République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 16 septembre 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 7e session - 32e séance
PL 7034
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:
Art. 19 A (nouveau)
Zone hameaux
1 La zone hameaux comprend des hameaux et des bourgs formés de groupes d'habitations anciennement à vocation rurale et de leurs dépendances sis en limite de la zone agricole.
2 La rénovation, la reconstruction et la transformation partielle de bâtiments et d'installations existantes pour y construire des logements, ou des bâtiments destinés à des activités rurales et villageoises, sont autorisées lorsque le volume et l'aspect extérieur sont conservés pour l'essentiel.
3 Sont considérées des transformations partielles notamment les transformations dans le volume existant et le changement d'affectation de bâtiments ou de partie de bâtiments, l'agrandissement modéré de bâtiments et d'installations permettant de les adapter au besoin de l'habitat.
4 De nouvelles constructions peuvent être autorisées dans la mesure où elles respectent la typologie des hameaux dans leur élément naturel et construit et qu'aucun intérêt prépondérant de l'aménagement du territoire n'est lésé.
5 La délivrance des autorisations de construire en zone hameaux est subordonnée à l'adoption d'un règlement par le conseil municipal de la commune concernée, approuvé par le Conseil d'Etat, qui définit le degré d'occupation des terrains, les dimensions, le caractère architectural, le genre et la destination des constructions afin de conserver ou d'en assurer le caractère et l'harmonie.
6 L'élaboration du règlement suit la procédure fixée aux articles 15 D, 15 E, alinéa 2, et 15 F de la loi sur l'extension des voies de communication et l'amélioration des quartiers et localités, du 9 mars 1929.
7 Le projet de règlement est soumis au préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites avant d'être approuvé par le conseil municipal.
Art. 22 (abrogé)
Art. 2
Modificationà une autre loi
(B 6 1)
La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit:
Art. 30, al. 1, lettre s (nouvelle,les lettres s à y anciennes devenant les lettres t à z)
s) le règlement relatif à l'utilisation du sol dans un hameau;
Art. 70, al. 1, lettre i (nouvelle,les lettres i à m anciennes devenant les lettres j à n)
i) le règlement relatif à l'utilisation du sol dans un hameau;
EXPOSÉ DES MOTIFS
Dès l'adoption de la loi d'application de la loi sur l'aménagement du territoire, le 4 juillet 1987 (ci-après LALAT), il s'est avéré que son article 22 qui traite des hameaux en zone agricole rencontrait des difficultés d'application.
En 1989 déjà, un projet de loi (PL 6276) visant à compléter cet article par deux alinéas nouveaux a été déposé. Il s'agissait de donner une base légale au Conseil d'Etat pour que des autorisations de construire soient délivrées pour rénover des maisons existantes dans leurs présents gabarits afin de faciliter le maintien du patrimoine bâti de ces hameaux.
Ces nouvelles dispositions ont permis des décisions ponctuelles de rénovation mais n'ont pas résolu la question dans son ensemble des rénovations voire des transformations de bâtiments situés dans les hameaux en zone agricole.
Le problème qui se pose est celui de la dualité existante entre le statut juridique des bâtiments situés en zone agricole et leur affectation réelle d'autre part. De plus, le fait que les hameaux sont situés en zone agricole a comme conséquence, conformément aux principes généraux de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après LAT), que les autorisations permettant aux propriétaires d'un bâtiment de le rénover ou de le transformer ne peuvent être gérées uniquement par le biais de dérogations.
Cette application est la résultante de deux procédures différentes, d'une part par l'octroi d'une dérogation accordée par le département des travaux publics dans les circonstances limitatives; d'autre part, par décision de déclassement prise par le Grand Conseil ayant pour conséquence de sortir de la zone agricole les hameaux considérés et de les intégrer dans la quatrième zone rurale.
En effet, en l'état de notre législation, une autorisation de construire dans un hameau intervient par l'application des règles d'aménagement et de construction en vigueur pour la quatrième zone rurale au sens de l'article 19, alinéa 2, lettre b de la LALAT.
Conséquences de ces procédures
Ces décisions étant ponctuelles et prises par voie dérogatoire, l'autorité cantonale pratique une politique du coup par coup. Or, si la LAT oblige les cantons à distinguer la zone à bâtir de la zone agricole, elle ne limite cependant pas les possibilités des cantons, bien au contraire: l'article 18 de la LAT réserve explicitement au canton la compétence de créer des zones de troisième type qui ne sont pas forcément assimilables aux zones à bâtir ordinaires.
Dès 1991, la Chambre genevoise d'agriculture, la Chambre genevoise immobilière de même que l'Association des communes genevoises se sont réunies pour trouver au problème des hameaux dans notre canton une solution juridique conforme aux dispositions sur l'aménagement du territoire.
Parvenus à la conclusion que le dépôt d'un projet de loi permettrait de réexaminer la question dans son ensemble, les représentants de ces organisations ont décidé de demander la collaboration du département de l'intérieur, de l'agriculture et des affaires régionales, département qui est chargé des relations avec les communes genevoises, et d'élaborer un projet de loi en commun.
Le texte auquel ils sont parvenus n'ayant pas été déposé par le Conseil d'Etat, les députés signataires, dans le but d'engager un débat sur le problème que posent les hameaux dans le cadre de l'aménagement du territoire et qui est soulevé depuis de nombreuses années par les autorités communales, ont décidé de reprendre ce projet à leur compte et de permettre ainsi un large échange de vues.
En conclusion, la solution qui vous est proposée consiste à intégrer l'ensemble des hameaux existants dans une zone nouvelle intitulée «zone hameaux». Celle-ci se distingue de la zone à bâtir ordinaire par le fait que l'article introduit dans la LALAT autorise dans cette zone la rénovation, la reconstruction ou la transformation partielle de bâtiments ou d'installations existantes pour réaliser des logements si le volume et l'aspect extérieurs sont conservés pour l'essentiel.
Les buts d'une telle proposition sont multiples. Il s'agit en priorité de préserver le patrimoine architectural et, dans cette optique, de donner la possibilité à leurs propriétaires de le restaurer et, par voie de conséquence, de le rentabiliser. La structure actuelle des hameaux doit être conservée, cette nouvelle zone crèe ne devant pas être considérée comme des terrains vierges constituant un potentiel constructif. De plus, ces agglomérations ne doivent pas s'étendre, en revanche leur affectation doit pouvoir subir des mutations.
C'est la raison pour laquelle cet article prévoit que de nouvelles constructions peuvent être autorisées, dans la mesure où elles respectent la typologie des hameaux dans leur élément naturel et construit, et qu'aucun intérêt prépondérant de l'aménagement du territoire n'est lésé.
Ainsi, la délivrance des autorisations de construire en zone hameaux est subordonnée à l'adoption d'un règlement par le conseil municipal de la commune, autorité qui est la mieux à même de connaître la véritable configuration du hameau, règlement qui doit fixer le degré d'occupation des terrains, les dimensions, le caractère architectural, le genre et la destination des constructions afin de conserver ou d'en assurer les caractères et l'harmonie et être approuvé par le Conseil d'Etat.
Un alinéa supplémentaire prévoit que ce projet de règlement est soumis au préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites avant d'être soumis au Conseil d'Etat.
Par cette nouvelle disposition, les paramètres autorisant des restaurations, voire des nouvelles constructions dans les hameaux actuellement situés en zone agricole, seront différents de ceux qui sont stipulés pour la quatrième zone rurale. De plus, elle devrait permettre d'éviter la procédure actuelle du déclassement hameau par hameau prévu par l'article 22, alinéa 2 de la LALAT et à ce titre, il serait judicieux que les plans des périmètres de ces hameaux soient approuvés par le Grand Conseil en même temps que ce nouvel article de loi.
Rappelons à ce propos qu'une définition du hameau de même qu'une liste des hameaux recensés ont été soumises au Grand Conseil lors de sa séance du 5 octobre 1989 (Mémorial 1989, page 6029). Cet inventaire non exhaustif pourrait valablement servir de base de travail pour établir les périmètres de cette nouvelle zone. La commission chargée d'examiner ce projet de loi, en collaboration avec les communes, établira une liste définitive. Ce travail devrait également faciliter la mise en application du nouveau droit foncier rural qui est destiné à s'appliquer uniquement aux immeubles situés en zone agricole et qui sont appropriés à l'agriculture et à l'horticulture. Or, tel n'est actuellement pas le cas pour les immeubles situés dans les hameaux.
Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à éclairer et motiver le présent projet de loi et dont nous espérons, de votre part, un accueil favorable.
Préconsultation
Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Bien que la législation actuelle prévoie soit une dérogation accordée par le département des travaux publics pour la transformation d'un bâtiment dans un hameau, soit une modification de la zone proposée par le Grand Conseil pour sortir le hameau de la zone agricole et l'intégrer dans la quatrième zone rurale, cette situation n'est pas idéale pour traiter le problème des hameaux en général.
Aujourd'hui, la situation de ceux-ci a changé, non seulement du fait de l'accroissement de la fonction résidentielle, mais également à cause de la modification des besoins de l'agriculture.
M. Philippe Fontaine (R). Nous approuvons ce projet, bien entendu, puisque mon collègue Charles Bosson en est le cosignataire. Nous espérons qu'ainsi les changements d'affectation de nos maisons agricoles seront facilitées. En effet, vous connaissez les mutations actuelles dans l'agriculture et leur influence sur nos habitations. Je parle de nos habitations puisqu'à titre personnel j'ai la chance d'habiter à la campagne, mais je parle également du devoir de maintenir un patrimoine souvent difficile à conserver dans les conditions d'aujourd'hui.
Nous espérons que par une amélioration de la loi nous parviendrons à préserver ce qui en vaut vraiment la peine.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement.