones de déclassement et des zones habitées.

La présidente. Monsieur Meyll, vous savez que notre nouveau règlement prévoit que l'on ne peut pas prendre la parole plus de trois fois, sauf si on a été mis en cause. Vous ne l'avez pas été, pourtant je vous ai accordé la parole, mais, je vous en prie, respectez le règlement à l'avenir !

M. Pierre Meyll. Je vous remercie, Madame la présidente !

M. John Dupraz (R). Je ne saurais me satisfaire de la réponse de M. Joye !

Je ne sais pas si vous connaissez un peu l'histoire de l'aménagement de ce canton et les problèmes d'urbanisme que nous avons connus. J'aimerais simplement vous citer l'exemple du quartier des Mouilles à Lancy où les procédures ont été nombreuses. Contre l'avis de tout le monde - des opposants, des habitants du quartier, de la commune - le Conseil d'Etat, de guerre lasse, a répondu que, puisque même sur une basse densification les gens n'étaient pas d'accord, il faisait table rase de tout cela et repartait sur un taux de 1,2. Le Conseil d'Etat de l'époque - y compris M. Grobet, qui a bien des défauts mais qui a quand même certaines qualités - a eu ce courage. Actuellement, qui parle du quartier des Mouilles ? Personne ! C'est une réalisation urbanistique exemplaire !

Je ne souhaite pas que ce projet de loi soit une solution de facilité pour appliquer un taux de 0,4, voire de 0,8, à ces terrains en zone villa, en périphérie de la zone urbaine.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. M. Dupraz évoque ses souvenirs. Il devrait venir avec moi se promener devant les assemblées communales, lorsqu'il faut résister à deux cent cinquante personnes et leur expliquer ce qui se passe. Votre voisine de gauche pourra témoigner de ce que cela signifie. Le quartier des Mouilles est une histoire qui a vingt d'âge et deux bâtiments ont été construits après cette affaire, Monsieur Dupraz. Alors, s'il vous plaît, occupez-vous d'agriculture, vous serez plus compétent ! (Sifflets, chahut.)

Monsieur Meyll, la commune peut autoriser un projet de construction, exceptionnellement, sous forme d'une délibération municipale et après consultation de la commission d'architecture. Ces moyens sont largement suffisants vu la densité du contrôle réel effectué par l'ensemble des partenaires, de la population et des groupes de pression de toute nature. Nous sommes tout à fait couverts et nous n'avons pas de crainte à avoir dans ce domaine !

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Annen, vous pourriez réagir de la même façon vis-à-vis des députés de vos rangs qui s'expriment sur ce point.

Je remercie M. Dupraz. Ce taux de densité de 0,4 devrait être limité à des cas exceptionnels. En effet, si un terrain est suffisamment important, il faudrait tout de même arriver à concocter des projets plus cohérents que ce qu'il est possible de faire avec un taux de 0,4. Je m'étonne que M. Joye évoque des bahuts de six ou sept étages pour du 1,2. On sait qu'avec ce taux on peut réaliser des projets de deux ou de trois niveaux sur rez-de-chaussée, donc des immeubles qui s'intègrent parfaitement bien à l'environnement.

Monsieur Joye, je reconnais qu'il n'est pas toujours aisé de défendre les projets de densification. Je suis très heureux que M. Dupraz reconnaisse aujourd'hui le geste urbanistique exemplaire que représente le quartier des Mouilles. Je souligne qu'à l'époque, Monsieur Dupraz, vous n'en faisiez probablement pas partie, mais je me souviens de M. Blanc et d'autres qui vociféraient au sujet de ce projet que vous qualifiez d'exemplaire ! Sans nul doute, M. Joye bénéficiera d'un appui plus solide au niveau du parlement que son prédécesseur n'en disposait ! Vous devriez vous sentir encouragé, Monsieur Joye, dans ces assemblées publiques et prêcher la bonne parole pour arriver à un urbanisme cohérent.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je fais toutes mes amitiés à M. John Dupraz, et je lui concède le droit de prendre la parole en matière d'aménagement du territoire, domaine dans lequel il est très compétent ! (Rires.) Ayant dit cela, je rappelle encore une fois qu'en réalité, contrairement à ce que dit M. Grobet, on ne peut pas construire un rez plus deux étages avec un taux de 1,2. C'est tout simplement illusoire et impossible !

Le projet qui nous est soumis est véritablement raisonnable, puisqu'il peut s'intégrer dans des infrastructures existantes de routes, telles qu'on les connaît ici, et permet à la commune de faire ses vérifications elle-même et de décider là où les choses sont possibles ou non. Par exemple, un développement de ce genre ne serait pas possible à Corsier-Port. L'évolution de quartiers de villas doit être dirigée au coup par coup. Cela ne sert à rien de vouloir prescrire des règlements et des plans localisés de quartier supplémentaires, qui ne font que retarder encore davantage le processus. Tous les plans de quartier dont je m'occupe ont en moyenne six à sept ans d'âge. C'est beaucoup trop pour être efficaces !

Ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Le titre et le préambule sont adoptés.

Article unique (souligné)

Art. 59, al. 4, lettre b (nouvelle teneur)

La présidente. Je mets aux voix l'amendement déposé par M. Meyll visant à remplacer à l'avant-dernière ligne de la lettre b, : «n'excède pas 40%» par «30%» et de compléter cet alinéa par la phrase suivante :

«Ce taux peut être porté à 40% de la surface du terrain moyennant l'adoption préalable d'un PLQ en conformité à la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers et localités du 9 mars 1929.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Cet article est adopté, de même que l'article 75, alinéas 1 et 3 (nouvelle teneur).

L'article unique (souligné) est adopté

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

modifiant la loi d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses

(L 5 1)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988 est modifiée comme suit:

Art. 59, al. 4, lettre b (nouvelle teneur)

b) peut autoriser exceptionnellement, avec l'accord de la commune, exprimé sous la forme d'une délibération municipale, et après consultation de la commission d'architecture, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40% de la surface du terrain.

Art. 75, al. 1 et 3 (nouvelle teneur)

1 Chaque construction ne peut pas comporter en principe plus de 4 logements,

3 Le département peut accorder des dérogations pour des constructions édifiées en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé.

 

La séance est levée à 23 h 25.