République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 25 mars 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 5e session - 10e séance
PL 6981-A
La commission fiscale, sous la présidence de M. Jean-Luc Ducret, s'est réunie pour examiner le projet de loi susmentionné le 4 février 1994.
La commission a conduit ses travaux avec l'assistance de M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, chef du département des finances, de M. Pietro Sansonetti, directeur des affaires fiscales, et de Mme Catherine Neuenschwander, sous-directrice du service de l'enregistrement.
Ce projet de loi déposé le 26 mai 1993 a pour objet la modification des articles 52, alinéa 3, et 57 de la loi sur les droits d'enregistrement, du 9 octobre 1969.
Il s'agit des dispositions qui régissent les «transferts de biens mobiliers» et «constitution de sociétés».
L'article 52 définit les actes soumis au droit de vente mobilier de 1% auquel s'ajoutent des centimes additionnels de 110%. Ce droit d'enregistrement de 2,6% au total frappe tous les actes translatifs à titre onéreux de la propriété, de la nue-propriété ou de l'usufruit de biens mobiliers, notamment les ventes, adjudications, apports et reprises de biens.
L'article 57 est une disposition particulière applicable aux apports et reprises de biens mobiliers par des sociétés. Le traitement en est différent selon la forme juridique de la société ou la nature du bien.
En pratique, pour éviter la charge fiscale qui s'ajoute à celle que les sociétés doivent de toute façon supporter lors de leur constitution ou de l'augmentation de leur capital (droit de timbre), l'habitude s'est prise, pour les sociétés genevoises, de passer par-devant des notaires vaudois les actes portant sur la reprise de biens mobiliers. Le canton de Vaud ne percevant pas ce droit d'enregistrement, tout mandataire genevois consciencieux ne peut que recommander à ses clients de faire le déplacement pour s'épargner une charge fiscale et, du même coup, remettre en question la compétitivité genevoise.
Face à cette situation de concurrence, l'administration fiscale genevoise en est réduite à ne pas taxer ce type de reprises de biens mobiliers.
Au point que, pour 1993, les recettes d'enregistrement se sont montées à environ 64 000 F.
Dès lors que les actes authentifiés dans un autre canton échappent totalement au contrôle de l'administration fiscale genevoise, le Conseil d'Etat préfère modifier les dispositions légales pour que l'application soit conforme.
Au cours de cette discussion, les commissaires ont pu s'assurer de ce que ce type d'impôt n'était pas l'objet d'une quelconque préoccupation d'harmonisation intercantonale.
Si le projet 6981 est, par ses effets économiques, très modeste, il comporte aussi une valeur symbolique: la volonté genevoise de prendre les mesures fiscales commandées par la compétition intercantonale.
L'administration fiscale genevoise désire, par exemple, soumettre prochainement à notre Grand Conseil un projet de loi relatif au droit d'enregistrement des sentences arbitrales.
Par 12 voix contre 3 (ADG), la commission fiscale a approuvé le PL 6981 et vous recommande par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver ce projet de loi.
Premier débat
Mme Christine Sayegh (S). Si, sur le principe, il apparaît quelque peu surprenant en ces temps de récession économique de proposer la suppression d'une recette d'impôts, celle proposée aujourd'hui par le Conseil d'Etat pour modifier les articles 52, alinéa 3, et 57 de la loi sur les droits d'enregistrement n'est pas choquante pour autant.
En effet, cette modification supprime une concurrence fiscale avec le canton de Vaud qui, lui, ne taxe pas les reprises de biens mobiliers dans le cadre de la constitution de sociétés, ni l'augmentation du capital social, ce qui incite, en conséquence, l'enregistrement de ces opérations en terres vaudoises. Cela a d'ailleurs amené l'administration fiscale, depuis 1977 déjà, à ne plus percevoir cet impôt dans sa totalité, selon une instruction interne, et à réduire ainsi la taxe à 0,5% au lieu de 2,1%. Cette pratique confirme l'enregistrement non négligeable de sociétés hors de notre canton et il apparaît également que l'administration tend aujourd'hui à ne plus percevoir cette taxe afin que l'enregistrement d'actes authentiques se fasse à Genève.
Avec cette proposition, le Conseil d'Etat ne fait qu'adapter la loi à la pratique actuelle. Cette mesure est raisonnable puisque le moyen d'éluder la loi est aisé et on ne peut, en conséquence, conclure au fait que ce projet prétériterait les recettes de l'Etat. C'est pourquoi nous ne nous y opposerons pas.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue:
LOI
modifiant la loi sur les droits d'enregistrement
(D 3 6)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur les droits d'enregistrement, du 9 octobre 1969, est modifiée comme suit:
Art. 52, al. 3 (nouvelle teneur)
3 Toutefois, le transfert de biens mobiliers résultant d'une fusion ou de l'absorption de patrimoines n'est soumis à aucun droit.
Art. 57 (nouvelle teneur)
Apports et
reprises de
biens
mobiliers
1 Il n'est perçu aucun droit sur les apports de biens meubles ou mises de fonds des personnes qui fondent une société simple, en nom collectif ou en commandite.
2 Il en est de même lors de la constitution ou de l'augmentation de capital des autres sociétés.
3 Il n'est perçu aucun droit proportionnel pour les reprises de biens mobiliers dont il est fait état, soit dans l'acte de fondation d'une société anonyme ou d'une société à responsabilité limitée, soit dans leurs statuts ou dans toute autre pièce.
4 La libération d'actions ou de parts sociales en compensation de créance n'est soumise à aucun droit.
Art. 2
Entrée en
vigueur
Le Conseil d'Etat fixe l'entrée en vigueur de la présente loi.