République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 5 novembre 1993 à 17h
53e législature - 1re année - 1re session - 41e séance -autres séances de la session
No 41
MÉMORIAL
DES SÉANCES DU
GRAND CONSEIL
53e LÉGISLATURE
Vendredi 5 novembre 1993,
nuit
Présidence:
M. Hervé Burdet,président
La séance est ouverte à 21 h.
Assistent à la séance: MM. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat, Claude Haegi, Bernard Ziegler, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Dominique Föllmi, Jean-Philippe Maitre, Olivier Vodoz, Guy-Olivier Segond, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, Hervé Dessimoz, Marlène Dupraz, Sabine Haupt Secrétan, Philippe Joye, Pierre Kunz, René Longet, Pierre Marti, Alain Mauris, David Revaclier, Jean-Pierre Rigotti, Philippe Schaller, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
M. Jean Spielmann(AdG). J'annonce le dépôt d'un projet de loi modifiant la loi sur les contributions publiques en ce qui concerne la péréquation intercommunale, et d'un deuxième projet de loi modifiant la loi générale sur les contributions publiques.
b) de propositions de motions;
Le président. La proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :
Cette proposition de motion qui formalise et concrétise le rapport M 644-B de la commission de l'environnement et de l'agriculture sera discutée avec le point 13 de l'ordre du jour reporté à la fin de l'ordre du jour de cette séance.
c) de propositions de résolutions;
Le président. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence :
Mme Elisabeth Reusse-Decrey(S). Je demande que cette résolution soit traitée ce soir. Je ne pense pas qu'elle fasse l'objet d'un grand débat, mais vu l'urgence de la situation en Haïti il semblerait judicieux que l'on puisse la voter ce soir.
La proposition de mettre ce point à l'ordre du jour de cette séance est mise aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Cette proposition est adoptée par 41 oui contre 21 non.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:
Art. 198 (nouvelle teneur)
Compositionet attributions
1 Dès le début de la législature, le Grand Conseil nomme une commission d'aménagement du canton composée de 15 membres chargée d'examiner:
a) les projets de loi portant sur la modification des limites de zones au sens des articles 15 et suivants de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire.
b) les motions demandant une modification des limites de zones en vertu de l'article 15 A de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire.
c) les oppositions formées par les communes au sens des articles 6 de la loi sur les zones de développement, 5 de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités et 40 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites.
d) les objets que le Grand Conseil décide de lui envoyer, touchant notamment l'urbanisme et l'aménagement du territoire.
2 Cette commission fournit des préavis aux autres commissions auxquelles de tels projets sont renvoyés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Préambule
Le 29 avril dernier, en adoptant le projet de loi 6705, le parlement cantonal a accédé à une légitime demande des communes genevoises de pouvoir détenir une certaine autonomie en matière d'aménagement du territoire. Dorénavant, les communes disposent d'un droit d'initiative leur permettant de faire engager des procédures portant sur des propositions émanant d'elles, de modification des limites de zones au sens de l'article 12 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LaLAT).
Le législateur a également profité de cette opportunité pour élargir le cercle des initiants aux députés en leur donnant la qualité pour ouvrir une procédure de changement d'affectation de zone.
En effet, jusqu'à ce jour, les procédures de modification de zones étaient engagées à la seule initiative du Conseil d'Etat.
Toutefois, si le Grand Conseil a étendu ses pouvoirs, il n'en a pas pour autant défini les modalités de traitement des motions prévues à cet effet. C'est la raison de ce projet de loi.
Il n'est pas inutile de rappeler qu'antérieurement à l'adoption de la loi précitée, plusieurs demandes émanant de députés et proposant au Conseil d'Etat d'ouvrir une procédure relative aux modifications des plans de zone ont été présentées au législateur cantonal; on peut citer à titre d'exemple:
PL 6154
proposition de déclasser des terrains en zone préexistante agricole en zone préexistante agricole en zone de construction à Pinchat, refus d'entrer en matière par le Grand Conseil le 2 juin 1988.
PL 6362
modification du régime des zones de construction à Sécheron, renvoyé à la commission d'aménagement en juin 1989.
PL 6369
modification du régime des zones de construction à la Gra-vière à Meyrin, renvoyé à la commission d'aménagement en octobre 1989.
PL 6432
modification du régime des zones de construction à Pregny-Chambésy, renvoyé à la commission d'aménagement en octobre 1989.
M 793
déclassement de terrains sis en zone préexistante agricole en zone de construction à la Pallanterie à Collonge-Bellerive renvoyée au Conseil d'Etat en mai 1992.
Certains périmètres visés par les demandes susdites portent sur des sites sensibles ou posent des problèmes sur le plan politique, d'autres demandent des études d'aménagement, d'aucuns impliquent des accords entre l'Etat et les propriétaires fonciers. C'est la raison pour laquelle ils sont toujours en sus-pens devant la commission d'aménagement.
Depuis la nouvelle teneur de l'article 15 A de LaLAT, les députés ont usé de leur prérogative pour:
M 825
Déclassement de terrains en zone préexistante agricole en zone de construction à Bellevue. Motion renvoyée au Conseil d'Etat le 13 novembre 1992. Adoption du PL 6996-A par le parlement cantonal en date du 8 octobre 1993.
M 830
Déclassement des terrains en zone préexistante agricole en zone de construction aux Petites-Fontaines à Plan-les-Ouates renvoyé au Conseil d'Etat en juin 1993.
M 859
Création d'une zone constructible à Confignon et abrogation d'une zone constructible à Bernex. Renvoi de la motion au Conseil d'Etat le 13 mai 1993. Mise à l'enquête publique de préconsultation avril-mai 1993, délibération des conseils municipaux respectivement les 8 juin et 24 août derniers. Le Grand Conseil sera vraisemblablement saisi du projet de loi au mois de novembre 1993, la procédure d'opposition ayant été ouverte.
M 879
Extension de la zone à bâtir à Bonvard sur la commune de Choulex, motion renvoyée à la commission d'aménagement le8 octobre 1993.
Motivation du projet de loi
La vive discussion échangée lors de la séance de la commission d'aménagement du 6 octobre dernier, portant quant à la forme du traitement de la motion 879 demandant l'extension de la zone de construction du hameau de Bonvard, pour savoir si le Grand Conseil devait renvoyer la motion, soit au Conseil d'Etat soit en commission, a incité votre serviteur à proposer d'inscrire la règle du renvoi automatique en commission pour toutes les propositions de projets de lois et motions proposant une modification des limites de zone.
Portée législative de la motion au sens des articles 15 LaLATet 143 du règlement du Grand Conseil
Il n'échappe à personne que la portée de ce type de motion a fondamentalement évolué depuis la promulgation de la loi 6705, le 26 juin 1993. Elle ne peut être considérée comme une motion à teneur de l'article 143 de la loi portant règlement du Grand Conseil, mais prend la forme d'une obligation légale que l'exécutif doit respecter en engageant une procédure de déclassement au sens de l'article 16 LaLAT.
En effet, le droit garanti du Grand Conseil exprimé sous la forme de motion tel que défini à l'article 15 A LaLAT pose la problématique de sa valeur législative par rapport à celle de l'article 143 du règlement du Grand Conseil qui n'est, rappelons-le, «qu'une proposition faite au Conseil d'Etat».
Le législateur a clairement exprimé sa volonté de pouvoir posséder la compétence de mettre à l'enquête publique de préconsultation des avant-projets de lois. Toutefois, en vertu de la séparation des pouvoirs et n'étant pas en possession d'un appareil administratif pouvant instruire formellement cette attribution, le Grand Conseil a délégué cette tâche au Conseil d'Etat.
Mais qu'adviendra-t-il le jour où l'exécutif cantonal ne donnera pas suite à l'injonction du parlement ?
Cette équivoque a volontairement été écartée du présent projet de loi et son auteur laisse le soin à la commission du règlement de statuer sur cette antilogie et si cela se révèle nécessaire de définir la propriété législative de la «motion impérative» en complétant l'article 143 du règlement du Grand Conseil.
Pour ce qui est de l'étude par le parlement d'une «proposition de motion», une discussion sur le fond doit avoir lieu tant entre les députés qu'avec le Conseil d'Etat sur la portée matérielle de l'acte législatif (motivation de la demande, régime de zone proposée, définition du périmètre, respect des normes légales, visite des lieux, audition des autorités communales, des tiers et du département des travaux publics, etc.), ce qui ne peut manifestement pas se faire lors de débats en séance plénière. En la matière, il convient au préalable, comme ceux dus à l'initiative des communes, de s'assurer que les avant-projets de lois mis à l'enquête publique de préconsultation répondent sur le plan formel aux exigences légales. Pour le surplus, il est opportun de circonstancier la mission que le Grand Conseil entend confier au Conseil d'Etat.
Le droit à l'expression
Le respect de l'autonomie des communes en matière d'aménagement du territoire demande à ce qu'elles puissent exprimer leur position sur les propositions du législatif cantonal avant que les avant-projets de lois ne soient mis à l'enquête publique de préconsultation.
Il en va de même pour les propriétaires fonciers touchés par la mesure d'aménagement ainsi que pour les tiers intéressés.
Enfin, les associations et organismes intéressés doivent également pouvoir exposer leur point de vue.
Le Grand Conseil, en réformant les compétences des communes, ne doit pas tomber lui-même dans les travers de la fatuité par une manifestation de suffisance.
En d'autres termes, il serait irrelevant que seuls les députés et le Conseil d'Etat puissent en séance plénière, s'exprimer préalablement sur la mesure d'aménagement proposée, tout en ne permettant pas aux autorités communales, communiers et tiers intéressés, de se manifester et éventuellement établir un dialogue au moyen des auditions.
La procédure relative à l'adoption des plans de zone
Ce n'est qu'au terme de la procédure définie à l'article 16 LaLAT (enquête publique de préconsultation, préavis du conseil municipal, procédure d'opposition) que le Grand Conseil est saisi d'un projet de loi. Dès lors, sa marge de manoeuvre pour modifier la teneur de l'acte législatif consiste à la seule réduction du périmètre mis à l'enquête publique.
Il est donc préférable de connaître la position des intéressés touchés par la mesure d'aménagement avant que le Conseil d'Etat n'élabore l'avant-projet de loi soumis à l'enquête publique de préconsultation, ce qui permettra aux parlementaires de procéder, le cas échéant, à la modification de l'«invite» de la motion en l'amendant en commission.
Pour le même motif, il apparaît indispensable de confirmer dans le règlement du Grand Conseil le renvoi obligatoire devant la commission de l'aménagement du canton de tout projet de loi portant sur une modification du régime des zones. Le but de la modification des dispositions du règlement du Grand Conseil relatives à la commission de l'aménagement est d'assurer ce double renvoi obligatoire en commission.
Conclusions
La règle du renvoi automatique de toute proposition de modification des limites du régime des zones à la commission d'aménagement du canton est une mesure respectueuse à la fois du droit d'être entendu et de l'autonomie des communes. En outre, cela peut éviter que le Grand Conseil renvoie au Conseil d'Etat des motions dont la portée est peu réaliste, confuse ou ne respecte pas les normes légales qu'il a lui-même mises en place.
Cette modification du règlement du Grand Conseil permettra de poursuivre le dialogue établi entre le législatif cantonal et les communes, par l'adoption du contreprojet à l'initiative 29 «Pour une autonomie des communes en matière d'aménagement de leur territoire».
Telles sont en substance, mes chers anciens collègues, Mesdames et Messieurs les députés, les motivations qui ont incité le sussigné qui use, pour une ultime fois de ses prérogatives à déposer ce projet de loi. Il vous remercie par avance d'y faire bon accueil, en le renvoyant simultanément à la commission d'aménagement (commission rapporteuse) et à celle du règlement pour consultation.
Préconsultation
M. René Koechlin (L). Ce projet de loi représente la dernière action de député de notre ex-collègue Richardet. C'est une action opportune. Sa proposition découle de la récente adoption par le Grand Conseil du contreprojet sur l'autonomie communale qui établit notamment à qui échoit le droit d'initiative en matière de déclassement de zone. Alors que précédemment l'initiative était pratiquement du seul ressort du Conseil d'Etat - comprenez du département des travaux publics - elle appartient désormais tant aux députés - ce qui est la moindre des choses en matière législative, vous l'avouerez - qu'aux communes.
Or, à nous autres députés, la nouvelle loi offre le moyen de prendre l'initiative en déposant une motion invitant le Conseil d'Etat à engager la procédure de déclassement et à élaborer le projet de loi qu'elle implique. Mais pour que ce projet de loi soit conforme à la volonté politique de ce Grand Conseil et aussi, si possible, de la commune, il faut que la matière traitée dans la motion qui le précède soit examinée préalablement en commission. C'est ce que vise le projet de loi de M. Richardet et c'est pourquoi nous en approuvons le principe, car, à notre avis, il découle directement de la loi que nous avons votée récemment sur l'autonomie communale. Nous l'examinerons plus en détail en commission.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 11 de la loi sur le domaine public, du 24 juin 1961,
Décrète ce qui suit:
Article unique
La partie du domaine public sise au carrefour de la rue de Montbrillant et de l'avenue de France, sur la commune de Genève, section Petit-Saconnex, feuille 80, soit la sous-parcelle bB, d'une superficie de 561 m2 telle qu'illustrée par le tableau de mutation portant le n° 63/1992, établi le 7 avril 1992 par MM. Huber et Chappuis, ingénieurs géomètres officiels, est distraite du domaine public pour être incorporée au domaine privé de l'Etat de Genève.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En 1987, la Fondation des immeubles pour les organisations internationales (ci-après FIPOI) a organisé un concours d'architecture ayant pour objet la construction, sur une parcelle propriété de l'Etat de Genève comprise dans le triangle formé par l'avenue de France et la rue de Montbrillant, d'un immeuble administratif destiné aux organisations internationales. Cet immeuble administratif de Montbrillant (IAM), construit en droit de superficie par la FIPOI, est destiné au Haut-Commissariat pour les réfugiés (ci-après HCR).
A l'extrémité de ce triangle se trouve une parcelle, jusqu'à présent propriété de la Ville de Genève, située à l'intersection de l'avenue de France et de la rue de Montbrillant, sur laquelle se trouve une station-service désaffectée. Tenant compte des aménagements extérieurs du IAM et de son accès, dont la réalisation est à la charge de la FIPOI, il est apparu opportun que cette parcelle soit englobée au patrimoine de l'Etat, ce qui a été accepté par la Ville de Genève dans le cadre d'un échange foncier avec l'Etat portant sur d'autres terrains.
La parcelle située à l'intersection de l'avenue de France et de la rue de Montbrillant faisant l'objet du présent projet de loi fait toutefois partie du domaine public de la Ville de Genève. Comme il est prévu que le petit bâtiment qui s'y trouve soit maintenu et transformé en un pavillon d'information du public mis à disposition du HCR, il convient que cette parcelle soit désaffectée du domaine public pour qu'elle puisse être incorporée au domaine privé de l'Etat.
Ce changement de statut implique qu'il soit approuvé par le Grand Conseil sous forme d'une loi, conformément à l'article 11 de la loi sur le domaine public (L 1 0,5).
Au vu de ces motifs, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28579-507-516, dressé par le département des travaux publics le 11 mars 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire des communes de Bernex et de Confignon (création d'une zone agricole à la route de Soral et d'une zone de développement 5 au chemin de la Lécherette), est approuvé.
2 Le terrain correspondant à la zone agricole créée en vertu de l'alinéa 1 ne peut être bâti.
3 La zone de développement 5 est destinée à la construction de deux villas.
4 Les plans des zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité II aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 5 créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan n° 28579-507-516 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de loi concerne deux parcelles situées sur le territoire des communes de Bernex et de Confignon.
La parcelle n° 12733, feuille n° 15 du cadastre de la commune de Bernex, est délimitée au sud par la route cantonale de Soral et au nord par un chemin non revêtu prolongeant le chemin des Curiades; elle a une superficie totale de 4'165 m2, dont environ 2'400 m2 (plantés en vigne depuis 1980), situés en 5e zone et 1'765 m2 en zone 4 B protégée où se trouvent les bâtiments d'exploitation et le logement des propriétaires (père et fils). Cette parcelle est entourée de terrains bâtis, ou en voie de l'être, vu les autorisations de construire récemment délivrées.
La parcelle n° 10612, feuille n° 8 du cadastre de la commune de Confignon, est située au nord-est du chemin de la Lécherette; elle a une superficie de 2'359 m2 entièrement comprise dans la zone agricole. Cette parcelle se trouve au milieu d'un site non bâti composé d'une partie viticole au nord (prolongement du coteau de Bernex), de vieux vergers et de cultures qui descendent en pente douce jusqu'au site classé de l'Aire.
Ces deux parcelles appartiennent à la même famille.
Le département des travaux publics a été saisi, par les propriétaires, d'une demande pour un «échange de zones» soit de restituer à la zone agricole la partie de la parcelle n° 12733 située en 5e zone, sur le territoire de la commune de Bernex, et de déclasser en zone de développement 5 la parcelle n° 10612 située sur le territoire de la commune de Confignon, afin d'y construire deux villas.
Les motifs avancés par les propriétaires sont, d'une part, le maintien de la vigne existante, exploitée par le fils agriculteur (comprise dans le cadastre viticole fédéral) et, d'autre part, de permettre la construction de deux logements par les deux filles qui souhaitent vivre dans le village où elles sont nées.
Cette demande a fait l'objet d'un examen attentif de la part des services concernés du département des travaux publics, qui a fait rapport au Conseil d'Etat. Ce dernier n'est pas entré en matière sur la demande d'échange de zones, considérant que le déclassement en zone agricole de la parcelle n° 12733 aurait pour effet la création d'une enclave insolite à l'intérieur d'un périmètre cohérent de terrains sis en zone à bâtir qui, de plus, risquerait d'être remis ultérieurement en zone à bâtir au même titre que d'autres poches résiduelles de zone agricole se trouvant dans la même situation. D'autre part, le déclassement en 5e zone de la parcelle n° 10612 de Confignon, créerait un empiétement indésirable sur les limites actuelles de la zone agricole.
Le Conseil d'Etat a, par ailleurs, constaté que les besoins des consorts Mermoud auraient pu être satisfaits sur la parcelle n° 12733 sans empiétement ou moyennant un empiétement modeste sur la partie plantée en vigne, selon diverses propositions faites par le département des travaux publics, ce léger sacrifice de plants de vigne se justifiant d'autant plus que c'est la plantation récente de celle-ci qui a provoqué le besoin invoqué.
