République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 octobre 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 10e session - 39e séance
M 544-A
Rappel du texte
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
qu'aux termes d'une convention conclue avec la Confédération pour régler les modalités de leur mise à disposition, le canton de Genève s'est engagé à maintenir, en permanence et à ses frais, les bâtiments et installations dont il est propriétaire dans le périmètre de la caserne des Vernets dans un état parfait et approprié aux besoins de la troupe;
qu'au-delà des redevances contractuelles qu'elle verse annuellement au canton pour l'utilisation de ces infrastructures, la Confédération s'est déclarée disposée à participer, dans une mesure demeurant à déterminer, au financement de travaux plus fondamentaux d'adaptation et de rénovation des casernes, lesquels s'avèrent chaque jour plus urgents;
que, déférant au voeu du canton, la Confédération a - conformément aux dispositions de la convention précitée - donné son accord à l'implantation de la halle technique destinée à compléter l'équipement de l'arsenal à l'intérieur du périmètre de la caserne des Vernets, subordonnant toutefois son consentement à une étude et à une prise en considération conjointes des besoins de la place d'armes et du canton;
que, constatant qu'aucun fait nouveau n'était intervenu depuis la signification de cet accord de principe (26 novembre 1987), la Confédération a, pour des raisons de planification financière, récemment interpellé le canton en le priant de la renseigner sur l'état de question,
invite le Conseil d'Etat
à poursuivre sans plus attendre, et en étroite collaboration avec les organes compétents de la Confédération, les études et négociations requises pour l'avancement de ce dossier;
à le tenir dans les meilleurs délais informé du calendrier probable de réalisation des travaux envisagés et à lui présenter en temps et lieu les demandes de crédits d'étude et de construction nécessaires.
RÉPONSE DU CONSEIL D'ÉTAT
L'assainissement et l'adaptation de la caserne des Vernets, construite en 1958, figurent depuis plus d'une décennie au nombre des préoccupations majeures du département militaire.
Un groupe de projet fut constitué en 1987, composé de représentants des administrations fédérales et cantonales intéressées.
Ce groupe fut chargé d'élaborer le concept général de l'opération et d'établir un catalogue des besoins basés sur l'évolution des impératifs de l'instruction et des changements intervenus dans les habitudes civiles et les mentalités des occupants de la caserne et de le faire approuver par la Confédération.
Dans le courant de l'année 1988, la construction d'un nouveau dépôt de matériel dans la cours de l'arsenal devenait prioritaire et ralentissait, de ce fait, l'étude du projet d'assainissement des casernes.
Le projet de loi 6411, ouvrant un crédit pour la construction d'un dépôt à l'arsenal cantonal de Genève, fut voté par le Grand Conseil le 25 janvier 1990 et attaqué ensuite par voie référendaire.
Confronté aux contraintes budgétaires que l'on connaît, le Conseil d'Etat fut, à la même époque, amené à revoir l'ensemble des projets de construction de l'Etat afin de définir leur degré d'urgence et d'en revoir le programme en fonction des strictes nécessités.
C'est ainsi qu'il décida de renoncer à la réalisation de ce dépôt et retira son projet; le Grand Conseil accepta le 9 novembre 1990 la loi 6628 abrogeant la loi 6411 votée le 25 janvier 1990.
En janvier 1989, le groupe de projet, comprenant des représentants de l'Etat-major du groupement de l'instruction, de l'office des constructions fédérales, du commandement de la place d'armes, des départements militaire et des travaux publics et de l'association d'architectes mandatés, repris son travail et tint 9 séances jusqu'à fin octobre 1990.
A cette date, un projet satisfaisant avec descriptif des travaux projetés dans les bâtiments de la troupe, de l'infirmerie et des officiers était présenté, dont le coût estimatif était de 22,5 millions de francs.
Une telle opération d'assainissement ne pouvait être que fractionnée et son étalement sur une période de 10 à 15 ans devenait inévitable compte tenu des problèmes de financement.
La Confédération envisageait plusieurs variantes de financement de l'assainissement de la caserne des Vernets, la variante retenue étant directement liée à une prorogation de la convention des 23 octobre 1985/6 février 1986 concernant l'utilisation de la place d'armes de Genève.
Dans la perspective d'une participation fédérale qui aurait pu se monter à près de 75% du coût total des travaux, le Conseil d'Etat donna son accord le 21 février 1990 à la prorogation de la convention actuelle jusqu'au 31 décembre 2090.
En mars 1991, l'Etat-major du groupement de l'instruction informait le département militaire cantonal qu'en fonction de nouvelles directives internes au DMF, l'ensemble du projet devait être inclus dans un message du Conseil fédéral aux Chambres concernant les ouvrages militaires de l'année 1995 au plus tôt.
