République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 1 avril 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 3e session - 13e séance
PL 6678-A
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. J'avais déposé mon rapport de minorité à la fin novembre déjà; aussi, je me permettrai de le compléter quelque peu car les faits ne font que renforcer la justesse et le bien-fondé de ce projet de loi.
Le 17 novembre dernier, la «Tribune de Genève» publiait les résultats d'une enquête faite auprès de la population genevoise concernant l'appréciation de nos conseillers d'Etat.
S'il est vrai que le titre de l'article de presse précisait que les Genevois sont sévères avec leurs hommes politiques, le commentaire relatif à notre seul conseiller d'Etat assumant aussi un mandat au Parlement fédéral était le suivant: «bon orateur, habile, peu présent, pas toujours efficace». J'attire votre attention sur la qualité de «peu présent», car c'est bien du temps disponible dont il s'agit.
Le 29 décembre 1992, plusieurs journaux publiaient cette fois la liste des mauvais élèves du Parlement fédéral et remarquaient que ceux-ci sont souvent des conseillers d'Etat. Le conseiller d'Etat nous représentant au Parlement fédéral est le deuxième des parlementaires les plus souvent absents. Il compte dix-neuf jours d'absence sur septante-trois jours de session et sept absences au moment de voter alors qu'il figurait sur la liste de présence.
Enfin, rappelons que le 12 janvier dernier, notre ancien collègue Charles Poncet annonçait qu'il quittait le Grand Conseil car il devait se rendre à l'évidence qu'il n'est pratiquement pas possible d'exercer un mandat parlementaire à Genève et à Berne. L'incompatibilité du double mandat est donc vérifiée. Les personnes auditionnées et favorables au double mandat ont admis qu'il fallait alléger la tâche du Conseil d'Etat.
Or, et hormis le fait que personne n'a proposé de solutions concrètes, il faut relever que les Genevois s'attendent à ce que leurs conseillers d'Etat s'occupent en priorité du canton, et cela ressort clairement de la première enquête à laquelle j'ai fait référence. Aussi, tout concourt en faveur de ce projet de loi qui ne peut que conduire à une saine gestion du mandat politique confié. Je vous invite, en conséquence, à voter ce projet de loi.
Mme Jeanine Bobillier (MPG). Je ne reprendrai pas point par point ce qu'a développé Mme Sayegh. Je me bornerai simplement à rappeler l'importance pour notre canton d'être représenté par les membres de son gouvernement auprès de l'administration fédérale. Dans les auditions que nous avons entendues, il a été nettement dit qu'il était vraiment important qu'un membre du gouvernement genevois soit présent à Berne, et je crois vraiment qu'il nous faut rejeter ce projet de loi.
M. Philippe Fontaine (R). Celles et ceux qui auront lu ce rapport auront pris connaissance des avis de nos grands élus, comme nous les appelons chez les radicaux. Vous aurez vu que Robert Ducret, lui, est plutôt pour le rapporteur de la majorité, si je peux m'exprimer ainsi, Guy-Olivier Segond est plutôt contre, Gilles Petitpierre, quant à lui, est tout à fait partagé. (Rires épars.)
Dès lors, il est bien difficile pour notre groupe de dégager un seul avis, raison pour laquelle chacun de mes collègues votera selon sa propre conscience. (Commentaires.)
Cela dit, puisque j'ai la parole, je voudrais exprimer mon avis qui soutient le rapport de minorité. Je suis en effet opposé à une dispersion des activités de ces grands élus. Il est important -- je tiens à le souligner dans ce débat -- de ne pas prendre ce que l'on dit ou ce que l'on ne dit pas de la personne qui est en place aujourd'hui.
Je suis contre ce projet, à cause de cette dispersion des activités, disais-je. En effet, je me rends compte qu'il n'est pas possible d'être partout à la fois et que, lorsque je suis partout, j'ai bien l'impression, Mesdames et Messieurs, d'être nulle part.
Une voix. Parle pour toi!
M. Philippe Fontaine. Oui, Monsieur, je parle pour moi et ce qui est valable pour moi serait certainement valable pour les autres. (Rumeurs.) Lorsque je veux agir à tous les niveaux, eh bien, je me rends compte que je suis souvent incapable de porter l'accent principal sur une action précise. Ainsi, lorsque j'estime que ma présence est indispensable à une place et à une autre, c'est peut-être parce que je n'ai pas suffisamment appris à déléguer.