A la suite de cette décision, le Grand Conseil a été saisi, le 29 novembre 1991, d'un projet de loi qui permettrait la réalisation de l'échange de zone souhaité, suivi d'une motion, du 1er juin 1992, qui a été renvoyée au Conseil d'Etat le 2 octobre 1992. La commission d'aménagement du canton s'est encore prononcée favorablement au projet de loi précité lors de sa séance du 10 mars 1993, après s'être rendue sur place et avoir ensuite auditionné les intéressés. A cette occasion, il est apparu que contrairement à la parcelle 12733, la parcelle 10612 n'est pas équipée et qu'il faudra notamment réaliser un collecteur secondaire en système séparatif reliant les constructions futures au réseau d'assainissement.
Déférant au voeu du Grand Conseil, le présent projet de loi a été élaboré et soumis aux commissions consultatives compétentes, qui ont émis des préavis défavorables. Commission d'urbanisme le 1er avril 1993; commission des monuments, de la nature et des sites le 30 mars 1993.
En conclusion, le présent projet propose la création d'une zone agricole de 2'400 m2 sur le territoire de la commune de Bernex et d'une zone de développement 5 de 2'359 m2 sur le territoire de la commune de Confignon.
L'enquête publique ouverte du 7 avril au 7 mai 1993 a provoqué quelques observations qui seront transmises à la commission chargée de l'examen du projet de loi. Celui-ci a été préavisé favorablement par le Conseil municipal des communes de Confignon, 7 oui, 4 non et 4 abstentions, en date du 8 juin 1993 et de Bernex, 12 voix contre 4, en date du 24 août 1993.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28097-534, dressé par le département des travaux publics le 2 avril 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune du Grand-Saconnex (création d'une zone de verdure, d'une zone de développement 4 B, et d'une zone de développement 3, aux lieux-dits «La Tour, Le Chapeau du Curé»), est approuvé.
2 La zone de verdure créée par le plan visé à l'alinéa 1 est également destinée à la réalisation de petits équipements communaux tels que couvert, buvette, WC publics, etc.
3 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 3 et de la zone de développement 4 B créées par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan n° 28097-534 susvisé, certifié conforme par la présidente du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le périmètre faisant l'objet du présent projet de loi est situé sur le territoire de la commune du Grand-Saconnex, feuilles nos 6, 11 et 12, au sud-ouest du village, entre la route de Ferney, à l'est, et l'avenue Edouard-Sarasin au nord.
Suite à l'abandon, par les Services industriels, de leur projet de réservoir à cet endroit, la commune du Grand-Saconnex, en date du 9 décembre 1991, a décidé l'achat des parcelles nos 153 et 154 index 1, feuille n° 6, propriété de la SI La Traviata SA, au lieu-dit le «Chapeau-du-Curé».
Le présent projet de loi a pour but de modifier le régime des zones de ces parcelles situées actuellement en zone agricole pour les affecter à une zone de verdure. La commune a, en effet, l'intention d'en faire un espace public avec quelques installations à destination de loisirs et de délassement (couvert, buvette WC publics, etc.) ce qui est conforme aux possibilités offertes par les alinéas 2 et 3 de l'article 24 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT). De plus la commune envisage de supprimer la circulation au chemin du «Chapeau-du-Curé» qui serait réservé aux piétons et, éventuellement, aux cyclistes. Cette nouvelle zone de verdure constituera un prolongement direct du périmètre scolaire du chemin du Pommier et permettra d'autre part de réaliser une pénétrante de verdure continue et homogène de la campagne Sarazin au parc du château.
Par ailleurs, il est proposé quelques modifications aux limites des zones dans le secteur situé au nord-ouest du périmètre du «Chapeau-du-Curé». En effet, plusieurs résidus d'une ancienne zone agricole subsistent dans ce secteur, lesquels résultent de projets routiers abandonnés. Il est, aujourd'hui, opportun de mettre ces terrains en conformité avec leur affectation réelle.
En résumé, le présent projet de loi propose la création:
d'une zone de verdure d'une superficie de 11'046 m2 pour le périmètre dit du «Chapeau-du-Curé», destinée également à la réalisation de petits équipements communaux tels que couvert, buvette, WC publics, etc.;
d'une zone de développement 4 B d'une superficie de 9'000 m2 pour la parcelle 293;
d'une zone de développement 3 d'une superficie de 5'600 m2 pour la parcelle 879.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est proposé d'attribuer le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 4 B et de développement 3 créées par le présent projet de loi.
L'enquête publique ouverte du 19 mai au 18 juin 1993 n'a suscité aucune observation et le présent projet de loi a fait l'objet d'un préavis favorable, 16 voix contre 2, du Conseil municipal de la commune du Grand-Saconnex, en date du 13 septembre 1993.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
blanche
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
8. a) Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants:
Dans sa séance du 17 juin 1988, votre Grand Conseil a accepté deux motions portant sur le bâtiment des forces motrices (ci-après BFM) de la Coulouvrenière, qui fait partie des ouvrages de régularisation du niveau du lac Léman et restera en fonction à ce titre jusqu'à la mise en service du barrage du Seujet dans le courant de l'année 1994. Ce bâtiment servait également, grâce à l'utilisation de la force motrice provenant de la chute, de station de pompage pour le réseau d'eau potable des Services industriels de Genève (ci-après SIG) jusqu'à la mise en service récente de la nouvelle station de pompage située à la rue de l'Arquebuse.
Les SIG libéreront définitivement le BFM au cours de l'année 1996 avec la mise en service de leur nouveau centre d'exploitation du Lignon et le bâtiment sera restitué à l'Etat de Genève, conformément aux conditions de la concession du 5 octobre 1973 concédée par l'Etat de Genève aux SIG pour l'exploitation de la force hydraulique du Rhône. Ces deux motions ont la teneur suivante :
MOTION 511
concernant la création d'un centre de l'eau (Hydrorama) à Genève
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
la nécessité toujours plus impérieuse de susciter dans la population une prise de conscience de l'importance de l'eau douce et des dangers qui la menacent ;
la place considérable de l'élément aquatique dans l'évolution du pays lémanique en général et à Genève en particulier ;
la volonté d'information exprimée par le Grand Conseil à l'occasion de l'étude de la motion 231 déposée en juin 1983, par M. Raoul Baehler, Hugues Boillat, Charles Bosson, Pierre Pellegrin, Jean Spielmann et Mme Christiane Schellack-Magnenat (Mémorial du Grand Conseil 1984, p. 4670 et ss.) ;
la prochaine désaffectation par les Services industriels du bâtiment des forces motrices de la Coulouvrenière ;
l'importante étude effectuée par l'unité de biologie aquatique de l'université de Genève sur la création d'un centre d'exposition, de documentation, de recherche et d'information dans le bâtiment des forces motrices libéré de sa fonction actuelle,
invite le Conseil d'Etat
à procéder à une étude attentive de l'avant-projet de l'unité de biologie aquatique de l'université de Genève, en vue de la création d'un centre de l'eau (Hydrorama) dans le bâtiment des forces motrices de la Coulouvrenière lorsque celui-ci sera libéré par les Services industriels et de lui faire rapport sur les conditions de faisabilité d'un tel projet.
MOTION 515
concernant la conservation du bâtiment des forces motricesde la Coulouvrenière
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
les divers projets d'affectation du bâtiment des forces motrices de la Coulouvrenière ;
l'intérêt présenté notamment par les projets relatifs aux questions de l'eau, du Rhône et de l'industrie, compatibles avec l'identité historique du bâtiment ;
les démarches préalables à tout projet de transformation du bâtiment préconisées par les conservateurs du patrimoine architectural et par l'ICOMOS en vue de la sauvegarde de cette identité, des valeurs du bâtiment et des installations qui fondent la volonté de conservation exprimée par le Conseil d'Etat ;
le démontage actuel des pompes,
invite le Conseil d'Etat
à procéder à l'inventaire historique et culturel et à l'analyse du bâtiment et de ses installations, de même qu'à l'étude des conséquences sur leur conservation des éventuelles modifications qui seraient rendues nécessaires par des projets pris en considération. A recourir à cette fin à des experts dans le domaine de la muséographie comme de la conservation des monuments et des matériaux. A éviter d'engager des projets de transformation avant de disposer desdites études préalables et d'avoir mené les concertations nécessaires.
Il convient tout d'abord de relever que le BFM présente un grand intérêt tant sur le plan architectural que sur le plan historique comme le relèvent les considérants précités. C'est du reste pour ces motifs que ce bâtiment et la parcelle 79 sur laquelle il a été érigé ont été déclarés monuments classés par arrêté du Conseil d'Etat du 27 juillet 1988. En conséquence, il convient de modifier le moins possible ce bâtiment qui comporte deux ailes, et de le maintenir dans son état actuel, sous réserve des travaux liés au réhaussement du plan d'eau résultant de la mise en service du barrage du Seujet et qui sont pris en charge par les crédits de construction de cet ouvrage.
Afin de permettre le passage de l'eau du bras gauche du Rhône à veine libre pour alimenter l'usine du Seujet en cours de construction, les pertuis des quatre groupes situés dans la petite aile ont dû être entièrement transformés.
Signalons que deux groupes turbines-pompes (nos 5 et 6) ont toutefois été conservés à titre de témoins historiques et mis hors d'eau, y compris leur tuyauterie en sous-sol, les vannes et leur commande par moteur hydraulique.
Dans la grande aile, toutes les turbines-pompes ont été évacuées. Les pertuis des groupes de même que les vannes d'entrée sur le bras gauche avec leur commande sont maintenus en l'état. Les vannes qui doivent être conservées pour assurer l'écoulement du bras gauche du Rhône ne seront pas entièrement fermées afin d'assurer la circulation d'eau fraîche dans les sous-sols immergés.
Il en résulte que d'importants espaces seront à disposition dans la grande aile du bâtiment qui sera complètement dégagée, offrant une surface de plancher de plus de 2'000 m2, et dans la petite aile, d'une surface de 900 m2. Malgré l'intérêt du projet de musée préconisé par la motion (M 511), le Conseil d'Etat a décidé de renoncer à celui-ci vu qu'il est mal adapté à la nature de ce bâtiment de surcroît non chauffé qu'il convient de préserver dans sa substance actuelle, sans parler du coût élevé d'aménagement d'un tel musée et des frais de fonctionnement qui en résulteraient, sa prise en charge étant incompatible avec la situation financière actuelle de l'Etat. A noter que la Ville de Genève, a, elle aussi, renoncé à réaliser de nouveaux musées pour les mêmes motifs.
Par contre, l'espace de la grande aile, complété d'une partie importante de la petite aile du BFM, devrait permettre à moindres frais de créer une superbe salle polyvalente en pleine ville, remarquablement bien située, pouvant servir pour des grandes réunions, des kermesses, des banquets, des expositions, à l'exclusion de manifestations bruyantes tels que concerts. Un tel emplacement fait manifestement défaut en ville et le Conseil d'Etat est arrivé à la conclusion qu'une telle affectation, qui n'exige que très peu de travaux, répondrait véritablement à un besoin et constituerait pour notre canton une infrastructure supplémentaire précieuse dans le domaine social et culturel.
Certes, l'utilisation du bâtiment sera réduite pendant la saison froide, bien que l'installation d'aéro-chauffeurs permettrait néanmoins d'envisager son utilisation en certaines occasions durant cette saison.
L'affectation retenue pour le BFM, après consultation du conservateur des monuments, est celle qui paraît la mieux adaptée en regard de la conservation du bâtiment en son état actuel et elle a l'avantage, de plus, de ne pas entraîner de coûteux travaux d'isolation qui seraient de nature à porter atteinte à la substance du bâtiment.
Il convient, enfin, de préciser que le Conseil d'Etat a décidé de mettre en place dans la petite aile une exposition rappelant les aménagements du Rhône exécutés à la fin du siècle dernier et complétés de certains éléments muséographiques, ce qui répond à la préoccupation de ceux qui, à juste titre, souhaiteraient que la fonction de ce bâtiment et les installations qui lui étaient liées soient mises en évidence aux yeux de la population genevoise et du public intéressé.
Débat
Mme Erica Deuber-Pauli (T). Le bâtiment des forces motrices de la Coulouvrenière appartient à l'un des dispositifs urbains les plus passionnants de l'histoire moderne de Genève. La question, lorsque le bâtiment a été construit, remontait loin dans le temps. D'une part, elle était liée aux inondations récurantes des villes riveraines du Léman, dont nos voisins les plus puissants, les seigneurs de Berne, imputaient la cause aux encombrements de l'émissaire du lac à Genève : barrage de la machine, roues et biefs des moulins en particulier. Des plaintes, des conférences diplomatiques, des mesures du débit et les premiers levés du plan d'eau ont accompagné ces inondations.
D'autre part, la question était liée au pompage de l'eau, dont je ne rappelle pas l'histoire, connue de tous, qui remonte à l'installation d'une première machine hydraulique en 1708 en amont du pont de l'Ile. Pendant plusieurs siècles, cette question a animé les débats dans une grande ignorance technologique et scientifique du problème de l'eau. Elle est même à l'origine des grands progrès que les savants genevois ont faits dans ces domaines. Ce n'est qu'au XIXème siècle que la question a pris un tournant juridique et technologique déterminant, notamment avec la création du Tribunal fédéral, quand les riverains du lac ont pu porter plainte devant le Tribunal fédéral et que s'est engagé ce que l'on a appelé «le procès du Léman.» C'est au terme de ce procès, accompagné d'appels d'offres aux écoles polytechniques et de travaux d'ingénieurs dans toute la Suisse, qu'ont été fixés, grâce aux nouvelles technologies, le niveau maximum que pouvait atteindre le lac et les dispositifs technologiques qui devaient permettre de l'évacuer.
On a associé à cette évacuation le pompage de l'eau qui a permis de livrer non seulement de l'eau à domicile pour les habitants, comme l'ancienne machine hydraulique avait commencé à le faire au XIXème siècle, mais également de l'eau sous pression aux industries, ce qui a permis de débarrasser le paysage des rives de ses moulins et d'expatrier les industries à Sécheron, aux Charmilles, au Creux de Saint-Jean ou à Plainpalais. Cette histoire, unique en son genre en Europe, méritait à coup sûr que l'on classe cet édifice parmi les bâtiments très intéressants du patrimoine industriel. Je suis particulièrement satisfaite, et l'Alliance de gauche avec moi, que le département des travaux publics ait résolu de la manière la plus élégante possible la perspective de conservation de ce bâtiment. D'abord en le classant, ensuite en décrétant qu'étant un bâtiment industriel non chauffé, non isolé on ne pourrait pas en faire une enveloppe pour un musée ou pour des affectations trop subtiles et, finalement, en décidant de l'affecter à un espace public couvert destiné à des manifestations et à des fêtes.
Cependant j'aimerais ajouter quelque chose. Ce bâtiment perd toute compréhension en perdant ses machines et en perdant une partie du dispositif qui le lie au lac. Il est donc essentiel d'assurer le souvenir de son utilisation à travers ce mini-musée si évocateur qui est contenu dans le projet, mais aussi en attachant beaucoup de soins à la conservation des équipements qui sont en amont de l'usine. Cette usine, lorsqu'elle a été établie, procédait d'un plan général du Rhône divisé en deux bras par une digue et des vannes de décharge avec un barrage à la Machine, sur le bras droit d'écoulement creusé à cet effet, un bras gauche industriel conduisant aux dix-huit turbines de l'usine de la Coulouvrenière. Avec la disparition de l'écart des plans, cette digue, ces vannes, ce barrage risquent de perdre leur sens. Je voudrais inviter le département des travaux publics à garder en mémoire ces éléments du dispositif qui appartiennent, au même titre que l'usine, au patrimoine industriel et qu'il conviendra de mettre en valeur de la meilleure façon possible
lorsque sera mis en eau le nouveau barrage du Seujet.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. J'aimerais remercier Mme Erica Deuber-Pauli de l'appui qu'elle a donné à la position du Conseil d'Etat. En votre qualité d'historienne de l'art, vous êtes parfaitement qualifiée - vous venez de le démontrer - pour mettre en évidence non seulement l'intérêt de ce bâtiment, mais également l'intérêt que présentait l'ensemble des aménagements réalisés à la fin du siècle dernier pour régulariser le niveau du lac. Il faut bien dire que ces installations étaient quasiment uniques en Europe et, au moment où il s'est agi de construire le barrage du Seujet, remplaçant la régulation qui se faisait au pont de la Machine à «l'huile de coude» - si je peux m'exprimer ainsi - avec les rideaux qu'il fallait lever toutes les nuits à la force humaine, il s'est posé un grave dilemme au département des travaux publics, mis en évidence par la commission des monuments et des sites, à savoir que l'on allait faire disparaître un élément du patrimoine industriel.
Nous avons essayé de limiter la casse et nous avons pris note à l'époque du préavis de la CMNS en maintenant tout ce qui pouvait être maintenu dans le concept nouveau et, notamment dans ce bâtiment des forces motrices, nous avons conservé deux remarquables turbines Escher-Wyss plus que centenaires et qui fonctionnaient encore, il n'y a pas si longtemps, avec une dizaine d'autres pour alimenter le réseau d'eau potable de notre ville. Nous allons, Madame, veiller - et je vous remercie de votre intervention à ce sujet - à ce qu'un certain nombre d'autres éléments, notamment ceux qui doivent faire fonctionner les vannes sous le bâtiment, soient conservés et, par ailleurs, nous allons récupérer certains éléments qui seront exposés dans le bâtiment. Mais nous avons voulu quand même donner un usage à ce bâtiment, et je crois que celui qui a été prévu par le Conseil d'Etat est celui qui permet le mieux de respecter le patrimoine en question tout en créant au centre-ville un lieu assez exceptionnel pour des activités sociales, culturelles et autres à un moment où manque précisément ce type d'équipements. Cela peut se faire à moindre coût et je suis heureux que ce projet puisse se concrétiser.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
M. Gérard Ramseyer (R). Je m'adresse au président Grobet. Il y a une notion contre laquelle la classe politique ne peut rien, c'est celle de la malice du temps. Il se trouve, en effet, que je réplique au Conseil d'Etat à propos du stade des Charmilles le surlendemain d'une soirée qui a vu le Servette Football Club jouer en Coupe d'Europe devant 18 000 spectateurs.
