République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 29 avril 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 6e session - 14e séance
PL 7082
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28567-518, dressé par le département des travaux publics le 28 avril 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Corsier (création d'une zone de verdure à destination de cimetière à la route de l'Eglise et abrogation d'une zone de verdure à destination de cimetière), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
1 La réalisation du cimetière à l'intérieur du périmètre figurant au plan n° 28567-518 visé à l'article 1 est déclarée d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique.
2 En conséquence, l'acquisition des immeubles et droits nécessaires à cette réalisation peut être poursuivie par voie d'expropriation.
Art. 3
Le terrain compris à l'intérieur de la zone de verdure est grevé d'un droit de préemption au profit de la commune de Corsier, subsidiairement de l'Etat de Genève, qui s'exerce selon les modalités prévues par les articles 30A et 30B de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987. Ce droit est annoté au registre foncier.
Art. 4
La loi du 8 mai 1987 créant une zone de verdure à destination de cimetière est abrogée.
Art. 5
Un exemplaire du plan n° 28567-518 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La commune de Corsier est confrontée depuis plus de vingt ans à la nécessité d'agrandir son cimetière, sis à Corsier-Village à la route de l'Eglise.
La commune a tout d'abord envisagé un agrandissement du cimetière à l'est, sur la parcelle 4272 (feuille 18) contiguë, appartenant à une famille de Corsier. Une variante a de même été élaborée, qui préconisait une emprise tant sur cette parcelle propriété privée que sur un terrain appartenant à la paroisse catholique. La cession foncière demandée à cette dernière paraissait, toutefois, excessive tenant compte du fait qu'elle avait déjà cédé, en son temps, une partie de son terrain jouxtant l'église pour une première extension du cimetière et il ne leur restait plus qu'un modeste terrain à côté de la cure.
Vu le refus des propriétaires de céder une partie de leurs terrains, la commune a sollicité en 1982 un avis de droit à l'ancien juge fédéral Alexandre Berenstein sur les chances de succès d'une procédure d'expropriation portant sur les deux terrains précités, adjacents au cimetière, en vue de l'agrandissement de ce dernier. L'expert a mis en évidence qu'une expropriation pouvait être contestée s'il était démontré que d'autres possibilités de réaliser un cimetière existaient.
En effet (...) «il ne suffit pas, pour que la mesure d'expropriation soit conforme à la constitution fédérale, que l'intérêt public existe. Encore faut-il, conformément aux principes généraux du droit constitutionnel, que la mesure prise respecte le principe de proportionnalité, c'est-à-dire qu'elle soit adaptée au but qu'elle vise, (...). Saisi d'un recours de droit public dans lequel le principe d'une expropriation est contesté sur la base de la garantie de la propriété, le Tribunal fédéral examine si la réalisation du projet répond à un besoin qui ne pourrait pas être satisfait d'une façon suffisante par l'emploi d'un moyen différent, tenant mieux compte de l'intérêt privé des propriétaires frappés; il procède à la pesée des intérêts de l'expropriant et de l'exproprié: pour que l'expropriation puisse être admise, il faut que l'intérêt public invoqué justifie en raison de sa nature et de son importance l'atteinte portée à l'intérêt privé - qu'il pèse plus que l'intérêt privé auquel il s'oppose (...). En d'autres termes encore, l'atteinte à la propriété privée ne doit pas dépasser ce qu'exige l'intérêt public» (avis de droit, 6 mai 1982, p. 4).
La commune a cherché, en conséquence, d'autres solutions. Elle a renoncé à envisager la localisation plus à l'est et dissociée de l'actuel cimetière, sur des terrains appartenant aux mêmes propriétaires privés et à la Société catholique romaine de Corsier, localisation proposée par ceux-ci comme contreprojet à un agrandissement sur leurs terrains jouxtant le cimetière existant.
Par ailleurs, le département des travaux publics a refusé d'entrer en matière sur une autre solution qui aurait trouvé place à l'ouest du village de Corsier en zone agricole et consistant dans la création d'un centre sportif et d'un cimetière au lieu-dit «Sous-la-Croix».
Après diverses études, la commune a alors envisagé en 1984, conformément à son étude directrice de 1973, de localiser tant une extension du cimetière que les futurs équipements publics (terrains de sports, place) à proximité de l'école et de la salle communale au lieu-dit «Les Prés-Grange» (à l'est du village de Corsier). Cette solution a fait l'objet d'un projet de modification du régime des zones (PL 5708) longuement débattu en commission du Grand Conseil: il s'agissait d'étendre la 4e zone B protégée du village de Corsier, ainsi que la 5e zone de développement de Maisons-Neuves, et de créer une zone de verdure grevée d'une clause d'utilité publique pour les installations sportives et le cimetière.
Finalement, seule l'extension de la 4e zone B protégée a été votée par le Grand Conseil en 1985. Le refus de vendre ou d'accepter un échange de parcelle de la part de la propriétaire du terrain pressenti pour l'extension du cimetière, ansi que le rachat par la commune du complexe sportif et hôtelier «Le Petit Castel» ont ainsi fait différer la création de la zone de verdure.
En 1987, à la demande du maire de l'époque, le Grand Conseil a, en dernier ressort, opté pour la création d'une petite zone de verdure à destination de cimetière située en contrebas du «Petit-Castel», à la route de l'Eglise (parcelles nos 4263, 4264 et 28332, feuille 19).
Cette modification du régime des zones (PL 5708-B) n'a pas fait l'objet d'une nouvelle procédure d'enquête publique, bien qu'il eût dû en être ainsi. Ceci tient au fait que le projet d'origine de modification de zone, soumis à l'enquête publique en automne 1984, comportait la création d'une zone de verdure déclarée d'utilité publique.
Cette localisation s'est toutefois avérée insatisfaisante de l'avis du Conseil municipal qui n'avait pas été consulté par l'ancien maire (ce que l'autorité cantonale ignorait), en raison de la proximité du complexe du «Petit-Castel» et du développemeent de celui-ci par la commune en une aire de délassement; ce grief paraît effectivement fondé.
Un nouvel emplacement a été proposé par la commune en 1989 au chemin des Ambys en bordure du Nant d'Aisy, qui nécessiterait un échange de parcelles. Néanmoins, ce site, encore plus excentré que les précédents par rapport au village, sis en zone agricole, cultivé et compris dans les surfaces d'assolement, n'a pas reçu l'aval de la commission d'aménagement du Grand Conseil. La valeur de la parcelle cédée était, par ailleurs, manifestement excessive pour du terrain situé en zone agricole.
Aucune des solutions recherchées depuis dix ans n'a donc donné satisfaction. Aujourd'hui, tant la commission précitée que le département des travaux publics et de l'énergie recommandent en conséquence que l'extension du cimetière se fasse à l'endroit le plus logique et le plus approprié, à savoir à l'est de l'actuel cimetière sur une partie de la parcelle n° 4272 déjà pressentie en 1981.
Cette solution s'avère être la plus adéquate du point de vue de l'aménagement du territoire et elle s'impose en l'absence de tout autre emplacement acceptable.
La partie de la parcelle 4272 qui sera affectée à l'extension du cimetière couvre une surface d'environ 1500 m2. Le propriétaire de ce terrain possède en outre sur la commune de Corsier cinq autres parcelles sises presque exclusivement en zone agricole. Les propriétés totalisent une surface de 32 082 m2: c'est dire que la proposition d'en soustraire seulement 1500 m2 reste dans des proportions admissibles (4,67%) et que ce propriétaire ne saurait prétendre être gravement lésé dans ses intérêts personnels par rapport à l'intérêt public en cause.
Le projet d'extension du cimetière exige par ailleurs d'abroger la zone de verdure à destination de cimetière créée en 1987 en contrebas du «Petit-Castel» qui deviendra inutile. Les trois parcelles concernées sont ainsi restituées à la zone agricole, zone dans laquelle elles se trouvaient précédemment et qui régissent les terrains avoisinants, dans l'attente d'une éventuelle adaptation du régime des zones pour l'ensemble du secteur compris entre Maisons-Neuves et le village de Corsier selon le projet de loi n° 5708.
Le présent projet de loi propose donc la création d'une zone de verdure à destination de cimetière d'environ 1500 m2 et l'abrogation de l'actuelle zone de verdure à destination de cimetière; l'extension du cimetière est déclarée d'utilité publique dans l'hypothèse où la cession du terrain ne pourrait pas être négociée à l'amiable. La clause d'utilité publique se justifie d'autant plus qu'aucune autre solution acceptable n'a pu être trouvée ces douze dernières années pour l'extension du cimetière, devenue indispensable, et cela malgré des recherches intenses de terrains portant sur tous les sites envisageables.
Tels sont, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.