C'est peut-être parce que parfois je manque d'imagination, ou c'est peut-être que mon égo, par définition, n'aime pas le partage.
Je me demande où nos grands élus se ressourcent et trouvent le temps nécessaire pour savourer les autres plaisirs de l'existence. Où trouvent-ils enfin le temps de la réflexion?
Pour conclure, je voudrais citer William Shakespeare: «Le temps est le maître absolu des hommes. Il est tout à la fois leur créateur et leur tombe. Il leur donne ce qu'il lui plaît et non ce qu'ils demandent». Et je terminerai par deux alexandrins:
Il faut protéger aujourd'hui nos grands élus
Contre ce temps qui les dévore à leur insu.
(Rires.)
M. Bénédict Fontanet (PDC). Double mandat ou pas, «That is the question».
Dans un premier temps, on voit au travers du rapport de minorité de Mme Sayegh le souci louable de se préoccuper de la santé, de la vie privée, du sommeil et des états de service de nos parlementaires et conseillers d'Etat. C'est très bien.
éM 668-Aé Ce fossé éàRapport de commission éRapport de commissioné ê é $F-$D-$I-$Z-é é19900101à é êé lectorat ne pr é é électeurs apportent un cr d) la motion de Mme et MM. Jean-Luc Richardet, Michel Jacquet, Georges Jost, Bernard Lusti, Jean Montessuit, Pierre Meyll, Catherine Rapp-Jotterand et Alain Rouiller concernant l'étude de faisabilité de tramways urbains et régionaux utilisant le site et les infrastructures ferroviaires existantes sur la ligne Annemasse - Les Eaux-Vives; ( -) M668é à â éno history yet é éà è ét Mémorial 1990: Annoncée, 2451. Lettre, 2784. Développée, 3017. Lecture, 3020.é , je crois qu'on peut se poser quelques questions... Motion, 3024.é é é è Ensuite, Madame, c'est une question de libert é àM 674-Bàé é àRapport du conseil dEtat éâRapport du conseil dEtat ê é è$F-$D-$I-$Z- é 19900101êè à é r é ê à une drogue, et nous sommes capables de nous surcharger en saisissant toutes les occasions de t e) la motion de Mme et M. Hélène Braun-Roth et Jean-Claude Genecand concernant la réalisation d'un réseau de transports publics efficaces; ( -) M674â é éno history yetûà é « » à l'autre. Nous nous dispersons et, d'une certaine mani Mémorial 1982: Développée, 4132. Commission, 4145.è re, nous perdons notre cr Mémorial 1982: Rapport de la commission, 590. Motion, 597.é é é « é »P 863-A é à àRapport de commissionéè Rapport de commissionà è à é$F-$D-$I-$Z-é è19900101é à è écessairement des r è é éral et membre d'un ex f) la pétition Tramway: ligne 13. ( -)P863é é ô éno history yeté é é é è ê é é è 15.é Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur les objets suivants: ê ê é ê é Le Conseil d'Etat nous fait un rapport groupèé de pétitions et de motions qui s'étalent sur une dizaine d'années et représentent les discussions longues et fournies que nous avons eues dans ce Grand Conseil et en particulier à la commission des transports. éEn lisant ce rapport, nous ne pouvons pas nous empéêcher d'être légèrement déçus. Je comprends que le Conseil d'Etat réponde à la procédure qu'a mise au point le Bureau en lui demandant de traiter les anciennes affaires en quelques lignes, mais c'est dommage pour certains points. En fait, tout le monde n'est peut-être pas d'accord sur les mêmes points. êEn ce qui me concerne, je trouve regrettable que le point sur le financement soit traitJ'ai le sentiment que la classe politique de notre pays -- l'é en quelques lignes et que le Conseil d'Etat n'ait pas répondu de façon plus explicite à la motion que mon collègue Jean-Luc Richardet et moi-même avions déposée.é Dans un premier temps, j'ai eu envie de demander au Conseil d'Etat un complément de rapport puisque, dans la procédure du Bureau, il était possible, dans un paquet de pétitions et motions comme celui-léà, de demander à ce que l'un des points soit renvoyé de façon isolée au Conseil d'Etat.è Mais, comme c'est nous, Grand Conseil, qui avons demandèé au Conseil d'Etat de nous faire des rapports courts sur les objets en suspens, nous sommes un peu pris à notre propre piège. Je suis tout de même un peu déçu qu'un certain nombre de ces points aient reçu des réponses si lacunaires, même si je comprends les intentions du Conseil d'Etat. ê é à é ô éLe Grand Conseil prend acte de ce rapport.é à Je ne crois pas que le problé è é éP - 942-A; â ç éP 942-Aé è â àRapport de commissionè àRapport de commissioné â ô $F-$D-$I-$Z-é é19900101é à é é. é éê 16.é Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition relative au comportement des squatters du 75, rue des Eaux-Vives. ( -)P942 é ê é éno history yetà à éè êRapport de Mme Liliane Johner (T), commission des pèétitions é é é é é « » èMises aux voix, les conclusions de la commission (dàépôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées. é é é é é é à é P - 950-A; éè éP 950-Aà é é éRapport de commissioné éRapport de commission à éè $F-$D-$I-$Z-è é19900101à é é é àè è17.é Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la pétition des chauffeurs de taxi contre un émolument injustifiable. ( -)P950 é é à âno history yetê é é àé Rapport de M. Hervèé Dessimoz (R), commission des transports é é é é é é ê àDèébat é à é ê ï J'ai fait une erreur de dictée dans le rapport en prêécisant que cette pétition était renvoyée sur le bureau du Conseil d'Etat, alors que c'est bien sur le bureau du Grand Conseil. Par contre, le Conseil d'Etat devait nous faire une déclaration sur le principe du double contrôle, et je crois que M. Ziegler la fera tout à l'heure.è é é é é Je remercie la commission des transports qui, pour accàélérer ses travaux, a accepté qu'un renseignement qui nous manquait lui soit fourni en séance plénière. ùIl s'agissait de vérifier si la carte de travail faisait double emploi avec le disque tachygraphe qu'utilisent les chauffeurs de taxi. Apréès vérification, ce n'est pas le cas. Les deux institutions sont prévues par le droit fédéral. Nous pensions que l'une était prévue par le droit fédéral et l'autre par le droit cantonal, et que le droit cantonal était redondant avec le droit fédéral. éCette carte de travail peut remplacer le livret de travail prévu par la lùégislation fédérale sur la durée du travail, soit l'ordonnance sur la durée du travail et du repos des conducteurs professionnels. Il n'y a donc pas de redondance crée par le canton, qui ne fait qu'appliquer, en cette matiéère, la législation fédérale. éPour le surplus, je vous signale que cet èémolument entré en vigueur au début de l'année a été payé sans problème par l'ensemble des conducteurs concernés. Il s'agit ici aussi de respecter le principe de couverture des charges de fonctionnement de notre Etat, et il est nécessaire qu'ici aussi nous appliquions le principe de l'équivalence. é é é é é A brebis tondue, Dieu mesure le vent. (Rires.) Nos autorit és, à tous les échelons, qui ont souvent tendance à se prendre pour Dieu, feraient bien de s'inspirer quelquefois de ce dicton populaire. Nul n'ignore que les chauffeurs de taxi, employés ou artisans, sont actuellement tondus vraiment très court, voire carrément écorchés. Qu'on en juge! éLe tarif dit è«officiel» n'a plus été ajusté au coût de la vie depuis juin 1985, alors que la perte du pouvoir d'achat de la monnaie est de l'ordre de 30%. Tous les émoluments du service des automobiles ont subi un réajustement substantiel. Le département de l'économie publique, quant à lui, s'apprête à faire «cracher les taxis au bassinet de l'Office du tourisme». Non content de la hausse substantielle des taxes sur l'essence, que le bon, le trop bon peuple a acceptée, on va encore augmenter d'un tiers le coût de la vignette autoroutière qui est absolument indispensable aux taxis. éCitons pour mémoire l'augmentation des assurances et autres frais gèénéraux. Pour couronner le tout, l'entrée en vigueur de l'initiative dite «Pour des taxis moins chers» se traduit par un afflux massif de nouveaux taxis aux stations, d'où baisse dramatique du nombre de courses par chauffeur, impossibilité de stationner, recherche vaine de places