République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 12 mars 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 3e session - 12e séance
PL 6872-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
M. David Lachat (S), rapporteur. Les noces que nous allons célébrer ce soir n'ont rien de romantique. Nous n'avons pas à unir des amants pleins de fougue et de passion. Les fiancés sont déjà âgés, un peu usés, ils se sont longtemps détestés. Ils ont cherché l'un et l'autre leur bonheur ailleurs sans le trouver, notamment dans des étreintes furtives et onéreuses avec des spéculateurs immobiliers. (Rires.)
Avec le temps, nos deux fiancés se sont rendu compte qu'ils n'avaient pas d'autre choix, pas d'autre avenir qu'ensemble. Aussi se sont-ils résolus à se marier sans passion réciproque: un pur mariage de convenance et de raison. La commission ad hoc du Grand Conseil chargée d'orchestrer ce mariage entre la Caisse d'épargne et la Banque hypothécaire n'est d'ailleurs pas transportée d'enthousiasme et ne baigne pas dans l'euphorie. Elle se contente de vous livrer un «nihil obstat» unanime, fondé sur une froide analyse objective de la situation actuelle des deux banques.
Tous les avis autorisés concordent pour dire que la Caisse d'épargne et la Banque hypothécaire de Genève ont chacune une trop petite taille pour pouvoir, à moyen terme, survivre à la concurrence qu'elles se livrent mutuellement depuis qu'elles sont devenues toutes deux des banques universelles. La taille de ces deux banques ne leur permet pas non plus de résister à la rivalité des établissements privés. Dans un espace géographique et commercial aussi restreint que le canton de Genève, il n'est plus possible d'avoir deux banques cantonales qui assument des tâches analogues. Il est dès lors raisonnable et nécessaire d'approuver cette fusion. Elle s'inscrit d'ailleurs dans la mouvance des concentrations bancaires auxquelles nous assistons actuellement dans notre pays. De surcroît, elle s'inscrit peut-être dans une future mouvance de concentration des banques cantonales dans un espace géographique plus large, par exemple au niveau romand.
Cette fusion intervient, par ailleurs, à un bon moment pour la Caisse d'épargne et surtout pour la Banque hypothécaire. Ces deux banques ont connu, ces deux dernières années, des difficultés liées à la conjoncture mondiale et locale, à la hausse des taux et je pense aussi, en tout cas à titre personnel, à des opérations immobilières hasardeuses. Ces banques ont dû constituer de très importantes provisions pour débiteurs douteux. Leur marge bénéficiaire s'est réduite et elles devront encore consentir un effort pour provisionner avant la fusion l'ensemble des risques identifiés.
On peut toutefois faire preuve d'un très léger optimisme, notamment en raison de la baisse en marche des taux hypothécaires. Ils devraient réduire quelque peu l'importance des risques. La fusion devrait aussi, semble-t-il, donner un dynamisme nouveau à la banque et la faire sortir des eaux un peu agitées. On espère également qu'un conseil d'administration restreint, mais fort, sera à l'avenir plus regardant que les organes actuels des deux banques qui, à mon avis, n'ont pas assumé de manière optimale leurs tâches et leurs responsabilités.
La fusion envisagée n'est pas seulement nécessaire pour les deux banques. Elle sera utile à l'économie genevoise et contribuera certainement au nécessaire effort de relance. Par conséquent, c'est une commission unanime qui vous invite à entrer en matière et à approuver le processus de fusion envisagé. Je n'entends pas à ce stade entrer dans le détail du projet de loi et je me réserve la possibilité d'apporter quelques précisions et corrections, d'une part, au rapport qui vous est soumis et, d'autre part, au moment de la discussion article par article.
Permettez-moi de terminer cet exposé liminaire en tirant quelques conclusions sur le fonctionnement de notre parlement, fonctionnement que j'apprécie à la lumière des travaux de la commission ad hoc chargée d'examiner ce projet de loi sur la fusion des deux banques.
Assurément, notre parlement n'a pas les moyens de traiter en profondeur de tels dossiers. La commission qui s'est penchée sur ce projet de fusion n'avait probablement pas toutes les connaissances techniques requises. Nous avons fait de notre mieux, mais nous n'avons pas été assistés d'experts. Nous n'avons pas bénéficié d'une documentation abondante.
A titre d'anecdote, je peux vous dire que j'ai dû faire un effort relativement important de lecture, de recherche et de travail en bibliothèque pour obtenir un simple historique. Je pense donc qu'il serait grand temps que notre parlement se dote d'un service de documentation adéquat qui nous permette de faire notre travail dans de meilleures conditions.
Nous avons été livrés dans cette affaire aux indications qui nous étaient fournies par les banques. Il n'y a aucune suspicion de notre part, mais nous avons dû faire confiance et nous n'avons pas été en mesure de contrôler quoi que ce soit.
Les renseignements nous ont été fournis, je pense, avec loyauté, honnêteté, mais quand même avec une certaine parcimonie. A titre d'exemple, je vous donne l'illustration de ce qui s'est passé lorsque les banques nous ont présenté le mécanisme technique de leur fusion. En commission, nous avons eu un exposé très complet mais extraordinairement rapide. On nous a présenté des planches avec des chiffres qui défilaient à une vitesse vertigineuse et, malgré tous les efforts de compréhension que nous avons pu faire, je doute qu'un seul député -- en tout cas ce n'était pas mon cas -- ait réellement compris la situation tout de suite.
Lorsque nous avons demandé à pouvoir disposer sur-le-champ de documents écrits, on nous a dit que des problèmes, liés à la suspension de la cotation boursière, rendaient difficile la délivrance immédiate de tels documents, tant et si bien que les premiers renseignements écrits et chiffrés que nous avons eus -- cela a été mon cas -- nous les avons puisés le lendemain dans la presse locale, en particulier dans la presse spécialisée, qu'il s'agisse d'abord du «Journal de Genève» et ensuite dans la «Neue Zürcher Zeitung». Il est vrai, et je l'admets bien volontiers, que les banques ont par la suite collaboré avec beaucoup de générosité et le rapporteur a eu le privilège de pouvoir bénéficier d'une assistance soutenue de la part des deux banques et des personnes spécialisées dans cette fusion.
J'ai quand même eu le sentiment que la commission était un peu livrée à elle-même. Nous n'avons pas pu faire notre travail dans les conditions optimales que l'on aurait pu souhaiter. Je suis un peu rassuré de constater que le Conseil d'Etat était aussi, d'une certaine manière, à la même enseigne, même si ce n'était pas au même degré.
Toujours à titre d'anecdote, je livre deux impressions personnelles. Lorsque nous avons cherché à savoir comment seraient financés les 147 millions que l'Etat de Genève verse dans la corbeille de la mariée, il nous a été dit, dans un premier temps, qu'il faudrait faire un emprunt. Dans un second temps il nous a été dit que ce ne serait pas nécessaire. Et dans un troisième temps, lorsque le conseiller d'Etat responsable et les banques se sont concertés, il nous a bien été confirmé qu'il faudrait faire un emprunt.
S'agissant de la situation fiscale et des banques, dans un premier temps, le chef du département des finances et contributions nous a dit ici, devant ce Grand Conseil, qu'il y aurait une fiscalité pleine et entière. Quelque temps plus tard, à la suite d'une réunion avec les banques, on nous a dit que la part du capital en main des collectivités publiques, cantons et communes, serait proportionnellement exonérée d'impôts. Tout ceci pour vous dire qu'il y a eu un certain flottement dans l'information et que l'autorité politique n'a pas les possibilités, dans ce type de dossiers, d'apprécier complètement, et je dirai techniquement, l'ensemble des données. En définitive, si nous étions à l'école primaire, et si notre maîtresse devait rendre ce soir à la commission son carnet, je crois que le commentaire serait: «La commission s'est donné de la peine, mais elle en a!».
Le président. Le Grand Conseil a reçu sur cet objet une résolution du Conseil municipal de la Ville de Genève que je prie Mme Martine Roset, notre secrétaire, de bien vouloir lire.
M. Hervé Dessimoz (R). Les considérations de M. Lachat, rapporteur, trouveront certainement réponse, dans une certaine mesure, dans la déclaration ultérieure de M. Vodoz. Personnellement, après les travaux de la commission, j'ai pris la peine d'assister aux assemblées générales tant de la Banque hypothécaire que de la Caisse d'épargne. Aujourd'hui, j'ai le sentiment d'avoir une idée très claire du processus de fusion et du processus de création de la Banque cantonale de Genève. J'ai été conforté dans ce sentiment par l'attitude des détenteurs de bons de participation qui assistaient à ces assemblées qui m'ont paru plutôt enthousiastes à cette idée et -- je crois pouvoir l'affirmer -- qui ont compris l'importance de la décision mais aussi des principes du mécanisme de fusion. Il est vrai que dans un domaine aussi complexe, tant les commissaires que les détenteurs de bons ont dû faire confiance aux organes désignés pour préparer ce mécanisme de la commission de pilotage présidée, d'une part, par M. Vodoz et, d'autre part, par les sociétés de révision, les consultants extérieurs, comme Arthur Andersen, qui ont été mandatés pour faire un travail d'évaluation des risques ou d'autres travaux. Notre mission n'est pas de remettre en doute le travail de sociétés considérées, qui prennent une responsabilité lorsqu'elles signent un rapport.
Cela étant, Monsieur le président, permettez-moi, en guise de préambule à mon intervention directe de vous livrer trois citations sur le thème de l'argent:
«L'argent ne représente qu'une nouvelle forme d'esclavage impersonnel, à la place de l'ancien esclavage personnel.»
La deuxième: «L'argent peut tout, il permet tout, il donne tout.»
Et enfin: «Point d'argent, point de Suisse».
La première citation est de Léon Tolstoï. La deuxième est de Marcel Pagnol et la troisième de Jean Racine qui, au XVIIème siècle, pensait déjà beaucoup de bien de nous!
Si l'on prend en considération les rapports conflictuels qu'entretient l'homme avec l'argent, nous comprenons aussi pourquoi il en va de même avec la banque, dans la mesure où celle-ci symbolise, plus que tout autre, cet argent.
En ce qui concerne les travaux de la commission, je voudrais vous dire ceci.
Dans le contexte évoqué tout à l'heure par M. Lachat, avec les fiançailles de la Banque hypothécaire et de la Caisse d'épargne, la tentation était certes grande d'ouvrir un débat de fond sur le thème de la banque. Si la tentation était également grande de procéder à la critique du système bancaire pour les excès qu'il a générés dans un proche passé, si la tentation était encore grande de juger la Caisse d'épargne ou la Banque hypothécaire, très vite les commissaires décelèrent l'essence même du problème qui leur était posé, à savoir: notre canton doit-il disposer d'une banque cantonale? Et si la réponse était oui, quelle serait son ambition?
Dans ces temps troublés, Genève prend cruellement conscience de sa faiblesse financière tant dans les domaines bancaires que dans ceux des assurances. Genève subit dès lors plus sévèrement que n'importe quel autre canton les effets de la crise économique.
Les commissaires ont étudié, débattu, amendé puis adopté le projet de loi d'application dans le seul but de permettre la création de cette banque unique et d'en assurer son avenir. Dans cet esprit, ils ont donné une prime à la compétence et à l'efficacité, notamment en régissant la composition des organes dirigeants. Il y a lieu de préciser ici que la majorité de la commission a décidé de ne pas donner suite aux vues exprimées par la Ville de Genève et qu'elle a proposé de limiter le nombre des administrateurs à dix-huit au maximum, soit six désignés par le Conseil d'Etat pour le canton, six désignés par les communes, dont quatre pour la Ville de Genève et deux pour les autres communes, et trois à six pour la représentation des actions au porteur. Dans la mesure où la Ville de Genève, par la résolution qui vient de vous être lue, insiste dans son ambition d'obtenir deux sièges de plus, il vous appartiendra de vous déterminer en fonction de vos convictions.
Si l'autorité de surveillance, pour des raisons juridiques, n'a pu être confiée à la Commission fédérale des banques, elle reste donc le fait du Conseil d'Etat. Dans la mesure où la commission pensait qu'il importait à votre Conseil de pouvoir s'exprimer, chaque année, sur la marche des affaires de la Banque cantonale, il a été convenu que le Conseil d'Etat rapporterait sur son activité de surveillance lors du compte-rendu annuel.
Tout au long de ses travaux, la commission a été assistée par M. Vodoz, président du département des finances. Qu'il soit ici remercié pour sa disponibilité et sa volonté de servir au mieux les travaux de la commission. Mes remerciements vont aussi à ses collaborateurs. Je dois citer les directions des banques et leurs collaborateurs qui ont montré une grande disponibilité, M. Lachat l'a évoquée tout à l'heure, mais aussi un esprit d'ouverture apprécié. Ils ont ainsi, dans le respect du secret bancaire, répondu aux nombreuses questions, notamment sur les risques identifiés, les activités de la future banque, le mécanisme de fusion ou encore le plan social de restructuration du personnel.
Je tiens, au nom de tous les commissaires, à remercier très sincèrement M. David Lachat, rapporteur de la commission, qui s'est imposé un travail important. Grâce à la qualité remarquable et remarquée de ce rapport, le débat avec les citoyens, qui seront appelés à se prononcer sur ce projet, en sera grandement facilité.
Enfin, mes remerciements vont à tous les commissaires qui ont montré une assiduité, une volonté de servir que j'avais peu souvent observées à ce jour.
En guise de conclusion, je rappellerai que la commission a également débattu sur l'éthique bancaire. Elle a voulu qu'il soit fait mention de l'éthique dans la loi d'application, à l'article 2, alinéa 3, en disant: «La banque est gérée selon les principes éprouvés de l'économie et de l'éthique bancaire».
