République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 16 septembre 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 7e session - 32e séance
PL 7025
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28 545-166, dressé par le département des travaux publics le 19 mars 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (portant sur une zone industrielle et la création d'une zone de développement 3 destinée à des organisations internationales à l'avenue Blanc, à Sécheron), est approuvé, de même que l'échange foncier qui en résulte et qui porte sur la cession par l'Etat de la parcelle n° 4125 index 1 à Noga Invest SA en contrepartie d'une surface de terrain de 10'000 m2 destinée aux organisations internationales.
2 La zone de développement 3 destinée à des organisations internationales constitue une zone de développement affectée à de l'équipement public au sens de l'article 30 A de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 janvier 1987; la construction de bâtiments à cette fin dans le périmètre de cette zone est subordonnée à la cession préalable des terrains à l'Etat de Genève.
3 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité IV aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone industrielle et le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 3 créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan n° 28 545-166 susvisé, certifié conforme par la présidente du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
A la suite de la vente par la Société ABB SA à la Société Noga Invest SA des terrains dont elle était propriétaire dans le périmètre de la zone industrielle et de chemin de fer de Sécheron compris entre l'avenue de France, l'avenue Blanc, l'avenue de la Paix et les voies CFF, le Conseil d'Etat avait envisagé de soumettre à l'approbation du Grand Conseil un projet de modification de zone visant à créer une zone de développement 3 et une zone de développement industriel pour ce périmètre destiné à permettre la réalisation d'un important projet immobilier.
A cette fin, une étude d'aménagement fut engagée avec la Ville de Genève, qui n'a pas reçu l'agrément des propriétaires des terrains. Par la suite, la Ville de Genève a préconisé le maintien des terrains concernés en zone industrielle. Simultanément, le Conseil d'Etat, pour ne pas retarder le projet de construction de la Société Sécheron SA sur la parcelle 4125 propriété de l'Etat, a décidé d'engager une procédure en modification de zone portant, d'une part, sur cette parcelle, afin de l'intégrer entièrement à la zone industrielle existante et, d'autre part, sur la parcelle 4126, également propriété de l'Etat, afin de l'affecter à une zone de développement 3 destinée aux organisations internationales permettant d'y construire le siège futur de l'Organisation météorologique mondiale (OMM).
A l'occasion de l'examen de ces deux projets de modification de zones par le Conseil municipal de la Ville de Genève appelé à préaviser les deux plans de zones y relatifs, ce dernier a voté une résolution (5006) confirmant la recommandation du Conseil administratif de la Ville de Genève portant sur le maintien du solde du périmètre de Sécheron en zone industrielle, tout en demandant qu'une partie de ce périmètre soit affecté aux organisations internationales.
Cette prise de position a amené le Conseil d'Etat et la Société Noga Invest SA à entamer de nouveaux pourparlers portant, d'une part, sur l'avenir du périmètre de Sécheron et, d'autre part, sur l'échange foncier résultant de la localisation du projet de Sécheron SA sur la parcelle no 4125 propriété de l'Etat. L'analyse de la situation a fait apparaître que la réalisation du projet immobilier à l'origine du projet de déclassement de la zone industrielle de Sécheron était très aléatoire, vu l'importante charge foncière dont les terrains concernés sont grevés. Dès lors, il a semblé plus réaliste de maintenir les terrains concernés en zone industrielle et d'utiliser à des fins industrielles les bâtiments existants (qui ont une valeur patrimoniale indiscutable) plutôt que de les démolir, tout en prévoyant un développement modulé de la zone industrielle permettant de la reconstruire par étapes au fur et à mesure des besoins des entreprises.
Cette solution a le mérite de répondre au voeu exprimé par la Ville de Genève, tout en favorisant grâce à un échange foncier avec l'Etat une extension de la zone préexistante destinée aux organisations internationales, qui répond à un besoin évident pour l'avenir de Genève si notre canton veut être en mesure de garantir les besoins d'extension de ces organisations. Le fait de disposer de terrains de réserve à cette fin est primordial, lorsque l'on songe tant à l'importance de ces organisations qu'à la nécessité de pouvoir répondre immédiatement à leurs besoins, si l'on veut éviter que certaines d'entre elles ne quittent Genève, tant la lutte est actuellement vive entre Etats pour attirer ces organisations.
Les dimensions de la zone destinée aux organisations internationales à Sécheron sont, certes, modestes, mais il s'agit d'un endroit extrêmement bien situé par rapport aux sièges de ces organisations, avec le grand avantage que les terrains sont ou deviendront propriété de l'Etat, ce qui est primordial pour les besoins auxquels ils seront affectés, cela d'autant plus que les terrains de réserve de l'Etat pour les organisations internationales sont très modestes.
Le présent projet de loi vise donc à maintenir la zone industrielle existante, sous réserve de l'extension de la zone destinée aux organisations internationales qui sera concrétisée grâce à l'échange de la parcelle 4125, laquelle restera en zone industrielle, avec une surface de 10'000 m2 de terrain devant revenir à l'Etat et être déclassée en zone de développement 3 à destination des organisations internationales. Afin de localiser ce secteur, le département des travaux publics a procédé avec Noga Invest SA à une analyse commune du périmètre de Sécheron dans le but de déterminer quels étaient les terrains dont le maintien en zone industrielle paraissait le plus approprié.
Cette analyse et la volonté exprimée par Noga Invest SA d'avoir pignon sur rue, ce qui implique de réserver à l'industrie les terrains en bordure de l'avenue de France, ont amené à situer le secteur destiné aux besoins des organisations internationales sur des terrains proches de la zone de développement existante déjà affectée à cet effet, telle que le Grand Conseil l'a créée le 18 septembre 1992. Ces terrains sont de ce fait et de part leur proximité avec le Centre William Rappard, également placés de manière favorable pour des bâtiments destinés aux organisations internationales. Cette proposition a fait l'objet d'un accord de principe avec Noga Invest SA quant à l'échange foncier qui conditionne la matérialisation du périmètre destiné aux organisations internationales. Le solde du périmètre comprenant les bâtiments les plus intéressants sur le plan constructif restera en zone industrielle, ce qui permettra de continuer à affecter ces bâtiments à des activités industrielles en attendant une valorisation progressive des terrains sur lesquels ils sont situés.
Le projet de plan de zone établi sur cette base est complété d'un projet de plan localisé de quartier élaboré en collaboration avec la Ville de Genève, qui vise à matérialiser les options retenues et à structurer l'ensemble du périmètre, notamment en ce qui concerne ses dessertes internes. C'est la raison pour laquelle le projet de plan localisé de quartier porte sur l'ensemble du périmètre de Sécheron englobant à la fois les bâtiments existants, les terrains affectés à l'industrie et ceux destinés aux organisations internationales, afin d'avoir une vision cohérente de l'ensemble du périmètre formé par l'avenue de France, l'avenue Blanc, l'avenue de la Paix et les voies CFF. Il mentionne également les deux plans localisés de quartier adoptés par le Conseil d'Etat portant sur les parcelles nos 4125 index 1 et 4129. Etant donné que les terrains compris dans le périmètre du projet de plan de zone n'ont pas fait l'objet de projets concrets de construction, le projet de plan localisé de quartier se borne à fixer pour ceux-ci les périmètres d'implantation, le gabarit et l'affectation des bâtiments, ainsi que la surface maximale de plancher constructible pour les terrains affectés aux organisations internationales. Seuls les axes principaux de circulation sont fixés, l'emplacement des voies secondaires à créer dépendant des projets concrets qui seront réalisé. Cette formule correspond, du reste, à celle des plans directeurs usuellement adoptés pour les zones de développement industriel, afin de laisser un maximum de souplesse pour les constructions dont la conception et, par voie de conséquence, la surface de plancher utile, peut varier considérablement en fonction des besoins effectifs des entreprises.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Préconsultation
M. Philippe Joye (PDC). Notre groupe est favorable au renvoi de ce projet de loi en commission. Toutefois, il voit cinq raisons qui justifient une certaine réserve par rapport à ce dernier.
Premièrement, il semble que le texte soumis au Grand Conseil n'est pas le même que celui sur lequel le Conseil municipal de la ville de Genève s'est appuyé pour voter le principe de cette loi. Nous risquons donc de traiter d'un projet qui sera contesté par la Ville. Ainsi, nous reviendrons très vite à la case départ, c'est-à-dire à l'harmonisation préalable des deux textes.
Deuxièmement, il nous semble difficile de régler une seconde fois la question des terrains de Sécheron au coup par coup. Pour le cas précédent, cela se justifiait car il fallait agir vite pour permettre la construction de l'usine de Sécheron, mais nous devrions procéder de façon plus synthétique.
Troisièmement, l'état des négociations sur les différents terrains, les affectations et conceptions face à la ventilation du plan d'utilisation des sols est à revoir. Faut-il vraiment ajouter un pourcentage important de logements sur les terrains prévus pour la Maison de l'Europe ?
