République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 11 juin 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 6e session - 24e séance
R 258
Débat
Mme Martine Wenker Coskun (S). A travers cette proposition de résolution, nous aimerions apporter notre soutien à toutes celles et à tous ceux qui luttent chaque jour en Birmanie, souvent au prix de leur vie, pour le respect des droits de l'homme et la restauration de la démocratie telle qu'elle avait été souhaitée par le peuple lors des élections de 1990.
Nous aimerions également rendre hommage à celle qui symbolise l'opposition en Birmanie, Mme Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, qui ne cesse de lutter pour la liberté, la non-violence et le respect des droits de l'homme. Par cette proposition de résolution, nous condamnons, comme la commission des droits de l'homme des Nations Unies à Genève l'a fait en date du 17 mars, la junte militaire qui continue à perpétrer des violations graves des droits de l'homme, comme la torture, les travaux forcés, les viols, les exécutions arbitraires et les déportations massives de minorités ethniques après destruction de villages entiers.
C'est pourquoi nous nous devons de soutenir l'action menée par les prix Nobel qui sont venus devant la commission des droits de l'homme réclamer la libération d'Aung San Suu Kyi et de tous les démocrates du pays et qui ont également demandé au Conseil de sécurité des Nations Unies d'élaborer une résolution qui condamne le régime de Rangoon pour ses violations des droits de l'homme, ainsi qu'un embargo sur les armes destinées à la Birmanie, un boycott du pays, la reconnaissance des mouvements d'opposition au régime et, finalement, la restauration de la démocratie.
C'est pourquoi je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés du parlement genevois qui vivez dans une ville à vocation internationale et humanitaire, à soutenir cette proposition de résolution qui concrétise votre engagement dans la lutte pour l'instauration d'une véritable démocratie en Birmanie, en acceptant de la renvoyer au Conseil d'Etat afin que ce dernier intervienne dans ce sens auprès des autorités fédérales compétentes.
J'aimerais conclure en vous invitant à méditer sur le cri du coeur d'Aung San Sun Kyi: «Nous avons tant besoin d'un monde plus lumineux qui offrirait un refuge adéquat à tous ses habitants».
M. Jacqueline Jacquiard (MPG). On ne peut que souhaiter le rétablissement de la liberté pour tous les peuples qui en sont privés. Dans ce sens, nous souscrivons au voeu concernant un de ces pays en lutte pour y parvenir. Je dis notre voeu, car le Conseil fédéral, qui dirige notre politique étrangère, intervient déjà pour la Suisse dans le respect de ses compétences politiques, notamment notre neutralité. Grâce à cette spécificité, la Suisse a très souvent fait oeuvre de paix, même si de nos jours des voix s'élèvent pour suivre certains courants d'intervention qui ne figurent pas dans notre statut.
Mme Mitterrand, citée dans les considérants de la résolution, intervient parfois individuellement en faveur des droits de l'homme. Nous, nous recevons, en tant que signataires, des délégations d'opposition et des prix Nobel de la paix sans pour cela devoir nous engager dans des actions politiques.
Si nous sommes d'accord avec la première invite de la résolution, sur un plan général et dans l'observation de nos attributions en matière de politique étrangère, nous ne pouvons nous rallier à la deuxième invite du Grand Conseil à l'adresse du Conseil d'Etat. Les comités de soutien ne se sont pas toujours manifestés avec la même conviction pour des actions concrètes à l'égard de tous les pays privés des libertés fondamentales, tel le Tibet sous la domination chinoise depuis tant d'années, la Mongolie, voire le Laos et le Cambodge, ainsi que les pays africains.
Pour ces raisons, nous nous abstiendrons de voter cette résolution.
M. Gérard Ramseyer (R). Je soutiendrai cette résolution. En ce qui concerne la deuxième invite, j'aimerais simplement signaler aux auteurs de la résolution que les premiers pays exportateurs d'armes au monde sont précisément les pays asiatiques. C'est dire la portée limitée de la seconde invite!
M. Michel Jörimann (S). J'aimerais dire à Mme Jacquiard et à M. Ramseyer qu'ils ont raison sur le fond. Sur la forme, je rappelle simplement que le Conseil de sécurité a déjà voté l'embargo. On ne pouvait dès lors pas faire autrement dans une résolution que de reprendre un point déjà voté. Sinon, cela aurait été tout à fait minimaliste et notre résolution n'aurait pas eu de raison d'être si ce point n'avait été repris.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée.
Elle est ainsi conçue: