République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 octobre 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 10e session - 38e séance -autres séances de la session
No 38
Vendredi 21 octobre 1994,
soir
Présidence :
M. Hervé Burdet,président
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Olivier Vodoz, Jean-Philippe Maitre, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Dominique Belli, Fabienne Blanc-Kühn, Erica Deuber-Pauli, Nelly Guichard, Armand Lombard, Olivier Lorenzini, Olivier Vaucher et Nicolas Von der Weid, députés.
3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
Le président. A la demande de M. Guy-Olivier Segond, le point 81 de notre ordre du jour sera traité ce soir. Il s'agit, semble-t-il, d'un simple renvoi en commission.
Par ailleurs, je vous rappelle que le point 59 sera traité ce jour même en raison de son urgence.
4. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président, la commission des pétitions du Grand Conseil s'est réunie à 5 reprises, les 28 mars, 18 avril,9 mai, 16 mai et 30 mai 1994. Elle a entendu successivement les parties en présence ainsi que Me Mauro Poggia, avocat de la famille Wetzel et consorts. Elle a entendu également M. André Hediger, conseiller administratif de la Ville de Genève dont le dicastère coiffe le domaine public, ainsi queM. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat chargé du département de justice et police et des transports, assisté de M. Jean Lottaz, directeur des services financiers du même département.
Les pétitionnaires, en les personnes de M. Reynald Wetzel, de son épouse Mme Andrée Wetzel, de M. Jean-Claude Schauerjans et de M. Louis Bergdorf estiment qu'il y a deux poids et deux mesures dans la répartition des emplacements pour les métiers forains lors des différentes manifestations à Genève. Il semble qu'il n'y ait pas de gros problèmes pour les principales de celles-ci, telles les Fêtes de Genève ou celles qui ont lieu sur la plaine de Plainpalais (fêtes de l'An, Salon de l'auto, fêtes de Pâques) mais que les litiges surviennent lors du 14 juillet et du 1er Août surtout. Il y aurait également des problèmes pour les ponts de Saint-Gervais et Clair-Bois. La commémoration du 700e anniversaire de la Confédération avait donné lieu également à des discussions très vives. Ils se plaignent de l'hégémonie qu'exerce, dans les manifestations sujettes à problèmes, M. Fernand Moënnat, qui n'est pas issu d'une famille de forains mais est une pièce rapportée, ayant épousé une foraine. Celui-ci collabore habituellement avec M. Jacky Farine (dit Jack Yfar), imprésario connu et ancien député, en particulier pour les fêtes du14 juillet organisées par les Français de Genève, qui les ont mandatés pour ce faire. A cette occasion, M. Moënnat place tous ses métiers et ceux de sa famille (et de ses amis), ne laissant que la portion congrue à tous les autres forains, dont en particulier la famille Wetzel.
Les pétitionnaires aimeraient que les places de ces manifestations soient attribuées par le domaine public de la Ville de Genève pour éviter que certaines associations (privées ou semi-privées) organisatrices ne fassent jouer des relations particulières qu'elles entretiennent avec certains forains. Ils nous ont répété plusieurs fois qu'il s'agit d'une question de principe et pas d'intérêts bassement financiers car ils estiment que chacun a le droit de gagner son pain mais de manière équitable. Par contre, les Fêtes des promotions ne semblent pas poser de problème, les communes s'assurant toutes le concours de certains forains et ayant parfois même de la peine à trouver des carrousels disponibles.
Le 18 avril 1994, c'est M. André Hediger, conseiller administratif de la Ville de Genève, qui est venu en personne se faire entendre pour les problèmes du domaine public. Il nous a renseignés sur les questions d'autorisations, données par le département de justice et police et des transports, il nous informe que la Ville met un périmètre à disposition des forains et que ceux-ci doivent s'arranger entre eux ensuite pour la répartition des différents métiers. M. Hediger nous dit que le domaine public n'a pas de rapports directs avec les forains mais avec les comités de diverses manifestations seules. La Ville ne reçoit pas de royalties des forains mais une simple redevance au m2 plus l'électricité et l'eau. Il nous fait clairement savoir qu'en dehors du règlement régissant les installations des divers métiers, il ne tient pas à se mêler des différends entre forains et que c'est à eux de trouver un modus vivendi. Ledit règlement nous a d'ailleurs été transmis par les pétitionnaires eux-mêmes et vous le trouverez en annexe.
Le 9 mai 1994, c'est au tour de Me Mauro Poggia, avocat des pétitionnaires, d'être entendu. Celui-ci confirme ce que nous savions déjà, c'est-à-dire que le litige concerne surtout la Fête du 14 juillet et le monopole que s'en attribuent MM. Moënnat et Yfar. Comme le problème reste une affaire de droit public, il souhaiterait qu'une personne du domaine public de la Ville fasse le coordinateur neutre pour les attributions de places au lieu de MM. Moënnat et Yfar, qui sont en fait juge et partie dans cette affaire. Une commissaire constate que cela marche partout où ne sont pas ces deux messieurs.
Ceux-ci sont entendus à leur tour le 16 mai 1994 et nient tout ce qui leur est reproché par les pétitionnaires, leur attribuant à eux tous les torts. Ils insistent beaucoup sur le fait qu'ils doivent favoriser les contribuables genevois, arguant que les Wetzel sont en partie domiciliés sur le canton de Vaud. Or, vérification faite, M. Reynald Wetzel et son fils aîné Frank sont bien domiciliés à Versoix et payent leurs contributions publiques à Genève. M. Moënnat prétend aussi que les Wetzel ne sont pas des gens du voyage, allégation qui ne résiste pas à l'examen, la famille Wetzel étant foraine depuis le XIXe siècle et Mme Andrée Wetzel venant d'une famille du cirque.
Enfin, le 30 mai 1994, c'est au tour de M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat chargé du département de justice et police et des transports et ancien maire de Versoix, d'être entendu. De lui, nous apprenons les différentes ethnies et catégories qui constituent les gens du voyage. Il trouve regrettable que la Ville et certaines organisations aient confié la distribution des emplacements à M. Moënnat, qui semble bel et bien favoriser les amis de son clan. Mais ni l'Etat ni la Ville ne sont compétents pour régler ce litige.
Après avoir écouté patiemment tous ces intervenants, la commission estime qu'il est bien difficile d'agir dans un domaine si particulier dont les coutumes sont en dehors des normes habituelles. Les commissaires présents estiment qu'ils ne peuvent s'ériger en tribunal et que la parole des uns vaut peut-être bien celle des autres.
A titre d'information, une pétition semblable a été adressée au Conseil municipal de la Ville de Genève le 16 septembre 1993, qui a été classée par la commission des pétitions dudit Conseil en date du 28 mars 1994, ainsi qu'une pétition de la partie adverse (M. Moënnat), qui a subi le même sort le 28 mars 1994, tout cela assorti d'un postulat demandant au Conseil administratif de revoir le règlement idoine afin de l'adapter à la réalité de la pratique actuelle.
Elle vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, par 15 voix, soit la totalité des membres présents, de bien vouloir déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement, tout en souhaitant que les forains, qui par ailleurs sont des gens actifs et qui méritent de gagner leur vie, arrivent à créer une association unique et représentative sur Genève, qui puisse prendre en main l'organisation interne et la distribution des emplacements lors de toute les manifestations auxquelles ils participent sur le territoire de la République, afin que ces querellles mesquines cessent et que la paix revienne parmi eux.
Annexes:
- Pétition 1023
- Pétition 323 A (au Conseil municipal de la Ville de Genève)
- Règlement concernant les fêtes foraines, de la Ville de Genève
ANNEXE
Secrétariat du Grand Conseil
Dépôt: 9 février 1994
P 1023
PÉTITION
sur l'égalité de traitement entre les forains
Je vous informe être chargé de la défense des intérêts de nombreux forains genevois, lesquels rencontrent systématiquement des difficultés à exercer leur profession dans le canton, dans le cadre des manifestations organisées par la Ville de Genève.
Je vous remets en annexe copie de la pétition qui avait été adressée, le 16 septembre 1993, à la commission des pétitions du Conseil municipal de la Ville de Genève, avec ses annexes.
En résumé, mes clients demandent, afin que l'égalité de traitement entre les forains soit respectée, que le placement sur le domaine public de la Ville ait lieu sous le contrôle du Service du domaine public.
En effet, ce sont systématiquement des associations privées, voire des particuliers, qui se voient déléguer ce pouvoir, dont ils abusent en faisant jouer les relations particulières qu'ils entretiennent avec tel ou tel forain.
Cette situation n'est pas acceptable, car mes clients sont contribuables du canton et doivent pouvoir gagner leur vie normalement, sans chicane particulière et sans devoir, chaque fois, déployer une énergie démesurée, pour obtenir ne serait-ce que la reconnaissance de leurs droits au travail.
Dans la mesure où la Ville de Genève n'a pas encore pris position et risque fort de ne pas le faire, même si une délégation de mes clients a été aimablement reçue, je vous remercie de bien vouloir transmettre la préoccupation de mes clients à la commission des pétitions du Grand Conseil, afin que ce principe soit consacré non seulement lorsque les manifestations ont lieu sur le domaine public de la Ville de Genève, mais également des autres communes du canton.
Je reste évidemment à votre disposition, avec mes clients, pour vous exposer de vive voix leurs préoccupations.
En vous remerciant de la bienveillante attention que vous porterez à la présente, je vous prie de croire, Monsieur le président du Grand Conseil, à l'assurance de ma parfaite considération.
N. B.: 1 signataire
Mauro Poggia, avocat
Rue du Rhône 29
1204 Genève
ANNEXE
ANNEXE
ANNEXE
ANNEXE
ANNEXE
Débat
M. Henri Gougler (L), rapporteur. Je rappelle que semblable pétition avait été adressée en son temps au Conseil municipal de la Ville de Genève, laquelle avait été purement et simplement classée.
Notre commission a été plus nuancée et l'a trouvée digne d'intérêt. Par contre, elle s'est estimée incompétente pour agir dans ce domaine. Elle a donc préféré la déposer sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement. Toutefois, ces débats auront abouti à un résultat qui semble assez concret, je veux parler de la création d'une association cantonale des forains et étalagistes genevois, dont le but sera de régler le problème des places dans les diverses fêtes du canton.
Je demande donc à l'assemblée de bien vouloir accepter ce rapport et son dépôt à titre de renseignement sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
1. Le 20 octobre 1989, vers 23 h, un incendie volontaire détruisait la porte palière des locaux de l'Université ouvrière de Genève (UOG) au1er étage du no 9 de la rue Simon-Durand, dans un immeuble abritant également, au 2e étage, le Centre de contact Suisses-Immigrés (CCSI).
Cet acte criminel, survenant alors que des manifestations xénophobes et des attentats contre des requérants d'asile commençaient à se multiplier dans notre pays, suscitait un vif émoi au sein de la population, l'UOG et surtout, le CCSI travaillant en effet tous deux à promouvoir l'intégration des étrangers dans notre société.
Le 8 novembre 1989, M. Gérald Crettenand, coordinateur du CCSI, et 879 autres personnes déposèrent une pétition demandant que tout soit mis en oeuvre pour identifier les auteurs de l'attentat et qu'une enquête approfondie soit menée dans les milieux de l'extrême-droite locale dans un but de prévention de tels actes.
Entendus par la commission des pétitions, les représentants du CCSI firent part de leur inquiétude face à la montée de la violence et de l'intolérance à Genève et dans le reste de la Suisse. Pour sa partM. Laurent Walpen, chef de la police, indiqua que cette dernière avait poussé ses investigations jusque dans les milieux extrémistes puisqu'il existait de fortes présomptions, mais pas de certitude, que cet acte ait été commis par des personnes proches de ces milieux. Il ajouta que l'enquête préliminaire était terminée et que le dossier avait été transmis au Parquet, qui jugerait de la suite à donner à cette affaire.
Dans son rapport du 30 mars 1990, la commission des pétitions souligna qu'en agressant des associations telles que le CCSI, les auteurs de ces attentats tentaient de créer un climat de peur et de méfiance en ouvrant la voie à l'intolérance, avec tous les abus et les injustices qu'elle engendre. Elle exprima son inquiétude face à la montée de la violence dans notre pays, des manifestations racistes et xénophobes et des issues qu'elles avaient eues dans d'autres cantons. Elle émit l'avis que, par l'éducation dès le plus jeune âge, on devrait inculquer le respect des autres et apprendre à admettre et à tolérer les différences. Dans cet esprit, la commission des pétitions proposa au Grand Conseil de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, afin qu'il entreprenne toutes les démarches en son pouvoir pour faire toute la lumière sur cette affaire et indique les mesures qu'il entendait prendre pour éviter les excès de racisme dans notre canton (P 848-A). Cette pétition fut renvoyée au Conseil d'Etat le 17 mai 1990.
2. L'exercice de l'action publique étant du ressort du procureur général (art. 4 du code de procédure pénale, CPP), à qui la police judiciaire est subordonnée (art. 104 CPP), le Conseil d'Etat, par l'intermédiaire du chef du département de justice et police, a interpellé le Ministère public sur les suites données à cet acte criminel. Le procureur général a répondu qu'une procédure pénale avait été ouverte sous no P 35027/89, mais qu'elle avait été classée, l'enquête préliminaire effectuée par la police n'ayant pas permis de recueillir des indices suffisants à l'encontre d'une ou plusieurs personnes déterminées.
Le Conseil d'Etat ne peut que prendre acte de ce qui précède, car il ne dispose pas de compétences ou de moyens qui lui permettent de mener des investigations indépendamment de celles conduites par les autorités instituées à cet effet.
3.a) S'agissant des mesures propres à éviter les excès de racisme à Genève, il y a lieu de relever, à l'instar des commissaires, qu'il s'agit à la base d'un problème d'éducation.
A ce sujet, on rappellera que la préparation à la vie dans une société complexe et multiculturelle qui change rapidement et s'ouvre sur l'Europe et le monde constitue une des priorités de l'école publique genevoise. Cette mission éducative doit contribuer à développer la tolérance à l'égard des minorités, des immigrés, des réfugiés et favoriser l'ouverture aux autres cultures, la défense des droits de l'homme et le refus des discriminations en tous genres.
La politique suivie en cette matière a été exposée de manière détaillée dans le rapport du Conseil d'Etat du 10 juin 1991, sur la pétition «Ecole et développement» de la jeunesse étudiante chrétienne, Genève (P 694-A), auquel il convient de se référer.
b)
Enfin, au niveau de la répression, la lutte contre les manifestations de racisme et de xénophobie passe par l'insertion dans le code pénal suisse d'une norme incriminant ces comportements.
Le Conseil d'Etat rappelle que dans sa réponse du 28 mars 1990 à la consultation ouverte à ce sujet par les départements fédéraux de justice et police et des affaires étrangères, il s'est prononcé sans réserve en faveur de l'adhésion de la Suisse à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, du 21 dé-cembre 1965 et a approuvé la révision correspondante du code pénal suisse et du code pénal militaire.
Cette dernière n'est pas encore entrée en vigueur, le référendum lancé contre elle ayant abouti.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
A la suite de la pétition qui avait été déposée en 1989 par plusieurs locataires d'un immeuble sis au No 66 de l'avenue des Grandes-Communes à Onex, votre Conseil, après en avoir débattu tant en commission qu'en séance plénière, avait décidé de renvoyer le problème évoqué et imparfaitement résolu au Conseil d'Etat.
Il s'agissait de la décision prise en séance du 29 novembre 1990.
Les conclusions qui avaient été adoptées étaient celles proposées par la commission soit: «Renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, afin qu'il mette en place un relais offrant une meilleure collaboration entre les services sociaux et la police, permettant ainsi de respecter la qualité de vie de chaque citoyen».
Le cas douloureux qui, à l'époque, avait mis en évidence, d'une façon très générale, la difficulté pour les services de police ayant reçu une plainte, de déterminer l'organe adéquat permettant d'aboutir à une solution, voire à un placement ou tout au moins à un traitement de la personne malade, celle-ci ne nécessitant toutefois pas une hospitalisation psychiatrique.
Grâce à l'excellente collaboration des deux départements intéressés, celui de l'action sociale et de la santé et celui de justice et police et des transports, il a pu être envisagé de ne pas recourir à la mise en place d'une structure supplémentaire et spécifique à ce genre de situation.
Après examen des institutions susceptibles de prêter un concours efficace, les personnes respectivemeent en charge du dossier se sont demandées si le nouveau centre de consultation pour l'aide aux victimes d'infractions, qui de toute manière devait être créé à l'occasion de l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI), ne pourrait pas, à Genève, offrir le «relais» souhaité lorsqu'il convient de faire face à des situations difficiles sur le plan social.
Il va sans dire que le but premier assigné à cet organe par le législateur fédéral est autre. Toutefois, il est apparu que la coordination nécessaire et souhaitée et jusqu'ici cruellement manquante, pourrait être exercée avec profit au sein de ce nouveau centre de consultation.
Cette idée a trouvé l'accord des deux départements intéressés et une procédure simple a d'ores et déjà été arrêtée. Elle sera affinée, en cas de besoin, à la fin d'une phase expérimentale.
Cette solution devrait donner satisfaction et éviter dans le futur que perdurent des situations analogues à celles qui ont occupé la commission des pétitions à deux reprises.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le 2 juin 1992, une première pétition relative à des problèmes de voisinage dus au comportement anormal d'une locataire habitant un immeuble de l'avenue des Libellules, à Châtelaine, avait été déposée sur le bureau de votre Conseil.
Après examen du cas évoqué et audition des parties en cause, la commission des pétitions avait rédigé un rapport P 944-A invitant Mesdames et Messieurs les députés à transmettre cette pétition au Conseil d'Etat afin que celui-ci puisse prendre les mesures médico-légales qui s'imposaient pour mettre fin à une situation intolérable pour le voisinage.
C'est alors que le Conseil de surveillance psychiatrique a été chargé d'une expertise mais il a dû constater qu'il ne lui était pas possible, en l'état de la législation, de donner suite à une affaire de cette espèce, car il ne s'agissait pas de prodiguer des soins en urgence.
En conséquence, le dossier a, à ce niveau, été classé.
Toutefois, l'évacuation de la locataire ayant été prononcée par le Parquet, ce cas particulier a pu être considéré comme liquidé.
Toutefois, il appartenait à notre Conseil de rechercher une solution, pour le futur, car des faits similaires étaient manifestement susceptibles de se reproduire.
D'ailleurs, une seconde pétition analogue avait, entre-temps, été formulée et il avait, cette fois, été demandé par votre Conseil de trouver une sorte de «relais» qui permette d'offrir une collaboration efficace entre les divers services de l'Etat, voire entre la police et les divers organismes sociaux.
C'est maintenant chose faite et nous nous permettons de considérer que le rapport P 849-B que nous avons récemment transmis à votre Conseil constitue également une réponse à la pétition 944.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:
Art. 2 A, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les présidents et vice-présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal de première instance, du Collège des juges d'instruction et de la Justice de paix sont élus par le Grand Conseil, parmi les juges de chacune de ces juridictions.
Art. 5 (nouvelle teneur)
1 Les juges de paix sont au nombre de 4, dont un président et un vice-président; ils ont, en outre, 4 suppléants. Chaque juge siège comme juge unique.
2 Un juge de paix préside la Chambre des tutelles.
Art. 75 B, al. 1 (nouvelle teneur)
1 La commission de gestion est composée du procureur général, qui la préside, des présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal administratif, du Tribunal de première instance, du Collège des juges d'instruction, de la Justice de paix et du Tribunal de la jeunesse et de l'un des présidents de la Chambre d'appel des prud'hommes, désigné par la Cour de justice, ainsi que de 2 fonctionnaires à plein temps du pouvoir judiciaire.
Art. 2
Modifications à d'autres lois
(E 2 3)
1 La loi de procédure civile, du 10 avril 1987, est modifiée comme suit:
Art. 412 (abrogé)
Art. 413 (nouvelle teneur)
Avocat d'office
1 Le président de la Chambre des tutelles transmet sans délai le dossier au président de la Justice de paix, qui examine si la désignation d'un avocat est nécessaire.
2 Dans l'affirmative, le président de la Justice de paix désigne lui-même l'avocat. Si le président de la Chambre des tutelles est en même temps président de la Justice de paix, il transmet le dossier au membre le plus ancien de cette juridiction, qui statue.
3 Les dispositions sur l'assistance juridique sont applicables.
4 Même si l'assistance juridique n'a pas été sollicitée ou accordée, l'Etat rembourse ses frais à l'avocat commis d'office et lui verse l'indemnité équitable prévue par le règlement si l'intéressé refuse de l'en défrayer. Le montant ainsi payé est recouvré par l'Etat auprès de l'intéressé.
Art. 414 (nouvelle teneur)
Appui socio-
médical
Si les circonstances le permettent, la Chambre des tutelles peut inviter l'intéressé à accepter les conseils d'un service social ou à se soumettre à un examen médical. Elle s'efforce d'amener l'intéressé à suivre le traitement préconisé ou à prendre toutes les autres mesures préventives appropriées.
** *
(E 4 1)
2 La loi instituant un Conseil supérieur de la magistrature, du 27 juin 1942, est modifiée comme suit:
Art. 2, lettre g (nouvelle teneur)
g) du président de la Justice de paix;
** *
(E 4 3)
3 La loi concernant le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire, du 26 novembre 1919, est modifiée comme suit:
Art. 4, al. 1, lettres a et b (nouvelle teneur)
a)
5% du minimum de la classe 31 pour le président de la Cour de justice, le président du Tribunal administratif, le président du Tribunal de première instance et de police, le président du Collège des juges d'instruction et le président de la Justice de paix;
b)
3% du minimum de la classe 31 pour le président du Tribunal de la jeunesse, le vice-président de la Cour de justice, le vice-président du Tribunal administratif, le vice-président du Tribunal de première instance, le vice-président du Collège des juges d'instruction et le vice-président de la Justice de paix.
Entrée en vigueur
Art. 3
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
des PL 7162 à 7167
INTRODUCTION
Dans le cadre de la réflexion demandée à tous les serviteurs de l'Etat en vue de rationaliser ses tâches, le pouvoir judiciaire a fait plusieurs propositions concernant l'administration de la justice pénale, civile et administrative.
Le volet pénal de ces propositions a déjà été partiellement réalisé grâce aux réformes que vous avez votées et la réflexion engagée se poursuit. Le Conseil d'Etat se réfère à ce sujet à son rapport du 13 octobre 1993 sur la motion 589 concernant les moyens destinés à lutter contre la criminalité économique.
Il en va de même du volet administratif. En effet, le transfert au Tribunal administratif des compétences de la Cour de justice en matière d'assurances sociales a d'ores et déjà été opéré et un groupe de travail composé de magistrats et de hauts fonctionnaires étudie actuellement la conformité de l'administration de la justice administrative dans notre canton aux exigences du droit fédéral et du droit conventionnel.
L'objet des présents projets de lois est de concrétiser les propositions du pouvoir judiciaire visant à rationaliser l'administration de la justice civile au travers d'une réorganisation de la Justice de paix et de la Chambre des tutelles et d'une modification de leurs compétences.
En plein accord avec le pouvoir judiciaire, le Conseil d'Etat soumet à votre approbation les réformes suivantes, dont certaines ont été élaborées en étroite collaboration avec la Chambre des notaires de Genève.
I. Suppression de la collégialité à la Chambre des tutelles.
II. Transfert du Tribunal de première instance à la Chambre des tutelles de la compétence pour ordonner les interdictions et les conseils légaux.
III. Transfert aux notaires des compétences de la Justice de paix en matière d'établissement des attestations d'héritier dans les successions ab intestat et de garde des testaments olographes.
IV. Transfert aux notaires des compétences de la Justice de paix en matière de mesures de sûreté relatives au dépôt et à la communication des testaments.
V. Modification de la procédure en matière d'inventaires fiscaux.
VI. Extension des compétences de la Justice de paix en matière de jugement et exigence du brevet d'avocat pour être élu juge de paix.
** *
Suppression de la collégialité à la Chambre des tutelles
INTRODUCTION
Actuellement, la Chambre des tutelles se compose de 3 juges de paix. Ces magistrats sont tenus de se réunir pour prendre, par exemple, des décisions de curatelle alors que des décisions plus importantes au niveau de l'exercice des droits civils, telles que la tutelle, sont prises par un juge unique du Tribunal de première instance.
De même, alors qu'un divorce et une mesure de curatelle instituée pour favoriser les relations personnelles entre l'enfant et le titulaire du droit de visite sont décidés par un juge unique du Tribunal, 3 juges de paix doivent se réunir pour choisir et désigner le curateur.
Observons encore, en ce qui concerne, par exemple, le droit de visite, qu'un juge unique du Tribunal de première instance décide de l'attribution des droits parentaux et du droit de visite, alors que 3 juges de paix doivent se réunir si les modalités fixées par le curateur pour ledit droit de visite sont contestées dans un cas particulier, par exemple, la quotité des vacances passées par l'enfant avec l'un ou l'autre des parents à une occasion déterminée.
La lourdeur de ce système fait perdre un temps considérable aux magistrats de la Justice de paix qui ont tous maintenant une formation de base égale à celle des autres membres du pouvoir judiciaire (brevet d'avocat).
Un changement de système s'avère donc souhaitable tant pour une meilleure rationalisation du travail que pour des motifs d'économie budgétaire puisque, actuellement, il est nécessaire de faire appel à des juges suppléants pour que la Chambre des tutelles soit dûment composée lorsque certains juges de paix sont absents ou récusés.
Il vous est donc proposé de changer la composition de la Chambre des tutelles en ramenant de 3 à 1 le nombre des juges de paix qui la composent. Cette modification, qui s'opère au travers d'une reformulation de l'article 5, alinéa 2 de la loi sur l'organisation judiciaire s'accompagne d'un toilettage des diverses dispositions faisant référence à la présidence de la Chambre des tutelles: cette dernière étant désormais composée d'un juge unique, les références à sa présidence ne se justifient plus. En parallèle, il est clairement énoncé que la Justice de paix, qui délègue ses membres pour siéger à la Chambre des tutelles, compte un président et un vice-président, à l'instar des autres juridictions.
COMMENTAIRE ARTICLE PAR ARTICLE
Loi sur l'organisation judiciaire
Art. 2 A, al. 1 (nouvelle teneur)
Un juge de paix étant délégué par ses pairs pour siéger à la Chambre des tutelles, il ne se justifie plus de faire référence à l'élection du président et du vice-président de cette instance, mais bien à celle du président et du vice-président de la Justice de paix, juridiction composée de 4 juges.
Art. 5 (nouvelle teneur)
Alinéa 1: il est fait mention du président et du vice-président de la juridiction;
Alinéa 2: la composition de la Chambre des tutelles passe de 3 juges de paix à 1.
Art. 75 B, al. 1 (nouvelle teneur)
«... de la Chambre des tutelles et de la Justice de paix» est remplacé par «de la Justice de paix», car le juge de paix siégeant à la Chambre des tutelles ne sera pas forcément le président de la Justice de paix.
Loi de procédure civile
Art. 412 (abrogé)
Cette disposition qui, en cas de péril en la demeure, confère à un juge délégué de la Chambre des tutelles un pouvoir de placement provisoire sujet à ratification n'a plus de raison d'être dès lors que l'on prévoit que cette autorité n'est plus composée que d'un juge de paix.
Art. 413 (nouvelle teneur)
Alinéas 1 et 2: la notion de «juge délégué» est supprimée.
Alinéa 3: l'adjectif «légales» est supprimé, les dispositions relatives à l'assistance juridique se trouvant non seulement dans la loi, mais également dans un règlement. En outre, ces dispositions sont directement applicables.
Alinéa 4: cette disposition est calquée sur l'article 47, alinéa 2, de la loi sur la profession d'avocat.
Art. 414 (nouvelle teneur)
La référence au juge délégué est supprimée.
Loi instituant un Conseil supérieur de la magistrature
Art. 2, lettre g (nouvelle teneur)
«Président de la Chambre des tutelles» est remplacé par «président de la Justice de paix».
Loi concernant le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire
Art. 4, al. 1, lettres a et b (nouvelle teneur)
«Président de la Chambre des tutelles» et «vice-président de la Chambre des tutelles» sont remplacés respectivement par «président de la Justice de paix» et «vice-président de la Justice de paix». En harmonie avec l'article 2, il est fait référence au minimum de la classe 31 et non plus de la classe 30 (réforme du 14 septembre 1989).
** *
Transfert du Tribunal de première instance à la Chambre des tutellesde la compétence d'ordonner les interdictions et les conseils légaux
INTRODUCTION
Le droit fédéral confère aux cantons la latitude de désigner les autorités compétentes pour prononcer l'interdiction des majeurs et déterminer la procédure à suivre (art. 373 CCS).
Dans beaucoup de cantons, ce sont des autorités purement administratives ou politiques qui prononcent ces mesures et exercent les fonctions d'autorité tutélaire. Par exemple, à Lucerne, Nidwald et Uri, le Conseil communal est autorité tutélaire et peut prononcer les interdictions. Dans la plupart des cantons, les autorités tutélaires ne comportent pas de juristes.
A Genève, l'autorité tutélaire est exercée par la Chambre des tutelles, composée de juges pouvant théoriquement être élus sans avoir de formation juridique, ce qui explique l'obligation qui leur est actuellement faite de siéger à 3. Quant aux interdictions, elles sont prononcées par un juge unique constituant une des chambres du Tribunal de première instance.
Réunir ces compétences dans les mains d'un seul juge ayant une formation juridique complète, fonctionnant à la fois comme autorité tutélaire et juge des interdictions, est tout à fait conforme au droit fédéral. On observe, par exemple, qu'à Neuchâtel, l'autorité tutélaire est composée du président du Tribunal de district et de deux assesseurs. Dans ce canton, c'est l'autorité tutélaire qui est chargée de prononcer les interdictions, les conseils légaux et les curatelles. Le président ordonne les mesures provisoires et procède seul à l'instruction. A Genève, le fait que l'interdiction soit prononcée par un juge unique ne suscite aucune critique. Nous vous proposons de transférer cette compétence du Tribunal de première instance à la Chambre des tutelles dans sa nouvelle composition, soit un juge de paix. La Chambre des tutelles sera désormais compétente non plus seulement pour nommer les tuteurs (art. 379 CCS), instituer les curatelles (art. 392 CCS) et nommer les curateurs (art. 396 CCS), mais également pour prononcer les interdictions et instituer les conseils légaux (art. 373 et 395 CCS).
COMMENTAIRE ARTICLE PAR ARTICLE
Loi d'application du code civil et du code des obligations
Art. 2, al. 2 (nouvelle teneur)
a) «survenance» remplace «surveillance» qui était le résultat d'une coquille;
b) par l'introduction de cette nouvelle disposition, la compétence pour prononcer les interdictions est transférée du Tribunal de première instance à la Chambre des tutelles;
c) il s'agit de la reprise de la lettre b) actuelle;
d) il s'agit de la reprise de la lettre c) actuelle, complétée par la mention du conseil légal;
e) à g) il s'agit de la reprise des lettres d) à f) actuelles, la lettre f) dans sa nouvelle teneur visant en outre la mainlevée de l'interdiction et du conseil légal.
Art. 8, lettre b, ch. 2 (nouveau)
Cette modification est sans rapport avec la précédente.
Lors des modifications apportées le 14 janvier 1993 à la loi d'application du code civil et du code des obligations pour tenir compte du nouveau droit de la société anonyme entré en vigueur le 1er juillet 1992, l'article 8, lettre b), chiffre 2 a été abrogé par erreur.
En effet, dans sa nouvelle teneur, l'article 699 du code des obligations prévoit comme précédemment la compétence du juge pour ordonner à la place du conseil d'administration la convocation de l'assemblée générale si un ou plusieurs actionnaires représentant ensemble 10% au moins du capital-actions le demandent.
Il vous est donc proposé de réintroduire une disposition analogue à celle abrogée par erreur.
Loi de procédure civile
Art. 406 (nouvelle teneur)
«Chambre des tutelles» remplace «le Tribunal».
Art. 407, al. 2 (nouvelle teneur) et 3 (nouveau)
Alinéa 2: il s'agit, comme dans les cas de privation de liberté à des fins d'assistance, de permettre au juge de faire nommer d'office un avocat à l'intéressé lorsque ce dernier n'en a pas et que l'assistance d'un défenseur apparaît nécessaire.
Alinéa 3: c'est la reprise de l'alinéa 2 actuel, «le Tribunal» étant remplacé par «la Chambre des tutelles».
Art. 408, al. 3 et 4 (nouvelle teneur)
«La Chambre des tutelles» remplace «Le Tribunal» dans les deux cas.
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Transfert aux notaires des compétences de la Justice paix en matière d'établissement des attestations d'héritier dans les successions ab intestat et de garde des testaments olographes
1. Le dépôt facultatif (ou remise en garde) du testament olographe
Dans certains cantons, cette compétence est déjà confiée exclusivement aux notaires (Berne, Fribourg, Tessin, Valais, Bâle-Ville).
En effet, il est courant que le testament olographe soit confié par le testateur à un tiers, banque, avocat, notaire. Les notaires tiennent d'ailleurs un répertoire des testaments qui leur sont confiés conformément à l'article 31 de la loi sur le notariat. Les notaires sont par ailleurs déjà tenus de conserver les originaux des testaments publics et des pactes successoraux qu'ils instrumentent (art. 23 de la loi sur le notariat). Les notaires fonctionnent dès lors déjà actuellement de facto comme «organe de dépôt facultatif» au sens de l'article 505 CCS et il est logique que cette compétence leur soit formellement attribuée. Cela contribuera à faciliter le moment venu l'homologation systématique des testaments auprès du registre suisse des testaments mis sur pied par le Fédération suisse des notaires.
La compétence de conserver les testaments olographes (art. 505 CCS) peut dès lors, sans préjudice pour les justiciables, être confiée exclusivement aux notaires.
A cette fin, il convient d'abroger l'article 1, lettre b, LACCS et d'introduire l'article 36 nouveau LACCS qui vous est proposé.
2. L'attestation de la qualité d'héritier ab intestat
Actuellement, la qualité d'héritier ab intestat est établie soit par un acte de notoriété dressé par un notaire (art. 35 LACCS), soit par un certificat d'héritier établi par la Justice de paix (art. 1, lettre e) LACCS par analogie).
Cette compétence peut sans dommage pour le justiciable être confiée exclusivement aux notaires, ce d'autant plus qu'un acte de notoriété se révèle de toute façon indispensable pour toutes les personnes d'origine étrangère ou naturalisées et pour lesquelles la production d'actes d'état civil jouissant de la foi publique (art. 9 CCS) n'est pas possible.
En revanche, l'établissement d'un certificat d'hérédité dans le cadre de l'article 559 CCS (héritiers institués) devrait continuer à être l'apanage du juge de paix. En effet, il ne s'agit pas là de dresser un simple état des parentèles, mais aussi de trancher diverses questions préjudicielles qui peuvent se révéler délicates. L'intervention de l'autorité judiciaire (le notaire pouvant être mandaté par l'un ou l'autre des héritiers) paraît ici devoir être conservée.
Ce transfert de compétence s'opère par le biais d'une modification de l'article 35 de la loi d'application du code civil et du code des obligations.
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Transfert aux notaires des compétences de la Justice de paix en matière de mesures de sûreté relatives au dépôt et à la communicationdes testaments
Actuellement, les mesures de sûreté relatives au dépôt et à la communication des testaments sont de la compétence exclusive de la Justice de paix (art. 1, lettre e) LACCS). D'autres cantons confient cette compétence partiellement aux notaires.
A Fribourg, l'autorité compétente pour le dépôt du testament (art. 556 CCS) est le juge de paix. L'ouverture du testament est ensuite effectuée par le juge de paix assisté du notaire et la communication aux ayants droit (art. 557 CCS) est le fait du notaire. Quant au certificat d'hérédité (art. 559 CCS), il est le fait du notaire sous l'autorité et la signature du juge de paix. A l'examen de ces dispositions, on constate que le notaire apparaît en quelque sorte comme le greffier du juge. Cette situation s'explique par le fait que dans ce canton le juge de paix n'est pas un juriste.
Un système identique existe en Valais où la compétence générale, selon les articles 556 à 559 CCS, est dévolue au juge de commune qui est obligatoirement assisté d'un notaire en qualité de greffier.
La transposition de ce système à Genève ne paraît pas opportune: elle ne ferait que compliquer la procédure au lieu de la simplifier.
Au Tessin, le testament est déposé en main d'un notaire qui l'homologue chez le «pretore», lequel procède à son ouverture. Le testament est ensuite communiqué par le notaire aux intéressés qui lui sont indiqués par le «pretore». C'est également le notaire qui procède aux éventuelles publications selon l'article 558 CCS. Un système analogue existe en France où l'homologation du Tribunal n'est toutefois pas obligatoire.
Dans un tel système, la collaboration entre le notaire et l'autorité successorale permet de décharger partiellement cette dernière des tâches de communication des testaments qui sont très fastidieuses.
Il vous est proposé d'introduire à Genève une procédure de ce type, le dépôt des dispositions testamentaires s'opérant en main du notaire qui se voit chargé de toutes les opérations d'ouverture et de communication. Seule l'homologation reste de la compétence du juge de paix ainsi que les éventuelles mesures prévues à l'article 556, alinéa 3 CCS, de même que la délivrance du certificat d'hérédité selon l'article 559 CCS. Cette solution, qui n'implique aucune modification de l'article 1, lettre e) LACCS est concrétisée par l'introduction dans la loi de procédure civile des deux nouveaux articles, numérotés 497 A et 497 B.
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Modification de la procédure en matière d'inventaires fiscaux
INTRODUCTION
Actuellement, l'inventaire après décès est régi par les articles 44 et 46 de la loi sur les droits de succession (ci-après LDS). L'article 46, alinéa 6 LDS prescrit que «l'administration de l'enregistrement et du timbre fait procéder à l'inventaire par le juge de paix ou un notaire commis par ce dernier».
L'établissement d'un inventaire fiscal ne peut être évité compte tenu des dispositions impératives de l'article 97 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct. Cette formalité est en outre souvent opportune tant pour le fisc que pour les héritiers et ne fait pas double emploi avec l'établissement ultérieur de la déclaration de succession prescrite par les articles 29 et suivants LDS. Toutefois, l'administration fiscale renonce actuellement à établir un inventaire pour les successions relativement peu importantes.
L'intervention du juge de paix en matière d'inventaires fiscaux n'est pas indispensable, alors que depuis le XVIIIe siècle, le notaire joue un rôle primordial dans l'élaboration de ces actes.
Actuellement, depuis 1974 et avec l'accord du département de justice et police et des transports, les juges de paix sont souvent suppléés par des notaires pour l'établissement des inventaires fiscaux (2 après-midi par semaine sur 3). Dans ces cas-là, l'inventaire fiscal est dressé en une seule vacation, soit à la Justice de paix, soit au domicile du défunt.
Cette situation est insatisfaisante à plus d'un titre:
- il est le plus souvent impossible de dresser convenablement l'inventaire en une seule vacation: fréquemment, l'inventaire porte des mentions «à produire» qui sont ensuite complétées par le justiciable et l'administration fiscale sans le concours du juge de paix ou du notaire suppléant. Ces derniers se plaignent de faire un travail incomplet;
- des justiciables ne comprennent pas la perception de deux émoluments d'inventaire: l'un par le fisc, l'autre la Justice de paix. De fréquentes plaintes sont enregistrées à ce sujet;
- les justiciables ne comprennent pas non plus le rôle respectif du représentant du fisc, du juge de paix et du notaire suppléant. Ils ont tendance à confondre, vu l'intervention du juge de paix, l'établissement de l'inventaire fiscal et de l'inventaire civil (art. 553 et 581 CCS);
- l'Etat doit payer des frais de vacation au notaire suppléant;
- la tenue des inventaires fiscaux dans les locaux de la Justice de paix prive les magistrats de cette juridiction de leur unique salle d'audience.
Il vous est en conséquence proposé de modifier la loi sur les droits de succession pour que les inventaires fiscaux soient désormais dressés par le fonctionnaire délégué de l'administration fiscale ou par un notaire commis à cette fin par la Justice de paix à la demande des héritiers ou du fisc.
Le juge de paix n'interviendra donc plus en la matière, sauf pour commettre le notaire à des fins d'inventaire, compétence qui est déjà la sienne en matière d'inventaires civils (art. 494 de la loi de procédure civile).
Les émoluments actuellement perçus par la Justice de paix le seront par le fisc ou par le notaire, l'article 31 A du tarif des greffes en matière civile et prud'homale étant repris dans le règlement sur l'inventaire au décès ainsi que dans le règlement sur les émoluments des notaires.
La solution proposée présente les avantages suivants:
- décharger la Justice de paix de tâches pouvant être exécutées à satisfaction par un autre service de l'administration sans surcharge decelui-ci;
- constituer une économie pour l'Etat de l'ordre de 25 000 F par année (frais de vacation des notaires) sans entraîner de pertes de recettes;
- ne percevoir qu'un seul émolument d'inventaire simultanément à l'envoi du bordereau relatif aux droits de succession;
- bien séparer dans les faits et dans l'esprit du justiciable l'intervention du fisc sur le plan fiscal et du juge de paix sur le plan civil;
- garantir les droits de l'administré face au fisc en lui permettant de se faire assister par un mandataire professionnellement qualifié ou d'exiger que l'inventaire soit dressé par un notaire.
COMMENTAIRE ARTICLE PAR ARTICLE
Loi sur les droits de successions
Art. 46, al. 6 (nouvelle teneur)
L'intervention du juge de paix n'est plus prévue que pour commettre un notaire aux fins de procéder à l'inventaire de la succession à la demande de l'administration de l'enregistrement et du timbre.
Art. 46, al. 7 (nouvelle teneur)
Il s'agit de la reprise du texte de la loi actuelle augmenté de la phrase: «la convocation précise que les héritiers ont le droit de se faire assister par un mandataire professionnellement qualifié ou de demander la commission d'un notaire à des fins d'inventaire ». La Chambre des notaires a insisté pour que les héritiers ne se retrouvent pas seuls face au représentant du fisc.
Art. 46, al. 11 (nouvelle teneur)
«Le fonctionnaire délégué du département» remplace «le juge de paix». La fin de l'alinéa tient compte de cette modification.
Art. 46, al. 13 à 15 (nouvelle teneur)
Il n'est plus fait référence au juge de paix.
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Extension des compétences de la Justice de paix en matièrede jugements; exigence du brevet d'avocat pour les juges de paix
1. Extension des compétences de la Justice de paix en matière de jugements
En raison de l'accroissement du nombre des causes déposées auprès du Tribunal de première instance, des capacités professionnelles des juges de paix et de l'allégement de leurs tâches induit par la redéfinition de leurs compétences, il vous est proposé de porter de 2 000 à 8 000 F le montant des litiges qu'ils peuvent trancher si les faits ne sont pas contestés, en cas de défaut de la partie citée ou encore à la demande des parties.
Il suffit pour cela de modifier en conséquence l'article 11 de la loi sur l'organisation judiciaire.
2. Exigence du brevet d'avocat pour être élu juge de paix
En application de l'article 60, lettre d) de la loi sur l'organisation judiciaire, les magistrats du pouvoir judiciaire doivent être titulaires du brevet d'avocat. Une exception est toutefois prévue à l'article 60 A LOJ pour les juges de paix et les juges assesseurs. A ce sujet, il y a lieu de relever que l'organisation judiciaire actuelle est basée sur la loi du 22 novembre 1941. C'est à l'occasion de l'entrée en vigueur de cette dernière que, pour la première fois, des conditions professionnelles d'éligibilité ont été exigées pour les magistrats qui, à cette époque, devaient être soit licenciés en droit, soit docteur en droit, soit porteurs d'un brevet d'avocat ou de notaire.
L'exception de l'article 60 A, alinéa 1 LOJ a été introduite dans des conditions particulières, ainsi que le relate le Mémorial des séances du Grand Conseil des 5 mai et 5 juin 1937. En effet, il en ressort que la commission chargée de présenter le projet de loi avait proposé à l'unanimité que tous les membres du pouvoir judiciaire soient soumis aux mêmes conditions professionnelles d'éligibilité. Seule l'opposition énergique d'un député avait permis l'amendement de ce projet. L'intéressé, qui était alors juge de paix et exerçait la profession de négociant, avait rappelé que depuis plus de 30 ans les juges de paix avaient été ouvriers typographes, bijoutiers, négociants, etc., et que l'essentiel pour cette juridiction était d'avoir un homme d'expérience connaissant bien la vie.
A 41 voix contre 36, il avait pu faire voter son amendement. L'article 60, lettre d) a subi une nouvelle modification en 1958, date à laquelle le Grand Conseil, après avoir longuement examiné l'opportunité d'introduire un examen spécial pour l'entrée dans la magistrature, a décrété que les magistrats du pouvoir judiciaire devaient tous être titulaires du brevet d'avocat.
Lors de cette modification, le cas des juges de paix, toujours soumis à l'exception de l'article 60 A, n'a pas été évoqué, ni discuté (Mémorial des 11 janvier 1958, p. 62 et suivantes et 22 octobre 1958, p. 2042 et suivantes).
Des faits qui précèdent, il appert que c'est en 1941, lors de l'introduction de la loi sur l'organisation judiciaire genevoise, que tous les magistrats de l'Ordre judiciaire ont été soumis à des conditions professionnelles d'éligibilité, sous réserve de ceux siégeant à la Justice de paix et à la Chambre des tutelles qui, à ce jour, peuvent encore être élus sans même être titulaires d'une licence en droit. Cette exception, motivée à l'époque par un intérêt particulier et un contexte différent, n'est plus justifiée aujourd'hui en raison des compétences toujours plus étendues des juges de paix, qui doivent indiscutablement bien connaître le droit pour assumer leurs fonctions.
Pour ces motifs, il se justifie de supprimer la référence aux juges de paix à l'article 60 A LOJ.
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Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981, est modifiée comme suit:
Art. 2, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Indépendamment des attributions qui lui sont expressément conférées par le code civil, elle intervient en outre, d'office ou sur requête, dans les cas suivants:
a)
pour recevoir les avis concernant la survenance d'un cas de tutelle (art. 368, al. 2, 369, al. 2, 371, al. 2);
b)
pour prononcer l'interdiction (art. 373, al. 1);
c)
pour recevoir les avis de l'autorité tutélaire du lieu d'origine concernant les intérêts d'un de ses ressortissants (art. 378, al. 2);
d)
pour pourvoir un majeur d'une curatelle (art. 394) ou d'un conseil légal (art. 395);
e)
pour fixer le délai pour la ratification d'actes conclus par les pupilles (art. 410, al. 2);
f)
pour donner mainlevée de l'interdiction (art. 433), du conseil légal et de la curatelle (art. 439);
g)
pour requérir d'office la déclaration d'absence (art. 550).
Art. 8, lettre b, ch. 2 (nouveau)
2° convocation de l'assemblée générale (art. 699 et 764);
Art. 2
Modification à une autre loi
(E 2 3)
La loi de procédure civile, du 10 avril 1987, est modifiée comme suit:
Art. 406 (nouvelle teneur)
Procédure
détenu et
interdiction
volontaire
Dans les cas des articles 371 et 372 du code civil, la Chambre des tutelles prononce l'interdiction sans autre procédure, après avoir constaté l'existence des faits qui la motivent.
Art. 407, al. 2 (nouvelle teneur) et al. 3 (nouveau)
2 Si le cité ne constitue pas avocat, l'article 413 s'applique par analogie.
3 La Chambre des tutelles, siégeant en chambre du conseil, établit d'office les faits. Elle procède à toutes les mesures probatoires nécessaires à fonder sa conviction, en conformité des règles générales de la procédure et de l'article 374 du code civil.
Art. 408, al. 3 et 4 (nouvelle teneur)
3 Le greffier de la Cour de justice en informe la Chambre des tutelles qui transmet d'office le dossier complet avec le jugement attaqué.
4 La procédure est la même que devant la Chambre des tutelles.
Art. 3
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981, est modifiée comme suit:
Article 1, lettre b (abrogée)
Art. 35 (nouvelle teneur)
Qualité d'héritier
1 La qualité d'héritier, dans les successions ab intestat, est attestée par un acte authentique dressé par le notaire, soit sur la base des actes d'état civil pertinents, soit sous forme d'un acte de notoriété signé par au moins 2 témoins certificateurs, majeurs et domiciliés dans le canton de Genève.
2 Dans le cadre de l'article 559 du code civil, la qualité d'héritier est attestée par un certificat d'héritier dressé par la Justice de paix.
Art. 36 (nouveau)
Le dépôt facultatif du testament olographe (art. 505 du code civil) s'opère en mains d'un notaire.
Art. 2
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Préconsultation
M. René Ecuyer (AdG). Je tiens à m'exprimer sur ce point, car on assiste, de fait, à une privatisation de la Justice de paix !
Je vous dis à l'avance que nous étudierons avec le plus grand soin les projets de lois 7164 et 7165. Nous ne céderons pas, sans rien faire, à la lamentable pression de la corporation des notaires. L'article 36 impose le dépôt d'un testament auprès d'un notaire, alors que maintenant cela se fait à la Justice de paix : c'est pratique, peu coûteux et sécurisant pour les gens. Il n'est pas acceptable d'obliger les personnes à passer par un notaire pour le simple enregistrement d'un testament écrit à la main, comme le code civil l'autorise. Il nous arrive très fréquemment, à l'AVIVO - association pour personnes âgées - d'aider et de conseiller des petites gens qui veulent exprimer un souhait quant à la destination de leurs maigres biens. Ils écrivent leur testament et le portent à la Justice de paix, laquelle l'enregistre et le met au placard jusqu'à «l'extinction des feux» !
Nous sommes tout à fait opposés à la modification de ce mode de faire !
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi de procédure civile, du 10 avril 1987, est modifiée comme suit:
TITRE XIX
CHAPITRE II A (nouveau)
Mesures de sûreté relatives aux testaments
Art. 497 A (nouveau)
Notaire
1 Le dépôt de tout testament découvert lors du décès est opéré en mains d'un notaire, qui procède à son ouverture et son homologation, en copie authentifiée, à la Justice de paix.
2 Le notaire procède aux communications et publications prévues aux articles 517, 557 et 558 du code civil sur ordonnance du juge de paix.
Art. 497 B (nouveau)
Juge de paix
Le juge de paix prend les mesures prévues à l'article 556, alinéa 3 du code civil, enregistre les renonciations au mandat d'exécuteur testamentaire ainsi que les oppositions et procède, sur requête, à l'établissement du certificat d'hérédité.
Art. 2
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Préconsultation
M. Christian Ferrazino (AdG). Suite aux propos de M. Ecuyer, s'agissant du projet de loi précédent, j'aurais souhaité entendre M. Ramseyer - ne serait-ce que brièvement - sur la raison d'être de ce projet de loi.
Je ne vous le cache pas, nous avons été quelque peu étonnés de voir que rien ne justifiait la modification législative qui nous est proposée aujourd'hui dans l'exposé des motifs. Non seulement nous n'y trouvons pas les raisons qui pourraient permettre de faire place à un transfert de compétences de la Justice de paix en faveur des notaires, mais nous voyons que les exemples que vous nous donnez, Monsieur le président, à l'appui de cet exposé des motifs, sont également contradictoires.
Je m'explique. En page 22 de l'exposé des motifs, vous nous dites : «Le dépôt facultatif du testament olographe s'effectue déjà exclusivement, dans certains cantons, en mains des notaires», notamment à Fribourg. En page 24, en haut, le rapport dit, je cite : «A Fribourg, l'autorité compétente pour le dépôt du testament est le juge de paix.». C'est exactement l'inverse ! Il y a une confusion totale sur les compétences. Même si c'est le cas à Fribourg, nous pouvons nous enorgueillir à Genève d'avoir une Justice de paix qui permet à tous les citoyens de déposer leur testament, démarche qui est très utilisée. J'aimerais - je suis sûr que vous avez pris le temps de vous renseigner - que vous me disiez combien de citoyens font appel à cette possibilité.
Vous nous dites dans l'exposé des motifs que cette modification ne va engendrer aucun préjudice pour les justiciables. Que voulez-vous dire par là, Monsieur le président ? Aujourd'hui, si un citoyen veut déposer un testament en mains d'un juge de paix, non seulement il peut le faire sans frais aucuns, mais il peut directement solliciter de l'administration les renseignements nécessaires pour rédiger son testament. En d'autres termes, actuellement, il n'est pas obligé de passer chez un notaire, démarche forcément coûteuse, puisque c'est une prestation de service. Alors, forcément, ce projet de loi qui propose ni plus ni moins d'empêcher le citoyen de déposer son testament en mains d'un juge de paix - ce qui l'oblige, par conséquent, à aller chez un notaire - engendre un préjudice pour le justiciable. Prétendre le contraire est faux ! Cette démarche ne coûte rien à l'heure actuelle, ce qui ne sera plus vrai en cas de changement. Je ne comprends pas pourquoi on devrait transférer cette compétence exclusivement en mains des notaires. La moindre des choses serait que vous donniez des explications à ce sujet, sans omettre de nous renseigner sur la fréquentation de ces services, car je sais qu'elle est très grande. Il me semble donc très utile de continuer à dispenser ce service à la collectivité.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Il s'agit d'un sujet très technique et juridique.
Néanmoins, je rappelle que ce que vous trouvez en page 16 du document que vous avez sous les yeux répond à la demande faite à tous les serviteurs de l'Etat de rationaliser les tâches. Le pouvoir judiciaire a fait plusieurs propositions concernant l'administration de la justice pénale, civile et administrative, et ce volet traite de propositions dans le but de rationaliser l'administration de la justice civile.
Monsieur le député, et par ailleurs excellent avocat, je vous propose de ne pas ennuyer le plénum maintenant sur les différents points que vous avez abordés. Nous avons la possibilité de le faire en commission, qui est composée de spécialistes. Il vous y sera donc répondu de manière nettement plus complète et exacte que je ne pourrais le faire maintenant, à froid.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur les droits de succession, du 26 novembre 1960, est modifiée comme suit:
Art. 46, al. 6, 7, 11, 13, 14 et 15 (nouvelle teneur)
6 Dans les 8 jours qui suivent le décès, l'administration de l'enregistrement et du timbre procède à l'inventaire de la succession ou y fait procéder en demandant à la Justice de paix de commettre un notaire à cette fin. Cette administration peut prolonger ce délai. Ces dispositions s'appliquent également aux successions de personnes domiciliées dans le canton de Genève mais dont le décès est survenu hors du canton.
