République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 juin 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 8e session - 24e séance
PL 6737-B et objet(s) lié(s)
14. Deuxième rapport de la commission fiscale chargée d'étudier les objets suivants :
1. Introduction
Déposé le 21 août 1991 le projet de loi 6737 appartient au train de mesures fiscales annoncées par le Conseil d'Etat pour assurer une plus grande équité fiscale. Il vise, en outre, à garantir le paiement de l'impôt sur le bénéfice immobilier et à lutter contre la spéculation immobilière. Renvoyé à l'examen de la commission fiscale par décision du Grand Conseil du 19 septembre 1991, il a fait l'objet d'un premier rapport de Mme Françoise Saudan députée, déposé le 22 avril 1993 et d'un deuxième débat au Grand Conseil lors de la séance du vendredi 14 mai 1993 au soir (Mémorial N° 20 p. 2729 et suivantes).
Lors de cette dernière séance, plusieurs députés dont le rapporteur sont intervenus pour contester le résultat du travail de la commission sur le point précis du calcul de l'imposition. Ils ont estimé que la solution adoptée par la majorité de la commission fiscale était regrettable dans la mesure où elle ne tenait pas compte de l'évolution du pouvoir d'achat dans la détermination du prix de revient et, de ce fait, frappait de façon anormale et injuste le secteur immobilier déjà très fortement malmené par la conjoncture économique actuelle. Ils ont proposé le renvoi en commission du projet de loi, ce qui a été accepté par une majorité du Grand Conseil.
Cette contestation n'enlève rien au remarquable rapport de synthèse établi par Mme Saudan à l'issue de la première partie des débats de la commission fiscale. Le rapporteur n'a donc repris dans le présent document que les explications relatives aux articles contestés et invite Mesdames et Messieurs les députés à se référer pour le surplus aux explications très claires et très détaillées du rapport 6737 A de Mme Saudan.
2. Travaux de la commission
Suite à la décision du Grand Conseil du 14 mai 1993, la commission fiscale, présidée successivement par Mme Christiane Magnenat-Schellak, députée, et M. Jean-Luc Ducret, député, a consacré tout ou partie des séances des 28 mai, 18 juin, 2 juillet, 27 août 1993, 18 mars et 6 mai 1994 à l'examen des points contestés. Lors de ces séances, elle a bénéficié de la participation de M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat chargé du département des finances et contributions ainsi que de la collaboration successive de MM. Pierre-Alain Loosli, directeur général de l'administration fiscale, Flurin Könz, chef du service juridique, Alfred Charpillod, directeur de la division du contrôle et, dès 1994, de MM. Pietro Sansonetti, directeur des affaires fiscales et Daniel Brauen, administrateur général.
Les collaborateurs du département ont fourni de nombreux exemples chiffrés ainsi que des tableaux comparatifs pour lesquels la commission les remercie tout particulièrement.
2.1 Auditions
En date des 18 juin 1993, 2 juillet 1993 et 18 mars 1994, la commission a procédé, à leur demande, aux auditions suivantes:
18 juin 1993 : Audition de la Chambre genevoise immobilière, représentée par MM. Jean-Paul Rey, secrétaire, Pierre Mottu, notaire et Michel Ricci, tous trois membres de la commission fiscale de la Chambre. (Annexe 2)
Les représentants de la Chambre relèvent combien la solution retenue jusqu'alors par la commission fiscale ignore la dévaluation monétaire et pénalise fortement les personnes qui ont conservé longtemps un bien immobilier, même si l'alinéa 5 de l'article 84 permet de tenir compte des années de propriété. Ils estiment que le système de taxation devrait frapper fortement les reventes après une courte durée de possession et que les personnes à revenus modestes ayant placé leurs économies dans un bien immobilier devraient pouvoir récupérer, sans taxation, le montant investi, à sa valeur indexée. Ainsi ce montant versé par exemple aux Rentes Genevoises en vue de s'assurer une rente de retraite serait exonéré d'impôt.
La prise de position de la Chambre donne l'occasion à M. Loosli de rappeler les dispositions de l'article 12 de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (Annexe 1) que les cantons doivent mettre en application d'ici au 1er janvier 2001.
Les représentants de la Chambre se déclarent favorables au retour au système de taxation actuel avec modification des taux pour les possessions de courte durée, ce qui permettrait de mieux lutter contre la spéculation.
18 juin 1993: Audition de l'Association des promoteurs constructeurs genevois représentés par MM. François Moser et Thierry Barbier-Mueller, tous deux gérants d'immeubles. (Annexe 3)
Outre les remarques similaires à celles des représentants de la Chambre genevoise immobilière, celles de l'Association des promoteurs constructeurs démontrent, exemple à l'appui, que la tarification retenue conduit à des taxations inéquitables. Un bien immobilier de 10 millions, revendu 10 ans plus tard 12,5 millions, soit un «bénéfice» de 2,5 millions, ou encore de 25%, inférieur à l'inflation, payera un impôt de 32,85%, alors qu'un «bénéfice» de 61% réalisé par la revente d'un studio à 290 000 F 1 an après son acquisition à 180 000 F, ne sera frappé que d'un impôt de 15,4%
Ils soulignent que les éventuels investisseurs immobiliers sont présentement dans une situation d'attente devant le marché genevois et que l'adoption de la loi dans sa nouvelle formulation serait perçue comme un message négatif. Au contraire, ils suggèrent des messages positifs tels que, par exemple, l'exonération totale ou partielle (limitée dans le temps) des droits de mutation ou encore le report de l'imposition de la valeur locative pour l'acquéreur de son propre logement.
Ils disent encore qu'un certain nombre de caisses de retraite, prêtes à investir dans l'immobilier, qui en a grand besoin, seront découragées par les dispositions de ce projet de loi.
2 juillet 1994: Audition de l'Association genevoise pour la protection des villas et de leur environnement, représentée par MM. Philippe Schmidt, Bertrand Reich, Renaud Barde et Walter Zbinden. (Annexe 4)
Les représentants de cette association estiment que la valeur d'acquisition devrait être indexée selon l'indice des prix à la consommation pour faire sortir, en valeur réelle, la somme soumise à taxation. Ils se déclarent, par contre, favorables à l'application de taux élevés les 5 premières années. Ils estiment que la réduction de l'impôt devrait atteindre 80% après 25 ans de possession et 100% après 30 ans.
18 mars 1994: Audition de la Caisse paritaire de prévoyance bâtiment-gypserie-peinture, représentée par M. Gérard Baudry, administrateur et M. Gabriel Barrillier, secrétaire général de la Fédération des métiers du bâtiment (F.M.B.) (Annexe 5)
Les représentants de la Caisse exposent leur préoccupation devant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1995, des modifications de la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) par introduction du libre-passage et de facilités pour l'accession à la propriété. Ils estiment qu'il pourrait résulter de ces nouvelles dispositions la nécessité pour les caisses de pension de réaliser une partie de leurs actifs immobiliers, lesquels seraient lourdement frappés par les textes nouveaux adoptés. Ils suggèrent d'exonérer les caisses de pension de cet impôt. Ils suggèrent également une mesure conjoncturelle, soit de libérer de l'impôt les bénéfices réalisés lors de la première revente d'un immeuble mis en chantier dans les 2 ans qui suivent l'adoption de la présente loi.
2.2 Débat général
Les nombreuses auditions effectuées ont conduit la majorité de la commission à admettre que la solution retenue, après le premier renvoi en commission n'était pas satisfaisante, donnait quelquefois des résultats contraires au but recherché et était enfin, par son système de double échelle progressive, compliquée et difficilement perçue par les contribuables. La commission a longuement débattu du principe de l'indexation du prix d'acquisition pour y renoncer finalement, moyennant qu'il soit largement tenu compte des durées de possession pour déterminer l'impôt. La commission a demandé au département de revenir à un système proche de la législation actuelle.
Enfin, elle a apporté quelques modifications à d'autres dispositions de la loi explicitées ci-après.
2.3. Commentaires article par article.
Ces commentaires ne concernent que les articles qui ont été modifiés à la suite du deuxième renvoi en commission.
Art. 80
La rédaction de l'alinéa 1 a été modifiée. Les termes «L'impôt sur certains bénéfices....» ont été remplacés par «L'impôt sur les bénéfices...»
Art. 81
Les dipositions retenues après le premier passage en commission prévoyaient qu'en cas de succession ou de partage successoral l'imposition était prorogée. Cette disposition était conforme à la loi fédérale sur l'harmonisation fiscale citée ci-avant. La commission a préféré maintenir la situation actuelle où l'impôt n'est pas perçu étant entendu qu'il conviendra ultérieurement de procéder à la modification de la loi pour la rendre conforme au droit fédéral. Ce changement implique également une modification de l'article 82 exposée ci-après.
En conséquence, l'article 81 alinéa 1 lettre b est modifié par suppression des mots : «de succession, de partage successoral». L'alinéa 3 est complété par une lettre c «en cas de succession ou de partage.»
Les dispositions de cet article ont donné l'occasion au département de préciser qu'il entend maintenir sa pratique actuelle en cas de succession soit de laisser un délai de 27 mois aux héritiers pour réaliser un bien immobilier dans le cadre des droits de succession.
L'article ainsi modifié est adopté par 8 voix (5L, 2DC, 1R.) contre 5 voix (2S, 1AdG, 1E et 1R)
Art. 82
L'alinéa 1 est modifié par suppression des mots «augmentée des impenses».
L'alinéa 2 est modifié par adjonction des mots «augmentée des impenses».
Ces 2 modifications, purement rédactionnelles, n'impliquent pas de changement de fond.
L'alinéa 3 reprend le texte de l'alinéa 4.
L'alinéa 4 est nouveau, il résulte de la modification de l'article 81.
L'alinéa 5 reprend les dispositions actuelles de la loi.
L'alinéa 6 reprend le texte de l'ancien alinéa 5.
L'alinéa 7 reprend le texte de l'ancien alinéa 6.
L'alinéa 8 reprend le texte de l'ancien alinéa 7.
L'ancien alinéa 8 est supprimé.
Un amendement à l'alinéa 8 précisant que les impenses peuvent comprendre les indemnités versées aux locataires pour libérer les locaux a été refusé par 9 voix (2L, 2R, 3S, 2E, et 1 AdG) contre 1 voix (DC) et 2 abstentions (L et DC)
Art. 84
L'article 84 est entièrement nouveau. Il est semblable à la législation actuelle avec des taux modifiés qui réflètent les discussions de la commission. Les tableaux de l'annexe 6 établis par le département, avec les taux proposés modifiés ultérieurement par la commission pour les courtes durées de possession, permettent de comparer l'imposition prévue avec l'imposition actuelle. Les tableaux font ressortir clairement l'alourdissement de l'impôt pour les courtes durées de détention et son allègement pour celles dépassant 25 ans. Pour les lettres a) b) et c), le département avait proposé respectivement les taux de 45%, 35% et 25%. Un amendement, accepté à l'unanimité pour la lettre a), à l'unanimité moins 1 abstention (L) pour la lettre b) et à l'unanimité moins 1 opposition (L) pour la lettre c), a porté les taux à respectivement 50%, 40% et 30%.
Un amendement proposant de modifier de 0% à 5% le taux prévu à la lettre g) a été repoussé par 7 voix (4L 2DC 1R) contre 4 voix (3AdG 1R) et 3 abstentions (2S et 1E). L'article, dans sa rédaction amendée, est finalement adopté sans vote.
Art. 86 A
Le délai de 5 jours prévu à l'alinéa 3 est porté à 8 jours. Le texte de l'alinéa 4 est modifié. Les mots «l'aliénateur est dispensé...» sont remplacés par «l'aliénateur peut, à sa demande, être dispensé...».
L'article 86 A amendé est accepté à l'unanimité.
3. Conclusion
En conclusion, la commission fiscale vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, par 11 voix (4L 2R 2DC 1E et 2S) contre 3 voix (AdG) d'accepter le projet de loi dans sa rédaction ci-après, étant entendu que le projet de loi répond au volet fiscal de l'initiative 21. La motion 474, mentionnée dans le premier rapport, n'a pas été reprise en début de législature et est, par conséquent, devenue caduque.