Le match s'est déroulé dans une enceinte suffisamment usée par l'irréparable outrage des ans pour qu'elle n'ait pu faire le plein de sa capacité, dans un cadre suffisamment dépassé sur le plan de la sécurité pour que l'Union européenne de football ait appliqué, au sujet des installations sportives genevoises, des normes restrictives. Si la sacro-sainte clause de besoin devait être démontrée, le cas d'espèce serait illustratif.
En évoquant la similitude des volontés pour le Zénith et pour le stade des Charmilles, j'ai fait allusion à l'urgence de prendre des décisions et d'agir avec célérité. J'avais souhaité que, pour une fois, notre Grand Conseil ne fasse pas partie de ces lents que dévorent avec appétit les rapides. Et, parmi les rapides, mentionnons l'évolution très accélérée du monde politique, puisque je m'exprime devant un Grand Conseil renouvelé à 70 % en quatre ans. En d'autres termes, il n'y a presque plus de concordance parlementaire entre la genèse d'un projet et son aboutissement, entre les députés qui lancent une idée et ceux qui la votent. La malice du temps, c'est en l'occurrence la coïncidence des événements, c'est aussi le rappel des jours qui s'écoulent inexorablement.
Or, Monsieur le président, entre mon interpellation du 29 novembre 1991 et votre réponse, 678 jours se sont écoulés. C'est pour éviter l'engluement de ce dossier, auparavant grossi de deux études d'impact à compte d'auteur, si je me souviens bien, qu'une pétition a été lancée à mi-parcours du cursus de cette interpellation, à savoir en septembre 1992. Elle a rencontré un vif succès - 12 000 signatures - elle a été examinée avec célérité par la commission des pétitions puisque le 18 mai 1993 cette commission a remis au Grand Conseil un rapport, renvoyé depuis au Conseil d'Etat.
Et c'est à ce dossier que vous avez déclaré, le 8 octobre dernier, vous être attelé. Je vous en suis reconnaissant. Encore que l'image d'un attelage ne m'enthousiasme pas trop. Vous savez que pour tirer un attelage on peut recourir à nombre de créatures ou de machines. Parmi les créatures, le cheval, de préférence le percheron ou le trait breton, mais en tous les cas pas le pur-sang qui correspond tout de même mieux à l'image que vous donnez de vous-même, et que j'enregistre bien respectueusement.
La malice du temps fait que le projet d'un nouveau stade s'est estompé derrière celui de la rénovation de ce stade des Charmilles auquel nous sommes tous très attachés, à commencer par vous, Monsieur le président, puisque vous avez porté les couleurs de ce club vénérable dans la partie de votre jeunesse consacrée à de saines activités, (Eclat de rires.) avant de vous consacrer à l'action politique. (Brouhaha et quolibets fusent.)
Il me suffit donc d'avoir enregistré votre engagement de vous attaquer fermement au projet de rénovation et d'amélioration à tout point de vue des installations des Charmilles.
A n'en pas douter, il y aura d'autres grandes soirées aux Charmilles ces prochaines années et peut-être même ne seront-elles pas exclusivement sportives mais aussi musicales. L'important est que le stade des Charmilles offre toutes les garanties de confort et de sécurité, et nous n'avons pas devant nous 678 nouvelles journées pour décider de commencer à agir. Et le Conseil d'Etat n'a plus la possibilité de faire valoir qu'il s'agit d'un projet mal conçu sur le plan financier : une rénovation du stade des Charmilles simplifie la question en comparaison de l'idée de la construction ailleurs d'une telle infrastructure.
Je remercie donc le Conseil d'Etat de prendre en compte la situation de besoin dans laquelle nous nous trouvons et de considérer dès lors mon interpellation et ma réplique de ce soir comme des interventions complémentaires à la pétition que j'ai déjà eu le privilège de défendre devant ce Grand Conseil.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président...
Une voix. Il était centre avant !
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Ah, non ! J'étais à l'aile gauche à l'époque ! Déjà ! (Eclats de rires, applaudissements.) Figurez-vous qu'on me mettait à l'aile gauche - vous savez qu'en hockey sur terre c'est la position la plus difficile - car il paraît que j'étais assez habile. (Rires.) Cela étant, je remercie M. Ramseyer d'avoir rappelé mes amours non seulement de jeunesse, car je suis toujours membre du Servette, cher Monsieur, club pour lequel j'ai beaucoup d'estime, et je vous remercie de vanter les qualités de ce club ne pensant pas le faire moi-même, ne voulant pas être accusé d'opportunisme.
Vous avez compté avec la même précision que le «Renquilleur» un certain nombre de jours, ceux-ci séparant le développement de votre interpellation et la réponse du Conseil d'Etat. J'en ai déduit - et par d'autres propos que vous m'adressiez tout particulièrement, bien qu'en principe c'est le Conseil d'Etat qui est concerné par les interpellations - qu'il était urgent de répondre. Il se serait peut-être écoulé encore quelques jours de plus si je ne m'étais pas montré insistant pour répondre une fois pour toutes à votre interpellation, parce que certains collègues, vous ne me contredirez pas, pensaient qu'il n'était pas urgent d'y répondre et qu'il fallait encore attendre.
Voyez-vous, j'ai pensé au contraire qu'il fallait répondre même si la réponse n'était pas celle que vous attendiez. Je constate que vous demandiez que l'on aille vite. J'en déduis que vous voulez ma réélection au Conseil d'Etat et que je reste au département des travaux publics, j'en suis ravi de la part d'un des sept candidats de l'Entente ! (Applaudissements.) Soyez rassuré, Monsieur Ramseyer, si vous m'accordez dans le secret des urnes votre confiance (Rires.) et si les concitoyennes et concitoyens de ce canton me l'accordent également, eh bien, je m'engage à relever le «défi» !
Des voix. Non ! Non !
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Les deux défis, bien entendu. Celui d'abord d'être élu, et puis l'autre de s'occuper du stade des Charmilles. Effectivement, je crois que l'on a maintenant pris la voie de la raison parce qu'il n'y a pas si longtemps on a imaginé un premier projet totalement démesuré qui aurait coûté 220 millions et qui s'inscrivait dans cette période d'euphorie où finalement l'on avait perdu tout sens de la réalité dans le domaine immobilier. C'est quelques projets de ce type qui ont mis le marché immobilier genevois dans une situation extrêmement délicate. On a aussi imaginé d'aller installer le stade ailleurs, et vous savez comme moi que mettre un stade comme celui-ci, avec les inévitables nuisances qu'il provoque dans un quartier d'habitation, je ne sais pas si en tant que maire de Versoix vous l'eussiez défendu si c'eût été Versoix.
J'aimerais aussi dire que je suis persuadé que les Genevois qui s'intéressent au football et au sport en général sont attachés au stade des Charmilles tel qu'il est aujourd'hui. Je vois un certain parallélisme avec les bains des Pâquis que certains ont voulu détruire, projet qui a été balayé par la population qui a voulu conserver des bains des Pâquis qui représentaient indiscutablement quelque chose. Je dis que c'est identique en ce qui concerne le stade des Charmilles, mais il est vrai qu'il se pose des problèmes tant du point de vue de la restauration de ce stade que de sa sécurité. J'aimerais alors que l'on s'entende. Il n'y a pas de danger actuellement dans les tribunes autorisées; simplement l'UEFA pose d'autres règles. Pour les matchs européens où l'on est souvent envahi, hélas, de personnes qui ont une conception un peu curieuse du sport, on a des exigences de sécurité pour maîtriser un certain nombre d'acteurs à un spectacle qui ne devraient pas être là. C'est un autre problème.
Je pense que l'on doit arriver à trouver une solution. Je sais que mon collègue Claude Haegi s'occupe activement de ce dossier et le Conseil d'Etat aura certainement l'occasion, sitôt qu'il sera réélu, d'empoigner ce projet avec la poigne que vous souhaitez et de venir le plus rapidement possible devant ce Conseil. (Bravos, applaudissements.)
L'interpellation est close.
M. John Dupraz(R). Concernant le département des travaux publics, si vous me permettez, M. Grobet est responsable des bâtiments de la République et canton de Genève. Or, je constate, après quatre ans d'absence de ce parlement, que les bâtiments sont fort refroidis. Je voudrais que vous donniez des instructions pour la prochaine séance afin que le chauffage soit remis dans cette salle parce que beaucoup de personnes souffrent des frimas ! (Rires, quelques applaudissements.)
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Si vous me permettez de répondre à cette interpellation non inscrite, faite sur-le-champ et qui correspond bien au tempérament de mon ami Dupraz, je dirai simplement que le département des travaux publics s'efforce de respecter le mieux possible les options d'économies d'énergie souhaitées par ce Grand Conseil, et c'est vrai que le département des travaux publics ne s'est pas rendu très populaire en respectant ce que le Grand Conseil a voulu. Même en période électorale, nous ne craignons pas d'être impopulaires !
La commission judiciaire s'est réunie à six reprises pour examiner le projet de loi sur la récusation qui lui a été renvoyé par le Grand Conseil lors de sa séance du 19 septembre 1986 (mémorial des séances du Grand Conseil 1986, p. 3080).
Les séances de commission ont eu lieu en date des 4 et 11 décembre 1986, 8 et 15 janvier 1987 et 14 et 21 mars 1991. La commission a été successivement présidée par Mmes Christiane Brunner et Claire Torracinta-Pache. M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat, chef du département de justice et police, a assisté aux travaux de la commission accompagné de M. François Berdoz, secrétaire adjoint du département de justice et police, puis de M. Rémy Riat qui succéda à M. Berdoz dans ses fonctions.
Historique du projet de loi
Le projet de loi 5315 modifiant la loi sur l'organisation judiciaire en matière de récusation a été déposé le 17 septembre 1981 par M. Arnold Schlaepfer et renvoyé à la commission judiciaire lors de la séance du 8 octobre 1981 du Grand Conseil (mémorial des séances du Grand Conseil 1981, p. 3980-3981).
En substance, le projet de loi de M. Schlaepfer proposait deux innovations majeures en matière de récusation. D'une part, la requête tendant à la récusation d'un magistrat ne devait plus être déposée auprès du président de la juridiction dont le magistrat dépend mais auprès du président d'une juridiction ayant un rang supérieur. Il s'agissait d'une remise en cause du principe selon lequel, en matière de récusation, les magistrats sont jugés par leurs pairs. D'autre part, le projet de loi de M. Schlaepfer prévoyait que l'autorité saisie d'une demande de récusation puisse ordonner des mesures probatoires, si elle l'estimait nécessaire. Il est à relever que M. Schlaepfer prévoyait que le Ministère public ne devait plus être soumis à récusation (voir annexe).
Un premier rapport de la commission judiciaire, déposé le 17 juillet 1986, proposait au Grand Conseil de ne pas entrer en matière.
En substance, le rapport relevait qu'il n'était pas opportun d'introduire des mesures probatoires en matière de récusation, celles-ci ayant pour effet de retarder l'issue d'un litige et de provoquer «un procès dans le procès». D'autre part, aux yeux des personnes qui avaient été auditionnées à l'époque par la commission judiciaire, soit Monsieur le procureur général Raymond Foex et Mme Eliane Hurni, juge d'instruction et présidente de l'association des magistrats du pouvoir judiciaire, un changement de compétence quant à l'autorité pouvant statuer sur une requête de récusation présentait plus d'inconvénients que d'avantages en ce sens qu'il pouvait être une source de confusion entre la récusation et le recours, qu'il donnait compétence pour trancher à un seul magistrat et non à un collège de juges ce qui n'était pas souhaitable et qu'il attribuait les cas de récusation à une autre juridiction, laquelle connaîtrait moins bien les problèmes que la juridiction visée. Concernant la récusation du procureur général, le rapport de la commission judiciaire relevait qu'il s'agissait d'un cas rare ne justifiant pas que l'on légifère à ce seul sujet (voir mémorial des séances du Grand Conseil 1986, p. 3074-3075).
Le rapport de la commission judiciaire, rédigé au début de l'année 1986, fut déposé, comme cela a déjà été indiqué, au mois de juillet 1986.
Durant l'été 1986, le Tribunal fédéral fit connaître sa décision dans le cadre d'une cause qui avait défrayé la chronique l'affaire Medenica. En substance, le Tribunal fédéral a estimé que la législation genevoise rendait le procureur général récusable si, après avoir connu de la cause en qualité de président de la Chambre d'accusation, il entendait soutenir l'accusation.
Le Tribunal fédéral indiquait notamment: «Les règles de la loi sur l'organisation judiciaire permettent d'éviter que la même personne apparaisse successivement dans le même procès à des titres différents, situation que le justiciable pourrait, avec raison et pour des motifs compréhensibles, avoir quelque peine à comprendre et qui pourrait éveiller en lui des appréhensions relatives à la composition des autorités judiciaires. L'application au procureur général des causes de récusation prévues pour les juges par l'article 91 de la loi sur l'organisation judiciaire apparaît comme une garantie donnée aux justiciables par le législateur.»
En raison de l'effet produit à Genève par cette décision de notre plus haute juridiction, le Grand Conseil a décidé de renvoyer le projet de loi concernant la récusation à la commission judiciaire pour que celle-ci examine s'il n'y avait pas lieu de modifier les cas de récusation concernant le procureur général. En outre, la question était posée de savoir quelle devait être l'autorité cantonale compétente pour prononcer une telle récusation (mémorial des séances du Grand Conseil 1986, p. 3078-3080).
Ainsi saisie pour la seconde fois, la commission judiciaire, d'entente avec l'auteur du projet de loi, a limité ses travaux comme le lui demandait le Grand Conseil à la question de la récusation du Ministère public.
Lors de ses séances des 4 et 11 décembre 1986 et 8 et 15 janvier 1987 la commission judiciaire, après avoir décidé de la marche à suivre, a procédé à l'audition de Monsieur le procureur général et a examiné les dispositions de la loi sur l'organisation judiciaire traitant de la récusation du Ministère public.
Après avoir examiné les dispositions qu'il convenait de modifier, la commission judiciaire a décidé de suspendre ses travaux de façon à ne pas interférer avec la procédure Medenica qui n'était pas encore terminée. Il est en effet apparu qu'il n'était pas souhaitable que la commission judiciaire prenne une décision quant à l'autorité compétente pour prononcer la récusation du procureur général au moment où la défense de M. Medenica contestait qu'une telle compétence puisse être exercée par les substituts du procureur général réunis en collège.
La commission judiciaire a repris l'examen du projet de loi portant sur la récusation dans ses séances des 14 et 21 mars 1991. Après avoir décidé de ne pas remettre en question les votes déjà intervenus, elle a cependant procédé à un nouvel examen de l'article 91 de la loi sur l'organisation judiciaire et a, pour l'essentiel, ratifié les décisions déjà prises.
Il sera rendu compte ci-dessous des votes de la commission et des discussions les ayant précédés.
Audition de Monsieur le procureur général
La commission judiciaire a procédé à l'audition de Monsieur le procureur général Corboz lors de sa séance du 8 janvier 1987.
D'emblée, le procureur général indiqua que, à ses yeux, la commission judiciaire devait faire porter ses travaux sur l'article 101 de la loi d'organisation judiciaire.
A cette occasion, outre les causes de récusation du procureur général, la commission judiciaire devait également examiner s'il convenait que les greffiers des tribunaux soient soumis aux mêmes exigences en matière de récusation que les autres magistrats. En effet, les greffiers n'étant pas appelés à rendre des jugements, ils ne devraient pas être récusables dans les mêmes conditions que les juges. Cela étant, le procureur général a relevé que la récusation des greffiers n'était demandée que très rarement.
Quant à la récusation du Ministère public, le procureur général a relevé que la question était délicate dans la mesure où celui-ci était amené à exercer une double fonction: celle de rendre des décisions, notamment en matière d'ordonnance pénale, et celle d'assurer la poursuite pénale. Dans le premier cas l'arrêt du Tribunal fédéral insiste sur ce point le Ministère public est soumis à la garantie d'impartialité découlant de l'article 58 de la Constitution fédérale; en sa qualité d'autorité de poursuite, il doit respecter les exigences d'interdiction de l'arbitraire, telles qu'elles ressortent de l'article 4 de la Constitution fédérale.
Poursuivant ses réflexions, le procureur général se demanda s'il y avait lieu d'abroger totalement l'article 101 de la loi sur l'organisation judiciaire, comme le propose le projet de loi, de telle sorte qu'il n'y ait plus de cause de récusation à son encontre en application du droit cantonal. Une telle décision équivaudrait à ce que les cas de récusation soient directement portés devant le Tribunal fédéral lequel trancherait en appliquant directement les articles 4 ou 58 de la Constitution fédérale. En outre, une abrogation de l'article 101 de la loi d'organisation judiciaire n'empêcherait pas le condamné par ordonnance pénale d'exercer son droit d'opposition et, en cas de classement, l'exercice d'un droit de recours.
Le procureur général indiqua également qu'il pouvait comprendre que l'abrogation de l'article 101, lettre a de la loi sur l'organisation judiciaire apparaisse excessive aux yeux du Grand Conseil. Dans ce cas, il conviendrait à tout le moins que cette disposition ne s'applique pas aux greffiers et que, concernant le Ministère public, elle ne s'applique pas aux cas visés par l'article 91, lettres c et e.
Il convient d'ajouter que, lorsque la commission judiciaire a repris ses travaux en 1991, M. Bernard Bertossa, troisième procureur général consulté quant à ce projet de loi, fut contacté par M. Rémy Riat.
Monsieur le procureur général Bertossa confirma que les lettres c et e de la loi sur l'organisation judiciaire ne devraient pas être applicables au Ministère public. Il approuva par ailleurs les décisions de la commission judiciaire visant, en outre, à rendre inapplicables au Ministère public les lettres h et i de l'article 91 de la loi sur l'organisation judiciaire. Par ailleurs, Monsieur le procureur général Bertossa indiqua que, à ses yeux, c'est la Cour de cassation qui doit être compétente en matière de récusation du procureur général.
