République et canton de Genève

Grand Conseil

M 912
6. Proposition de motion de Mmes et MM. Sylvia Leuenberger, Fabienne Bugnon, Chaïm Nissim et René Longet concernant la décentralisation du traitement des déchets organiques. ( )M912

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

que la récente «panne» due à un affaissement de terrain de l'unique aire de compostage du canton, sis au Nant de Châtillon, oblige d'incinérer actuellement tous les déchets organiques récupérés,

qu'en matière de compostage, la décentralisation se justifie écologiquement et financièrement,

invite le Conseil d'Etat

à encourager toute initiative communale ou intercommunale en matière de compostage par, entre autres, la mise à disposition de terrains nécessaires ou l'autorisation d'exploiter ceux que les communes pourraient déjà posséder;

à considérer également d'autres solutions que la seule méthode de compostage en aérobie (à l'air) pour la récupération des déchets organiques en milieu urbain (systèmes de méthanisation par exemple);

à réserver l'incinération aux résidus justifiant absolument cette filière de destruction;

à améliorer la stricte rentabilité de l'usine des Cheneviers en traitant au juste prix des déchets pour les autres cantons ou régions et pour les industries dépendantes de l'incinération pour leurs déchets toxiques non récupérables.

EXPOSÉ DES MOTIFS

En introduction il est utile de rappeler que les déchets organiques qui pourraient être compostés dans notre canton représentent environ 60 000 tonnes par an, soit un tiers de la totalité des déchets genevois. Or, actuellement, seules 6000 tonnes sont récupérées pour être compostées...

D'où l'intérêt écologique et financier primordial de trouver la meilleure politique possible pour éviter d'incinérer à grands frais ce qui pourrait être valorisé sous forme de compost.

Déjà en juin 1989, le groupe écologique, entre autres, refusa le projet de loi 6060 ouvrant un crédit de construction pour la réalisation du 2e four de 50 Gcal/h à l'usine d'incinération des Cheneviers avec pour argumentation que ces fours surdimensionnés pour Genève entraveraient les efforts entrepris pour récupérer et recycler les déchets. Car, effectivement, à court terme, il est plus tentant de tout brûler que de faire l'effort de trier et de récupérer. Mais à long terme les coûts de l'incinération sont très élevés et les ressources gaspillées.

Puis environ deux ans plus tard, le département des travaux publics mena une immense étude sur la gestion globale des déchets qui donna lieu à de nombreux rapports, ainsi qu'à la réalisation de l'aire de compostage du Nant de Châtillon.

Si ces démarches allant dans le sens de récupérer, de recycler et de sensibiliser la population à ces problèmes avaient été accueillies favorablement, nous avions émis des réticences quant au concept de compostage au Nant de Châtillon, unique point cantonal de récolte des déchets organiques. Sa centralisation et l'exclusion de toute autre méthode de compostage adaptée pour composter les déchets paraissaient peu compatibles avec les critères écologiques de diversité et de décentralisation.

Il nous a été dit que cela serait une expérience pilote menée pour deux ans et que pendant ce temps-là les expériences communales seraient bloquées.

Aujourd'hui, nous constatons que ce délai est passé, que la centralisation du compostage présente de nombreux problèmes, que les communes manifestent le désir d'être consultées, que certaines communes se sont regroupées sous le nom de GICAL (Groupement Intercommunal de Compostage Arve et Lac), afin de prendre en charge le ramassage et le compostage de leurs déchets organiques; elles ont besoin à cet effet surtout de la collaboration de l'Etat pour, par exemple, obtenir l'autorisation d'utiliser un terrain et la mise à disposition du savoir-faire de l'Etat dans ce domaine.

