République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7082-A
8. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Corsier (création d'une zone de verdure à destination de cimetière et abrogation d'une zone de verdure à destination de cimetière). ( -) PL7082
Mémorial 1994 : Projet, 1276. Commission, 1280.
Rapport de M. John Dupraz (R), commission d'aménagement du canton

En date du 29 avril 1994, le Grand Conseil renvoyait à la commission d'aménagement du canton le projet de loi 7082. Sous la présidence de Mme Martine Roset, les députés ont consacré une séance à ce texte législatif. Assistaient aux travaux M. Georges Gainon, chef de la division de l'équipement, et M. Pauli, juriste.

Objet du projet de loi

L'exposé des motifs explique par le détail l'historique du cimetière de Corsier. En 1987, à la demande du maire de l'époque, le Grand Conseil a voté la création d'une petite zone de verdure à destination de cimetière située en contrebas du «Petit Castel», à la route de l'Eglise (parcelles nos 4263, 4264 et 2833 2, feuille 19).

Aujourd'hui, cette solution apparaît insatisfaisante de l'avis du Conseil municipal en raison de la proximité du «Petit Castel» et du développement prévu pour la commune en une aire de délassement. Ce grief est fondé et aucune des solutions envisagées depuis dix ans n'a donc donné satisfaction.

C'est pourquoi il est proposé d'agrandir le cimetière à l'endroit le plus logique et le plus approprié, à savoir à l'est de l'actuel cimetière sur une partie de la parcelle no 4272 déjà prescrite en 1981 (extension de 1500 m2). Le même projet de loi propose d'abroger la zone de verdure à destination de cimetière créée en 1987 qui devient inutile, ces surfaces sont restituées à la zone agricole.

Travaux de la commission

Suite aux explications données par M. Gainon, les commissaires sont convaincus du bien-fondé du projet de loi. La solution envisagée aujourd'hui (agrandissement du cimetière) est préférable à celle de 1987 (création d'un nouveau cimetière).

La commission propose de rejeter l'opposition formée de 19 avril 1994 par M. Gilbert Cochet pour les motifs qui suivent.

Il faut tout d'abord constater que M. Gilbert Cochet (ci-après l'opposant) est propriétaire de la parcelle no 4272, dont une partie, correspondant à une surface de 1500 m2, est comprise à l'intérieur du périmètre d'utilité publique prévu par le projet de plan no 28567-518, visé aux articles 1 et 2 du projet de loi querellé. M. Gilbert Cochet a donc manifestement qualité pour s'opposer à l'adoption de ce projet de loi. Formée en temps utile, l'opposition est dès lors recevable à la forme.

Quant au fond. l'opposant se réfère intégralement à sa lettre d'observation du 8 octobre 1993, ainsi qu'à un avis de droit du 6 mai 1982, rédigé par M. Alexandre Berenstein à l'intention de l'ancien maire de la commune de Corsier.

Sur ce dernier point, il n'est peut-être pas inutile de préciser que cet avis de droit reconnaît, pour l'essentiel, qu'«il est certain que l'aménagement d'un cimetière communal constitue par définition une tâche d'intérêt public, qui est confiée aux communes par la loi sur les cimetières» (p. 3). En d'autres termes, un cimetière peut clairement faire l'objet d'une décision d'utilité publique.

Au surplus, cet avis rappelle simplement que l'adoption d'un projet de loi semblable à celui querellé nécessite que soit respecté le principe de la proportionnalité, qui exige, en l'espèce, que l'objectif recherché ne puisse être atteint «d'une autre façon, qui sauvegarderait mieux l'intérêt des propriétaires, c'est-à-dire qui éviterait l'expropriation». Or, l'exposé des motifs à l'appui du présent projet de loi, de même que le présent rapport, démontrent précisément qu'en douze ans, d'autres solutions ont bien été envisagées, mais aucune d'entre elles ne s'est avérée satisfaisante.

C'est donc à tort que l'opposant affirme qu'il «ressort clairement (de cet avis de droit) qu'une expropriation en vue de l'agrandissement du cimetière n'a que peu de chances d'aboutir». L'avis de droit de M. Berenstein n'est pas si catégorique et ne tient pas compte de ces nouveaux éléments.

Cela dit, l'argumentation contenue dans la lettre d'observation de l'opposant du 8 octobre 1993 consiste en quelques points, auxquels il sera répondu de la manière suivante:

L'opposant et sa famille habitent à proximité du cimetière et ne tiennent pas à le voir grandir.

Ce grief ne peut pas être retenu, dans la mesure où il deviendrait alors impossible de construire ou d'étendre un cimetière situé à proximité d'une habitation existante, ce qui est inconcevable et ne constitue pas un motif d'aménagement du territoire pertinent. Par ailleurs, des cimetières coexistent à côté de secteurs d'habitation dans d'autres endroits du canton sans que cela ne pose de problèmes (par exemple le cimetière de Plainpalais ou celui de Châtelaine).

L'agrandissement de ce cimetière «créerait une verrue qui déprécierait considérablement la parcelle».

Il ne s'agit là que d'une affirmation, dont la pertinence n'est aucunement démontrée par l'opposant. De toute façon, la parcelle no 4272 était jusqu'alors sise en zone agricole. Elle n'est donc pas constructible et l'on ne voit pas en quoi l'extension du cimetière envisagée déprécierait cette parcelle par rapport à la situation actuelle.

L'opposant n'aurait plus de vue directe sur la route de l'Eglise car «elle serait coupée par un mur». En outre sa maison disposerait actuellement de deux accès. Selon l'opposant, il serait peut-être nécessaire «de créer une entrée précisément sous le cimetière actuel».

Il y a lieu de relever que l'aménagement de la zone de verdure à destination de cimetière prévue par le projet de plan no 28567-518 ne préjuge pas de l'aménagement de détail qui sera finalement retenu pour le secteur considéré. Cet aménagement devra faire l'objet d'une procédure d'autorisation de construire ad hoc, au cours de laquelle l'opposant aura tout loisir de faire valoir de tels griefs.

Le projet porterait sur une «surface minimum d'environ 1500 m2», si bien que «d'ici 20 à 30 ans le problème se représentera avec ses inconvénients».

Il n'est certes pas impossible que dans 10 ou 20 ans, la situation ait changé et que les besoins en surfaces de cimetières soient supérieurs à ceux qui prévalent actuellement. Dans l'immédiat, l'opposant ne démontre pas que l'agrandissement du cimetière ne répondrait pas aux besoins actuels et ceux des années à venir. Au contraire, en soulignant le caractère «minimum» de la surface mise en zone de verdure et déclarée d'utilité publique en vue de l'extension du cimetière par le projet de plan no 28567-518, l'opposant reconnaît implicitement que l'étendue de cette surface ne peut pas être qualifiée d'excessive.

L'opposant aurait «offert une bande de terrain d'environ 2150 m2 située une centaine de mètres plus à l'est à grouper avec une parcelle appartenant à la paroisse catholique de Corsier de 3725 m2, soit un total de 5875 m2».

Cette solution présentait le désavantage de prévoir non pas un agrandissement du cimetière existant, mais la réalisation d'un second cimetière, situé à 150 m du premier, ce qui n'était pas rationnel, notamment du point de vue des frais d'entretien à charge de la commune. Cette solution était onéreuse également pour d'autres motifs, puisqu'elle aurait impliqué la canalisation d'une partie du nant d'Aisy. De plus, cet endroit était exposé au nord, avec un paysage peu sympathique pour les parents des défunts, qui préfèrent se recueillir devant un beau paysage. Enfin, il y aurait également eu des voisins à proximité, qui, eux aussi, auraient pu s'opposer à la modification du régime des zones envisagée, de la même manière que l'opposant. Toutes ces raisons ont amené le Conseil municipal de l'époque (1982) à ne pas retenir cette proposition.

D'autres solutions auraient été proposées, mais n'auraient pas non plus été retenues par l'Etat.

En l'absence de précisions supplémentaires, il ne paraît pas nécessaire de s'étendre sur les motifs qui ont amené l'Etat ou la commune de Corsier à ne pas suivre d'autres propositions, pour des motifs en grande partie similaires à ceux évoqués au point précédent. En tout état de cause, l'opposant ne saurait nier que les terrains sis à proximité du chemin des Ambys sont excentrés par rapport au village de Corsier. Le fait que des «convois funèbres et des visiteurs n'arrivent pas exclusivement de l'église de Corsier» est en outre dénué de toute pertinence.

L'exposé des motifs à l'appui du projet de loi soulignerait le fait que «le propriétaire possède 32 082 m2 de terrain agricole et en soustraire 1500 m2 reste dans des proportions admissibles» ne serait «pas élégant» et n'amènerait «rien de constructif au problème».

C'est à juste titre que l'exposé des motifs à l'appui du projet de loi signale que la soustraction d'une emprise de terrain agricole de 1500 m2 représente une proportion admissible (4,62%) par rapport à l'ensemble des surfaces de terrain (32 082 m2) dont dispose l'opposant sur le territoire de la commune de Corsier. L'opposant ne peut donc pas prétendre être gravement lésé dans ses intérêts personnels par rapport à l'intérêt public en cause. Pour peu agréable qu'elle soit au goût de l'opposant, cette constatation est tout à fait pertinente. D'ailleurs, l'opposant ne démontre pas le contraire.

L'abrogation de la zone de verdure créée en 1987, en contrebas du «Petit Castel», serait une erreur, dès lors que ce serait «le seul endroit possible en cas de catastrophe». De plus, cette attitude soulignerait le manque de cohérence des commissions successives chargées de cette affaire.

Comme le relève l'exposé des motifs à l'appui du présent projet de loi, cette localisation s'est avérée «insatisfaisante de l'avis du Conseil municipal qui n'avait pas été consulté par l'ancien maire (ce que l'autorité cantonale ignorait), en raison de la proximité du complexe du «Petit Castel» et du développement de celui-ci par la commune en une aire de délassement». L'opposant ne démontre pas en quoi ces considérations ne seraient pas pertinentes.

Enfin, l'opposant affirme, sans pour autant le démontrer, que «dans la grande majorité des communes genevoises, les cimetières ne sont plus blottis auprès de leur église».

L'extension du cimetière doit être réalisée à l'endroit le plus logique et le plus approprié, à savoir à l'est de l'actuel cimetière sur une partie de la parcelle 4272, comme l'explique l'exposé des motifs à l'appui du projet de loi. C'est dire que c'est l'emplacement du cimetière actuel qui est déterminant, et non celui de l'église. Cela dit, le fait que le cimetière actuel se situe à proximité d'une église est une raison supplémentaire pour adopter le projet de loi querellé, peu importe qu'ailleurs dans le canton, il existe des églises qui n'ont pas la chance de pouvoir disposer d'un cimetière à proximité.

En conclusion, la commission de l'aménagement du canton vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité moins une abstention (L), d'accepter ce projet de loi modifié (rejet de l'opposition) pour répondre à la nécessité de la commune de Corsier d'agrandir son cimetière.

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la

commune de Corsier (création d'une zone de verdure à destination de

cimetière et abrogation d'une zone de verdure

à destination de cimetière)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28567-518, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 28 avril 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Corsier (création d'une zone de verdure à destination de cimetière à la route de l'Eglise et abrogation d'une zone de verdure à destination de cimetière), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

1 La réalisation du cimetière à l'intérieur du périmètre figurant au plan no 28567-518 visé à l'article 1, est déclaré d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique.

2 En conséquence, l'acquisition des immeubles et droits nécessaires à cette réalisation peut être poursuivie par voie d'expropriation.

Art. 3

Le terrain compris à l'intérieur de la zone de verdure est grevé d'un droit de préemption au profit de la commune de Corsier, subsidiairement de l'Etat de Genève, qui s'exerce selon les modalités prévues par les articles 30A et 30B de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987. Ce droit est annoté au registre foncier.

Art 4

L'opposition à la présente loi formée par M. Gilbert Cochet est rejetée dans la mesure où elle est recevable pour les motifs exposés dans le rapport de la commission chargée de l'étude de ladite loi.

Art. 5

La loi du 8 mai 1987 créant une zone de verdure à destination de cimetière est abrogée.

Art. 6

Un exemplaire du plan no 28567-518 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.