7 Les héritiers connus et domiciliés dans le canton de Genève sont convoqués par lettre au moins 48 heures à l'avance. La convocation précise que les héritiers ont le droit de se faire assister par un mandataire professionnellement qualifié ou de demander la commission d'un notaire à des fins d'inventaire. En cas d'absence de tous les héritiers et à défaut d'un représentant légal ou d'un mandataire régulièrement constitué, l'administration de l'enregistrement et du timbre prend toutes dispositions pour faire procéder à l'inventaire.
11 Le fonctionnaire délégué du département ou le notaire procède conformément aux articles 494 à 497 de la loi de procédure civile et consigne toutes observations faites par les héritiers ou l'Etat.
13 L'inventaire est signé par les personnes ayant assisté à l'opération, le notaire et le fonctionnaire délégué de l'administration de l'enregistrement et du timbre. Les héritiers doivent déclarer, avant la signature, que l'inventaire est sincère, exact et complet. La signature de l'inventaire officiel par les héritiers n'emporte pas pour eux acceptation de la succession.
14 L'inventaire dressé par le fonctionnaire délégué du département est conservé à l'administration de l'enregistrement et du timbre. Une expédition timbrée de l'inventaire dressé par le notaire est remise à l'administration de l'enregistrement et du timbre, si celle-ci le demande.
15 Les frais, débours, émoluments et vacations, soit pour les inventaires dressés par le fonctionnaire délégué du département, soit pour les inventaires dressés par le notaire, sont supportés par les héritiers.
Art. 2
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:
Art. 11 (nouvelle teneur)
1 Le juge de paix, saisi en application de l'article 10, tranche au vu des pièces produites, sans instruction et sans débat public, tout litige dont le montant ne dépasse pas 8 000 F, si les faits ne sont pas contestés ou si la partie citée fait défaut ou encore si les parties le requièrent expressément.
2 Il en est de même dans les causes où, déduction faite de la somme reconnue par la partie défenderesse, le litige ne porte plus que sur une différence de 8 000 F ou moins.
Art. 60 A, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les conditions d'ordre professionnelle prévues à l'article 60 ne sont pas applicables aux juges assesseurs.
Art. 2
Entrée en vigueur
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur la police, du 26 octobre 1957, est modifiée comme suit:
Art. 6, al. 1, lettre d, chiffre 5 (nouvelle teneur)
5° 234 inspecteurs principaux, inspecteurs principaux adjoints et inspecteurs;
Art. 6, al. 1, lettre j (nouvelle teneur)
j) le service de presse, composé du porte-parole de la police et du nombre nécessaire d'attachés de presse;
Art. 6, al. 1, lettre k (nouvelle, les lettres k et ldevenant les lettres l et m)
k) du nombre nécessaire de policiers avec fonction d'état-major selon une liste arrêtée par le Conseil d'Etat sur proposition du département , rattachés à l'état-major de la police, et chargés de tâches particulières, dont l'effectif est imputé sur celui de la police de sûreté, respectivement de la gendarmerie en fonction de l'incorporation d'origine de chaque policier;
Art. 19, al. 1 (nouvelle teneur)
Promotions
1 Les promotions dans le corps de police se font de la façon suivante:
a) dans la gendarmerie, selon le rang du rôle matricule pour les grades de sous-brigadier et brigadier et en tenant aussi compte des qualifications, de la capacité au commandement et du dossier de l'intéressé pour le grade de maréchal;
b) dans la police de sûreté, selon le rang du rôle matricule établi d'après la date d'entrée au corps pour les grades d'inspecteur principal adjoint et d'inspecteur principal.
Pour tous les grades supérieurs, le Conseil d'Etat statue en dernier ressort, compte tenu des compétences, qualités et états de service des candidats. Il en est de même pour l'officier quartier-maître, sous réserve cependant des examens que le département peut faire subir aux candidats. Les adjudants sont choisis à parts égales parmi les maréchaux, d'une part, et parmi les brigadiers, d'autre part. Les adjudants-chefs doivent être choisis parmi les adjudants, maréchaux et brigadiers, et les officiers de gendarmerie parmi le personnel gradé de la gendarmerie; demeure toutefois réservé l'article 7, alinéa 3.
Les chefs de section, les chefs de section adjoints et les inspecteurs chefs de brigade doivent être choisis parmi le personnel gradé de la police de sûreté ou ayant accompli au moins 18 années de service dans la police.
Art. 31, lettre e (abrogée)
Art. 31 D, al. 2, dernière phrase (nouvelle teneur)
Les policiers avec fonction d'état-major reçoivent également une indemnité spéciale selon les principes arrêtés ci-dessus.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. INTRODUCTION
La présente modification vise pour l'essentiel trois buts:
corriger une erreur mathématique concernant le nombre d'inspecteurs dans la police de sûreté;
introduire la notion de «policiers avec fonction d'état-major», auxquels peuvent être confiées des tâches spécifiques au profit de l'état-major de la police;
permettre la promotion des chefs de section, chefs de section adjoints et inspecteurs chefs de brigade dans la police de sûreté après 18 ans de service.
2. CORRECTION MATHÉMATIQUE
Actuellement l'article 6, alinéa 1, lettre d, stipule que l'effectif de la police de sûreté est de 265 personnes, ce qui ne correspond pas à l'addition des chiffres 2 à 5 dudit alinéa.
Cette erreur est due au fait suivant:
Par modification de la loi sur la police de 1988, le nombre de chefs de section adjoints a passé de 6 à 7 et il aurait donc fallu, par voie de conséquence, faire passer le nombre d'inspecteurs principaux, inspecteurs principaux adjoints et inspecteurs de 235 à 234 (chiffre 5 de la lettre d).
Il convient également de préciser que le chef de la police de sûreté, mentionné sous lettre d, chiffre 1, est inclus en matière d'effectifs dans les 8 officiers de police du même alinéa, lettre c.
3. INTRODUCTION DE POLICIERS AVEC FONCTION D'ÉTAT-MAJOR
Cette modification doit permettre à l'état-major de la police de confier à des personnes choisies pour leurs connaissances et leur sens de la conduite des tâches spécifiques et de disposer de cadres d'état-major gérant des domaines particuliers.
Il est en effet paradoxal, dans le système actuel, de constater que tous les services de la police sont dotés d'états-majors adéquats, alors que la direction de la police ne dispose pas de cadres librement disponibles autres que les officiers de police déjà responsables d'un dicastère.
Les principaux besoins que l'on cherche à satisfaire par cette introduction sont notamment les domaines suivants :
responsable du service financier police,
responsable du service de coordination informatique police,
responsable de l'adjudance auprès du chef de la police, respectivement du chef état-major,
responsable du service psychologique police,
responsable de la prévention.
Selon les besoins, le chef de la police doit avoir la possibilité de nommer, à des fonctions d'état-major, les personnes nécessaires à la coordination de l'ensemble des services de la police. En ce sens, l'énumération des responsabilités précitées peut être modifiée selon les circonstances. La liste desdits policiers est arrêtée et mise à jour par le Conseil d'Etat sur proposition du département.
Par la même occasion, la notion «d'officier de presse» disparaît, le porte-parole de la police, chef du service de presse, devenant un policier avec fonction d'état-major. Ainsi la notion «d'officier» reste exclusivement réservée au grade hiérarchique qu'implique ladite fonction.
Lesdits policiers sont mis au bénéfice d'une indemnité spéciale analogue à celle prévue à l'article 31D, alinéa 2 actuel, dont le montant est à fixer par le Conseil d'Etat.
4. PROMOTION DES CHEFS DE SECTION, CHEFS DE SECTION ADJOINTS ET INSPECTEURS CHEFS DE BRIGADE
En juillet 1990, la société «Polymanagement Consultants SA» rendait un rapport sur les difficultés de recrutement dans la police cantonale de Genève. Cette société, après avoir analysé certains dysfonctionnements tant à la gendarmerie qu'à la police de sûreté, a proposé pour y remédier plusieurs actions exemplaires de changement. Deux d'entre elles concernent directement l'avancement:
1. Introduire dans l'avancement de carrière un pourcentage de promotion au choix, fondée sur la compétence et non sur le rôle-matricule, en profitant des ouvertures de la loi. De façon plus large, mettre en place une véritable gestion du personnel fondée sur l'évolution par les compétences et la formation .
2. Confier des postes de responsabilité, comme chef de poste ou chef de brigade à des femmes et hommes qui sont jeunes et non en fin de carrière comme aujourd'hui, donc désireux de l'achever sans «éclat» .
Depuis plusieurs années, en effet, le chef de brigade qui dirige, selon les services, entre 10 et 25 personnes et qui, de par la spécificité de sa brigade, est responsable d'une mission de police judiciaire a vu ses compétences diminuer. Une partie de cette diminution est due au fait que dans le système actuel, la promotion automatique selon l'ancienneté génère l'arrivée de cadres qui en fin de carrière ne possèdent plus, pour certains, la motivation nécessaire.
Par ailleurs, du fait que le système actuel est basé sur l'ancienneté, les départs à la retraite après trente années de service interviennent à la même date pour tous les membres d'une même école. En conséquence, si une école de formation se compose d'une douzaine d'inspecteurs, après trente années de service, ce seront une douzaine de chefs de brigade qui bénéficieront simultanément d'une retraite. Il est donc légitime de se demander s'il est concevable que les deux tiers des chefs de brigade partent simultanément.
La suppression de la promotion au «matricule» est considérée, au sein de la police, comme un sujet très sensible puisqu'il a souvent cristallisé les antagonismes entre le personnel et les états-majors. C'est la raison pour laquelle le chef de la police de sûreté a soumis cette problématique à tous ses collaborateurs à l'occasion d'un rapport annuel 1993. Ce sont 74 % des inspecteurs qui sont d'avis de supprimer «le matricule» pour la nomination au grade de chef de brigade. L'association du personnel de la police de sûreté a, de son côté, mené un sondage équivalent dont le résultat fut similaire.
Compte tenu du fait que l'accession aux divers grades est directement tributaire des effectifs des écoles de formation, la passation des grades ne s'effectue pas toujours à la même année de service. Ainsi, le premier de l'école de formation 1968 a accédé au grade de chef de brigade lors de sa 21ème année de service, alors que le premier de l'école de formation 1972, y accédera environ à la 28ème année.
Cette inégalité a pour conséquence que la postulation à l'état-major de la police de sûreté ne pourrait se faire pour certaines écoles de formation qu'à partir de la 21ème année (date de l'obtention du premier grade). Si l'on sait qu'une carrière dure en principe 30 ans, l'obtention du premier grade après 20 ans de service ne permet pratiquement plus l'accession aux plus hautes responsabilités. Etant donné ce phénomène, il est proposé de donner la possibilité à toute personne ayant 18 années de service au sein de la police de sûreté de postuler même si elle ne possède encore aucun grade.
5. COMMENTAIRE ARTICLE PAR ARTICLE
5.1. Art. 6, al. 1, lettre j
Comme indiqué, le porte-parole de la police, chef du service de presse, a le statut de policier avec fonction d'état-major et est rattaché directement au chef de la police. Cette manière de faire permet, d'une part, de préserver la notion «d'officier» au grade hiérarchique par cohérence avec le système et, d'autre part, de mieux réintégrer, dans le corps de police, le porte-parole de la police, qui quitte sa fonction.
5.2. Art. 6, al. 1, lettre k
Il est précisé que les policiers avec fonction d'état-major n'entraînent pas une augmentation de l'effectif global de la police, mais que lesdites unités sont prélevées sur l'effectif global des policiers, tel que fixé dans la loi, ceci en fonction de l'appartenance à la gendarmerie ou à la sûreté des personnes choisies comme policiers avec fonction d'état-major. La nomination de policiers avec fonction d'état-major garantit donc de facto un blocage des unités correspondantes des effectifs tant de la gendarmerie que de la sûreté.
La répercussion financière, basée sur une indemnité spéciale analogue à celle prévue à l'article 31D, alinéa 2 actuel entraîne des dépenses annuelles supplémentaires suivant le nombre de policiers désignés comme tels. Le Conseil d'Etat reste toutefois maître de cette dépense dans la mesure où il arrête la liste desdits policiers.
5.3. Art. 19, al. 1
Le choix des inspecteurs chefs de brigade sera donc possible dès la 18ème année de service, en fonction des capacités des candidats, en dérogation à l'application stricte du rôle-matricule qui prévalait jusqu'à présent.
5.4. Art. 31, lettre e
La suppression de la fonction «d'officier de presse» entraîne systématiquement la suppression de la classe salariale particulière prévue pour le futur porte-parole de la police qui bénéficiera d'une indemnité spéciale.
5.5. Art. 31D, al. 2, dernière phrase
L'indemnité spéciale prévue pour les policiers avec fonction d'état-major s'établira en fonction des décisions que le Conseil d'Etat prendra. Les modalités d'exécution seront réglées de manière identique à celles prévues actuellement pour les fonctionnaires de police chargés de tâches nécessitant des connaissances spéciales ou assurant des responsabilités spéciales. Ainsi, une liste ad hoc sera soumise au Conseil d'Etat et l'indemnité fera l'objet d'un arrêté annuel de ce dernier.
Vu les explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le présent projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- que des courtiers en matériel de guerre opèrent régulièrement depuis Genève;
- que leur activité n'est pas réglementée, si les armes concernées ne transitent pas par le territoire suisse;
- qu'il apparaît nécessaire de combler ce vide juridique, sans attendre la révision totale, en cours d'étude, de la loi fédérale sur le matériel de guerre du 30 juin 1972,
invite le Conseil d'Etat
- à remettre aux députées et députés une copie de la prise de position adressée par le canton au Conseil fédéral à propos de la révision projetée de la loi fédérale sur le matériel de guerre du 30 juin 1972;
- à déposer aux Chambres fédérales une initiative cantonale visant:
a) à soumettre rapidement à autorisation le courtage, exercé régulièrement depuis la Suisse, d'armes de guerre, même lorsque les armes concernées ne transitent pas par notre pays, ceci indépendamment de la nouvelle loi à l'étude;
b) dans la mesure du possible à autoriser les cantons qui le désirent et qui sont particulièrement touchés par ce phénomène, à pouvoir réglementer sur leur territoire le courtage en matériel de guerre, ceci dans l'attente de la révision projetée.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Il est notoire qu'un certain nombre de personnes et de sociétés établies à Genève servent d'intermédiaires à des transactions d'armes. Quelques cas ont occupé nos autorités ces dernières années.
Lorsque les armes transitent par le territoire suisse, les courtiers établis à Genève tombent sous le coup de la loi fédérale sur le matériel de guerre, du 30 juin 1992. Son article 4 soumet en effet à une autorisation de la Confédération non seulement la fabrication, l'acquisition et la commercialisation d'armes, mais également le fait «de servir d'intermédiaire pour l'acquisition ou le commerce de matériel de guerre».
En revanche, lorsque les armes ne transitent pas par le sol helvétique, la loi sur le matériel de guerre, dans sa version actuelle, n'est pas applicable. Le courtage demeure alors libre (G. Malinverni, Commentaire de l'article 41 de la Constitution fédérale in Commentaires de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, p. 9, No 29).
2. Les auteurs de la présente motion pensent que le courtage de matériel de guerre devrait être soumis à une autorisation et à un contrôle de nos autorités, même lorsque les armes concernées sont fabriquées à l'étranger et vendues dans un pays tiers, sans transiter par notre sol.
En effet, il semble vain de vouloir restreindre la participation suisse à la fourniture de matériel militaire à des belligérants, si on admet parallèlement que des citoyens suisses ou des personnes et sociétés installées en Suisse jouent les intermédiaires dans la vente de fusils et de canons de l'étranger à l'étranger.
Un contrôle et, dans certaines hypothèses, une interdiction des opérations de courtage menées depuis notre territoire constitueraient l'apport de notre pays à la pacification de pays comme l'ex-Yougoslavie ou le Rwanda. Tout le monde sait que les guerres atroces qui y font rage n'ont été rendues possibles que par la fourniture, plus ou moins officielle, d'armes en provenance des pays dits civilisés. Personne n'ignore non plus que ce sont des courtiers qui favorisent la vente de ces armes en mettant en contact les acheteurs et les vendeurs.
3. La première invite de la présente motion a pour but de demander au Conseil d'Etat s'il partage la préoccupation des motionnaires décrite ci-dessus et s'ils l'ont fait savoir au Conseil fédéral en répondant à la récente consultation relative au projet de révision totale de la loi fédérale sur le matériel de guerre. En particulier, les auteurs de la motion souhaitent connaître le point de vue du Conseil d'Etat à propos des articles 14 et 15 du projet de loi qui soumettent à autorisation le cas «de toute personne qui, sur territoire suisse, veut procurer à titre d'intermédiaire du matériel de guerre à un destinataire à l'étranger».
La seconde partie de la présente motion vise à inviter le Conseil d'Etat à déposer une initiative cantonale aux Chambres fédérales, demandant que:
a) le courtage de matériel de guerre soit rapidement soumis à autorisation, sans attendre l'issue de la révision totale, qui tarde à venir, de la loi sur le matériel de guerre;
b) les cantons se voient octroyer une compétence pour légiférer dans ce sens. Une telle loi n'aurait aucun contenu «révolutionnaire», mais pourrait simplement contenir les éléments suivants:
- le commerce en courtages d'armes est soumis à autorisation;
- l'autorisation d'exercer le commerce et le courtage d'armes est délivrée aux seules personnes physiques;
- les conditions à l'octroi de l'autorisation sont une réputation irréprochable et une formation professionnelle suffisante;
- les conditions à l'autorisation sont l'inscription au registre des transactions, le respect de la loi fédérale sur les exportations d'armes et la publication de la liste des personnes autorisées.
Certes une solution fédéraliste n'est, à long terme, pas souhaitable. Elle permettrait à des individus de déplacer leur domicile pour échapper à une réglementation soumettant à autorisation le courtage d'armes ne transitant pas par le sol suisse. De manière toute provisoire toutefois, on pourrait admettre qu'une solution cantonale permettrait aux cantons les plus touchés par ce type d'affaires de réagir rapidement, de parer au plus pressé. Nul n'ignore à ce titre que Genève est, avec Zurich et le Tessin, l'un des cantons les plus concernés par ce type d'affaires, comme il l'est par les affaires de blanchiment d'argent sale. Ces deux types d'activités vont d'ailleurs parfois de pair. Il est en effet notoire que le produit de l'argent de la drogue sert régulièrement à l'acquisition d'armes.
Au vu de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement cette proposition de motion.
Débat
M. Luc Gilly (AdG). Je commencerai en donnant un exemple de ce qui se passe réellement à Genève au niveau des trafics d'armes et des organisations de certaines sociétés.
Les trafiquants d'armes sont protégés par la loi à Genève, mais également en Suisse par la loi fédérale, si la «marchandise» ne transite pas sur le sol genevois ou helvétique. Il y a quelques années, un trafiquant, M. Starckmann, opérait à Genève sous le couvert d'une maison de production cinématographique. Ce personnage, recherché par la police française, a été expulsé de chez nous non pour le motif de ses activités liées au trafic d'armes, mais pour des raisons administratives... son permis de séjour n'était plus valide à Genève !
Depuis le démantèlement du pacte de Varsovie et le départ des troupes américaines de notre continent, un marché fantastique vient de s'ouvrir : «armes cherchent guerriers désespérément !». Ainsi donc, malgré les mésaventures arrivées au patron, l'entreprise Starckmann poursuit sa superproduction sous le label de la maison ERKIS S.A. à Genève. Cette entreprise se développe; elle possède maintenant une représentation en Floride et à Moscou. Parmi les meilleurs clients de ERKIS S.A. : la Bosnie et la Libye, pays soumis à embargo. Font également partie de la clientèle : le Zaïre, le Tchad, la Jordanie, la Syrie, etc. Des armes vont certainement renforcer le chemin de la démocratie dans ce dernier pays ! Lors de sa rencontre avec le dictateur syrien, Hàfiz al Asad, à Genève, le conseiller fédéral Flavio Cotti avait assuré que la situation des droits de l'homme s'améliorait en Syrie !
Le matériel marchandé par ces individus est très divers. Il va du missile Stinger à la machine à implanter des puces «ion implanter». Quant aux mines anti-personnel proposées par ERKIS S.A., cette maison d'assassins à Genève les a fortement exportées du côté de l'Autriche qui les distribue dans d'autres pays. Or, nous savons que Genève abritait, cet été encore, les conférences internationales organisées sous l'égide de l'ONU pour interdire les exportations et l'usage de ces mines. Ainsi donc, ces sinistres sires qui roulent en Rolls Royce - nous en avons les preuves - peuvent poursuivre à Genève leur trafic mortel sans être inquiétés par un procureur, qui a évidemment d'autres choses en tête !
La nouvelle législation sur l'exportation du matériel de guerre ne devrait pas menacer les trafiquants d'armes opérant depuis notre territoire. En effet, selon le «rapport sur le projet de révision totale de la loi fédérale sur le matériel de guerre», daté de décembre 1993, donc relativement récent, ce type d'activité ne sera pas encore interdit, mais soumis à autorisation préalable par le biais d'une «autorisation de courtage» : c'est l'article 14 de la future constitution sur l'exportation du matériel de guerre. Dans notre pays où la liberté du commerce est sacrée, nul doute que les marchands de mort pourront dormir en paix avec cette loi. Seule l'initiative visant à interdire l'exportation et le commerce des armes pourrait menacer leurs activités si le peuple l'accepte. Depuis 1992, elle dort dans les tiroirs de la Chancellerie fédérale. Devinez donc à qui profite cette lenteur !
Pourtant, pour revenir à Genève, la motion qui nous concerne ce soir demande le minimum que nous pouvons exiger à l'heure actuelle de la part du gouvernement genevois, à savoir de contrôler les opérations de courtage qui s'effectuent quotidiennement sur notre territoire. Genève est une ville internationale qui accueille l'ONU depuis de nombreuses années. Va-t-on continuer à vivre dans l'hypocrisie permanente, alors que l'ONU organise, année après année, des conférences sur le désarmement ?
Si cela intéresse certains, j'ai ici la liste complète des noms de ces tristes sires, de ces gangsters qui trafiquent chez nous avec la mort, et sur lesquels la loi actuelle n'a aucun pouvoir !
Le président. Monsieur le député, si voulez renvoyer cette motion en commission, vous devez le demander, car seul un député peut le faire !
M. Luc Gilly. Evidemment, nous demandons le renvoi de cette motion en commission pour qu'elle y soit discutée sérieusement. Nous parlons toujours de Genève comme ville internationale à vocation humanitaire, d'accueil et de paix. Il est donc urgent que Genève avance et s'engage pour faire cesser cette mascarade dans notre canton !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Les autorités fédérales sont en train de travailler sur un nouveau projet de loi concernant le matériel de guerre. Un article, entre autres, prévoit de soumettre à autorisation - comme l'a dit M. Gilly - les activités d'intermédiaire en matériel de guerre, alors qu'aujourd'hui seuls sont soumis à autorisation les cas où les armes transitent par la Suisse. Dans un premier temps, il nous paraîtrait intéressant de connaître la position du Conseil d'Etat sur ce point lors de la consultation concernant ce projet.
L'autre aspect touche plus particulièrement notre canton. Genève, vous le savez, a déjà fait l'objet de nombreux scandales s'agissant du trafic d'armes. Les sociétés y fleurissent tout particulièrement agréablement, au bord du lac ! Zurich, le Tessin et Zug - je l'ai appris dernièrement - connaissent la même situation. Rien d'illégal, je le précise, dans ces activités, puisqu'il s'agit d'activités d'intermédiaires seulement. Avouez quand même que cette situation et cette manière de faire sont hypocrites. Nous achetons du matériel de guerre, nous vendons du matériel de mort, mais nous sommes innocents, puisque nous, Suisses, n'y avons pas touché. Pour ma part, je trouve cela extrêmement choquant. Vous souhaitez que Genève reste une ville internationale, fidèle à son histoire, alors que dans le même temps nos lois permettent à cette même Genève d'être un repaire de courtiers en armes !
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons plus de transparence sur ces sociétés. Rien d'extraordinaire. Aucune interdiction, mais quelques règles de comportement et d'obligation d'autorisation. Genève pourrait légiférer de manière transitoire, en attendant que la loi fédérale soit mise sous toit et votée par les Chambres, afin que l'image de notre canton ne soit plus ternie par ce genre de scandales. Le procureur, Laurent Kasper-Ansermet, souhaite - d'ailleurs, lui-même le faisait savoir cet été dans la presse - une évolution en cette matière pour que les opérations de courtage soient soumises à autorisation.
Je vous invite donc à accepter cette motion.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je partage l'indignation de M. Gilly. Tristes sires sont ces trafiquants; tout aussi tristes sires sont ceux qui ont recours à eux !
Nous attendons effectivement une nouvelle législation fédérale à ce sujet. Dans cette attente, nous sommes d'accord de débattre de ce sujet en commission.
Le président. Le Bureau vous propose le renvoi de cette motion à la commission législative...
M. John Dupraz. Judiciaire !
Le président. Législative !
Une voix. Judiciaire !
Le président. Que ceux qui veulent la renvoyer à la commission judiciaire motivent ce choix !
Le Bureau et les chefs de groupe vous proposent le renvoi à la commission législative. Que celles et ceux qui approuvent un tel renvoi lèvent la main. (Contestation.)
M. John Dupraz. Je demande que cette motion soit renvoyée à la commission judiciaire qui siège beaucoup plus souvent que la commission législative ! (Brouhaha et réflexions.)
Le président. Que celles et ceux qui veulent renvoyer cette motion à la commission judiciaire lèvent la main ! (Rires.) Monsieur Dupraz, j'avais raison !
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission législative.
Le président. Avant d'entrer en matière sur les points suivants, je souhaite faire deux observations.
La première est une observation de fond. Je souhaite remercier le conseiller d'Etat qui a honoré sa parole et vidé ses tiroirs ! En effet, lors d'une discussion entre le Bureau du Grand Conseil et le Conseil d'Etat, nous avons explicitement demandé que des réponses soient fournies aux motions, aux pétitions et aux questions écrites des députés dans des délais acceptables, ce que M. Ramseyer a fait. Ces réponses ont été rédigées sous une forme qui vous plaira ou non, concernant les points 41, 42 et 43, mais, pour ma part et en tant que président, je tiens à le remercier d'avoir tenu parole !
Pour la procédure, il est évident que même si la réponse est compacte, le Grand Conseil devra prendre acte de chacun des rapports. Aussi, je vous ferai voter lettre par lettre.
17. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur :
Au début de la législature, le nouveau Bureau du Grand Conseil a invité le Conseil d'Etat à procéder à un effort particulier pour épurer la liste des objets en suspens, en lui suggérant en particulier de regrouper différentes interventions en un seul rapport et en renonçant à développer celui-ci dans le détail. Le présent rapport s'inscrit dans cette perspective en répondant de manière synthétique à l'ensemble des objets relatifs à la circulation routière adressés par la Grand Conseil au Conseil d'Etat avant le début de la présente législature.
Nombre des motions et pétitions dont il est question ici portent la marque du climat très particulier qui a entouré la politique des déplacements dans la législature précédente. Le gouvernement homogène qui a prêté serment en décembre dernier, s'il revendique la continuité de l'Etat qu'il incarne, entend tirer un trait sur le passé et se préoccuper de l'avenir. Cette attitude s'impose d'autant plus à lui en raison de son double rôle dans ce domaine d'autorité politique et d'autorité juridictionnelle saisie de recours à l'égard des mesures décrétées par le précédent chef du département de justice et police.
Le présent rapport se divise dès lors en deux parties: 1) une partie consacrée aux principes généraux de la politique des déplacements; 2) une partie consacrée aux besoins plus sectoriels évoqués par les motions et pétitions que le Grand Conseil lui a renvoyées.
Principes généraux de la politique des déplacements
La motion 860, la pétition 806 ou la pétition 918, mais aussi dans une certaine mesure les motions 659 et 686 se présentent comme des éléments de programme politique concernant le domaine de la circulation routière.
Pour sa part, le Conseil d'Etat est convaincu de la nécessité d'éviter tant l'approche idéologique que l'approche purement technocratique du problème. C'est dire qu'il fait sienne une démarche pragmatique, systémique, ouverte au dialogue et à l'évolution. Il confirme qu'il entend lier désormais étroitement entre eux les différents volets d'une politique (parcage, circulation motorisée, transport publics) plutôt que de progresser de manière accélérée dans un domaine sans que les autres suivent: c'est ainsi qu'en 1995 il entend conduire simultanément l'ouverture du parking de Saint-Antoine, la mise en exploitation de la ligne de tram 13 et les modifications de circulation que ces deux ouvrages entraînent.
Dans la définition de sa politique des déplacements, le Conseil d'Etat entend tenir compte de l'ensemble des facteurs pertinents, qu'ils soient économiques ou environnementaux, de sécurité ou de mobilité.
Il entend se donner mieux les moyens d'agir en distinguant plus clairement les niveaux de responsabilité: niveau politique, niveau stratégique et niveau opérationnel alors que ces deux derniers niveaux ont parfois tendu à se confondre au détriment tant de l'un que de l'autre. C'est ainsi que nombre de données qui paraissaient nécessaires, notamment à la suite de la motion 456 ou de la motion 686 ne sont pas encore disponibles malgré les travaux d'ores et déjà entrepris dans ce sens; le Conseil d'Etat en tire la conclusion qu'il faut renforcer l'approche stratégique indispensable pour intégrer la dimension économique à la politique des déplacements.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat entend développer encore la concertation transfrontalière dans ce domaine, au sein de la commission permanente «Transports et sécurité» du Comité régional franco-genevois, comme l'y invitent tant la motion 456 relative aux véhicules des frontaliers que la motion 659 et la pétition 689 à propos des points de passage du trafic des poids lourds.
Besoins sectoriels
Le Conseil d'Etat ne croit pas à une approche qui oppose toujours un mode aux autres, les piétons aux automobilistes, les cyclistes aux camionneurs, alors que cette diversité fait la richesse de notre société et que chacun de nous assume successivement ces différents rôles. Il entend néanmoins répondre succinctement aux préoccupations dont le Grand Conseil s'est fait l'écho.
a) Stationnement
A défaut du parking de Plainpalais (pétition 738), le Conseil d'Etat se réjouit d'avoir donné une impulsion décisive à la construction de parkings au centre-ville en débloquant le parking de la place Neuve (objet de la pétition 728) et l'extension du parking sous-lacustre et en favorisant l'aboutissement des démarches préliminaires en vue de la construction du parking de Saint-Gervais dans le cadre d'une réhabilitation exemplaire de ce quartier fondée sur le partenariat public/privé.
Il reconnaît l'importance d'aménager de manière systématique des places réservées pour les livraisons et d'en faire respecter l'affectation, comme le demande la motion 437.
b) Modération de la circulation
Tant à propos des Pâquis (motion 764-B), où le département de justice et police et des transports a récemment repris contact avec la Ville de Genève et les milieux intéressés dans l'esprit de concertation souhaité par le Grand Conseil, qu'à propos de l'accès aux écoles et de la sécurité des élèves (à l'exemple de l'école des Allières évoquée par la pétition 951/2-A), le Conseil d'Etat réaffirme son souci d'une démarche harmonisée entre l'aménagement urbain, de la compétence municipale, et la gestion de la circulation. Trop souvent, ces dossiers donnent l'impression d'un fâcheux ping-pong entre services et le Conseil d'Etat souhaite une approche beaucoup plus intégrée dans ce domaine, qui devrait aller, pourquoi pas, jusqu'à remettre en cause des délimitations de compétences peut-être devenues inadéquates.
c) Circulation des poids lourds
S'il entend aborder ce problème dans une optique transfrontalière, le Conseil d'Etat est évidemment sensible aux revendications des communes touchées qu'expriment tant la motion 689 que la pétition 859.
Il lui appartient de veiller à la cohérence d'ensemble du réseau principal qui irrigue l'économie genevoise et pour laquelle chacun peut être amené à accepter des sacrifices, sans pour autant que cela soit au détriment de la sécurité.
d) Piétons
La sécurité est évidemment la préoccupation principale des piétons. Tant la pétition 528 que la motion 737 appellent une action reposant sur l'usage de tous les moyens disponibles. Toutes les actions du département de justice et police et des transports visent à assurer des aménagements de qualité et une évolution positive des comportements des usagers, en sanctionnant fermement les contrevenants.
Le Conseil d'Etat souhaite cependant appeler à la raison: si toute mort est un scandale, il est faux de croire que c'est de l'Etat que tout peut venir dans ce domaine qui relève au plus haut point de la psychologie collective.
** *
Au bénéfice de ces explications, le Conseil d'Etat vous invite à lui donner la possibilité de se consacrer, avec vous, à l'avenir plutôt qu'au passé en prenant acte du présent rapport.
Débat
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Le Bureau du Grand Conseil, le 13 avril dernier, a demandé au Conseil d'Etat de faire les fonds de tiroirs et de répondre aux textes en suspens, en nous octroyant un délai à l'automne. J'ai donc exhumé vingt-sept textes légaux et j'ai donné à mes services un délai au 15 septembre pour rédiger des réponses.
Ce faisant, nous avons constaté que ces sujets traitaient de trois domaines généraux : les problèmes liés à la circulation et aux parkings, la politique des transports et, enfin, la problématique des requérants d'asile et des réfugiés. Nous avons donc rédigé trois rapports généraux, répondant en ceci au voeu de votre Bureau, et de votre président en particulier. Il n'y a aucun problème pour voter, lettre par lettre, chacun des textes déposés et pour reprendre, au niveau du Conseil d'Etat, les sujets particuliers, si vous le souhaitez, pour autant bien sûr que vous puissiez dire en quoi les réponses apportées ne vous satisfont pas.
Néanmoins, je vous rends attentifs au fait que ces textes sont pour la plupart anciens. Certains ont déjà plus de dix ans ! Le contexte s'est donc modifié. Les faits ne sont souvent plus d'actualité et les défauts indiqués ont plus ou moins été déjà corrigés et d'autres sont apparus. Si donc vous proposez des renvois au Conseil d'Etat, je me demande s'il ne serait pas préférable de prendre note des rapports qui vous sont présentés et de déposer de nouveaux textes qui soient d'actualité et qui portent sur un sujet ou un problème contemporain. Sinon, je serai obligé de faire des acrobaties de texte pour donner à mes réponses une apparence de validité et d'actualité qui ne pourrait être que de pure façade.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Contrairement à notre président, je ne vais pas remercier M. Ramseyer pour la présentation de ses réponses !
En effet, notre groupe a été extrêmement surpris, pour ne pas dire choqué, par la nouvelle procédure employée par le Conseil d'Etat pour répondre aux objets figurant aux points 41, 42 et, dans une moindre mesure, au point 43. Nous avons été surpris et choqués à la fois par la forme et par le fond.
Sur la forme, d'abord.
1) L'absence dans le rapport des textes originaux renvoyés au Conseil d'Etat rend impossible, sauf à leurs auteurs, de juger si la réponse est adéquate.
2) Le fait de ne pas prévoir au moins un paragraphe de réponse spécifique à chaque objet ajoute encore à la difficulté d'évaluer ladite réponse.
3) Une réponse globale et si minimale à des objets d'envergure si différente n'est pas admissible à nos yeux.
Je précise toutefois que notre groupe n'est pas complètement opposé à des réponses globales, pour autant qu'elles répondent à des objets d'importance comparable traitant du même sujet et pour autant, je le répète, que chaque proposition y figure et fasse l'objet d'une réponse particulière.
Sur le fond, maintenant. A l'évidence, et pour autant qu'on puisse en juger, les réponses sont incomplètes, voire inexistantes, ou, dans le meilleur des cas, peu substantielles. Autre fait curieux : en page 4 du rapport figurant au point 41, le Conseil d'Etat entend répondre à la motion 456, alors que ladite motion n'apparaît pas en première page du rapport comme un objet auquel il répond. Moi, je veux bien, mais cela me semble bizarre. Enfin, la déclaration partiale du Conseil d'Etat dans le deuxième paragraphe du rapport nous a proprement sidérés. De quel droit le Conseil d'Etat se permet-il de juger du climat qui aurait inspiré telle ou telle proposition dans la législature précédente ? De quel droit entend-il «tirer un trait sur le passé», sur des objets auxquels notre constitution l'oblige à répondre dans un délai de six mois, en tout cas en ce qui concerne les motions, et en vertu de l'application de l'article 92 ?
Nous considérons, pour notre part, que cette manière de procéder est la négation totale du travail fourni par les députés; des députés qui consacrent du temps et fournissent des efforts pour préparer leurs propositions; des députés dont c'est le rôle de porter au Conseil d'Etat les revendications des citoyens qui les ont élus, qui le font dans des conditions de plus en plus difficiles - cela a été rappelé hier - quasi bénévolement, sans infrastructure d'aide et de soutien, la plupart du temps en plus d'une activité professionnelle à plein temps et, souvent, au détriment de leur vie de famille et de leurs loisirs. Bien entendu, je ne nie pas la charge énorme qui incombe aux conseillers d'Etat, mais j'aimerais quand même souligner que eux, comme les hauts fonctionnaires et contrairement aux députés, sont payés pour le faire !
Répondre en trois petites pages inconsistantes à une quinzaine d'interventions nous semble révélateur de la manière dont le nouveau gouvernement entend appliquer l'article 92 de notre constitution et cela nous inquiète ! De plus, cela révèle l'indifférence - pour ne pas dire le mépris - avec laquelle sont traitées les pétitions des citoyens qui s'adressent aux autorités politiques en désespoir de cause et pour tenter de résoudre certains problèmes. Cela aussi est inquiétant s'agissant de l'exercice des droits démocratiques.
Avant de conclure, j'ajouterai quand même que je comprends bien que le Conseil d'Etat puisse être parfois agacé par l'accumulation des objets qui lui sont renvoyés, traitant souvent de mêmes sujets, et auxquels il est supposé répondre. Je considère quant à moi que leur nombre est plutôt réjouissant, car il prouve le dynamisme de notre parlement. Si je puis me permettre de faire une petite suggestion : la meilleure façon de «s'en débarrasser» ne serait-elle pas de les traiter au fur et à mesure de leur dépôt et dans les délais prescrits, afin d'éviter leur accumulation dans les tiroirs du Conseil d'Etat ?
Ces observations sont valables pour les points 41 et 42. Nous reviendrons tout à l'heure sur le point 43 dont le rapport est tout de même plus substantiel. Le groupe socialiste vous demande de renvoyer au Conseil d'Etat les deux rapports relatifs aux deux premiers points. (Quelques applaudissements.)
M. Claude Blanc. Timides applaudissements ! (Rires.)
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Une expérience du parlement - inférieure à la vôtre, il est vrai - m'a appris à faire une différence entre les paroles et le bruit qu'elles font !
Vous êtes déçue, vous êtes choquée. Mais, Madame, vous vous trompez complètement ! Je vous rappelle que certains de ces textes ont plus de dix ans... (Manifestation.) ...c'est donc à mon devancier qu'il faut faire des reproches et pas à moi ! (Contestation.) Ces textes traînent depuis dix ans, comment l'expliquez-vous ? C'est parce que certains de ces textes ont été très rapidement dépassés !
Je vous donne deux exemples. La traversée du village de Chancy. Elle est à l'ordre du jour du comité régional franco-genevois; nous parlons d'une situation qui a évolué au cours des années, et, maintenant, le problème se pose à nouveau. Le parking sous la place Neuve quant à lui est étudié tous azimuts. Alors, Madame, il faut être raisonnable ! Si vous me demandez de répondre en détail à chacun de ces textes, je le ferai volontiers. Il me suffit de mettre à l'oeuvre un secrétaire adjoint qui rédigera cinq à six pages de texte pour vous contenter. Mais ce n'est pas sérieux, Madame ! Cinq ou six pages de texte pour des événements qui remontent aux années 1980 et qui sont traités en 1994, franchement, je n'en vois pas l'utilité ! Alors, de deux choses l'une : ou bien vous voulez du formalisme, et vous l'aurez - ce n'est pas un problème pour moi, j'ai le personnel qu'il faut pour cela - ou bien vous voulez du pratique, mais, de grâce, ne me dites pas que vous êtes choquée et déçue !
Je vous le répète, j'ai sorti vingt-sept textes des tiroirs de mes devanciers, alors ne mettez pas ma bonne foi en doute ! Je ne mets pas la vôtre en doute non plus, mais je vous dis franchement que je suis surpris. Je veux bien faire de l'administration, mais c'est du travail inutile. Je veux bien retarder les réponses, mais elles n'auront aucune valeur ! Que voulez-vous que je réponde au sujet de la place Neuve dont le texte date de 1980 ? Je veux bien vous concocter une réponse, mais ce sera de la bouillie pour les morts ! Mais si vraiment cela vous fait plaisir, je le ferai volontiers, chère Madame ! (Quelques applaudissements mêlés à des sifflements et à des huées.)
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Puisque le chef du département vient de parler de chantier, parlons-en !
La pétition 689 a été déposée en 1986, et vous découvrez maintenant qu'il y a de nouveau des problèmes de sécurité à Chancy ! Ils datent d'avant, Monsieur ! Vous dites que le problème est actuellement examiné avec l'Ain. Il aurait peut-être mieux valu le signaler dans le rapport plutôt que de ne rien mettre. Figurez-vous que depuis ce temps-là d'autres lettres ont été envoyées au département. Vous avez raison de dire qu'avant vous il y avait un autre conseiller d'Etat. En novembre 1993, il répondait qu'il ne pouvait pas tout faire en même temps et qu'il s'occuperait de Chancy une autre fois. La pétition pouvait bien attendre encore un peu. La raison en est simple et logique. En effet, la population de Chancy est de moindre importance !
Une voix. Exactement !
Une autre voix. Il y a moins d'électeurs ! (Rires.)
Une autre voix. Donc, il y a moins de risques ! (Redoublement de rires.)
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus. Deux mille camions seulement circulent à Chancy chaque jour ! Les problèmes liés à cet intense trafic de camions ne sont pas importants, puisque cela concerne quelques centaines de personnes seulement ! Vous ne pouvez pas répondre que cette pétition est réglée, parce que les problèmes sont incessants. La situation s'est péjorée, car le nombre des habitants a augmenté et la circulation est devenue plus dense, alors que les voies de communication sont restées les mêmes. Il faut donc apporter une réponse valable et ne pas vous satisfaire d'une non-réponse !
Cette pétition avait fait l'objet d'un rapport et d'un renvoi au Conseil d'Etat, et je relève que la conclusion de la commission ne recommandait pas une route de contournement - j'en suis très satisfaite. En effet, je m'y suis toujours opposée pour des raisons de préservation de l'environnement et de la zone agricole. Il ne faut pas faciliter encore davantage le transport routier du gravier, au contraire il faut réfléchir aux solutions de transport par train, par ferroutage.
M. Jean-Pierre Lyon (AdG). Les déclarations du Conseil d'Etat sont pour le moins surprenantes !
Cinq points concernent la sécurité des piétons, et en page 5 figure un tout petit paragraphe en guise de réponse. Je trouve que c'est grave de traiter un tel sujet aussi légèrement, alors que le Grand Conseil gère plus de trois cent quatre-vingt mille habitants !
Vous devez accepter à l'unanimité le renvoi au Conseil d'Etat pour que nous ayons des réponses plus étayées.
Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez dit que certains objets ont plus de dix ans. Alors pourquoi ce soir nous présentez-vous l'IN 4 déposée voilà quatorze ans ? Faites pareil, jetez-la ! (Eclat de rires général.) Elle a quatorze ans, vous venez de le dire ! Monsieur le conseiller d'Etat, vous n'êtes pas cohérent et vous n'êtes pas sérieux ! Il faut aller jusqu'au bout de votre logique et tout jeter !
Si vous êtes conscients, Mesdames et Messieurs les députés, de l'importance de la sécurité des habitants, en particulier des écoliers de ce canton, vous devez renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat. Si vous ne le faites pas, vous êtes coupables d'assassinat ! (Vive manifestation de contestation. Applaudissements des radicaux.)
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je partage entièrement les propos de Mme Torracinta-Pache.
Je tiens quand même à m'exprimer au sujet de la motion 496 que j'ai déposée il y a six ans. La réponse est plus que succincte, puisqu'elle comporte à peine trois lignes. Le rapport stipule, en page 3, je cite : «Pour sa part, le Conseil d'Etat est convaincu de la nécessité d'éviter tant l'approche idéologique que l'approche purement technocratique du problème. C'est dire qu'il fait sienne une démarche pragmatique, systémique, ouverte au dialogue et à l'évolution.».
C'est exactement l'esprit de l'invite de la motion 496 qui fut déposée et acceptée à l'unanimité il y a six ans et demi ! Elle demandait, je cite : «...invite le Conseil d'Etat à étudier, dans le cadre des relations franco-genevoises, la possibilité, lors de l'examen des demandes d'octroi ou de renouvellement du permis frontalier, d'exiger la présentation de l'attestation française relative au contrôle antipollution (carte blanche).». La démarche pragmatique consiste, effectivement, à demander aux vingt mille frontaliers, conducteurs d'un véhicule, de présenter leur carte blanche, pour les inciter à passer le contrôle antipollution dans leur pays. Il y a eu concertation, puisque tout le monde était d'accord : les Genevois et les Français ont reconnu, lors des auditions, que cette mesure ne posait pas de réels problèmes d'application. Je suis donc très étonnée qu'il ait fallu six ans au Conseil d'Etat pour expliquer dans un rapport, en moins de trois lignes - et encore en se trompant de numéro de motion ! - qu'il envisageait de poursuivre la concertation transfrontalière dans ce domaine.
En fait, pour appliquer cette invite, qui répond aux préoccupations de pragmatisme et de dialogue préconisées par le Conseil d'Etat, quelques semaines auraient suffi pour mettre au point une circulaire destinée aux frontaliers détenteurs d'un véhicule leur indiquant la nécessité de présenter leur attestation française de contrôle antipollution.
Je n'ai pas l'intention de redéposer cette motion, aussi je voudrais bien qu'elle soit renvoyée au Conseil d'Etat pour que l'on obtienne enfin ce qui avait été accepté il y a six ans !
J'évoque le problème de la motion qui me concerne, mais je soutiens, évidemment, le renvoi des deux premiers rapports au Conseil d'Etat.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Je voudrais répondre brièvement à M. Ramseyer. D'abord, je tiens à le rassurer, je ne le rends pas responsable du retard accumulé par ses prédécesseurs, de quelque bord qu'ils soient. Nous sommes bien d'accord ! Tous ont pris du retard.
Malheureusement, Monsieur le conseiller d'Etat, c'est vous qui êtes en place maintenant, et c'est vous qui êtes supposé vider les tiroirs ! C'est donc à vous que je m'adresse, car c'est tout de même vous qui êtes responsable de cette nouvelle procédure. Je ne vous ai pas réclamé des réponses de cinq ou six pages, et il me semble avoir été précise. Nous aimerions simplement que les textes originaux apparaissent dans les rapports, pour éviter de consulter la liste et de rechercher dans le Mémorial quels textes on traite. Un petit paragraphe pour répondre à chaque texte nous semblerait judicieux, sauf, peut-être, pour les textes complètement dépassés. Ainsi, nous saurions de quoi il retourne.
Mesdames et Messieurs, si vous acceptez la procédure qui vous est proposée aujourd'hui, cela revient à nier encore une fois le travail parlementaire. C'est simple, je vois le moment où nous n'aurons plus besoin de venir. Nous déposerons des projets, puis nous viendrons chercher les réponses, sous forme de multipack, tous les six mois ! Cela a plus d'importance que vous ne l'imaginez. Je vous demande donc, pour des raisons de fond, de renvoyer ces deux rapports au Conseil d'Etat.
Le président. Puis-je me permettre, Madame la députée, de vous faire observer que jusqu'ici nous n'avions pas de réponse du tout ! (Les commentaires vont bon train.)
M. Luc Gilly (AdG). Je me joins aux récriminations de Mme Torracinta-Pache. Je trouve absolument incroyable que l'on nous réponde de cette manière sur des sujets aussi importants. Je saisis cette occasion pour évoquer la motion 764, s'agissant des Pâquis.
Le président. Monsieur le député, nous voterons lettre par lettre !
M. Luc Gilly. D'accord ! Alors je reprendrai la parole tout à l'heure !
Le président. Si vous êtes disposés à entamer cette procédure, je vous propose d'aborder le point 41 de notre ordre du jour, soit le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion 437.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Je demande de renvoyer le point 41 au Conseil d'Etat; nous aborderons le point 42 ensuite.
Le président. C'est concevable ! (Rires.)
Mise aux voix, la proposition de renvoyer le point 41 au Conseil d'Etat est rejetée.
M 437-A
Mme Liliane Charrière Urben (S). Je demande la lecture de cette motion, étant donné que je n'ai pas le texte et que je ne sais pas de quoi il s'agit. (Réactions mitigées.)
M. John Dupraz (R). Je demande que cette proposition de lecture soit votée.
Cette proposition est rejetée.
M. Pierre Meyll (AdG). Je constate que nous allons devoir voter sur des motions et des pétitions dont nous ne connaissons même pas le texte, ce qui est absolument antidémocratique. J'admets que M. Ramseyer nous dise que certains points sont dépassés pour autant que nous ayons au moins le texte afin de juger sur quelque chose de concret. Il est absolument impossible de faire un travail sérieux dans ces conditions !
Il serait préférable de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat pour que M. Ramseyer nous réponde en joignant les textes et en indiquant, s'il y a lieu, ceux qui sont dépassés. Au moins, nous saurons sur quoi voter. Cela me paraît beaucoup plus logique. A part quelques personnes qui ont bien voulu s'abstenir, j'aimerais qu'en face on tienne compte d'une demande qui me semble raisonnable !
Le président. Monsieur le député, si vous le voulez bien, nous allons passer à la lettre a) de ce point de l'ordre du jour.
M. Pierre Meyll. Non, Monsieur le président, je ne suis pas d'accord de passer à lettre a) ! (En colère, l'orateur poursuit.) Je considère que l'ensemble du rapport est absolument inadmissible. Je demande simplement que l'on renvoie le tout, parce qu'il n'est pas possible de voter sur des sujets que l'on ne connaît pas. C'est antidémocratique !
Le président. J'ai fait voter le Grand Conseil qui a choisi d'entrer en matière sur le point 41. Nous sommes donc au point 41, lettre a).
M. Pierre Meyll. (Très énervé.) Le Grand Conseil, en l'occurrence... (Le président coupe le micro de M. Meyll, qui continue à s'exprimer très en colère.) Le Grand Conseil ne sert à rien dans ce cas. C'est antidémocratique ! Je n'accepte pas cette manière de travailler. (L'orateur dit ces mots en tapant du point sur son pupitre.)
Le président. Lettre a). Que celles et ceux qui souhaitent prendre acte de ce rapport lèvent la main !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je voudrais poser deux questions.
La première vous est adressée, Monsieur le président. Pouvez-vous me dire de quoi traite cette motion 437 ? En effet, le rapport ne mentionne que ses auteurs; il ne stipule pas le sujet de la motion.
Ma deuxième question s'adresse à M. Ramseyer, conseiller d'Etat. Monsieur Ramseyer, où puis-je trouver la réponse à cette motion 437 ?
Mme Claire Chalut (AdG). Cela ne fait pas tout à fait une année que je suis dans ce parlement, mais j'en propose la dissolution ! Cela sera plus économique pour tout le monde ! Comme l'a dit mon collègue, il est impossible de voter sur des objets dont on ne connaît même pas la teneur ! Je ne peux pas me prononcer sur un «truc» comme ça !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je constate que les tours montent !
Nous avons fait exactement ce qui a été demandé par votre Bureau et votre président, dans les délais fixés. Certains de ces textes ont été rédigés par des députés qui ne siègent même plus ici. (Vive manifestation de contestation.) (Interpellé par une députée.) Laissez-moi finir, Madame, et vous serez satisfaite ! Vous me dites que vous n'avez pas les textes avec vous, mais vous pourriez les trouver !
Je constate simplement que vous refusez de travailler sur des réponses dans lesquelles ne figurent pas les textes déposés. Je peux comprendre cette position, puisque vous dites ne pas pouvoir vous procurer ces textes. Cela étant, par mesure d'apaisement, je maintiendrai intégralement les textes qui vous sont présentés et je vous redonnerai ce rapport avec la photocopie, au dos, de tous les textes initiaux, pour que vous puissiez vous y référer et juger sur pièce. A une prochaine séance, je reviendrai donc avec la totalité des documents pour que vous puissiez vous prononcer, mais je ne changerai pas le texte que je vous ai proposé.
J'espère ainsi, Mesdames et Messieurs des bancs de gauche, vous qui ne semblez pas approuver ce mode de faire, que vous serez satisfaits. Moi, ça ne me dérange pas !
Les points 41, 42 et 43 sont retirés de l'ordre du jour.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Mon interpellation s'adresse à M. Ramseyer.
La presse alémanique a signalé, dernièrement et très discrètement, un projet d'aménagement de quarante-cinq places de détention dans le centre d'enregistrement de requérants d'asile à Bâle; cela, bien évidemment, en cas d'acceptation de la loi sur les mesures de contrainte que nous espérons voir rejetée par le peuple le 4 décembre.
Il n'y a pas de raison de penser qu'il n'en sera pas de même au centre d'enregistrement de Genève si la loi est acceptée. D'ailleurs, déjà aujourd'hui, on peut observer que les personnes qui y séjournent ne jouissent pas de leur liberté de mouvement, dans la mesure où elles ne peuvent sortir sans autorisation. Celle-ci peut être acceptée ou refusée, même sans motif, et elle doit être sollicitée au moins une demi-journée à l'avance. D'une façon générale, au surplus, les requérants ne peuvent quitter le CERA entre 17 h 45 et 9 h le matin. Cette situation s'apparente donc tout à fait à une forme de semi-détention.
Dès lors, mes questions sont les suivantes :
1) Est-il conforme au droit que des personnes soient privées de leur liberté par une instance fédérale sur le territoire du canton de Genève, mais en dehors de tout contrôle d'une juridiction genevoise ?
2) Si c'est le cas, quelle en est la base légale ?
3) Si ça n'est pas le cas, quel contrôle le Conseil d'Etat entend-il exercer sur le fonctionnement du CERA ?
4) Si des discussions sont en cours en vue d'installer au CERA de véritables cellules destinées à la détention de personnes qui seront renvoyées sous la contrainte, quelle est position du Conseil d'Etat ?
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. J'aurais souhaité recevoir ces questions à l'avance pour pouvoir me préparer. Imaginant que vous alliez évoquer les problèmes du CERA, je peux néanmoins vous apporter quelques éléments de réponse.
S'agissant de l'installation au CERA de cellules destinées à la détention de personnes renvoyées sous la contrainte, je vous informe qu'aucune discussion n'est en cours à ce sujet et que le Conseil d'Etat n'a pas l'intention d'adresser une requête dans ce sens à l'autorité fédérale.
Vous demandez quelle en est la base légale. Une éventuelle transformation d'une partie du CERA en un lieu de détention ne pourrait procéder que d'une demande cantonale, voire intercantonale. Les nouvelles dispositions de contrainte dans le droit des étrangers donnent, en effet, à la seule autorité cantonale la compétence d'ordonner la détention d'un étranger pendant la préparation de la décision sur son droit de séjour ou lorsqu'une décision de renvoi en première instance a été notifiée. Une détention préventive ordonnée par l'autorité fédérale au CERA ne reposerait donc sur aucune base légale.
La question de la relation entre la Confédération et le territoire cantonal s'est également posée, et mes services ont d'ores et déjà rédigé la réponse suivante : actuellement, l'autorité fédérale, l'ODE, décide de l'internement sur territoire cantonal d'un étranger qui ne peut être refoulé. Lorsqu'il menace sérieusement l'ordre et la sécurité publics, les nouvelles mesures de contrainte ne prévoient plus cette faculté. En remplacement, le nouveau droit donne à l'autorité cantonale la compétence d'assigner un étranger dans un lieu de séjour déterminé et d'ordonner sa mise en détention s'il ne se conforme pas à la décision prise.
Vous parlez de semi-détention au CERA; c'est une appellation que je ne partage pas. L'administration d'une structure d'accueil et d'hébergement collective, les repas à heures fixes et le fait que les requérants doivent être à la disposition de l'autorité fédérale pour être contrôlés et pour qu'il puisse être procédé à leur audition d'enregistrement, rendent indispensable de subordonner la sortie du bâtiment à une autorisation. Le centre est fermé la nuit, car seul un personnel réduit assure la surveillance des locaux. Au surplus, le séjour au CERA pourrait certainement être moins long s'il n'y avait pas autant de demandes abusives, car la procédure en serait accélérée d'autant. A toutes fins utiles, je rappelle encore que le dépôt d'une demande d'asile se fait sur une base volontaire.
Pour terminer, permettez-moi de relever que certains milieux s'offusquent du fait que des requérants d'asile sans papiers sont laissés à la rue par le CERA. Il faudrait alors savoir si l'on veut des requérants d'asile à l'intérieur ou à l'extérieur du bâtiment ! C'est la réponse que je pouvais apporter à votre question.
J'ajoute, Madame la députée, que si je n'ai pas répondu complètement à votre question, puisque j'en prends note à l'instant, je vous serai reconnaissant de bien vouloir me la transmettre pour que je puisse vous répondre plus complètement lors de la prochaine séance.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Visiblement, on continue à se moquer du travail des députés !
Un député a le droit de poser une question sous forme d'interpellation. En général, il est assez correct pour transmettre son texte à l'avance au Conseil d'Etat, pour ne pas le surprendre. Monsieur Ramseyer, je vous ai donné mon texte écrit intégralement à la dernière séance du Grand Conseil et, au surplus, votre collaborateur, M. Riat, craignant que vous n'ayez égaré ce texte, me l'a redemandé. Je le lui ai fourni la semaine dernière. C'est donc en double exemplaire que vous avez eu le texte de mes questions ! Je ne sais pas ce qui se passe dans vos tiroirs, car beaucoup de motions sont traitées avec retard, mais, apparemment, les interpellations se perdent aussi !
Vous prétendez qu'il n'y a pas de détention au CERA. Il est vrai qu'un certain nombre de règles doivent être pratiquées dans un logement collectif destiné à des personnes qui ne connaissent pour la plupart pas notre ville ni notre langue. Il n'en reste pas moins que je pourrais vous citer pas mal d'exemples intéressants, dont celui d'une femme enceinte qui, à deux semaines de son accouchement, souhaitait dormir ailleurs que dans un lieu bruyant et enfumé comme le CERA. Elle avait trouvé un lieu d'accueil, mais on lui a interdit d'aller dormir ailleurs. J'appelle ça de la détention, et rien d'autre, Monsieur Ramseyer !
Cette interpellation est close.
En date du 19 janvier 1993, la pétition 978 a été déposée. Munie de2 signatures, elle a la teneur suivante:
PÉTITION
Pour un réexamen de l'affaire du Burgas Bar
La précédente pétition ayant été réglée sans pour autant que n'ait eu lieu la moindre confrontation entre les parties. Le Grand Conseil s'est déclaré incompétent. Depuis, de nombreux faits nouveaux sont intervenus, démontrant que les dires des pétitionnaires de la pétition 864 avaient raison. La justice par les tribunaux a rendu des jugements basés essentiellement sur des allégations fallacieuses de Pierre Ochsner, et n'a par contre jamais tenu compte des faits exposés par Galcom SA, étayés par les pièces et les déclarations à la police, des accusés. L'envoi de cette affaire aux tribunaux civils, alors qu'elle aurait dû, compte tenu des faits graves, être dirigée sur la Cour correctionnelle, démontre que le Parquet n'a pas rempli l'engagement pris par le serment tant des juges d'instruction que du procureur, puisque ce dernier en particulier, n'a jamais voulu recevoir les demandeurs.
Par la présente pétition, les pétitionnaires demandent expressément au Grand Conseil de prier le procureur général de se conformer au serment qu'il a porté devant lui, et de réétudier cette affaire dès le commencement, soit le 24 octobre 1989, date de la première plainte déposée par Galcom SA, classée «jusqu'à faits nouveaux», et les faits nouveaux s'étant produits, selon les plaintes pénales 30360/89, de reprendre à la base les faits pour constater s'il n'y avait pas lieu de transférer, comme cela apparaît, cette affaire aux inculpations en découlant.
Le traitement de cette pétition dans les plus brefs délais serait conforme à la nécessité, au regard des trois années déjà écoulées dans cette triste affaire.
N.B. : 2 signatures
M. M. T. Reubi
16, rue Plantamour1201 Genève
Discussion de la commission
En réalité cette pétition vise à la réouverture d'un dossier déjà traité et qui avait fait l'objet de la pétition 864. En 1990, la commission des pétitions avait recommandé le dépôt sur le bureau du Grand Conseil, ce qui fut fait.
Sur le fond, il s'agit de conflits à rebondissements multiples entre les tenanciers du Burgas Bar, les époux Reubi, et leur propriétaire, voir les mandants de ceux-ci. Différents tribunaux s'étant déclarés incompétents (première instance, Cour de justice) le couple a déposé plainte. Sujets à une quérulence persistante, les pétitionnaires entendent maintenant demander au Grand Conseil pas moins que de rappeler le Procureur général à l'ordre !
Compte tenu de la séparation des pouvoirs, la commission des pétitions estime que le Grand Conseil n'a pas à s'immiscer dans ce conflit, encore moins à tancer le Procureur général.
Elle vous propose donc à l'unanimité, Mesdames et Messieurs les députés, de classer la pétition 978.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (classement de la pétition) sont adoptées.
La commission des pétitions s'est réunie, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, les 13 décembre 1993 et 20 juin 1994, afin d'examiner la pétition 1011, déposée le 26 octobre 1993:
PÉTITION
Rue Baudit - avenue des Grottes / tapage nocturne /«La Gitana»
L'ouverture d'un débit de boissons «La Gitana» avec droit de danse les vendredi, samedi et dimanche soir a été autorisée par le département de justice et police (DJP) malgré des oppositions préalables.
Les habitants du voisinage se plaignent du tapage nocturne, notamment lors de la fermeture les soirs de danse.
Les habitants de l'annexe de l'Armée du Salut (avenue des Grottes) et les occupants du cabinet médical sus-jacent se plaignent du bruit de la musique les soirs de danse (plafond antibruit inefficace suite à certaines manipulations techniques). Des protestations se sont élevées dans le quartier et ont même motivé des descentes de police.
Par conséquent, les soussignés, habitants du quartier et personnes concernées, demandent aux autorités concernées:
- que la tranquillité du quartier soit respectée et que des mesures soient prises pour mettre fin au tapage nocturne;
- qu'une autorisation de danse ne soit pas accordée par le DJP pour d'autres soirs;
- que d'autres autorisations (exemple: ouverture éventuelle d'une salle de jeux) ne soit pas accordée à la légère par le DJP.
N.B.: 63 signatures
Dr B. Radeff
6, rue Baudit
CH-1201 Genève
Auditions
La commission a auditionné les pétitionnaires, à savoir, M. B. Radeff et Mmes A. Dudan, S. Wieland et A. Weidemann, ainsi que M. H. Pisteur, propriétaire de «La Gitana», M. B. Bohbot, responsable des autorisations de commerce, M. S. Lago, gérant de «La Gitana», et Mlle D. Bel, tenancière d'un autre café du quartier des Grottes («Le Tunnel»).
M. Radeff, médecin, a son cabinet médical au 6, rue Baudit, dans le quartier des Grottes, au-dessus du débit de boissons dit «La Gitana». Ce débit de boissons a droit de danse les vendredi, samedi et dimanche soir. M. Radeff se plaint du bruit occasionné notamment par les musique, les soirs de danse. Il demande que:
i) la tranquillité du quartier soit respectée, et
ii) que le département de justice et police et des transports n'accorde pas à la légère d'autorisation de danse pour d'autres soirs que ceux susmentionnés ni pour une éventuelle salle de jeux.
Mme Dudan, directrice du Centre-Amitiés de l'Armée du Salut. Les habitants du Centre semblent particulièrement gênés par les bruits liés au parcage des véhicules. Mme Dudan se plaint également des drogués, ainsi que des personnes qui vomissent devant la porte de l'immeuble ou endommagent son entrée.
Mme Wiedemann, dont la maison est située derrière «La Gitana», se plaint également des nuisances occasionnées par le bruit causé par l'établissement.
Les pétitionnaires mentionnent à plusieurs reprises les contacts qu'ils ont essayé de prendre avec le gérant de l'établissement, M. Lago, cela afin d'arranger les choses «à l'amiable», mais sans que ces tentatives ne soient couronnées de succès.
M. Pisteur, propriétaire de l'immeuble, affirme n'avoir jamais eu de démêlés avec le DJP. Il lui semble que beaucoup de nuisances sont attribuées à «La Gitana» alors que certaines sont sans rapport avec l'établissement. Il n'a pas l'intention de déposer de demande d'aménagement de salle de jeux. Il a pris un maximum de mesures pour insonoriser «La Gitana».
M. Lago confirme les propos de M. Pisteur et, quant à lui, il n'a pas demandé d'autorisation de danse pour d'autres soirs, sauf exceptions très rares.
Discussion de la commission
Entre la première audition des pétitionnaires et celle du propriétaire et du gérant de l'établissement faisant l'objet de cette pétition, les choses semblent s'être calmées. «La Gitana» a pris des mesures contre le bruit et il n'y a pas eu de nouvelle plainte. En ce qui concerne M. Radeff, les commissaires ont considéré d'une part que son cabinet médical n'est pas ouvert aux heures où les nuisances liées au bruit sont les plus importantes et, d'autre part, que M. Radeff n'a pas son logement dans cet immeuble. En ce qui concerne les plaintes du Centre-Amitiés, les commissaires ont discuté des avantages et des désavantages respectifs à ce que les personnes âgées habitent au centre ville, en retenant dans l'ensemble que les avantages sont plus importants que les inconvénients (dont le bruit). Finalement, une des demandes des pétitionnaires se voit également exaucée d'elle-même, dans la mesure où ni le propriétaire ni le gérant de «La Gitana» ne prévoient de demander des autorisations d'exploitation supplémentaires.
Dans ces conditions, la commission, par 12 voix pour et une abstention, vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
En date du 28 mars 1994, la commission des pétitions prenait connaissance d'une pétition munie de 18 signatures, adressée au Grand Conseil en date du 18 mars 1994, par le GPFI (Groupement pour la protection de la famille et des individus) et dont le texte est le suivant:
PÉTITION
contre la scientologie
But
Demande la création d'une commission visant à prendre toutes mesures légales et autres pour protéger, porter assistance à toutes familles ou individus victimes de sectes poursuivant le culte de l'argent par la pratique des manipulations mentales de ses adeptes et la destruction de ceux qui en entravent le développement.
Inviter ainsi le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève à prendre d'urgence toutes mesures provisoires nécessaires allant dans le sens du but de la présente pétition.
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
La presse parle de plus en plus des individus victimes de la scientologie, secte qui pratique le culte de l'argent. (Définition acceptée par le Tribunal fédéral en date du 19 décembre 1992, pièce annexée.)
Si la scientologie s'en prend à des êtres fragiles pour leur soutirer leur argent et celui de leur famille, cette dernière s'en prend également à ceux qui en entravent le développement.
Il y a lieu aujourd'hui d'en parler.
Nous citerons:
1. Quelques textes relatifs à l'exploitation de la personne prise au piège (environ 1000 noms recensés à Genève):
«Obtenez des données. Obtenez tous les noms, dates, adresses, numéros de téléphone et autres renseignements qui pourraient être utiles à une investigation plus approfondie du cas, si on en avait besoin.»
(LHR. Bulletins techniques, vol. 12.)
«Quand quelqu'un s'inscrit, considérez que c'est pour la durée de l'éternité. Ne permettez jamais une approche du type «esprit ouvert». S'ils se sont engagés, ils y sont dans les mêmes conditions que le reste d'entre nous; vaincre ou mourir dans la tentation.
Ne les laissez jamais être à moitié scientologues. Les plus belles organisations de l'histoire ont été des organisations dures vouées à leur tâche. Aucun groupe gnangnan de dilettantes efféminés n'a jamais réalisé quoi que ce soit. Nous vivons dans un univers dur (...). Nous survivrons parce que nous sommes durs et dévoués. Quand nous faisons réellement et correctement l'instruction de quelqu'un, il devient un tigre.»
(RH. Fascicule HCOPL. Car. et Rép. 12.10.1985.)
«Cherchez à toucher les points clés par n'importe quel moyen; la directrice du club féminin, le secrétaire du président, le conseiller du syndicat. Gagnez bien votre vie avec ça, mais faites votre travail, maniez (manipulez, en termes sciento - n.d.l.r.) et améliorez les gens que vous rencontrez et créez une meilleure planète.»
(LHR. Lettre de règlement HCO, Rev. 26.10.1980.)
«Vous devez vous attacher à contrôler sans interruption chaque personne entrant dans votre bureau, depuis le moment où vous les amenez de la réception (...), à partir de ce moment jusqu'à l'étape finale où ils signeront le chèque, et même jusqu'à ce qu'ils aient franchi la porte. Ceci est la raison de 90% de mon succès. Les gens réclament qu'on les contrôle.»
(LHR. Volume administratif No 2.)
«Maintenant, nous en savons plus sur la psychiatrie que les psychiatres eux-mêmes. Nous pouvons faire un lavage de cerveau plus vite que les Russes (en 20 secondes nous obtenons une amnésie totale, contre trois années nécessaires pour rendre la loyauté à quelqu'un légèrement confuse. (resic)»
(LHR Bulletins techniques. Vol. 2.)
Contrat annexé
2. Quelques textes et directives donnés aux cadres supérieurs et aux membres actifs fervents de la secte, à appliquer à l'encontre de ses ennemis qualifiés par cette dernière de:
«SP»: suppressifs
ou
«Fair game»: gibier de potence (mot le plus utilisé).
«ennemi: Ordre «SP». «Fair game». Peut être privé de propriété ou blessé par tous moyens par tout scientologue sans qu'il encoure aucun reproche de la part de la scientologie. On peut le tromper, le poursuivre en justice, lui mentir ou le détruire.»
(Extrait de Hubbard Communications Office)
Saint Hill Manor. East Grinstead. Sussex, Oct. 1967.
«Si vous êtes attaqués, arrangez-vous pour que la question soit politisée, donnez l'impression au public, au gouvernement qu'ils sont tombés sur un barrage de flèches et un bombardement électronique, et que, s'ils continuent leurs attaques, cela provoquera leur propre désintégration. (...) Introvertissez ces différents groupes, contrôlez-les, la scientologie est le seul jeu sur terre où tout le monde gagne. Il n'y a pas d'actes néfastes à mettre bon ordre dans les choses.»
(LRH. HCO Lettre de règlement. Volume vert No 7 (réservé aux cadres supérieurs de l'organisation - n.d.l.r.), 15.08.1960.)
«Si vous êtes attaqués sur un point vulnérable par quelque individu ou quelque organisation que ce soit, fabriquez ou trouvez une menace suffisante contre eux pour les amener à négocier la paix. Débrouillez-vous pour vous mettre dans une position où vous aurez l'avantage, et alors posez vos conditions. Ne vous défendez jamais, attaquez toujours. Ne restez pas inactifs. C'est l'attaque imprévue sur l'arrière des premiers rangs de l'ennemi qui paie le plus.»
(LRH. HCO. Lettre de règlement. Volume vert No 7 (réservé aux cadres supérieurs de l'organisation - n.d.l.r.), 15.08.1960.)
«S'il se présente une menace à long terme, vous devez immédiatement évaluer la situation et provoquer une campagne de propagande noire, afin de détruire la réputation de la personne et la discréditer de telle manière qu'elle soit mise au ban de la société.»
(LRH. HCO. Lettre de règlement. 30.05.1974.)
«Il est possible qu'une personne ait un cancer de la peau, avec la Niacine. Au cas où cela se produirait, le cancer disparaîtrait complètement si on continue la Niacine».
(LRH. Fascicule HCOB- Rs-Rev. 21.04.1983.)
A la lecture de ces textes, vous conviendrez que cette secte porte et portera de plus en plus atteinte à nos familles, aux individus, donc à notre société et représente un réel danger.
C'est ainsi que nous sollicitons du Grand Conseil qu'il accède sans délai et en l'urgence à notre requête citée sous rubrique, en cette année 1994, année de la famille.
Nous vous remercions de nous tenir informés et vous prions de croire, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, à l'assurance de notre confiance et de nos sentiments dévoués.
N.B: 10 signatures
G.P.F.I.
Groupement pour la protection
de la famille et des individus
Case postale
1255 Vernier
La pétition était accompagnée d'articles de presse et de documentation sur la scientologie.
Introduction
En mai 1950, M. Lafayette Ron Hubbard publia un livre intitulé «La Dianétique, science moderne de la réalité mentale». Ce livre tente d'expliquer le mental humain. C'est en quelque sorte une méthode psychanalytique, tendant à aider les personnes à se débarrasser de toutes les influences négatives accumulées durant leur vie, à guérir de toutes les maladies psychosomatiques et à accéder à leur top niveau, au 100% de leurs capacités mentales et physiques de manière à obtenir, par la suite, la réalisation de leurs désirs, par une forme de pensée positive et volontariste.
Est-ce l'époque (maccarthysme, début des terreurs nucléaires) qui créa un terrain favorable, ou les techniques d'éveil de la personnalité de L. Ron Hubbard (inspirées du bouddhisme en premier lieu, du yoga et de la psychiatrie traditionnelle, entre autres) qui apportèrent à ceux qui ne les connaissaient pas l'impression de découvrir quelque chose d'extraordinaire? Toujours est-il que la Dianétique eut un vif succès, aux USA, tout d'abord, puis, à travers le monde. Ce succès permit à L. R. Hubbard de fonder la «scientologie» en 1952. S'inspirant de la Dianétique, mais en l'approfondissant, la scientologie fut également bien accueillie. Cependant, après quelque temps, elle souleva aussi plus de polémiques et en soulève toujours. En 1954, elle commença à s'instaurer religion aux USA et à se dénommer «Eglise de scientologie», terme très controversé par la suite. Introduite en France en 1959 elle s'étend actuellement sur 65 pays du monde. Huit millions d'adeptes seraient passés par la scientologie depuis sa fondation (voir art. «La vie», 10 juin 1993). En Suisse, elle est présente depuis les années 70 et existe depuis 20 ans à Genève (selon M. Colle, scientologue). Bien qu'il soit difficile de dénombrer ses adeptes, on peut dire qu'ils sont environ 2 000 en Suisse romande et entre 400 et 600 dans notre canton.
Lorsque débutent les travaux de la commission, ses membres sont loin d'en connaître autant que ce que contient le présent rapport sur celle que l'on appelle «église» ou «secte», selon ce que l'on pense d'elle.
Les travaux de la commission
Désirant éviter tout conflit rhétorique, la commission citera ses interlocuteurs dans leurs termes. Mais, quant à elle, elle utilisera, pour désigner «l'Association Eglise de scientologie de Genève», le terme «l'association».
Le 28 mars 1994
Après avoir pris connaissance de la teneur de la pétition et, après discussion, la commission décide de la traiter à l'unanimité. Elle désire entendre les pétitionnaires en premier lieu, afin de se faire une idée plus précise des faits énoncés.
Le 11 avril 1994
Audition de M. et Mme Robert-Louis Schreiner, ainsi que M. François Lavergnat
M. Lavergnat, membre du GPFI. Cependant, suite à cette expérience, il s'est documenté et a rencontré d'autres personnes avec qui il a décidé de déposer la pétition. Il reproche à la scientologie d'être plus intéressée par l'argent que par la religion.
Il constate que l'on ne trouve pas trace d'elle auprès des associations caritatives, dont lui-même s'occupe activement, car ces dernières, ainsi que les gens qu'on y rencontre, ne sont pas assez intéressants financièrement. Il arrive, selon lui fréquemment, que la «dépendance à la secte» dont sont victimes les adeptes finisse par mettre dans l'embarras financier des familles entières. En effet, il existe plusieurs caps payants à passer, dans l'instruction de cette technique mentale, avant d'arriver au grade supérieur. Chaque étape coûte cher, car il faut suivre des cours et l'on est susceptible de recalage. L'ascension totale finit par représenter des sommes excessives, que l'adepte peut avoir du mal à assumer. Il arrive alors qu'il engage des biens familiaux ou emprunte. La «secte» fait signer des contrats dont les membres ne reçoivent jamais copie, mais les fait respecter. Elle ne fait pas cadeau de son enseignement, même si l'adepte a déjà beaucoup dépensé, mais elle l'aide à obtenir des prêts qui, accumulés, ruinent peu à peu la personne. Nous apprenons également que les méthodes de Ron Hubbard sont employées dans deux établissements de traitement de la toxicomanie, tenus par des scientologues. Un, Narconon, aux Plans-sur-Bex/VD, l'autre en Suisse allemande. A la fin de leur cure, les toxicomanes peuvent rejoindre les membres de «la secte». Il y a également, selon lui, la société Trimlines, qui vend - par téléphone - des vitamines pour maigrir et de nombreuses autres sociétés affiliées à la scientologie. L'infiltration de services de l'Etat est, d'après lui, présentée comme possible, notamment par le biais de la Ste Pasche Informatic SA, qui donne des cours informatique, aux Services industriels entre autres. M. Lavergnat mentionne ensuite que les plaintes sont de plus en plus nombreuses à travers le monde. L'ADFI (Association pour la défense de la famille et des individus) désire poursuivre la scientologie pour ses agissements lorsqu'elle prétend être une religion. L'ADFI se prépare également à une intervention au parlement européen. Une autre plainte est en cours concernant les médicaments vitaminés, qui ont d'étranges effets et sont prescrits à haute dose, au point que les utilisateurs sont déphasés. A Milan, «la secte» a été condamnée récemment pour association de malfaiteurs, extorsion et abus sur incapables. Pour terminer, il nous informe que, depuis la parution du nom des pétitionnaires dans la presse, il a été menacé de plainte pénale, en tant que principal instigateur, et est harcelé de coups de téléphone anonymes.
A la suite de l'audition de M. Lavergnat, M. Schreiner nous expose avec émotion ce qui l'a amené, lui aussi, à être membre du GPFI et à signer la pétition. Il s'agit de la disparition, il y a de cela environ 5 ans, de sa fille Elise, après qu'elle a suivi la «secte». Il affirme que celle-ci recrute ses membres en priorité parmi les faibles, à savoir, les drogués, les malades, les alcooliques ou les personnes momentanément déprimées, par un divorce, un décès, etc. Dans le cas de sa fille, c'est précisément suite à une longue période de chômage qu'elle a répondu à une petite annonce. Elle travailla un temps pour la secte, puis y fut peu à peu incorporée. Ses parents n'ayant pas les moyens financiers pour lui payer ses cours, le prix de ceux-ci a été retenu sur son salaire. Elle ne recevait pas de fiche de paie, ne savait pas si elle cotisait à l'AVS, ni si elle avait des droits. La «secte», d'après M. Schreiner, ne respecte pas les lois sociales. Il a demandé un relevé à la chambre des tutelles, mais l'a dit infiltrée, au même titre que l'instruction publique. Peu à peu, l'état mental de sa fille se dégrada. Soudain agressive avec ses parents, Elise souffrit d'hallucinations et de tendances suicidaires et, au bout d'un certain temps, elle ne sut plus travailler, n'étant plus capable que d'«auditer». Pour finir, elle disparut, ne donnant plus de nouvelles à ses parents. Après avoir tout tenté pour la retrouver, son père déposa plainte. Un jour, alors qu'on lui avait dit qu'elle se trouvait à la maison mère des scientologues de Flag, aux USA, sa femme la rencontra dans la rue à Genève. Elle vendait des imprimés pour la scientologie. Sa mère voulut lui parler mais Elise se détourna d'elle et reste, depuis lors, silencieuse. Après ce témoignage difficile, M. Schreiner constate que la «secte» reprend régulièrement, pour justifier son statut d'église, le leitmotiv selon lequel elle est reconnue à ce titre par le fisc américain. Ce qui, d'après lui, est faux. Le service des impôts américain aurait, selon lui, simplement accepté de faire figurer «la secte» sur la liste des associations ayant obtenu pour leurs donateurs des déductions fiscales. La scientologie a interprété cela comme une reconnaissance à titre d'église, car il en figure beaucoup sur cette liste. Evoquant ensuite le problème moral, il cite un professeur en médecine qui a écrit que «les endoctrinements de la secte ressemblent à du lavage de cerveau». Ce qui est appelé «audition» est un moyen de manipulation du mental. Après l'«audition», comme M. Hubbard l'indique, l'adepte est conduit à l'état d'angoisse et devient un robot. M. Schreiner cite encore un psychiatre qui, s'exprimant devant la Cour d'appel de Toulon, disait, entre autres, que «la scientologie pouvait avoir recours à des méthodes d'intimidation pouvant conduire le sujet à la mort». L'inculpation d'une vingtaine de personnes aurait suivis. Ordre est donné aux adeptes de s'infiltrer partout, même dans les clubs de boulistes. Il rappelle l'interpellation de M. Gilles Petitpierre au Conseil des Etats et également celle devant le Conseil d'Etat vaudois. Des plaintes auraient été déposées pour pratique illicite de la médecine. En conclusion, M. Schreiner nous signale avoir été l'objet d'une contre-plainte de la part de la scientologie, concernant ses allégations au sujet des versements de cotisations AVS.
Comme solution, M. Lavergnat préconise la création d'une commission extra-parlementaire, car, d'après lui, l'importance du sujet mérite une étude pluridisciplinaire. Cette commission devrait trouver le moyen d'aider les personnes qui quittent la «secte» ruinées, moralement et financièrement. Il aimerait l'aide d'une personne experte (d'Info-Sectes par exemple) auprès de l'Etat, pour avoir plus de force, car il y a souvent contre-plainte, de la part de la scientologie, envers les plaignants. Fréquemment, notamment dans le cas d'une personne majeure, il n'est pas tenu compte qu'une fragilité passagère peut l'avoir transformée en proie facile. Il voudrait qu'il y ait reconnaissance des faits et assistance à personne en danger. Info-Sectes, d'après lui, mérite également une subvention. Enfin, il pense qu'il serait utile de modifier certaines lois. M. Choisy, directeur de Champ-Dollon a, par exemple, confirmé n'avoir pas trace de loi lui autorisant à interdire à la scientologie de s'introduire dans la prison et d'y faire circuler des livres.
M. Schreiner, quant à lui, insiste sur l'utilité d'une prévention tout public.
Après l'audition des pétitionnaires, la commission se penche sur les solutions proposées. La principale, émise par M. Lavergnat, évoque la création d'une commission extra-parlementaire. Elle présente de multiples désavantages. Considérant l'état actuel des fonds du gouvernement, son financement semble impossible. D'autre part, il faudrait un temps infini pour choisir des experts convenant à toutes les parties. Cette solution nous paraît donc à mettre de côté, pour l'instant, ainsi que celle d'une subvention à Info-Sectes. Les autres méritent réflexion, aussi la commission décide-t-elle de poursuivre elle-même les auditions, en entendant M. Paul Ranc expert sur la question de sectes.
Le 18 avril 1994
Le président de la commission nous informe que M. Paul Ranc a été contacté et a donné son accord pour être auditionné. Il mentionne également le fait qu'il a reçu de la documentation des pétitionnaires et des scientologues. Ces derniers ayant expressément demandé à être entendus, nous décidons de les auditionner également.
Le 25 avril 1994
Audition de M. Paul Ranc
Né à Paris et ayant suivi les études théologiques de l'Institut biblique de Nogent-sur-Marne, M. Ranc exerça dans diverses églises de France. En 1982, il fut consacré diacre de l'Eglise réformée du canton de Vaud. Son ministère l'amena à étudier l'histoire de l'Eglise et le phénomène des sectes. Il fut le créateur et principal animateur d'Info-Sectes durant plus de 10 ans. Il est maintenant membre du comité de l'ADFI et s'y consacre, ainsi qu'à ses conférences. Il est enfin l'auteur du livre «La scientologie, une secte dangereuse». Il nous confirme qu'il soutient le texte de la pétition, étant donné le danger représenté par ce que, lui aussi, appelle «la secte». Il fut personnellement témoin de drames familiaux, de menaces, de divorces, d'escroqueries financières pouvant aller de 3 000 F à 400 000 F. Par exemple, des électromètres sont vendus entre 15 000 F et 30 000 F, alors qu'ils coûtent environ 1 000 F à la fabrication. Les scientologues exercent, d'après lui, une pression morale qu'il faut dénoncer. Il cite la tactique de contre-plaine, dont on nous a déjà parlé et explique que la «secte» a un budget contentieux faramineux; elle est très au courant des astuces juridiques et a recours à de nombreux avocats. Elle intimide ses adversaires. C'est d'ailleurs pour ces raisons qu'Info-Sectes ne dépose que rarement plainte contre elle. Son action, se centrant plutôt sur les conseils, se limite à tenter d'aider les victimes, de réunifier les familles éclatées, etc. La scientologie est, selon M. Ranc, «la plus dangereuse des sectes». Elle use de méthodes contraires aux lois du pays et possède sa propre police, appelée l'Ethique, ainsi qu'un tribunal qui pratique l'exclusion. Dans certains pays, il a même été question de châtiments corporels. Il affirme que les écoles et les entreprises sont particulièrement visées, pour y répandre les préceptes de Ron Hubbard et que celui-ci a usé du terme église dans le seul but d'obtenir une exonération fiscale. A Lausanne, les scientologues ont fait plusieurs démarches pour obtenir le statut d'église. D'après lui, les cours donnés ne sont que de la pseudo-psychanalyse. Les établissements pour toxicomanes n'acceptent pas ceux qui n'en ont pas les moyens financiers et, si M. Ranc ignore la quantité de toxicomanes happés par la «secte», suite à des traitements, il connaît ce qu'ils subissent. Quatre heures de sauna par jour, un régime strict et des médicaments vitaminés sont prescrits. Le temps de sudation est 175 fois supérieur à ce qui est communément recommandé et les vitamines sont également diffusées à haute dose, notamment la A qui peut finir par être dangereuse. Il nous signale que la scientologie tenait un stand au Salon du livre cette année. Cette science, selon M. Ranc, n'est autre que de l'occultisme de haut vol. On parle même de traversée du mur de feu. En 1990, une commission rogatoire est venue de Lyon pour l'interroger dans le cadre d'une enquête sur la «secte». Quelques semaines après sa déposition, il fut attaqué par celle-ci pour faux témoignage et calomnie. Il raconte avoir également été l'objet de menaces depuis la parution de son livre, qui n'ont pour l'instant pas été exécutées. A titre d'indication, il signale qu'il y a environ 60 sectes différentes à Genève en ce moment.
Comme solution, il préconise, lui aussi, une campagne de prévention, notamment axée sur les jeunes. Il souhaite une aide de l'Etat aux victimes et des mesures décourageant les sectes de monter des escroqueries sur fond de pressions psychologiques.
Audition des représentants de l'«Association Eglise de scientologie de Genève». Mme Suzanne Montangero, Mme Françoise Conod et M. Jean-Pierre Colle
Mme Montangero est scientologue depuis 22 ans et y a atteint le grade le plus élevé, celui d'OT VIII. Elle vécut à Aigle où, sa mère étant décédée, elle s'occupa de son père. Elle affirme qu'il avait beaucoup de caractère et qu'être scientologue l'a bien aidée dans sa tâche. Sa famille ne lui a jamais reproché son appartenance à l'«Eglise», dans laquelle elle s'engagea à part entière à la mort de son père. Elle travaille actuellement pour la branche de Lausanne mais s'occupe des problèmes juridiques de celle de Genève.
Concernant la pétition, elle conteste la définition présentée comme étant acceptée par le Tribunal fédéral de «secte poursuivant le culte de l'argent». Ce qualificatif ressort bien d'un arrêt du Tribunal fédéral, lors d'un appel de «l'Eglise» de Lausanne, suite à un article du «Reader's Digest», mais elle a été volontairement sortie de son contexte. Elle reconnaît que suivre des cours peut être onéreux mais elle justifie ces coûts par l'offre de services, celui de «l'audition» étant plus élevé car particulier. Pour ce qui est des branches annexes, elle affirme qu'elles n'ont pas de liens avec les «Eglises». Les antennes comme Narconon ou Trimlines sont tenues par des scientologues, mais il se pourrait qu'ils soient musulmans ou catholiques. Les seules ventes sont les ouvrages de Ron Hubbard et les cours, qui assurent le fond de roulement de l'«Eglise» qui, elle, n'est pas subventionnée par l'Etat. Les personnes désirant être des membres actifs signent un contrat, sorte de règlement interne du mouvement qui indique à la personne ce que l'on attend d'elle. Nous apprenons également que les «Eglises» sont autonomes entre elles géographiquement, mais qu'elles paient des copyrights à la maison mère des USA.
Les fondements de la scientologie se trouvent, d'après Mme Montangero, dans le bouddhisme mais la base de l'«oeuvre» est constituée par les recherches de L. Ron Hubbard. Selon sa théorie, l'homme est un esprit immortel. Les scientologues méditent mais ont un credo qui montre que chacun garde sa foi. La croix, figurant sur certains documents, est un vieux symbole repris par M. Hubbard. Dotée de huit divisions, elle représente les différentes vies, matérielle, humaine, de groupe, du couple, etc. Lors d'une audition, les questions n'étant pas écrites, elles ne sont pas remise à l'adepte, elle n'en verrait d'ailleurs pas l'utilité.
A la lecture d'un dossier fourni par les scientologues, nous avons constaté qu'ils reprochent à la pétition de faire état de textes qui ont été annulés depuis longtemps. La commission s'étonne que ces écrits aient pu être retirés de l'«oeuvre», puisque seul son auteur, d'après ce que nous pouvons lire dans le dossier, avait le droit de les modifier ou de les abolir. Nous sommes également surpris de constater les gros moyens mis en oeuvre pour la défense et la propagande. Mme Montangero nous explique alors que c'est bien M. Hubbard qui a modifié, voire annulé, certains textes. Il les jugeait mal assimilés par les adeptes et pensait qu'ils avaient été transformés par des personnes extérieures, attirées dans l'«Eglise» par l'attrait de l'argent. Concernant la propagande, elle l'a dit commune à toutes les églises et explique que, s'ils sont souvent attaqués, c'est parce que Ron Hubbard a mis des données psychiatriques fondamentales dans ses écrits et qu'on y découvre beaucoup sur soi-même et ceux qui nous entourent. Ce fut la base du conflit qui oppose la scientologie aux psychiatres qui sont leurs pires ennemis. Face à ces attaques ils ont besoin d'une bonne défense, car la structure de l'«Eglise» peut prêter à des demandes de remboursement exagérées.
Questionnée sur Narconon, ses réussites, ainsi que sur l'éventuelle récupération des patients par la scientologie, elle répond qu'une réussite de 50% à 60% est enregistrée et que, sur 150 drogués guéris, il y en a 3 à Lausanne et 1 à Genève qui sont restés dans l'«Eglise». Au sujet des vitamines, elle dit que certaines maisons ont le droit d'en importer. Lorsque nous nous demandons pourquoi la scientologie n'a pas envoyé ces représentants de Genève, pour participer à l'audition, Mme Montangero nous indique que M. Colle a été chargé de représenter les autorités de Genève et que Mme Conod, elle, est porte-parole des membres passifs.
A propos d'Elise Schreiner, elle affirme que les scientologues n'ont aucun intérêt à garder cette «malheureuse fille» contre son gré. Elle ne sait pas où elle est, mais insinue que la disparition d'Elise peut être due aux méthodes d'éducation de son père.
C'est ensuite au tour de Mme Conod de se présenter. Elle est simple paroissienne OT III, mais connaît la scientologie depuis 18 ans. Elle avait quitté l'Eglise nationale protestante mais elle s'est aperçue des bienfaits de son instruction et retourne désormais au culte avec plaisir. La scientologie l'a aidée dans son métier de physiothérapeute et elle assiste maintenant des personnes qui approchent la mort, sans leur donner de drogues. Elle dit que la première chose qu'elle critique dans la pétition est qu'il a été annoncé 1 000 membres à Genève, alors qu'il n'y en a que 400. La seconde remarque est que le terme secte ne devrait pas leur être appliqué, car il qualifie actuellement des groupes malveillants, or, l'«Eglise» n'est ni malveillante ni un groupe au sein d'une autre religion. En troisième lieu, elle n'a retrouvé aucune trace de la citation mentionnée dans la pétition: «Obtenez des noms, des données...». Au sujet de l'assurance de discrétion que peuvent désirer les «audités», elle se borne à répondre que les personnes s'apercevant d'une indiscrétion peuvent porter plainte. Mme Conod déclare que l'histoire démontre que, lorsque ceux qui ont été des précurseurs ont lancé de nouvelles religions, ils furent également traqués au début.
La commission entend maintenant M. Colle. Il fait de la scientologie depuis 8 ans et n'a pas encore atteint le stade de Clair. A 20 ans, il buvait et s'entendait mal avec sa famille. Il a suivit un cours de communication, qui lui a permis de travailler à l'aéroport. A ce poste, il a appris la valeur d'un règlement et sait désormais suivre le groupe dans lequel il est. Aujourd'hui, il est veilleur de nuit dans une maison pour toxicomanes condamnés et internés, en plus de son travail à la scientologie. Il a formé les membres du personnel de l'association durant 2 ans et affirme avoir le souci de délivrer les messages de Ron Hubbard au plus près des textes. Il se dit rentré dans le droit chemin et s'est réconcilié avec ses parents. Il trouve incorrect, dans la pétition, que les articles aient été tronqués et sortis de leur contexte. Il explique les nombreuses attaques contre la scientologie par le fait que lorsqu'on se bat contre les drogues, on a affaire à des personnes influentes. D'autre part, il affirme que s'il est attaqué en tant que scientologue, il n'en devient pas forcément un ennemi de celui qui l'attaque. Il reconnaît avoir déjà beaucoup dépensé (60 000 F), mais dit ne pas le regretter. Le service le plus cher est de 2 000 F, les autres sont entre 90 F et 100 F. Certaines personnes mettent jusqu'à 100 000 F, c'est vrai, mais elles le font volontairement. Il existe également des cartes de membres qui donnent droit à des réductions. Concernant Elise Schreiner, la commission lui demande comment elle a pu ainsi s'éloigner de sa famille, alors que l'«Eglise» dit vanter les mérites des bons rapports familiaux. Il répond qu'il ne comprend pas ce qui s'est passé. Il doit y avoir eu une erreur. C'est justement Elise qui l'a fait rentrer en scientologie. C'est une malheureuse affaire. Peut-être avait-elle omis de nous signaler qu'elle avait subi une psychothérapie, auquel cas elle aurait dû avoir un traitement différent des autres.
Le 2 mai 1994
Le président de la commission nous signale que, dans un courrier accusant MM. Schreiner et Lavergnat de calomnies, les scientologues lui demandent de pouvoir consulter les procès-verbaux de la commission. Il a répondu que seul un député peut avoir accès à ces documents. Nous apprenons également que les médicaments vitaminés sont importés d'Allemagne ou d'Angleterre. Ils ne sont pas vendus en pharmacies et ils ne sont pas enregistré à l'OICM. La commission décide de demander à M. Vodoz ce qu'il en est du statut fiscal de la scientologie.
Le 9 mai 1994 et le 16 mai 1994
Le président de la commission nous informe qu'après s'être renseigné, M. Vodoz lui a certifié que la scientologie n'a pas le statut d'église et ne figure pas sur la liste des associations dont les donateurs ont des exemptions fiscales.
Le 30 mai 1994
Le président de la commission nous informe que tous les députés ont reçu le gros livre «Qu'est-ce que la scientologie?». Les scientologues reviennent également à la charge pour obtenir les procès-verbaux de la commission. Il demandera conseil au président du Grand Conseil, M. Burdet. La commission désire entendre quelqu'un du DIP pour en savoir plus sur les éventuelles infiltrations au sein du département.
Le 6 juin 1994
Le président, M. Lescaze, nous signale que nous entendrons M. Von Niederhausern, inspecteur à la Sûreté et, M. Saurer, député, qui a écrit à la commission pour lui demander d'être auditionné. Nous verrons après cela ce que nous ferons pour le DIP.
Le 13 juin 1994
Audition de M. Von Niederhausern, inspecteur principal de la Sûreté
Celui-ci nous apprend que ses services ont été alertés depuis 1975-1979 par des personnes dont les enfants sont partis dans les sectes, dont le but est de s'enrichir aux dépens des parents. Concernant la scientologie, plus particulièrement, il a reçu des témoignages de personnes ayant perdu jusqu'à 300 000 F. Il confirme l'utilité fiscale pour l'association de se voir accorder le statut d'église. Au départ, la présentation est gratuite puis, peu à peu, les prix augmentent. Les nouveaux venus sont souvent astreints à travailler pour l'organisation. Un scientologue repenti, ayant été recalé plusieurs fois, et ayant dépensé 350 000 F au lieu de 150 000 F a porté plainte. M. Von Niederhausern constate qu'il est difficile d'avoir recours à la justice. L'«Eglise» fait signer des reconnaissances de dettes en blanc auprès d'une banque à Berne, qui octroie les prêts. Il a reçu un témoignage d'un ancien OT IV de scientologie qui lui a confirmé que le terme église est usurpé. Il a également eu la preuve de certaines infiltrations des administrations de l'Etat et attire notre attention sur les possibilités de fuite à travers les pays. Il a appris que les scientologues donnent des commissions à leurs rabatteurs, et tient, d'un ex-membre, qu'aux USA l'«Eglise» ne reculerait devant rien pour abattre une personne qui se dresserait contre elle. Il nous signale que les membres du personnel ne sont pas payés avant 6 mois à 1 an. Il trouve difficile de prouver que les personnes lésées n'étaient pas capables de discernement. Cependant, dans le cas des vitamines, il pense qu'étant donné qu'elles ne sont pas inscrites à l'OICM, un patient lésé pourrait porter plainte. Il dit ne rien avoir trouvé de religieux dans cette «secte», lors des témoignages qu'il a entendus, mais qu'il y est surtout question d'argent. Il a également reçu de la scientologie une demande pour savoir où il en est dans ses travaux.
M. Von Niederhausern pense qu'il serait très utile de créer une structure, qui permette aux gens de venir se confier à des personnes compétentes et discrètes, en toute sécurité. En effet, tout le monde ne désire pas porter plainte et ses services ne peuvent avoir contact qu'avec une infime partie de ceux qui ont des problèmes liés à la «secte». D'autre part, il faut des personnes très compréhensives et connaissant bien la question pour recueillir des témoignages parfois difficile à confier. Il s'aperçoit que les victimes de sectes ne viennent pas forcément se confier à la police, ils ont peur qu'on les pousse à porter plainte, que les entretiens soient trop administratifs, ou ils craignent tout simplement d'être mal jugés. Une campagne d'information serait, selon lui, également nécessaire.
M. Saurer nous parle ensuite de ce qui s'est passé récemment avec sa fille. Alors qu'elle flânait au rondeau de Carouge avec des amies, elles furent abordées par un monsier, qui leur proposa de venir avec lui faire un test de personnalité de 200 questions qui prit 2 heures dans les locaux de la scientologie à la route de St-Julien. Puis on fit leurs courbes et les cinq jeunes femmes constatèrent avec surprise qu'elles avaient toutes des problèmes. On leur a ensuite passé un film et elles sont rentrées très tard. Ayant appris ces faits de la bouche de sa fille, M. Saurer décida de se rendre au local de la scientologie, afin de rencontrer la personne qui avait analysé sa fille. Il fut bien reçu, mais lorsqu'il demanda à voir les résultats du test, on lui dit que ce n'était pas possible. Son enfant étant mineure, on avait gardé son dossier au service juridique et celui-ci était fermé. Il demanda alors à prendre rendez-vous avec un responsable de ce service. On lui a répondu qu'il fallait téléphoner. En téléphonant, il apprit que le responsable était absent et ne put, en fin de compte, rencontrer cette personne avant plusieurs jours. Lorsqu'il fut enfin face à lui, il découvrit que son interlocuteur s'était renseigné. En effet, on lui dit clairement qu'il était membre du parlement et qu'il était difficile de lui donner toutes les informations. On s'est montré aimable avec lui, mais il n'a obtenu que de vagues informations, sur les prétendus troubles dont souffrait sa fille. En se renseignant sur les personnes qu'il avait rencontrées, M. Saurer découvrit que le monsieur qui avait abordé les jeunes filles dans la rue est professeur de gymnastique au CEPIA; un autre est veilleur de nuit à Vessy. Heureusement, les filles ont bien réagi et n'ont pas été perturbées par les résultats du test. On n'a pas cherché à leur vendre des cours, mis à part une brochure à 9 F qui a été proposée. M. Saurer trouve ce procédé anti-déontologique. Dans ce cas l'affaire commerciale est évidente, dit-il. Le gros livre envoyé aux 100 députés démontre que la scientologie n'est pas démunie. Il trouve inadmissible de s'attaquer à des enfants. Sa fille a moins de 16 ans, cependant on ne lui a même pas demandé son âge et, bien que son physique prouve à l'évidence qu'elle n'est pas majeure, on n'a pas demandé la signature de parents, pour laquelle une place est pourtant prévue sur le test. Il n'a pas non plus été proposé aux jeunes filles de téléphoner à leurs parents pour les prévenir de leur retard, dans le cas où ils s'inquiéteraient. Ces pratiques sont odieuses et ressemblent à celles des dealers. On déstabilise les gens, on les rend dépendants. Cela devient difficile à gérer pour les parents. Il voit en cela une menace, en dehors de toute considération politique.
M. Saurer pense également qu'il faut faire quelque chose au niveau du DIP. Mettre au point un texte préventif, qui informe dans le même temps les jeunes qu'il y a des psychologues dans les écoles pouvant répondre à leurs questions.
En fin de séance, le président de la commission nous signale qu'une nouvelle pétition, numérotée 1035, pour la création d'une commission consultative en faveur de la tolérance et du respect des libertés religieuses a été déposée, demandant plus de soutien pour les minorités religieuses et signée notamment par le Dr Franceschetti, scientologue notoire.
Discussion de la commission
Après avoir entendu tous ces témoignages et reçu une riche documentation, la commission ne peut que considérer le problème soulevé comme important. Les accusations contre la scientologie sont graves et nombreuses. La commission elle-même a constaté les pressions dont sont capables les scientologues. Elle s'est posé la question de savoir s'il fallait parler des sectes en général ou une association du même type. Cependant, étant donné que la pétition mentionne spécifiquement la scientologie et que celle-ci nous a été présentée comme «la plus dangereuse», nous avons décidé, après discussion, de ne pas aborder les autres sectes ou associations qui ne font pas parler d'elles et de centrer le débat sur la scientologie. Les commissaires considèrent unanimement qu'il est de leur devoir de proposer des mesures utiles pour protéger les personnes fragiles et principalement les enfants et adolescents contre les abus qui ont été portés à leur connaissance. Si la commission reconnaît aux scientologues le droit constitutionnel à la liberté de conscience, elle désire cependant qu'ils se conforment aux autres lois en vigueur dans notre canton, notamment en ce qui concerne la fiscalité, les droits des employés et la pratique de la médecine. La commission s'est également préoccupée des accusations d'éventuelles infiltrations et de prosélytisme à l'intérieur de l'administration. Des réponses plutôt rassurantes lui ont été données à cet égard.
Conclusions
Mesdames et
Messieurs les députés,
La commission décide à l'unanimité de proposer au Grand Conseil le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat en l'invitant à:
1. mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour éviter tout prosélytisme et toute utilisation de données administratives à des fins de propagande et de recrutement, notamment auprès des mineurs;
2. favoriser une étroite collaboration entre les associations d'information et de soutien aux victimes des sectes et les départements de l'Etat de Genève;
3. étudier la nécessité de faire intervenir le médecin ou le pharmacien cantonal dans le contrôle de prestations médicales apportées par des sectes, notamment de la distribution de vitamines par l'Association pour une Eglise de scientologie.
Glossaire
Auditer: audition que les responsables de la scientologie font passer à leurs membres, durant laquelle la personne doit parler des problèmes qui la touchent particulièrement, de ses expériences les plus perturbantes, etc. Bien que les scientologues soient contre cette définition, il y a une ressemblance entre ces audits et une séance de psychiatrie.
Flag: maison mère de la scientologie aux USA.
Electromètre: appareil électrique qui, apposé sur la personne, détermine son ton émotionnel. Utilisé durant les audits, il est censé servir à déterminer si la personne a dominé le problème dont elle est en train de parler.
Clair: grade en scientologie, personne qui n'a plus de mental réactif, c'est-à-dire qui s'est débarrassée de toutes les influences emmagasinées durant sa vie et qui commandent ses réactions.
ANNEXE 1
ANNEXE 2
ÉTATS-UNIS
La scientologie exemptée d'impôts
Un accord est intervenu au début d'octobre entre la direction américaine de la scientologie et l'administration fiscale des Etats-Unis (Internal Revenue Service, IRS). Depuis de nombreuses années, l'IRS refusait à beaucoup de filiales de la scientologie l'exemption d'impôts, accordée aux églises et associations sans but lucratif. De son côté, la scientologie ou ses membres avaient déposé des plaintes contre l'IRS et plusieurs de ses fonctionnaires, pour abus de pouvoir et autres. Elle avait, par voie d'annonces, demandé aux contribuables qui avaient à se plaindre de fonctionnaires des impôts de dénoncer ceux-ci auprès d'une association scientologue moyennant des primes.
Bien que les termes exacts de l'accord ne soient pas connus, il semble que les deux parties aient décidé d'arrêter les frais et d'effacer tout le contentieux. La scientologie abandonne ses plaintes, et l'administration accepte de considérer comme «charitables et religieux» plus de 150 groupes affiliés à la scientologie, au vu des déclarations fournies par eux sur leurs buts, leur fonctionnement, leurs structures, leur financement.
On sait tout de même que les documents fournis par la scientologie indiquent que celle-ci possède des actifs se montant à 400 millions de dollars, et encaisse près de 300 millions de dollars par an en paiements pour ses «conseils», la vente de livres, en revenus d'investissements, et autres. On y apprend aussi qu'elle dépense de grosses sommes en frais judiciaires, en publicité et en commissions de notre société, dans les administrations, les entreprises, les universités et même dans les ministères. Elles déstabilisent notre société dans le but d'établir un ordre dont elles seraient les maîtres, à l'image du modèle mis en pratique à l'intérieur de leurs groupes. Elles déstabilisent la cellule familiale biologique pour lui substituer une autre famille artificielle. Elles déstabilisent l'être humain, transformé malgré lui en «zombi». A l'image du mort sorti du tombeau qu'un sorcier met à son service, l'adepte mort à sa famille, à ses racines, à ses repères fondamentaux, est au service de la secte.
Une troisième annexe peut être consultée au secrétariat du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
(Vifs applaudissements de l'assemblée.)
Le Grand Conseil recevait le 10 mai 1994 la pétition 1035 qui a la teneur suivante:
PÉTITION
pour la création d'une commission consultative en faveur de la tolérance et du respect des libertés religieuses
But
Créer une commission consultative confessionnellement neutre et indépendante, composée de philosophes, historiens, sociologues et experts dans le domaine des religions, chargée d'assurer le respect des garanties constitutionnelles religieuses.
Inviter le Conseil d'Etat du canton de Genève à prendre toutes les mesures allant dans ce sens.
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Depuis quelque temps, dans notre canton, les attaques de quelques individus et groupements antireligieux à l'égard des mouvements religieux minoritaires prennent de plus en plus d'ampleur.
Ces individus et groupements antireligieux n'hésitent pas à répandre des informations tendancieuses, voire fallacieuses, sur les minorités qui en sont la cible.
Ils utilisent pour ce faire tous les canaux d'information à leur disposition pour atteindre le public et, ce faisant, porter atteinte aux mouvements religieux minoritaires. Ils n'hésitent pas non plus à solliciter les autorités de notre canton, afin que celles-ci s'immiscent dans la vie interne de ces communautés et même prennent des mesures liberticides à l'encontre de celles-ci.
La presse se fait régulièrement l'écho de ces individus et mouvements antireligieux et ne donne guère l'occasion aux mouvements minoritaires de se faire entendre.
Ces informations erronées et mal documentées sont de nature à alarmer le public tant à l'égard de la nature des croyances qu'à l'égard des pratiques des adeptes de ces religions minoritaires.
Certaines personnes, peut-être en raison de leur niveau d'éducation ou d'un défaut de recul et de sens critique, sont plus perméables que d'autres à une campagne tendancieuse. L'hostilité, l'intolérance et la crainte d'une partie de la population envers les mouvements religieux minoritaires et leurs adeptes, est, quoi qu'il en soit, le résultat de cet activisme antireligieux.
C'est ainsi que l'histoire a montré de tout temps qu'une population, mal informée au sujet d'une minorité religieuse, a une tendance générale et irrépressible à prendre celle-ci comme cible et à la parer de tous les défauts. Une telle attitude est source de conflit au sein même des individus d'une même collectivité (cf. B. Lescaze, «Quelques réflexions sur le Kulturkampf à propos de l'argumentaire politique», Revue du Vieux Genève 1994, p. 67-75), pouvant même aller jusqu'à diviser les cellules familiales qui la composent.
A l'heure actuelle, l'Eglise de scientologie, tout particulièrement, et cela depuis plusieurs années, se trouve être la cible d'une telle campagne.
Il s'agit pourtant d'un mouvement religieux qui existe aux Etats-Unis depuis une quarantaine d'années. L'année dernière, l'Administration fiscale américaine l'a formellement reconnue comme organisation religieuse et charitable et a en conséquence exonéré toutes les entités - églises et missions - qui forment ce mouvement.
Cette même administration américaine a officiellement informé les autorités fédérales de cette décision, leur remettant à cette occasion une brochure d'information concernant cette religion nouvelle et dont l'honorabilité ne peut être mise en doute.
Tout naturellement, cette religion s'est répandue dans notre pays où elle connaît un essor non négligeable.
Dans ces conditions, il est contraire à l'esprit de tolérance et d'ouverture de notre canton, en matière de conscience et de croyance, que certains de nos citoyens et contribuables se voient menacés dans l'exercice de leurs libertés par une propagande dont l'origine réside dans l'esprit sectaire et intolérant de certains individus.
Le gouvernement se doit dans ces conditions de réagir, en créant une commission consultative, pluridisciplinaire, confessionnellement neutre et indépendante, composée d'individus, de préférence de grade universitaire, dont les connaissances en matière de philosophie, de sociologie et d'histoire des religions sont largement reconnues par le public.
Ces personnes devraient avoir démontré une ouverture d'esprit et une volonté de dialogue à l'égard des minorités religieuses. Par là, leur autorité dans le domaine devrait être incontestée, tant par les adeptes des minorités religieuses que par le public en général.
L'avis de cette commission pourrait être utilement sollicité dans l'hypothèse où un problème ou conflit important surviendrait dans notre canton, dans lequel serait impliquée une minorité religieuse. De même, l'un ou l'autre des membres de cette commission pourrait être appelé à fonctionner comme expert dans le cadre d'une éventuelle procédure judiciaire, nécessitant un rapport établi par une personne apte à émettre un avis compétent et documenté sur le sujet de la religion ou du mouvement concerné.
Le nombre des membres de cette commission ne serait pas inférieur à trois et pas supérieur à onze. En tous les cas, la nomination de ces membres devrait être soumise à l'approbation des différentes communautés religieuses minoritaires de notre canton, dans le cadre d'une procédure de consultation.
En vous remerciant de bien vouloir accueillir favorablement cette pétition, nous vous prions de recevoir, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'expression de notre haute considération.
N.B.: 2 signatures
Dr A. Franceschetti
7, chemin du Petray
1222 Vésenaz
Cette pétition a été traitée par la commission, sous la présidence de M. B. Lescaze, lors de sa séance du 27 juin 1944.
Elle a auditionné Mme Pugliatti et M. Franceschetti, signataires de la pétition et membres de l'Eglise de Scientologie. M. Franceschetti a mis en exergue l'intolérance contre les minorités religieuses. Lui-même en a été victime puisque son élection au Conseil municipal de Collonge-Bellerive a été fortement contestée. Il souhaite la création d'une commission extra-parlementaire visant à réparer les injustices ou à régler des conflits concernant les groupes religieux. Cette instance servirait aussi d'observatoire et pourrait donner des réponses d'intérêt général plus scientifiques, plus éclairées. Il estime que l'émotion domine lorsqu'il s'agit de scientologues et pense que des personnalités nommées par le Conseil d'Etat feraient preuve de davantage de nuances. Il souhaite que l'image de Genève, terre d'accueil, ne soit pas ternie et que son esprit de tolérance survive.
Discussion
Tous les commissaires présents ont reconnu l'intolérance sous toutes ses formes comme inadmissible. Néanmoins, faisant référence à notre constitution, chacun a pu constater qu'elle est garante des libertés individuelles. Que, d'autre part, la justice peut être actionnée en cas d'atteinte à ces libertés, que le Conseil d'Etat peut aussi intervenir comme ce fut le cas pour M. Franceschetti où il lui a été reconnu le droit de siéger.
Par conséquent, les commissaires ont estimé que les mesures existantes sont suffisantes et que la création d'une commission comme celle préconisée par les pétitionnaires est superfétatoire. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des pétitions vous recommande, à l'unanimité des 13 membres présents, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
La commission ad hoc «SAN» a examiné durant ses travaux relatifs à l'étude du projet de loi 7070 la pétition déposée par le président de l'UPCP relative à la «privatisation du service des automobiles et de la navigation» et comportant 687 signatures.
Lors de sa séance du 1er juillet 1994, cette pétition a fait l'objet d'une proposition de dépôt sur le bureau du Grand Conseil. Le vote sur cet objet a donné le résultat suivant:
9 voix pour (5 L, 2 R, 2 PDC);
6 voix contre (3 ADG, 2 S, 1 PEG).
ANNEXE
Secrétariat du Grand Conseil
Dépôt: 3 juin 1994
P 1040
PÉTITION
relative à la privatisation du service des automobileset de la navigation
Considérant que le service des automobiles et de la navigation (SAN) n'est pas compatible avec la fonction d'un secteur privé, les membres de l'Union du personnel du corps de police (UPCP) soussignés:
1. refusent la perspective qu'une autorité de décision et de contrainte soit déléguée à un secteur privé;
2. s'insurgent contre le fait que leurs rapports de travail et de confidentialité puissent se détériorer à moyen terme;
3. rejettent l'idée globale qu'une entreprise privée tire son bénéfice des activités dévolues à l'Etat;
4. s'opposent fermement à la privatisation du SAN en demandant au Grand Conseil de retirer le projet de loi n° 7070 et proposent que cette autorité instaure une étude en vue d'améliorer la rentabilité de ce service dans le cadre de l'Etat.
N.B. 687 signatures
Bruno Jacquemai
Président de l'UPCP
Case postale 100
1211 Genève 8
Débat
M. Pierre Vanek (AdG). Il n'y a franchement pas lieu de remercier M. Lacour pour l'important travail qu'il a fait en rédigeant ce rapport ! En effet, il continue à considérer que cette pétition ne mérite pratiquement pas d'être traitée sérieusement. Deux paragraphes font seulement état du vote en commission sur cette pétition.
S'il y avait lieu de présenter des rapports on aurait pu consulter la minorité également et lui demander si elle estimait nécessaire de présenter un rapport sur cette question. Je rappelle que la commission ad hoc elle-même a traité cette pétition sur la privatisation du service des automobiles et de la navigation - nous l'avons déjà relevé - de manière très très cavalière en refusant d'auditionner les représentants des six cent quatre-vingt-sept signataires membres de la police genevoise. Ils méritaient d'être entendus, car cet objet les concerne au premier chef et ils avaient des observations importantes à faire. On les a entendus, certes, dans un premier temps, mais la pétition a été déposée - la récolte de signatures a également été faite - après cette audition, et j'estime qu'il y a là - je le répète - un vice de forme quant à la procédure démocratique par rapport au traitement d'une pétition.
A mon avis, lorsqu'un nombre aussi important de signatures sont récoltées sur un objet de cette importance, on organise des débats, en l'occurrence au sein de la police genevoise. Le «feed-back» méritait d'être entendu par la commission en question avec toute l'attention voulue, dans le cadre des débats parlementaires. Voter purement et simplement le classement de cette pétition, sous prétexte que l'on aurait tout dit sur la question du SAN, me semble un peu léger, eu égard au droit démocratique que représente une pétition. J'estime que la commission a commis une erreur que nous devons réparer. Je demande donc que la commission ad hoc sur le SAN se réunisse pour entendre et auditionner ces pétitionnaires dans le cadre d'un débat à Genève. C'est la moindre des choses que l'on puisse faire par respect pour les personnes qui se sont donné la peine de réunir les six cent quatre-vingt-sept signatures qui figurent sur cette pétition.
Je rappelle les éléments essentiels des arguments que les pétitionnaires devraient justifier ou développer devant une commission. Les membres de la police genevoise refusent la perspective qu'une autorité de décision et de contrainte soit déléguée à un secteur privé; ils s'insurgent contre le fait que le rapport de travail et de confidentialité puisse se détériorer à moyen terme; ils rejettent l'idée globale qu'une entreprise privée puisse faire des bénéfices dans le cadre d'une activité dévolue à l'Etat et s'opposent à la privatisation du SAN.
Par rapport à ces indications, je crois qu'il y a lieu de les entendre, pour corriger la bévue qui a été commise. Si cette proposition n'agrée pas à ce parlement, il faudrait renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Ce serait la moindre des choses !
M. Claude Lacour (L), rapporteur. La question a en effet été posée à la commission, pour savoir si elle voulait entendre à nouveau les représentants de l'Union du corps de police. La réponse à cette question a été négative.
Par ailleurs, la pétition en question demande au Grand Conseil de retirer un projet de loi qui a été adopté à la séance du Grand Conseil du 15 septembre 1994. C'est donc un appel déguisé. Ce n'est pas dans ces formes-là qu'on peut le faire !
M. Pierre Vanek (AdG). Les pétitionnaires ont déposé cette pétition au moment où le projet de loi 7070 sur la privatisation du SAN était débattu ici. Certes, la quatrième invite de la pétition est difficilement réalisable; les citoyens décideront probablement du classement de ce projet de loi, mais ce ne sera pas en raison d'une erreur de procédure. Cette erreur est significative, car ce n'est pas par hasard que l'on a oublié de traiter cette pétition ! Cela relève du travail effectué en commission et du mépris affiché vis-à-vis des pétitionnaires. Ce n'est pas parce qu'une erreur a été commise qu'il faut reprocher aux pétitionnaires que cet objet ne figure plus à l'ordre du jour du parlement !
Cette erreur doit être réparée, et je maintiens mes revendications par rapport au traitement de cette pétition.
Mises aux voix, les conclusions de la commission ad hoc «SAN» (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
Lors de sa séance du 14 janvier 1993, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat la pétition 948-A afin d'intervenir pour que le tenancier du café-restaurant «Au Vaudois» puisse continuer à exercer son activité jusqu'à la démolition de l'immeuble.
Comme le Conseil d'Etat a eu l'occasion de l'exprimer à réitérées reprises, ses possibilités d'interventions dans ce genre d'affaires sont quasi nulles, sous réserve des impératifs liés à la sauvegarde de l'ordre public.
Il s'agit en effet de litiges d'ordre privé, relevant de la compétence des tribunaux et du procureur général, à qui il revient de faire exécuter les jugements (art. 45 de la loi sur l'organisation judiciaire).
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Le député Lescaze avait eu la courtoisie de me transmettre sa question à l'avance, de sorte que je puis lui donner la réponse suivante.
Le Tribunal administratif a enregistré, en 1993, neuf cent quatre-vingt-quatre affaires nouvelles contre sept cent septante-deux en 1992, et huit cent quarante-huit en 1991. La baisse constatée en 1992 était due à la chute brutale des recours dans le domaine de la construction. L'augmentation intervenue depuis est due principalement au fait que le contentieux en matière d'assurances sociales, qui était auparavant du ressort de la Cour de justice, a été transféré, courant 1993, à ce Tribunal administratif. L'alourdissement du rôle de cette juridiction s'est confirmé depuis. Je passe sur les chiffres.
Cela étant, on peut dire que, si le Tribunal administratif ne souffre pas de la même surcharge de travail que certaines juridictions civiles ou pénales, ses membres n'en sont pas moins tous occupés à plein temps par leur charge. Il ne faut pas perdre de vue non plus le fait que si cette juridiction ne se trouve pas actuellement en sous-effectif, cela lui permet de rendre ses arrêts dans des délais extrêmement brefs. Il s'agit là d'un avantage non négligeable à l'heure où les autorités politiques préconisent une accélération des procédures administratives. De plus, il faut savoir que, dans les deux ans qui viennent, de nombreuses compétences nouvelles devront être confiées au Tribunal administratif pour se conformer aux nouvelles dispositions de la loi fédérale d'organisation judiciaire et à la convention européenne des droits de l'homme.
La Cour de justice compte quinze juges de carrière et autant de suppléants, ainsi qu'un certain nombre d'assesseurs. Ces magistrats sont épaulés par un greffier-juriste et six secrétaires-juristes. Les statistiques que nous possédons n'ont pas grande signification, puisque la Cour a perdu les assurances sociales courant 1993.
On peut dire qu'en raison notamment de la conjoncture économique difficile la charge de travail des juges de la Cour peut être qualifiée de lourde, d'où le recours aux services des juges-suppléants. Néanmoins, la juridiction fait face à ses obligations et les arrêts sont rendus dans des délais raisonnables, quand bien même les juges souhaiteraient, dans leur ensemble, pouvoir consacrer plus de temps aux dossiers qui leur sont confiés.
Voilà la réponse que je pouvais donner à la question urgente de M. Lescaze.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. M. Vanek a d'abord évoqué avec une certaine vigueur le porte-monnaie des commerçants. J'aimerais rappeler, au cas où cette notion serait inconnue, que les commerçants sont le deuxième employeur du canton, ce qui représente vingt-deux mille emplois dans le canton, dont quinze mille dans le centre-ville. L'incidence fiscale est importante, puisque les commerçants versent 831 millions de salaire.
Les panneaux dont M. Vanek a fait état étaient, il est vrai, souriants. Mais je rappelle en passant que les milieux combattus par M. Vanek ont récolté, dans l'été 1993, vingt-cinq mille signatures en trente jours contre le concept de circulation. Ce n'est donc pas un milieu à négliger. Je précise néanmoins - au cas où M. Vanek ne l'aurait pas saisi - que la manifestation conduite par les commerçants n'a rien coûté, ni en frais ni en déprédations, à l'Etat de Genève. Toutes les manifestations ne se passent pas aussi bien, loin de là !
Monsieur Vanek, je vous réponds comme suit :
Dois-je condamner l'UPCG ? : je condamne les extrémistes et les ayatollahs de tout poil ! Je considère que le recours à la rue est un signe de faiblesse. Je ne l'apprends à personne.
Entends-je faire respecter la signalisation des rues marchandes ? : oui, c'est déjà le cas dans la mesure des moyens de la police genevoise.
Entends-je instituer des contrôles d'identité sélectifs ? : non, je respecte l'égalité des citoyens devant la loi ! Il demeure que M. Vanek est un semi-professionnel de l'action de rue et je m'étonne, en effet, que la police genevoise ait encore besoin de contrôler son identité !
Cela étant, je lis sous l'excellente plume de M. Jean-Charles Magnin une pensée qui nous concerne tous : «Nous sommes tous illégaux. Néanmoins, certains sont plus illégaux que d'autres !».
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. La question qui m'est posée est contemporaine, puisqu'elle date du mois d'octobre de cette année : je veux parler du renvoi des Kosovars.
Je me permets donc de vous apporter quelques éléments d'information. Tout d'abord, le renvoi vers le Kosovo est devenu techniquement possible, puisqu'une ligne aérienne s'est ouverte entre Zurich et Belgrade le 17 octobre dernier. Le renvoi de Suisse des Kosovars déboutés de leur demande d'asile par la Confédération, via l'aéroport de Belgrade, est ainsi techniquement possible. Le gouvernement du Kosovo en exil est intervenu pour rappeler les conditions difficiles des Kosovars dans leur pays. Par lettre du 13 octobre, les oeuvres d'entraide genevoises ont également demandé à être reçues par le Conseil d'Etat; la détermination du rendez-vous est en cours.
Quelques chiffres genevois vous intéresseront. Les dossiers de Kosovars en phase de renvoi atteignent le nombre de septante, soit cent soixante-sept personnes, seize familles et quatre-vingt-sept personnes individuelles. Les dossiers transmis à la police pour exécution des départs sont au nombre de quatre seulement. Les dossiers traités par le bureau d'aide au départ de la Croix-Rouge sont au nombre de douze. Hormis quelques cas pénaux, à l'heure actuelle aucun renvoi de Kosovar n'a encore été effectué par la contrainte.
Pour ce qui est de la procédure, j'aimerais vous faire savoir que c'est au cours de l'instruction du dossier que le caractère raisonnablement exigible du renvoi est examiné d'office, tant par l'Office fédéral des réfugiés que par la commission de recours. Le canton est uniquement compétent en matière d'exécution des renvois, ce que je tiens à rappeler. Dans certaines circonstances exceptionnelles, il peut intervenir lorsqu'un certificat médical est versé au dossier; il arrive alors que l'Office fédéral suspende l'exécution du renvoi. Il est donc vraisemblable que, dans ce cas précis, tous les éléments du dossier sont en possession de l'autorité fédérale et lui sont donc connus.
En phase de départ, tous les intéressés sont entendus par l'office cantonal de la population. Un nouvel examen individuel des situations est effectué. Le mandataire peut assister à l'entretien. J'aimerais vous rappeler une fois encore que rien n'oblige légalement mes services d'agir de la sorte. Je salue donc leurs efforts personnels dans la gestion de ces problèmes.
Je termine en donnant des informations très récentes sur le cas de la famille S. C'est à dessein que je ne citerai pas le nom de cette famille. Le père de famille s'est directement adressé à l'OCP, sans avoir demandé de rendez-vous. Il a été reçu, à bien plaire, par un collaborateur de l'OCP. Ce père de famille s'est tout de suite énervé, n'a rien voulu entendre, est sorti et a été interviewé par un journaliste qui a donné une certaine publicité à ce cas précis. Malgré le procédé, la famille S a été convoquée par l'OCP le mardi 25 octobre pour examen supplémentaire de son dossier. Vous avez bien compris que le dossier de cette famille est parfaitement en ordre sur le plan médical, qu'il est connu de l'autorité de décision, que cette autorité de décision a décidé le renvoi de cette famille, mais que nous procédons à un examen supplémentaire du dossier pour le cas où un élément nous aurait échappé.
La procédure vous étant connue, j'espère vous avoir ainsi renseignée de manière complète et précise.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, je me permets simplement de signaler que le 15 septembre, M. Dominique Hausser a posé une question sur la toxicomanie à laquelle je ne crois pas avoir répondu. Je ne voudrais pas retarder encore cette réponse. Me permettez-vous, dès lors, de répondre brièvement à cette interpellation urgente ?
Le président. Le Conseil d'Etat m'avait fait savoir que le président du Conseil d'Etat souhaitait répondre. Mais, réponse du Conseil d'Etat pour réponse du Conseil d'Etat, allez-y !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. La réponse du Conseil d'Etat est extrêmement simple.
M. Hausser a parlé de toxicomanie. Nous le renvoyons au rapport du Conseil d'Etat qui est en fait le rapport quadriennal de la commission mixte en matière de toxicomanie, le RD 227, daté du 3 octobre 1994. Il figure au point 87 de l'ordre du jour. Dans sa question urgente, M. le député a évoqué brièvement le cas particulier de l'Usine. J'ai le privilège de l'informer que la Ville de Genève a demandé à être auditionnée, ce qui sera fait le 11 novembre prochain. Je signale en passant que le 11 novembre est le jour de l'armistice !
Cette interpellation urgente est close.
(7171)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur les allocations familiales en faveur des salariés, du 24 juin 1961, est modifiée comme suit:
Art. 8, al. 2, lettre a (nouvelle teneur)
2 L'allocation mensuelle complète s'élève au moins:
a)
l'allocation ordinaire à 135 F par enfant jusqu'à l'âge de 10 ans révolus; à 150 F par enfant dont l'âge est compris entre 10 et 15 ans révolus, ou jusqu'à 20 ans révolus dans les cas prévus à l'article 4, alinéa 2;
Art. 2
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.
(7172)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur les allocations familiales aux agriculteurs indépendants, du 2 juillet 1955, est modifiée comme suit:
Art. 9, al. 1, lettre a (nouvelle teneur)
L'allocation s'élève par mois:
a)
l'allocation ordinaire à 135 F par enfant jusqu'à l'âge de 10 ans révolus; à 150 F par enfant dont l'âge est compris entre 10 et 15 ans révolus, ou jusqu'à 20 ans révolus dans les cas prévus à l'article 5, alinéa 2;
Art. 2
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ces projets sont renvoyés à la commission des affaires sociales.
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Le projet de budget du département de l'instruction publique 1995 expose, au chapitre 1 de sa première partie, les objectifs à moyen et à long terme du système éducatif genevois.
Le premier des objectifs assignés à notre système éducatif est le suivant : «Assurer une formation de qualité répondant aux besoins économiques.». Pour ceux chez qui subsisterait encore un doute, le commentaire qui suit commence par : «L'objectif est premier.». Depuis que cette malheureuse formulation a ému les politiciens, les professionnels et les parents, la présidente du département a déjà affirmé, devant la conférence de l'instruction publique, que ce n'était pas elle qui l'avait écrite. Elle a également assuré la commission de l'enseignement que le texte n'avait malheureusement pas fait l'objet d'une relecture attentive et que l'objectif de la présidente était bien différent de celui publié dans le document susmentionné. Le lapsus est de taille, si jamais lapsus il y a !
Le développement des objectifs assignés au système éducatif poursuit plutôt une logique sans faille. L'objectif magistral du gouvernement étant l'équilibre du budget de l'Etat, et l'allégeance aux besoins des dirigeants économiques étant prioritaire, ces besoins sont simplement répercutés comme objectifs principaux ou premiers du DIP. Malgré les analyses de texte très particulières que vous faites, Madame la présidente, je doute que vous ayez entendu par «besoins économiques» ce que des écologistes auraient compris, à savoir que l'économie est à la fois économique, sociale et écologique.
Les besoins économiques cités ici sans explication sont les besoins immédiats, que, par ailleurs, peu d'économistes connaissent, hormis l'accord déplorable sur le fait qu'une partie de la population est et sera inutilisée et inutilisable pour cette économie justement. Réduire à ses besoins et à ses non-besoins la mission de l'école est une honte ! Une honte logique et grave. Madame la présidente, excusez-moi des termes utilisés, mais ils sont à la mesure de ma déception.
Vous négligez dans cette publication non seulement la loi sur l'instruction publique et son célèbre article 4, mais encore le document : «L'an 2000 c'est demain; où va l'école genevoise ?».
Je vous rappelle les cinq principaux chantiers qui étaient envisagés :
1) Démocratiser l'accès à la connaissance. Chacun doit pouvoir accéder au savoir indispensable pour participer à la vie politique, sociale et culturelle, pour éduquer ses enfants et préserver leur santé.
2) Eduquer pour une société pluraliste et ouverte.
3) Retrouver l'unité de la culture générale.
4) Diversifier les formes d'accès au savoir.
5) Vivifier le fonctionnement du système scolaire.
Le rappel de ces principes m'amène à vous poser la première de mes questions. Comment pensez-vous assurer la pérennité des tâches de l'Etat, en particulier dans votre département ? Soit, oui ou non, l'objectif premier du DIP est-il de répondre aux besoins de l'économie au sens étroit ? Quant au troisième et dernier objectif général assigné au système éducatif genevois, il est formulé de la manière suivante : «Concevoir son organisation en fonction des moyens que la collectivité peut consentir.». Le même thème, la même logique économique. De grâce, ne vous précipitez pas dans la politique réduite à la gestion, la gestion à la place de perspectives pédagogiques, soit la subordination de la politique à l'économie !
Dans le canton de Vaud, votre alter ego à l'instruction publique proposait d'inscrire au budget d'investissement, et non au budget de fonctionnement, la charge de son département qui, comme le vôtre, consiste essentiellement en salaires, salaires qui participent à la préparation de notre avenir collectif, à une des richesses essentielles de notre canton. L'énoncé des objectifs pédagogiques, sociaux, économiques et culturels doit précéder l'énoncé des limites budgétaires. La confrontation avec les ressources disponibles doit se faire seulement à partir des perspectives et des objectifs établis. La négociation peut alors avoir lieu et les choix peuvent se faire. Ni les enseignants, ni les parents, ni les enfants ne peuvent faire leur ce projet d'équilibre des finances qui occulte tous les autres aspects de l'école et de la formation.
La deuxième question que je souhaite vous soumettre est la suivante : quels sont les rapports que vous voulez établir avec le personnel du DIP et les députés, tant il est vrai qu'actuellement le choix semble s'être porté sur la confrontation ? L'équilibre du budget est-il, oui ou non, un objectif de l'instruction publique ?
L'ignorance de la qualité éminemment culturelle des institutions dont vous avez la responsabilité et l'ignorance de la richesse sociale et de la capacité d'intégration dont l'école fait preuve m'obligent à vous poser une dernière question sur les rapports que vous voyez entre l'instruction publique et la prévoyance sociale, d'une part, parce que tout échec dans l'existence peut se retrouver, à un moment ou à un autre, pris en charge par le budget de l'Etat par l'intermédiaire du DASS, et, d'autre part, parce qu'il est établi depuis longtemps que la prévention est moins une affaire médicale qu'une affaire de formation, de culture, de capacité d'autonomie, toutes choses qui sont de la responsabilité de votre département.
L'écologie a longtemps été accusée, à tort, d'être «monothématique», et voilà que le libéralisme le serait ! Recyclez, Madame, recyclez l'économie dans le sens des valeurs humanistes de justice sociale, de dignité humaine et de création, d'épanouissement individuel et collectif ! L'économie, au sens le plus réducteur du terme a, elle aussi, tout à y gagner. Intégrez aussi le long terme au contenu pédagogique et culturel des objectifs et ne vous contentez pas de le citer dans le titre. Expliquez-nous, en préliminaire de votre projet de budget, quelle part de la grande tâche du DIP que vous dirigez vous êtes encore prête à assumer malgré les difficultés budgétaires ! En d'autres termes, quels sont vos choix et vos priorités ? (Bravos et applaudissements de la gauche.)
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'aurais pris avec plus de sérénité cette déclaration si je n'avais pas passé deux heures et demie, à la commission de l'enseignement, la semaine dernière, à expliquer mes priorités, à expliquer la lecture du budget et, surtout, si je n'avais pas déjà passé dix mois à écrire, à agir, à expliquer les choses sur le terrain.
Je répondrai brièvement sur un point. Madame, il est inexact de prétendre que j'ai choisi la confrontation avec le personnel enseignant. Ce n'est pas exact, et le journal socialiste «Combat»... (Rires sur les bancs de la gauche.)
Une voix. «Débat» !
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Ah oui, «Débat» !
M. Bernard Annen. C'est la même chose ! (Rires.)
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. D'habitude les rires suivent la pause, cette fois, ils la précèdent manifestement !
Ce journal regrettait, ou s'étonnait, qu'il n'y ait pas davantage de réactions ou de divergences entre la présidente du DIP et les associations du personnel enseignant.
Je tiens à dire que je n'ai jamais eu à me confronter à qui que ce soit jusqu'à maintenant; je n'ai d'ailleurs jamais eu de courrier dans ce sens, ni d'enseignants ni d'associations d'enseignants. En effet, nous travaillons sur la base du dialogue et de la concertation. Même lorsque nous ne sommes pas d'accord, nous exprimons nos points de vue et nous travaillons dessus. Le malentendu ne vient donc pas de là. J'ai dit que la phrase, telle qu'elle était libellée et que vous me reprochez, était malencontreuse, mais je l'assume en tant que responsable du département de l'instruction publique, car je n'ai pas été suffisamment attentive à sa formulation.
J'ai déjà expliqué notre souci, au DIP, pour l'intégration future des jeunes que nous formons dans la vie économique, culturelle et sociale. J'ai déjà dit que nous recherchions sérieusement, à la demande des associations professionnelles, des solutions à cette intégration. Pour cela, il faut étudier l'environnement économique dans lequel ils évolueront à moyen terme. J'ai eu l'occasion de dire à la commission de l'enseignement qu'il fallait connaître et intégrer les nécessités de cet environnement et non pas se soumettre au diktat économique. Même si cette phrase devait être prise au pied de la lettre, il est évident que les besoins économiques prévus exigeront davantage de culture générale, une meilleure capacité d'adaptation, une meilleure ouverture au monde et la capacité de se former dans le futur. Toutes celles et ceux qui connaissent les milieux économiques le confirment, y compris les syndicats qui travaillent sur le terrain. Cette phrase correspond exactement à ce que nous souhaitons faire. En effet, dans un programme à long terme, il faut développer la capacité d'autonomie des élèves, leur capacité de choix, leur capacité à approfondir leur culture générale, comme nous le faisons en introduisant la maturité professionnelle. Je vous rappelle que cela permet aux élèves de répondre toujours mieux aux exigences toujours plus grandes de notre monde.
Lors du débat à la commission de l'enseignement, il a été dit que des instructions auraient été données au sein du département de l'instruction publique pour que le nombre de places dans les écoles professionnelles corresponde aux places offertes sur le marché. Non, ce nombre n'est pas déterminé par les places existantes sur le marché. En revanche, nous devons - les syndicats tels que la CGAS ou le CIT l'ont exprimé également - avoir une vision prospective de l'évolution de la formation par rapport aux futures exigences et à l'intégration dans la vie économique. Le département de l'instruction publique, comme toute institution, ne doit pas s'y soustraire. C'est la véritable origine de cette polémique. Pourtant, j'avais pris soin d'envoyer la lettre incriminée, via le président de la commission de l'enseignement. Cette lettre ne correspond pas à ce que la députée a cru comprendre. Il n'y a donc pas de malentendu à ce niveau. Vous constaterez qu'il n'y a pas de malentendu non plus au sujet de la définition des projets de l'école tels qu'ils figurent dans les différents chapitres et tels que vous avez eu l'occasion d'en prendre connaissance, s'agissant de l'enseignement primaire. La préface de ce projet commence justement par les objectifs de l'article 4 de la loi sur l'instruction publique. Mes déclarations orales ou verbales n'ont donné lieu à aucun malentendu, je le répète une fois encore, y compris dans l'article du journal de l'employeur suisse !
Madame, j'ai dit, expliqué et répété tout cela, que ce soit à la conférence de l'instruction publique, à la commission de l'enseignement, aux députés délégués de la commission des finances ou à la commission des finances. Aussi, comprenez que les explications que je vous ai données ne méritaient pas le ton de votre interpellation. (Contestation.) Madame, il me paraît exagéré de parler de «honte» après le mal que je me suis donné pour expliquer tout cela ! Le mot était un peu fort, me semble-t-il.
Nous nous sommes exprimés au sujet du budget, tant à la commission de l'enseignement qu'à la commission des finances. Nous le ferons à nouveau en séance plénière du Grand Conseil. J'ai dit et je répète que le DIP ne peut pas se soustraire à l'objectif de redressement des finances publiques, puisqu'il représente le tiers du budget de l'Etat. S'il ne peut s'y soustraire, il a le devoir de vérifier que ses buts soient atteints dans le cadre des efforts qu'il doit fournir pour contribuer à ce redressement.
Madame, ces objectifs peuvent être respectés dans le cadre du budget 1995 - c'est mon avis et celui de ceux qui travaillent avec moi - tant dans la réforme de l'enseignement primaire que dans la réforme du cycle, qui est en réflexion, tant dans la réforme de l'enseignement post-obligatoire, qui l'est aussi par le biais de la nouvelle ordonnance de maturité, que dans notre stratégie de la formation professionnelle et du regroupement des métiers et dans l'introduction de la maturité professionnelle. Ce n'est pas une simple vue de l'esprit de la présidente du département de l'instruction publique. En effet, comme vous le savez, depuis le début de mon mandat je me suis donné la peine d'aller sur le terrain, de vérifier les choses et de poser, à chaque étape, les questions nécessaires, avant d'affirmer des vérités.
Je vous remercie, quoi qu'il en soit, d'avoir posé la question en séance plénière ! (Applaudissements.)
Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Je vous remercie de votre réponse. Je sais tout le travail que vous accomplissez et les réformes que vous entreprenez.
Je tiens néanmoins à répondre sur un ou deux points seulement, car l'ensemble de votre réponse est satisfaisant, et il me semble utile que cette déclaration ait été faite publiquement. Ce sera une base de travail pour la commission de l'enseignement.
S'agissant du problème de la confrontation, je répondrai comme suit :
Dans mon esprit, en parlant de confrontation, j'ai pensé à votre présentation de la réforme de l'enseignement primaire. En effet, ce projet est, à l'origine, un projet d'enseignants plutôt progressistes. Vous proposez de le reprendre et de le généraliser sur huit ans à l'ensemble de l'école primaire dans le canton. La présentation que vous en avez faite heurte; nous en avons d'ailleurs parlé en commission. Nous avons évoqué le cadre non négociable et l'impression de personnes qui se sentaient remises en cause. Vous avez dit que vous alliez constituer une commission d'accompagnement de ce projet, dont les membres se rendraient dans les écoles pour susciter des vocations afin de tester la méthode.
La situation de certains enseignants - malgré l'inertie qui existe, c'est vrai, comme partout - est inconfortable, car ils se sentent mis en cause. Vous dites qu'il n'y a pas de problème, parce que vous n'avez pas constaté de réaction. Moi, je dis que vous jouez sur du velours, vous et le Conseil d'Etat dans son ensemble. Pour ce que j'ai pu constater, dans les départements de l'enseignement et de la santé que je connais, les gens sont extrêmement déstabilisés, voire paniqués. Cela me semble dangereux. C'est peut-être efficace à court terme, parce que les gens restent tranquilles quand ils sont désécurisés, mais il me semble que le Conseil d'Etat doit en tenir compte dans la manière avec laquelle il intervient.
S'agissant du ton que j'ai utilisé dans mon intervention, je vous dirai ce qui suit. Madame, je vous ai félicitée lors de votre élection, car vous me sembliez avoir l'étoffe d'une conseillère d'Etat; vous êtes sincèrement libérale, claire et intelligente, alors je n'ai pas pu vous pardonner cet excès. Vous avez dit qu'il n'était pas de votre fait, mais les personnes qui préparent vos textes savent bien pour qui elles les préparent ! (Bravos et applaudissements.)
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je ne crois pas qu'il y ait lieu de revenir sur les textes. En tant que cheffe du département, je prends la responsabilité ultime de ce qui est rédigé.
Pour ce qui est de la réforme de l'enseignement primaire et de la soi-disant confrontation qu'elle engendre, je n'ai jamais prétendu qu'elle se faisait sans problème et sans désaccord avec les associations professionnelles. J'ai dit que nous nous entendions sur certains points et pas sur d'autres. Je n'appelle pas cela de la confrontation.
Madame, je ne me suis pas approprié la rénovation de l'enseignement primaire. L'année dernière, un forum a suivi l'analyse publiée sur l'échec scolaire. De ce forum et des réflexions menées par les enseignants sont nées des propositions qu'il a fallu mettre en forme pour en faire un projet politique. Pour aboutir, il doit être le projet de l'ensemble du département de l'instruction publique. Les expériences ne doivent pas être effectuées individuellement, sinon elles ne sont jamais évaluées, ni saluées, ni corrigées. Le département en a souffert qui n'a jamais pu s'alimenter de ces expériences. Les écoles en ont souffert également, car leurs expériences n'ont pas été reconnues.
Ce projet de réforme est difficile, car il doit être appliqué progressivement. Tous les enseignants n'ont pas la même motivation ni la même formation pour apprécier ce projet qui est novateur sans être révolutionnaire. Hier, j'ai lu ce qui se passait en France dans les cycles il y a un an. J'y ai retrouvé les mêmes inquiétudes, mais aussi des éléments plus positifs. Les soucis et les questions des enseignants sont les mêmes, car c'est dans la nature même des projets. Tant qu'un projet n'est pas réalisé, on a de la peine à l'imaginer. Soyez assurés que nous tenons compte de ces soucis et de ces inquiétudes, comme je vous l'ai dit en commission de l'enseignement.
Sur le terrain, il y a ceux qui élaborent et portent le projet dans les écoles, dans les circonscriptions, pour écouter, expliquer, relever les questions, les expliciter davantage et diffuser les réponses. Il y a un cadre non négociable, et c'est de là que vient le reproche. Aucun département de l'instruction publique responsable ne proposerait une réforme sans fixer un cadre. Certains ont trouvé ce cadre trop vague, d'autres l'ont trouvé trop rigide. Ce n'est ni l'un ni l'autre. C'est un cadre nécessaire, sans lequel aucune réforme ne peut se faire. Les règles du jeu doivent être établies. Cela a été exprimé, expliqué et réfléchi.
Celles et ceux qui ont défini ce cadre sont des gens qui, d'expérience, connaissent bien les enseignants, les projets et les réflexions qui ont été menées à ce sujet ces dernières années. Ces personnes sont respectées des enseignants. Jamais, Madame, je n'aurais accepté d'envisager une réforme sans un cadre sur lequel s'appuyer. C'est le B.A.-Ba d'une politique, comme d'ailleurs d'avoir des outils à disposition pour évaluer cette politique.
Je vous rappelle une dernière chose. Ce projet doit se réaliser sur huit ans. A la rentrée 1995, une dizaine d'écoles seront concernées, et les enseignants pourront se rendre compte des résultats de ces expériences, des réactions de leurs collègues, des problèmes qui se posent et des avantages occasionnés. Ils pourront donc constater concrètement ce qu'ils ont du mal à imaginer maintenant. Sur ces prémices, je suis certaine, Madame, que nos efforts déboucheront sur un résultat. Il y a des inquiétudes et des soucis, mais il n'y a aucune confrontation. Un changement, quel qu'il soit, provoque toujours ce genre de manifestation.
Je dirai seulement aux enseignants que ce n'est pas parce que nous avons fait quelque chose de bien pendant vingt ans que ce quelque chose est adapté pour les vingt ans à venir. C'est pourquoi il faut répéter et expliquer sans relâche le sens de ces rénovations.
Cette interpellation est close.
M. René Longet (S). J'aimerais poser quelques questions au Conseil d'Etat concernant la poursuite de l'engagement européen de notre canton.
La première question concerne le récent renouvellement du poste de délégué cantonal à l'Europe, puisqu'un successeur à Mme Tinguely a été nommé par le Conseil d'Etat, Mme Dubouloz, eurodéléguée cantonale, à qui nous souhaitons la bienvenue dans cette fonction. Quelle est la définition exacte de son rôle ? Le cahier des charges a-t-il évolué ? Quelle est la définition de la fonction de l'eurodéléguée dans les circonstances actuelles ? Peut-on nous décrire les tâches qui lui sont assignées et quelle est sa mission ?
Forts du score obtenu par l'Espace Economique Européen il y a deux ans dans notre canton, nous avons pensé qu'il serait nécessaire que les autorités des cantons, favorables à l'intégration européenne, contribuent ou en tout cas continuent à s'engager pour que le débat reste présent, pour alimenter la discussion dans tout le pays. Vous le savez certainement, différentes stratégies ont été articulées. Certains avaient lancé l'idée d'un appel de cantons à d'autres cantons, d'actions, d'information et de sensibilisation avec des collectivités publiques, des cantons, des communes où il y a matière à mieux se comprendre. Ma deuxième question est donc la suivante. Y a-t-il des idées plus concrètes dans ce domaine ? Avez-vous, par le biais notamment de l'eurodéléguée, des projets qui nous permettraient d'entretenir cette flamme européenne dans le pays ? L'année dernière était une année de morosité européenne sur tout le continent, mais Maastricht est finalement entré en vigueur. On parle déjà de l'après-Maastricht. On sait qu'en 1996 un nouveau débat portera sur une constitution européenne. On voit bien ce que signifie le fait de passer d'un traité à une constitution. Les votes tout récents de l'Autriche et de la Finlande montrent que le dossier ne s'enlise pas. A partir de cela il faut que la Suisse réagisse. Pouvez-vous me dire si vous avez des projets d'action, de soutien et de sensibilisation pour contribuer à relancer le débat dans d'autres régions du pays ?
Troisième question, toute simple, mais qui nécessitera un développement au niveau de la réponse : quels sont les liens que voit le Conseil d'Etat entre la politique régionale et la politique européenne ? Comment peut-on valoriser l'une par rapport à l'autre ?
La quatrième question concerne notre canton. Envisagez-vous une action d'information et de sensibilisation continue en direction de l'opinion publique à Genève même ? Un certain nombre d'idées sont certainement déjà sur la table. Des débats, des possibilités d'intervention sont-ils prévus ? Quelle est la part que pourra prendre le Conseil d'Etat, ou le canton, dans ce travail de sensibilisation pour lequel, encore une fois, nous sommes légitimés par la votation claire de la population ?
Dernière question. Quelle coopération concrète pouvez-vous envisager avec le secteur non gouvernemental ? Une complémentarité avec les mouvements de citoyens et les institutions qui travaillent en direction de l'Europe est-elle possible ? Si oui, sur quels principes cette complémentarité pourrait-elle se concrétiser, à votre avis ?
Je vous remercie par avance de vos réponses à ces questions.
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Si je me donnais la peine de répondre avec précision à la série de questions de M. Longet, je retiendrais votre attention jusque tard dans la nuit. En effet, certaines questions justifieraient à elles seules pratiquement une conférence. Je ne le ferai donc pas.
Je me bornerai à vous dire ce qui suit. Pour ce qui est de l'entretien de la flamme européenne à laquelle vous avez fait allusion et notre action à l'intérieur du pays que vous avez évoquée, il est clair que, malgré notre déception, nous devons accepter la décision de notre pays. Lorsqu'on a le désir de faire partie d'une communauté européenne plus large, on doit d'abord être capable d'accepter les décisions majoritaires de notre pays fédéraliste. C'est pour cela que, depuis un certain nombre de mois, nous avons multiplié les occasions de contacts avec la Suisse alémanique. Nous avons reçu de nombreux groupes, notamment de jeunes étudiants venus de Suisse centrale, pour leur présenter la réalité quotidienne genevoise dans sa dimension régionale transfrontalière et pour leur faire comprendre les conséquences que cette décision a engendré pour Genève et à quel point l'acceptation de l'Espace Economique aurait modifié notre vie économique. C'est par un engagement dans un dialogue constructif, avec détermination et respect de l'interlocuteur, que nous pourrons entretenir et, peut-être, communiquer notre propre flamme à d'autres, pour permettre une évolution positive et un rapprochement avec les organisations européennes.
Vous demandez si notre vécu régional a une influence européenne. A mon avis, oui, parce que ce vécu s'appuie notamment sur une disposition du Conseil de l'Europe, qui avait été prise dans le cadre de la Conférence de Madrid. Celle-ci donne les bases de la convention des relations transfrontalières, pour lesquelles on est en train d'envisager un protocole additionnel qui donnerait aux régions des pouvoirs plus grands, la possibilité de négocier plus directement et plus librement avec nos interlocuteurs voisins. (Le brouhaha s'intensifie. Le président agite sa cloche.) Ce protocole pourrait être accepté d'ici moins d'un an si les difficultés auxquelles nous sommes confrontés sont surmontées.
Monsieur Longet, nous devons absolument rester en contact étroit avec l'Union européenne à Bruxelles, car plusieurs programmes nous intéressent, comme le programme Intereg, par exemple, dans lequel nous sommes partie prenante. D'autre part, nous ne perdons pas de vue que l'eurocompatibilité, notamment au plan législatif, n'est pas à écarter, même si à la veille du fameux 6 décembre nous avions imaginé voter et accepter neuf projets de modification des lois genevoises. Chaque fois que cela est possible, nous devons nous approcher de la législation européenne de manière à faciliter les relations avec celle-ci.
A part l'axe de l'Union européenne, vous ne serez pas étonné que j'évoque celui du Conseil de l'Europe, qui est aujourd'hui la seule instance dans laquelle la Suisse est partie prenante à part entière et dans laquelle nous pouvons développer des actions particulièrement intéressantes, au moment où le paysage européen se transforme complètement et au moment où nous étudions l'entrée de neuf pays nouveaux dans ce Conseil de l'Europe. Ces pays ne sont pas particulièrement expérimentés en matière de démocratie, mais ils pourront cheminer dans une direction qui créera un espace de paix, de solidarité et de prospérité au niveau du continent européen situé entre l'Atlantique et l'Oural.
Voilà, Monsieur Longet, ce que je puis vous dire, sans retenir plus longtemps l'attention de ce Grand Conseil. Notre nouvelle eurodéléguée a rejoint, d'une part, l'équipe du service des affaires régionales qui est impliquée dans les domaines que je viens de traiter, d'autre part, l'équipe des eurodélégués suisses, de manière à poursuivre le travail remarquable qui avait été engagé par Mme Tinguely. C'est dire que notre détermination d'aujourd'hui est aussi vive que celle d'hier !
M. René Longet (S). Je remercie M. Haegi pour sa réponse. Je ne doutais pas qu'il allait confirmer son engagement en la matière, qui est bien connu.
Néanmoins, j'aurais aimé obtenir un certain nombre de précisions. Je pense que vous vous rappelez des questions que je vous ai posées, notamment sur le rôle exact de l'eurodéléguée, sur la poursuite d'actions concrètes dans d'autres régions de Suisse, sur les liens avec les milieux non gouvernementaux ou sur les travaux de sensibilisation à Genève. J'espère, puisque je partage votre avis sur le fait qu'il ne faut pas retenir l'attention du Grand Conseil pendant des heures sur des sujets de ce type, recevoir une réponse écrite complémentaire. Si cela est possible, j'en serais très heureux.
Cette interpellation est close.
Mme Claire Chalut (AdG). En octobre 1995, l'ONU fêtera, dans le calme, son 50ème anniversaire.
La création de la SDN fut, pour les peuples au lendemain de la grande boucherie de 1914-1918, un grand espoir. Elle devenait pour eux le symbole de la paix universelle. De plus, l'adhésion de la Suisse à la Société des Nations avait été acceptée lors d'un référendum le 16 mai 1920. La SDN lui garantissait sa neutralité.
Au cours des années, la SDN céda la place à la création, en 1944, de l'ONU, qui connut au cours de ces cinquante années un développement considérable. Elle compte, aujourd'hui, cent quatre-vingt-quatre pays membres, mais la Suisse, elle, ne les a toujours pas rejoints.
Le caractère universel de l'ONU s'est encore accentué par l'entrée en force de l'Afrique, de l'Asie et de nations récemment constituées, dans les différents organes qui la composent. En effet, aucune autre institution que celle-ci ne représente en son sein toutes les formes de civilisation, toutes les formes de régimes politiques et sociaux, ce qui est à la fois un privilège et lui confère une valeur inestimable. Bien sûr, cette cohabitation aussi diverse ne va pas sans poser de problèmes dans la poursuite des objectifs que l'ONU s'est fixés - et qu'elle se fixe encore - la promotion de la paix et l'entente entre les peuples.
Le monde est aux abois : les inégalités apparaissent de plus en plus criantes et aucun continent n'est épargné. Les guerres et la misère tuent des millions de personnes. Les tâches assignées à l'ONU deviennent de plus en plus complexes.
C'est dans ce contexte difficile que, dans l'automne 1995, certaines villes - dont Genève - fêteront cet anniversaire. Pourtant, l'ONU - certes confrontée à des difficultés financières - ne souhaite pas investir des sommes pour marquer cet événement, mais préfère poursuivre et donner de l'importance à ses tâches sur le terrain. (Brouhaha. Les députés se dispersent dans la salle.)
En revanche, l'on apprend que Genève tient à organiser ces festivités en y consacrant globalement entre 5 et 6 millions de francs !
(L'oratrice est visiblement gênée par le bruit.) Mais c'est quoi ce bruit ?
(Agacée, elle continue son intervention.) Je pose donc les questions suivantes :
1) Au vu de ce qui précède, ne pensez-vous qu'il est un peu présomptueux - alors que l'ONU tient à une certaine réserve - que l'on consacre, à l'heure des restrictions budgétaires et des privatisations, une telle somme ?
2) Face aux situations tragiques subies par un grand nombre de peuples, au lieu d'un étalage de moyens financiers...
(L'interpellatrice s'interrompt à nouveau en raison du brouhaha.) Monsieur le président, c'est un peu pénible de parler dans une espèce de... Excusez-moi, je suis un peu «mal foutue», c'est peut-être pour ça ! (Eclat de rires général.) C'est casse-pieds, il y a un truc qui sonne là et puis c'est «chiant» quoi ! (L'assemblée est pliée de rire et les quolibets vont bon train.)
Le président. Reprenons notre calme ! Continuez, Madame !
Mme Claire Chalut. Ah, c'est l'horreur ! Alors, je recommence au point 2. (Les rires redoublent.)
2) Face aux situations tragiques subies par un grand nombre de peuples, au lieu d'un étalage de moyens financiers, Genève - une fois n'est pas coutume - ne pourrait-elle pas se montrer plus digne, plus en relation avec le souhait de l'ONU ?
3) Sur quel budget la part de l'Etat sera-t-elle prélevée ? Quel est le montant de cette dernière ?
4) Pourquoi le choix d'une telle somme et sur la base de quels critères ? Avec qui ces festivités seront-elles - si elles ont lieu - mises sur pied ?
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Le 50ème anniversaire des Nations Unies doit correspondre au voeu des Nations Unies d'abord. C'est leur anniversaire et non celui de Genève. Nous ne devons pas perdre cet élément de vue. Il a fallu le répéter au cours de ces derniers mois aux personnes qui l'oubliaient. On ne fête pas un anniversaire sans demander à celui qui est directement concerné comment il entend le faire.
Les circonstances m'ont permis, Madame, de parler de cet anniversaire avec le secrétaire général des Nations Unies et de comprendre dans quel sens il entendait le fêter. Madame, lorsque vous dites que l'année prochaine l'ONU fêtera dans le calme son 50ème anniversaire, j'aimerais que vous ayez raison. (MM. Unger et Annen parlent fort.) Mais si l'ONU fêtait son anniversaire... (M. Haegi est visiblement importuné.) C'est inouï ! Mais regardez ça ! (M. Haegi rit.)
Mme Claire Chalut. Pourtant, ce sont vos potes ! (Grand éclat de rires.)
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Si l'ONU fêtait son anniversaire cette année, ce ne serait hélas pas dans le calme. Il faudrait pour cela que la situation internationale évolue. Lorsqu'une organisation comme celle-ci fête un tel événement, elle doit le faire avec retenue. Ce n'est pas une fête comme les autres lorsque - comme vous l'avez dit tout à l'heure - le monde est déchiré.
Madame, le Conseil d'Etat a signé une convention avec les Nations Unies concernant les projets liés à cet anniversaire, de manière à respecter leur volonté pour ce grand rendez-vous. Cela étant, un comité présidé par M. Dominique Föllmi a été mis en place. Ce dernier avait lancé un concours d'idées qui a abouti à de nombreux projets, mais tous ne pouvaient être retenus. Le Conseil d'Etat les a examinés, en a parlé avec les Nations Unies, avec le comité d'organisation, et il a donné un accord de principe sur une série de projets sans dire qu'il allait les financer. Ce n'est pas parce qu'on cherche des sponsors privés qu'il faut admettre que n'importe quel projet soit organisé sous prétexte que l'on aurait de quoi le financer. Certains projets ont été agréés au niveau de New York et ont été déclarés par les Nations Unies : «projets universels». C'est, en quelque sorte, un «superlabel» des Nations Unies. Certains projets ont le label de Genève et ils ont été agréés par les Nations Unies, mais ils sont moins intéressants que celui-ci.
Alors, Madame, je ne vais pas énumérer, ce soir, devant ce Grand Conseil, la liste des projets. Ceux-ci seront encore affinés sur le plan financier au cours de ces prochains jours, et M. Föllmi a décidé avec les Nations Unies qu'une conférence de presse serait organisée à la fin du mois de novembre sur ce point. Il y a encore quelques semaines de travail pour préciser les choses.
En ce qui nous concerne, au niveau du canton, nous avons déclaré que nous voulions marquer le 50ème anniversaire des Nations Unies par un apport substantiel pour permette aux Nations Unies de travailler dans des conditions différentes et, surtout, pour faire un geste particulier. C'est dans cet esprit que nous avons proposé de nous engager dans la construction de la Maison dite «universelle», pour permettre aux pays qui n'en ont pas les moyens financiers de supporter des charges d'installation à Genève dans les meilleures conditions. C'est une manière de marquer la vocation universelle de Genève. C'est plus important, à notre avis, même si c'est moins spectaculaire. C'est en tout cas ce qui a été décidé pour cet anniversaire.
Par ailleurs, le secrétaire général des Nations Unies a souhaité qu'un grand concert classique soit organisé à Genève et retransmis en «mondovision». Des personnes travaillent sur ce projet et sur d'autres également. Une exposition au dialogue de paix est organisée. Nous avons également l'intention de recevoir à Genève, dans le cadre d'un projet «jeunes», des jeunes de tous les pays du monde. Ce projet sera conduit en collaboration avec les communes genevoises, pour les accueillir, et en contact étroit avec l'UNESCO. Un gros travail est effectué à ce niveau et ce projet a été agréé et souhaité par les Nations Unies. D'autres réalisations ont été envisagées. Le Conseil d'Etat a prévu de dépenser 1,3 million de francs pour ces projets, montant qui figure d'ores et déjà au budget 1995.
Voilà ce que je puis vous dire ce soir. Je comprends tout à fait l'esprit de votre interpellation. Croyez que le Conseil d'Etat en est bien conscient ! Il n'est pas toujours facile de freiner les enthousiasmes, et, pourtant, nous devons refuser catégoriquement un certain nombre de projets. Ce n'est pas bien compris par ceux qui les ont imaginés, parce qu'ils l'ont fait avec conviction, mais nous devons respecter certaines règles, desquelles nous ne saurions nous éloigner. Je vous assure en tout cas que l'esprit tel que vous l'avez défini correspond à celui du Conseil d'Etat.
Mme Claire Chalut (AdG). Je crois que le Conseil d'Etat a bien compris que mon interpellation n'est pas dirigée contre l'ONU, loin de là ! Je voulais seulement le confirmer pour que les choses soient bien claires !
Cette interpellation est close.
M. Claude Blanc. On va à la soupe !
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. M. Spielmann nous a demandé dans quelle mesure le Conseil d'Etat respectait la séparation des pouvoirs.
La réponse est brève. Nous avons rencontré le procureur général et le pouvoir judiciaire, les présidents des différentes juridictions, il y a peu de temps et cela a été l'occasion pour notre Conseil de réaffirmer l'indépendance et l'autonomie du pouvoir judiciaire. Cela nous paraît aller de soi, mais, à certains moments, il semble nécessaire de le répéter !
Hier soir, M. Spielmann évoquait la nécessité de transparence pour lutter contre la criminalité financière. Nous disons oui à la transparence, mais dans le respect individuel et dans la prise en compte de la présomption d'innocence qu'il ne faudrait pas perdre de vue, comme on a parfois tendance à le faire. Le Conseil d'Etat est favorable au renforcement des moyens de lutte contre le crime organisé. Il a déjà exprimé ce souci depuis un certain temps et il reste toujours très attentif à ce problème.
Cette interpellation urgente est close.
La séance est levée à 19 h 15.