(6737)
PROJET DE LOI
modifiant la loi générale sur les contributions publiques
(Impôt sur les bénéfices et gains immobiliers)
(D 3 1)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:
Imputation de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers
Art. 33 A (nouveau)
Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le revenu, l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers perçu en application des articles 80 à 87 est imputé sur l'impôt annuel entier ou remboursé pour la part qui en excède le montant.
Imputation de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers
Art. 74 (nouveau)
Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le bénéfice net ou le revenu net, l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers perçu en application des articles 80 à 87 est imputé sur l'impôt annuel entier ou remboursé pour la part qui en excède le montant.
PREMIÈRE PARTIE
TITRE II
IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES
ET GAINS IMMOBILIERS
(intitulé nouvelle teneur)
Objet
Art. 80 (nouvelle teneur)
1 L'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers a pour objet le bénéfice net provenant de l'aliénation d'immeubles ou de parts d'immeubles sis dans le canton, ainsi que certains gains que ces immeubles procurent sans aliénation.
2 Sont assimilées à des immeubles les actions ou parts de sociétés immobilières au sens de l'article 68, lettre c.
3 L'impôt est dû par l'aliénateur ou le bénéficiaire du gain même s'il est domicilié hors du canton. Les époux vivant en ménage commun sont considérés comme contribuables distincts. Le conjoint aliénateur ou bénéficiaire du gain est seul responsable du paiement de l'impôt dû.
4 Est considéré comme aliénation tout acte qui confère à un acquéreur la propriété ou la réelle disposition économique d'un immeuble, soit notamment la vente, l'échange, le partage, l'expropriation et l'apport dans une société.
5 Le transfert d'un immeuble ou part d'immeuble de la fortune privée dans la fortune commerciale ou de la fortune commerciale dans la fortune privée est assimilé à une aliénation.
Exemption
Imposition
prorogée
Art. 81 (nouvelle teneur)
1 L'imposition est prorogée en cas d'aliénation en raison:
a)
d'actes juridiques entre époux;
b)
d'avancement d'hoirie ou de donation;
c)
d'échange;
d)
de remembrement effectué en vue d'un remaniement parcellaire, de l'établissement d'un plan de quartier, de rectification de limites ou d'arrondissement d'une aire agricole.
2 Lors d'un partage ou d'un échange, l'impôt est perçu immédiatement sur la soulte reçue pour la part qui représente une plus-value de l'immeuble aliéné.
Exonérations
3 L'impôt n'est pas perçu:
a)
en cas de vente forcée, lorsque les créanciers saisissants, gagistes ou admis définitivement à l'état de collocation ne sont pas entièrement désintéressés;
b)
en cas de revente d'un immeuble que le créancier ou la caution d'une créance hypothécaire avait dû acquérir dans une vente forcée pour se couvrir de sa créance si elle n'est pas entièrement éteinte par le prix de vente;
c)
en cas de succession ou de partage successoral.
Calcul du bénéfice
Art. 82 (nouvelle teneur)
1 Le bénéfice ou gain imposable est constitué par la différence entre la valeur d'aliénation et la valeur d'acquisition.
Valeur d'acquisition
2 La valeur d'acquisition est égale au prix payé pour l'acquisition du bien, augmentée des impenses, ou, à défaut de prix, à sa valeur vénale.
3 Lors de l'aliénation d'un immeuble acquis par un transfert justifiant la prorogation de l'imposition, le prix d'acquisition est celui de la dernière aliénation soumise à l'impôt qui est aussi déterminante pour fixer la durée de possession.
4 Lorsque le bien a été acquis par dévolution pour cause de mort ou à la suite d'une déclaration d'absence, la valeur d'acquisition est égale à la valeur fixée par le département pour la perception des droits de succession ou d'enregistrement, augmentée du montant desdits droits.
5 Lorsque l'acquisition est intervenue plus de dix ans avant l'aliénation, le contribuable peut demander que soit considérée comme valeur d'acquisition la valeur fiscale 5 ans avant l'aliénation s'il s'agit d'un immeuble locatif au sens de l'article 48, lettre a, et la valeur fiscale 10 ans avant l'aliénation majorée de 30% s'il s'agit d'un autre immeuble.
Valeur d'aliénation
6 La valeur d'aliénation est égale au prix de vente diminué des impenses que l'aliénateur a supportées à cette occasion.
7 Le prix de vente comprend l'ensemble des prestations de tout genre auxquelles l'acquéreur s'oblige à l'égard de l'aliénateur.
Impenses
8 Sont considérés comme impense les frais liés à l'acquisition ou à l'aliénation de l'immeuble et les dépenses qui en ont augmenté la valeur.
Autres gains
Art. 83 (nouvelle teneur)
1 Sont également soumises à l'impôt les prestations de tout genre que reçoit, avant ou après l'aliénation, le propriétaire d'un bien ou actif immobilier ou le titulaire d'un droit immobilier réel ou personnel, soit notamment:
a)
le produit de la cession du droit d'acquérir un immeuble, de droit d'emption et de préemption et la substitution dans le bénéfice d'une promesse de vente;
b)
le produit de la constitution, la modification ou la radiation de charges ou, le cas échéant, de droits de superficie, qui, sous la forme de servitudes de droit privé ou de restrictions de la propriété fondées sur le droit public, atteignent de façon essentielle et durable l'exploitation ou la valeur d'aliénation d'un immeuble;
c)
les dédits et peines conventionnels résultant de l'inexécution d'un contrat relatif à l'immeuble;
d)
les indemnités de tout genre, quelle que soit leur appellation, liées à l'aliénation du bien ou actif immobilier ou à une des transactions prévues à cet article.
2 Lorsqu'une de ces prestations est liée à l'aliénation d'un immeuble, elle fait partie de la valeur d'aliénation selon l'article 82; dans les autres cas, elle est soumise à l'impôt au moment où elle est acquise, sous déduction éventuelle des seuls frais s'y rapportant directement.
Taux de l'impôt
Art. 84 (nouvelle teneur)
1 L'impôt est perçu de l'aliénateur ou du bénéficiaire du gain sur le montant global du bénéfice ou du gain nets aux taux suivants:
a)
50% lorsqu'il a été propriétaire des biens ou actifs immobiliers, ou titulaire des droits immobiliers (réels ou personnels) pendant moins de 2 ans;
b)
40% lorsqu'il l'a été pendant 2 ans au moins, mais moins de 4 ans;
c)
30% lorsqu'il l'a été pendant 4 ans au moins, mais moins de 6 ans;
d)
20% lorsqu'il l'a été pendant 6 ans au moins, mais moins de 8 ans;
e)
15% lorsqu'il l'a été pendant 8 ans au moins, mais moins de 10 ans;
f)
10% lorsqu'il l'a été pendant 10 ans au moins, mais moins de 25 ans;
g)
0% lorsqu'il l'a été pendant 25 ans et plus.
2 Lorsque, postérieurement à l'acquisition d'un immeuble, des travaux lui ont apporté une plus-value d'une certaine importance, le gain est déterminé et imposé séparément pour les divers éléments selon la durée de propriété de chacun d'eux; si la répartition du bénéfice entre les divers éléments ne peut être déterminée, elle est fixée par estimation.
Remploi
Art. 85 (nouvelle teneur)
1 L'impôt est remboursé en cas de remploi du bénéfice résultant de l'aliénation:
a)
d'un logement (villa ou appartement) occupé par le propriétaire qui aliène;
b)
d'une propriété exclusivement agricole exploitée par le propriétaire qui aliène, son conjoint ou un membre en ligne directe de sa famille;
c)
de tout autre immeuble cédé à l'Etat, à une commune genevoise ou à une corporation de droit public genevois pour cause d'utilité publique ou d'intérêt général.
2 Il y a remploi au sens de l'alinéa précédent lorsque l'aliénateur utilise le produit de l'aliénation pour acquérir, construire ou transformer un immeuble de même nature, pourvu qu'il ne s'écoule pas plus de 5 ans entre les deux opérations.
3 N'est remboursé que l'impôt relatif au bénéfice qui a été effectivement investi, en plus du montant de la valeur d'acquisition du bien aliéné.
4 L'impôt remboursé est exigible lors de l'aliénation de l'immeuble de remplacement; les aliénations dont l'imposition est prorogée n'entrent pas en ligne de compte, mais l'acquéreur reprend l'obligation de l'aliénateur dans les cas de l'article 81, alinéa 1, lettres a et b.
5 La prescription et la péremption ne commencent à courir qu'au moment de l'aliénation donnant lieu à la perception de l'impôt.
Déclaration
Art. 86 (nouvelle teneur)
Toute aliénation ou prestation doit être déclarée au département par l'aliénateur ou le bénéficiaire du gain, dans un délai de 30 jours à compter de la date de l'opération, sur la formule établie par le département, en y joignant les pièces justificatives.
Consignation et sûretés
Art. 86 A (nouveau)
1 Lors de la passation d'un acte translatif de la propriété d'un immeuble ou de tout autre droit immobilier réel ou personnel, l'aliénateur est tenu de consigner entre les mains du notaire qui instrumente ou du préposé à l'office des poursuites et des faillites la partie du prix correspondant en pour-cent au taux de l'impôt, ou des sûretés équivalentes.
2 Sauf accord du département, le notaire doit refuser d'instrumenter tant que la consignation n'a pas été effectuée. Les fonds destinés à la part de l'impôt sont consignés chez le notaire, sans intérêts.
3 En cas de doute sur la somme à consigner, le département fixe cette somme dans les huit jours à compter de la réception de la requête de l'aliénateur.
4 Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le revenu, l'aliénateur peut, à sa demande, être dispensé du versement de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers moyennant remise d'une garantie bancaire dont les termes et conditions sont fixés par le département.
Provision
Art. 86 B (nouveau)
1 Le bénéfice réalisé par le promoteur d'une opération immobilière soumise à la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, peut être affecté à la constitution d'une provision.
2 Cette provision doit être utilisée dans un délai de cinq ans pour une nouvelle opération de construction, de transformation et de rénovation d'un immeuble soumise à la loi générale sur le logement et la protection des locataires.
3 Le montant du bénéfice réinvesti ne peut dépasser
a)
la différence entre le prix du nouvel immeuble construit et le prix de revient de l'immeuble aliéné;
b)
le coût de la transformation;
c)
le coût de la rénovation.
4 Si la provision n'est pas utilisée ou n'est que partiellement utilisée dans un délai de cinq ans, elle doit être dissoute et portée au crédit du compte de résultat.
Hypothèque légale sans inscription
Art. 371 (nouvelle teneur)
L'impôt immobilier complémentaire pour deux années échues et l'année courante, ainsi que l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers pendant deux ans à compter de l'aliénation et dans la mesure où la consignation prévue à l'article 86 A n'a pas été effectuée, sont au bénéfice d'une hypothèque légale sans inscription (art. 836 du code civil) dans les termes prévus par l'article 89 de la loi d'application du code civil et du code des obligations.
Dispositions transitoires
Art. 2
(concernant l'application de l'art. 85, al. 4 in fine:)
L'impôt dont la perception avait été différée en raison d'un remploi intervenu entre le 1er janvier 1987 et l'entrée en vigueur de la présente loi n'est pas dû si la première aliénation qui suit est une de celles qui sont désignées à l'article 81, alinéa 1, lettres a et b et intervient jusqu'au 31 décembre 1999.
Modification à une autre loi
(E 1 1)
Art. 3
La loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981, est modifiée comme suit:
Art. 80, al. 1, lettre a (nouvelle teneur)
a) les impôts désignés à l'article 371 de la loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887;
Entrée en vigueur
Art. 4
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
ANNEXE 1
ANNEXE 2
ANNEXE 3
ANNEXE 4
ANNEXE 5
ANNEXE 6
RAPPORT DE MINORITÉ
Le projet de loi 6737 relatif à l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers propose une modification bienvenue de notre législation fiscale.
Nous sommes intervenus à de multiples reprises pour taxer davantage les plus values considérables réalisées lors de ventes de biens immobiliers et plus particulièrement les bénéfices réalisés lors d'opérations spéculatives. Il n'est en effet pas normal que certains puissent ainsi réaliser des profits, sans créer aucune richesse, par la réalisation de bénéfices purement spéculatifs.
Rappelons que l'initiative IN 21 contre la spéculation n'a toujours pas été soumise en votation populaire alors que les délais prévus dans notre Constitution sont écoulés depuis plusieurs années. Par ailleurs nous avons présenté à ce parlement des projets de loi qui concernent directement les buts visés par le présent projet de loi.
Nous n'entendons pas revenir dans ce rapport de minorité sur l'ensemble des arguments qui militent en faveur d'une imposition plus forte des revenus spéculatifs, ces arguments ayant été largement développés dans les exposés des motifs de nos projets de loi et de l'IN 21. Précisons tout de même que la période actuelle nous semble particulièrement favorable à l'introduction de dispositions contre la spéculation. Leur but principal n'est pas seulement d'assurer de nouvelles recettes fiscales mais de servir avant tout d'instrument de dissuasion contre les opérations spéculatives. Celles-ci ont pris une importance telle dans notre canton ces dernières années qu'elles ne frappent pas seulement les locataires mais l'ensemble des activités économiques avec des conséquences désastreuses sur l'emploi qui est actuellement le principal sujet de préoccupation de la population.
Notre opposition ne porte donc pas sur les buts visés par le projet de loi 6737 mais sur les mesures trop timides qu'il préconise quant aux taux d'imposition proposés. Nous proposons de reprendre les taux d'imposition que nous avions prévus dans notre projet de loi et qui correspondent aux pratiques actuellement en vigueur dans le canton de Zurich. Nos amendements visent l'article 84 du projet de loi relatif à l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers.
Art. 84 (nouvelle teneur)
1L'impôt est perçu de l'aliénateur ou du bénéficiaire du gain sur le montant global du bénéfice ou du gain net aux taux suivants:
a) 70 % lorsqu'il a été propriétaire des biens ou actifs immobiliers, ou titulaire des droits immobiliers (réels ou personnels) pendant moins de 6 mois;
b) 60 % lorsqu'il l'a été pendant 6 mois au moins, mais moins de 1 an;
c) 50 % lorsqu'il l'a été pendant 1 an au moins, mais moins de 2 ans;
d) 40 % lorsqu'il l'a été pendant 2 ans au moins, mais moins de 3 ans;
e) 35 % lorsqu'il l'a été pendant 3 ans au moins, mais moins de 5 ans;
f) 30 % lorsqu'il l'a été pendant 5 ans au moins, mais moins de 10 ans;
g) 25 % lorsqu'il l'a été pendant 10 ans et plus.
Nous considérons que nous devons nous donner les moyens légaux nécessaires pour frapper énergiquement les bénéfices résultants de la spéculation immobilière. La spéculation foncière, si elle s'est quelque peu ralentie avec la crise économique, a atteint dans notre canton des niveaux tels que la question de savoir si le gain immobilier doit être imposé ne se pose même plus. Cependant les dispositions antérieures ont fait la preuve de leur insuffisance tant du point de vue des taux appliqués que des modalités de perception de l'impôt puisque des aliénateurs domiciliés ou partis à l'étranger ont pu échapper à l'imposition.
Les taux de l'actuel projet de loi proposés par la majorité de la commission sont eux aussi manifestement insuffisants et surtout il supprime toute imposition à partir de la vingt-cinquième année de possession comme si, avec le temps, la spéculation devenait acceptable.
Dans de nombreux cantons la fiscalité est utilisée depuis plusieurs années comme une mesure dissuasive contre la spéculation. L'imposition unique des gains immobiliers en une seule fois, au moment où ils sont effectivement réalisés, est non seulement justifiée, mais elle est aussi la méthode la plus efficace pour résoudre les problèmes posés par leur évaluation. Le gain réalisé peut en effet être déterminé avec précision en établissant la différence entre le prix de vente et le prix de revient.
Dans notre pays, les gains immobiliers sont imposés de diverses manières, soit par le biais d'un impôt spécial, soit dans le cadre de l'impôt ordinaire, ou encore par le cumul des deux. De nombreux cantons soumettent les gains immobiliers à un impôt spécial, exclusif, en ce sens qu'il n'est perçu que sur ce type de gains. Dans d'autres cantons, ces gains sont en outre soumis de façon cumulative à l'impôt sur le revenu (le bénéfice). La majorité des cantons établissent des distinctions entre les diverses catégories de gains immobiliers. Les gains faisant partie de la fortune privée du contribuable sont assujettis à l'impôt spécial et les gains réalisés sur les immeubles faisant partie de la fortune commercial sont soumis aux impôts ordinaires sur le revenu et le bénéfice et viennent s'additionner aux autres éléments du résultat d'exploitation. C'est ce système qui est en vigueur à Genève et que le projet de loi 6737 propose de modifier. Rappelons que les gains réalisés professionnellement sont soumis à l'impôt sur les bénéfices immobiliers et sont en outre soumis, parallèlement, à l'impôt sur le revenu (sur le bénéfice). Le bénéfice sur les gains immobiliers qui a été soumis à l'impôt spécial peut toutefois être déduit du bénéfice devant être pris en compte.
L'acheteur est tenu solidairement responsable du paiement par le vendeur de l'impôt sur les gains immobiliers. Lorsque le prix indiqué par les parties est manifestement inférieur à la valeur vénale de l'immeuble en question, le montant de l'aliénation est établi d'office par l'autorité fiscale. Dans ce cas, le supplément d'impôt relatif à la différence entre la valeur ainsi déterminée et le prix indiqué par les parties est alors dû par l'acquéreur, le vendeur étant tenu solidairement responsable.
Nos amendements visent à modifier les taux et le montant de la perception de l'impôt sur le bénéfice immobilier pour mieux tenir compte de la durée de possession et permettre ainsi de réduire la portée des opérations purement spéculatives qui sont nuisibles à l'ensemble de l'économie et aux conditions de vie de la population.
Telles sont, Mesdames et Messieurs les députés, les amendements que nous jugeons utile d'apporter au projet de loi 6737 pour lui permettre de lutter plus efficacement contre la spéculation immobilière.
Premier débat
M. Jean Montessuit (PDC), rapporteur. Il est nécessaire, me semble-t-il, de rappeler en préambule de ce nouveau débat sur la taxation des plus-values immobilières que la finalité de cette loi s'applique aux non-professionnels, étant entendu que les professionnels seront taxés selon la fiscalité ordinaire. Cette précision a pour but d'éviter, si on suivait les amendements du rapport de minorité, que les professionnels soient moins taxés que ceux qui, pour une raison ou une autre, vendent dans un délai relativement court.
C'est la raison pour laquelle je vous invite à ne pas suivre le rapport de minorité.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je voudrais apporter quelques précisions, tout d'abord sur le fond, puis sur trois aspects particuliers de ce projet de loi.
Le texte de loi parle de bénéfices et de gains immobiliers. Permettez-moi de dire qu'il s'agit d'un euphémisme pour traiter de ce que j'appelle la rente foncière, à savoir un profit parasitaire, parce que ne découlant d'aucune création de valeur, contrairement à la plupart des activités de production et de services. Ces profits spéculatifs sont parasitaires, non seulement parce qu'ils n'apportent rien à la société, mais parce qu'ils péjorent les conditions de vie et les conditions économiques. Ils renchérissent de manière artificielle les prix des produits et des services.
Ceux qui parlent à longueur d'année de la concurrence internationale sont soudain muets face à ce facteur artificiel d'élévation des coûts. Sur le plan social, c'est évidemment au niveau du logement que la spéculation foncière a les conséquences les plus néfastes avec le renchérissement des prix des terrains qui rend de plus en plus difficile la construction de logements bon marché et entraînant des dépenses accrues de l'Etat pour le logement social. Ces profits spéculatifs n'existent, au fond, que parce que les terrains sont par nature limités sur le plan quantitatif et qu'il n'est pas possible d'augmenter l'offre pour faire baisser les prix. Seuls des transferts de zones peuvent freiner ce processus, mais ce système a forcément ses limites. En l'état, ce projet de loi tente d'agir sur les conséquences et non sur les causes de la spéculation foncière. Encore le fait-il de manière bien timide !
Le précédent projet, le PL 6737-A, prévoyait des taux différents et mieux adaptés. Dans le rapport de Mme Saudan d'avril 1993, on pouvait lire en page 24 : «On ne peut raisonnablement affirmer que l'on va prétériter de manière grave le marché immobilier avec ces modifications. Elles ont essentiellement pour but une imposition plus équitable en fonction de la capacité contributive de chacun de lutter contre la spéculation foncière, de favoriser les possessions de longue durée.». Eh bien, certains sont revenus en arrière sur la pression des milieux immobiliers en exonérant de tout impôt les profits spéculatifs de la vingt-cinquième année de possession.
Le rapporteur de majorité a le sens de l'humour, lorsqu'il écrit en page 6 : «Les tableaux font ressortir clairement l'alourdissement de l'impôt pour les détentions de courte durée et son allégement pour celles dépassant vingt-cinq ans.». En fait d'allégement, il s'agit de la suppression de toute imposition, avec comme conséquence cette aberration qu'un propriétaire qui vend la vingt-quatrième année en réalisant, par exemple, un bénéfice d'un million payera 100 000 F d'impôts, alors que le même propriétaire ne payera rien s'il vend la vingt-cinquième année en réalisant le même bénéfice.
Du point de vue de l'équité fiscale, on peut se poser la question de la validité de ces taux. Par ailleurs, aucune étude n'a été faite sur les conséquences fiscales de ce projet de loi qui rapportera peut-être plus, peut-être moins, que les taux actuels. Nous n'en savons rien !
A l'heure où nous assistons à une tendance à la baisse des rentrées fiscales, dues notamment à la diminution de la masse salariale, et où la majorité de ce parlement prétend équilibrer les finances de l'Etat, on nous propose de voter les yeux fermés cette modification de l'impôt sur les gains immobiliers ! Le minimum aurait été de considérer l'ensemble des ventes immobilières de ces trois dernières années et de leur appliquer les nouveaux taux, pour nous permettre d'évaluer l'impact sur les rentrées fiscales par rapport aux taux actuels. L'examen des cent dix-sept cas présentés dans le rapport de majorité - dont nous ne connaissons pas la représentativité - n'est pas suffisant.
Enfin, en augmentant les taux d'imposition sur les gains immobiliers, notre parlement peut agir de manière intelligente sur les recettes de l'Etat, sans risquer un rejet du projet. Jusqu'à présent la politique suivie a consisté à agir sur les seules dépenses, mais cette fois nous pouvons intervenir au niveau des recettes. C'est dans ce sens que nous vous demandons de soutenir nos amendements.
Monsieur le président, je vous serais reconnaissant de bien vouloir proposer la formulation de l'article 89 de notre rapport de minorité.
Le président. Il en sera fait ainsi !
Mme Christine Sayegh (S). Ce projet de loi sur l'imposition spéciale des gains immobiliers a occupé la commission fiscale de manière très intense et pendant de nombreuses séances.
Sans en reprendre l'historique, on peut tout de même rappeler que l'on revient pratiquement à la «case départ», je veux parler du projet du Conseil d'Etat. Il est d'ailleurs surprenant de constater que les modifications - plus particulièrement la conception du barème d'imposition telle qu'elle est ressortie de la première phase des travaux, laquelle avait fait l'objet du rapport de Mme Françoise Saudan - avaient été suggérées par les milieux professionnels concernés, qui ont ensuite changé d'avis. Il n'est pas interdit de changer d'avis, mais cela a passablement retardé l'entrée en vigueur de cette loi qui, au-delà du fait qu'elle tend à décourager les spéculateurs, introduit un système de perception de l'impôt beaucoup plus efficace. L'impôt est prélevé immédiatement sur le bénéfice réalisé. Ainsi, non seulement la substance de l'impôt est garantie, mais encore cette méthode de perception a l'avantage de réduire sensiblement le contentieux de l'administration fiscale.
Au cours des travaux, M. Ducret a proposé un amendement accepté par la majorité des commissaires, à savoir de ne pas imposer le bénéfice immobilier dans le cadre des successions, soit le système actuellement appliqué. Toutefois, pour être cohérents avec la loi fédérale sur l'administration fiscale, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2001 et qui imposera ces bénéfices tout en prorogeant la perception, nous proposerons trois amendements que j'étayerai en deuxième débat. Ils ne remettent pas la loi en cause, et c'est pourquoi nous voterons l'entrée en matière.