libres, kilomètrage à vide et, finalement, amende salée pour stationnement en double file. éDans ces conditions, ne trouvez-vous pas que faire payer un émolument supplémentaire aux travailleurs de la branche des taxis, pour le droit de travailler et pour faire contrèôler ce droit, devient quelque chose de parfaitement indécent? Je vous prie instamment, Mesdames et Messieurs les députés, par respect pour les gros soucis de travailleurs particulièrement défavorisés aujourd'hui et dont le revenu, réduit à la portion congrue, est dépourvu de la moindre garantie, de bien vouloir renvoyer leur pétition au Conseil d'Etat pour qu'il prenne en considération une demande parfaitement légitime. é é è é é àMises aux voix, les conclusions de la commission (dépéôt sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées. é «é è é éLa présidente.é M. Queloz a la gentillesse de nous offrir un apéritif, aussi je làève la séance pour vous permettre de vous y rallier. éLa sèéance est levée à 18 h 45. è è ê é é La piste qui est la plus souvent èévoquée par les cantons c'est celle qui consisterait -- comme l'ont fait les Allemands -- à transformer la Chambre des cantons en une vraie chambre où seraient représentés les gouvernements cantonaux -- par les ministres des «Länder» en République fédérale. On ne voit pas pourquoi une telle évolution ne serait pas également désirable sur le plan suisse. êOn a vu l'utilité de cette institution du à«Bundesrat» allemand au moment de la réunification, où il a fallu traiter de dossiers extraordinairement compliqués, des relations financières entre le centre et les «Länder», entre l'Etat fédéral et les «Länder». éEn Suisse, les probléèmes dont nous avons à débattre actuellement sont des dossiers tout aussi compliqués. Il nous faudra bien, d'une manière ou d'une autre, résoudre ce problème institutionnel. En ce sens, les auteurs du projet de loi ont amorcé une réflexion. Je doute que cette réflexion se termine aujourd'hui. Il faudra que votre parlement et votre gouvernement poursuivent ensemble cette réflexion. Il est vrai que c'est surtout une réflexion à mener à l'échelle de la Confédération, mais il n'est pas interdit aux cantons d'avoir une opinion à cet égard. é Comme l'indiquait tout é à à èMis aux voix, ce projet est rejetàé en premier débat. é é é à é éP - 495-A; M - 348-A; M - 603-A; M - 668-A; M - 674-B; P - 863-A; é éèP 495-A é é éRapport de commissioné èRapport de commissioné é ê é$F-$D-$I-$Z-é è19900101à é é û «é ésir de voir la r a) la pétition Pour des transports publics efficaces; ( -) P495é ê é éno history yetâ è ô é è éd Mémorial 1982: Rapport de la commission, 4207.é » èé éM 348-Aé é é éRapport de commissioné àRapport de commission é é ê$F-$D-$I-$Z-à è19900101àé é à moins que ce Grand Conseil ne soit touch é â éanmoins un petit exercice de b) la motion de MM. Jean-Luc Richardet et Alain Rouiller invitant le Conseil d'Etat à réexaminer les modalités de financement pour les infrastructures des TPG; ( -) M348« » é éno history yeté é é é à Mémorial 1985: Développée, 5098. Motion, 5102.» é é é é éM 603-Aé é à éRapport de commissioné éRapport de commissioné à ê é$F-$D-$I-$Z-é é19900101 ô è é des parlementaires f é é ée comme des poissons rouges dans un bocal qui nagent dans leurs propres eaux, prot c) la motion de MM. Jean-Claude Genecand et Jean Montessuit concernant le prolongement de la ligne 12; ( -) M603é é é éno history yeté î é à èé Mémorial 1989: Développée, 5905. Motion, 5910. à é
Il se trouve, comme par hasard, qu'un conseiller d'Etat, qui appartient d'ailleurs à mon parti, serait susceptible, semble-t-il, d'être visé par ce projet de loi. Alors, puisque vous lui faisiez le grief, Madame, d'avoir été absent l'année passée plus qu'il ne l'aurait fallu, permettez-moi de vous dire que l'efficacité des députés, et c'est aussi vrai pour notre Grand Conseil, ne se mesure pas forcément à leur présence. Il me semble d'ailleurs que les meilleurs d'entre nous ne sont pas forcément les plus présents!