En mai 1993, cette même instance précisait au département militaire cantonal qu'en raison de la détérioration des finances de la Confédération et compte tenu de nouvelles priorités, elle repoussait l'assainissement de la caserne des Vernets à l'an 2000.
Lors d'une séance de travail du groupe de projet, tenue le 21 juin 1994, il a été pris note que la Confédération envisageait de financer la construction anticipée de l'abris pour troupes PA, qui sera utilisé comme local de matériel pour les troupes faisant service en caserne.
La construction, d'une durée de 4 à 6 mois, devrait intervenir en 1995 ou 1996 et sera susceptible de modifier le catalogue final des besoins.
De plus, une étude de faisabilité, financée par la Confédération, sera faite pour l'adaptation du rez-de-chaussée du bâtiment infirmerie avec, pour priorité, une salle de cinéma, une salle d'instruction, un local de garde.
Conclusion
Le Conseil d'Etat poursuivra, en étroite collaboration avec les services compétents de la Confédération, toutes les études et négociations indispensables pour faire avancer les travaux d'assainissement de la caserne des Vernets.
Débat
M. Luc Gilly (AdG). Assainissement : c'est vraiment le mot qui convient pour la caserne des Vernets ! Située en pleine ville, elle pourrait être destinée au logement, ce qui serait plus utile. Dans la motion que j'avais déposée l'an dernier, je souhaitais qu'on laisse un peu de place aux sans-abri; nous en aurons encore besoin cette année !
Je reviens à notre rapport. En février 1990, le groupe «Pour une Suisse sans armée» avait lancé un référendum contre ces crédits d'équipement, lequel avait obtenu le nombre de signatures nécessaire. Les contraintes budgétaires de l'époque avaient déjà obligé le département à revoir tous les programmes, en fonction des strictes nécessités d'équipement; c'est ce qui est dit également dans le rapport. Le vote sur ces crédits n'a donc pas eu lieu. Aujourd'hui, en octobre 1994, le budget genevois et le budget de la Confédération sont au plus mal - Kaspar Villiger l'a encore rappelé hier très clairement. Va-t-on encore gaspiller des millions de francs pour des ouvrages militaires à Genève ?
Plus de 4 milliards ont été attribués aux avions F/A-18 que l'on n'utilisera jamais, même pas pour arrêter une future et probable «excursion nucléaire» venant de Creys-Malville ! Ce soir, je me demande quel sera le prix des futures constructions inutiles et des rénovations, puisque le rapport du Conseil d'Etat n'en parle pas. Je voudrais donc obtenir des données précises et chiffrées des projets engagés indiqués dans le rapport.
Nous vous proposons, évidemment, le rejet de cette motion pour la renvoyer au musée des horreurs !
Le président. Ce n'est pas une proposition de motion, mais un rapport du Conseil d'Etat.
M. Luc Gilly. Le rapport doit être renvoyé au musée des erreurs ou des horreurs, au choix !
M. Max Schneider (Ve). Je reviens sur une intervention de M. Guy Loutan, notre ex-collègue, qui nous démontrait, lors de la présentation de cette motion au Grand Conseil, que les soldats suisses ne sont pas des mauviettes et qu'ils peuvent vivre dans des conditions d'entraînement au combat. Il disait également que, puisque nous n'avons pas de guerre chez nous, les soldats pourraient vivre dans des casernes moins luxueuses à Genève. Cette motion était donc malvenue. Malheureusement, comme bien souvent, nous étions en minorité et voilà que, quelques années plus tard, on répond à cette motion.
J'ai rendu mes effets militaires il y a moins de quinze jours, avec mon cher collègue Laurent Rebeaud, en présence de notre conseiller d'Etat préféré... (Rires et quolibets.) La caserne des Vernets est merveilleuse. Elle est bien construite, les murs tiennent debout, et - sérieusement - j'estime que c'est un bâtiment de luxe. Moi, je ne vis pas dans un immeuble de ce standing et, pourtant, je vis et je me porte très bien ! A mon avis, cette caserne ne justifie pas d'investissements pendant des années encore. Il me semble que bien d'autres objets sont prioritaires dans notre République.
Allez voir la halle de «gym» de la caserne des Vernets, dans laquelle la cérémonie s'est déroulée ! Elle devrait être ouverte au public et l'ensemble de la population des Acacias devrait pouvoir en bénéficier... (Rires.) Les jeunes pourraient y donner des concerts. Je pense sérieusement que cette caserne devrait être restituée aux citoyens genevois pour qu'ils puissent y organiser des fêtes et non plus des entraînements guerriers inutiles. En tout cas, il est parfaitement inutile de faire le moindre investissement militaire dans ce truc-là ! (Bravos et applaudissements.)
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.