M. Nicolas Brunschwig (L). Je voudrais faire quelques remarques, suite aux propos de M. Clerc. Je rappelle à l'ensemble de ce parlement que le taux actuel pour une durée de possession de moins de deux ans est de 32% et que, donc, avec cette loi, nous allons passer à un taux de 50%. Par ce biais, nous répondons en grande partie aux soucis partagés par l'ensemble des membres de la commission en taxant plus fortement les plus-values en cas de courtes durées de possession.
Comme l'a dit M. Montessuit en préambule, il paraît impensable d'aller au-dessus d'un tel taux, car les professionnels se verraient moins taxés que les non-professionnels. Ce serait illogique et illégitime !
Un deuxième élément me paraît important : la spéculation après vingt-cinq ans. Mon Dieu ! Pensez-vous, Monsieur Clerc, que les gens spéculent au bout de tant de temps ! Seul votre groupe peut exprimer une telle affirmation !
Vous parlez également de l'iniquité des limites entre les détenteurs d'un bien immobilier : vingt-quatre et vingt-cinq ans. Eh bien, c'est comme cela ! Toute loi fiscale comporte une limite, un plancher, un plafond, un délai ou autre, et on se trouve en dessous ou au-dessus. Si on va par là on pourrait remettre en cause bien des lois, ce qui serait tout à fait inadéquat.
Le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui, après un parcours tortueux, est difficile et technique. Son aspect politique l'a compliqué encore un peu. Le compromis auquel nous sommes arrivés est satisfaisant. Je vous recommande donc de ne pas accepter les différents amendements qui vont vous être proposés.
M. Jean Spielmann (AdG). En parlant de spéculation il convient de garder à l'esprit qu'il s'agit de problèmes complexes et qu'il ne suffit pas de légiférer en la matière pour les résoudre.
Le renchérissement du sol tient à des paramètres complexes qui échappent au droit, pour la plupart. La législation peut ralentir la montée du prix du terrain, mais elle ne peut pas l'empêcher. On peut agir donc sur la prise de bénéfices, on peut dissuader les activités spéculatives, mais, en définitive, le problème est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Plus personne aujourd'hui ne peut plus soutenir la spéculation foncière. Même dans les milieux proches du parti libéral - je pense au juriste Jean-François Auber - on part du principe «qu'il serait bon de combattre l'augmentation de la valeur du sol, ne serait-ce que pour freiner la spéculation, car nul ne peut tenir pour satisfaisant l'état d'une société dont certains membres s'engraissent de l'industrie des autres.». Il est difficile d'être plus clair. Il est donc nécessaire de se doter d'un certain nombre de moyens pour éviter cela.
La spéculation s'est beaucoup développée dans notre canton et a posé de gros problèmes aux locataires, mais aussi à l'activité immobilière, aux artisans, à ceux qui voulaient développer des activités industrielles ou tertiaires et qui sont aux prises avec des valeurs locatives résultant d'activités spéculatives. En définitive, elle pénalise toute notre société.
L'initiative 21, curieusement relatée dans ce deuxième rapport, était chargée de freiner la spéculation foncière et, dans le cas particulier, on parle de loi sur les bénéfices immobiliers, ce qui n'est pas la même chose. L'initiative avait quatre objectifs :
- La fiscalité, qui peut être utilisée pour dissuader la spéculation et pour effectuer des prélèvements sur la plus-value sur les bénéfices immobiliers.
- L'aménagement du territoire. La loi fédérale permet un certain nombre de dispositions pour effectuer des prélèvements en cas de plus-value due à des changements de zone ou des changements d'affectation. D'ailleurs, la loi fédérale demande aux différents cantons de légiférer en la matière et de mettre en place les dispositions que nous proposions dans notre initiative. Certains cantons l'ont déjà fait. Les recours des milieux immobiliers ont d'ailleurs été sanctionnés par le Tribunal fédéral qui a pris clairement position en faveur des dispositions prévues par la loi fédérale d'aménagement du territoire qui permettent de prélever ces plus-values.
- Le régime du crédit bancaire et l'acquisition de terrain. Des dispositions doivent également être prises sur ces points. Je ne veux pas revenir là-dessus.
- L'acquisition de terrain par les collectivités publiques.
L'initiative dont je vous parle a été déposée tout au début de l'année 1988. Le délai pour que le Grand Conseil prenne une décision est échu le 8 février 1989 et, aujourd'hui, on continue à nous «promener» avec des propositions qui n'ont rien à voir avec le contenu de l'initiative sur ces différents points. On en discute dans certaines commissions, mais, concrètement, aucune décision n'a encore été prise, alors que ce Grand Conseil avait voté son entrée en matière pour trouver des solutions rapides. Visiblement, c'est un acte de déni de justice et nous saisirons le Tribunal fédéral ! Nous avons dit, à plusieurs reprises et même cinq ans après le dépôt de cette initiative, que nous étions prêts à accepter d'attendre pour autant que les choses se concrétisent. Il faut bien constater aujourd'hui que c'est loin d'être le cas !
Le deuxième point important : je veux parler du contexte politique. Si on regarde rétrospectivement ce qui s'est passé dans ce parlement et comment une véritable politique du logement a été mise sur pied - je pense à la création du Rassemblement pour une politique du logement - on constate que le parti chrétien-social participait activement à cette politique du logement si importante pour les familles. Ce parti est devenu le parti démocrate-chrétien, mais il est, surtout et paradoxalement, devenu le parti qui défend le plus les milieux immobiliers dans ce parlement. Chaque fois que des projets doivent être défendus et chaque fois que des spéculateurs se trouvent dans une position inconfortable, il se trouve un rapporteur du parti démocrate-chrétien pour défendre ce qui n'est pas défendable ! C'est un important changement de politique ! (M. Maitre interpelle M. Spielmann.) Monsieur Maitre, puisque vous intervenez, permettez-moi de vous dire ce que j'ai sur le coeur ! Ce sont les deux représentants démocrates-chrétiens qui se montrent les plus farouches défenseurs des milieux immobiliers et qui proposent, au niveau national, la suppression de tout contrôle des loyers, la suppression du bail et la libéralisation dans le domaine du logement.
C'est un paradoxe politique que je tenais à souligner. Il explique les difficultés auxquelles nous sommes confrontés dans le domaine du logement et il explique également la duplicité de votre discours sur la défense de la famille et des intérêts des plus démunis. Votre démarche politique vire nettement à droite en faveur de l'immobilier ! Je pourrais multiplier les exemples, Monsieur Maitre. Ne m'obligez pas à continuer !
Il faut aujourd'hui faire un pas en direction des propositions faites dans notre rapport de minorité. Je rappelle simplement que les propositions contenues dans la loi sont très nettement inférieures à ce qui se fait dans de nombreux cantons de ce pays. Pour des prises de bénéfices relativement faibles : 10 000 F, nous sommes un peu plus chers que d'autres, mais ensuite nous sommes taxés moitié moins que les autres cantons. Et surtout, Monsieur Brunschwig, il y a abandon total de toute forme de perception d'impôt sur la plus-value immobilière après une durée de vingt-cinq ans, ce qui ne se fait nulle part ailleurs. Expliquez-moi pourquoi on ne payerait pas d'impôts sur un bénéfice immobilier réalisé, même après vingt-cinq années de possession d'un bien ?
Aucun canton ne va aussi loin; tous maintiennent un petit seuil d'imposition. C'est la proposition que je ferai à titre subsidiaire si vous refusez les propositions contenues dans notre rapport de minorité !
M. Daniel Ducommun (R). Notre groupe soutient et accepte ce projet de loi. Conformément au rapport de M. Montessuit, nous le souhaitons sans amendement. Comme le disait M. Brunschwig, nous accouchons d'un projet après seize séances de travail. Alors, je vous en prie, arrêtons-nous là !
Certains d'entre nous regrettent toutefois que l'important travail fait par la précédente commission fiscale - excellemment rapportée par notre collègue Françoise Saudan - ait été vain et n'ait pas reçu le soutien du Conseil d'Etat, lequel l'avait pourtant déposé. Ce rapport faisait apparaître des éléments intéressants, tels que la double échelle, faisant référence à la capacité contributive, ainsi que la distinction entre un immeuble acquis à titre de placement et un logement habité par son propriétaire.
La nouvelle mouture présentée ce soir est considérablement simplifiée. Réflexion faite, elle correspond mieux au but fixé, à savoir la volonté de lutter contre la spéculation par une imposition plus forte des gains réalisés à court terme. En outre, elle correspond à l'injonction contenue dans la loi fédérale sur l'harmonisation qui stipule que les cantons doivent veiller à ce que les bénéfices réalisés à court terme soient plus lourdement taxés. L'augmentation du taux, pour les deux premières années, de 32 à 50% correspond aux nouvelles exigences. A contrario, taxer l'aliénateur après une propriété supérieure à vingt-cinq ans ne poursuit pas le même but et ne peut que pénaliser les propriétaires ayant fait un investissement immobilier pour assurer leur retraite, ce qui n'est pas satisfaisant.
Voilà quelques-uns des arguments qui motivent l'acceptation du rapport de majorité.
M. Michel Halpérin (L). Un mot seulement pour mieux renseigner M. Spielmann qui pense que la suppression de l'impôt après une certaine durée de possession n'existe nulle part en Suisse. Pour s'en tenir aux cantons romands, celui du Valais, par exemple, connaît exactement la même disposition, de sorte que nous sommes en bonne compagnie, mon cher collègue !
M. Jean-Luc Ducret (PDC). A entendre M. Spielmann, je comprends que ses lectures favorites ne sont pas «Les encycliques du pape» ! (Rires.) S'il prenait le temps de les lire, il constaterait que la spéculation est un péché...
M. Jean Spielmann. Vous allez souvent vous confesser, vous ? (Rires.)
M. Jean-Luc Ducret. Certes, c'est un péché véniel, mais vous spéculez sur la disparition du parti démocrate-chrétien, Monsieur Spielmann ! Eh bien, vous pouvez attendre encore longtemps ! Nous connaissons parfaitement le problème de la spéculation, à telle enseigne que, lors du premier débat, nous nous sommes élevés - autant que vous du reste - contre la spéculation malsaine. Nous avons voulu marquer notre désapprobation à l'égard de ces opérations qui ont fleuri dans les années 85 à 89.
L'adage «L'impôt tue l'impôt» est véridique. En modifiant nos taux d'imposition vers le haut, le danger est grand de favoriser une nouvelle fois une évasion fiscale, voire une fraude fiscale. Restons donc raisonnables; c'est ce que nous avons voulu être en fixant les taux d'imposition.
Je suis étonné de votre proposition d'amendement, Madame Sayegh. Je vous ai suivie avec attention, lorsque vous avez parlé des liquidations de sociétés immobilières. Vous avez dit que la liquidation d'une société immobilière, au sens du droit fiscal, était une origine de propriété. Vous refusiez donc le principe de la prépossession qui est, comme je l'avais dit dans mon rapport, une fiscalité équitable qui tient compte de la réalité économique. Vous avez combattu cette réalité, puisque vous n'avez pas considéré la propriété de l'actionnaire au travers d'une société immobilière comme faisant partie de la possession. Et maintenant, vous voulez réintroduire le principe de la prépossession, s'agissant de l'impôt spécial à la suite d'une succession. Il s'agit manifestement d'une contradiction.
Sans vouloir reprendre le débat qui a été fait il y a plusieurs mois, il s'agit d'une loi simple qui reprend, pour l'essentiel, les principes existants. Elle est efficace, compréhensible pour un propriétaire moyen et, surtout, praticable dans ce sens que n'importe quel propriétaire sera à même de calculer son impôt à l'occasion de la vente de sa propriété. Je vous demande donc d'accepter ce projet de loi et de refuser les amendements qui vous seront proposés.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. J'aimerais répondre à quelques-uns des arguments qui ont été avancés.
Comment pouvez-vous, Monsieur Brunschwig, dire qu'après vingt-cinq ans il n'y a plus spéculation ? Cela supposerait qu'après ce délai le bénéfice réalisé par le revendeur soit égal à la compensation du renchérissement ou de la perte du pouvoir d'achat. Or, vous savez bien que ce phénomène ne se passe pas comme cela.
D'autre part, je m'étonne que vous avanciez cet argument, puisque vous avez refusé le mode de perception qui était proposé dans le rapport précédent, lequel prévoyait justement une déduction de l'impôt en fonction de la durée de possession. Non seulement vous avez supprimé cette possibilité de réduction de l'impôt en fonction de la durée de possession, mais vous avez supprimé tout impôt après vingt-cinq ans ! C'est étonnant, car l'Association genevoise des propriétaires pour la protection des villas, qui avait été auditionnée par la commission, était prête à admettre une imposition jusqu'à trente ans. Mais vous, vous avez trouvé que ces propriétaires de villa exagéraient et qu'il ne fallait les imposer que jusqu'à la vingt-quatrième année ! (M. Brunschwig fait non de la tête.) C'est dans le rapport, Monsieur Brunschwig !
Il y a des cantons qui n'imposent plus les bénéfices après vingt-cinq ans, mais il n'y en a que deux sur vingt-six. Monsieur Halpérin, vous oubliez de dire à combien sont imposées les premières années de possession ! Eh bien, je vais vous le dire, moi ! C'est 40% en Valais jusqu'à vingt ans, ce qui est bien différent de nos taux !
L'argument selon lequel il faut supprimer tout impôt pour éviter la fraude fiscale me laisse rêveur !
M. Michel Balestra. Très bonne idée ! Bravo ! (Applaudissements de la droite.)
M. Jean Montessuit (PDC), rapporteur. M. Spielmann n'arrive plus tellement à vendre sa marchandise, c'est pour cela qu'il développe toujours des théories sans rapport avec les projets qui nous occupent ! Je ne peux pas accepter, Monsieur Spielmann, que vous me traitiez de suppôt de la Chambre genevoise immobilière, pour la simple et bonne raison - que j'ai déjà donnée - que la proposition que vous faites favorise, précisément, les professionnels de l'immobilier ! Alors vous, Monsieur Spielmann, vous êtes le «porteur d'eau» de la Chambre genevoise immobilière ! (Des bravos fusent.)
Cela dit, les taux que vous proposez sont carrément confiscatoires. Prendre 70% du bénéfice est délirant, je ne sais pas si un tel taux résisterait à une attaque sur le plan légal !
Avant de terminer, je propose également un amendement à apporter à l'article 86 A, mais c'est un amendement purement technique que je développerai en temps opportun.
Le président. C'est exactement ce qu'on va faire, Monsieur le député !
M. Jean Spielmann (AdG). Je reviens sur les propos de M. Montessuit. J'ai effectivement déposé un projet de loi modifiant la loi sur les gains immobiliers - dans lequel je tenais compte, précisément, du problème lié aux professionnels - et sur l'imposition spéciale sur ces gains. Je suis intervenu pour tenter de combler ces anomalies et vous avez refusé ces projets. Si vous étiez cohérents, vous les auriez admis ! Acceptez au moins d'admettre que j'ai une certaine cohérence et que je maintiens mes positions par rapport à la spéculation, au logement social, aux problèmes liés au patrimoine bâti et aux possibilités offertes par la loi pour pénaliser, comme le dit si bien le professeur François Auber, ceux qui «s'enrichissent de l'industrie des autres».
Vous dites que les taux d'imposition sont confiscatoires et que vous pouvez intervenir au niveau de la loi. Regardez les documents que vous recevez en tant que membres de la commission fiscale; vous pouvez les lire et vous constaterez qu'en page 81 on fait des comparaisons intercantonales sur les gains immobiliers. Ces comparaisons ne sont guère pertinentes, puisqu'elles ne correspondent même pas au projet de loi qui est voté. Vous avez utilisé des anciens tableaux qui étaient déjà modifiés au cours de la discussion de la commission, mais je m'abstiendrai sur ce point. Certains cantons imposent bien davantage que nous le faisons.
Monsieur Halpérin, je parlais de comparaison entre cantons comparables, comme Bâle, Zurich, Berne. La spéculation tient aussi à la densité de la population et à la possibilité d'extension au niveau des constructions. Les cantons d'Argovie et du Valais sont dans une situation différente de celle de canton-ville, tel que Genève ou Bâle, ou d'agglomérations urbaines, comme Zurich ou Berne. Leur législation va dans le sens de ce que nous vous proposons. Les prélèvements sont importants; ils dépassent 60% pour Berne et Zurich, mais je ne vais pas tous les énumérer ici.
Monsieur Montessuit, il y a des gens dans ce pays qui, contrairement à vous, pensent qu'il convient effectivement de combattre la spéculation foncière par tous les moyens. Ils utilisent l'arsenal légal existant pour la combattre.
J'irai plus loin ! Si vous refusez les amendements, tels qu'ils sont présentés, vous n'allez pas aggraver la fiscalité, au contraire, vous allez supprimer toute prise d'impôts sur une bonne partie des bénéfices immobiliers après un certain nombre d'années. Je le répète, seuls deux cantons le font après trente et cinquante ans, Argovie et Valais. Nous ne pouvons pas nous comparer d'autant que leurs taux sont nettement supérieurs à ceux que vous proposez dans la loi pour les premières années de possession. Il y a une totale incohérence et je me demande même si la population serait prête à accepter que ce parlement vote une loi supprimant les impôts sur les bénéfices immobiliers !
Quelles en seraient les conséquences au niveau des recettes fiscales ? Je me tourne vers M. Vodoz qui pourra très certainement nous donner son appréciation. Paradoxalement, on a peu parlé des conséquences d'une telle mesure sur le budget de l'Etat. Je sais bien que nous vivons une période un peu particulière. Les arrêtés «anti-surchauffe» et le blocage des ventes de terrains ont rendu le problème de la spéculation moins aigu. C'est peut-être justement l'occasion de mettre en place des dispositions légales pour nous permettre d'éviter que cela recommence, eu égard à la mentalité de certains dans ce Grand Conseil !
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je voudrais revenir sur la notion de taux confiscatoire.
En effet, il ne suffit pas d'articuler un taux, encore faut-il dire sur quelle période de possession il s'applique. Dans notre proposition, il s'applique sur une période de moins de six mois. Cela veut dire que la personne qui achète un immeuble et qui le revend dans le délai de six mois - ce qui est typiquement une opération de type spéculatif - sera taxée à 70%. On trouve tout à fait normal qu'une personne à qui on arrache le sac à main le retrouve avec l'argent dedans. Ce genre d'action est de l'escroquerie. On dit qu'on va prendre 60%, mais en laissant 40%. Le taux de 60% s'applique entre six mois et moins d'un an et, ensuite, il retombe au niveau des taux évoqués par le rapport de majorité. Les taux pour les possessions de longue durée doivent légitimement être maintenus, compte tenu que la spéculation n'est pas seulement un phénomène de rattrapage du coût de l'inflation, mais qu'elle va bien au-delà dans la majorité des cas.
Monsieur le président, nous demanderons le vote nominal pour notre amendement. (Appuyé.)
M. Jean Montessuit (PDC), rapporteur. MM. Spielmann et Clerc pourraient laisser croire que la nouvelle loi, telle qu'elle est proposée, diminue la fiscalité pour les détenteurs d'un bien pendant une courte durée. Je vous invite - vous m'excuserez, car cela est très technique, mais il faut en faire la démonstration - à vous reporter aux tableaux des pages 38 et 39 qui sont faux - comme l'a dit M. Spielmann - dans la mesure où les taux du nouveau barème sont inférieurs à ceux qui ont été finalement retenus par la commission. Je l'ai du reste signalé dans mon rapport.
Vous constaterez que l'aggravation de la fiscalité est considérable, en tout cas pour les courts délais, puisque ceux qui sont frappés à raison de 45% voient leurs impôts passer de 1,6 million à 2,25 millions, par exemple. Alors, Monsieur Spielmann, je vous en supplie, ne faites pas de fausse démonstration !
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je suis désolé, mais je ne peux pas laisser passer ce type d'affirmation !
Je l'ai dit dans mon introduction tout à l'heure, les exemples donnés sont théoriques, tout comme ceux dont vous venez de nous parler, Monsieur Montessuit ! Ils ne sont pas représentatifs des ventes telles qu'elles ont effectivement été réalisées dans le canton. Vous ne pouvez donc pas extrapoler sur une plus-value fiscale par rapport à ces taux. C'est faux !
M. Jean Spielmann (AdG). Je me vois obligé de répondre à M. Montessuit que non seulement il n'a pas compris mes propos mais encore qu'il les a falsifiés ! Je n'ai jamais dit que nous avions diminué l'imposition pour les courtes durées de possession. C'est le contraire, mais nous allons beaucoup moins loin que ce que font les autres cantons.
Il est logique qu'une telle loi différencie les professionnels des autres, car le but n'est pas que les professionnels acheteurs/revendeurs gardent leur propriété plus longtemps. La vocation de ces professionnels est de revendre le plus rapidement possible, pour faire fonctionner le marché. Si celui qui l'achète veut faire la même chose qu'un professionnel, eh bien, qu'il paye des impôts comme un professionnel ! Vos propositions ne vont pas assez loin; elles sont quasiment inférieures de moitié aux dispositions des autres cantons.
Je répéterai, jusqu'à ce que vous ayez compris ou, tout du moins, jusqu'à ce que vous arrêtiez de comprendre le contraire de ce que je dis... (Immense éclat de rires du groupe libéral.) Monsieur Montessuit, vous avez dit qu'on voulait réduire l'impôt de courte durée. Ce n'est pas vrai, je n'ai pas dit cela ! On l'augmente effectivement, mais pas assez ! Nous, on propose d'aller plus loin. C'est le premier point.
Deuxième point, j'ai dit que vous proposiez, avec cette loi, la suppression de l'impôt sur le bénéfice immobilier pour toute une série d'opérations, ce que je trouve scandaleux. J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous pouvez justifier de supprimer l'impôt sur toutes ces opérations immobilières, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je vais tenter d'être bref, mais je voudrais rappeler que le débat auquel nous assistons me paraît presque naturel en raison, précisément, de la matière.
En effet, ce projet de loi comporte deux aspects bien distincts :
- les aspects techniques, qui ont rencontré très rapidement un large consensus, voire l'unanimité, notamment au niveau de la prise d'impôts sur les opérations et qui ne font pas l'objet de contestation aujourd'hui;
- les aspects politiques, touchant plus particulièrement l'article 84 fixant les taux de prélèvement sur les bénéfices.
On l'a dit et je le rappelle :
1) Cette loi ne touche pas les professionnels de l'immobilier.
2) Cette loi n'a pas pour objectif de condamner toute prise de bénéfices, mais elle a, en revanche, pour but - comme cela a été souligné par l'ensemble des rapporteurs, à l'exception de l'Alliance de gauche - de lutter contre des bénéfices spéculatifs inacceptables, notamment en période de revente dans une durée limitée.
Le projet de loi qui vous est présenté ce soir est l'aboutissement d'une très longue saga. Le département des finances avait imaginé un système très simple, puis on nous a demandé d'élaborer un système à double échelle. Il fallait partir de l'idée qu'un bénéfice devait être traité différemment suivant que, sur un même objet de 600 000 F, par exemple, le bénéfice était de 150 000 F ou de 500 000 F. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes remis au travail, et nous avons présenté à la commission une nouvelle mouture dite «des deux échelles», l'une se référant à la durée de possession, l'autre atténuant les rigueurs de la durée de la possession par la problématique de l'intensité du bénéfice prélevé sur l'opération.
Finalement, nous avons, après le retour en commission, renoncé au système de la double échelle pour revenir au système que nous connaissons actuellement, mais en en modifiant les taux. Jusqu'à ce soir en tout cas, ce projet de loi a recueilli en commission une très large majorité, puisque seuls s'y sont opposés les commissaires de l'Alliance de gauche.
Le débat central de ce soir porte en réalité sur l'article 84, non pas seulement et essentiellement sur la lettre a) où le rapporteur de minorité souhaite porter le taux d'imposition à 70% du bénéfice levé, mais surtout sur la lettre g), qui stipule que le taux est de 0% lorsque la durée de possession a atteint vingt-cinq ans ou plus.
Voyez-vous, je n'ai pas entendu les arguments qui ont finalement motivé cette proposition. Elle est fondée sur le fait qu'on ne tient pas compte de l'inflation en matière de bénéfices immobiliers. Evidemment, il y a eu de nombreuses propositions. Le système valaisan est à mon avis un système pervers, parce qu'en permettant d'adapter le bénéfice à l'inflation on arrive virtuellement à des impositions égales à zéro. D'ailleurs, le canton du Valais est en train d'examiner la possibilité de revoir sa propre loi, compte tenu des effets découlant de l'indexation des prix de vente. C'est en raison de cette absence d'indexation des prix de vente que la commission a considéré, notamment pour les propriétaires d'appartement ou de petite villa pendant vingt-cinq ans et plus, que la prise de bénéfices pouvait être exonérée dans ce cas, ce qui compensait, en partie, l'érosion de la monnaie pendant la durée de possession.
Voilà ce qui, en définitive, a motivé les commissaires de la commission fiscale dans leur majorité à adopter cette proposition. C'est la raison pour laquelle, après beaucoup de discussions, il a été considéré qu'après un laps de temps de vingt-cinq années de possession on pouvait tenir compte de cet élément au niveau de la prise de bénéfices.
Cette loi, sur le plan politique, devait provoquer le débat que nous connaissons. Le département des finances - et ce sera ma conclusion, même s'il est vrai que les travaux de commission se sont étalés sur deux législatures et que bon nombre de documents ont été fournis aux commissaires de la précédente législature - a présenté cent dix-sept cas, tous réels. Ils ont été présentés afin de dénombrer les ventes réalisées ces dernières années, selon les délais différents et de mesurer leur impact. Nous avons constaté qu'en dehors des transactions effectuées par les professionnels, il y avait fort peu de ventes dans les premières tranches, soit d'un à deux ans. C'est pour cela que la commission a longuement hésité en imaginant une tranche supplémentaire comprise dans ce délai et, d'autre part, que les bénéfices réalisés après vingt-cinq ans étaient très limités. Nos propositions ont donc été faites sur la base des renseignements fournis par l'administration fiscale, sur des cas concrets, et cette dernière n'a pas été avare pour répondre aux questions posées par les députés.
Je souhaite ardemment que ce projet de loi soit accepté en débat d'entrée en matière. J'interviendrai sur les différentes propositions d'amendement dans le cadre du deuxième débat.
Mis aux voix, le projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1 (souligné)
Art. 81 (nouvelle teneur), al. 1, lettre b)
Mme Christine Sayegh (S). L'amendement que je propose ajoute à l'article 81, alinéa 1, lettre b) :
«d'avancement d'hoirie, de succession, de partage successoral ou de donation.».
Cet amendement, ainsi que les deux suivants qui résultent du premier, à savoir imposer, mais proroger la perception d'impôt en matière de succession, est conforme au droit fédéral dans le cadre de l'harmonisation fiscale, lequel sera applicable dans notre canton dès le 1er janvier 2001.
Il n'y a pas - comme l'a dit M. Ducret - de confusion entre les SI et les successions. La prépossession n'est pas dans la même situation. En effet, il s'agit de traiter sur pied d'égalité le bénéfice dans le cadre d'une vente suite à une donation qui est taxable, aux termes de l'article 81, indice b, et la vente suite à une succession. Cette solution procède de l'équité. En effet, la distinction entre ces deux situations est infondée. Il n'y a aucune raison d'exonérer fiscalement le bénéfice immobilier en cas de succession. Ainsi le propriétaire, qui vend un bien immobilier reçu par donation ou par succession, est censé avoir acquis l'immeuble à la date et au prix auquel ce dernier est entré dans le patrimoine du donateur ou de la personne décédée. La durée de possession, alors prise en considération pour le calcul de l'impôt, sera donc étendue à celle du donateur ou du défunt, ce qui permettra un allégement certain du montant imposé.
En cette période où la masse fiscale diminue, on ne peut négliger le besoin impératif de recettes nouvelles, et il serait déraisonnable de renoncer à celles-ci pendant quelque cinq ans et demi encore. C'est pourquoi je vous invite à soutenir cet amendement.
M. Jean-Luc Ducret (PDC). Pour les raisons évoquées tout à l'heure, je vous demande de ne pas entrer en matière sur cette proposition d'amendement.
En effet, il ne s'agit pas simplement de discuter d'un taux, mais, selon Mme Sayegh, d'introduire un nouvel impôt qui serait prélevé à l'occasion d'une vente suivant les vingt-sept mois après un décès. C'est un nouvel impôt, qui ne correspond pas du tout à la volonté de la commission fiscale.
S'agissant notamment de la liquidation des sociétés immobilières, Madame Sayegh, vous ne m'avez pas répondu ! Vous avez combattu le principe de la prépossession et vous voulez la réintroduire dans le cadre de l'imposition sur les bénéfices immobiliers; c'est une contradiction que je ne comprends pas !
Mme Christine Sayegh (S). Il ne s'agit pas d'un impôt nouveau, mais d'un impôt prévu par le droit fédéral, qui sera de toute façon imposé à notre canton le 1er janvier 2001. Je ne suis donc pas en train d'inventer un nouvel impôt !
Ensuite, il me semble que les sociétés immobilières font justement des économies d'impôts substantielles pendant toute leur durée, ce qui nous autorise à nous opposer au principe de la prépossession. Ce n'est pas le cas pour les successions. La donation est traitée de la même manière et je ne vois pas pourquoi on ferait une différence entre la donation et la succession en cas de revente, ce que le Parlement fédéral a bien compris, puisqu'il a fait un projet de loi qui entrera en vigueur dans cinq ans et demi.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. L'exonération prévue à l'article 81, alinéa 3, lettre c), votée par la commission fiscale de votre parlement, confirme le système actuel.
J'ai eu l'occasion de dire en commission - et je le répète ici - que la LHID - comme l'a rapporté Mme Sayegh tout à l'heure - obligera les cantons à adapter leur législation sur ce point, dès le 1er janvier 2001. Or, je vous rappelle que le 13 avril, après avoir effectué avec le département et l'administration fiscale un énorme travail, nous avons déposé trois projets de lois visant un premier train d'aménagement de notre loi fiscale cantonale à la loi fédérale d'harmonisation fiscale et à la nouvelle loi fédérale sur l'impôt fédéral direct. Ce train de lois, qui est en cours d'examen par la commission fiscale, traite précisément des personnes morales, de l'impôt à la source et des dispositions relatives à l'encaissement de l'impôt. Le dernier train de lois d'harmonisation, puisque cela se fait par étape, comme dans tous les cantons - le canton de Vaud a adopté la semaine dernière les nouvelles dispositions en matière de personnes morales - touchera les personnes physiques.
Ce «paquet», selon les travaux en cours, devrait intervenir devant le Grand Conseil dans le courant de l'année 1997, pour être adopté et appliqué au plus tard le 1er janvier de l'an 2001. Dans le cadre de ce dernier «paquet» sur les personnes physiques, nous aurons, comme la loi fédérale nous y contraint, à adapter nos dispositions pour cette date. C'est pourquoi j'ai dit en commission qu'il y avait deux possibilités : harmoniser immédiatement ou, par souci d'égalité par rapport à ceux qui verront cette loi changer relativement drastiquement, la présenter lors du dernier train de modifications de lois d'harmonisation fiscale, globalement avec les personnes physiques. De toute manière, votre parlement, au plus tard d'ici quatre ans, devra voter une disposition fixant la prorogation de l'impôt au niveau de cas de succession et de partage successoral, comme le propose Mme Sayegh, et non pas au niveau de l'exonération, comme c'est le cas aujourd'hui.
Pour être tout à fait clair, car c'est un domaine complexe, Mme Sayegh propose qu'on ajoute à l'alinéa 1, lettre b) :
«d'avancement d'hoirie, de succession, de partage successoral ou de donation.».
La loi sera ainsi conforme à la perspective de l'an 2001 et ce sera, par conséquent, la suppression de l'alinéa 3, lettre c), avec les corrections qui s'imposeront à l'article 82.
L'autre suggestion de la majorité vous propose de voter le texte tel quel et de revenir avec le dernier train de modifications, comme je viens de vous l'expliquer.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de Mme Sayegh qui consiste à remplacer le libellé de l'article b) actuel, en bas de la page 9, par le libellé suivant :
«d'avancement d'hoirie, de succession, de partage successoral ou de donation.».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Art. 81 (nouvelle teneur), al. 3, lettre c)
Le président. Nous sommes en présence d'un second amendement de Mme Sayegh portant sur l'alinéa 3, lettre c).
Mme Christine Sayegh (S). Les deux amendements suivants étant intimement liés au premier, je renonce à les proposer.
Mis aux voix, l'article 81 (nouvelle teneur) est adopté.
Art. 82 (nouvelle teneur)
Le président. Nous sommes en présence, à l'alinéa 4, d'un nouvel amendement de Mme Christine Sayegh, qui n'est pas forcément lié au premier. Le maintenez-vous, Madame ?
Mme Christine Sayegh (S). Non, car il est lié au premier !
Mis aux voix, l'article 82 (nouvelle teneur) est adopté, de même que l'article 83 (nouvelle teneur).
Art. 84 (nouvelle teneur) de l'article 1 (souligné)
Le président. Nous sommes en présence de quatre amendements.
Le plus éloigné de la version du rapporteur de majorité est celui proposé par le rapporteur de minorité, que vous trouverez en page 43 de votre rapport. Il consiste à changer entièrement l'article 84 nouvelle teneur.
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je demande le vote nominal sur notre proposition. (Appuyé.)
Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent l'amendement proposé dans le rapport de minorité répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Cet amendement est rejeté par 50 non contre 33 oui et 9 abstentions.
Ont voté non (50) :
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Claude Basset (L)
Roger Beer (R)
Dominique Belli (R)
Janine Berberat (L)
Anne Briol (E)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Fabienne Bugnon (E)
Anne Chevalley (L)
Hervé Dessimoz (R)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Jean-Luc Ducret (DC)
Michel Ducret (R)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Henri Gougler (L)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Claude Howald (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Pierre Kunz (R)
Claude Lacour (L)
Bernard Lescaze (R)
Sylvia Leuenberger (E)
Armand Lombard (L)
Olivier Lorenzini (DC)
Pierre Marti (DC)
Michèle Mascherpa (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean Montessuit (DC)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean Opériol (DC)
Barbara Polla (L)
Laurent Rebeaud (E)
David Revaclier (R)
Martine Roset (DC)
Micheline Spoerri (L)
Jean-Philippe de Tolédo (R)
Pierre-François Unger (DC)
Olivier Vaucher (L)
Nicolas Von der Weid (L)
Michèle Wavre (R)
Ont voté oui (33) :
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Jacques Boesch (AG)
Micheline Calmy-Rey (S)
Claire Chalut (AG)
Pierre-Alain Champod (S)
Bernard Clerc (AG)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Erica Deuber-Pauli (AG)
Marlène Dupraz (AG)
Laurette Dupuis (AG)
René Ecuyer (AG)
Christian Ferrazino (AG)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
Sylvie Hottelier (AG)
Liliane Johner (AG)
Jean-Pierre Lyon (AG)
Liliane Maury Pasquier (S)
Pierre Meyll (AG)
Laurent Moutinot (S)
Chaïm Nissim (E)
Danielle Oppliger (AG)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Jean-Pierre Rigotti (AG)
Maria Roth-Bernasconi (S)
Françoise Saudan (R)
Jean Spielmann (AG)
Evelyne Strubin (AG)
Pierre Vanek (AG)
Se sont abstenus (9) :
Liliane Charrière Urben (S)
Sylvie Châtelain (S)
Jean-Claude Genecand (DC)
René Longet (S)
Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)
Christine Sayegh (S)
Philippe Schaller (DC)
Max Schneider (E)
Claire Torracinta-Pache (S)
Etaient excusés à la séance (3) :
Bernard Annen (L)
Claude Blanc (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Etaient absents au moment du vote (4) :
Jean-Claude Dessuet (L)
Catherine Fatio (L)
Elisabeth Häusermann (R)
Andreas Saurer (E)
Présidence:
M. Hervé Burdet, président.
Le président. Nous passons à l'amendement proposé par M. Spielmann, qui porte sur les lettres f) et g) de l'article 84 (nouvelle teneur). Il consiste à libeller la lettre f) de la façon suivante :
«10% lorsqu'il l'a été pendant dix ans ou plus.»
et à biffer la lettre g).
M. Jean Spielmann (AdG). Dans la législation actuelle, il est prévu que les bénéfices réalisés après une certaine durée soient imposés au taux plancher de l'imposition, soit 10%. La loi d'aujourd'hui augmente l'imposition pour une très courte durée - je précise pour des opérations spéculatives - ce qui me semble juste. Par contre, il n'est pas normal que, d'un coup et d'un seul, ce parlement supprime toute perception sur des bénéfices réalisés lors de ventes.
Vous pouvez difficilement argumenter en faveur de cette proposition de suppression totale de toute forme de perception pour une durée de possession de dix ans et plus. Je rappelle, pour comparer des choses comparables, que nos voisins - je pense à la ville de Lausanne - appliquent une perception de 18% sans fixer de limite à la durée de possession. Il y aurait donc une différence considérable, puisque, quelle que soit la durée de possession, on payerait un impôt de 18% à Lausanne et rien à Genève !
Je propose donc qu'on garde le taux plancher de 10% qui est actuellement dans la loi pour toutes les opérations avec prise de bénéfices.
M. Christian Grobet (AdG). L'adoption de cette loi après les propos tenus par M. Vodoz me laisse extrêmement perplexe.
M. le conseiller d'Etat a relevé que la loi - nous le savions - ne s'applique pas aux gains réalisés par les professionnels. Or, en matière de spéculation immobilière - vous êtes certainement mieux renseigné que nous, Monsieur Vodoz - la plupart des affaires spéculatives importantes ont été réalisées par des professionnels. A cet égard, il serait intéressant de savoir quelles sont les mesures que le Conseil d'Etat entend prendre pour frapper plus fortement ces professionnels de la spéculation.
Une voix. La bourgeoisie !
M. Christian Grobet. Cette question est importante, car ces personnes ont causé un tort considérable au marché immobilier genevois.
La loi va donc s'appliquer aux propriétaires qui n'exercent pas une activité professionnelle dans le domaine immobilier et, par voie de conséquence et forcément, sur des objets dont la durée de possession est beaucoup plus longue. Nous ne sommes pas étonnés des propos de M. Vodoz qui affirme que peu de cas se trouveraient concernés par cette loi, s'agissant des premières années de possession. Je ne sais pas combien il y a de cas de possession de plus de vingt-cinq ans, mais j'ai tout de même le sentiment qu'ils sont relativement nombreux.
La moindre des choses serait donc de maintenir le statu quo actuel qui, finalement, est un taux modeste : 10% à partir de dix ans de possession. Comme Jean Spielmann l'a rappelé, le canton de Vaud applique un taux de 18%. Il est vrai que ce taux s'applique sur la différence entre la valeur fiscale et le prix de vente. Cela m'amène également à dire que la valeur fiscale des biens immobiliers - et c'est une faveur accordée aux propriétaires, notamment à ceux qui vivent dans leur villa ou leur logement - est notoirement en dessous de la valeur vénale. C'est dire que les propriétaires fonciers bénéficient déjà aujourd'hui d'un privilège fiscal non négligeable. Il serait tout de même paradoxal qu'au moment de la vente d'un bien immobilier ces propriétaires bénéficient encore d'un avantage supplémentaire ! En effet, cette loi va accorder un cadeau fiscal supplémentaire à un certain nombre de propriétaires !
M. Ducret, je crois, a dit qu'il ne faudrait pas pénaliser les propriétaires dont le logement constitue la caisse de retraite. Ce ne sont pas ces propriétaires qui vendent, Monsieur Ducret, et les cas de ventes de logements ne sont pas les seuls concernés ! Les biens immobiliers de façon générale et les immeubles sont également concernés. C'est d'autant plus important que l'on vient de voter un projet de loi dont l'objectif est d'encourager la liquidation des sociétés immobilières. Les immeubles vont donc devenir des propriétés en nom. Par conséquent, on ne peut pas invoquer comme argument qu'un certain nombre de propriétaires sont des propriétaires de villas et de logements, pour ne pas maintenir une imposition fiscale sur les autres types d'immeubles.
En définitive, on peut - comme M. Clerc l'a fait - se demander si on va améliorer véritablement le rendement fiscal de cette loi sur les gains immobiliers ou si on ne va pas au contraire le diminuer. Le rendement restera identique à partir de dix ans de possession, il sera meilleur pendant les dix premières années, quoiqu'encore à un taux inférieur à celui d'autres cantons, et il sera nul à partir de la vingt-cinquième année. En cette période de difficultés financières de l'Etat, il est tout de même assez paradoxal de constater que l'on cherche à réduire, voire à supprimer l'impôt sur des bénéfices certainement importants. (S'adressant à M. Montessuit qui sourit.) Vous souriez, Monsieur Montessuit, mais nous savons que la plus-value immobilière dépasse de loin, et de très loin, l'indexation de la valeur d'achat à l'indice du coût de la vie. Je doute que cette plus-value diminue à l'avenir. Elle a été considérable ces dernières années. Par voie de conséquence, si on ne maintient pas le statu quo, Monsieur Ducret, je pense que nous retournerons au mauvais exemple du Valais que vous avez cité tout à l'heure et qui n'est vraiment pas un exemple à suivre !
M. Nicolas Brunschwig (L). Il me semble que l'on n'a pas assez tenu compte d'un élément dans les propos tenus par ces messieurs de l'Alliance de gauche !
En effet, dans le projet de loi qui fait l'objet de notre débat, la valeur d'acquisition n'est pas indexée. Une autre formule a été envisagée et, dans ce cas, les arguments que vous avancez auraient pu être pris en considération. Dans le cas présent, l'effet de l'inflation se répercute exclusivement par le biais de ces taux qui sont différenciés en fonction des durées de possession du bien immobilier concerné. Dès lors, il est apparu légitime à la commission de différencier les personnes qui gardent leur bien immobilier pendant dix, douze ou quinze ans, et les personnes qui les gardent plus de vingt-cinq ans. Pour ces raisons techniques essentielles et sans entrer dans des considérations politiques, la formule proposée aujourd'hui est une bonne formule.
Nous vous demandons donc de rejeter cet amendement.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Suite aux dernière interventions, j'attire votre attention - comme je l'ai fait en commission et comme je l'ai fait lors du dépôt de ce projet de loi - sur le fait que les professionnels sont imposés en tout temps dans leur déclaration annuelle sur le montant du bénéfice et que la durée de possession ne joue aucun rôle pour eux.
Grosso modo, l'impôt cantonal et communal à Genève, suivant l'intensité, se monte de 0 à 50%, sur le bénéfice. C'est pourquoi, pendant la période de forte spéculation immobilière - en ce qui me concerne je n'étais pas encore au Conseil d'Etat - le gouvernement a encaissé des montants considérables résultant de cette plus-value. L'IFD oscille entre 0 et 11,5%. C'est la raison pour laquelle il faut à tout prix distinguer les deux choses. C'est aussi pour cela que je vous ai indiqué, il y a quelques mois, dans le cadre de la présentation d'un autre projet de loi, qu'il fallait absolument que nous sérions mieux les activités professionnelles et de patrimoine détenues à titre professionnel et du patrimoine immobilier détenu au titre de particulier.
En effet, il faut savoir qu'un certain nombre de personnes s'intitulaient «agents immobilier» pendant un certain temps, ou étaient taxées comme tels après deux ou trois opérations, et nous annonçaient ensuite que leur bien faisait partie de leur patrimoine privé. J'ai donc pris des mesures correctrices. C'est pour cela que, d'une manière générale, les professionnels sont imposés à l'année sur leur déclaration. Si nous n'avions pas déposé un projet de loi visant à imposer immédiatement les bénéfices des professionnels, on se serait retrouvé, dans une phase de reprise ou de spéculation éventuelle future, avec un certain nombre de contribuables réalisant des bénéfices immobiliers importants et quittant le canton, soit pour un autre, soit pour l'étranger. Il y avait alors une fin d'assujettissement et nous ne pouvions plus prélever d'impôts. J'ai donc déposé, au nom du Conseil d'Etat, un projet de loi visant à corriger cette anomalie et ce dernier a été voté par votre parlement. Je voulais ainsi apporter quelques éclaircissements sur le distinguo à faire entre les professionnels et les autres.
Le président. Je mets aux voix le double amendement de M. Spielmann dont je vous rappelle la teneur portant sur les lettres f) et g). Il consiste à «relibeller» la lettre f) de la façon suivante :
«10% lorsqu'il l'a été pendant dix ans ou plus.»
et à biffer la lettre g).
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Nous sommes en présence d'un autre amendement de M. Spielmann qui porte sur la lettre g) de l'article 84 (nouvelle teneur). Voulez-vous le présenter, Monsieur le député ?
M. Jean Spielmann (AdG). Il s'agit d'une proposition qui vise à éviter la suppression complète de l'imposition. Cela permettrait de conserver le taux plancher le plus faible des taux appliqués, soit 5% après une durée de possession de vingt-cinq ans. Cela me semble vraiment dérisoire ! Je vous préviens que si vous refusez un minimum d'imposition, la loi deviendrait inacceptable et nous prendrions les mesures nécessaires pour nous y opposer.
Le président. Je mets donc aux voix l'amendement de M. Spielmann, qui porte sur la lettre g), ainsi libellé :
«5% lorsqu'il l'a été pendant vingt-cinq ans et plus.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 84 (nouvelle teneur) est adopté, de même que l'article 85 (nouvelle teneur) et l'article 86 (nouvelle teneur).
Art. 86 A (nouveau), al. 1
Le président. Nous avons une proposition d'amendement de M. Jean Montessuit.
M. Jean Montessuit (PDC), rapporteur. En fait, cette proposition d'amendement n'émane pas de moi, mais de l'administration fiscale. Le lendemain du jour où j'ai déposé mon rapport, j'ai reçu un petit mot de M. Sansonetti me disant qu'une dernière lecture du texte du projet de loi avait laissé apparaître qu'il serait plus judicieux de mettre : «...la partie du bénéfice résultant de l'opération...» plutôt que : «...la partie du prix correspondant...». Cela ne change absolument rien au sens de l'article, mais la rédaction est meilleure ainsi.
Je vous recommande donc d'accepter cet amendement.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Montessuit qui consiste à remplacer :
«...la partie du prix correspondant...» par «...la partie du bénéfice résultant de l'opération...».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 86 A (nouveau) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 à 4 (soulignés).
Le projet est adopté en deuxième débat.
Troisième débat
M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. (Accueilli sans enthousiasme.) Eh oui, encore !
Nous avons proposé toute une série d'amendements qui allaient d'une solution qui nous paraissait normale et équitable à un amendement qui visait simplement à prolonger la fiscalité actuelle sur les bénéfices spéculatifs immobiliers. Nous avons même proposé un taux d'imposition de 5% pour la période de vingt-cinq ans et plus. Vous les avez tous refusés. Vous faites des cadeaux à ceux qui spéculent à Genève dans l'immobilier... (Manifestation de réprobation.) Vous acceptez de voter les yeux fermés sans mesurer les conséquences fiscales, alors que vous vous plaignez à longueur d'année des comptes de l'Etat qui ne sont pas équilibrés !
Dans ces conditions, je vous annonce que l'Alliance de gauche ne votera pas cette loi. (La droite acclame presque cette déclaration.)
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant la loi générale sur les contributions publiques
(Impôt sur les bénéfices et gains immobiliers)
(D 3 1)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:
Imputation de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers
Art. 33 A (nouveau)
Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le revenu, l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers perçu en application des articles 80 à 87 est imputé sur l'impôt annuel entier ou remboursé pour la part qui en excède le montant.