En effet, les relations Ville-Etat ne semblent pas toutes progresser de la même manière. Dès lors, est-il juste de les figer par un projet de loi partiel, non pas quant à sa territorialité, mais quant aux autres éléments vitaux de l'aménagement du territoire. Ainsi, on court le risque de faire capoter les discussions en plaçant les autres partenaires devant un fait accompli, que ce soient les usagers futurs, la Ville de Genève ou les propriétaires.
Quatrièmement, une phrase-clé de ce projet de loi nous interpelle à l'article 1, alinéa 2 de la loi. Il est effectivement écrit que : «La zone de développement 3 destinée à des organisations internationales constitue une zone de développement affectée à de l'équipement public...». La construction de bâtiments à cette fin dans le périmètre de cette zone est subordonnée à la cession préalable des terrains à l'Etat de Genève. Qu'adviendrait-il si, par hypothèse, une fois les terrains cédés préalablement à l'Etat, les constructions des bâtiments n'étaient plus possibles pour des raisons que nous ne pouvons pas prévoir à l'avance.
Cinquièmement, le cas de la Maison de l'Europe n'est pas réglé.
Je trouve tout simplement inadmissible qu'un élément aussi vital de la politique onusienne genevoise ne soit pas traité avant l'arrivée d'un projet de loi sur Sécheron sans inclure la parcelle du foyer qui est - et c'est connu - la parcelle la plus délicate ainsi que le point sensible des discussions entre la Ville et l'Etat.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Les propos de M. Joye m'amènent à formuler quelques observations. D'abord, le plan qui vous est soumis à l'appui de ce projet de loi est, bien entendu, celui qui a été soumis à l'appréciation du Conseil municipal.
Je m'étonne que vous puissiez en douter. Le texte du projet de loi a été précisé comme annoncé devant la commission d'aménagement du Conseil municipal pour donner certaines garanties quant à l'échange de terrains entre «Noga Invest» et l'Etat de Genève. Pour être franc, je ne crois pas du tout à cet échange de terrains. Il est clair que dans cette affaire nous avons tout perdu sur le plan foncier.
En ce qui concerne la Maison de l'Europe, qui fait l'objet d'un périmètre distinct de la zone industrielle, savoir si on modifie la zone ou non devrait bien entendu faire l'objet, à ce moment-là, d'un projet totalement distinct.
Je désire souligner, en ce qui concerne la Maison de l'Europe, qui est précisément un de ces projets que certains se sont plu à gonfler pour en faire une sorte de machine de guerre, que c'est une baudruche et j'ai le regret de l'annoncer ici. On s'est fait mener en bateau d'une façon invraisemblable. C'est très triste, et je regrette, pour un certain nombre de causes valables, que des personnes aient voulu porter ce débat sur la place publique alors qu'il eût fallu l'aborder avec sérénité. Mais il faut savoir qu'aujourd'hui il n'y a aucune mission diplomatique des pays du Marché commun qui n'est intéressée à ce projet.
Le Conseil d'Etat a eu la prudence d'adresser une lettre à l'ensemble des missions diplomatiques des pays du Marché commun. Nous étions au courant de leur décision. La seule commission exécutive du Marché commun - elle ne représente qu'une petite part de cette Maison de l'Europe - est encore intéressée, nous dit-elle, à réaliser une construction sur cet emplacement. Nous n'avons eu que des réponses négatives à l'ensemble des lettres envoyées aux missions diplomatiques et certaines n'ont pas répondu.
Toutefois, nous savons qu'aujourd'hui, concrètement, le projet dit «communautaire» n'existe plus. Cela nous a été clairement indiqué par les représentants des missions diplomatiques. Il ne s'agit plus que d'un projet de la commission exécutive du Marché commun car les principaux partenaires n'en sont pas partie prenante.
Cela pose un problème extrêmement délicat dans la mesure où le Conseil d'Etat s'engagerait dans un projet important sur la parcelle du foyer. Il faudrait d'ailleurs que ce dernier puisse accorder une dérogation, car sur cette question il est nécessaire d'avoir l'accord de la Ville de Genève. Il est très délicat de s'engager sur un projet qui implique des dérogations importantes au profit d'un certain nombre de pays du Marché commun sans avoir aucune garantie. Je tenais à le dire car malheureusement ce dossier, comme quelques autres - cela me fait singulièrement penser à feu le dossier Palais Wilson - a été médiatisé. Pour ma part, il vaudrait mieux avoir un tout petit peu de retenue sur les dossiers de ce type.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement.