République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 4 novembre 1993 à 17h
53e législature - 1re année - 1re session - 39e séance
E 653
Le président. Tous les députés présents ont été élus en conformité des dispositions légales et doivent, comme tels, être assermentés.
Je prie Mesdames et Messieurs les députés de bien vouloir se lever, de même que les personnes qui se trouvent à la galerie.
Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant cette lecture, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque la lecture sera terminée, vous baisserez la main.
Veuillez lever la main droite :
«Je jure ou je promets solennellement :
de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;
d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;
de garder le secret dans tous les cas où il me sera enjoint par le Grand Conseil.»
Veuillez baisser la main.
Maintenant, à l'appel de son nom, chaque député lèvera à nouveau la main droite et prononcera les mots, selon ses convictions : «Je le jure» ou «Je le promets».
(Chaque député, debout, à l'appel de son nom, prête serment en répondant: «Je le jure» ou «Je le promets».)
Ont prêté serment :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Jacques Boesch (AG)
Nicolas Brunschwig (L)
Martine Brunschwig Graf (L)
Thomas Büchi (R)
Fabienne Bugnon (E)
Hervé Burdet (L)
Micheline Calmy-Rey (S)
Claire Chalut (AG)
Pierre-Alain Champod (S)
Liliane Charrière Urben (S)
Sylvie Châtelain (S)
Anne Chevalley (L)
Jean-François Courvoisier (S)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Erica Deuber-Pauli (AG)
Daniel Ducommun (R)
Jean-Luc Ducret (DC)
Michel Ducret (R)
John Dupraz (R)
A l'appel de son nom, Mme Marlène Dupraz répond : «Je ne promets rien, je ne jure rien».
Le président. Je regrette, Madame, vous devez simplement dire : «Je le promets ou je le jure».
Mme Marlène Dupraz. Je ferai de mon mieux !
Le président. Ce n'est pas un serment, Madame ! J'exige que vous disiez : «Je le promets ou je le jure».
Mme Marlène Dupraz. Le peuple le jugera !
Le président. Madame, le peuple vous a élue. Vous êtes en prestation de serment. Je vous demande de ne pas faire de scandale et de vous en tenir à la formule habituelle : «Je le promets ou je le jure».
Mme Marlène Dupraz. Le travail l'attestera !
Le président. Je ne peux donc pas vous assermenter et je me vois obligé de vous prier de quitter la salle. Je suis navré, Madame. Prenez conscience que nous faisons une prestation de serment; c'est un moment solennel et je vous prie, encore une fois, de bien vouloir vous prononcer selon la formule consacrée : «Je le promets ou je le jure.». Vous n'avez pas le droit de dire autre chose.
Mme Marlène Dupraz. Je promets que je ferai de mon mieux. (Manifestation de désapprobation.)
Des voix. Dehors, dehors !
Le président. Alors, Madame, je ne peux pas accepter ce serment et je vous prie de sortir.
Mme Marlène Dupraz. (Enfin et sous les huées de toute l'assemblée et du public.) Alors, je le promets !
Le président. Bien, Madame, alors, levez la main droite et dites : «Je le promets.»
Des voix. (Visiblement irritées.) On lève la main !
Le président. Vous levez la main droite et vous dites : «Je le promets.»
Mme Marlène Dupraz. (S'exécutant enfin.) Je le promets !
Marlène Dupraz (AG)
Laurette Dupuis (AG)
Henri Duvillard (DC)
René Ecuyer (AG)
Catherine Fatio (L)
Christian Ferrazino (AG)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Jean-Claude Genecand (DC)
Luc Gilly (AG)
Gilles Godinat (AG)
Isabelle Graf (E)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Sabine Haupt Secrétan (E)
Elisabeth Häusermann (R)
Dominique Hausser (S)
Sylvie Hottelier (AG)
Claude Howald (L)
Yvonne Humbert (L)
Liliane Johner (AG)
Philippe Joye (DC)
René Koechlin (L)
Pierre Kunz (R)
Claude Lacour (L)
Bernard Lescaze (R)
Sylvia Leuenberger (E)
Armand Lombard (L)
René Longet (S)
Pierre Marti (DC)
Michèle Mascherpa (L)
Alain Mauris (L)
Liliane Maury Pasquier (S)
Jean Montessuit (DC)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Laurent Moutinot (S)
Chaïm Nissim (E)
Jean Opériol (DC)
Danielle Oppliger (AG)
Barbara Polla (L)
Gérard Ramseyer (R)
Laurent Rebeaud (E)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
David Revaclier (R)
Jean-Pierre Rigotti (AG)
Martine Roset (DC)
Maria Roth-Bernasconi (S)
Françoise Saudan (R)
Andreas Saurer (E)
Christine Sayegh (S)
Philippe Schaller (DC)
Max Schneider (E)
Jean Spielmann (AG)
Micheline Spoerri (L)
Evelyne Strubin (AG)
Jean-Philippe de Tolédo (R)
Claire Torracinta-Pache (S)
Pierre-François Unger (DC)
Pierre Vanek (AG)
Olivier Vaucher (L)
Nicolas Von der Weid (L)
Le président. Je prends acte de votre serment, vous pouvez vous asseoir.
10. Allocution du doyen d'âge.
Le président. Le souvenir des discours de mes prédécesseurs m'a convaincu de mon ignorance, aussi je ne vous infligerai pas un trop long pensum.
Permettez, d'abord, au citoyen Meyll de rendre hommage à Jean Vincent, qui fut une grande personnalité de notre République et qui oeuvra, sa vie durant, au progrès social à Genève et en Suisse.
Ma fugitive apparition à ce perchoir me donne le privilège d'exprimer quelques propos non désabusés face à un Grand Conseil qui, depuis 1989, ne comporte pas moins de 70 nouveaux - remplaçants de la précédente législature et nouveaux élus. J'en profite pour adresser un cordial salut à nos anciens collègues de la précédente législature et, notamment, à ceux qui nous ont fait l'amitié d'être à la tribune et d'être encore parmi nous ce soir.
Prenons conscience que nous sommes l'expression d'un tiers des électeurs et que chacun d'entre nous, députés, vaut 3 millièmes de représentation populaire.
Compte tenu que plus de 30% de la population genevoise paient des impôts, ont participé à notre essor économique et en subissent les ratés actuels, que ces 30% ne peuvent pas s'exprimer par un bulletin de vote, qu'il faut ajouter nos fonctionnaires inéligibles, je vous laisse évaluer la parcelle - que dis-je, la miette - de pouvoir qu'il nous reste. J'ai dit «pouvoir». Quelle présomption ! Car faut-il encore que le Conseil d'Etat ne nous considère pas comme une chambre d'enregistrement. Mais c'est à nous, députés, de défendre les prérogatives du législatif face à l'empiétement de l'exécutif.
Un parlement de milice sans suppléant, comme le nôtre, contraint les députés à des sacrifices consentis, certes, mais parfois trop contraignants, et peu compatibles avec certaines professions ou des emplois de salariés notamment. Cela explique le nombre de démissions en cours de mandat et le renouvellement de 70% des députés depuis quatre ans. C'est aussi inquiétant que le peu de fréquentation des bureaux de vote.
Face aux grands problèmes qui assaillent notre planète, nos débats paraissent futiles, parfois même indécents.
L'exercice de la démocratie n'est pas toujours aisé, mais puis-je vous inviter à la modestie dans votre temps de parole. Le nouveau règlement du Grand Conseil va dans ce sens, et il apporte d'autres modifications bienvenues.
Le débat de ce soir a démontré la nécessité de régler le problème des incompatibilités autrement qu'en utilisant des arguments revanchards, douteux et démagogues.
En 1983 déjà, le Tribunal fédéral rendait le canton attentif à la situation peu et mal définie des fonctionnaires face à l'éligibilité, et à l'article 73 de la constitution genevoise qu'il mettait en doute.
Mon rôle de président était dicté par un respect des lois et des règlements, selon l'enseignement de Jean Vincent. Leurs applications n'étaient pas faciles pour moi qui ne considère pas femmes et hommes des services publics non autonomes comme des demi-citoyens.
Parmi les problèmes que nous aurons à traiter, le chômage deviendra - et l'est déjà - prioritaire.
Crise structurelle, crise conjoncturelle ?
Les deux ensemble ?
Dans certaines branches économiques - secondaire, tertiaire et services - la productivité augmente, les bénéfices augmentent, le chômage augmente aussi.
Le suréquipement en vue de profit a fait grossir exagérément le génie civil et l'industrie du bâtiment, et les plus vulnérables, dont les travailleurs, ont payé et paient encore, tandis que spéculateurs et promoteurs de tout poil ont conservé leurs billes à l'ombre ou au soleil !
Cinquante ans de libéralisme nous amènent devant une facture que les néo-libéraux voudraient faire payer aux travailleurs, petits et moyens contribuables.
A voir les slogans qui promettent ce qui pouvait être fait avant par la droite, c'est le moment de passer sur la rive gauche en oubliant le pont promis depuis trente ans par la majorité au pouvoir !
Passons à l'intendance. Collègues, nouveaux députés - que je ne suis pas encore - sachez que vous allez trouver dans cet hémicycle et autour de cette enceinte des fonctionnaires - demi-citoyens eux aussi - attachés au service du Grand Conseil. Ces femmes, ces hommes feront tout et plus pour rendre votre devoir de député le moins lourd possible.
D'avance, je me fais votre interprète pour les remercier de leur disponibilité, compétence et amabilité.
Que notre sautier, Pierre Stoller, au sommet de cette pyramide, veuille transmettre au personnel de la chancellerie, en particulier au service du Grand Conseil, secrétaires, mémorialistes, huissiers, ainsi qu'au service de la législation, notamment à MM. Jean-Jacques Rosé et Bernard Larue, notre message de reconnaissance.
Je n'abuserai pas de votre temps et, pour conclure, je vous signale que rue de Coutance, sur la façade d'un temple de la consommation, une plaque situe la maison de Jean-Jacques Rousseau qui a écrit :
«Mon père en m'embrassant fut saisi d'un tressaillement que je crois sentir et partager : Jean-Jacques - me disait-il - aime ton pays.»
C'est toujours vrai. Et on peut l'aimer, le protéger et le servir autrement que l'arme au pied, et en l'ouvrant aux proscrits et aux exilés.
Il y aurait tant à dire sur le devenir et l'esprit de Genève.
Je vous prie de m'excuser pour le temps volé. Votre pensum est terminé ! Merci de votre attention. (Chaleureux applaudissements ; une gerbe de fleurs est offerte au président.)
(Les deux huissiers quittent la salle.)