République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7099
19. Projet de loi de MM. Thomas Büchi, Jean-Claude Dessuet, Michel Ducret, René Koechlin, Pierre Marti, Jean Opériol et Olivier Vaucher modifiant la loi sur les constructions et les installations diverses (LCI) (Délais de réponse). ( )PL7099

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, est modifiée comme suit:

Art. 4, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Si le requérant n'a pas reçu de réponse dans le délai, il peut aviser le département, par lettre recommandée, qu'il considère ses plans comme définitifs et autorisés. A défaut de notification de la décision dans un délai de 10 jours à compter de la réception de cet avis par l'administration, le requérant est en droit d'exiger du département la publication de l'autorisation de construire dans un nouveau délai de 10 jours.

EXPOSÉ DES MOTIFS

A bien lire l'article 4, alinéa 4 actuel de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (ci-après: LCI), l'on constate que cette disposition n'est guère logique. Tout d'abord, elle n'est pas applicable, sauf à l'interpréter de manière très extensive, lorsque le requérant a sollicité une autorisation de construire préalable. En effet, le dossier présenté au département des travaux publics et de l'énergie ne traite que des grandes orientations du projet; la requête doit donc être suivie d'une demande d'autorisation définitive. Dès lors, la construction ne saurait être entreprise sur la base d'une autorisation préalable. Par ailleurs, la disposition actuelle a pour effet de supprimer le droit de recours des tiers qui constitue précisément la raison pour laquelle des publications officielles sont requises par la loi.

Le projet qui vous est soumis permet de rétablir la situation dans la mesure où il résout les problèmes susévoqués. En sollicitant qu'une parution ait lieu dans la Feuille d'avis officielle de manière obligatoire, l'on rend le système prévu applicable aux demandes d'autorisations préalables et l'on ouvre aux tiers la possibilité de recourir contre des projets sur lesquels le département des travaux publics et de l'énergie ne se serait pas prononcé de manière officielle. Ce faisant, on sauvegarde un droit constitutionnel des individus qui n'ont pas de raison d'être défavorisés ensuite d'une inadvertance ou d'un retard de l'administration.

Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous prions de réserver un accueil favorable au présent projet.

Préconsultation

M. Christian Ferrazino (AdG). Juste quelques observations sur ce projet de loi mettant en évidence que la situation, telle que nous la connaissons dans la loi sur les constructions et installations diverses, n'est pas satisfaisante. Elle ne l'est pas, car le requérant n'a pas de moyens de contraindre le département à lui délivrer l'autorisation lorsque le département tarde à le faire. En fait, la disposition actuelle, article 4, alinéa 4, de la LCI prévoit simplement que lorsque le requérant n'obtient pas de réponse du département, il peut commencer les travaux, c'est-à-dire qu'il peut ouvrir le chantier, mais à ses risques et périls, car le département peut quand même, après coup, lui notifier tardivement une décision l'empêchant de poursuivre les travaux.

Tout le monde le constate, cette situation devrait être modifiée. Mais alors - c'est là où le bât blesse - les auteurs de ce projet de loi voudraient transformer cette situation, ce qui est parfaitement louable, mais en créant une situation qui serait pire encore, ce qui est non seulement regrettable mais particulièrement inadmissible pour une raison toute simple que vous comprendrez aisément, c'est que la modification proposée voudrait que lorsque le département ne répond pas dans le délai fixé par la loi, le requérant obtiendrait automatiquement son autorisation.

En d'autres termes, le département n'aurait pas à examiner le dossier, il suffirait de constater qu'il n'a pas répondu dans le délai et cette simple carence de l'administration aurait à elle seule pour conséquence de permettre la délivrance de l'autorisation. Je vous le dis tout de suite, on n'a jamais vu ça dans aucun texte légal quel qu'il soit, que ce soit du canton de Genève...

Une voix. Mais il faut innover !

M. Christian Ferrazino. Oui, vous voulez innover, cher Monsieur, mais à vous suivre, vous pouvez aussi nous proposer que lorsque l'on demande un permis de conduire à l'administration, si elle ne nous répond pas dans un délai X, on obtient immédiatement le permis de conduire ! C'est exactement le même raisonnement que vous nous proposez dans ce projet de loi.

Que feriez-vous d'éventuelles complaisances qui pourraient, le cas échéant, faire en sorte que le dossier ne soit pas traité dans le délai ? Elle aurait comme conséquence immédiate de délivrer cette autorisation, ce qui, vous en conviendrez, est manifestement inacceptable. On ne voit pas comment et pour quelles raisons la conséquence de l'inaction du département serait de délivrer automatiquement l'autorisation sollicitée par le requérant. Bien évidemment, puisque la situation actuelle n'est pas satisfaisante, et nous l'avons relevé tout à l'heure, nous soutiendrons le renvoi en commission de ce projet de loi, mais nous proposerons toutefois des solutions différentes, des solutions pouvant permettre justement de sanctionner, ne serait-ce que par le biais de contraindre le département à verser un émolument au requérant s'il devait ne pas donner suite, dans les délais légaux, à la demande qu'il est censé examiner.

Dernier mot par rapport à l'exposé des motifs qui nous est sommairement indiqué à l'appui de ce projet de loi. Contrairement à ce qui est indiqué, très peu nombreuses sont les requêtes concernant des demandes d'autorisations préalables, puisque la plupart des demandes dont le département est saisi - M. Joye pourra le confirmer tout à l'heure - concernent des demandes définitives. Par conséquent, les craintes exprimées n'ont guère de fondement dans le cadre de l'exposé des motifs, puisque là, encore une fois, la quasi-totalité des demandes ne sont pas précédées d'une demande préalable.

M. René Koechlin (L). Je ne pensais pas que l'on devrait intervenir dans ce débat de préconsultation et que ce projet irait directement en commission. Mais puisque M. Ferrazino évoque les inquiétudes qu'il éprouve à la lecture du projet de loi, je l'invite à le mieux lire. Car à partir du moment, Monsieur, où une demande d'autorisation de construire est publiée, il s'écoule, vous le savez, trente jours de délai de recours. Et toute personne habilitée à recourir peut parfaitement s'en référer aux tribunaux, tels que la commission de recours, puis le Tribunal administratif, etc. Cela veut dire que le département des travaux publics, s'il était pris en défaut de réponse et n'avait pas obtempéré à la loi, aurait la possibilité à son tour de recourir contre l'autorisation de construire qui, elle, ne serait entrée en force qu'après les nouveaux trente jours de délai légaux.

Vous n'avez pas à vous inquiéter, Monsieur Ferrazino, le droit des tiers, y compris celui de l'Etat, est, dans le projet que nous proposons, tout à fait respecté. Mais nous l'examinerons en commission.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. J'ai longuement évoqué la question de ces diverses modifications proposées - nous en avons reçu une quinzaine - pour améliorer le fonctionnement de la loi sur les constructions et installations diverses. En ce qui concerne le projet 7099, j'ai le plaisir de vous informer qu'après en avoir parlé en particulier avec Mme Sylvie Bietenhader, qui a une très grande expérience dans ce domaine, il nous semble que le risque que l'on pourrait percevoir à travers cette loi est très faible. En effet, depuis huit ans il n'y a pas eu une seule ouverture de chantier suite à une mise en demeure laissée sans réponse. C'est pourquoi, en ce qui nous concerne, nous acceptons ce projet de loi. Nous étions même prêts à le discuter en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission LCI.