République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 juin 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 8e session - 25e séance
PL 7110
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, est modifiée comme suit:
Art. 26 (al. 1, lettre c (nouvelle, les lettres c et d, anciennes, devenant les lettres d et e))
c)
des immeubles rénovés, lorsque le coût des travaux entraîne une augmentation de loyers portant ceux-ci à un montant ne répondant plus aux besoins prépondérants de la population.
Art. 26, al. 2 (nouveau)
2 Dans les cas d'application de l'alinéa 1, lettre b, le taux de subventionnement accordé pour les immeubles de la catégorie 2 doit permettre un abaissement initial des loyers de 40% au moins. Dans les cas d'application de l'alinéa 1, lettre c, le taux de subventionnement accordé doit permettre un abaissement initial des loyers de logements existants de 20% au moins. Si l'abaissement de loyer ne dépasse pas ce taux, la durée de l'aide et du contrôle des loyers institué aux articles 42 et suivants sont limités à 10 ans. En outre, l'aide n'est pas accordée ou est diminuée pour les appartements dont le loyer subventionné correspond pour le locataire à un taux d'effort inférieur à celui fixé à l'article 30, alinéa 3.
Art. 2
La présente loi entre en vigueur le... (à préciser).
EXPOSÉ DES MOTIFS
La nouvelle loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR) approuvée en votation populaire en juin 1983 part d'une approche plus globale de la problématique de la conservation des immeubles d'habitation que la loi sur les démolitions de 1961, qui visait essentiellement à interdire les démolitions et les transformations portant atteinte à de tels immeubles. La nouvelle loi résultait d'une initiative populaire qui préconisait de compléter les mesures restrictives en vigueur par une politique de rénovation des immeubles d'habitation qui devait être concrétisée par un plan général de la rénovation, car le maintien des immeubles implique qu'ils soient conservés en bon état et, le cas échéant, que leur confort soit amélioré.
Encourager les rénovations
Cette approche a été partiellement concrétisée dans le chapitre III de la LDTR intitulé «Encouragement à la rénovation» et plus particulièrement à l'article 8 de ladite loi. Il s'agissait de favoriser la rénovation d'immeubles d'habitation en faisant recours à la loi générale sur le logement et la protection des locataires (LGL) qui avait elle aussi été complétée quelque temps plus tôt par une disposition (l'article 26) permettant de subventionner la transformation et la rénovation d'immeubles d'habitation en les mettant au bénéfice du régime HBM ou HLM, alors que précédemment les lois HLM ne pouvaient subventionner que la construction d'immeubles neufs.
En particulier, les rénovations moyennes
Dès l'entrée en vigueur de la LDTR du 26 juin 1983, un nombre appréciable d'immeubles anciens ont été transformés ou rénovés grâce à l'article 26 LGL et la mise au bénéfice d'un subventionnement HLM. Cette aide n'était toutefois consentie qu'au profit de transformations lourdes en raison de la portée juridique restrictive donnée à la disposition légale précitée. Il en est résulté que de nombreuses transformations moyennes n'ont pas pu être mises au bénéfice d'un subventionnement HLM, ce qui est éminemment regrettable à trois titres:
1. Principalement, c'est ce type de rénovation qu'il faut encourager pour maintenir un immeuble en bon état de conservation sans attendre qu'il ne soit fortement dégradé et ne nécessite une rénovation lourde.
2. En second lieu, ces rénovations moyennes sont tout de même assez onéreuses et entraînent souvent des augmentations de loyer importantes qui peuvent porter le montant des loyers à un prix supérieur aux besoins prépondérants de la population, ce qui est incompatible avec la LDTR dont l'un des buts est de maintenir des logements bon marché.
3. Enfin, il est arrivé qu'un propriétaire prévoie des travaux plus importants que nécessaire afin de pouvoir être mis au bénéfice du subventionnement HLM, ce qui est absurde.
Pour ces motifs, il est apparu opportun de compléter la LDTR ou la LGL de dispositions permettant le subventionnement de rénovations moyennes avec un taux d'abaissement des loyers plus bas que le taux usuel en matière HLM et par conséquent une durée de contrôle des loyers inférieure. Cette proposition n'ayant pas été concrétisée, le présent projet de loi vise à introduire une telle possibilité dans la LGL afin d'encourager ce type de rénovation qui est celle la plus souvent effectuée à Genève, mais qui, à l'heure actuelle, ne bénéficie pas de l'aide de l'Etat.
Un coup de fouet pour l'industrie du bâtiment
Celle-ci serait d'autant plus appréciée dans le contexte économique actuel que la rénovation - si elle est mieux encouragée - permettrait de donner des occasions importantes de travail à l'industrie du bâtiment dans un domaine particulièrement intéressant, puisqu'il fait appel à de nombreux corps de métiers et permet ainsi de soutenir efficacement un secteur de l'économie qui connaît de graves difficultés, indépendamment de l'objectif de maintenir un parc immobilier en bon état.
Face à la crise qui frappe le secteur de la construction et compte tenu de la nécessité de renouveler le domaine bâti existant, l'office fédéral des questions conjoncturelles a précisément mis sur pied un programme d'action, d'une durée de 6 ans (1990-1995), portant sur l'entretien et la rénovation des constructions (programme PI-BAT) ainsi que sur l'utilisation rationnelle des l'électricité (programme RAVEL) et le développement des énergies renouvelables (programme PACER).
Dans la branche de la construction, on observe partout en Suisse une tendance de plus en plus marquée pour la rénovation. Dans les années à venir, cette orientation ne pourra que se renforcer. C'est dire que le maintien en état du patrimoine construit demandera des efforts de plus en plus importants; d'où la nécessité d'encourager les rénovations, y compris celles que l'on qualifie de «douces».
Taux d'abaissement des loyers et durée de contrôle
Le présent projet de loi vise donc à introduire un paragraphe supplémentaire à l'article 26 LGL ayant pour but d'étendre le subventionnement accordé en vertu de cette loi aux rénovations moyennes. Dans cette hypothèse, l'abaissement des loyers serait de 20% et l'aide consentie ainsi que le contrôle des loyers seraient limités à dix ans. En outre, l'abaissement de loyer serait accordé par logement, ce qui permettrait de supprimer l'aide ou de la diminuer pour les logements dont les locataires en place auraient des revenus ne justifiant pas qu'ils bénéficient d'une subvention par rapport au taux d'effort au sens de l'article 30 LGL qui résulterait du loyer subventionné.
Il est également proposé que l'article 26 LGL soit complété d'un alinéa 2 nouveau, prévoyant, pour les transformations ou rénovations lourdes, que le taux d'abaissement des loyers est de 40% au moins, afin que l'aide soit véritablement efficace. Rappelons à ce sujet que les taux maximums de subventionnement prévus à l'article 23 LGL permettent d'atteindre un abaissement de loyer plus important, mais ces dernières années les taux accordés étaient plus bas et entraînaient (lorsque les taux hypothécaires étaient élevés) un abaissement des loyers qui ne dépassait pas 35%, ce qui est insuffisant et conduisait à des loyers incompatibles avec les revenus de la majorité de la population.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que le présent objet de loi recevra bon accueil de votre part.
Préconsultation
M. Christian Ferrazino (AdG). Juste deux mots d'introduction sur ce projet de loi qui vous est présenté et qui a essentiellement pour but d'aider la rénovation moyenne. Actuellement, la loi générale sur le logement, en son article 26, a pour conséquence que lorsqu'un propriétaire demande un subventionnement pour procéder à des rénovations il doit s'agir de rénovation lourde. Nous constatons, dans des périodes de difficultés économiques comme celles que nous connaissons, qu'il est d'autant plus nécessaire de favoriser des rénovations moyennes, que l'on qualifie également de douces. Or, le texte actuel de la loi générale sur le logement ne le permet malheureusement pas.
Ce projet de loi n'est rien d'autre qu'une aide à la rénovation moyenne, et c'est en quelque sorte pour combler une lacune de la loi générale sur le logement que nous proposons que le subventionnement ne soit pas accordé uniquement pour des rénovations lourdes, mais puisse également l'être dans le cadre de rénovations moyennes. Là, j'anticipe un peu sur les débats que nous aurons tout à l'heure concernant le bonus à la rénovation qui a été proposé et qui sera soumis également à notre examen. L'idée que nous avons eue lorsque nous avons examiné en commission du logement ce projet était de faire en sorte qu'il puisse s'appliquer non seulement aux rénovations lourdes mais également aux rénovations légères, moyennes et douces.
Ce projet de loi vise simplement à combler une lacune, et je dirai qu'il est d'autant plus nécessaire de l'adopter rapidement étant donné la situation morose dans laquelle se trouve l'économie, particulièrement dans le secteur de la construction qui est l'un des plus touché. Cela permettrait, par le biais du subventionnement octroyé pour des rénovations moyennes, d'inciter un certain nombre de propriétaires à y procéder et, par conséquent, de donner du travail supplémentaire aux petites et moyennes entreprises de la construction.
Voilà brièvement résumées les raisons de ce projet de loi que je vous invite à adopter.
M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Quelques remarques au sujet de ce projet de loi. Des opérations de rénovation, loi générale sur le logement de catégorie HCM avec réduction modérée des loyers d'environ 20% répondant aux objectifs du projet de loi, existent déjà. La LGL, dans le cadre de rénovations, n'intervient pas seulement lors de travaux de rénovation lourde. La pratique actuelle de la direction générale du logement a été assouplie. Elle n'est plus calquée sur celle de l'Office fédéral qui n'intervient que lorsqu'il y a au moins 50% de travaux dits à plus-value.
Le projet de loi prévoit que les loyers soient modifiés en fonction de l'évolution des revenus des locataires. Cela conduirait à une lourdeur administrative excessive, une décision soit du Conseil d'Etat, soit du service social du logement devrait être prise lors de chaque variation de revenu, avec notification officielle de droit et recours, etc., et vous auriez encore le système d'allocation surtaxe qui agit déjà très bien dans ce sens-là.
L'article 26, alinéa 1, du projet de loi fait référence aux besoins prépondérants de la population. Il y a plusieurs besoins prépondérants. Aussi, pour les loyers dépassant 3 600 F, type HCM, l'application des TR doit être modifiée avec renversement correspondant de la jurisprudence. En cas de rénovation légère, il n'est plus nécessaire d'intervenir par le biais de subventionnement, les dispositions qui ont été prises il y a un an et demi dans le cadre de la LGL nous permettent d'agir maintenant dans le cadre de l'allocation logement; c'est un moyen correspondant aux besoins dans un cas comme celui-ci.
C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat n'est pas opposé à un examen en commission. Par contre, il ne pense pas que cette mesure apportera une incitation quelconque aux rénovations. Nous disposons déjà des moyens d'aller dans cette direction. Encore une fois, j'admets volontiers qu'en commission on puisse en débattre de manière à faire mieux le tour de la question.
Ce projet est renvoyé à la commission du logement.