Le second des éléments que je voulais relever, c'est que M. Maitre a été président du Conseil d'Etat l'an dernier, ce qui est source d'une charge accrue et qu'outre des négociations interminables avec le Cartel intersyndical de la fonction publique, il a dû -- vous me passerez l'expression -- «se taper» pas moins de quatre grèves (Rires.) et que sa présence, par voie de conséquence, pouvait être plus requise à Genève qu'à Berne.
Mais enfin, il ne faut pas oublier non plus que nous vivons dans un petit pays et dans un petit canton. Le canton de Genève a à peu près 400 000 habitants; la Suisse en a 6,5 millions. On peut bien, dans un petit pays et un petit canton, assumer deux charges publiques à la fois. Il y a d'autres pays autour de nous, beaucoup plus grands et plus puissants, qui connaissent le double mandat.
Ce qui doit nous guider, c'est le souci de l'efficacité d'une part et, d'autre part, de la liberté, car il est démontré, semble-t-il, et les auditions en commission étaient intéressantes à cet égard, qu'il est important pour le gouvernement d'être représenté au sein des Chambres fédérales afin de faire le lien entre le canton, d'une part, et les Chambres fédérales, d'autre part.
Ensuite, Madame, c'est une question de liberté. Il y a des gens plus ou moins intelligents. Je ne veux pas dire par là que M. Maitre est le plus intelligent de nos conseillers d'Etat. Je n'ai aucun doute, quant à moi, à cet égard, mais il y a des gens plus ou moins travailleurs, plus ou moins qualifiés. Alors, pourquoi empêcher ceux qui estiment avoir les qualités nécessaires, s'ils ont aussi le goût de se charger plus que d'autres, d'exercer un double mandat?
La seule question qui se pose, à mon sens, est celle du parti politique. Il est vrai que les partis politiques résolvent les questions de durée de mandat ou de double mandat avec plus ou moins d'heur et de bonheur. Toutefois, il n'est pas nécessaire de faire intervenir une modification de la constitution pour régler un problème qui, selon nous, doit être traité par le parti politique du ou des magistrats concernés.
Je crois que nous sommes assez grands pour nous imposer, le cas échéant, des limitations lorsqu'il le faut. Il n'est donc pas nécessaire de faire intervenir une modification de la constitution pour se discipliner dans le cadre d'un parti politique; tel n'est en tout cas pas la nécessité à l'intérieur du parti politique auquel j'appartiens.
Lors de mon intervention en préconsultation, je vous avais déjà dit quelles étaient les réticences qu'inspirait ce projet de loi à notre groupe. Réticences, tout d'abord, parce que nous craignions qu'en posant une question de principe, il ne vise également une personne. Je dois vous dire à cet égard que l'intervention de Mme Sayegh n'est pas de nature à dissiper toute ambiguïté sur ce point.
Réticences, aussi, car finalement c'est le peuple qui décide, lorsqu'il élit ses conseillers nationaux et ses conseillers d'Etat, de nommer ou non des personnes ayant un ou plusieurs mandats. Ce choix appartient au peuple et, dans une mesure très restreinte certainement, mais tout de même, ce projet de loi équivaut à limiter l'exercice des droits populaires puisqu'il réduit le choix des candidats que l'on peut présenter au peuple.
Comme l'indiquait tout à l'heure M. Fontanet, c'est finalement aux partis à s'imposer des règles de comportement. Si le parti socialiste estime que le double mandat n'est pas une chose souhaitable, c'est parfaitement honorable. Il appartient donc à ce parti de ne pas mettre des candidats dans la situation de devoir assumer un tel double mandat. Toutefois, on peut se demander si, sur ce point, il est nécessaire de légiférer et de se substituer à l'appréciation du peuple qui a toujours le choix de décider s'il entend ou non accepter un double mandat.
Une dernière réserve a été exprimée lors de nos travaux en commission. En effet, il est utile de ne pas couper Genève de Berne. Un certain nombre de personnes que nous avons auditionnées nous ont indiqué que cela pouvait être une source d'enrichissement pour notre Conseil d'Etat que d'avoir de meilleures antennes dans le cadre du Parlement fédéral. En ce sens, ce n'est pas une mauvaise chose pour Genève, qui a malheureusement tendance à s'isoler un peu de notre capitale, qu'il y ait un certain nombre de personnes pouvant faire le lien entre notre canton et la Confédération.
