République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 29 avril 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 6e session - 14e séance
M 911
EXPOSÉ DES MOTIFS
Dans le cadre des mesures destinées à favoriser le développement économique du canton, le Conseil d'Etat peut accorder des allègements fiscaux, soit des exonérations totales ou partielles d'impôt sur le capital, les réserves ou les bénéfices des entreprises ainsi que des allègements fiscaux indirects (amortissements, provisions, etc.).
La politique fiscale ne représente que l'un des éléments à disposition du Conseil d'Etat pour promouvoir économiquement notre canton. D'autres mesures peuvent être prises, comme des aides financières (prime à l'emploi, aide à l'innovation), des aides foncières (conditions de mise à disposition de terrains), des aides en matière de main-d'oeuvre et de formation professionnelle. La fiscalité n'est donc qu'une partie d'un ensemble, mais une partie largement méconnue.
L'article 65 A de la loi sur les contributions publiques fait obligation au Conseil d'Etat de rapporter annuellement au Grand Conseil sur sa politique en matière d'allègements fiscaux.
A la page 29 des comptes rendus de 1992 figurent sous le titre «Application de l'article 65 A de la loi générale sur les contributions publiques» les trois paragraphes suivants qui constituent la totalité du rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil:
«Selon l'alinéa 2 de l'article 65 A de la loi générale sur les contributions publiques (entré en vigueur le 1er avril 1981), le Conseil d'Etat doit renseigner sur l'application de ce texte.
En 1992, des allègements fiscaux ont été octroyés à 33 entreprises industrielles dont huit d'entre elles ont bénéficiés pour la première fois cette année-là.
Chaque entreprise a fait l'objet d'un examen attentif afin que ces dispositions soient appliquées uniquement dans des situations qui les justifient.»
Rien sur les critères qui président au choix des bénéficiaires, rien sur l'admission ou non d'un report des pertes, rien sur les modalités des exonérations accordées. Vous conviendrez, Mesdames et Messieurs les députés, que la parcimonie avec laquelle le Conseil d'Etat dispense des informations sur un sujet comme celui des allègements fiscaux, légitimait la présentation d'une motion, que nous vous remercions d'ores et déjà de bien vouloir renvoyer au Conseil d'Etat.
Débat
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Je n'ai pas l'intention d'argumenter très longuement en faveur de la présente motion dans la mesure où l'exposé des motifs à l'appui de celle-ci me semble suffisamment explicite, mais dans la mesure aussi où le Grand Conseil s'est déjà prononcé sur la nécessité d'un rapport complet du Conseil d'Etat au Grand Conseil au sujet des allégements fiscaux.
Au printemps 1993, en effet, le Grand Conseil approuvait à l'unanimité la motion 803-A de la commission de l'économie, motion comportant une invite intitulée «politique fiscale» et un texte exactement semblable à celui qui vous est soumis ce soir. A l'appui de la demande, le rapporteur Armand Lombard écrivait :
«Ce que désire instamment souligner la motion, c'est le besoin de l'exposé d'une politique fiscale, c'est-à-dire d'une direction et d'un sens donné à moyen et à long terme à l'accueil de telle ou telle profession ou branche économique, au soutien de telle ou telle classe de population, à l'appréciation de tel ou tel type de transaction en fonction des objectifs posés.».
On ne saurait mieux dire les choses que ne l'a fait M. Lombard. Si nous revenons à la charge aujourd'hui, c'est parce que le rapport de gestion du Conseil d'Etat, figurant traditionnellement dans les comptes, ne répond pas aux souhaits exprimés par la commission de l'économie et qu'aucun autre rapport y répondant ne nous est parvenu depuis lors. C'est la raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat accepte cette motion. La réponse est quasiment prête. J'attends encore quelques documents du département de l'économie publique, tant il est vrai que l'utilisation de l'outil fiscal, notamment dans la période de crise que nous traversons, est important pour permettre aux entreprises en place et pour celles souhaitant se restructurer, ou d'autres qui entendent venir à Genève, de pouvoir bénéficier dans les limites de la légalité et de l'égalité de traitement, bien entendu, des dispositions des articles 14 A et 65 A.
Je vous rappelle, à cet égard, que les cantons suisses et la Confédération sont liés par un concordat intercantonal sur la concurrence fiscale et que, de ce point de vue, les règles sont parfaitement claires. J'ajoute enfin que depuis trois ans le département de l'économie publique et le département des finances publient des directives adressées à tous les mandataires, fiduciaires, avocats et autres groupements attachés à la vie économique du canton et diffusent les normes d'application de ces dispositions. C'est la raison pour laquelle, nous y répondrons sans difficulté. Désormais, nous compléterons, au moment de l'examen des comptes 1993, le rapport de gestion que vous venez de recevoir, où l'exposé est relativement succinct. Mais nous vous donnerons, bien entendu, les critères d'application qui font que le Conseil d'Etat, après avoir recueilli le préavis des communes sur des lieux de site des sièges de sociétés, se détermine pour prendre ces décisions en matière d'exonération fiscale.
En revanche - et vous le comprendrez - je ne vous donnerai aucun nom d'entreprise. Par secteur économique, vous aurez cependant la répartition des quarante-cinq entreprises qui depuis un certain nombre d'années et jusqu'à aujourd'hui ont pu bénéficier de telles dispositions. Par conséquent, la réponse se fera à la fois dans le cadre des travaux de la commission des finances et par une réponse écrite séparée en ce qui concerne cette motion.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
concernant les allègements fiscaux
LE GRAND CONSEIL,
- considérant les articles 14 A et 65 A de la loi sur les contributions publiques;
- considérant que les allègements fiscaux consentis sont à assimiler à une dépense par diminution des rentrées fiscales, dépense au sujet de laquelle le Grand Conseil doit être complètement informé;
- considérant que les allègements fiscaux sont un des instruments de la politique économique et qu'il convient en conséquence que le Grand Conseil connaisse les principes d'action qui gouvernent le Conseil d'Etat sur ce plan,
invite le Conseil d'Etat
à faire rapport au Grand Conseil sur sa politique en matière d'allègements fiscaux dans le cadre des comptes rendus, selon les termes de l'article 65 A de la loi sur les contributions publiques.