République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 juin 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 8e session - 28e séance
M 935
EXPOSÉ DES MOTIFS
Il arrive que des décisions négatives pour l'octroi de l'asile soient prises, alors que les personnes, même si elles ne répondent pas aux critères établis par la loi sur l'asile, courent des risques graves en cas de renvoi, les autorités ne tenant pas toujours compte de l'existence du principe de non-refoulement.
En conséquence, les personnes quittent souvent la Suisse clandestinement vers un pays tiers, ce qui prend une tournure dramatique lorsqu'il s'agit d'une famille avec des enfants. L'alternative est de pouvoir organiser un départ légal qui peut prendre du temps, car il est difficile de trouver le pays d'accueil et les démarches d'immigration sont longues et difficiles dans leur phase concrète. Il est dès lors important de permettre aux personnes concernées d'achever les démarches légales entreprises vers un pays tiers si des indices sérieux rendent le projet possible.
Débat
M. Jean-Claude Genecand (PDC). Cette motion a pour objet de demander à l'autorité compétente de faire preuve de patience quant au renvoi des requérants n'ayant pas obtenu le droit d'asile. Comme chacun le sait, des foyers de conflits ethniques surgissent et perdurent dans notre monde. Or, renvoyer des requérants qui ne sont pas considérés comme aptes à l'asile ne signifie pas que les risques contre leur personne sont insignifiants.
En effet, des témoignages nous révèlent que les personnes renvoyées subissent soit des emprisonnements, soit des atteintes à leur intégrité corporelle. Le but de cette motion est de se donner le temps nécessaire à des démarches pour faire aboutir des formalités auprès de pays tiers. Souvent, celles-ci se prolongent et l'autorité a l'impression d'être flouée par ceux s'occupant des démarches. Ce n'est pas le cas, mais les méandres administratifs sont longs. Il faut préciser que les frais de séjour du requérant n'émargent pas aux deniers publics, ce sont les parrainages qui les prennent en charge, ce qui n'est pas une sinécure. C'est pourquoi je vous remercie de bien vouloir soutenir cette motion.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat accueille avec objectivité cette motion. D'abord, j'aimerais dire que la patience à laquelle vous appellent les motionnaires est une constante du département, nous l'avons moult fois prouvé.
Une deuxième question s'impose lorsqu'il est question de l'autonomie financière assurée des requérants en attente de leur départ. Il faudrait tout de même dire qu'il peut s'agir d'une autonomie financière assurée par des tiers mais subventionnée par l'Etat, ce qui revient au même. Mais cela n'est pas important, la seule petite interrogation que j'ai, c'est de me demander si l'on ne devrait pas fixer un délai. Vous parlez de «délais nécessaires», il ne faudrait pas non plus que ça dure des années, mais je pense que si nous sommes, les uns et les autres, raisonnables, le délai nécessaire sera peut-être de quelques mois pour permettre l'organisation de ce départ vers un pays d'accueil. Nous pouvons, dans ce sens, accepter cette proposition de motion.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
concernant le renvoi des requérants d'asile
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
- les décisions de refus d'asile signifiées par les autorités suisses ne tenant pas toujours compte des risques en cas de refoulement;
- l'impossibilité dès lors pour certains requérants et leur famille de retourner dans leur pays en toute sécurité;
- les difficultés des requérants à trouver un pays tiers d'accueil, et les lenteurs administratives afin de mettre sur pied un tel projet,
invite le Conseil d'Etat
à accorder les délais nécessaires à l'organisation d'un départ légal vers un pays tiers pour tel ou tel requérant débouté, dont les chances de succès sont bien réelles et dont l'autonomie financière est assurée.