Discussions et votes de la commission
La commission judiciaire s'étant considérablement écartée du projet de loi déposé par M. Schlaepfer, elle a été amenée à examiner toutes les dispositions de la loi sur l'organisation judiciaire relatives à la récusation du Ministère public et à voter sur l'opportunité de modifier ces dispositions. C'est dire que les articles de loi qui ont fait l'objet de votes de la commission sont, le plus souvent, sans grand rapport avec le projet de loi de M. Arnold Schlaepfer. Il est cependant rappelé qu'il a été ainsi procédé sur la demande du Grand Conseil et en la présence de l'auteur du projet de loi.
Art. 89
Dès la première lecture de cette disposition, intervenue lors de la séance de la commission judiciaire du 15 janvier 1987, il est apparu que les cas de récusation visés par l'article 89 de la loi sur l'organisation judiciaire devaient être maintenus pour le Ministère public.
L'article 89 prévoit qu'un juge est récusable s'il plaide à titre personnel devant une juridiction qu'il préside, s'il y eu dans les cinq ans qui précèdent la récusation un procès pénal entre lui-même et l'une des parties, s'il a eu, à titre personnel, un procès civil avec l'une des parties dans les six mois qui précèdent la récusation et s'il est directement concerné par l'issue de la procédure en ce sens qu'il est lui-même engagé, à titre personnel, dans une procédure identique à celle où il doit intervenir comme magistrat. Les cas de récusation auxquels se réfère l'article 89 de la loi sur l'organisation judiciaire s'appliquent également si la famille du magistrat est engagée dans les différentes procédures évoquées par l'article 89.
Examinant les articles 89 et suivants de la loi sur l'organisation judiciaire, la commission judiciaire a, par ailleurs, considéré que le terme «juge» figurant dans ces dispositions est applicables à l'activité des magistrats aussi bien en matière de contentieux que de procédures non contentieuses.
Art. 90
Dans la même séance du 15 janvier 1987, la commission judiciaire a estimé que les cas de récusation prévus par l'article 90 de la loi sur l'organisation judiciaire devaient être maintenus pour le Ministère public. L'article 90 de la loi sur l'organisation judiciaire traite de différents cas où le magistrat ou sa famille entretiennent des relations économiques avec l'une des parties (créancier, débiteur, donataire, administrateur, tuteur, etc.).
Art. 91, lettre a
Cette disposition prévoit qu'un magistrat est récusable «s'il a donné conseil, plaidé ou écrit sur le différend».
La commission judiciaire a estimé qu'il était indispensable qu'un substitut, amené à prendre des réquisitions contre l'un de ses anciens clients qu'il a connu comme avocat, puisse être récusé.
La modification de cette disposition en ce qui concerne le Ministère public a donc été refusée par 3 oui, 8 non et 1 abstention.
Ce vote, intervenu le 15 janvier 1987, a été ratifié, sans opposition, lors de la séance du 14 mars 1991 de la commission judiciaire.
Art. 91, lettre b
A teneur de cette disposition, un magistrat est récusable «s'il a sollicité, recommandé ou fourni aux frais du procès».
A l'unanimité, la commission judiciaire a décidé que cette cause de récusation devait être maintenue.
Art. 91, lettre c
Cette disposition prévoit qu'un magistrat est récusable s'il a précédemment eu connaissance du procès «comme juge dans une autre juridiction, comme arbitre ou comme expert».
Le cas visé par l'article 91, lettre c, est celui de l'affaire Medenica où le Tribunal fédéral a considéré que l'article 91, lettre c, de la loi sur l'organisation judiciaire ne permettait pas au procureur général Corboz de requérir contre M. Medenica puisqu'il avait précédemment connu l'affaire en qualité de président de la Chambre d'accusation.
C'est dire que la question du maintien de ce cas de récusation a fait l'objet d'une longue discussion lors des travaux de la commission judiciaire.
Les partisans de l'abrogation de cette disposition ont fait valoir que dans les procédures qui durent longtemps, comme c'est souvent le cas des affaires financières complexes, il était tout à fait possible que le procureur général connaisse de l'affaire tout d'abord comme juge puis, changeant de fonction, comme procureur général.
En raison de l'importance de ces procédures, il serait souhaitable que le procureur général s'en occupe personnellement. Tel ne pourrait pas être le cas si le procureur général est récusable.
C'est cependant le point de vue contraire qui a prévalu.
La majorité de la commission judiciaire a en effet considéré que l'on ne pouvait pas changer la loi à l'occasion d'un seul précédent judiciaire, qui constitue une exception.
En outre, les procureurs généraux restent en fonction pendant une période de temps relativement longue de telle sorte qu'il est peu vraisemblable que le précédent de l'affaire Medenica puisse se reproduire.
A cela s'ajoute que la Convention européenne des droits de l'homme garantit aux parties d'être entendues «équitablement» par un tribunal «indépendant et impartial». Il n'est pas certain qu'une procédure où l'accusateur a eu précédemment une fonction de juge puisse être considérée comme équitable.
A cela s'ajoute que le Ministère public a une double fonction, celle de poursuivre l'accusation et celle de rendre des décisions. Dans cette seconde fonction, il importe que les représentants du Ministère public puissent être récusables à l'égal des autres juges. A cet égard, on relèvera que M. le procureur général Corboz, lors de son audition, a indiqué que si l'on entendait modifier l'article 91, lettre c, il conviendrait de faire une distinction entre les différentes fonctions du procureur général.
Ce sont les raisons pour lesquelles la commission judiciaire a refusé, lors de sa séance du 15 janvier 1987, de modifier cette disposition de la loi sur l'organisation judiciaire par 6 oui, 7 non, 0 abstention.
La question a été évoquée à nouveau lors de la séance du 14 mars 1991 de la commission judiciaire, laquelle s'est prononcée dans une nouvelle composition en raison du changement de législature survenu dans l'intervalle.
Le premier vote de la commission a été confirmé par 4 oui et 7 non.
La netteté du second vote s'explique par le fait que, dans l'intervalle, la loi sur l'organisation judiciaire a été modifiée pour permettre l'élection de deux procureurs.
Les arguments en faveur de la suppression de l'article 91, lettre c, de la loi sur l'organisation judiciaire ont dès lors perdu de leur acuité dans la mesure où les procédures importantes peuvent être réparties entre trois magistrats, le procureur général et les deux procureurs.
C'est dire que s'il existe un cas de récusation contre l'un des procureurs ou contre le procureur général, l'accusation pourra toujours être soutenue par un magistrat expérimenté dont la fonction implique qu'il reste au Ministère public le temps nécessaire pour mener la cause à son terme.
Art. 91, lettre d
Cette disposition prévoit qu'un magistrat est récusable «s'il a déposé comme témoin».
A l'unanimité, la commission judiciaire a estimé que cette cause de récusation devait être maintenue.
Art. 91, lettre e
A teneur de cette disposition, un juge est récusable «s'il a manifesté son avis avant le temps d'émettre son opinion pour le jugement».
Il appartient aux fonctions du Ministère public d'émettre une opinion avant le jugement dans la mesure où il est amené à intervenir à plusieurs reprises dans la procédure avant l'audience de jugement, notamment lorsqu'il s'exprime devant la Chambre d'accusation.
Cette disposition a donc été interprétée jusqu'ici comme donnant la possibilité au Ministère public d'intervenir chaque fois qu'il lui appartenait de le faire. De façon à éviter toute équivoque, la commission a cependant décidé de supprimer ce cas de récusation par 12 oui, 0 non, 1 abstention.
Ce vote a été ratifié à l'unanimité lors de la séance du 14 mars 1991 de la commission judiciaire.
Art. 91, lettre f
Cette disposition, qui peut apparaître désuète, prévoit qu'un juge est récusable «si, depuis l'instance, il a accepté un repas chez l'une des parties ou à leurs frais».
Lors de son premier examen du projet de loi, la commission judiciaire, sans discussion et sans opposition, a décidé du maintien de cette disposition.
Tel n'a pas été le cas le 14 mars 1991 où la question du maintien du cas de récusation prévu par l'article 91, lettre f, a été examinée de façon approfondie.
De façon à manifester sa volonté de supprimer les cas de récusations dilatoires, la commission judiciaire a décidé que l'article 91, lettre f, ne devait plus s'appliquer au Ministère public.
Il a été notamment relevé que cette disposition fait double emploi avec l'article 91, lettre g qui prévoit qu'un magistrat est récusable s'il a reçu des présents de l'une des parties.
Ainsi, par 7 oui, 1 non, 1 abstention, la commission judiciaire a décidé de la suppression de ce cas de récusation pour le Ministère public.
Art. 91, lettre g
A teneur de cette disposition, un magistrat est récusable «s'il a reçu de l'une des parties des présents ou des promesses de présents ou de services».
A l'unanimité, cette disposition est maintenue.
Art. 91, lettre h
Cette disposition prévoit qu'un magistrat est récusable «s'il a fait relativement à la cause quelque promesse ou quelque menace à l'une des parties».
La commission judiciaire a estimé que le pouvoir de classement du Ministère public impliquait la possibilité pour lui de passer des transactions avec les parties, c'est-à-dire notamment de promettre l'immunité en échange de certains renseignements.
Une interprétation trop littérale de cette disposition y ferait obstacle.
Il est cependant bien évident que la possibilité de passer des transactions implique que celles-ci soient passées de façon loyale, c'est-à-dire qu'elles ne soient pas l'effet de la contrainte ou de certaines promesses.
De tels procédés sont toutefois d'ores et déjà prohibés par le serment prêté par les magistrats (voir art. 73 de la loi sur l'organisation judiciaire) dont la violation peut faire l'objet d'une dénonciation auprès du Conseil supérieur de la magistrature.
La commission judiciaire a estimé que, en cas de manquement, la possibilité d'intervention du Conseil supérieur de la magistrature représentait une mesure adéquate et qu'il ne fallait pas qu'une interprétation trop extensive de l'article 91, lettre h, de la loi sur l'organisation judiciaire puisse compromettre les transactions tout à fait légitimes qui peuvent être passées dans le cadre d'une procédure pénale.
C'est dès lors à l'unanimité qu'elle propose la suppression de cette disposition pour le Ministère public.
Art. 91, lettre i
Il s'agit d'une disposition comparable à celle qui vient d'être évoquée dans la mesure où elle prévoit qu'un magistrat est récusable «s'il a, de toute autre manière, témoigné haine ou faveur pour l'une des parties».
Une interprétation trop extensive de cette disposition empêcherait le Ministère public d'exercer ses fonctions d'accusateur dans la mesure où la poursuite d'infractions pénales exige de la fermeté.
Par ailleurs, le serment prêté par les membres du Ministère public comprend l'engagement «de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties».
Pour les mêmes motifs qu'elle a retenus dans son examen de l'article 91, lettre h, de la loi sur l'organisation judiciaire, la commission judiciaire, à l'unanimité, propose la suppression de cas de récusation pour les membres du Ministère public.
Art. 98, alinéa 4 (nouveau)
L'un des motifs pour lesquels le Grand Conseil a renvoyé le projet de loi concernant la récusation à la commission judiciaire était de permettre à celle-ci de réexaminer la question de l'autorité compétente pour prononcer une récusation.
En effet, la loi sur l'organisation judiciaire prescrit actuellement que la requête de récusation est traitée par les membres de la juridiction dont dépend le juge concerné (voir art. 98, al. 2 et 99, al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire).
Tel mode de procéder équivaut, en ce qui concerne les requêtes de récusation dirigées contre le procureur général, à ce que celles-ci soient traitées par les procureurs et les substituts, soit des magistrats qui lui sont subordonnés et à l'égard desquels il exerce un pouvoir hiérarchique (voir art. 41 de la loi sur l'organisation judiciaire).
De façon à ce que les décisions en matière de récusation du procureur général ne soient pas suspectes en raison du rapport hiérarchique existant, la commission judiciaire a estimé qu'il convenait que ces requêtes soient traitées par une autre juridiction.
Il est à relever que le cas dans lequel se trouve le procureur général est exceptionnel dans la mesure où sa fonction est unique dans l'organisation judiciaire genevoise.
En effet, les présidents des autres juridictions sont assistés d'un vice-président et exercent, le plus souvent, leurs tâches dans le cadre d'un tournus qui amène chaque membre de la juridiction, en raison de l'ancienneté, à en assumer la présidence.
Avec l'accord de l'auteur du projet de loi, la commission judiciaire a décidé à l'unanimité de compléter l'article 98 de la loi sur l'organisation judiciaire par un nouvel alinéa ayant la teneur suivante:
«Si la requête est dirigée contre le procureur général, elle est remise au président de la Cour de cassation».
Il est en effet apparu que la Cour de cassation, de par la place qu'elle occupe dans l'ordre judiciaire, devait être l'autorité compétente pour statuer en matière de récusation du procureur général.
Concernant les procureurs et les substituts, une décision quant à une requête de récusation continuera à être prise par leurs pairs, comme c'est le cas au sein des autres juridictions.
Art. 99, al. 2 (nouveau)
La modification de l'article 98, par laquelle est désignée l'autorité compétente pour recevoir la requête de récusation, entraîne la modification de l'article 99 dans lequel est mentionnée l'autorité qui traite la requête de récusation.
A l'unanimité, la commission judiciaire a adopté le libellé suivant:
«Si la récusation est dirigée contre le procureur général, la décision est prise par la Cour de cassation».
Art. 99, al. 3 et 4
En raison de l'insertion d'un article 99, alinéa 2 nouveau, l'ancien alinéa 2 de l'article 99 devient l'alinéa 3 et l'ancien alinéa 3 de l'article 99 devient l'alinéa 4.
Art. 101, lettre a
L'article 101, lettre a, constitue la clé de voûte en matière de récusation du Ministère public puisque c'est cette disposition qui prescrit que les dispositions en matière de récusation des juges s'appliquent également au procureur général, aux procureurs et aux substituts.
Dès le début de ses travaux, la commission judiciaire s'est trouvée placée devant les possibilités suivantes: soit abroger l'article 101, c'est-à-dire enlever toute possibilité de récuser le procureur général à teneur de la législation cantonale, soit amender l'article 101, lettre a, soit en rester au statu quo.
Comme on l'a vu ci-dessus, contrairement à ce que préconisait le projet de loi déposé par M. Schlaepfer, la commission judiciaire a décidé de maintenir l'article 101, lettre a, tout en amendant cette disposition.
La commission judiciaire a eu l'occasion de s'exprimer à deux reprises sur ce point, au début de ses travaux, lorsqu'elle a décidé d'examiner dans le détail les différents cas de récusation et, une seconde fois, lorsqu'elle a abordé la question de la suppression de l'article 101.
Les deux votes quant à la suppression de l'article 101 sont intervenus lors de la séance du 15 janvier 1987 de la commission judiciaire et ont donné les mêmes résultats: 3 oui, 7 non, 3 abstentions.
Suite à l'examen des articles 89, 90 et 91, l'article 101, lettre a, de la loi sur l'organisation judiciaire a été rédigé comme suit:
«Les dispositions ci-dessus sur les causes de récusation et sur le mode de les proposer et de juger sont appliquées:
a) au procureur général, aux procureurs et aux substituts, sauf les lettres e, f, h et i de l'article 91;»
Art. 101, lettre b (nouvelle)
L'article 101, lettre a, prévoyait les mêmes causes de récusation pour le Ministère public et les juges d'instruction de telle sorte que les magistrats relevant de ces deux juridictions étaient cités à l'article 101, lettre a.
Vu le résultat des travaux de la commission, il a été nécessaire de créer un article 101, lettre b, traitant du seul cas des juges d'instruction.
Aucune autre modification législative n'intervient pour ces magistrats.
Art. 101, lettre c
En raison de l'édiction d'un nouvel article 101, lettre b, le cas des juges de paix, précédemment traité à l'article 101, lettre b, fait l'objet d'un article 101, lettre c, nouveau.
Aucune autre modification n'intervient concernant les magistrats de cette juridiction.
La commission judiciaire tient à relever ici que la précision selon laquelle les cas de récusation s'appliquent également aux «fonctions de juridiction non contentieuse» des juges de paix est superflue dès lors que le terme «juge» figurant aux articles 89, 90 et 91 de la loi sur l'organisation judiciaire s'applique indistinctement à ceux-ci, qu'ils agissent dans le cadre d'un litige ou dans le cadre d'une procédure non contentieuse.
Art. 101, lettre d (nouvelle)
La commission judiciaire a eu une discussion approfondie sur la question de savoir si les cas de récusation applicables aux juges doivent continuer à s'appliquer aux greffiers.
Quand bien même la question peut être considérée comme académique, les cas de récusation des greffiers étant rarissimes, il est apparu nécessaire à la commission judiciaire de la traiter pour une double raison.
D'une part, Monsieur le procureur général Corboz avait relevé que cette disposition semble inutile. D'autre part, la tendance actuelle de développer le rôle des greffiers en procédant à la nomination de greffiers-juristes exige que l'on soit attentif à ne pas abroger une disposition qu'il faudra peut-être réintroduire quelques années plus tard par une nouvelle modification de la législation.
Finalement, il est apparu à la commission judiciaire que les greffiers devaient rester récusables dans les mêmes conditions que les juges lorsqu'ils sont amenés à exercer une activité de nature juridictionnelle. En revanche, lorsque les greffiers sont totalement subordonnés au juge, une récusation ne devrait pouvoir intervenir que dans des circonstances exceptionnelles.
C'est la raison pour laquelle la commission judiciaire a décidé, à l'unanimité, d'amender l'article 101 en indiquant que les causes de récusation s'appliquent «aux greffiers des tribunaux, par analogie».
Par ailleurs, la disposition concernant les greffiers qui figurait précédemment à l'article 101, lettre c, fait l'objet d'un nouvel alinéa en raison de l'édiction d'un article 101, lettre c nouvelle.
Conclusions
Au terme de son examen du projet de loi, c'est à l'unanimité que la commission judiciaire vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter les modifications de la loi sur l'organisation judiciaire résultant de ses travaux.
annexe
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue:
LOI
modifiant la loi sur l'organisation judiciaire
(E 2 1)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:
Art. 98, al. 4 (nouveau)
4 Si la requête est dirigée contre le procureur général, elle est remise au président de la Cour de cassation.
Art. 99, al. 2 (nouveau,les al. 2 et 3 anciens devenant les al. 3 et 4)
2 Si la récusation est dirigée contre le procureur général, la décision est prise par la Cour de cassation.
Art. 101 (nouvelle teneur)
Les dispositions ci-dessus sur les causes de récusation et sur le mode de les proposer et de juger sont appliquées comme suit:
a) au procureur général, aux procureurs et aux substituts, sauf les lettres e, f, h et i de l'article 91;
b) aux juges d'instruction;
c) aux juges de paix, même en ce qui concerne leur fonction de juridiction non contentieuse;
d) aux greffiers des tribunaux, par analogie.