Aussi, il nous paraît urgent et opportun que le Conseil d'Etat envisage de décentraliser sa politique de compostage en collaboration avec le GICAL, les autres communes intéressées, voire des particuliers, que celui-ci veille à ce que les communes urbaines, défavorisées par le manque de terrains et de matières ligneuses pour équilibrer et aérer leur compost, puissent s'adjoindre aux communes agricoles ou bénéficier d'autres systèmes (méthanisation par exemple).

Enfin, étant établi qu'en matière de déchets organiques triés, le coût de l'incinération est au moins deux fois plus élevé que celui du recyclage, la politique à suivre s'impose d'elle-même:

- réserver l'incinération aux résidus justifiant absolument cette filière de destruction. Cela implique que les déchets organiques urbains actuellement incinérés au prix fort cèdent progressivement la place aux autres;

- affecter le produit de la différence des coûts de traitement au financement d'installations de recyclage performantes. Cela veut dire débloquer des projets communaux et intercommunaux;

- réajuster les prix pour la tonne d'incinération, qui étant actuellement trop bas n'incitent pas à la récupération.

Pour toutes ces bonnes raisons, nous vous prions de bien vouloir, Mesdames et Messieurs les députés, accepter cette motion et la renvoyer au Conseil d'Etat.

Définitions

Le compostage, terme non scientifique, signifie dans ce texte le traitement des déchets organiques recyclables par voie aérobie (à l'air).

La méthanisation signifie le traitement par voie anaérobie des mêmes matières.

L'association des deux traitements permet une excellente synergie pour résoudre le problème de recyclage des déchets organiques urbains insuffisamment ligneux.

Débat

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Le compostage est le procédé le plus naturel et le plus ancien pour transformer en terre des déchets d'origine végétale ou animale. Cela n'est remis en cause par personne. Simplement ce processus de compostage, qui est une métamorphose de la matière vivante, est plus efficace s'il ne nécessite pas de long transport ou de stockage. Il doit être proche des personnes qui fournissent ces déchets organiques, donc il doit être décentralisé. Aussi, suite à l'expérience du Nant-de-Châtillon, qui a eu l'avantage de conscientiser les gens à trier les déchets et de mettre en évidence l'importance de rendre à la terre, cette couche si mince et seule fertile de notre planète, ce qui lui appartient et ce qui la constitue.

Nous pensons maintenant que, vu les problèmes d'affaissement de terrain du Nant-de-Châtillon et les coûts qui en résultent, il est grand temps de décentraliser les lieux de compost et d'ouvrir la porte aux propositions des communes dans ce domaine. L'Etat doit encourager les actions des communes par l'octroi d'autorisations de terrains et de savoir-faire. Il doit conserver son rôle de coordinateur afin que chaque commune puisse fonctionner le mieux possible dans ce domaine. D'ailleurs, l'article 17 de la loi sur l'énergie stipule, je cite : «Le canton et les communes favorisent ou organisent la récupération et le recyclage des déchets en vue d'économiser l'énergie.».

Cette motion critique aussi l'unicité de la méthode employée par l'Etat. C'est pourquoi des expériences pilotes en la matière n'ont pas pu voir le jour dans notre canton faute de débouchés. Elles ont dû s'expatrier dans d'autres régions, alors qu'il y aurait eu là l'occasion de développer des techniques industrielles intéressantes de recyclage pouvant créer des emplois et permettant l'innovation industrielle qui nous fait souvent défaut. Je pense, en particulier, aux techniques de biogaz et de méthanisation développées par des ingénieurs genevois tels que MM. Cotton ou Mahrer.

Enfin, troisième point, la tonne d'incinération doit vraiment être facturée au juste prix, afin que toute entreprise de diminuer les déchets à la source, de recycler ou de récupérer, soit encouragée et devienne rentable. Nous pensons également que les fours des Cheneviers doivent traiter les déchets non organiques des régions avoisinantes.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Le président. Je salue la présence à la tribune de notre ancien collègue, François-Régis Mahrer. (Applaudissements.)

M. Jean-Claude Genecand (PDC). La création d'une aire de compostage au Nant-de-Châtillon a été voulue par le Grand Conseil. Elle a même été la condition sine qua non de l'agrandissement des Cheneviers.

Mais déjà en 1987, lors de cette création, une motion demandait que cette expérience de compostage soit élargie aux communes le désirant. La motion 432 de la commission des travaux confirmait ce souhait l'année dernière. Or, cette demande est restée lettre morte jusqu'à il y a peu.

L'affaissement du terrain et les plaintes des Bernésiens incommodés par les odeurs dues probablement à une trop grande quantité de déchets à composter viennent à point nommé. Il faut s'interroger et analyser les causes de ce dysfonctionnement. Que le terrain se soit affaissé n'est pas le fruit du hasard. Soit la nature a mal été évaluée, soit les eaux d'arrosage n'ont pas été correctement canalisées. Je rappelle que le procédé Bühler a coûté 10 millions, que son poids est énorme, que la consommation électrique est importante et qu'il est patent que la dissémination des aspergilles, c'est-à-dire des moisissures pathogènes, se répand dans l'atmosphère. Autant de questions que notre groupe aimerait poser au Conseil d'Etat.

C'est pourquoi je présente l'amendement suivant, à rajouter à l'excellente motion de nos collègues :

«...à renseigner le Grand Conseil sur les raisons de l'affaissement du terrain et l'absence d'étude géologique, sur l'efficacité et la rentabilité du procédé Bühler, sa consommation électrique, la quantité d'eau utilisée et le recyclage de celle-ci, sur les émanations du compost et les odeurs incommodantes, sur les risques de pollution de la nappe phréatique, sur la dissémination des aspergilles, moisissures pathogènes, et, subsidiairement, sur le tri à la source en donnant des informations sur les expériences en cours ou futures dans les quartiers et villages choisis.».

Notre groupe soutient la motion 912 ainsi amendée et souhaite que vous en fassiez de même.

M. Roger Beer (R). Je crois que cette motion arrive effectivement à point nommé. Le traitement des déchets organiques, soit le compostage, a été le maître mot du Conseil d'Etat de la dernière législature. C'était une très bonne chose de se lancer dans une opération pilote extrêmement centralisée. Aujourd'hui, avec un Conseil d'Etat homogène, j'imagine que l'on sera un peu à l'écoute des communes qui prônent une certaine décentralisation et qui ont des projets.

Cette motion soulève un sujet intéressant. Effectivement, il faut faire un bilan des expériences passées et en informer les députés. En ce qui concerne la qualité du compost, je suis très à l'aise pour vous dire qu'elle est excellente, vu qu'on peut l'utiliser en ville. La production est insuffisante. Par contre, le problème des coûts induits reste flou. Je signale, par exemple, que pour la matière organique de la Ville de Genève, il semble assez «idiot» d'utiliser des centaines de camions pour transporter la matière à l'extérieur du canton, alors que nous avons quelques surfaces disponibles en ville. Le problème du transport se pose également pour d'autres communes. En ce qui concerne la méthanisation, nous avions fait un essai à Certoux, mais l'investissement était beaucoup trop élevé pour se lancer dans une expérience d'une telle envergure. En tout cas, à l'époque, cela n'était pas possible.

Enfin, je souscris parfaitement aux différents amendements de M. Genecand. La demande de renseignement me semble légitime, par conséquent nous devons accueillir favorablement cette motion, mais le groupe radical souhaiterait qu'elle soit renvoyée à la commission de l'environnement pour auditionner un certain nombre de personnes sur ce sujet.

M. Max Schneider (Ve). Le groupe écologiste acceptera le premier amendement de M. Genecand au sujet des expertises, notamment sur la contamination de la nappe souterraine du Nant-de-Châtillon. Ce sont des recommandations qui avaient été exprimées dans une étude effectuée par l'Institut du génie de l'environnement, dirigée par M. Lucien-Yves Mestre, au mois de septembre 1993, soit avant le malheureux accident survenu au Nant-de-Châtillon. On avait donc déjà demandé au Conseil d'Etat de réaliser une étude des risques de la contamination de la nappe souterraine et des eaux de surface par les sites anciennement contaminés et d'assainir les sites à risques tel le Nant-de-Châtillon. Malheureusement, c'est après un accident que l'on songe à effectuer cette étude !

Cet institut avait également fait des recommandations pour l'usine des Cheneviers. La proposition de M. Beer de renvoyer cette motion en commission me semble donc très indiquée, précisément pour étudier la recommandation suivante : «...construire l'installation Denox», c'est-à-dire le dispositif de dénitratation des gaz de fumée de l'usine des Cheneviers, conformément à l'OPair 1992. Cela veut dire que le cours No 3 des Cheneviers ne pourra pas être mis en service si ces normes OPair 1992 ne sont pas respectées. Cette motion traite du compostage, mais aussi du biogaz pour intégrer le recyclage des déchets organiques.

Le groupe écologiste soutient donc cette motion.

Le Le président. Monsieur le président du Conseil d'Etat, vous avez la parole ! Excusez-moi, Monsieur le président, M. Meyll voudrait s'exprimer encore avant vous !

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Eh bien, qu'il le fasse, j'attendrai volontiers !

M. Pierre Meyll (AdG). A la queue comme tout le monde, comme disait M. Blanc ! C'est bien juste, j'avais demandé la parole auparavant. Il s'agit d'une inattention que je pardonne volontiers !

Pour l'Alliance de gauche, le renvoi de cette motion en commission paraît absolument nécessaire. En effet, il ne faut pas oublier que notre concept de gestion des déchets a été approuvé par le Grand Conseil, soit la récupération de tous les déchets possibles afin d'en limiter l'incinération. Le problème ne se pose pas tellement dans les communes rurales, encore faut-il qu'elles aient un terrain à disposition qui corresponde à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, ce qui n'est pas toujours le cas; on l'a vu notamment sur certaines communes de la rive droite. Le problème se pose évidemment dans les grandes communes. Notre concept prévoyait des centres sur les deux rives afin que les grandes communes puissent y déverser leurs déchets. Je m'étonne, compte tenu des plaintes, que l'on puisse trouver des terrains en Ville de Genève. Je le souhaite pour M. Beer, mais je n'en suis pas convaincu.

Les trois centres cantonaux me semblent donc absolument nécessaires et nous ne refuserons pas d'en discuter en commission. Nous aimerions que le Conseil d'Etat nous indique - peut-être pas ce soir, mais tout au moins en commission - ce qu'il en est de la réalisation des centres qui avaient été prévus sur les deux rives.

Nous ne nous opposerons donc pas au renvoi en commission de cette motion, qui a besoin d'être affinée pour répondre à la demande de la gestion des déchets.

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. C'est depuis le début de cette législature que le problème du traitement des déchets dépend du département de l'intérieur. Jusque-là nous ne devions intervenir que sur la qualité du compost.

Tout d'abord, je tiens à vous dire que si vous deviez prendre une décision au sujet de cette motion sur la base des considérants, je vous inviterais à la refuser, car ces derniers amènent deux remarques. La première concerne l'allégation selon laquelle le canton incinère tous les déchets organiques récupérés. Cette assertion est fausse. En effet, en dépit des travaux de réparation entrepris sur le site du Nant-de-Châtillon, les exploitants de cette installation disposent temporairement, à côté du site, d'une aire sur laquelle les déchets organiques sont compostés de manière artisanale. D'ailleurs toutes les communes genevoises ont été informées par le département, par lettre du 14 avril, qu'elles pouvaient à nouveau acheminer sur ce site leurs déchets organiques ménagers. Par conséquent, et contrairement à ce que les motionnaires soutiennent, ces déchets ne sont actuellement pas incinérés, ce qui devrait vous rassurer.