Imputation de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers
Art. 74 (nouveau)
Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le bénéfice net ou le revenu net, l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers perçu en application des articles 80 à 87 est imputé sur l'impôt annuel entier ou remboursé pour la part qui en excède le montant.
PREMIÈRE PARTIE
TITRE II
IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES
ET GAINS IMMOBILIERS
(intitulé nouvelle teneur)
Objet
Art. 80 (nouvelle teneur)
1 L'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers a pour objet le bénéfice net provenant de l'aliénation d'immeubles ou de parts d'immeubles sis dans le canton, ainsi que certains gains que ces immeubles procurent sans aliénation.
2 Sont assimilées à des immeubles les actions ou parts de sociétés immobilières au sens de l'article 68, lettre c.
3 L'impôt est dû par l'aliénateur ou le bénéficiaire du gain même s'il est domicilié hors du canton. Les époux vivant en ménage commun sont considérés comme contribuables distincts. Le conjoint aliénateur ou bénéficiaire du gain est seul responsable du paiement de l'impôt dû.
4 Est considéré comme aliénation tout acte qui confère à un acquéreur la propriété ou la réelle disposition économique d'un immeuble, soit notamment la vente, l'échange, le partage, l'expropriation et l'apport dans une société.
5 Le transfert d'un immeuble ou part d'immeuble de la fortune privée dans la fortune commerciale ou de la fortune commerciale dans la fortune privée est assimilé à une aliénation.
Exemption
Imposition
prorogée
Art. 81 (nouvelle teneur)
1 L'imposition est prorogée en cas d'aliénation en raison:
a)
d'actes juridiques entre époux;
b)
d'avancement d'hoirie ou de donation;
c)
d'échange;
d)
de remembrement effectué en vue d'un remaniement parcellaire, de l'établissement d'un plan de quartier, de rectification de limites ou d'arrondissement d'une aire agricole.
2 Lors d'un partage ou d'un échange, l'impôt est perçu immédiatement sur la soulte reçue pour la part qui représente une plus-value de l'immeuble aliéné.
Exonérations
3 L'impôt n'est pas perçu:
a)
en cas de vente forcée, lorsque les créanciers saisissants, gagistes ou admis définitivement à l'état de collocation ne sont pas entièrement désintéressés;
b)
en cas de revente d'un immeuble que le créancier ou la caution d'une créance hypothécaire avait dû acquérir dans une vente forcée pour se couvrir de sa créance si elle n'est pas entièrement éteinte par le prix de vente;
c)
en cas de succession ou de partage successoral.
Calcul du bénéfice
Art. 82 (nouvelle teneur)
1 Le bénéfice ou gain imposable est constitué par la différence entre la valeur d'aliénation et la valeur d'acquisition.
Valeur d'acquisition
2 La valeur d'acquisition est égale au prix payé pour l'acquisition du bien, augmentée des impenses, ou, à défaut de prix, à sa valeur vénale.
3 Lors de l'aliénation d'un immeuble acquis par un transfert justifiant la prorogation de l'imposition, le prix d'acquisition est celui de la dernière aliénation soumise à l'impôt qui est aussi déterminante pour fixer la durée de possession.
4 Lorsque le bien a été acquis par dévolution pour cause de mort ou à la suite d'une déclaration d'absence, la valeur d'acquisition est égale à la valeur fixée par le département pour la perception des droits de succession ou d'enregistrement, augmentée du montant desdits droits.
5 Lorsque l'acquisition est intervenue plus de dix ans avant l'aliénation, le contribuable peut demander que soit considérée comme valeur d'acquisition la valeur fiscale 5 ans avant l'aliénation s'il s'agit d'un immeuble locatif au sens de l'article 48, lettre a, et la valeur fiscale 10 ans avant l'aliénation majorée de 30% s'il s'agit d'un autre immeuble.
Valeur d'aliénation
6 La valeur d'aliénation est égale au prix de vente diminué des impenses que l'aliénateur a supportées à cette occasion.
7 Le prix de vente comprend l'ensemble des prestations de tout genre auxquelles l'acquéreur s'oblige à l'égard de l'aliénateur.
Impenses
8 Sont considérés comme impense les frais liés à l'acquisition ou à l'aliénation de l'immeuble et les dépenses qui en ont augmenté la valeur.
Autres gains
Art. 83 (nouvelle teneur)
1 Sont également soumises à l'impôt les prestations de tout genre que reçoit, avant ou après l'aliénation, le propriétaire d'un bien ou actif immobilier ou le titulaire d'un droit immobilier réel ou personnel, soit notamment:
a)
le produit de la cession du droit d'acquérir un immeuble, de droit d'emption et de préemption et la substitution dans le bénéfice d'une promesse de vente;
b)
le produit de la constitution, la modification ou la radiation de charges ou, le cas échéant, de droits de superficie, qui, sous la forme de servitudes de droit privé ou de restrictions de la propriété fondées sur le droit public, atteignent de façon essentielle et durable l'exploitation ou la valeur d'aliénation d'un immeuble;
c)
les dédits et peines conventionnels résultant de l'inexécution d'un contrat relatif à l'immeuble;
d)
les indemnités de tout genre, quelle que soit leur appellation, liées à l'aliénation du bien ou actif immobilier ou à une des transactions prévues à cet article.
2 Lorsqu'une de ces prestations est liée à l'aliénation d'un immeuble, elle fait partie de la valeur d'aliénation selon l'article 82; dans les autres cas, elle est soumise à l'impôt au moment où elle est acquise, sous déduction éventuelle des seuls frais s'y rapportant directement.
Taux de l'impôt
Art. 84 (nouvelle teneur)
1 L'impôt est perçu de l'aliénateur ou du bénéficiaire du gain sur le montant global du bénéfice ou du gain nets aux taux suivants:
a)
50% lorsqu'il a été propriétaire des biens ou actifs immobiliers, ou titulaire des droits immobiliers (réels ou personnels) pendant moins de 2 ans;
b)
40% lorsqu'il l'a été pendant 2 ans au moins, mais moins de 4 ans;
c)
30% lorsqu'il l'a été pendant 4 ans au moins, mais moins de 6 ans;
d)
20% lorsqu'il l'a été pendant 6 ans au moins, mais moins de 8 ans;
e)
15% lorsqu'il l'a été pendant 8 ans au moins, mais moins de 10 ans;
f)
10% lorsqu'il l'a été pendant 10 ans au moins, mais moins de 25 ans;
g)
0% lorsqu'il l'a été pendant 25 ans et plus.
2 Lorsque, postérieurement à l'acquisition d'un immeuble, des travaux lui ont apporté une plus-value d'une certaine importance, le gain est déterminé et imposé séparément pour les divers éléments selon la durée de propriété de chacun d'eux; si la répartition du bénéfice entre les divers éléments ne peut être déterminée, elle est fixée par estimation.
Remploi
Art. 85 (nouvelle teneur)
1 L'impôt est remboursé en cas de remploi du bénéfice résultant de l'aliénation:
a)
d'un logement (villa ou appartement) occupé par le propriétaire qui aliène;
b)
d'une propriété exclusivement agricole exploitée par le propriétaire qui aliène, son conjoint ou un membre en ligne directe de sa famille;
c)
de tout autre immeuble cédé à l'Etat, à une commune genevoise ou à une corporation de droit public genevois pour cause d'utilité publique ou d'intérêt général.
2 Il y a remploi au sens de l'alinéa précédent lorsque l'aliénateur utilise le produit de l'aliénation pour acquérir, construire ou transformer un immeuble de même nature, pourvu qu'il ne s'écoule pas plus de 5 ans entre les deux opérations.
3 N'est remboursé que l'impôt relatif au bénéfice qui a été effectivement investi, en plus du montant de la valeur d'acquisition du bien aliéné.
4 L'impôt remboursé est exigible lors de l'aliénation de l'immeuble de remplacement; les aliénations dont l'imposition est prorogée n'entrent pas en ligne de compte, mais l'acquéreur reprend l'obligation de l'aliénateur dans les cas de l'article 81, alinéa 1, lettres a et b.
5 La prescription et la péremption ne commencent à courir qu'au moment de l'aliénation donnant lieu à la perception de l'impôt.
Déclaration
Art. 86 (nouvelle teneur)
Toute aliénation ou prestation doit être déclarée au département par l'aliénateur ou le bénéficiaire du gain, dans un délai de 30 jours à compter de la date de l'opération, sur la formule établie par le département, en y joignant les pièces justificatives.
Consignation et sûretés
Art. 86 A (nouveau)
1 Lors de la passation d'un acte translatif de la propriété d'un immeuble ou de tout autre droit immobilier réel ou personnel, l'aliénateur est tenu de consigner entre les mains du notaire qui instrumente ou du préposé à l'office des poursuites et des faillites la partie du bénéfice résultant de l'opération en pour-cent au taux de l'impôt, ou des sûretés équivalentes.
2 Sauf accord du département, le notaire doit refuser d'instrumenter tant que la consignation n'a pas été effectuée. Les fonds destinés à la part de l'impôt sont consignés chez le notaire, sans intérêts.
3 En cas de doute sur la somme à consigner, le département fixe cette somme dans les huit jours à compter de la réception de la requête de l'aliénateur.
4 Lorsque le bénéfice réalisé lors de l'aliénation d'immeubles est soumis à un impôt annuel entier sur le revenu, l'aliénateur peut, à sa demande, être dispensé du versement de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers moyennant remise d'une garantie bancaire dont les termes et conditions sont fixés par le département.
Provision
Art. 86 B (nouveau)
1 Le bénéfice réalisé par le promoteur d'une opération immobilière soumise à la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, peut être affecté à la constitution d'une provision.
2 Cette provision doit être utilisée dans un délai de cinq ans pour une nouvelle opération de construction, de transformation et de rénovation d'un immeuble soumise à la loi générale sur le logement et la protection des locataires.
3 Le montant du bénéfice réinvesti ne peut dépasser
a)
la différence entre le prix du nouvel immeuble construit et le prix de revient de l'immeuble aliéné;
b)
le coût de la transformation;
c)
le coût de la rénovation.
4 Si la provision n'est pas utilisée ou n'est que partiellement utilisée dans un délai de cinq ans, elle doit être dissoute et portée au crédit du compte de résultat.
Hypothèque légale sans inscription
Art. 371 (nouvelle teneur)
L'impôt immobilier complémentaire pour deux années échues et l'année courante, ainsi que l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers pendant deux ans à compter de l'aliénation et dans la mesure où la consignation prévue à l'article 86 A n'a pas été effectuée, sont au bénéfice d'une hypothèque légale sans inscription (art. 836 du code civil) dans les termes prévus par l'article 89 de la loi d'application du code civil et du code des obligations.
Dispositions transitoires
Art. 2
(concernant l'application de l'art. 85, al. 4 in fine:)
L'impôt dont la perception avait été différée en raison d'un remploi intervenu entre le 1er janvier 1987 et l'entrée en vigueur de la présente loi n'est pas dû si la première aliénation qui suit est une de celles qui sont désignées à l'article 81, alinéa 1, lettres a et b et intervient jusqu'au 31 décembre 1999.
Modification à une autre loi
(E 1 1)
Art. 3
La loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981, est modifiée comme suit:
Art. 80, al. 1, lettre a (nouvelle teneur)
a) les impôts désignés à l'article 371 de la loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887;
Entrée en vigueur
Art. 4
Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Initiative 21-C
Le président. Il est entendu que ce projet de loi concrétise l'initiative 21, s'agissant de son volet fiscal, tel qu'il figure dans le rapport de majorité en page 7.
M. Jean Spielmann (AdG). Je ne suis pas d'accord !
Je vous ai dit dans mon intervention que je n'avais obtenu aucune réponse concrète à l'initiative 21. Vous traitez des bénéfices immobiliers, alors que l'initiative parle de spéculation foncière. Vous avez même fait des fautes de numérotation. Nous saisirons le Tribunal fédéral pour déni de justice par rapport aux pratiques de ce parlement !
Et vous avez le front de conclure que cette loi concrétise l'initiative 21 ! C'est faux ! Revenez sur les débats d'entrée en matière de l'initiative 21 et vous constaterez qu'elle n'a rien à voir avec la loi qui vient d'être votée.