Je vous exprimerai enfin un regret. Nous avons esquissé en commission le désir de voir la réflexion se poursuivre dans le sens du projet de loi, vers une proposition qui voudrait que, si des conseillers d'Etat ont un double mandat, ils puissent être déchargés d'une partie de leurs tâches pour tenir compte de leur double mandat, de cet espèce de rôle de ministre des affaires étrangères ou des affaires confédérales qu'ils pourraient exercer pour le plus grand profit de notre canton.
Les auteurs du projet de loi ont considéré que s'engager sur cette voie, c'était par trop s'éloigner de leur volonté. Ils ont souhaité un débat net et que nous nous prononcions par oui ou par non. Je dois donc vous dire que, malheureusement pour les auteurs du projet, nous en sommes venus à dire non.
Les dés semblent jetés et, à moins que ce Grand Conseil ne soit touché par la grâce de M. Fontaine, je crains que vous ne rejetiez ce projet de loi. Permettez-moi néanmoins un petit exercice de «donquichottisme», et souffrez que je vous expose un argument qui ne me semble pas avoir été mis en exergue dans ce débat, mais qui a été esquissé tout à l'heure par M. Jean Queloz dans son discours d'adieu.
Nous constatons tous que le fossé entre la classe politique et la population se creuse de plus en plus. Les récents événements sous la coupole fédérale ont illustré à merveille cette cassure. On a vu dans un premier temps les politiciens ourdir dans les couloirs des manoeuvres pour faire élire un homme au Conseil fédéral en ignorant totalement les aspirations légitimes des femmes à être représentées et gouvernées par une des leurs.
En d'autres termes, la majorité des parlementaires fédéraux s'est comportée comme des poissons rouges dans un bocal qui nagent dans leurs propres eaux, protégés du monde environnant, de la réalité par une vitre épaisse et, de surcroît, déformante.
Dans un second temps, heureusement... (Hésitation de l'orateur.)
M. Jean Montessuit. Ils sont sortis du bocal! (Rires.)
M. David Lachat. ...les politiciens ont su, sous la pression de la rue il est vrai, corriger le tir et prendre une décision sage.
Ce fossé entre les politiciens et la population existe à tous les niveaux, sur le plan fédéral comme sur le plan cantonal, au Grand Conseil et au Conseil d'Etat. Nous devons y être attentifs.
Les politiciens se comportent de plus en plus comme une caste supérieure qui agit en vase clos, relativement loin des intouchables que sont les citoyennes et les citoyens dont ils ne se souviennent pratiquement que tous les quatre ans.
Pourquoi donc ce fossé existe-t-il et se creuse-t-il entre les politiques et la population? A mon sens, je vois trois explications, parmi d'autres. Tout d'abord, je pense que la presse qui est la courroie de transmission entre le monde politique et son électorat ne présente pas toujours une image de notre travail assez approfondie et sérieuse pour que les électeurs apportent un crédit suffisant à notre tâche.
Lorsque l'on voit, par exemple, et c'est une anecdote, qu'un quotidien de la presse consacre une demi-page avec une énorme photo à la promenade d'un conseiller d'Etat qui va visiter les vaches au Salève en été, je crois qu'on peut se poser quelques questions...
Une voix. Quel conseiller d'Etat?
M. David Lachat. Cela vaut pour tous les conseillers d'Etat, rassurez-vous!
M. Philippe Joye. Et pour toutes les vaches! (Rires.)
M. David Lachat. La seconde raison que je vois réside dans l'accumulation du travail qui accable les politiciens et, en particulier, les conseillers d'Etat. Il y a quelques années, M. Chavanne avait encore le temps d'aller au bistrot et de discuter avec les gens du quartier. (Rumeurs.) M. Grobet n'a pas eu le temps, lui, et doit travailler dix heures par jour pour faire face au nombre de dossiers dont il doit s'occuper... (Rumeurs.)
Comment voulez-vous qu'avec l'accumulation des tâches qui les accablent les politiciens aient le temps, surtout lorsqu'ils sont d'un certain niveau, même d'un haut niveau, de descendre dans la rue, en quelque sorte de sortir de leur bureau, de leurs salles de réunions, pour sentir de plus près le pouls de la population.