D'autre part, il a été allégué que la décentralisation du compostage se justifierait écologiquement et financièrement. J'ai, depuis plusieurs années, soutenu l'idée de la décentralisation, mais il faut la faire d'une manière raisonnable, comme M. Beer l'a signalé tout à l'heure. Il y a des limites à ne pas dépasser. En effet, seul un compost élaboré et de qualité, composé à peu près d'un tiers de déchets ménagers, d'un tiers de déchets de jardins et d'un tiers de déchets ligneux, est susceptible d'être commercialisé, notamment comme engrais pour les cultures agricoles et florales.

Or, la multiplication de stations de compostage, d'une part, ne permettrait que difficilement la production d'un compost élaboré pouvant être commercialisé et, d'autre part, augmenterait les programmes d'analyse et de contrôle du compost. De plus, cela obligerait les communes à engager du personnel technique qualifié, voire d'effectuer des investissements pour la construction de certaines installations de compostage. Certes, actuellement, le canton composte principalement les déchets de jardins, mais pour composter tous les déchets organiques produits sur le territoire cantonal il faudrait construire deux centres supplémentaires de compostage comparables à celui du Nant-de-Châtillon. Cela est d'ores et déjà prévu dans le plan cantonal de gestion des déchets; un centre est prévu sur la rive droite et l'autre sur la rive gauche pour éviter les transports auxquels il a été fait allusion.

Il faut dire oui à la décentralisation, mais non à l'idée qui a parfois été exprimée que chacun aurait son petit centre de compostage dans sa commune. Ce serait déraisonnable sur le plan économique et sur le plan écologique. Je tenais à préciser les choses pour éviter de tomber dans l'excès contraire qui consiste à dire que l'on peut faire du compost à peu près n'importe comment et n'importe où, ce qui est inexact. Dès lors que nous nous retrouvons d'accord sur la décentralisation, je crois que vous devriez être satisfaits. Je l'espère, si vous ne l'êtes pas, je le regrette !

Vous alléguez que le canton incinérerait toutes sortes de résidus au lieu de les composter. Le plan cantonal de gestion des déchets fixe pour objectifs principaux :

1) de réduire à la source la quantité de déchets. Cette démarche exceptionnelle a été engagée depuis de nombreuses années et nous en mesurons les effets aujourd'hui. Ils sont si substantiels que les prévisions, qui avaient été établies sur le volume de ces déchets, se révèlent être inexactes. En effet, la politique d'information conduite à l'époque par le département des travaux publics a permis d'influencer le comportement des habitants de notre canton.

2) de recycler et valoriser autant que possible les résidus.

3) de traiter des matières restantes, ce qui correspond parfaitement aux objectifs prévus par la législation fédérale, à savoir la loi fédérale sur la protection de l'environnement et l'ordonnance fédérale sur le traitement des déchets.

Or, la mise en service de l'installation de compostage du Nant-de-Châtillon a précisément permis de revaloriser une partie des déchets organiques du territoire cantonal en produisant du compost. Cette installation a été une entreprise pilote qui a donné entière satisfaction, même si elle est aujourd'hui confrontée au problème que vous savez. C'est pourquoi le plan cantonal de gestion des déchets prévoit de créer les deux centres de compostage dont je vous ai parlé tout à l'heure. Par conséquent, ces trois centres permettront de toucher efficacement environ 90% de la population.

J'aimerais, pour terminer, dire un mot sur la quatrième invite qui demande d'améliorer la rentabilité des Cheneviers. En effet, plusieurs députés ont relevé que cette motion ne parle pas simplement, contrairement à son titre, de la décentralisation du traitement des déchets organiques, mais elle interpelle également le Conseil d'Etat au sujet de l'usine des Cheneviers pour que l'incinération des déchets toxiques non récupérables soit facturée au juste prix aux autres cantons et aux entreprises. Nous sommes tout à fait du même avis et nous travaillons dans ce sens dans le cadre des instances transfrontalières.

Lors de la dernière réunion du comité régional franco-genevois qui a eu lieu il y a une semaine, nous avons signalé aux autorités françaises que nous étions prêts à accueillir des déchets à l'usine des Cheneviers, et ce pour une longue période, notamment des communes du pays de Gex. Nous avions imaginé dans un premier temps que cela pourrait se faire pour une période de quatre ans, mais nous nous rendons compte qu'il n'est pas possible de mener une politique régionale transfrontalière si, entre autorités française et genevoises, nous n'envisageons pas une organisation des usines de traitement des déchets d'une manière plus générale dans le temps. On ne peut pas accepter ces déchets sur une courte période, c'est-à-dire durant la période où nous sommes en surcapacité de production parce que cela nous arrange, et les renvoyer le jour où nous en aurons trop.

C'est la raison pour laquelle nous avons négocié ce virage. Tout à l'heure je vous parlais de mon entretien avec le ministre français de l'environnement au cours duquel nous avons parlé du problème de l'exportation des déchets. Vous vous souvenez que Mme Ségolène Royal avait pris des décisions interdisant l'exportation des déchets. Elle était motivée par les excès que vous connaissez, mais une application trop stricte de cette mesure pourrait conduire à des déplacements de déchets beaucoup plus longs que ceux que l'on peut envisager si nous nous rendons auprès des centrales les plus proches. C'est donc la démonstration de la nécessité de mener une politique un peu différente dans une région frontalière. D'un autre côté, nous avons également besoin de certaines assurances pour pouvoir développer une telle politique.

C'est dire que votre dernière invite correspond à la politique que nous pratiquons et qu'elle représente un encouragement à la poursuivre.

M. Jean-Claude Genecand (PDC). On change de département, mais le discours est toujours le même ! Les hauts fonctionnaires qui s'occupent précisément de ces problèmes de compostage disent toujours la même chose; ils persistent et signent !

De fait, l'expérience genevoise qui veut «cantonaliser» le compostage est quasi unique. Dans les autres cantons, les expériences communales fonctionnent fort bien, et je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire de même à Genève. Beaucoup de communes sont prêtes à en faire l'expérience. Le système de méthanisation permet de petites unités. Je ne vois pas pour quelle raison l'Etat continuerait à dépenser une somme importante pour faire ce travail, alors que les communes sont prêtes à le faire d'autant plus qu'elles sont proches du consommateur, c'est-à-dire des paysans qui peuvent réutiliser ce compost.

J'espérais que le nouveau gouvernement aurait une vision un peu plus globale du problème et décentraliserait, mais je constate que les choses restent en l'état !

M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat. Je n'ai jamais dit que j'étais opposé à une démarche de «municipalisation» du compostage. Je n'ai jamais dit cela, non ! Je vous ai dit que chacun ne pouvait pas avoir son compost devant sa maison ! Si vous estimez que chacun peut faire son petit compost, c'est votre affaire ! Ce n'est pas parce qu'il y a des changements à la tête d'un département que l'on doit rejeter massivement l'avis des gens qui sont des professionnels dans ce domaine.

Monsieur le député, on peut parfaitement imaginer la mise en place de groupements intercommunaux qui exprimeront les sensibilités communales. Je crois vous avoir fait la démonstration de mon désir de responsabiliser les communes. Ne cherchez donc pas absolument à voir une divergence entre votre point de vue et le mien ! Je vous disais tout simplement qu'il y a des limites dans la décentralisation qu'il ne faut pas franchir. C'est tout ! C'est une question de mesure. J'espère que l'essentiel du message est bien compris.

Nous en débattrons encore en commission, pour que vous puissiez être définitivement - je l'espère - convaincu.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de cette motion à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adoptée.