République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 mai 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 7e session - 18e séance
IU 9
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. L'interpellation urgente de M. Dominique Hausser avait trait à des allégations de mauvais traitements émanant d'Amnesty International.
Je voudrais dire d'abord que le rapport d'Amnesty reprend des dossiers pour la plupart anciens. Qui plus est, Amnesty reconnaît que ses allégations sont basées sur des rapports, des échos, et qu'il ne lui appartient pas de contrôler ces différents échos. Cela étant, et par souci de transparence, j'ai demandé à nos services de dresser un rapport de synthèse absolument complet sur tous les cas cités et sur tous les cas enregistrés par le département de justice et police et des transports. Ce rapport sera soumis au Conseil d'Etat, à la commission des visiteurs officiels et une copie sera transmise à M. le conseiller fédéral, Arnold Koller, qui m'a indiqué l'attendre avec intérêt, tant il est vrai que les rapports d'Amnesty ont des échos outre-Sarine.
Pour ma part, j'aimerais dire et répéter pour la énième fois que Genève est le seul canton possédant une commission de visiteurs de prison qui, moyennant trois signatures, peut visiter en tout temps n'importe quel poste de police et n'importe quel établissement de notre canton.
J'aimerais rappeler que l'admission à la prison de Champ-Dollon est précédée d'une visite sanitaire obligatoire. J'observe en passant que c'est précisément cette visite sanitaire qui soulève une interpellation urgente à laquelle je répondrai tout à l'heure. S'il y a plainte, et plainte pénale a fortiori, il y a constat, certificat médical, et M. le procureur, M. le chef de la police, M. le juge Schmidt et moi-même en sommes informés.
En 1993, et sur les premiers mois de 1994, vingt-cinq dossiers ont été adressés à ce juge, huit ont fait l'objet d'un retrait de plainte, sept ont été classés par le procureur général, trois cas n'avaient pas les éléments de preuves nécessaires, deux sont en cours d'enquête, deux sont au Palais de justice et deux ont été sanctionnés. Comment se fait-il, dès lors, que sur vingt cas il y ait dix-huit non-lieu ? Parce que quasiment tous les cas qui viennent à nos oreilles, et qui sont les mêmes que cite Amnesty, sont des cas d'arrestations, et, comme vous le savez, toutes les arrestations ne se passent pas forcément bien.
Un des cas cité par Amnesty mérite que l'on s'y attarde. Il s'agissait d'un personnage requis par le procureur général. C'est donc quelqu'un qui refusait obstinément de se rendre aux convocations qu'adressait la justice. Ce personnage s'est battu avec des agents qui venaient l'arrêter et l'emmener auprès du procureur général. Voilà ce qu'on appelle une torture ! Je relève ceci : il y a eu, en 1993, quatre mille trois cents arrestations et trente et un policiers blessés. Ils ont subi trois cents jours d'arrêts de travail pour blessures et ces policiers n'ont évidemment rien demandé à Amnesty; ils ont, eux, le sens des proportions...
Je renvoie donc ce Grand Conseil au rapport de mon département, à attendre dans le courant de l'été ou au tout début de l'automne. Dans cette perspective, je dois fermement réfuter les allégations d'Amnesty en ce qu'elles ont trait à de mauvais traitements sciemment infligés ou à des tortures. Enfin, en ce qui concerne la présence d'avocats dans les postes de police pendant la garde à vue, je réaffirme l'opposition totale du Parquet, de la police, de mon département et du Conseil d'Etat à cette mesure. Elle ne signifierait ni plus ni moins la fin de l'efficacité des enquêtes de police: mais peut-être est-ce bien ce qui est recherché !
Cette interpellation urgente est close.