La troisième raison que je vois à ce fossé réside dans la nature de l'homme politique et, peut-être demain, de la femme, mais en tout cas aujourd'hui de l'homme politique. Nous sommes en quelque sorte des toxicomanes. Nous aspirons toutes et tous au pouvoir comme à une drogue, et nous sommes capables de nous surcharger en saisissant toutes les occasions de tâches, de fonctions et apparemment d'honneurs que nous pouvons briguer.
Nous devenons des agités incapables de travailler à fond sur les dossiers qui nous sont confiés. Nous «volons» d'un dossier à l'autre. Nous nous dispersons et, d'une certaine manière, nous perdons notre crédibilité. Nous sommes en train lentement, Mesdames et Messieurs, de transformer notre démocratie en une «médiocratie». (Applaudissements.)
Une voix. C'est un discours d'adieux?
M. David Lachat. Y a-t-il un remède à ce mal? Je ne crois pas qu'il y ait un seul remède à ce mal. Je pense néanmoins qu'il est sain et sage de prévoir des garde-fous, des règles du jeu, des mesures qui permettent aux politiciens, et aux partis qui les poussent, de résister à la tentation. Parmi ces mesures, je vois très clairement et nécessairement des règles sur le double mandat. Non seulement le double mandat entre parlementaire fédéral et membre d'un exécutif cantonal, mais aussi le double mandat entre membre d'un exécutif communal et parlementaire cantonal, et j'en vois d'autres. Je pense que nous devrons, tôt ou tard, prendre de telles mesures. Pour cette raison, je pense que nous ne terminerons que provisoirement ce débat aujourd'hui, mais je suis assuré que nous y reviendrons un jour.
Une voix. Bravo!
Je voulais rassurer M. Lachat, je ne me sens pas particulièrement drogué, même si j'ai la même activité professionnelle et la même activité politique que lui. (Exclamations diverses.) Enfin, je ne souffre pas et je suis très étonné de le voir souffrir, lui socialiste, d'une sorte de complexe de classe.
J'ai le sentiment que la classe politique de notre pays -- l'élection au Conseil fédéral, c'est un peu particulier, puisqu'effectivement elle a été ressentie de manière très douloureuse par certains ou par certaines d'entre nous -- n'a pas le droit d'être coupée de la population, Monsieur Lachat, car, lorsque nous manquons à nos devoirs, par le biais des institutions de démocratie semi-directe qui sont les nôtres, la population fait une initiative populaire, lance un référendum et se rappelle, bien souvent, au bon souvenir des politiciens qui n'ont pas le droit, qui ne peuvent pas l'oublier.
Je ne crois pas que le problème que vous posiez et qui est réel soit celui de l'importance donnée maintenant aux tâches publiques que nous exerçons. C'est vrai que le mandat de député -- je vous le concède volontiers -- devient une tâche difficile à exercer parallèlement à d'autres activités; c'est vrai aussi que, dans notre Grand Conseil, nous manquons cruellement de moyens par rapport aux tâches importantes qui sont les nôtres.
Je crois que ce n'est pas un débat de double mandat ou non. Le débat consiste à savoir si oui ou non on doit donner aux parlementaires, aux élus politiques les moyens d'exercer leur fonction convenablement; ce n'est pas l'affaire de savoir si on peut exercer l'une ou l'autre activité.
Vous me faites peur car, si on vous suit, on ne pourra plus être maire d'une petite commune et député au Grand Conseil. Si mon choix est celui d'être maire d'une petite commune et député au Grand Conseil, je dois pouvoir l'assumer. Si je n'en suis pas capable, c'est à mon parti politique de me le rappeler. Ensuite, ce sont aux institutions politiques de se donner les moyens de bien fonctionner.
Je vous suggère d'être très ambitieux et de nous comparer un instant aux parlementaires fédéraux américains. Eh bien, M. Kennedy, sénateur, membre de la commission de la justice du Sénat, a entre quatre-vingt et cent vingt collaborateurs qui travaillent pour lui, et il est «simple» parlementaire. Je crois que le problème que vous posez est juste, mais c'est une question de moyens et non de cumul des fonctions car, là encore, cela peut parfaitement fonctionner. Je pense enfin qu'il est utile que notre canton soit représenté aux Chambres fédérales.