La motion de Mme Bobillier et de M. Vial a été déposée le 10 octobre 1991 et renvoyée en commission lors de la séance du Grand Conseil du 28 novembre 1991 (Mémorial des séances du Grand Conseil 1991, p. 5165).
Réunie sous la présidence de Mme Françoise Saudan, la commission judiciaire a examiné cette motion lors de sa séance du 2 avril 1992. Assistaient aux travaux de la commission M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat, chef du département de justice et police, lequel était accompagné par M. Bernard Duport, secrétaire adjoint du département de justice et police et M. Guy Baer, major de police, commandant de la gendarmerie.
Intervention de M. Bernard Ziegler
S'exprimant au nom du Conseil d'Etat, M. le président Ziegler déclara d'emblée que les considérants de la motion étaient inacceptables.
Sans qu'il y ait lieu d'épiloguer longuement, il apparaît que les attaques personnelles dirigées contre le procureur général sont inadmissibles.
De même, concernant la notion d'«intérêt public», M. Bernard Ziegler rappela que la pratique des autorités en matière d'occupation d'immeubles a été établie d'entente entre le Conseil d'Etat et le procureur général. A cet égard, M. Bernard Ziegler remit à la commission la copie d'un mémoire réponse adressé par le procureur général au Tribunal fédéral dans le cadre d'une affaire d'occupation d'immeubles (il est à relever que, depuis la date à laquelle la commission judiciaire a traité la motion, le Tribunal fédéral a statué et qu'il a approuvé la pratique des autorités cantonales).
Poursuivant son intervention, M. Bernard Ziegler répondit aux diverses questions dont fait état l'exposé des motifs de la motion (voir annexe).
Les réponses données aux questions sont les suivantes :
Ad 1 Environ 150 appartements répartis sur une vingtaine d'immeubles étaient squattés au 10 octobre 1991.
Ad 2 Approximativement 300 squatters les occupaient.
Ad 3 Aucune plainte de propriétaires n'a été déposée faisant état de dégâts commis dans les immeubles occupés, lesquels, il convient de le rappeler, sont voués à la démolition ou à la transformation. Par ailleurs, aucune action en dommage et intérêts n'a été introduite contre l'Etat, alors que cela arrive en matière de non-évacuation de locataires pour des raisons humanitaires.
Ad 4 Seuls deux sous-brigadiers s'occupent à temps partiel du contact continu avec les milieux du squat. Bien entendu, de plus amples effectifs sont mobilisés lorsqu'il s'agit de faire intervenir la force publique pour une évacuation.
La nécessité de garder un contact, de tenir des listes des occupants à jour, s'explique par le fait qu'il faut éviter que des îlots ne se soustraient au contrôle de l'Etat et ne deviennent des refuges pour les hors-la-loi en tous genres. Le département de justice et police est intransigeant sur ce point.
En ce qui concerne les frais d'eau, de gaz et d'électricité, les Services industriels les estiment à F :
600'000.
de 1978 à 1980
30'000.
en 1989
100'000.
en 1990
90'000.
en 1991
Ad 5 Les Services industriels coupent les fluides seulement dans les immeubles qui ne sont plus occupés par des locataires réguliers et quand les rapports d'usage sont résiliés. Les squatters peuvent demander le rétablissement des rapports d'usage, si le propriétaire y consent par écrit, ce qui est parfois le cas. Dans les autres situations, les squatters rétablissent eux-mêmes les fluides avec la conséquence que les Services industriels déposent plainte auprès des autorités compétentes.
Ad 6 Le Conseil d'Etat n'entend pas fournir l'identité des occupants d'immeubles. Il peut toutefois préciser que les squats sont occupés par des étudiants ou de jeunes travailleurs. Il arrive que parmi eux se trouvent des jeunes gens appartenant à des familles de magistrats ou de hauts fonctionnaires et des personnes sans occupation définie.
Ad 7 On ne voit pas à quoi se réfère le terme «collusion» employé par les motionnaires. Cela étant, dans le cas cité, les squatters ont eux-mêmes reconnu avoir été renseignés par des locataires évacués.
Ad 8 Le fait de communiquer le montant d'une amende ayant fait l'objet d'un arrêt du Tribunal administratif dont les jugements sont publics n'est pas constitutif d'une violation du secret de fonction.
Ad 9 Renseignements pris auprès des PTT, aucune coupure de téléphone n'est intervenue.
Ad 10 Cette question apparaît en contradiction avec la précédente. Cela étant, le Conseil d'Etat est en mesure d'indiquer qu'aucune écoute téléphonique n'a eu lieu.
Ad 11 L'assistance de la force publique est assurée aux propriétaires qui désirent avoir accès à leur bien, par exemple pour faire des relevés.
Ad 12 L'Etat n'entend prendre aucune mesure pour éviter de nouveaux squats, car il s'agit d'un problème dont les propriétaires sont exclusivement responsables. Ces derniers peuvent faire surveiller leurs immeubles vides par des agences privées ou les louer provisoirement à l'AGECAS.
En conclusion, M. Bernard Ziegler releva que la motion est inutile dans la mesure où, à Genève, la politique de l'Etat en matière d'occupation d'immeubles est clairement définie et qu'elle a été exposée à plusieurs reprises publiquement. Tel n'est pas le cas dans d'autres cantons, tels Berne ou Zurich, qui, de fait, traitent de la même manière les questions liées aux occupants d'immeubles sans le dire explicitement.
Discussion et vote de la commission
Le commissaire mpg. présent justifia la dureté des considérants par l'émotion qu'avaient suscité, au moment du dépôt, les questions liées aux squats.
Il releva que l'invite de la motion était imprécise dans la mesure où les motionnaires ne réclament pas la création d'une commission d'enquête. En conclusion, considérant que le Conseil d'Etat avait répondu à la motion, il estima que celle-ci devait être acceptée par la commission, sans renvoi au Conseil d'Etat.
Tel n'a pas été l'avis de la majorité de la commission qui a considéré qu'il ne fallait pas entrer en matière et que, dès lors, la commission n'avait pas à répondre en détail aux questions posées par les motionnaires, ce d'autant que la question des occupations d'immeubles a été abondamment traitée par le Grand Conseil, notamment par la commission législative.
Conformément à la décision de la commission, le rapporteur entend donc préciser que les réponses données par le Conseil d'Etat aux motionnaires n'engagent pas la commission.
Le vote d'entrée en matière a donné les résultats suivants : 1 pour (mpg.), 6 contre (1 pdt., 3 soc., 2 éco.), 5 abstentions (2 rad., 2 lib., 1 dc.).
Voilà les raisons pour lesquelles, Mesdames et Messieurs les députés, la commission judiciaire vous propose de ne pas entrer en matière sur la motion concernant le problème du squat à Genève.
Annexe : M 756
ANNEXE
PROPOSITION DE MOTION
concernant le problème du squat à Genève
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
qu'il est patent que le procureur général se refuse à appliquer les lois ou prétend pouvoir les appliquer quand cela lui convient ;
qu'il invoque pour ce faire un intérêt public à ménager les squatters ;
que la question de savoir s'il y a un intérêt public à ménager les squatters n'est pas de la compétence du procureur général mais du Grand Conseil qui peut décider des mesures adéquates à prendre,
invite le Conseil d'Etat
à créer une commission d'enquête aux fins d'élucider complètement le problème.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames etMessieurs les députés,
Pour faire suite aux travaux qui ont été menés à bien par la commission législative relatifs à une affaire particulière de squat, la commission d'enquête devra faire toute la lumière sur les zones d'ombre qui subsistent encore dans la façon dont sont réglés actuellement les problèmes de squat à Genève.
En effet, il est impératif que les réponses aux questions suivantes nous soient fournies par les autorités compétentes :
1. Combien d'immeubles étaient partiellement ou totalement squattés au 10 octobre 1991 ?
2. Combien de squatters occupaient ces locaux ?
3. Quels ont été les dégâts commis dans les immeubles occupés au 10 octobre 1991 par les squatters ?
4. A combien s'élèvent les frais occasionnés pour l'Etat par les squatters : indemnités aux propriétaires, frais d'eau, de gaz et d'électricité, salaires des fonctionnaires s'occupant des squatters, à quel titre que ce soit y compris de la police ?
5. Dans le cadre des Services industriels de Genève, qui prend la responsabilité de rétablir les raccordement du gaz ou de l'électricité ?
6. Quelle est la situation personnelle de chaque squatter, y compris leur formation professionnelle, la qualité et la durée de leurs études, leur situation de fortune, afin de déterminer ce que coûterait la prise en charge par un service social des personnes vraiment nécessiteuses ?
7. Y a-t-il eu collusion entre les fonctionnaires du département des travaux publics et la police dans l'affaire du 75, rue des Eaux-Vives ?
8. Qui a commis une violation du secret de fonction en communiquant l'amende prononcée contre le propriétaire du 75, rue des Eaux-Vives ?
9. Qui a coupé le téléphone de la dernière locataire du 75, rue des Eaux-Vives et pendant combien de temps et à quel téléphone était-elle reliée dans l'intervalle ?
10. S'il s'agit de la police, a-t-elle suivi la procédure prévue concernant les écoutes téléphoniques ?
11. Quelle mesure la police entend-elle prendre pour que les propriétaires puissent en tout temps faire les constatations nécessaires quant à l'état de leur immeuble jusqu'à l'évacuation des squatters ?
12. Quelles mesures le département de justice et police prend-il pour empêcher de nouveaux cas de ce genre ?
En conclusion et afin de permettre une enquête complète, nous demandons au Conseil d'Etat de délier les fonctionnaires de leur secret de fonction à l'égard de la commission.
Pour que nos institutions retrouvent leur entière crédibilité auprès des citoyens, nous vous remercions de l'accueil que vous voudrez bien réserver à cette proposition de motion que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la motion est rejetée.
La commission des transports a étudié le projet de loi 7024 lors de sa séance du 28 septembre 1993 tenue sous la présidence de M. Nicolas Brunschwig, en présence de MM. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat, Christof Stucki, directeur des TPG, Corminboeuf, directeur administratif, et Challet, chef comptable.
La commission a constaté que le budget 1994 des TPG est conforme à l'enveloppe financière déterminée par le département des finances et que l'offre demeurera stable sur le plan kilométrique, mais que certaines améliorations pourront être apportées grâce à l'étalement des fréquences lorsque la demande le permet.
L'accord signé en 1993 avec le personnel a été prorogé pour 1994. Il est précisé également en ce qui concerne la ligne Y (Blandonnet-Thoiry) que les Français prennent à leur charge la totalité du déficit d'exploitation des kilomètres exploités sur leur territoire.
Les tarifs demeurent inchangés, à l'exception du prix du trajet court qui passera de 1,20 F à 1,40 F. M. Stucki a informé la commission de l'intention de M. Stich de supprimer la rétrocession aux transports publics des droits sur le carburant. Cela pourrait entraîner pour les prochaines années une baisse des recettes d'environ 3 millions.
Concernant les investissements, M. Stucki précise que les travaux de construction du Bachet-de-Pesay sont maintenant terminés, et que les adaptations faites à l'heure actuelle sont déjà intégrées dans le budget de fonctionnement.
La commissison insiste une fois de plus pour que le compte de construction soit maintenant rapidement bouclé afin que les charges qui en découlent figurent enfin dans le budget des TPG.
En conclusion, M. Ziegler a informé la commission sur l'évolution de la situation suite à la loi sur la circulation 2005.
Le chantier de la ligne 13 a démarré avec un peu de retard dû à une rediscussion à la baisse des adjudications. Mais ce retard n'aura pas d'influence sur l'achèvement des travaux l'année prochaine.
Les travaux de planification sont achevés en ce qui concerne les prolongements en direction des Acacias et du Grand-Lancy, sauf le futur prolongement en direction de Plan-les-Ouates.
On est un peu moins avancé en ce qui concerne l'embranchement en direction de la place des Nations.
Pour ce qui est du métro, on considère maintenant qu'il serait préférable de réaliser d'abord le tronçon Meyrin-Cornavin plutôt que le tronçon Cornavin-Rive. On a estimé aussi qu'il fallait associer au projet le plus tôt possible nos voisins français et des discussions ont actuellement lieu dans le cadre du Comité régional franco-genevois.
Forte de toutes ces informations, la commission des transports, vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, à l'unanimité moins une abstention (MPG), d'accepter le projet de loi 7024 tel que présenté par le Conseil d'Etat.
Premier débat
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Dans ce projet de loi, il est fait mention d'une augmentation in extremis des tarifs sur les parcours limités à trois arrêts qui passent de 1,20 F à 1,40 F. Je dis in extremis, car, dans le fascicule d'horaire 93-94, il n'est pas fait mention de cette augmentation. Aussi notre groupe demande aux TPG de renoncer à cette augmentation pour les raisons suivantes.
Les TPG doivent être populaires. Il faut que la population ait le sentiment que l'effort qu'elle fait, en utilisant les bus et les trams, lui soit rendu en retour par une non-augmentation des tarifs déjà élevés. Cette année, il n'y a pas eu d'amélioration notable des services offerts par les TPG et, suite à la mise en vigueur de Circulation 2000, les automobilistes ayant renoncé à leur véhicule augmentent de ce fait le nombre des usagers des TPG. Enfin, plus les tarifs seront bas, plus il y aura d'usagers, ce qui, en plus du fait de désengorger la ville des voitures, augmente par multiplication mathématique simple les recettes des TPG.
Nous pensons que plus les tarifs sont bas, plus nous aurons un nombre élevé d'usagers. Si le tarif est élevé et s'il y a moins d'usagers, les recettes des TPG ne changeront pas; donc nous demandons aux TPG de renoncer à cette augmentation - même minime - de 20 centimes, ce qui constituera un acte de bienveillance envers la population qui fait des efforts.
M. Jean Spielmann (T). Il n'est pas dans mon intention de revenir sur le budget tel qu'il a été approuvé en commission. J'aimerais simplement attirer l'attention de ce Grand Conseil sur un certain nombre de décisions qui sont en passe d'être prises au niveau de la Confédération et qui vont poser à nos collectivités des problèmes. Je veux bien sûr parler des problèmes liés au trafic régional, à la diminution d'une bonne partie des subventions prévues pour les transports régionaux, et notamment les établissements de transports collectifs.
Ces problèmes ne toucheront pas directement le canton en tant que tel, mais toujours est-il que les budgets de ces différentes compagnies vont être diminués d'environ 60 millions. De plus, une autre décision est à l'examen et elle pourrait avoir des influences très négatives sur les budgets de notre collectivité. Je pense à la rétrocession des droits de douane sur les carburants, puisque ceux qui ont lu attentivement le budget se rendront compte que c'est une rétrocession de l'ordre de 3,3 millions pour les TPG; or il est aussi question de la supprimer.
Cela signifie que ça posera problème non seulement à la compagnie de transports urbains mais aussi à la compagnie générale de la navigation sur le lac qui devrait, elle aussi, subir la non-rétrocession de ces subventions des
droits de douane sur le diesel. Il y a là toute une série de problèmes qui devraient être traités avec sérieux par le Conseil d'Etat, car toutes ces mesures pénaliseront de manière considérable le trafic d'agglomération. Si l'on regarde globalement les chiffres tels qu'ils se présentent avec les projets qui sont à l'étude aujourd'hui, on constate une augmentation de 4 à 4,5 % des dépenses générales pour les CFF, mais une réduction de plus de 8 % des subventions que la Confédération accorde aux autres compagnies de transport. La suppression des rétrocessions des droits sur les carburants représente une réduction de 3,3 millions de francs de subventions.
Je crois que le Conseil d'Etat serait bien inspiré d'examiner ce problème avec sérieux. Je me pose la question de savoir s'il ne s'agirait pas aussi, pour les différents groupes de ce Grand Conseil, d'examiner une démarche commune pour que ces rétrocessions restent la propriété du canton, parce qu'il n'est pas normal de pénaliser ainsi les transports publics. En augmentant la taxe sur l'essence, nous voulions mettre en place des mesures d'incitation financière pour favoriser le transport public. Or, on est en train de pénaliser les transports publics urbains, ce qui va à l'encontre du bon sens et qui, à long terme, coûtera bien plus cher que quelques économies réalisées. Je proposerai à ce Grand Conseil, pour les prochaines séances, une démarche commune des différents groupes pour tenter d'intervenir avant que ces décisions ne soient prises.
M. Nicolas Brunschwig (L). Je suis étonné de la réflexion de Mme Leuenberger concernant l'augmentation des tarifs dans la mesure où, dans le cadre de l'étude de ce budget à la commission des transports, ce projet de budget avait été voté à l'unanimité moins une abstention du MPG - qui n'est manifestement pas de même tendance que le groupe écologiste - et il ne me semble pas que, dans le cadre de la discussion, nous ayons eu beaucoup de débats sur ce sujet.
Cette hausse des tarifs extrêmement limitée touche une catégorie tout à fait particulière, à savoir les trajets de moins de trois arrêts; elle ne touche donc que les utilisateurs occasionnels. Il est clair que dans le contexte actuel il apparaît difficile qu'il n'y ait absolument aucune augmentation et c'est déjà tout à fait remarquable que les TPG présentent un budget acceptable avec des hausses de tarifs aussi limitées que celles-ci. Je tiens aussi à faire remarquer que les subventions de l'Etat aux TPG sont de l'ordre de 105 millions pour l'année 1994, sans compter toutefois les charges financières liées au Bachet-de-Pesay qui ne figurent toujours pas dans les comptes des TPG vu que le chantier n'est pas bouclé. Selon M. Ziegler, il n'y peut rien, car cela provient exclusivement du département des travaux publics, (Sourires.) mais c'est peut-être une fois de plus l'occasion de dire que nous aimerions bien que cela ne soit plus le cas.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je voulais dire à M. Brunschwig que je n'ai pas du tout dit que nous refusions le budget des TPG. Nous l'acceptons. J'ai juste demandé qu'il y ait un geste symbolique, celui de renoncer à l'augmentation parce que plus les tarifs seront bas et plus nous aurons d'usagers, donc le résultat mathématique financier final sera identique. (Interrogations sur les bancs de la droite.)
M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat. Lors de l'établissement de leur budget, les TPG se sont efforcés de respecter les enveloppes qui avaient été fixées par le Conseil d'Etat. Ils y sont totalement arrivés, c'est même le seul établissement public qui y soit parvenu sans augmentation substantielle de ses tarifs parce qu'il aurait été facile de reporter sur les voyageurs les charges supplémentaires de l'entreprise et la stagnation des subventions. Le conseil d'administration des TPG a trouvé une formule qui n'augmente ni le prix des abonnements, ni le prix du billet de base qui reste à 2 F. Ce sont différentes autres positions mineures des tarifs qui sont touchées. La seule position de quelque importance est celle évoquée par Mme Leuenberger.
Si vous voulez persister dans la voie que vous nous proposez d'emprunter ce soir, Madame la députée, il vous faut déposer un amendement pour voter deux millions de subventions de plus aux TPG. Personnellement je regretterais que l'on ne respecte pas l'autonomie de gestion de l'entreprise qui prend ses responsabilités dans ce domaine.
Plus important est le problème qu'évoquait M. Spielmann qui est extrêmement angoissant pour l'avenir des entreprises de transports publics de ce pays dans la mesure où nous nous rendons compte - et M. Spielmann connaît bien ce problème en sa qualité de conseiller national - que la Confédération ne prend pas assez en compte le trafic d'agglomération dans sa conception du financement des réseaux de transports en Suisse. Dieu sait s'il y a des voyageurs à gagner dans le trafic d'agglomération. Les objectifs de la politique fédérale des transports, des déplacements, de la protection de l'environnement devraient mieux prendre en compte la gestion du trafic d'agglomération par les entreprises de transports publics. Mais nous avons de très grosses difficultés à faire reconnaître cette spécificité du transport d'agglomération par l'autorité fédérale.
Le problème qu'évoque M. Spielmann, le conseiller aux Etats Gilles Petitpierre l'a évoqué récemment, et lors de la prochaine réunion avec les députés aux Chambres fédérales nous discuterons ce problème. Je crois qu'il est effectivement nécessaire, comme le suggère M. Spielmann, que Genève fasse une démarche commune, par le biais de ses députés aux Chambres, pour empoigner ce problème spécifique du subventionnement du trafic d'agglomération et éviter ce transfert de charge rampant qui se fait constamment de la Confédération vers les cantons et dont nous avons une nouvelle illustration avec le problème que vous évoquez.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
approuvant les budgets de fonctionnement et d'investissementde l'entreprise des Transports publics genevoispour l'exercice 1994
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 160 A, alinéa 3, de la constitution genevoise, du 24 mai 1847;
vu les articles 28, 29, alinéa 2, et 36, lettre a, de la loi sur les Transports publics genevois, du 21 novembre 1975,
Décrète ce qui suit:
Article 1
Budget de fonctionnement
Le budget de fonctionnement des Transports publics genevois pour l'année 1994 est approuvé conformément aux chiffres suivants:
a) charges 6205'061'500 F
b) produits 6204'346'841 F
Art. 2
Budget d'investisse-ment
Le budget d'investissement des Transports publics genevois pour l'année 1994, comprenant 8'656'500 F de dépenses nouvelles, est approuvé.
Art. 3
Contributions de l'Etat
1 L'Etat participe à la couverture des charges de fonctionnement par le versement:
a) d'indemnités tarifaires 643'007'000 F
b) d'une contribution de desserte 624'618'840 F
c) d'une contribution pour amortisse-
ment et intérêts des investissements 631'960'000 F
d) d'une contribution pour inconvénient
de trafic 665'000'000 F
e) d'indemnités de desserte complé-
mentaire 661'689'000 F
2 Ces contributions sont inscrites au budget de fonctionnement 1994 de l'Etat, sous le département de justice et police.
Art. 4
Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1994.
I. Introduction
Le 12 mai 1989, votre Grand Conseil renvoyait au Conseil d'Etat la motion M 589 concernant les moyens destinés à lutter contre la criminalité économique et le trafic de drogue.
Le jour précédent, le Conseil d'Etat vous avait présenté un rapport consécutif à diverses motions concernant l'amélioration du fonctionnement de la justice (Mémorial du 11 mai 1989, p. 2438 et ss.). Ce rapport répondait déjà en partie à la M 589, dans la mesure où la problématique de la répression du crime organisé ne saurait être isolée de celle, plus vaste, de l'organisation de l'appareil judiciaire dans son ensemble.
Depuis 1989, d'importants progrès ont été accomplis en Suisse dans la lutte contre le crime organisé, à tous les niveaux.
II. Mesures prises au niveau fédéral
1. Les modifications du code pénal
1.1. Le 1er août 1990, sont entrés en vigueur les articles 305 bis et 305 ter qui répriment respectivement le blanchissage d'argent et le défaut de vigilance en matière d'opérations financières (FF 1989 II 961).
1.2. Le 30 juin 1993, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à un second train de mesures destinées à intensifier la lutte contre le crime organisé (FF 1993 III 269). Il propose notamment d'introduire dans le code pénal des dispositions permettant d'incriminer la participation à une organisation criminelle (art. 260 ter) et facilitant la confiscation des avantages patrimoniaux obtenus de manière délictueuse, en particulier de la substance économique des organisations criminelles (art. 59).
Si les Chambres fédérales adoptent ces nouveaux articles, notre pays disposera, du point de vue du droit matériel, d'un arsenal législatif permettant de réprimer efficacement le crime organisé.
2. Le projet de création d'un office central de répression du crime organisé
Le 6 août 1993, le département fédéral de justice et police a consulté la Conférence des chefs des départements cantonaux de justice et police sur un projet de modification du code pénal portant création d'un office central de répression du crime organisé (art. 351 octies et ss.), ayant pour mission de :
traiter les informations montrant l'implication nationale et internationale d'organisations criminelles ;
coordonner les enquêtes intercantonales et internationales et recueillir les renseignements propres à prévenir les infractions des organisations criminelles ;
analyser les cas de crime organisé, établir des rapports de situation et brosser un tableau des menaces à l'attention des autorités de poursuite pénale ;
fonctionner comme office pour l'échange national et international des informations et installer des agents de liaison à l'étranger.
Dans sa réponse, la Conférence a relevé que la création d'une telle instance de coordination répondait aux voeux des cantons, dans la mesure où la lutte contre le crime organisé constitue une priorité pour la sauvegarde des libertés individuelles, de l'Etat de droit et, en définitive, de la démocratie elle-même. Elle a souligné qu'en cette matière, l'application du principe de la proportionnalité conduisait à la conclusion évidente que l'efficacité de la lutte contre le crime organisé devait l'emporter largement sur la sauvegarde de la sphère privée.
La création de cet office est à mettre en relation avec le second train de mesures du Conseil fédéral destinées à intensifier la lutte contre le crime organisé ; elle doit être proposée aux Chambres simultanément.
3. La réforme de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP)
3.1. La collaboration au niveau international entre les diverses autorités confrontées au crime organisé est essentielle, cette forme de criminalité ignorant souvent les frontières.
Il est notoire que le système d'entraide en vigueur dans notre pays, caractérisé par sa lourdeur et sa complexité, est loin de répondre aux besoins des autorités étrangères, les renseignements qu'elles sollicitent leur parvenant souvent trop tard pour leur être utiles.
A la suite des événements survenus au département fédéral de justice et police et après le dépôt du rapport de la commission d'enquête parlementaire (CEP), le Conseil fédéral a accepté un postulat de cette dernière l'invitant à renforcer son action sur tous les plans afin de faciliter les procédures internationales d'entraide judiciaire en Europe notamment, et d'éliminer les obstacles inutiles. Le Conseil fédéral a donc chargé le département fédéral de justice et police de préparer un avant-projet de révision de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, lequel a été mis en consultation au cours de l'été dernier.
3.2. Dans sa réponse du 27 septembre 1993 à M. Arnold Koller, conseiller fédéral, le Conseil d'Etat a jugé que cet avant-projet restait très insuffisant, et il a énoncé les principes auxquels devrait répondre une véritable réforme de l'EIMP :
l'octroi de l'entraide ne devrait être soumis en Suisse à aucun recours, sous la seule réserve de la transmission à l'étranger de fonds saisis en Suisse, une telle remise ne représentant jamais un caractère d'urgence ;
l'autorité étrangère requérante devrait être seule compétente pour trancher les contestations relatives aux mesures dont elle a requis l'exécution ;
les magistrats et policiers chargés de la poursuite à l'étranger devraient être autorisés à assister en Suisse aux actes d'entraide ;
sous cette forme, l'assistance devrait être réservée par voie de traités et sous condition de réciprocité aux Etats dans lesquels la primauté du droit est garantie.
4. La révision de la procédure pénale fédérale
Le 18 août 1993, le Conseil fédéral a adopté le message concernant une révision de la loi fédérale sur la procédure pénale.
Il s'agit là également de satisfaire à une exigence formulée par la CEP, en relevant le procureur de la Confédération de toutes ses fonctions policières. Outre les attributions usuelles d'un procureur général, ce dernier se verra confier, notamment, la tâche de déléguer la poursuite pénale à un canton et de décider de la réunion des procédures en cas de compétence multiple entre Confédération et cantons ou entre cantons.
III. Mesures prises au niveau intercantonal
1. Rien ne sert de se doter, du point de vue du droit de fond, de moyens permettant de réprimer sévèrement le crime organisé si leur application doit être mise en échec par le cloisonnement des différentes procédures cantonales.
Or, les articles 352 et suivants du code pénal, qui réglementent l'entraide judiciaire intercantonale en matière pénale, ne permettent pas une coordination suffisamment efficace entre les cantons, alors que, souvent, le crime organisé étend ses ramifications dans plusieurs cantons.
Ce constat a conduit la Conférence des chefs des départements de justice et police, présidée par M. Bernard Ziegler, à confier à sa commission «criminalité économique» l'élaboration d'un concordat sur l'entraide judiciaire et la coopération intercantonale en matière pénale, qu'elle a adopté le 5 novembre 1992 et qui a été approuvé par le département fédéral de justice et police le 4 janvier 1993.
Ce concordat représente un progrès décisif pour la lutte contre le crime organisé dans notre pays : grâce à lui, l'autorité judiciaire en charge d'une procédure pénale dans un canton pourra intervenir directement dans tous les cantons signataires pour y accomplir, selon les règles de procédures de son propre canton, tous les actes qu'elle jugera utiles à la manifestation de la vérité.
Genève peut s'enorgueillir d'être le premier canton à avoir adhéré à ce concordat, la loi adoptée par le Grand Conseil à cet effet (Mémorial du 10 juin 1993, p. 3058 ss.) étant entrée en vigueur le 29 juillet 1993. Il a été rejoint récemment par le canton de Fribourg, de sorte que le concordat va être publié au Recueil officiel des lois fédérales et entrer en vigueur. Genève et Fribourg seront prochainement rejoints par la majorité des autres cantons, où la procédure d'adhésion est en cours devant le gouvernement ou le parlement.
2. La commission «criminalité économique» de la Conférence des chefs des départements de justice et police, également présidée par le chef du département de justice et police de notre canton, et dont fait partie M. Bernard Bertossa, procureur général, vient par ailleurs d'adopter, à l'intention des autorités de poursuite pénale des cantons, une recommandation ayant trait à la mise en oeuvre d'un article de la Convention de diligence des banques destiné à permettre le respect par les établissements bancaires des exigences d'identification découlant de l'article 305 ter du code pénal précédemment mentionné.
Il s'agit de faire en sorte que les autorités répressives adoptent dans ce domaine une attitude commune afin d'éviter la tentation d'un «tourisme bancaire» de la part des titulaires de comptes globaux.
3. Le 7 juin 1993, la brigade des stupéfiants du canton de Genève a été autorisée à exploiter, en collaboration avec celle de 7 autres cantons-pilotes, le système provisoire de traitement des données en matière de drogues «DOSIS» géré par l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants rattaché à l'Office fédéral de la police.
Le système DOSIS a pour but de faciliter :
la tâche de coordination de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants telle qu'elle découle de l'article 29 de la loi fédérale sur les stupéfiants ;
l'exécution des enquêtes préventives et des enquêtes de police judiciaire relatives aux cas de trafic de drogue ;
la coopération avec les autorités cantonales de police par l'exploitation appropriée de renseignements de nature à prévenir les infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et à faciliter la poursuite des délinquants ;
la collaboration, dans les limites des prescriptions régissant l'entraide judiciaire, à la lutte menée par d'autres Etats contre le trafic illicite des stupéfiants.
IV. Mesures prises au niveau cantonal
1. Les modifications de la Constitution et de la loi sur l'organisation judiciaire
La Constitution et la loi sur l'organisation judiciaire ont été profondément modifiées afin de permettre une restructuration du Parquet et de l'instruction. Ces réformes ont été inspirées par le rapport du 15 février 1990 établi par le consultant que le département de justice et police avait chargé d'étudier le fonctionnement de l'instruction.
1.1. Depuis le 24 mars 1990, le collège des juges d'instruction comprend une section formée d'au moins 4 juges spécialisés à qui sont, en priorité, attribuées les affaires complexes de nature économique ou criminelle. Les juges de cette section sont déchargés de la permanence.
1.2. Le nombre des juges d'instruction a été porté de 12 à 15 (Mémorial du 26 janvier 1990, p. 443 et ss.).
1.3. La loi constitutionnelle du 3 mai 1991 est entrée en vigueur le 25 janvier 1992. Elle prévoit que les fonctions du Ministère public sont exercées par un procureur général, 2 procureurs et des substituts (Mémorial du 3 mai 1991, p. 1760 et du 28 novembre 1991, p. 5087 à 5092).
Les postes de procureurs ont été créés pour permettre au procureur général de s'appuyer sur deux magistrats expérimentés et permanents, à même de traiter, sur la durée, des dossiers complexes, notamment de nature économique.
Globalement, le nombre des magistrats du Parquet n'a en l'état pas varié. Cette juridiction se compose actuellement du procureur général, de 2 procureurs et de 5 substituts contre 7 précédemment.
2. Les modifications du code de procédure pénale
Sur le plan de la procédure pénale, diverses innovations ont été introduites afin de réorganiser les attributions de certaines juridictions et d'éviter les recours dilatoires dans les affaires complexes. Les principales modifications intervenues sont les suivantes :
2.1. Depuis le 8 décembre 1990, la Cour d'assises connaît des infractions au code pénal passibles de réclusion pouvant dépasser 5 ans à propos desquelles le procureur général entend requérir une peine supérieure à 5 ans de réclusion. Quant à la Cour correctionnelle, elle peut prononcer des peines jusqu'à 5 ans de réclusion, voire jusqu'à 7 ans et demi de réclusion, par exemple en cas de récidive (Mémorial du 12 octobre 1990, p. 4677 et ss.).
2.2. Le pourvoi en cassation contre les ordonnances de renvoi en assises ou en correctionnelle a été supprimé par la loi du 17 mai 1990 entrée en vigueur le 14 juillet 1990. Prévu à l'origine comme un contrôle supplémentaire, on s'est aperçu que ce pourvoi était interjeté surtout dans les affaires complexes dans le but de freiner le déroulement de la justice et d'atteindre si possible la prescription (Mémorial du 17 mai 1990, p. 1092 et ss.).
2.3. Un grand nombre de recours dirigés contre des actes d'instruction ne sont plus, depuis le 14 juillet 1990, recevables avant la communication des dossiers au procureur général (ibidem).
2.4. Enfin, les magistrats du Parquet et de l'instruction peuvent prononcer actuellement des ordonnances de condamnation jusqu'à 6 mois d'emprisonnement grâce à une loi du 30 avril 1993, entrée en vigueur le 26 juin 1993 (Mémorial 1993, p. 2447 et ss.).
L'objectif principal de ces réformes, soit l'amélioration de l'efficacité des juridictions pénales, a été atteint. Reste en suspens le problème des appels des jugements du Tribunal de police, dont le nombre charge considérablement le rôle de la Chambre pénale de la Cour de justice.
3. La spécialisation de la police
A fin 1988, a été créé un «groupe argent sale» qui a finalement été intégré à la brigade financière.
Depuis quelques années, l'accent est mis sur l'aspect financier du trafic de drogue, du crime organisé et de leurs filières. Le groupe «argent sale» s'occupe essentiellement des problèmes de blanchissage d'argent.
La police dispose donc de spécialistes capables de mener des enquêtes souvent de longue haleine pour faire échec à la criminalité économique sous toutes ses formes.
Les instructions dans son domaine et les objectifs sont fixés par le procureur général au cours de séances de travail avec la police. La coordination entre magistrats et policiers est excellente et a permis d'obtenir des résultats appréciables dans le domaine considéré.
A titre d'exemple, depuis le début de 1993, un montant total avoisinant 12 millions de francs a pu être confisqué comme produit du crime organisé et versé dans les caisses de l'Etat.
V. Evaluation de la situation actuelle
L'arsenal législatif à disposition des autorités répressives apparaît suffisant. Il reste cependant à éliminer certaines lenteurs dues à la procédure et à mieux exploiter les forces disponibles et les outils informatiques à disposition. L'exploitation d'une base de données informatiques généralisée se heurte encore à des problèmes de protection des données.
VI. Propositions de réformes
En vue d'améliorer encore l'efficacité de la répression du crime organisé au niveau genevois, les trois réformes suivantes sont envisageables, qui pourraient voir le jour au cours de la prochaine législature.
1. La première d'entre elles concerne l'institution du jury, à propos de laquelle le Grand Conseil a renvoyé la motion M 817 au Conseil d'Etat le 25 septembre 1992 (Mémorial 1992, p. 5155). Les exigences légitimes de la jurisprudence en matière de motivation des verdicts pénaux pourraient conduire à confier à une Cour formée de magistrats de carrière et d'assesseurs spécialisés le jugement des crimes et délits de nature économique.
2. Il conviendra d'étudier la possibilité de réunir l'instruction et le Ministère public sous l'autorité du procureur général, à l'instar de ce qu'ont fait les cantons de Bâle-Ville et du Tessin. Il devrait en résulter une importante rationalisation du travail actuellement fait à double par les magistrats de ces deux juridictions. Cette forme d'organisation judiciaire se caractérise par sa souplesse et une grande efficacité.
3. On pourrait envisager d'introduire dans notre législation le «plea bargain», connu du droit anglo-saxon. Cette institution permet au Ministère public, dans certains cas, de négocier avec l'inculpé, sous le contrôle d'un juge, la peine qui va être infligée. Elle présente certaines analogies avec l'ordonnance de condamnation, simplifie l'instruction et permet de faire l'économie de longues audiences de jugement.
VII. Conclusions
Les motionnaires ont relevé avec pertinence que, dans le domaine de la lutte contre la criminalité économique, la persévérance et la perspicacité des diverses autorités et services étaient déterminantes.
Personne ne contestera la volonté des autorités genevoises de combattre le crime organisé.
Le procureur général élu par le peuple au printemps 1990 a fait de cette lutte l'objectif principal de sa politique criminelle, afin d'éviter à notre canton une justice à deux vitesses, prompte à punir les petits délinquants mais inapte à combattre efficacement le crime organisé.
Le soutien du Conseil d'Etat dans cette lutte est acquis à la magistrature judiciaire. Il en va de même de celui du Grand Conseil, ainsi qu'il l'a démontré en adoptant les lois rappelées ci-dessus.
PLAN DU RAPPORT
I.
Introduction
II.
Mesures prises au niveau fédéral
1.
Les modifications du code pénal
1.1.
Les articles 305 bis et 305 ter
1.2.
Les futurs articles 59 et 260 ter
2.
Le projet de création d'un office central de répression du crime organisé
3.
La réforme de l'EIMP
3.1.
La nécessité d'une réforme
3.2.
Les propositions du Conseil d'Etat
4.
La révision de la procédure pénale fédérale
III.
Mesures prises au niveau intercantonal
1.
Le concordat sur l'entraide judiciaire et la coopération en matière cantonale
2.
La recommandation de la commission «criminalité économique» de la Conférence des chefs des départements de justice et police
3.
La participation au système DOSIS
IV.
Mesures prises au niveau cantonal
1.
Les modifications de la Constitution et de la loi sur l'organisation judiciaire
1.1.
La création d'une section spécialisée à l'Instruction
1.2.
L'augmentation du nombre des juges d'instruction et le renforcement de la présidence de cette juridiction
1.3.
La création des postes de procureur
2.
Les modifications du code de procédure pénale
2.1.
La correctionnalisation
2.2.
La suppression du pourvoi en cassation contre les ordonnances de renvoi de la Chambre d'accusation
2.3.
Le regroupement des recours en fin d'instruction
2.4.
Les ordonnances de condamnation
3.
La spécialisation de la police
V.
Evaluation de la situation actuelle
VI.
Propositions de réformes
1.
Réforme de l'institution du jury
2.
La réunion de l'Instruction et du Ministère public
3.
L'introduction du «plea bargain»
VII.
Conclusions
Débat
M. Chaïm Nissim (Ve). Je suis de ceux qui ressentent souvent un profond malaise, de la tristesse et de la colère quand je vois dans les journaux que des dictateurs sanguinaires, comme Marcos ou Duvalier, «planquent leur fric» en Suisse et profitent des lourdeurs et des contradictions de nos législations cantonales pour repousser de plusieurs années toute décision concernant leur argent. Je ressens souvent aussi un malaise lorsque j'apprends qu'un avocat domicilie une société écran servant en fait à blanchir l'argent de la drogue. Aussi, j'encourage vivement M. Ziegler à insister
auprès des autorités fédérales pour faire avancer soit l'idée de concordat intercantonal, soit celle d'une législation fédérale.
Après avoir lu le rapport sur cette motion 589, je me suis demandé si ce rapport était satisfaisant ou non. Comme je ne savais pas très bien, j'ai consulté mon collègue Cramer qui comprend ces choses-là beaucoup mieux que moi et ce qu'il m'a dit m'a laissé sur ma faim. Je ne suis pas juriste mais je suis assez malin pour comprendre qu'il y a un dilemme entre la «protection de la personnalité privée» et «l'efficacité de la lutte contre la criminalité économique». On parle de ce dilemme à la page 2. Des avocats, comme Robert Cramer ou Michel Halpérin, sont axés plus sur la protection de la personnalité privée et M. Ziegler davantage sur l'efficacité. Personnellement, je suis comme vous, Monsieur Ziegler. Je suis un partisan de l'efficacité dans ce domaine, même si je ne suis pas toujours capable de juger, pour chaque mesure, de son efficacité.
Aussi, votre réponse à la consultation fédérale, telle qu'elle est résumée au bas de la page 3, me paraît plutôt bien, et que pour le reste je vous encourage à faire de votre mieux.
Mme Erica Deuber-Pauli (T). Je remercie le Conseil d'Etat de son rapport très complet sur les améliorations apportées aux moyens de lutte contre la criminalité économique et je me félicite de sa détermination à soutenir cette lutte. Cependant, vous le savez tous ici, l'égalité devant la loi est une fiction. Aujourd'hui, telle qu'elle a été élaborée par son auteur, la loi de procédure pénale accorde un extraordinaire avantage aux responsables de crimes économiques. En effet, cette procédure contient la possibilité unique en Europe de recourir contre tout acte judiciaire imaginable. La motivation de l'introduction d'une telle possibilité était honorable, notre collègue Chaïm Nissim vient de le rappeler. Il s'agissait d'assurer une protection maximale à l'individu face à l'appareil judiciaire.
Mais en pratique cette loi de procédure pénale genevoise a abouti à produire, d'une part, des inégalités devant la loi et, d'autre part, une protection accrue du crime organisé contre les poursuites judiciaires. Ce résultat peut être constaté à peu près dans toutes les grandes affaires de criminalité économique. Les possibilités de recours offertes par la procédure pénale portent sur trois niveaux. Premièrement, chaque acte d'entraide judiciaire internationale - par exemple la demande de séquestration de compte par un juge américain pour prendre cet exemple - peut être contesté par recours au Tribunal, en Cour d'appel et au TF. Deuxièmement, on peut faire recours contre toute ordonnance du juge d'instruction, par exemple, la mise sur écoute téléphonique de l'inculpé, la saisie de compte, l'incarcération... (Troublée par le bruit, Mme Deuber-Pauli s'interrompt quelques instants.)
J'aimerais bien que l'on se taise à mes côtés ! ...une demande de communication de document, un appel à des témoins, etc. Troisièmement, on peut faire recours contre les différentes ordonnances de la Chambre d'accusation qui évalue le dossier pour savoir à quelle juridiction de jugement il doit être transmis. Ces trois niveaux de recours sont des spécificités de la loi genevoise de procédure pénale. Enfin, lorsque le dossier arrive devant une juridiction de jugement et que le procès commence, il existe encore, comme partout ailleurs, une disposition permettant de nouveaux recours contre chacune des décisions de la juridiction de jugement.
Quelles sont les conséquences de la situation genevoise ? Premièrement, avec un bon avocat n'importe quelle affaire peut aller à la prescription. Deuxièmement, celui ou celle qui peut payer les provisions d'avocat peut se payer un appareil formidable de soustraction à la justice; c'est donc une inégalité patente. Troisièmement, en raison de tout ce qui précède, l'appareil judiciaire est totalement surchargé de recours et ne peut pas faire son travail d'enquêtes et de répression.
Un mot encore sur les définitions du crime organisé et du crime économique et sur leurs rapports financiers.
Le crime organisé implique des capitaux acquis par des actes criminels, puis recyclés ou réintroduits dans des circuits financiers légaux. Le crime économique implique des sociétés légales qui, occasionnellement, pratiquent l'escroquerie au crédit, la fraude fiscale par falsification de documents, etc. Il existe une dynamique qui va en s'accroissant entre les deux.
Premièrement, les cartels du crime organisé prennent actuellement une extrême importance du fait des énormes profits dus au trafic de la drogue, du fait aussi, en Europe, de l'unification douanière qui ouvre des espaces immenses à l'action de ces capitaux et, en Suisse, à cause du secret bancaire et de l'absence d'une loi obligeant les banquiers à dénoncer les clients qu'ils jugent suspects. A cause du silence qui résulte de ce secret et de la complexité institutionnelle, on trouve à Genève toutes les mafias du monde.
Deuxièmement, malheureusement au moment même où le crime organisé s'attaque à la société démocratique, la pollue, infiltre ses marchés et ses circuits ordinaires, à la manière d'un cancer, le crime économique augmente du simple fait de la crise. Quand les entreprises subissent d'énormes pressions de la part de la concurrence et des contraintes de restructuration, la tentation est énorme de produire, par exemple, de faux bilans. En conséquence de ce que je viens d'exposer - et qui ne vous est pas inconnu - je demande au Conseil d'Etat, dans ces circonstances de développement de la criminalité économique, de réfléchir aussi avec la justice aux moyens de limiter les moyens de recours en permettant à la justice d'enquêter et, si besoin est, de punir.
M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat. Je suis sidéré par l'intervention de Mme Deuber-Pauli. Apparemment, elle n'assistait pas à la séance du Grand Conseil du 17 mai 1990 quand précisément votre Grand Conseil a décidé de supprimer les voies de recours auxquelles Mme Deuber-Pauli fait allusion. Le recours contre l'ordonnance de renvoi prononcée par la Chambre d'accusation a été supprimé dans la modification de la procédure pénale que vous avez votée il y a trois ans. Ce nouveau droit est entré en vigueur et, le même jour, vous avez apporté d'autres modifications à la procédure pénale - le rapport le rappelle - en supprimant la plupart des recours contre les décisions du juge d'instruction.
Les réformes de procédure cantonale qui devaient être faites ont été votées par votre Grand Conseil. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de remercier ce Grand Conseil d'avoir examiné ce projet de loi avec diligence et avec détermination. Il reste un certain nombre de problèmes qui relèvent plus particulièrement de la collaboration intercantonale. Sur ce point, Monsieur Nissim, ce sont les cantons qui ont mis sur pied un concordat et non pas la Confédération, puisque le concordat est précisément une voie de collaboration intercantonale, et d'ailleurs c'était la seule manière d'aboutir - et elle a bien abouti - dans ce domaine-là puisque qu'actuellement le concordat est en voie de ratification dans la plupart des cantons suisses, sauf le canton des Grisons qui, pour le moment, n'est pas partant. Je l'ai encore vérifié hier à la conférence des chefs des départements de justice et police. La procédure d'adhésion est en route partout. Les cantons ont vu la nécessité de supprimer leurs barrières intérieures. Chacun connaît les réflexes de fédéralisme du canton voisin, le canton de Vaud : or M. Ruey m'a confirmé hier que le Conseil d'Etat vaudois avait également décidé d'aller de l'avant avec la ratification du concordat.
La collaboration intercantonale est en bonne voie. La grosse difficulté, Madame la députée, c'est la collaboration internationale avec le problème de la révision de la loi fédérale d'entraide internationale en matière pénale. Les grosses pannes qui se produisent dans les procédures d'entraide internationales proviennent de la loi fédérale, que le Conseil fédéral a promis de revoir. Il a soumis en consultation l'été passé un projet dont le Conseil d'Etat a estimé, en accord avec les autorités judiciaires, qu'il ne donnait pas satisfaction. Il a demandé une révision plus déterminée de la loi fédérale d'entraide internationale en matière pénale. Tout de même, les progrès qui ont été faits dans ce domaine sont importants, énormes.
La Suisse est l'un des trois pays d'Europe qui a pu ratifier la convention contre le blanchissage d'argent parce que c'est un des premiers pays d'Europe, il faut quand même le souligner, qui a adapté son droit de fonds. Les pays voisins qui nous donnaient volontiers des leçons à ce sujet n'ont pas encore de normes dans ce domaine aussi efficaces que celles que nous avons introduites dans le code pénal suisse pour lutter contre le blanchissage d'argent. Nous commençons à en voir le résultat dans les enquêtes qui sont en cours. Vous connaissez la confiscation spectaculaire de cet été. L'affaire suivante, qui est en train de tourner, porte non pas sur 12 millions, mais sur 50 millions. Les affaires actuellement à l'instruction sont extraordinairement importantes mais nécessitent effectivement un effort considérable du pouvoir judiciaire et de la police pour les faire aboutir. Je crois qu'il existe en Suisse actuellement une détermination d'aller de l'avant dans ce domaine. Il est vrai, on assistait autrefois à une espèce de sentiment d'impuissance des magistrats concernés devant l'énormité de la tâche. Cette mentalité a profondément évolué, et je crois qu'il est important de souligner l'évolution qui s'est opérée dans notre pays à cet égard.
M. Chaïm Nissim (Ve). Monsieur Ziegler, on m'a dit hier aussi que le canton du Tessin, qui était l'un de ceux où on blanchissait le plus d'argent sale, ne voulait pas rejoindre le concordat intercantonal. Est-ce vrai ?
M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat. Le canton du Tessin - son conseiller d'Etat me l'a confirmé - est également en train d'examiner la ratification du concordat, mais il l'examine dans le cadre d'une révision plus large de sa procédure pénale. Cela risque de prendre un peu plus de temps dans ce canton, mais il n'a pas du tout refusé d'adhérer au concordat. C'est un partenaire effectivement important de ce domaine, puisque le Tessin ainsi que Zurich, Genève et Bâle sont les cantons les plus concernés. Il est aussi important que d'autres cantons comme Zoug adhèrent au concordat. La procédure est en route dans l'ensemble de ces cantons.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
La commission a traité cette pétition en 5 séances sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon. La commission avait demandé le renvoi sur le bureau du Grand Conseil d'une pétition précédente portant le n° 951/1, dont l'invite était diamétralement opposée. La commission avait attendu l'ouverture de l'école du Pré-Picot qui devait permettre de résoudre une partie de la problématique avant de traiter cette pétition.
Rappel
Une pétition avait été déposée le 6 décembre 1991, adressée au Conseil administratif de la Ville de Genève.
Cette pétition est traitée dans le rapport n° 116 A de la commission des pétitions du conseil municipal accepté lors de la séance plénière du 24 juin 1992 avec quelques amendements. Ce rapport contient notamment quelques informations telles que:
une analyse sur la provenance des élèves fréquentant l'école des Allières;
la création future de passages protégés (secteur Allières-Frank-Thomas);
le plan de circulation de l'école des Allières;
diverses correspondances avec le conseil d'administratif de la Ville de Genève (2 avril 1992), le chef de la police cantonale (25 octobre 1991), le chef du département de justice et police (16 décembre 1993).
Suite à ce rapport, la pose de barrières de sécurité sur les trottoirs a suscité une action nocturne, elles avaient été enlevées et déposées sur la rue. Elles n'ont par la suite jamais été remises.
Déposée le 28 août 1992, une pétition appuyée par 32 signatures est intitulée «Accès à l'école des Allières».
Elle demande: un libre accès aux voitures avec possibilité de stationner temporairement sur les trottoirs.
La commission des pétitions réunie le 19 avril 1993 a pris en considération l'ensemble de la problématique et a décidé de déposer la pétition 951/1 sur le bureau du Grand Conseil à titre d'information.
Pétition actuelle: P 951/2
Déposée en septembre 1992, la pétition appuyée par 129 signatures de parents d'élèves est intitulée «Accès des abords de l'école des Allières».
Elle demande: l'application des recommandations du conseil municipal de la Ville de Genève et la pose d'agrafes afin de garantir le passage et la sécurité des usagers des trottoirs de l'avenue des Allières.
Le 30 août 1993, la commission des pétitions, sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, a auditionné une délégation des pétitionnaires conduite par Mme J. Grosjean.
Les pétitionnaires confirment que vu les dangers encourus par les enfants, ils entendent maintenir leur pétition. Les problèmes de circulation aux abords de l'école des Allières sont tels que les enfants ne sont en sécurité ni sur la chaussée, ni même sur les trottoirs.
Ils demandent que l'on puisse garantir la sécurité au moins sur les trottoirs.
Les pétitionnaires ne demandent pas pour autant que la rue soit interdite à la circulation, mais que des mesures soient prises sans tarder.
Les pétitionnaires se sont adressés à l'office des transports et de la circulation, concernant les problèmes posés, mais sans résultat.
Le 13 septembre 1993, audition de M. F. Wittwer, directeur de l'office des transports et de la circulation (OTC).
M. Wittwer connaît bien les problèmes aux accès de cette école et a reçu de nombreuses réclamations.
L'OTC a auditionné les différentes parties concernées dans cette affaire. La situation est quasiment inextricable.
L'OTC a également proposé de décréter la rue des Allières, rue résidentielle et placé des épingles sur les trottoirs. La priorité serait ainsi donnée à la sécurité des enfants.
L'OTC a aussi enregistré de nombreuses plaintes déposées par des riverains et des parents d'élèves à cause du stationnement de véhicules de frontaliers.
Conclusions
En vue de garantir un maximum de sécurité pour les enfants sur le chemin de l'école, la commission a donc décidé de renvoyer à l'unanimité cette pétition au Conseil d'Etat et lui propose de déclarer cette voie «rue résidentielle».
Débat
M. Max Schneider (Ve), rapporteur. Cette pétition est la deuxième sur ce sujet. Une première pétition où les parents d'élève demandaient d'avoir plus de facilité d'accès à l'école avait été traitée l'année dernière. La pétition qui nous concerne ce soir demande justement un peu plus de sécurité pour les enfants qui se rendent à l'école et qu'il y ait un peu moins de voitures qui entravent leur chemin piétonnier.
Ce que l'on peut souhaiter, c'est que le Conseil d'Etat, lors de la construction de prochaines écoles, prenne les mesures qui s'imposent pour la sécurité des enfants lorsque ceux-ci s'y rendent à pied. Il est inconcevable de revoir une deuxième école des Allières dans notre canton où des risques sont encourus par les parents comme par les enfants. Cette pétition acceptée à l'unanimité par notre commission nous a donné beaucoup de problèmes parce qu'il n'y avait pas de possibilité d'avoir un accord entre les parents qui amènent leurs enfants en voiture et les enfants allant à pied. On peut donc souhaiter que les choses s'améliorent pour les nouvelles planifications.
Mises aux voix, les conclusions de la commission (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
La commission de l'environnement et de l'agriculture s'est réunie le 30 mars, sous la présidence de M. Roger Beer et en présence de M. Mascherpa, directeur du centre horticole de Lullier. Elle avait à l'ordre du jour l'étude du rapport du Conseil d'Etat précité. Rappelons que celui-ci avait été renvoyé en commission, le Grand Conseil l'ayant jugé quelque peu insuffisant au plan des réalisations concrètes.
Travaux de la commission
Celle-ci a procédé à l'audition de l'un des motionnaires, ex-député, le docteur Guy Loutan qui exprime son désappointement. En effet, explique-t-il, la motion n'avait pas pour but de demander au Conseil d'Etat des considérations toutes générales sur la nature, ni de l'inciter à faire ou à soutenir de nouvelles études, de nouveaux inventaires ou répertoires, mais bien d'identifier, pour les protéger, des biotopes en zones urbaines et suburbaines. Lui-même en avait signalé deux et il espérait que le département, travaillant avec les associations de protection de la nature, en identifie et protège d'autres. Or celles-ci ne semblent pas même avoir été consultées à propos de cette motion.
M. Loutan explique combien il est important de maintenir la diversité de la faune et de la végétation en zones urbaines et suburbaines, non seulement pour l'équilibre de la nature, mais aussi pour le sentiment de beauté que fait naître celle-ci, pour le plaisir et la santé des habitants : il ne faut pas négliger les fonctions de filtre de la végétation et son rôle stabilisateur sur le climat ; pour le moment, il constate une minéralisation des milieux habités. Il signale que selon une étude menée par notre collègue Burdet, 10% d'espèces en voie de disparition vivent dans ces milieux urbains et suburbains, ce qui fait également leur intérêt. Il signale le problème des talus fauchés trop tôt et trop souvent. Il insiste sur les difficultés que rencontre la faune pour se nourrir et procréer lorsque ces espaces naturels sont séparés les uns des autres par divers aménagements. Les mesures à prendre seraient simples et peu coûteuses : des panneaux explicatifs, des barrières modestes, une carte indiquant ces biotopes en zone urbanisée. Le motionnaire estime en outre que puisque la protection de ces biotopes est un objectif général, le canton pourrait agir par voie de règlements ou de circulaires, mais également à travers l'enseignement, y compris à l'école d'architecture et d'ingénieurs. Une véritable prise de conscience doit avoir lieu : maintenir les biotopes existants. D'ailleurs, il est plus facile et moins coûteux de conserver l'environnement plutôt que de le recréer.
Les commissaires relèvent d'abord qu'il serait sans doute intéressant de connaître les surfaces à conserver, avec l'accord des propriétaires, mais que souvent des parcelles paraissant à l'abandon, sont en réalité en attente d'une future utilisation ;
que par ailleurs il ne faut pas trop planifier mais laisser à la nature une certaine spontanéité, celle-ci étant inventive et ayant un certain pouvoir d'adaptation ;
que l'entretien des talus est souvent nécessaire puisque une végétation haute empêche de voir les cyclistes ;
que la question soulevée est également du ressort des communes et que Onex, par exemple, a établi un plan directeur de protection et de plantation des haies en milieu urbain, réalisé en partie avec les enfants de la commune, cette initiative ayant suscité un large intérêt ;
que d'attirer l'attention du public sur un biotope peut lui faire courir un risque de dégradation ;
que de surcroît, des personnes protestent contre l'état naturel de certains lieux qu'elles jugent «en désordre».
Un commissaire évoque également un programme lancé en Ville de Genève avec les écoles pour aménager des jardins près de celles-ci et qu'en fin de compte, le service des espaces verts avait dû plus d'une fois se charger des travaux.
Au nom du département, M. Mascherpa souligne que les contacts avec les milieux de protection de la nature sont fréquents, une fois par mois avec le département de l'intérieur, et deux à trois fois par an avec tous les départements concernés. Par exemple, un accord est intervenu avec l'AGPN pour faucher les talus avec plus de modération. Il pense qu'il est possible de sensibiliser les maires des communes pour conserver de petites zones à l'état naturel. Il rappelle l'objectif de l'ASPAN visant à développer dans les écoles, avec des outils pédagogiques appropriés, un enseignement sur la protection des sols, grâce au concours des maîtres de sciences naturelles. Cependant, une coordination au niveau de l'enseignement entre le centre horticole de Lullier et l'école d'architecture lui paraît difficile. Et de plus, faudrait-il encore que lors des réalisations architecturales, il y ait quelques fonds pour les paysagistes, que ceux-ci soient mandatés, et assez tôt, ce qui est rare. A Lullier, en tout cas, il est rappelé aux élèves l'importance qu'il y a à conserver des jonctions entre les différentes zones et à planter des espèces indigènes (maillage vert).
De toutes façons, font remarquer certains commissaires, l'évolution de la société nous a amené à tout organiser et on a été trop loin, il ne reste plus assez de zones où les enfants puissent s'amuser et découvrir la nature. (Les jardins Robinson sont des tentatives de recréer ces espaces de liberté). De plus, toujours selon l'avis de certains membres de la commission, lors de consultations prévues par les diverses lois (loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, loi sur les constructions et installations diverses, loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, loi générale sur les zones de développement) «ceux qui s'occupent de la nature ont moins d'importance que ceux qui s'occupent du béton».
Les commissaires remarquent surtout que le problème évoqué est d'ordre général, qu'il faut le poser au niveau de l'aménagement du territoire au moyen des plans directeurs communaux et des plans localisés de quartier et que cela nécessiterait peut-être une adaptation de la législation cantonale, constatation avec laquelle les motionnaires sont d'accord. La motion est trop ponctuelle et il faut adopter un point de vue plus global. Ce que veut la commission, c'est que soient créés et maintenus des réseaux continus de végétation. Pour cela, il convient de ne pas s'arrêter uniquement à une approche financière des projets. La commission souhaite que se développent une volonté et une coordination des pouvoirs publics. Mais il faut également éviter d'alourdir et ralentir les procédures.
On ne peut cependant ignorer que des solutions de continuité pour la végétation et la faune, notamment souterraines, ont un prix et les collectivités publiques devraient prendre en charge une partie de ces coûts. Le fonds de compensation pour les arbres, dépendant du service des forêts, de la faune et de la protection de la nature, fonds alimenté dans les cas où il n'est pas possible de replanter l'équivalent des arbres abattus lors de constructions ou d'aménagements, pourrait être utilisé.
La commission de l'environnement et de l'agriculture souhaite donc que le Conseil d'Etat soit plus concret dans son action, suite au renvoi que le Grand Conseil lui a fait de la motion 644 et l'invite :
à être plus incitatif avec la ville et les communes en vue de répertorier et surtout protéger, autant que faire se peut, les biotopes existant en zones urbaines et suburbaines ;
à renforcer et à inclure la notion de biotope et de réseau biologique dans les plans directeurs et les plans localisés de quartier, dès leur élaboration, de façon à ne pas alourdir et retarder les procédures, quitte à modifier dans ce sens la législation cantonale ;
à faire appel, autant que possible, au fonds de compensation pour les arbres en vue d'atteindre les objectifs fixés dans la motion.
A la suite de ses travaux, la commission de l'agriculture et de l'environnement propose à l'unanimité, moins une abstention d'un commissaire remplaçant, la proposition de motion 883.
Débat
M. Max Schneider (Ve), rapporteur ad interim. Je remplace Mme Vesca Olsommer. On m'a fait remarquer qu'à la fin de son texte, à la page 4, il fallait présenter une motion en bonne forme et, de ce fait, vous avez tous reçu sur vos bancs une adjonction au rapport de la commission de l'environ
nement et de l'agriculture concernant la M 644-B. Voilà pourquoi, à la fin de la page 4, nous avons repris les invites de la commission qui ont été acceptées à l'unanimité moins une personne qui était remplaçante. Le texte n'a pas changé, c'est le même que celui qui avait été discuté en commission.
M. Roger Beer (R). Je voudrais insister sur deux choses. Nous avons reçu du Conseil d'Etat un rapport dont nous n'étions pas satisfaits. Il est retourné en commission et, à ce moment-là, nous avons obtenu des réponses à nos questions. Au sujet de l'inventaire des milieux naturels subsistant en zone urbanisée et devant être protégés, nous espérions une meilleure prise en compte et surtout quelques exemples concrets d'action de la part du Conseil d'Etat.
Par ailleurs, nous avons été choqués que le rapport ait été élaboré sans que des contacts n'aient été établis avec les milieux de protection de la nature, notamment l'AGPN et le WWF. Après discussion avec M. Claude Haegi, nous sommes satisfaits, et le rapport montre une certaine ouverture, même si les deux principales associations du canton dans ce domaine ne sont pas toujours d'accord sur la façon de protéger la nature ou ce qu'il en reste en ville.
Je crois que cette motion sous-tendait deux choses : d'une part, la prise en compte de ce qui subsiste de nature en ville et, d'autre part - ce qui est beaucoup plus important - une meilleure protection de ce qui subsiste de verdure en ville en cas de construction. C'est pour cela que la deuxième invite, qui inclut la notion de biotope ou de réseau biologique, doit être prise en compte dans le cadre des plans directeurs et des plans localisés de quartier, ce qui implique une certaine contrainte. Si nous voulons assurer d'ici cinquante, soixante, septante ans une survivance d'espaces verts malgré le développement de l'agglomération urbaine, des commune suburbaines ou même des communes rurales, je pense que c'est aujourd'hui qu'il faut prévoir, dans les conceptions d'urbanisme, de quelle façon nous devrons conserver les arbres et ce qu'il peut subsister de nature en ville.
Nous sommes satisfaits de cette réponse et vous invitons évidemment à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Nous espérons que le nouveau Conseil d'Etat tiendra largement compte de notre demande.
Mme Sylvie Châtelain (S). Je ne vais pas intervenir longuement sur ce sujet puisqu'en tant que nouvelle députée je n'ai pas participé au travail de la commission et n'ai absolument pas l'intention de modifier la proposition de motion qui nous est soumise ce soir. Cependant, ayant pris connaissance de la motion 644-B, du rapport du Conseil d'Etat et de celui de la commission, j'aimerais insister sur un point concernant la protection des biotopes en zone urbanisée.
Le rapport de la commission insiste sur la nécessité, je cite : «de créer et de maintenir des réseaux continu de végétation.». La commission relève dans ce sens l'exemple de la commune d'Onex qui a établi un plan directeur de protection et de plantation de haies en milieu urbain. Or, si les haies sont relativement bien protégées en zone agricole, il n'existe pour l'instant pas de bases légales permettant de maintenir les haies en zone urbanisée ou d'exiger des compensations lors de leur destruction. Il en va de même pour de nombreux autres milieux naturels.
Cette lacune devrait être comblée si l'on invite le Conseil d'Etat, comme le demande la motion que nous allons voter tout à l'heure, à inciter la Ville et les communes suburbaines à répertorier et protéger les biotopes. Je reviendrai donc, lors d'une prochaine séance, sur ce sujet.
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je voudrais remercier M. Schneider d'avoir repris ce rapport et d'avoir clarifié l'invite au Conseil d'Etat en présentant ce nouveau texte que vous avez reçu ce soir. Pour le surplus, j'ajouterai simplement que nous acceptons cette proposition de motion et préciserai que les relations avec les associations que vous avez citées tout à l'heure, Monsieur Beer, sont permanentes entre le service des forêts, de la protection de la faune et de la nature et que des réunions mensuelles sont organisées avec ces différentes associations. Bien entendu, tout est perfectible, et je constate que cette discussion a permis de préciser ce qui devait encore l'être.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
MOTION
concernant l'inventaire et la protection des milieux naturelssubsistant en zone urbanisée
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
le rapport du Conseil d'Etat M 644-B,
invite le Conseil d'Etat
à être plus incitatif avec la Ville et les communes en vue de répertorier et surtout de protéger, autant que faire se peut, les biotopes existant en zones urbaines et suburbaines ;
à renforcer et à inclure la notion de biotope et de réseau biologique dans les plans directeurs et les plans localisés de quartier, dès leur élaboration, de façon à ne pas alourdir et retarder les procédures, quitte à modifier dans ce sens la législation cantonale ;
à faire appel, autant que possible, au fonds de compensation pour les arbres en vue d'atteindre les objectifs fixés dans la motion.
Débat
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Le 30 octobre 1993, Jean-Bertrand Aristide, président démocratiquement élu en Haïti, aurait dû rentrer dans son pays et reprendre sa fonction. Les responsables du coup d'Etat ont tout fait pour empêcher ce retour et y sont parvenus jusqu'à ce jour. Aujourd'hui, le temps presse. Chaque jour des innocents sont victimes d'exactions sommaires, et les autorités en place et l'armée sèment la terreur.
Plus que jamais, l'appui de toute la communauté internationale est indispensable et urgente. L'avenir d'Haïti se jouera ces prochaines semaines et, si nous le voulons démocratique, alors il nous faut encourager le Conseil fédéral à entreprendre toutes les démarches possibles dans ce sens. C'est pourquoi je vous invite, ainsi que tous les auteurs et signataires de cette résolution, à la voter.
Le président. Vous avez écrit, Madame, «invite le Conseil d'Etat fédéral». Ce sera lequel des deux ?
Mme Elisabeth Reusse-Decrey. Vous enlevez le mot «Etat».
M. Bernard Ziegler, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat pense qu'il est utile de vous donner quelques informations sur l'implication du canton de Genève dans le processus de démocratisation en Haïti. Je n'étais malheureusement pas au courant du dépôt de cette résolution sinon j'aurais pris mon dossier dans lequel se trouve l'échange de correspondance que nous avons eu à ce sujet avec le Conseil fédéral et le président Aristide.
Vous vous souvenez qu'il y a deux ans et demi, la police cantonale genevoise avait été pressentie pour conseiller le gouvernement haïtien, et plus particulièrement le président Aristide, qui cherchait à constituer un corps de police professionnel. A la suite de la chute de la dictature Duvalier, l'organisation des fameux «tontons macoutes» avait été dissoute et il n'existait plus de force de police organisée distincte de l'armée. C'est l'armée qui, au moment de la dissolution de l'organisation des «macoutes», a assumé les tâches de police. Il s'agissait par conséquent de constituer un corps de police professionnel, c'est-à-dire séparer la police de l'armée. Cette opération assez délicate avait requis l'aide d'un consultant, accompagnant M. Laurent Walpen, chef de la police cantonale genevoise. Ce dernier s'est rendu sur place où il a réalisé tout un travail qui a été remis au père Aristide.
Alors qu'un certain nombre de fonctionnaires de la police cantonale genevoise se rendaient en Haïti, nous avons de justesse pu les retenir à Miami en apprenant le coup d'Etat, avant qu'ils ne prennent l'avion pour Port-au-Prince. Cela m'a d'ailleurs valu d'être la première personnalité genevoise a être au courant du coup d'Etat au moment même où il se produisait.
Vous vous souvenez également qu'à l'époque, le général Cedras, l'auteur du coup d'Etat et toujours chef de la junte au pouvoir là-bas, avait invoqué cette opération de séparation de la police et de l'armée, et avait même spécifiquement mis en cause l'assistance apportée par la police cantonale genevoise dans cette opération pour justifier le coup d'Etat. Par la suite, le président Aristide a eu l'occasion de revenir à plusieurs reprises en Suisse, puisque la Suisse n'a pas reconnu le régime issu du coup d'Etat et s'est même associée à l'embargo décrété par l'ONU. Nous ne sommes pas membres de l'ONU mais, comme dans l'affaire de l'Irak, le Conseil fédéral, par voie d'ordonnance, s'est associé aux sanctions prononcées par l'ONU contre le régime militaire d'Haïti.
A l'occasion de ses différentes visites en Suisse, le père Aristide nous a demandé si nous serions à nouveau disposés, une fois la démocratie rétablie en Haïti, à reprendre cette opération pour laquelle il nous avait consultés, et à l'aider à entreprendre la constitution d'un corps de police professionnel séparé de l'armée.
Cette demande nous a été confirmée au printemps dernier via le département fédéral des affaires étrangères. Dans cette affaire, nous agissions bien entendu avec l'aval de ce département et dans le cadre de l'ONU, qui a pris en charge cette opération devenue multilatérale. Ainsi, actuellement, le Canada, les Etats-Unis mais aussi la Suisse devraient participer à la mise en place provisoire d'une force de police multilatérale et de structures de formation pour constituer un corps de police professionnel en Haïti. D'ailleurs, des policiers de différents cantons suisses, dont Genève, ont suivi un stage de formation l'été passé afin de participer à cette opération, à la demande de l'Organisation des Nations Unies, sitôt rétablie la démocratie en Haïti.
Comme vous l'avez souligné, cette opération pour le moment n'a pas pu se dérouler puisque les accords conclus l'été passé sous l'égide de l'ONU n'ont pas été respectés. Je pensais qu'il était utile de vous signaler l'engagement de la Suisse et tout spécialement du canton de Genève. Le commandant de la police cantonale genevoise, le major Baer, était prêt à partir lui-même là-bas pour effectuer un certain nombre de tâches d'encadrement. Je tenais aussi à vous signaler que ce type d'aide au développement deviendra de plus en plus fréquent à l'endroit de certains pays du tiers-monde, où des élections démocratiques ont eu lieu, où l'alternance a joué.
Cette professionnalisation de la police est un objectif important dans leur processus de démocratisation et, de plus en plus souvent, des petits pays comme la Suisse sont sollicités pour participer à ces opérations, alors que traditionnellement, la police et l'armée étaient la chasse gardée des grandes puissances; mais ces grandes puissances, dans ce contexte, jouaient précisément leur jeu de grandes puissances. C'est la raison pour laquelle des pays comme Haïti se tournent vers des petits pays comme la Suisse, l'Autriche, la Belgique ou les Pays-Bas pour participer à ce type d'opérations. Je crois que c'est un des devoirs de la Suisse de répondre à ces sollicitations qui risquent de devenir de plus en plus fréquentes à l'avenir. Je tenais à le souligner à l'occasion de ce dossier.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
résolution
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
que l'Etat de droit en Haïti n'existe plus ;
que la population de ce pays vit l'horreur au quotidien : intimidations, arrestations, exécutions sommaires ;
que le retour du président démocratiquement élu, Jean-Bertrand Aristide, doit pouvoir se faire dans les plus brefs délais,
invite le Conseil fédéral
à soutenir M. Dante Caputo, représentant des Nations Unies à Port-au-Prince et principal négociateur entre les diverses parties ;
à intervenir, dans le cadre de ses responsabilités, en vue d'appuyer le rétablissement de la démocratie, de la paix et de la justice en Haïti ;
à faire savoir au président Aristide sa solidarité et son total soutien pour la reconstruction future de son pays.
La séance est levée à 22 h 30.