Brièvement, trois remarques au nom du Conseil d'Etat. Tout d'abord, le Conseil d'Etat voulait vous dire qu'il regrette la personnalisation de ce débat, du moins à ses débuts. Heureusement, il a été dépersonnalisé par la suite.
Le problème n'est pas de savoir si tel ou tel conseiller d'Etat peut ou non cumuler sa charge avec celle de conseiller national ou de conseiller aux Etats. Le seul problème dont il s'agit de débattre est institutionnel, et, à cet égard, le Conseil d'Etat regrette l'intervention de Mme Sayegh, comme d'ailleurs celle de M. Fontanet qui lui a répondu.
Il ne fallait pas parler du problème de mon collègue Maitre. D'autres parlementaires fédéraux sont conseillers d'Etat et comptaient également parmi les plus absents, à ce que je sache. Et pourtant, ils figurent parmi les plus grands noms du parlement comme M. Leuenberger de Zurich ou M. Matthey de Neuchâtel. Ce sont des gens qui ne passent pas pour être de mauvais parlementaires, au contraire! Il est regrettable de faire une personnalisation de ce type de débat.
Je rappelle également que l'an dernier notre collègue était président du Conseil d'Etat. C'était une année agitée et souvent nous lui avons demandé nous-mêmes de rester à Genève alors qu'il avait des séances à Berne. Nous portons aussi une part de responsabilité. Peut-être aurait-il mieux valu discuter du partage du travail au sein du gouvernement.
Cela étant, voici ma deuxième remarque. Je crois que ce projet a été déposé à un moment où nous avions une autre perspective devant nous qui était celle de la réforme du Parlement fédéral où les parlementaires fédéraux seraient devenus des professionnels ou des quasi-professionnels. Le problème se posait alors en d'autres termes. C'était un vrai débat institutionnel. Dans l'intervalle, la réforme du parlement a échoué en votation populaire.
Enfin, voici ma troisième remarque, et c'est le coeur du débat. Il y a un vrai débat institutionnel actuellement en Suisse sur la liaison entre le centre et les cantons. C'est un problème de liaison entre les gouvernements cantonaux et les institutions fédérales. C'est tellement vrai que nous l'avons vu pendant l'examen du dossier européen. Il a fallu mettre sur pied des organismes parallèles aux Chambres fédérales et, plus particulièrement, au Conseil des Etats qui est censé représenter les cantons à travers ce qu'on appelle un groupe de contact Confédération-cantons.
Il a fallu que les cantons délèguent des membres de leur gouvernement dans ce groupe de contact pour débattre du dossier européen. Cela montre que nos institutions, telles qu'elles sont définies par la Constitution fédérale, n'ont pas suffi à assumer cette liaison, qu'il a fallu créer des structures parallèles. Elles montrent qu'il y a un vrai problème institutionnel, et, vous le savez, la plupart des gouvernements cantonaux, comme le Conseil d'Etat genevois, pensent que ce problème doit être résolu.
La piste qui est la plus souvent évoquée par les cantons c'est celle qui consisterait -- comme l'ont fait les Allemands -- à transformer la Chambre des cantons en une vraie chambre où seraient représentés les gouvernements cantonaux -- par les ministres des «Länder» en République fédérale. On ne voit pas pourquoi une telle évolution ne serait pas également désirable sur le plan suisse.
On a vu l'utilité de cette institution du «Bundesrat» allemand au moment de la réunification, où il a fallu traiter de dossiers extraordinairement compliqués, des relations financières entre le centre et les «Länder», entre l'Etat fédéral et les «Länder».
En Suisse, les problèmes dont nous avons à débattre actuellement sont des dossiers tout aussi compliqués. Il nous faudra bien, d'une manière ou d'une autre, résoudre ce problème institutionnel. En ce sens, les auteurs du projet de loi ont amorcé une réflexion. Je doute que cette réflexion se termine aujourd'hui. Il faudra que votre parlement et votre gouvernement poursuivent ensemble cette réflexion. Il est vrai que c'est surtout une réflexion à mener à l'échelle de la Confédération, mais il n'est pas interdit aux cantons d'avoir une opinion à cet égard.
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.