Malgré des sensibilités très riches et très variées, qui se sont confrontées tout au long des débats, malgré des divergences parfois importantes sur certains objets, les commissaires ont voulu marquer leur appui à ce projet majeur pour Genève, en lui donnant leur aval à l'unanimité. Par une telle décision, par un tel comportement, les commissaires ont prouvé qu'ils étaient imprégnés d'une véritable éthique politique qui les honore et qui honorera, je l'espère, ce parlement au terme du présent débat.
M. Philippe Joye (PDC). M. Lachat a comparé les deux banques à de vieux mariés, moi je les ai comparées à deux dames patronnesses des banques cantonales suisses. Je voudrais dire que lorsqu'une commission parlementaire est saisie d'un projet de loi émanant du Conseil d'Etat, le travail est relativement simple, toute latitude étant laissée aux commissaires pour aller gratter jusque dans le plus petit détail les dossier présentés.
Dans le cadre de la présente fusion, le travail de la commission a été difficile puisque les limites du secret bancaire et de la protection légitime des intérêts des clients sont très strictes, ce qui est tout à fait naturel. Dès lors, nous nous sommes appuyés sur les trois piliers suivants de la sagesse: le premier, c'est notre acte de confiance à l'égard de la présidence et de la direction des deux banques; le deuxième, c'est notre acceptation des rapports des trois sociétés fiduciaires, soit les deux fiduciaires des deux banques, coiffées par la fiduciaire Arthur Andersen qui s'occupait de la coordination sur le plan des méthodes et de la mise en oeuvre des éléments nécessaires à une comparaison fiable, permettant une fusion sur des bases communes. Le troisième pilier, c'est la référence à la Commission fédérale des banques qui, dans son rôle classique d'autorité suprême de surveillance, a pu confirmer que l'ensemble des travaux, qui ont été entrepris dans chaque banque pour aboutir au projet de fusion, était conforme aux dispositions et aux prescriptions fédérales de la loi sur les banques et des autres lois.
Nous avons examiné trois textes: le projet de loi constitutionnelle, le projet de loi de fusion et les projets de statuts. Nous avons eu, au fond, six problèmes relativement importants, que nous avons traités.
Le premier avait trait -- et cela nous a beaucoup préoccupés -- aux réserves latentes, risques identifiés, provisions, etc. Les réserves qui ont été constituées pour provisionner ces risques ascendent à 780 millions. Elles présentent une couverture suffisante pour tous les risques identifiés à ce jour. Il va de soi que personne ne peut avoir de certitude absolue dans ce domaine et pour cause!
Un deuxième problème, qui tenait fort à coeur de certains membres de la commission, était la charge éthique. Dans ce domaine, la commission est tombée d'accord pour mentionner dans la loi que la Banque cantonale de Genève respectera les principes de l'économie et d'une éthique bancaire. Il existe des chartes analogues à celle-ci dans le cadre, par exemple, de la SBS.
Le troisième point concernait les valeurs respectives des apports des deux banques et c'est une chose qui est très importante par rapport aux exigences de la Ville de Genève. Bien que la fusion représente le mariage de deux entités de grandeurs et de bilans similaires, la valeur des actions est différente puisqu'une action CEG vaut, grosso modo, deux actions BCG. Cet aspect n'a pas échappé à la commission lorsqu'il s'est agi pour elle de définir la question délicate du nombre des membres du conseil d'administration.
Le quatrième point est la garantie du capital par l'Etat. Il a été question de limiter la garantie de l'Etat à 3 milliards, ce qui est parfaitement inconcevable, car le statut même de la Banque cantonale, tel qu'il a été discuté pour le cas genevois avec la Commission fédérale des banques, présuppose un engagement total de l'Etat à l'égard de son établissement de crédit. Remettre cette question sur le tapis nous ramènerait à la case départ du processus de fusion.
Le cinquième point, c'est l'efficacité des administrateurs. Comme cela a été dit, nous avons opté pour une solution à dix-huit personnes, mais, à titre de renseignement, le conseil d'administration d'une grande banque, du type de l'UBS, est inférieur à dix personnes.
Enfin, le dosage politique. Pour répondre au souci que les petits partis ne soient pas systématiquement oubliés dans les organes des banques, ainsi que nous l'avons fait dans le cadre d'autres réglementations nouvelles sur l'exercice, par exemple, de la profession d'avocat, on a inséré une phrase disant: «...que, dans la mesure du possible, les diverses tendances politiques seront représentées dans le conseil d'administration de la banque, par exemple».
Je crois que nous avons examiné de façon très approfondie le projet que nous avons reçu. En ce qui me concerne, je puis vous dire que j'ai posé toutes les questions qui me passaient par la tête. Je suis allé aussi loin que possible et je crois pouvoir dire, en mon âme et conscience, qu'on peut voter la fusion de ces deux banques. Je vous encourage à nous suivre dans cette proposition.
M. Jacques Boesch (T). J'ai participé avec beaucoup d'intérêt aux travaux de la commission ad hoc chargée de la fusion de ces deux banques. Je ne connaissais que peu de chose dans ce domaine, mais je dois avouer que j'ai beaucoup appris, grâce aux informations de M. Vodoz, de M. Fontanet, de M. Ducret, des directeurs de ces banques. Comme le montre bien le rapport de M. Lachat, la fusion de ces deux banques genevoises est certainement l'un des actes les plus importants de notre législature. Par mon intervention, je voudrais souligner, en y revenant, quelques points dignes, à mon sens, d'être relevés.
Cette fusion de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire vise à donner un poids spécifique plus important à ce nouvel établissement bancaire genevois qui est appelé à jouer un rôle de régulation et de stimulation dans l'économie de notre canton et de sa région. Il vise à densifier son réseau d'agences, à améliorer en qualité et en nombre ses services. Sa qualité de «banque cantonale» devrait le distinguer aussi bien des grandes banques commerciales que des banques privées, par des pratiques bancaires différentes.
Nous ne pouvons donc que souscrire à cet objectif général et généreux, pour autant que cet établissement soit réellement au service de toute la collectivité, dans ses multiples dimensions, et non qu'il soit asservi à une catégorie particulière de clients dont la seule motivation est la recherche du profit maximum.
D'aucuns se sont interrogés afin de savoir s'il s'agissait, dans le cas particulier, d'une «fusion-raison» ou d'une «fusion-sauvetage». Nous pourrions en disserter longuement, nous pourrions même en faire l'objet de longs rapports. Quant à moi, je reconnais humblement ne pas pouvoir me prononcer, bien que nous ayons tous à l'esprit l'histoire récente de ces établissements qui laisse apparaître qu'ils ont été, eux aussi, malheureusement mêlés, parfois d'un peu trop près, à des affaires troubles. Ces établissements ont quelque peu contribué à l'euphorie spéculative de ces dernières années dont nous payons, maintenant, les pots cassés. Il suffit d'ouvrir la «Tribune de Bussigny» d'aujourd'hui pour saisir, avec beaucoup de saveur, comment une des banques en question a procédé et continue à procéder. Cela se passe de commentaires, mais c'est édifiant, je dirai même, c'est inquiétant.
Dès lors, je voudrais revenir aujourd'hui sur quatre points, bien qu'ils aient été discutés en commission. Il m'apparaît nécessaire de les remettre en débat, surtout en prévision de la votation populaire du mois de juin qu'implique toute modification de notre constitution. Vous n'en serez donc pas surpris puisque je vous en ai préalablement dûment avertis.
Ces points concernent la composition du conseil d'administration. Je suis inquiet des fortes réactions de la Ville de Genève qui ressent beaucoup plus l'opération envisagée comme une simple absorption ou une OPA inamicale que comme une véritable fusion. Je n'ai toujours pas compris, je vous l'avoue, pourquoi la majorité bourgeoise de notre commission voulait limiter à ce point le nombre d'administrateurs, si ce n'est pour restreindre le contrôle que pourrait exercer cette collectivité publique ou, pire encore, écarter délibérément tous ceux qui habituellement posent des questions. Les arguments invoqués pour un conseil restreint ne tiennent pas. Ils ne sont pas crédibles par eux-mêmes et dès lors qu'ils heurtent profondément un partenaire privilégié de la future banque, nous nous devons de faire un pas en sa direction, ce que nous pourrons faire ce soir en adoptant l'amendement que nous allons vous proposer.
Un autre problème rencontré en commission a été de définir les compétences nécessaires pour siéger au conseil d'administration et les incompatibilités qui pourraient frapper les membres dudit conseil. Or je dois redire ici que si l'on entend par compétence professionnelle une bonne connaissance des mécanismes bancaires et économiques dans la gestion d'une banque, cela n'est pas suffisant. A notre sens, il est tout aussi important, pour être administrateur, d'être sensible à l'éthique, à la défense des intérêts d'autres milieux, et je voudrais citer ici les locataires, les milieux syndicaux, ceux de la défense de l'environnement, les tiers-mondistes.
En ce qui concerne le statut du personnel et la politique d'emploi, j'ai été frappé -- mais peut-être est-ce une absence de mémoire -- du peu de garanties qui ont été données par les représentants des établissements bancaires. S'il est vrai que, au nom d'une certaine rationalisation, il peut être nécessaire de modifier quelque peu le cahier des charges de quelques collaborateurs, il serait inconvenant de profiter de cette fusion pour opérer des licenciements, qu'ils soient collectifs ou individuels. Une banque qui se targue d'être cantonale doit aussi jouer un rôle d'employeur modèle. Or, ce que nous entendons ici et là n'est pas fait pour nous rassurer puisqu'on nous parle déjà de multiples départs de collaborateurs.
Enfin, il n'est pas normal que le plein renchérissement du coût de la vie ne soit pas versé aux employés des banques, alors qu'elles dégagent encore de beaux bénéfices et qu'elles accumulent toujours des réserves. Une banque cantonale ne peut se permettre de s'associer aux pratiques économiquement irresponsables et socialement ignobles des grandes banques qui osent annoncer des bénéfices aux records indécents, tout en licenciant, par centaines, des membres de leur personnel et en grignotant leur pouvoir d'achat.
L'éthique, à notre sens, doit tenir compte aussi de l'éthique sociale et de celle de la protection de l'environnement. La rédaction quelque peu timorée -- avouez-le -- qui nous en est proposée, ne nous convient guère. Nous vous en proposerons donc une qui assure une réelle crédibilité à cet établissement qui, par sa distinction, doit se démarquer des autres établissements. J'ai été personnellement particulièrement choqué par l'annonce de la décision d'une diminution de 50% des fonds destinés à l'achat d'oeuvres d'art. Les banques ont toujours joué un rôle -- c'est peut-être accessoire, mais c'est significatif -- de soutien, de mécène indispensable au monde artistique qui est, lui aussi, particulièrement touché par la crise. La solidarité n'est pas un vain mot. La perspective d'un soutien à la collectivité par l'achat d'oeuvres d'art a d'autres dimensions, qui stimulent la vie économique et la cohésion sociale. Il est donc absolument nécessaire que ce mécénat soit pleinement rétabli.
Enfin, par sa politique de prêts hypothécaires, la future banque devrait jouer un rôle plus offensif quant à la régulation du marché, pour permettre d'investir en période de crise et de freiner en cas de surchauffe. Pour les hypothèques, les taux devraient être plus bas, les collectivités publiques devraient pouvoir emprunter à de plus justes taux.
Pour permettre à ce Grand Conseil de se prononcer et de se situer en toute transparence quant à ces quelques préoccupations, nous avons préparé plusieurs amendements que nous allons soumettre, ce soir, à votre sagacité et qui permettront à la population genevoise de se prononcer au mois de juin en toute connaissance de cause et au mieux de ses intérêts.
Le président. Je salue la présence à la tribune de nos anciens collègues Jean-Claude Faes et John Dupraz. (Applaudissements.)
M. Nicolas Brunschwig (L). Le parti libéral genevois est particulièrement heureux et fier, ce soir, de voir se concrétiser le projet de fusion des deux banques cantonales. C'est pour nous, Monsieur Lachat, plus qu'un mariage de raison et notre satisfaction est particulièrement importante, car le projet de loi sur lequel nous devons nous prononcer aujourd'hui nous semble bien fait, équilibré; il donne les meilleures chances possibles d'efficacité au futur établissement.
Nous tenons d'ores et déjà à remercier les deux établissements, soit leurs conseils d'administration et leurs présidents, ainsi que leurs instances dirigeantes. Nous voudrions aussi remercier le conseiller d'Etat Olivier Vodoz pour son action, sa compétence et sa disponibilité.
Cet établissement unique, qui sera la quatrième ou cinquième banque cantonale de Suisse, pourra offrir des services performants et rationnels à la collectivité genevoise. De plus, cela permettra d'avoir, au niveau d'un grand établissement bancaire, un centre de décision à Genève.
J'aimerais aussi remercier M. Lachat pour son rapport et pour son esprit positif en commission. Par contre, on peut regretter quelque peu certains de ses propos ce soir. Je crois qu'il est apparu à l'ensemble des commissaires présents aujourd'hui que les informations données, aussi bien par les banques que par les personnes auditionnées, à titre d'experts, ont été extrêmement complètes dans la mesure de leurs possibilités en fonction des limites dictées par le secret bancaire. Il est clair qu'à un certain moment, nous devons nous baser sur la confiance en les personnes et les institutions auditionnées et qui ont toutes les qualités pour que celle-ci soit méritée. La commission ad hoc, constituée pour travailler sur ce projet, a consacré beaucoup de temps à étudier la situation actuelle de ces deux banques. Il en est ressorti deux conclusions.
La BCG et la CEG, comme toute banque faisant des opérations de financement, ont dans leurs portefeuilles des risques identifiés, en l'occurrence 840 millions. Pour neutraliser ces pertes potentielles, je dis bien potentielles, les deux établissements ont établi des provisions importantes. Au 31 décembre 1992, ce montant atteignait 601 millions. Au moment de la fusion, soit à fin 1993, il est vraisemblable que l'intégralité des risques sera provisionnée. Et de plus, les deux établissements ont d'importantes réserves latentes sur leurs propres immeubles et sur leurs portefeuilles de titres. La commission a pris acte avec satisfaction de ces informations. Dès lors, elle a pu attaquer le projet de loi en tant que tel et il nous semble que les options choisies en commission sont les bonnes. C'est pour cela que nous pouvons quelque peu regretter les amendements qui viennent aujourd'hui. En réalité, ils ne sont pas forcément une surprise dans la mesure où, effectivement, certaines de ces questions ont été largement discutées en commission. Le jeu politique veut sans doute que, lorsqu'on arrive à trouver des consensus en commission, cela soit un peu plus difficile en séance plénière, avec la présence du public et des médias.
J'aimerais rappeler les principaux éléments de ces options. Tout d'abord, la composition du conseil d'administration. Deux postulats nous ont guidés: avoir un nombre d'administrateurs qui ne soit pas excessif, afin que ce conseil puisse être efficace, mais aussi garantir une juste répartition, idéalement une répartition égale, entre les différentes catégories d'actionnaires que sont le canton, les communes, avec un poids prépondérant et normal pour la Ville de Genève, et les actionnaires privés. Efficacité et représentativité ont été les deux mots clés pour la composition de ce conseil d'administration.
Le deuxième élément, à mon avis, fondamental, consistait en la nomination du président par l'instance qu'est le Conseil d'Etat. Il nous paraît tout à fait clair qu'en fonction de la caution financière qui existe pour le canton il était logique que le président puisse répondre de ses actes non seulement devant les actionnaires, mais aussi devant le Conseil d'Etat. C'est donc pour cela que la formule choisie, soit sa nomination par le Conseil d'Etat parmi les administrateurs représentant les collectivités publiques, nous semble la seule solution possible. De plus, le Conseil d'Etat s'est engagé à choisir la personne la plus compétente et la plus disponible pour cette importante fonction.
Le troisième élément important, et la troisième option choisie par la commission, consiste en l'autorité cantonale de surveillance qui ne pourra être que le Conseil d'Etat en raison de la législation fédérale actuelle. On peut espérer des modifications de ces dispositions relativement rapidement. Pour l'instant, le Conseil d'Etat exercera cette surveillance tout particulièrement sur l'organisation de la banque, ainsi que sur les capacités des administrateurs et des gérants. Cependant, le Conseil d'Etat s'est engagé à consulter la Commission fédérale des banques et tiendra compte de son avis.
Enfin, en ce qui concerne le comité de banque, celui-ci sera composé de sept membres et pourra donc être représentatif des différentes catégories d'actionnaires et ainsi répondre au voeu de la Ville.
Comme vous pouvez le voir, et j'espère que vous en êtes convaincus, ce projet permettra à la banque d'être forte et efficace. Dans la conjoncture actuelle, Genève se doit d'avoir une banque cantonale performante, mais cependant avec des structures pas trop rigides, afin de s'adapter aux
situations. Il s'agit d'inspirer confiance de par la qualité de ses organes directeurs et le contrôle exercé par le Conseil d'Etat. Nous sommes convaincus que ce nouvel établissement arrivera à cette fin.
Nous vous recommandons donc vivement d'accepter ce projet de loi.
Mme Christine Sayegh (S). Ce projet de loi consacrant la création d'une banque cantonale genevoise est enfin à l'ordre du jour d'une séance du Grand Conseil. En effet, il y a plus de soixante ans, les socialistes avaient proposé de créer à Genève une véritable banque cantonale par la fusion de la CEG et de la BCG. L'idée a mis du temps à évoluer dans les différents milieux politiques, malgré les nombreuses relances et les motions du parti socialiste.
Aujourd'hui, et nous l'avons constaté dans la commission ad hoc qui s'est penchée sur ce projet de loi, il y a unanimité quant au principe d'une banque cantonale créée par la fusion des deux banques, la BCG et la CEG. Toutefois, le moment n'est peut-être pas très bien choisi, vous en conviendrez. Notre République est particulièrement touchée par les problèmes économiques et sociaux qui ne plaident pas en faveur de nouvelles dépenses de l'Etat. Or, pour que le processus de fusion des deux banques se concrétise, il faut que l'Etat paie 147,04 millions. Ce montant est égal, nous dit-on, à celui que les communes ont versé dès les origines de la BCG et correspond à 30% du capital de dotation de la CEG. L'estimation de la valeur des banques, valeur de référence pour construire le processus de fusion, n'est pas en soi vérifiable, car elle se heurte, bien évidemment, au secret bancaire qui ne livre pas ses critères d'évaluation. Le secret bancaire est un rempart qui est resté présent tout au long des travaux. Les représentants des banques, craignant des fuites, ont pris d'ailleurs de nombreuses précautions pour renseigner les commissaires. Le rapport de confiance ne s'est, à mon avis, pas franchement établi. C'était plutôt aux députés de faire confiance aux représentants des établissements bancaires concernés.
C'est pourquoi notre groupe a été amené à faire une pesée d'intérêts entre la nécessité de cette fusion, la nécessité donc d'une banque cantonale pour Genève, et les motivations profondes de la fusion proposée. La balance a pesé pour cette fusion, car elle s'inscrit dans le cadre de la relance économique. Nous faisons, en conséquence, pleinement confiance aux représentants de la BCG et de la CEG quand ils nous affirment qu'il ne s'agit pas d'une «fusion-sauvetage», mais bien de créer un établissement bancaire plus performant, s'inscrivant dans le cercle des cinq premières banques cantonales en Suisse.
Toutefois, il ne faut pas oublier que la nouvelle banque cantonale genevoise bénéficiera d'une garantie de l'Etat pour le remboursement des dépôts d'épargne, à savoir l'épargne privée et l'épargne liée. Il est, en conséquence, important qu'un contrôle politique soit instauré et que le Grand Conseil ait des moyens d'information suffisants. Ces informations, le Grand Conseil les recevra par l'intermédiaire du rapport de gestion que fera le Conseil d'Etat, en qualité d'autorité de surveillance, dans le cadre de son rapport annuel. C'est un minimum face à la garantie de l'Etat.
Au-delà de l'analyse en chiffres de cette fusion qui reste limitée, rappelons-le, il faut aussi et surtout se poser la question du sort des employés dans le cadre de cette restructuration. On nous a assuré qu'il n'est envisagé aucun licenciement mais que, toutefois, des déplacements de personnel ne pourront pas être évités, ainsi que des propositions de compléments de formation pour certains. Encore une fois, il faut faire confiance aux protagonistes de la fusion qui nous promettent que cette opération ne viendra pas grossir le nombre des chômeurs. Toutes ces assurances sur les différents points à voter ne seront vérifiables qu'avec la concrétisation du projet. Les risques que nous prenons sont directement proportionnels à l'évaluation des risques pris par les banques et évalués par les experts, le tout relativement voilé par le secret bancaire.
En définitive, le Conseil d'Etat prend une grande responsabilité dans cette opération, mais nous pouvons penser que ce risque n'est pas démesuré, vu le sérieux avec lequel ce dossier a été suivi par le chef du département des finances, pendant quelque trois années.
Aussi, c'est en faisant confiance aux avis d'experts que nous voterons ce projet de loi, convaincus de sa nécessité pour l'économie genevoise, et en souhaitant qu'avec sa clause d'éthique la future banque cantonale soit plus particulièrement attentive à sa région, à son environnement et fasse école.
Mme Vesca Olsommer (Ve). Le groupe écologiste vous recommandera l'acceptation des deux projets de lois qui vous sont soumis. Il vous le
recommandera sans naïveté, avec réalisme, mais avec peut-être une pointe de satisfaction quand même, car, en 1988 déjà, lors de notre première législature, notre collègue député André November s'était joint aux socialistes pour réclamer la création d'une banque cantonale.
Avec les autres groupes présents dans la commission ad hoc, nous nous sommes soigneusement mis au courant, autant que nous le pouvions, de la situation financière de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire. Nous nous sommes attachés à connaître la valeur de ces établissements, leur volume d'engagements. Nous nous sommes posé la question de savoir s'il y avait des risques sous-évalués et si les engagements de l'Etat devaient augmenter par la suite. Nous avons fait tout cela. Nous avons pris très au sérieux le préavis que nous devions donner au Grand Conseil. Et nous avons aussi estimé que toutes les cartes avaient été mises sur table, que toutes les données relatives à cette fusion nous avaient bien été communiquées et, comme pour les autres groupes, nous nous sommes dit que nous ferions confiance au Conseil d'Etat et aux représentants des banques et qu'en définitive, pour nous, il s'agissait aussi d'une «fusion-raison» plutôt que d'une «fusion-sauvetage», comme le dit notre collègue Lachat.
Si tous nous souhaitons la création d'une banque cantonale, les exigences des uns et des autres ont revêtu un caractère un peu différent, selon les divers groupes. Ainsi, pour les écologistes, il est important que les activités bancaires soient soumises à une clause d'éthique, mais une clause suffisamment large pour intégrer des objectifs auxquels nous tenons beaucoup et que nous avons évoqués en commission. Ce que nous avons dit en commission, c'est que, pour nous, le développement économique n'est pas une finalité en soi, qu'il doit être au service d'une population, contribuer à son bien-être matériel, mais social aussi, qu'il doit tenir compte du long terme, donc de l'environnement.
Nous avons commencé par proposer un conseil d'éthique puis une clause d'éthique assez large pour couvrir les objectifs dont je viens de parler. Après une controverse assez sérieuse, pendant laquelle nous avons constaté que pas plus le Conseil d'Etat que les représentants des banques et les autres groupes ne cherchaient à éluder le problème de l'éthique, nous nous sommes finalement mis d'accord sur l'alinéa 3 de l'article 2, tel qu'il vous est soumis.
Ces principes éprouvés d'éthique bancaire seront contenus dans une charte qui, elle, sera présentée lors de la première assemblée générale des actionnaires. Ce n'est pas autant que nous l'aurions souhaité, mais nous sommes quand même heureux de voir que ce principe d'éthique figure dans la loi sur la banque cantonale. De surcroît, nous attachons beaucoup d'importance au développement qu'a fait notre rapporteur de ce concept et qui figure dans son rapport, puisque celui-ci a été lu à la commission, et nous en tirons la conclusion que son analyse correspond plus ou moins au sentiment général de la commission. C'est une conception qui permet quand même d'intégrer nos objectifs écologiques et sociaux. La rédaction de cette charte pourra être modifiée au fil du temps pour couvrir plus largement les activités bancaires.
Le groupe écologiste a tenu à savoir également si la nouvelle banque prendrait la relève en matière de soutien à la culture qu'avaient consenti la Caisse d'épargne et la Banque hypothécaire. Il nous a été répondu oui, dans la mesure du possible. Nous avons tenté de reprendre, avec le parti du Travail, les propositions du Conseil municipal de la Ville de Genève, quant au nombre d'administrateurs désiré par la Ville et les communes. Sans succès! Il nous a été répondu que le souci d'efficacité devait primer celui de la représentativité. Un amendement de notre collègue Lachat n'a pas suffi à mettre du baume sur le coeur du Conseil municipal, si je peux m'exprimer ainsi.
Nous vous recommanderons donc d'accepter ces deux projets de lois. Mais, comme à peu près tous les groupes l'ont dit, nous avons fait confiance aux personnes que nous avons entendues et aux documents que nous avons reçus.
M. Jean Spielmann (T). Le projet de fusion qui nous est présenté part, effectivement, d'une analyse sérieuse et d'un problème réel. Nous souscrivons donc à l'idée, à la démarche telle qu'elle est proposée, d'autant plus que ce n'est pas la première tentative de doter notre canton d'une banque cantonale qui puisse, par son activité et son poids, rendre les services que l'on attend d'un tel établissement. La loi que nous votons ce soir a deux volets. D'une part, une loi constitutionnelle et, d'autre part, une loi d'application et au-delà le statut de la future banque. Cela veut dire que ce débat sera tranché par la population, puisque modification de la constitution signifie vote du peuple. Dans ce cadre-là, il n'est pas possible de discuter, de débattre d'un problème de fusion des banques sans que nous soyons bien clairs, les uns et les autres,
sur le rôle que l'on veut voir jouer par l'établissement que nous souhaitons créer et aussi sur les réponses et les attentes de la population par rapport au problème, plus général, des banques dans le contexte politique et économique actuel.
On a vu que les sondages, faits par les banques elles-mêmes, démontrent qu'il y a véritablement, dans ce pays, un problème de compréhension par rapport aux chiffres présentés par les trois plus grandes banques de notre pays et à la situation économique et politique à laquelle sont confrontés une bonne partie de nos citoyens.
Comment peut-on, effectivement, expliquer tranquillement que leurs bénéfices battent des records chaque année depuis trois ans -- on constate que les trois plus grandes banques ont augmenté de plus de 21% leurs bénéfices avant impôts -- et que, parallèlement, les collectivités publiques sont aux prises avec des difficultés croissantes au niveau du financement en raison du taux d'intérêt imposé par ces mêmes banques et que les problèmes importants du marché de la construction de ce pays résultent, pour une bonne part, des conditions de crédit et d'emprunt qui sont imposées dans ce domaine. Bien sûr, il y a la contrepartie directe de la période que nous avons vécue précédemment, qui aurait eu, comme toujours dans toute activité économique, besoin de stabilisation à un moment donné. Néanmoins, il y a des interrogations importantes, pour ne pas dire de l'incompréhension. Si nous ne dépassons pas ce débat et ne répondons pas à ces questions objectives de manière précise, j'ai quelque souci de voir passer cette votation sans que l'établissement que nous voulons créer soit réalisé en raison de la réalité que perçoivent les gens et de leur incompréhension.
Cela d'autant plus que l'on constate que, dans leur fonctionnement, ces grands établissements sont aussi en train, je l'ai dit, de contribuer à certaines difficultés économiques et de procéder à des licenciements importants. Si l'on examine simplement, au cours de cette année, les résultats par rapport à l'année passée, c'est globalement cinq cent quatre-vingt-un emplois dans les trois grandes banques qui ont été supprimés en Suisse et cent quatre-vingt ajoutés à l'étranger. On s'aperçoit aussi que dans les activités de ces banques, en une seule année, les marges et les résultats d'exploitation de ce qui s'est fait à l'extérieur du pays a passé de 1/5 à 1/3 et qu'il y a là une reconversion absolument importante qui n'est pas sans conséquence sur l'emploi, sur les salaires et sur la politique générale de ces banques. Donc, il y a là des réponses précises à donner et, si la population votait simplement pour ou contre les banques, on aurait beaucoup de peine à faire admettre l'idée de la création de cet établissement.
Il faut dire aussi qu'en général l'ensemble de ces trois grandes banques ont eu une politique profitable à long terme, même si leurs marges bénéficiaires sont inférieures à celles d'autres très grands établissements bancaires dans le monde qui ont des taux et des rendements nettement supérieurs. Malgré le fait que ces taux de l'ordre de 10% sont moins rentables, ils n'ont pas empêché les banques suisses de monter régulièrement dans le classement des meilleures banques mondiales publié récemment. Malgré un rendement inférieur, elles bénéficient d'une plus grande confiance et d'un taux d'activité supérieur. Cela veut dire que la rentabilité simple n'est pas le seul critère valable pour une banque. Il y a aussi tous les aspects de sa stabilité qui jouent un rôle important.
Reprenons maintenant les argumentations développées. Je crois que l'on ne peut pas aborder le débat de cette fusion sans souligner l'excellent travail qui a été fait par notre rapporteur, un travail important au niveau de la recherche et de l'argumentation pour présenter cette fusion et aussi, au passage, l'intéressant aspect historique qui y est développé. Je ne veux pas revenir sur ce débat, mais vous aurez constaté qu'au cours des ans, et cela depuis les années 30, il y a eu une constante demande de création de cette banque cantonale. Jusqu'à présent, tout le monde y était opposé du côté des partis au pouvoir et, aujourd'hui, on pourrait légitimement se poser la question de savoir ce qui, tout d'un coup, motive ce changement d'attitude.
Je crois qu'on peut trouver une partie de la réponse dans l'explication fournie à la page 5 et qui est un extrait de ce qu'a dit un historien. Celui-ci relevait que «l'insécurité est l'amie des caisses d'épargne et que celle de Genève ne fait pas exception». Il a dit aussi que généralement ces caisses et ces banques perdent du terrain quand la situation est florissante, mais, lors d'un retournement douloureux de la conjoncture, on constate un regain d'intérêt à leur égard. En définitive, cet intérêt, aujourd'hui, signifie peut-être le besoin d'un peu plus de sécurité; c'est aussi là qu'il faut chercher l'argumentation que je trouve bien développée dans cette page 5. Elle démontre que le contrôle politique de la banque, le fait qu'elle soit mise sous la protection et la couverture de la population -- car elle présente davantage
de démocratie et un peu moins de secret que les autres établissements -- permet aussi de susciter un peu plus de confiance, surtout au moment où la conjoncture devient plus difficile et où l'on est moins tenté de prendre des risques, parce que ces risques, en période de haute conjoncture, sont forcément positifs. Avec quelque inquiétude, on revient vers une situation plus raisonnable.
Cela signifie que, si nous voulons réussir cette opération, il faut tenir compte de cette réalité et il vous faut, Messieurs, faire encore un petit bout de chemin dans la direction que vous avez déjà prise en acceptant la banque cantonale et en admettant l'idée qu'il faut la placer dans le contexte qui vous a fait accepter la création d'une telle banque cantonale; qu'il faut, au niveau des propositions de cette banque, au niveau de son contrôle démocratique, au niveau de sa construction et au niveau aussi de ses buts, fixer quelques règles un peu plus précises que celles qui ont été admises en commission.
Nous avons déposé une série d'amendements que nous développerons petit à petit. Je n'entends pas ici faire le tour de toutes ces propositions. Vous aurez vu, à leur lecture, que ce sont celles qui ont été présentées en commission. Certaines découlent des exigences d'autres collectivités publiques, telles que la Ville et le canton. Nous ne les reprenons pas intégralement, mais nous argumenterons tout à l'heure. Il y a surtout une volonté de développer plus de transparence.
Je conclurai cette première intervention en disant qu'une des raisons de la méfiance de la population à l'égard des établissements bancaires, de leur révolte et du fait qu'ils soient scandalisés, est la présentation, en période difficile, de ces bénéfices éhontés. Mais il y a aussi cette volonté de démocratie et ce désir de plus de transparence. Le rapporteur, tout à l'heure, ironisait certainement quand il disait qu'il était rassuré de voir que le Conseil d'Etat n'était pas plus informé que les membres de la commission, ces derniers ayant appris, le lendemain, par la presse, ce qu'on n'avait pas voulu leur fournir, à la commission, sous forme de documents écrits.
Je dois dire que cela m'inquiète. Si cela vous rassure, moi, ça me pose un problème, puisque toute la construction ici est sous le contrôle du Conseil d'Etat. Alors, si lui n'est pas plus informé que la commission qui dit avoir lu dans les journaux les réponses aux questions qu'elle avait posées, à mon tour, je me pose quelques questions et je les pose aux membres de la commission! J'espère qu'on arrivera à me rassurer davantage. En tout cas, cela ne fait que conforter notre démarche qui consiste à élargir le cadre de l'administration de cette banque, à permettre qu'il y ait plus de personnes présentes.
Tout cela renforce notre volonté de donner plus de possibilités à la population d'être présente dans les conseils d'administration afin d'en élargir le cercle restreint. Je voudrais simplement vous rendre attentifs au fait que le peuple vote sur un seul article constitutionnel et que, si cette loi ne devait pas répondre aux différents critères déterminés ici, il pourrait être appelé à se reprononcer ultérieurement sur les termes mêmes. Je conclurai en disant que je regrette que, dans la démarche politique de ce canton, il n'y ait pas la possibilité du référendum obligatoire quand on élabore une loi qui a une couverture constitutionnelle. Cela signifie que le Grand Conseil, à un moment donné, pourrait décréter la soumission à la votation populaire, tant de l'arrêté constitutionnel que de la loi, pour que l'ensemble soit, d'une manière cohérente, approuvé par la population et que nous n'ayons pas à revenir à un troisième débat. C'est ce qui se passe au niveau du Conseil fédéral et cela ne me semblerait pas imbécile d'inscrire cette démarche dans les futures modifications de la constitution et du règlement du Grand Conseil, au niveau des droits politiques.
M. David Lachat (S), rapporteur. J'ai le sentiment que mon ironie, peut-être un tout petit peu forcée, a été mal comprise. J'ai voulu simplement expliquer que, dans un domaine aussi technique que celui-là, le travail parlementaire a des limites. A l'évidence, je ne suis pas prêt de vous affirmer que dans ce dossier, j'ai tout compris, tout saisi et pesé toutes les virgules de tous les chiffres qui nous ont été fournis! A titre personnel, je vous dis que j'ai fait un gros effort mais, nécessairement, j'ai des limites et des lacunes. Par conséquent, je dois, quelque part, faire confiance.
Quand j'ai essayé d'expliquer que j'ai éprouvé le sentiment que le Conseil d'Etat, malgré ses efforts très importants, n'avait parfois pas toujours compris toutes les virgules, je n'ai pas voulu dire que le Conseil d'Etat était mal informé, qu'il nous avait mal informés, voire désinformés. J'ai simplement voulu signifier que la difficulté technique est telle que l'homme politique ne peut pas tout saisir.
Notez quand même qu'au début du rapport, en ma qualité de rapporteur et au nom de la commission, j'ai remercié le Conseil d'Etat de son travail. M.
le président de la commission a expliqué que le chef du département nous avait fourni de nombreux renseignements qu'il avait recueillis au cours d'une longue collaboration avec les banques. Je crois que le monde politique, à un moment ou à un autre, doit faire preuve d'une certaine humilité et ne pas prétendre qu'il comprend tout. C'est ce que j'ai voulu vous dire.
Présidence de Mme Micheline Calmy-Rey, présidente.
M. Denis Menoud (Ve). Ce n'est pas, disons, fatigant d'entendre toutes ces louanges. Vous savez sans doute qu'au Moyen Age, lorsque la curie romaine se réunissait et qu'elle avait à traiter de problèmes théologiques épineux, elle désignait d'office un cardinal pour jouer le rôle de l'«avocat du diable». C'était très logique. D'ailleurs, au 19ème siècle, un professeur de philosophie allemand, M. Hegel, dans un ouvrage intitulé, si je ne fais erreur, «La raison dialectique», partait du point de vue «thèse, antithèse, synthèse». La thèse est pour nous. Ce soir, je constate qu'il n'y a pas d'avocat du diable, pas d'antithèse pour arriver à une synthèse qui est la banque cantonale, qui serait un point de vue fort au sein de l'opinion publique.
Qu'est-ce à dire? Effectivement, on peut se poser des tas de questions et il faut se les poser, ne serait-ce que pour les combattre ultérieurement, parce que, fondamentalement, dans un débat public, elles surgiront. Les communes sont-elles désavantagées par le projet de loi? On peut répondre oui, notamment la Ville de Genève, comme le prouvent la résolution du Conseil municipal et une lettre du Conseil administratif. Effectivement, il y a déjà ce point de vue qui n'est pas traité. Ensuite l'on parle d'efficacité et de dix sièges, comme à l'UBS, etc. Alors, que faire de la position de la Suisse qui s'était battue comme un beau diable, rappelez-vous, pour obtenir le vingt-quatrième siège tant convoité au FMI? Pour cela la Suisse s'était ralliée à la Pologne, au Kirghizistan, au Turkménistan, je crois même à la Turquie. Elle s'est battue et a même conclu des accords financiers, je ne sais si c'est vrai, pour avoir ce vingt-quatrième siège. Là déjà, l'argumentation était un peu légère.
On nous parle d'éthique. Evidemment, l'éthique c'est -- passez-moi l'expression -- la tartine au beurre. L'éthique est une question de pratique.
Vous pouvez avoir le meilleur texte de loi ou le plus brillant, par exemple, prenez la constitution de la défunte Union soviétique qui était la meilleure du monde, on sait que la réalité était tout autre. Alors évidemment, pour ce qui est de l'éthique, il faut être critique, car ce sont les gens qui font que les choses se passent d'une façon ou d'une autre et non pas uniquement les textes.
D'autre part, on nous parle de la garantie de l'Etat. Mais que vaut la garantie d'un Etat endetté comme le nôtre? Franchement, je vous pose la question. Si d'aventure la Banque cantonale doit prendre un bouillon, franchement, on aura quelques soucis! On nous dit encore, et nous n'avons pas à nous prononcer ce soir, que cela va coûter 147 millions aux contribuables. Tout le monde sait que cette année, pour le budget administratif du canton et République de Genève, le canton empruntera jusqu'au 31 décembre la petite somme de 780 millions qui engendre des intérêts débiteurs assez élevés, qu'il faut payer. De cela, on ne parle pas. On pourrait se poser la question sur le syndrome des lemmings. Vous connaissez les lemmings? Ce sont ces petites bestioles du Nord qui, par milliers, courent se noyer dans l'océan. Effectivement, on pourrait se demander pourquoi ces gens si bien intentionnés des conseils d'administration vont, tout à coup, se mettre à jouer à la chaise musicale. Il y en a une certaine quantité, une trentaine. Ils vont se retrouver moins nombreux. Lesquels vont rester, lesquels vont partir?
On nous dit, par exemple, qu'il n'y aura pas de licenciements. Quand on se rend à la rue de Carouge et que l'on voit... (Interruption de M. Bosson.) Je vous prie d'écouter, Monsieur Bosson, parce que vous n'avez pas encore compris ce que sont la thèse, l'antithèse et la synthèse. Les seules choses de synthèse que connaît M. Bosson, ce sont les pesticides organo-chlorés. Je les lui laisse! Effectivement, en cette période de golden boys, une fusion, cela peut être performant, être performant veut dit avoir moins de monde. Il ne faut que des battants et les canards boîteux loin du bal! On prévoit moins d'agences, etc. Alors, vous voyez, ces questions ne sont pas traitées avec le sérieux nécessaire.
D'autre part, il y a le choix des administrateurs. Il faut des gens compétents. C'est manifeste, et c'est tellement manifeste que personne ne s'est interrogé lorsque les grandes banques ont prêté à M. Fiorini, de Sasea, que tout le monde connaît, la bagatelle -- M. Vodoz, vous le savez? -- de cinq milliards, dit-on. Ce sont des gens compétents qui ont prêté de l'argent à cette personne. Alors, la théorie des gens compétents... Il faut être prudent et réaliste. Je pense qu'il faut faire quand même attention.
M. Dessimoz, ci-devant président de la commission ad hoc, a eu, passez-moi l'expression, la certaine outrecuidance de dire: «J'ai tout compris!». Alors là, bravo! Je lui tire mon chapeau et lui demande: "Voudriez-vous être candidat administrateur?». Effectivement, Monsieur Dessimoz, si je vous demande qu'est-ce le «ratio-Cook», pourriez-vous me répondre? (Réponse de M. Dessimoz.) Vous me répondez, c'est très bien. Les réserves latentes? C'est le grand oral pour le président.
Toujours est-il que j'ai été surpris de voir ce même président de la commission briller par son absence, lors du débat du Conseil municipal de la Ville de Genève. Je m'attendais à le voir à la tribune s'intéressant au débat et disant: «Au fond, c'est vrai. Je vais faire preuve d'une certaine objectivité, je suis président, j'ai du recul, etc.». Eh bien non, il n'était pas là!
Une voix. Ni le Conseil d'Etat.
M. Denis Menoud. On ne peut quand même pas demander au Conseil d'Etat d'être présent! Bref, c'était surprenant.
Par contre, dans son aspect «thèse de départ», M. Lachat envoie le balancier dans l'autre sens quand il dit: «Ces deux affreuses banques, surtout la BCG, ont fait le jeu des spéculateurs, etc.». Je vous rappelle, Monsieur Lachat, qu'à Genève il y a quand même deux cents établissements bancaires, que l'un d'eux, la banque de Paris et des Pays-Bas, a pris le bouillon. Elle a dû vendre son immeuble de la place de Hollande pour 90 millions au Crédit Lyonnais, si mes souvenirs sont bons, pour sauver la maison mère de Paris avec de l'argent frais. Il faut aussi voir ce qu'ont fait les autres banques sur la place de Genève avant de noircir outrageusement les banques cantonales. Je voudrais bien connaître les actifs réévalués à l'UBS de M. Magnin, il serait intéressant de savoir. Je vous rappelle aussi que la BPS...
La présidente. Il vous reste une minute.
M. Denis Menoud. ...a aussi pris le bouillon. C'est pour cela qu'elle a été rachetée, reprise ou absorbée par le Crédit Suisse. Pour revenir aux amendements, parce que ce qui compte n'est pas la parlote, nous sommes bien d'accord, (Rires.) nous arrivons à la synthèse. Je dis que les amendements proposés peuvent être acceptés. Il y a juste un point...
La présidente. Monsieur Menoud, nous parlerons des amendements lors du deuxième débat.
M. Denis Menoud. Je vous fais cadeau de mes trente secondes.
M. David Lachat (S), rapporteur. M. Menoud est actuellement administrateur de la BCG et ses propos confirment ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir qu'à mon avis les organes des banques n'ont pas toujours assumé de manière optimale la tâche qui est la leur. (Applaudissements.)
Cela confirme une des options qui a été choisie par la commission, à savoir s'assurer d'un conseil d'administration compétent. Par conséquent, il est urgent d'épurer le conseil d'administration de personnages comme M. Menoud.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. On a parlé, à propos de la fusion de nos deux banques cantonales, de dames patronnesses ou de conjoints subissant un mariage arrangé. J'apprécie l'humour, je m'en sers parfois, mais sachez que je ne suis pas directeur d'une agence matrimoniale. En revanche, j'ai la conviction qu'il y a deux établissements bancaires, à l'histoire intimement liée à celle de cette République, histoire que de nombreux historiens de qualité ont reprise, tout récemment encore, à l'occasion du 175ème anniversaire de la CEG et dont vous trouverez un certain nombre d'éléments dans le rapport de M. Lachat.
Sur le plan scientifique, il y a eu, au cours de cette dernière décennie, un certain nombre de travaux universitaires, notamment de mémoires de licence du département d'histoire économique de notre université. J'ai là un travail, fait en juillet 1985, intitulé: «Pourquoi n'y a-t-il pas de banque cantonale à Genève?», dans lequel on se pose, en conclusion, une série de questions, notamment cette dernière: «Cette banque cantonale verra-t-elle prochainement le jour? Nous ne pouvons pas l'affirmer. En revanche, nous pouvons dire que l'on n'a pas fini d'en parler». Depuis 1985, un certain nombre d'interventions politiques dans ce Grand Conseil ont été faites en faveur du rapprochement des deux banques. Je souligne que, dans l'histoire de Genève et des deux établissements, ces rapprochements ont été voulus tant en période de crise ou de difficultés qu'en période de prospérité. Il est évident qu'on eût pu y penser, dès lors qu'il faut toujours anticiper en politique comme dans la vie, et, par conséquent, imaginer cette fusion il y a plusieurs années, au temps de la prospérité, pour pouvoir mieux faire face aux problèmes qui allaient naître, tôt ou tard, dans cette République et notre région et que nous connaissons aujourd'hui.
Un mémoire de licence présenté par deux étudiants, sorti il y a six mois, intitulé: «La CEG, Genève et la BCG dans l'optique de la fusion», a obtenu le résultat maximum de la part de notre université pour son analyse remarquable. Je cite la conclusion: « La banque unique possédera sans conteste un potentiel et un poids supérieurs à celui des deux établissements. Son développement dépendra de l'évolution de la conjoncture et de l'adhésion du personnel au projet. Mais nul doute que la banque cantonale de Genève a devant elle un horizon prometteur, après avoir analysé scientifiquement et intellectuellement les avantages et les inconvénients et les difficultés d'une telle fusion».
Il y a aussi dans ces établissements du personnel, des cadres et des directions convaincus, depuis un certain nombre d'années, de l'intérêt commun à trouver des solutions visant à aboutir à une fusion. Mais il n'est jamais facile de réaliser une fusion, alors qu'on a tant de décennies d'histoire derrière soi. Je vous ai dit, lors du débat de préconsultation, que de banques complémentaires elles étaient devenues, au cours des décennies, des banques adversaires, en tout cas concurrentes, et qu'il avait fallu notamment les développements de l'informatique, extrêmement onéreux, pour amener, dans le secteur public comme dans le secteur privé, des établissements industriels, bancaires ou autres à se rapprocher et à assumer ensemble des coûts extrêmement importants pour demeurer compétitifs par la suite. C'est notamment le projet unicible à propos duquel je reviendrai tout à l'heure en parlant du personnel.
Le personnel et les cadres des deux établissements, dont certains se trouvent à la tribune ce soir, sont convaincus aujourd'hui qu'il faut aller de l'avant et qu'il faut, le 1er janvier 1994, que la banque cantonale de Genève puisse ouvrir ses portes.
Réaliser une fusion bancaire à dossier ouvert n'est pas évident du tout. Je remercie celles et ceux qui ont relevé l'aspect complexe d'un tel dossier, aspect rendu d'autant plus délicat en regard des obligations de confidentialité à l'égard de la clientèle des banques, à teneur de nos lois nationales. J'aimerais dire ici que quels que soient les sentiments du rapporteur faisant allusion à un certain degré de flottement, je distingue, pour ma part, les possibilités légitimes ou les limites légitimes d'un parlement de milice à pouvoir maîtriser un certain nombre de choses, mais également la bonne foi, la crédibilité et la confiance en celles et ceux qui nous livrent les informations nécessaires aux décisions.
Celles et ceux qui, au niveau des banques, nous ont apporté, d'abord à moi-même, au Conseil d'Etat, puis au Grand Conseil, à la commission parlementaire, des renseignements, des notes, des documents, sont des professionnels qui engage leur responsabilité et qui ont fait, eux aussi, appel à des experts.
Celles et ceux qui parmi vous, et ils sont plusieurs, siègent dans les conseils d'administration des deux établissements, connaissent également -- dès lors que les projets leur ont été présentés et qu'ils ont pu les étudier, et compte tenu de leur connaissance des dossiers -- la complexité des questions à résoudre comme celles liées à une fusion bancaire.
J'aimerais affirmer ici très clairement, au nom du Conseil d'Etat et en mon nom, que nous avons agi dans cette affaire de fusion au plus près de notre conscience, en nous entourant des spécialistes qui pouvaient nous épauler et nous dire si les mécanismes et les solutions que nous apportons sont conformes ou pas à ce que l'on est en droit d'attendre d'autorités politiques qui doivent prendre, à leur tour, leurs responsabilités.
Quant à nous, Conseil d'Etat, face à ce projet de fusion, face aux experts mandatés, aux conclusions des deux établissements bancaires, de la Commission fédérale des banques qui, tout au long de nos travaux -- je vous rappelle qu'il y a plus de deux ans de travail de la commission de pilotage que j'avais l'honneur de présider -- a reçu nos projets et, y compris de ma part dès la fin des travaux de la commission parlementaire, les textes définitivement arrêtés par ladite commission sur lesquels aucune remarque n'a d'ailleurs été formulée par ladite Commission fédérale, nous avons pris nos responsabilités.
Par conséquent et au-delà, encore une fois, de l'humilité, ce soir, face au projet -- permettez-moi de vous le dire, vous en avez peu sur d'autres projets -- vous ne pouvez pas laisser planer des suspicions ni à l'égard de la population que vous représentez ni à celui des milliers d'épargnants des deux établissements cantonaux d'aujourd'hui.
Il est évident que ce projet est important, non seulement en raison de la situation de crise profonde que notre canton et notre pays traversent, mais également pour la suite, pour le développement de Genève, pour sa reprise économique.
Je voudrais vous dire encore quelques mots sur trois points qui me paraissent essentiels et qui ont été évoqués dans le cadre du débat d'entrée en matière.
Tout d'abord, la garantie bancaire. Il n'y a pas de banque cantonale sans garantie bancaire, à l'exception des établissements constitués avant 1883, ce qui fait qu'aujourd'hui la Banque cantonale vaudoise, par exemple, n'a pas de garantie d'Etat, que la CEG bénéficie d'une garantie limitée, vous le savez, aux dépôts d'épargne de l'Etat, que la BCG ne connaît pas de garantie d'Etat jusqu'à aujourd'hui. Si nous voulions supprimer cette garantie, nous perdrions le caractère de banque cantonale et les éléments de rattachement par rapport aux ratios et aux fonds propres qui en découlent. Cela est si vrai que la Commission fédérale des banques m'a écrit fort clairement à ce sujet, lors de plusieurs échanges de correspondance, et je cite un extrait de sa lettre du 11 novembre 1991: «Il est néanmoins impératif que les épargnants de la nouvelle banque soient au bénéfice d'une garantie égale, sinon supérieure, à celle aujourd'hui existante, pour les engagements de la CEG». C'est la raison pour laquelle nous avons maintenu cette garantie bancaire limitée. C'est la raison pour laquelle -- et je vous l'avais dit en préconsultation -- la fusion se fait par l'absorption de la BCG par la CEG, laquelle est au bénéfice de cette garantie limitée, à défaut de quoi notre canton aurait dû donner, comme le canton du Jura, une garantie totale portant non seulement sur les dépôts d'épargne sans limite, mais également sur les engagements commerciaux que pouvait prendre la banque.
Le deuxième élément sur lequel j'entends brièvement intervenir est la surveillance. L'idée du Conseil d'Etat de soumettre la banque cantonale de Genève à une surveillance totale de la Commission fédérale des banques fait son chemin. Vous avez pu voir tout récemment, à propos de la banque cantonale de Berne, que le gouvernement bernois et le conseil d'administration de la banque ont demandé de prendre une série de mesures identiques à celles que je préconisais, à savoir notamment la surveillance par la Commission fédérale des banques, ainsi que le fait -- et nous l'avons déjà réalisé à Genève -- que dans le fond il n'était pas possible et pas souhaitable, ce que confirme le projet de loi, que des membres des exécutifs cantonal ou municipal, en ce qui concerne la Ville de Genève, siègent au sein du conseil d'administration de la banque. En effet, il est important d'avoir une distance et que, dans le cadre pour l'instant de l'autorité de surveillance, nous puissions agir en pleine connaissance de cause et en totale indépendance. Je puis vous dire que le conseiller national Scheidegger, qui avait posé une question écrite au Conseil fédéral, a reçu réponse dudit Conseil fédéral. Celle-là indique que, dans les limites des possibilités légales, la Commission fédérale des banques accorde à ses organes de surveillance un large soutien et s'engage ainsi, d'ores et déjà, à une surveillance efficace des banques cantonales.
C'est la raison pour laquelle cela m'a permis, compte tenu des contacts que j'entretenais avec la Commission fédérale des banques, de dire à votre commission parlementaire et de le répéter ce soir que le Conseil d'Etat -- et ce jusqu'à ce que la loi fédérale des banques soit modifiée, j'y reviendrai dans un instant -- consultera la Commission fédérale des banques qui lui fera des rapports. Je vous dirai, dès lors, que des mesures seront recommandées et appliquées par l'autorité de surveillance, c'est-à-dire le Conseil d'Etat. Cette collaboration avec la Commission fédérale des banques, non pas sur les opérations bancaires qu'elle contrôle déjà pleinement, mais sur le caractère irréprochable des organes et sur l'organisation de la banque, permettra d'avoir, dans cette phase intermédiaire, une surveillance accrue et tout à fait naturelle.
Dans sa réponse au conseiller national Scheidegger, le Conseil fédéral rappelle encore que, dans ses réflexions concernant une adaptation de la loi sur les banques dans ce domaine, il est également prêt à inclure une subordination contraignante et générale des banques cantonales à la surveillance de la Commission fédérale des banques. Sur la base des interventions qui ont été faites tant par le conseiller national Dominique Ducret, président de la BCG, que par votre Conseil d'Etat, nous voyons, aujourd'hui, que l'on progresse et que la Commission fédérale des banques pourra assurer plus rapidement que prévu cette surveillance sur les banques
cantonales, à tout le moins, sur toutes les banques cantonales qui le demanderont. D'ailleurs, c'est parce que le Conseil d'Etat est l'organe de surveillance qu'il souhaite également -- et nous y reviendrons dans le deuxième débat -- pouvoir s'assurer de la nomination du président de la banque.
Le troisième point concerne les organes de la banque. Il est vrai, comme l'a rappelé M. Lachat, que ce fut le seul problème politique évoqué par la commission parlementaire ad hoc. En ce qui concerne le conseil d'administration, il vous a été donné lecture de la résolution du Conseil municipal de la Ville de Genève, réuni en séance extraordinaire le 3 mars dernier. J'aimerais dire à M. Menoud que j'avais été invité par le président du Conseil municipal à être présent. J'aurais volontiers accepté, si je n'avais eu, simultanément, à me trouver à l'assemblée des délégués de la CIA qui traitait du problème important de l'augmentation de la cotisation. Je l'ai expliqué et cela a dû être indiqué au président du Conseil municipal. Voilà la cause de mon absence, ce soir-là, dans cette enceinte.
Au niveau du conseil d'administration, il vous appartiendra donc de trancher par rapport aux revendications de la Ville de Genève. Je vous rappelle que ce qui a été déterminant pour la commission fut de maintenir ce ratio entre les apports de la Ville de Genève et ceux des quarante-quatre autres communes. Lorsque la commission parlementaire a proposé d'avoir six personnes désignées par les autorités municipales, dont quatre pour la Ville et deux pour les quarante-quatre communes, elle tenait compte précisément de ce rapport. Cette proposition a été acceptée, exception faite de la Ville de Genève, à l'unanimité par les autres communes.
Il vous appartiendra de prendre aussi vos responsabilités dans ce domaine. Le Conseil d'Etat a dit très clairement qu'il souhaitait effectivement, Monsieur Menoud, un conseil d'administration efficace, suffisamment restreint, mais qu'en revanche il était prêt à accepter, ce qu'il a fait en commission, une augmentation du nombre des membres du comité de banque qui assureront, mois après mois, la gestion de la banque avec la direction générale.
Dans ce cadre-là, je crois, à la suite d'amendements encore en commission et notamment de ceux de votre rapporteur, qu'il a été présenté des solutions qui permettent de tenir compte, dans une large mesure, des intérêts des uns et des autres.
Quant au président de la banque, le Conseil d'Etat réaffirme par mon intermédiaire que, dès lors que le canton est seul à donner sa garantie, il considère comme parfaitement légitime de pouvoir nommer le président pour que ce dernier ne rende pas des comptes exclusivement à son conseil d'administration, respectivement à son assemblée générale, comme il pourrait nous le dire, mais rende des comptes aussi au Conseil d'Etat, autorité, qui plus est, de surveillance de la banque.
Si la Ville, comme je l'ai fait dire au président du Conseil municipal, voulait donner sa garantie, nous aurions pu, bien entendu, nous mettre à égalité sur ce plan-là, mais la Ville, semble-t-il, ne l'a pas accepté. Voilà pourquoi je pense que, pour ce qui est du poste de président, la position du Conseil d'Etat est tout à fait claire et ferme.
En ce qui concerne les réserves et les provisions pour risques, j'aimerais dire à ce parlement qu'indépendamment des débats tenus en commission parlementaire M. Philippe Joye est intervenu, par écrit, auprès de moi en me transmettant une liste d'affaires ou de noms recueillis, soit de par ses qualités professionnelles, soit au travers de la presse. Il m'a transmis ces noms en me demandant si ces affaires étaient provisionnées, si tant est que les personnes concernées aient été clientes des établissements publics. Comme c'était mon devoir et comme je le fais toujours quand l'un d'entre vous ou d'autres personnes m'alertent sur un problème, j'ai transmis cette communication aux présidents des deux établissements en leur demandant une réponse, notamment confirmée, comme je l'avais fait à l'égard de votre Conseil, il y a un peu plus d'une année, par les organes de révision bancaire externes aux deux établissements qui engagent leur responsabilité. J'ai reçu des deux organes de révision bancaire deux lettres m'indiquant que, après avoir pris connaissance des débiteurs mentionnés dans des listes communiquées à M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, dans la mesure où ceux-là soient clients de la CEG-Genève, respectivement de la BCG, ces débiteurs ont bien été pris en compte dans l'analyse des risques à la date du 31 décembre 1992 et, le cas échéant, que les provisions estimées nécessaires ont été constituées par la banque. Par conséquent, sur ce plan-là, n'étant pas administrateur des établissements, n'ayant aucune autorité de surveillance sur la BCG en l'état, je puis néanmoins dire ici, sur la base de ces lettres, que les deux établissements ont constitué des provisions pour les dossiers évoqués, y compris ceux
évoqués dans la presse de ce matin -- je n'y vois aucun fait du hasard, d'ailleurs -- si tant est que les personnes ou sociétés évoquées soient clientes des deux banques.
Enfin, et j'en aurai terminé, mais c'est important: le personnel. En ce qui concerne le personnel, il faut que l'on soit tout à fait clair. Suite au débat précisément du Conseil municipal qui a abordé également ce problème, j'ai demandé aux deux établissements bancaires ce qu'il en était et j'aimerais dire ici, en leur nom, ce qu'ils m'ont confirmé par écrit, à savoir que les deux banques n'ont procédé à aucun licenciement lié à la fusion ou à des motifs d'ordre économique. Sur les neuf cent septante-quatre personnes employées au 1er mars 1993, aujourd'hui seules quinze d'entre elles font partie d'une liste de personnes pour l'instant, passez-moi l'expression, non attribuées. Certaines d'entre elles ont refusé le nouveau poste qu'on leur proposait, raison pour laquelle elles figurent sur cette liste. D'autres sont très proches de la retraite et pourront être conservées, car les deux établissements -- ils l'ont répété devant la commission et m'ont autorisé à le dire ici -- se sont engagés et ont accepté d'avoir, au cours des trois ou quatre prochaines années, un sureffectif pour permettre d'éviter précisément des motifs de licenciements en raison de la fusion. Par conséquent, il n'y aura aucun licenciement collectif lié à la fusion de nos deux établissements bancaires cantonaux.
J'aimerais vous dire aussi que c'est une des nécessités exigées par le fait que nous faisons une fusion en pleine transparence. Dans le secteur privé, il y a eu déjà trois fusions dans le domaine bancaire à Genève ces deux dernières années, trois fusions importantes qui permettent, comme la fusion que nous préparons ce soir, de renforcer la place financière genevoise. C'est important pour notre avenir, c'est important pour l'avenir et le développement de la région et pour les emplois. Dans le cadre des fusions privées, des licenciements sont, hélas, nécessaires. En ce qui concerne les deux banques cantonales, compte tenu de leurs responsabilités particulières et du capital-actions qui est mis par les communes et l'Etat de Genève, il était important de pouvoir agir de la façon que je vous ai indiquée.
Par conséquent, sur ce plan-là, il n'y a aucun problème quelconque, m'ont assuré les deux banques. J'aimerais dire encore, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, que les informaticiens des deux établissements, environ quatre-vingt-dix personnes, ont été, m'ont dit les deux banques, transférés, avec leur accord, dans le cadre du projet Unicible, à la société Unicible, qui est chargée, avec d'autres banques cantonales, de mettre en place les programmes informatiques extrêmement complexes dans l'intérêt de notre future banque cantonale et dans celui d'autres banques cantonales de ce pays, notamment romandes.
Veuillez m'excuser d'avoir pris quelque temps, mais j'entendais par avance répondre à cela et vous démontrer que nous avons essayé de faire au mieux, conscients des problèmes, conscients des difficultés, avec l'appui de personnes qui méritent notre confiance et qui méritent que ce parlement votent les deux projets qui vous sont soumis, afin que le relais puisse être transmis au peuple et que le 1er janvier 1994 la banque cantonale de Genève ouvre ses portes, renforcée dans le cadre d'un intérêt évident, celui du canton et de notre région. (Applaudissements.)
PL 6872-A
Le projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Le titre et le préambule sont adoptés.
Art. 177
M. David Lachat (S), rapporteur. Il s'agit d'un amendement relatif à l'alinéa 2. On propose un adjectif qui vise à qualifier «d'harmonieux» le développement économique du canton. Il est repris de la loi valaisanne, d'une part, et de la loi vaudoise, d'autre part. La commission a examiné cette proposition d'amendement et l'a rejetée. Il lui semblait évident que, si l'un des buts poursuivis par la banque était de favoriser le développement économique, celui-ci devait être harmonieux. En quelque sorte, il s'agirait là, selon nous, d'une tautologie.
M. Jean Spielmann (T). Tout à l'heure, dans mon intervention, j'ai fait allusion à une série de problèmes et de questions qui se posent au sujet du moteur même du développement économique, du rôle joué par les banques. J'ai souligné certains aspects positifs et d'autres qui le sont moins. Nous n'allons pas refaire ici tout l'historique, mais il me semble important de donner un signe précis et je ne crois pas que l'évidence, comme l'a dit le rapporteur, consisterait, dans le fond, à ne pas changer le texte et à dire que tout développement économique est harmonieux. Il y a, et vous ne pouvez l'ignorer, des gens qui se posent la question de la primauté du développement économique, de la primauté de l'économie sur des questions importantes à long terme et qui sont celles de la protection de l'environnement, de la politique sociale et, en gros, celles du développement harmonieux de l'économie et de la société.
Par conséquent, ce n'est pas seulement le développement économique qui est qualifié par l'adjonction de cet adjectif, mais bien la volonté de trouver, dans un «développement économique harmonieux», une possibilité d'inscrire celui-ci dans le développement d'une société pour qui, je résume, le profit et l'argent ne sont pas les seuls et uniques moteurs au départ et qu'il y a aussi des conséquences sur l'être humain, sur l'environnement, qu'il nous faut prendre en compte. Cet adjonction «harmonieux», à notre avis, permet de bien préciser les choses dans le cadre de la définition de ce développement, et dans l'article constitutionnel, et dans l'alinéa 2 de la loi que nous voterons tout à l'heure. Si c'est si évident aux yeux de tous, je ne vois pas pourquoi on ne l'inscrirait pas dans le texte pour que cela soit aussi clair pour les gens de l'extérieur qui sont moins informés que nous des tenants et des aboutissants. Je crois qu'ainsi nous clarifierons la situation.
M. Philippe Joye (PDC). Je voudrais intervenir sur les amendements que notre parti refusera en bloc pour dire ceci: même si je le souhaitais ardemment, même si j'étais très sensible, par exemple, à l'aspect des subventions évoqué par M. Boesch, nous ne sommes pas en train de créer une société philanthropique, mais une société qui doit avoir un organisme, un rendement économique que nous voulons voir fonctionner dans un système extrêmement rigoureux, avec une compétition très forte. Nous avons une banque qui va être beaucoup plus soumise à des contraintes de concurrence que les banques suisses nationales, parce que celles-ci font des bénéfices élevés en provenance de l'étranger. Les marges de cette banque seront extrêmement restreintes. C'est pour cette raison que, connaissant la compétitivité acharnée qui règne sur le marché bancaire, je suis très réticent à l'idée d'imposer à notre futur conseil d'administration et à votre Bureau des contraintes qui pourraient amener ce Conseil à se préoccuper d'abord des exigences de la protection de l'environnement, des impératifs de la protection sociale et de l'éthique, avant de se préoccuper de la chose primordiale qui est la rentabilité.
Vous avez beaucoup parlé de la méfiance de la population à l'égard des bénéfices bancaires. Certes, mais ce qui est bien plus grave c'est lorsque les banques sont en état de suspension de paiements et qu'elles ne peuvent plus honorer leurs engagements. Nous avons connu ce genre de situation avant la guerre et je crois que nous devons faire extrêmement attention. Le premier but de cette banque doit être de marcher correctement, de dégager des bénéfices, d'inspirer une confiance certaine à sa clientèle, cela à l'intérieur des limites déontologiques, éthiques et environnementales raisonnables que notre commission a amplement discutées.
Mme Erica Deuber-Pauli (T). Un établissement bancaire qui relève les défis de la concurrence, c'est bien. Mais la concurrence n'a pas de valeur en soi. La concurrence a de la valeur quand elle s'inscrit dans un projet et c'est ce projet-là que nous voulons harmoniser. Ce n'est pas la concurrence que nous contestons, mais l'exemple de ce qui s'est passé au début des années 80 avec nos deux banques, fiancées d'aujourd'hui. Elles ont été concurrentielles sur le marché des prêts de capitaux pour des opérations immobilières. Elles ont été prises dans ce système de concurrence qui les a amenées à l'aveuglement et à un certain nombre d'opérations qu'elles regrettent d'avoir faites et qui ont conduit une partie du secteur immobilier à la ruine. C'est de la concurrence qui conduit à la ruine. Il faut de la concurrence qui conduise à du progrès pour que soient précisément remplis les objectifs que nous attendons de cet instrument qui est une banque concurrentielle. C'est bien ce que nous voulons signifier en disant «harmonie».
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je voudrais vous dire juste un mot, car vous allez, au travers du vote, vous séparer sur une forme d'incompréhension.
En réalité, vous faites une loi constitutionnelle et, tout à l'heure, vous ferez une loi organique. En transformant la CEG, qui est une fondation, et la BCG qui a une autre forme juridique, en société anonyme de droit public, vous créez simultanément une assemblée générale. Et, dans cette assemblée générale, comme au conseil d'administration, les communes et le canton de Genève seront majoritaires, vous le savez. Il appartiendra précisément à ces actionnaires et aux administrateurs désignés, sous le contrôle de l'autorité de surveillance, de veiller à l'activité de la banque.
J'aimerais vous dire qu'il est absolument superfétatoire de mettre dans une constitution un terme qui sera d'ailleurs difficilement qualifié et qualifiable puisque, comme d'aucuns l'ont dit, le sens du terme «harmonieux» varie d'une personne à l'autre. En revanche, et c'est là aussi un de ses intérêts, le projet permettra au canton, aux communes et à leurs représentants à l'assemblée des actionnaires de dire un certain nombre de choses, comme de déterminer la charte d'éthique que vous avez prévue. Cela me paraît être les bons mécanismes, raison pour laquelle je considère, pour ma part, qu'il n'y a pas de raison d'inscrire cela dans la loi, respectivement dans la constitution. En revanche, ce seront des débats qui, en fonction évidemment de l'évolution économique, mais aussi de l'évolution sociale et humaine de notre canton, permettront de prendre les mesures qui seront les plus adéquates au moment nécessaire.
Mis aux voix, l'amendement proposé à l'article 177, alinéa 2, est rejeté.
Mis aux voix, les articles 1 et 2 (soulignés) sont adoptés.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue:
PL 6873-A
Premier débat
Le projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Art. 2
Le titre et le préambule sont adoptés.
M. Jean Spielmann (T). Dans le débat de tout à l'heure, j'ai décelé quelques éléments de contradiction qui, à notre avis, reposent sur un problème de fond.
Pour argumenter son opposition à l'introduction de l'adjectif que nous voulons insérer dans la constitution, M. Joye est intervenu en disant qu'il fallait laisser cette banque développer une compétitivité acharnée, qu'il fallait qu'elle s'inscrive dans cette compétitivité économique sans frein ni barrière. Nous, nous considérons précisément que la construction d'une telle banque engendre des problèmes de fond, alors que le Conseil d'Etat a dit qu'il n'y en avait pas. Je pose simplement la question. Je dis que d'avoir introduit ce terme n'est pas si innocent et je remercie M. Joye d'avoir précisé l'idée que se font de cette banque ceux qui ont rejeté cet amendement. C'est important pour toute la suite du débat.
Comme je l'ai exprimé dans le débat d'entrée en matière, et c'est pourquoi je ne suis pas d'accord d'aller dans cette direction, il s'agit quand même, à notre avis, de laisser, dans ce contexte et dans ce développement, une place à l'être humain, une place aussi à la nécessaire protection de l'environnement. A force de développer et de ne considérer que la compétitivité, sans accepter de tenir compte de la réalité de la vie, vous allez poser des problèmes importants et vous les posez déjà dans les buts mêmes que vous fixez à cette future banque. Il faut être clair. Il ne s'agit pas ici seulement de jouer sur quelques mots, mais bien de voir quel instrument nous voulons mettre sur pied, à qui il va servir et à quoi il va servir.
Par conséquent, la modification de l'alinéa 3 de l'article 2 prévoit que la banque «soumet ses activités aux exigences de la protection de l'environnement et qu'elle prend en compte les impératifs de la protection sociale». Cela représente pour nous des arguments déterminants dans la mesure où notre collectivité ayant besoin d'un nouvel établissement c'est ce type d'établissement que nous voulons définir et construire. Il y a dans ce canton deux cents établissements bancaires qui peuvent parfaitement répondre à toutes vos préoccupations.
Nous voulons construire ce nouvel établissement, participer à sa réalisation, à ses activités, et permettre de jeter les jalons de cette politique dans la mesure où elle s'inscrit dans cette orientation, c'est-à-dire la prise en compte de la société pour laquelle on construit un tel instrument, dont les activités devront être soumises aux exigences de la protection de l'environnement et tenir compte des impératifs de la protection sociale. Ce sont là des éléments déterminants pour notre acceptation.
Je suis aussi persuadé que vouloir un tel organe pur et dur -- que certains d'entre vous tentent de présenter d'une manière plus favorable et plus acceptable -- va, en définitive, rendre beaucoup plus difficile la construction de l'établissement. En tout cas, nous ne sommes pas d'accord et le dirons clairement si vous deviez refuser la voie que nous vous proposons.
M. David Lachat (S), rapporteur. La commission a examiné un amendement quasi analogue à celui proposé à l'article 2, alinéa 3. La commission l'a rejeté par 8 non, 3 oui et 4 abstentions.
En réalité, le débat était le suivant: la commission unanime a souhaité faire un pas dans la direction de l'éthique. Je crois que c'est une première dans le domaine bancaire, en tout cas au niveau des banques cantonales, en Suisse. Nous avons inscrit clairement dans la loi que la banque doit être régie selon les principes de l'éthique bancaire. Ensuite, nous nous sommes posé la question de savoir s'il convenait de définir ce qu'on entendait par «éthique bancaire». Certains députés, précisément, ont demandé que, dans la notion d'une éthique élargie, on tienne compte des impératifs de protection de l'environnement et des impératifs de protection sociale.
La solution choisie par la commission a été de laisser cette notion d'éthique sans trop la préciser. La commission a considéré qu'il était difficile de circonscrire ce que devait être cette éthique à laquelle la banque cantonale devait s'astreindre.
On a toutefois exigé que la banque se dote d'une charte d'éthique et on lui a laissé le soin d'apprécier si cette charte devait comprendre, en toutes lettres, des indications selon lesquelles elle se soumettait à des impératifs de protection de l'environnement et à des impératifs de protection sociale.
Dans la discussion au sein de la commission, comme l'a dit tout à l'heure Mme Olsommer, il a été admis que cela pouvait être un des éléments de définition. Pour le surplus, je vous renvoie aux commentaires de cet article 2, alinéa 3, tels qu'ils figurent en pages 33 et 34 du rapport.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). M. Lachat vient de rappeler la position de la commission sur ce point. Quant à nous, nous avons regretté, lors de ce vote, que la barre n'ait pas été placée plus haut. Certes, nous étions déjà satisfaits qu'apparaisse dans la loi une clause éthique, mais nous aurions souhaité aller plus loin.
Nous l'avons déjà dit hier soir, dans le cadre de la discussion sur la conception cantonale en matière d'énergie, et nous le redisons ce soir: le développement économique d'une région ne devrait pas être un but en soi, mais doit être au service des hommes et des femmes de cette région pour assurer, évidemment, leur bien-être matériel, mais aussi leur bien-être social, moral et physique.
Les seuls critères habituels de rentabilité économique ne suffisent plus aujourd'hui. Ecarter les aspects éthiques, sociaux ou environnementaux, à l'heure d'une décision, se paiera toujours à moyen ou à long terme. Les entreprises et les banques ont intérêt à choisir leur projet à la lumière de multiples critères et la justesse d'une telle attitude nous a d'ailleurs été confirmée lors d'une audition par l'un des directeurs d'un établissement bancaire. Il nous a affirmé, en effet, avoir bénéficié d'une meilleure image après avoir choisi de renoncer à un certain nombre d'investissements en Afrique du Sud, lors de la période dure de l'apartheid.
Nous avons la certitude qu'à l'avenir seules les banques qui auront su développer leurs activités en fonction de solides normes éthiques et écologiques auront une garantie de stabilité et de survie. Si cette complémentarité n'est pas prise en compte, il n'y aura pas de développement durable au service des hommes et des femmes.
C'est pourquoi nous soutiendrons cet amendement.
Mme Erica Deuber-Pauli (T). Le texte proposé dit: «Elle est gérée selon les principes éprouvés de l'économie et de l'éthique bancaires».
«Les principes éprouvés de l'économie bancaire», nous sommes d'accord. «Les principes éprouvés de l'éthique bancaire», alors là, on frise le ridicule. Nous savons exactement, pour en avoir débattu longuement ici même, dans cette enceinte, lors des demandes de modifications des lois bancaires, à quel point cette éthique souffre d'être éprouvée et a besoin encore de faire un grand chemin avant de l'être.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de dire: «Elle est gérée selon les principes éprouvés de l'économie bancaire et ceux de l'éthique», car les principes de l'éthique doivent encore s'éprouver dans le domaine des banques. Je pense que la signification est relativement différente, mais elle est une invite à faire de la banque cantonale, et de la charte d'éthique qu'elle se donnera, un modèle du genre. Nous sommes en mesure de le faire, au vu de l'expérience que nous avons des ratages éthiques des banques, pour ne pas dire pire.
Je ne reviendrai pas sur les autres aspects de l'amendement. La protection de l'environnement et la protection sociale font partie de ce que nous appelons le développement harmonieux d'une société et d'une économie dans une société. Mais si cette économie n'est pas pénétrée de ces principes d'éthique, nous pensons qu'elle manque d'un garde-fou essentiel et nous risquons, dans le cadre des concurrences effrénées qui ne manqueront pas de continuer à s'exercer dans le domaine de l'économie, notamment à l'aurore de cette Europe dans laquelle nous aspirons à entrer, de subir de grands déboires. Il vaut mieux avoir un garde-fou que rien du tout et, dans ce domaine, nous manquons encore singulièrement d'expérience.
Mme Vesca Olsommer (Ve). C'est une discussion un peu difficile, parce que l'on revient en plénière avec une proposition que le parti écologiste avait faite en commission et qui avait été refusée, et fortement refusée. Nous y avions renoncé pour finir, de guerre lasse, et aussi parce que nous avions tout a fait approuvé la définition de l'éthique que le rapporteur avait développée dans son rapport. Nous y avions renoncé avec un certain regret, nous disant que, puisque ces principes d'éthique figureraient dans une charte, celle-ci pourrait évoluer.
Que faire maintenant? Le parti du Travail revient avec cette proposition qui était la nôtre. Nous allons donc la voter, mais nous savons qu'elle sera refusée. Cela nous ennuie que l'on revienne en plénière sur ce sujet, pour en faire un jeu de ping-pong entre la droite et la gauche, et ainsi le dévaloriser.
M. Denis Menoud (Ve). Je reviens à nouveau sur l'éthique. Rappelez-vous quelle oeuvre éthique était la banque du Saint-Esprit rattachée au Vatican, avec Mgr Marcinkus, un compère du louche M. Calvi retrouvé pendu sous un pont de Londres. Alors, voyez-vous, pour ce qui est des choses de l'éthique, il faut être très prudent.
On sait qu'elles concernent quelques thèmes très précis, dont la gestion de fortunes. A Genève, on évalue cet avoir entre 600 et 800 milliards. Peut-on supposer qu'une partie de la dette du tiers-monde se trouve ici, à faire travailler cet argent? Il y a la question de l'argent sale qui est déjà relativement résolue dans les banques cantonales. Il y a la question dite de la spéculation. C'est toujours très délicat de traiter de ce genre d'affaires. Je vous le dis, ce n'est pas toujours facile.
D'autre part, il y a la question des prêts douteux à l'armement. J'aimerais revenir sur la question, et j'y reviens un peu à cause de M. Lachat. Des administrateurs ou des administratrices ont pour première tâche, au départ, cette charte d'éthique. Ce n'est pas de savoir si la technique bancaire éprouvée ou le produit financier X est le meilleur ou le moins bon. C'est d'abord cette charte qu'il faut déterminer et c'est cela qui est capital. Vous pouvez bien faire tous les discours que vous voulez, pour moi, le meilleur texte possible peut être totalement dénaturé si vous nommez des gens qui s'en fichent complètement et éperdument.
Mme Martine Brunschwig Graf (L). Je demande au groupe écologiste qu'au nom de l'éthique, il prie son administrateur de la Banque hypothécaire de bien vouloir s'abstenir d'intervenir dans ce débat, comme le font tous les administrateurs qui siègent sur ces bancs et qui sont concernés par les banques en question. (Applaudissements.)
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 2, alinéa 1 (adjonction du terme «harmonieux») est rejeté.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 2, alinéa 3 (adjonction «et ceux de l'éthique. Elle soumet ses activités aux exigences de la protection de l'environnement. Elle prend en compte les impératifs de la protection sociale.») est rejeté.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté.
Art. 3
M. David Lachat (S), rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement, si bien que je ne vous donnerai qu'un avis personnel. Je constate que le projet de loi, à l'article 2, alinéa 1, indique que «La banque a pour but principal de contribuer au développement économique du canton et de la région». Je pense qu'il est opportun d'ajouter «La banque déploie principalement son activité dans le canton de Genève et sa région». A titre personnel, je pense que cet amendement est acceptable. On peut avoir une interprétation différente si l'on considère que la notion de région est déjà prise en compte à l'alinéa 2 de l'article 3, puisque la banque est habilitée à exercer son activité ailleurs en Suisse et à l'étranger, et que dans le rapport il est indiqué que la notion «d'étranger» est principalement la France voisine, donc de région.
M. Jean Spielmann (T). Simplement, nous avons pris cet amendement parce que, dans les buts de la banque, on avait bien précisé différents endroits. On avait parlé du canton et de la région. Il ne nous semblait pas juste que le rayon d'activité soit le canton de Genève, et qu'ensuite on parle de la Suisse et de l'étranger. Il nous semble important que s'inscrive «et sa région» dans un projet plus large et d'insérer aussi ce terme dans le rayon d'activité. Si cela ne suscite pas d'opposition, je pourrai très rapidement m'asseoir. Je vous invite à accepter cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement portant sur l'article 3, alinéa 1 (adjonction «...et sa région») est adopté.
Mis aux voix, l'article 3, ainsi amendé, est adopté, de même que l'article 4.
Art. 5
Mme Erica Deuber-Pauli (T). Il s'agit évidemment d'adapter les compétences professionnelles requises aux buts visés. Si ces buts sont ceux qu'a décrits, tout à l'heure, notre collègue Philippe Joye, en termes strictement d'économie bancaire, c'est, en effet, les connaissances professionnelles dans ce domaine qui sont exclusivement requises. S'il s'agit de se doter d'un certain nombre de paramètres qui ont trait à la protection de l'environnement, à la protection sociale et à l'éthique, il n'est pas inutile que les compétences, dans ces domaines, puissent également être représentées.
C'est cette exclusivité de la compétence professionnelle bancaire qui nous paraît contestable au vu des buts visés.
M. David Lachat (S), rapporteur. J'ai le sentiment qu'en fait cet amendement devient superflu dans la mesure où nous n'avons pas accepté l'amendement de l'article 2, alinéa 3.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je voulais simplement dire qu'à propos de l'article 5, quand on parle d'activité irréprochable et de compétences professionnelles, il est bien entendu que cette loi dépend d'une loi plus fondamentale qui est la loi fédérale sur les banques. L'autorité de surveillance doit s'assurer, précisément, de la partie non couverte par la Commission fédérale des banques, c'est-à-dire le caractère organisationnel et le caractère irréprochable de ces organes. C'est dans ce cadre-là et dans le cadre des activités bancaires qu'il faut des capacités professionnelles reconnues qui n'ont pas forcément besoin de relever exclusivement du cadre des compétences bancaires.
Enfin, je voudrais dire que tout le débat va porter sur la désignation des administrateurs. Le combat que conduit la Ville de Genève, dès lors que la proportion dans le capital est respectée, est un combat pour élargir le champ politique des administrateurs, six plutôt que quatre, comme la commission l'a voulu.
Par conséquent, ce sera le Conseil municipal qui désignera les administrateurs. Ceux qu'il aura désignés souverainement, sur la base des critères qu'il aura établis, ainsi que les deux administrateurs des communes, feront l'objet d'une nomination de la part du Conseil d'Etat par voie d'arrêté. En ce qui concerne le Conseil d'Etat, il tiendra compte des répartitions prévues à l'article 12.
C'est la raison pour laquelle, encore une fois et sans en faire un combat de fond, je considère cet amendement, pour autant que je le comprenne, comme totalement inutile en regard des compétences bien claires dans le cadre de l'article 5 sur la surveillance, par rapport à la loi fédérale sur les banques.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 5, alinéa 1 (modification: «...et disposant des compétences nécessaires pour répondre aux buts visés à l'article 2, alinéa 3») est rejeté.
Mis aux voix, l'article 5 est adopté, de même que l'article 6.
Art. 7
M. David Lachat (S), rapporteur. Je vous prierais d'excuser la petite erreur qui s'est glissée dans le commentaire de l'article 7, alinéa 2, à la page 42 de mon rapport. Selon le texte relatif à l'article 7, qui découle lui-même de la disposition constitutionnelle, article 177, alinéa 3, «de droit, le canton et les communes détiendront la majorité du capital social et des voix à la banque». En réalité, ils ne détiennent pas de «droit», mais «de fait» la majorité du capital social et des voix de la banque. C'est là une précision nécessaire, car mon commentaire n'est pas exact, à mon sens.
Les articles 7 à 11 sont adoptés.
Art. 12
M. Jean Spielmann (T). On arrive ici à un point important du débat qui a été discuté en commission et qui a fait l'objet d'une résolution admise à une très forte majorité par la Ville de Genève, sinon à l'unanimité. Cette résolution proposait de revoir la composition du conseil d'administration et de rediscuter des différentes représentations à l'intérieur dudit conseil, compte tenu des forces en présence au niveau financier.
Je crois que le choix entre vouloir restreindre le nombre des membres et les lier à une compétence professionnelle ou vouloir l'élargir en permettant un débat avec les risques et les conséquences qu'il comporte -- je conçois qu'ils existent -- pose un problème important à notre Conseil. Cela pose aussi un problème important quant au rôle que va jouer cette banque cantonale.
Je ne reprendrai pas l'ensemble de l'argumentation qui a déjà été développée en commission par les résolutions du Conseil municipal, mais je vous dirai simplement que, dans la proposition que nous faisons et modulons encore par rapport aux différentes interventions qui ont été faites, nous introduisons une autre notion qui nous semble tout aussi importante dans l'article 12, tel qu'il est rédigé dans le projet de loi déposé. On parle de la nomination et de la représentation de quatre représentants de la Ville de Genève et de deux émanant des autres communes.
Je crois que la réalité du développement économique de notre collectivité cantonale nécessite la prise en compte des grandes communes qui ceinturent la ville. En fait, il s'agit de villes à l'extérieur de la ville de Genève. Je veux parler ici des villes de Vernier, d'Onex, de Meyrin, de Lancy et de Carouge qui doivent, à mon avis, être traitées autrement que le collège de l'ensemble des autres communes. Par conséquent, on peut et on doit faire place à ces entités.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de modifier l'article 12, en reprenant la proposition faite par la Ville et présentée en commission, soit de porter le nombre d'administrateurs de vingt-et-un à vingt-quatre, d'en désigner dix-huit -- et là, il n'y a pas de modification dans la représentation de l'actionnariat nominatif -- dont neuf désignés pour le canton et neuf désignés, conformément à l'article 13, par les communes, soit six pour la Ville et trois pour les communes. Sur ces trois, nous demandons que deux soient choisis dans les communes de plus de dix mille habitants.
D'autre part, comme vous l'aurez remarqué dans les propositions d'amendements -- et je me réfère déjà aux propositions qui figurent au haut de la page suivante pour éviter de reprendre la parole sur ce point -- nous demandons aussi que les modalités d'élection soient conformes aux règles en usage. Je considère qu'il n'est pas possible que l'association des communes puisse parler au nom de toutes les communes. C'est un organe qui a une autre fonction qu'un organe qui peut déléguer ou décider la désignation des gens du conseil d'administration et cela ne doit pas échapper aux délégués des conseils municipaux, comme c'est le cas actuellement.
Les trois modifications fondamentales que nous proposons sont: monter le nombre des administrateurs de vingt-et-un à vingt-quatre, renforcer la présence de la Ville, développer l'idée de la représentation des communes de plus de dix mille habitants, et là j'anticipe sur l'article 13, changer le mode d'élection. Mais comme il s'agit de la même argumentation, les amendements que nous présentons sont forcément liés. Je vous remercie de leur faire bon accueil.
M. David Lachat (S), rapporteur. S'agissant de la composition du conseil d'administration, la commission a arrêté trois principes. Le premier principe veut que le canton, les communes et les actionnaires au porteur soient représentés au sein du conseil d'administration sur pied d'égalité. La majorité de la commission a souhaité que les actionnaires au porteur -- qui ne seront pas nécessairement des privés, les collectivités publiques ou parapubliques ou les fonds de prévoyance pouvant souscrire des actions au porteur -- aient un nombre aussi important d'administrateurs que le canton ou les communes, cela pour des raisons de politique économique. La participation au conseil d'administration peut susciter un certain intérêt pour l'acquisition de ces actions au porteur.
La seconde règle que nous avons retenue pour la composition du conseil d'administration consiste à admettre, dans son principe, le souhait de la Ville de Genève, compte tenu du rôle historique qu'elle a joué au sein de la Banque hypothécaire, d'avoir deux fois plus de sièges que les autres communes.
En fonction de ces deux premiers principes, nous avions le choix d'un conseil d'administration de dix-huit ou de vingt-sept membres au maximum. Nous avons choisi l'option «dix-huit» pour des questions d'efficacité. Nous considérons qu'un conseil d'administration de vingt-sept membres serait manifestement pléthorique et que les administrateurs perdraient, de ce fait, le pouvoir que nous voulons leur voir attribué dans la future banque, pouvoir qui serait en quelque sorte «confisqué» par la direction.
Toutefois, pour tempérer le risque que les partis minoritaires ou les groupements économiques minoritaires dans la vie de la cité et du canton ne soient pas représentés au conseil, la commission a accepté l'amendement que votre serviteur a proposé, à savoir qu'il est indiqué en chapeau de l'article 12, alinéa 2, que «Le conseil d'administration représente dans la mesure du possible les diverses tendances de la vie économique et politique du canton».
M. Jean Opériol (PDC). Notre groupe ne faiblira pas dans la détermination qui a été la sienne, lors des débats en commission auxquels je participais. Ce que ce Grand Conseil doit comprendre et le peuple avec lui, je l'espère, c'est que Genève veut une banque performante, efficace, gérée comme une entreprise privée, même s'il s'agit d'une société anonyme de droit public.
Nous considérons -- et je crois que la commission était quasiment unanime à ce propos -- que l'adéquation entre la saine gestion et la compétence ne passe pas nécessairement par le canal et le critère politiques, mais fait bien davantage appel à la compétence des administrateurs qui seront choisis précisément en fonction de leur formation et de leurs affinités professionnelles.
Monsieur Boesch, vous avez parlé de toutes sortes de sensibilités sociales, vous avez même parlé de locataires au sein de ce conseil d'administration. J'abonde dans votre sens. L'Union de Banques Suisses est «vice-présidée», sur le plan national, par un locataire genevois. Je pense qu'il n'appartient pas à la catégories des locataires auxquels vous pensez, mais cela répond à votre question. (Rires.)
Cela étant dit, la Ville de Genève ne nous dit pas ce qu'il arrivera le jour où d'autres partis viendront siéger au Conseil municipal. Il y aura peut-être des automobilistes, des varappeurs, je ne sais. A ce moment, il faudra revoir la loi et nous repartirons pour un nouveau débat parlementaire.
Je termine en disant qu'il faudrait quand même respecter aussi l'avis des autres communes qui nous ont délégué le président de leur association et qui ne font aucune objection à la découpe et à la taille du conseil d'administration auxquelles la commission a souscrit.
Mme Vesca Olsommer (Ve). Ils ne sont pas rares les administrateurs qui nous signalent que les conseils d'administration comprenant plus de douze personnes ne peuvent être gérés avec énormément d'efficacité. Par conséquent, nous pensons que nous pouvons accéder à la demande du Conseil municipal et augmenter le nombre des administrateurs de la Ville et des communes à neuf, et également le nombre de ceux du canton, puisque, de toute façon, le chiffre de douze, qui paraît magique comme on l'a dit, est déjà dépassé dans ce projet. Il y va du principe de représentativité auquel nous tenons beaucoup.
M. Denis Menoud (Ve). J'aimerais répondre aux propos désagréables, style maîtresse d'école...
Des voix. Ouhh, assis, assis...
La présidente. Laissez-le parler, s'il vous plaît! Sortez si vous ne voulez pas l'écouter, mais laissez-le parler!
M. Denis Menoud. Qu'ils sortent, on fera un contre-appel et on va bien rigoler. Je rappelle que je suis élu par le Conseil municipal de la Ville de Genève. Vos copains, administrateurs de la CEG, sont élus par le Conseil d'Etat, c'est tout à fait différent. J'ai une légitimité, au deuxième degré, de grand électeur, figurez-vous, ce qui n'est pas votre cas. Je m'arroge donc le droit de parler au nom du Conseil municipal et de défendre ses intérêts. Ce qui est proposé par ces amendements, c'est effectivement de tenir compte des intérêts patrimoniaux de la Ville de Genève qui, vous ne pouvez l'ignorer, représente 45% de la population genevoise. D'accord? D'autre part, elle a consenti à des efforts extrêmement importants pour le capital, notamment le capital de participation, etc. Si vous voulez un casus belli pour faire capoter cette affaire, continuez de la sorte. Simplement, vous êtes responsables de ce que vous faites, parce que je puis vous dire que des gens n'attendent que quelques prétextes pour faire capoter l'affaire. Ce ne sera pas sur le point de l'éthique, car tout le monde sait qu'une banque... Mais soyez extrêmement prudents. Je vous rappelle que même le Conseil administratif a écrit une lettre, sous la signature de Mme Rossi, pour faire valoir les doléances de la Ville de Genève. Alors, si vous pensez vous asseoir et passer par-dessus la Ville de Genève et des communes... Oui, Messieurs, dans la proposition, il y a un siège supplémentaire pour les communes, alors ne dites pas n'importe quoi et lisez le texte correctement.
M. Nicolas Brunschwig (L). Tout d'abord, j'ai deux remarques à faire, la première à Mme Olsommer. Je ne crois pas, Madame, que l'on puisse parler d'un chiffre magique pour le nombre d'administrateurs dans un conseil. Une chose est claire, c'est que moins ce conseil est nombreux, plus l'efficacité est grande. Dès lors, il vaut bien mieux avoir dix-huit administrateurs que vingt-quatre.
Monsieur Menoud, si, comme vous le dites, 45% de la population se trouve dans la ville de Genève, cela veut dire que 55% réside dans les autres communes qui n'ont pourtant que deux administrateurs au sein de ce conseil.
M. Charles Bosson (R). Je voudrais faire remarquer à M. Menoud que sur quarante-cinq communes, il y en a quarante-quatre qui ont été consultées par la commission, via l'Association des communes genevoises, pour faire part de leurs remarques personnelles et qu'aucune d'elles n'a fait d'objection à ce que le conseil d'administration soit ramené au nombre proposé. Cela a été ratifié lors de l'assemblée générale par les quarante-quatre communes concernées, qui sont bien plus représentatives que nous l'a dit M. Spielmann.
En ce qui concerne la motivation d'amener ce conseil d'administration à vingt-sept membres, Monsieur Menoud, je crois que vous avez dénoncé tout à l'heure l'origine du conflit. Vous cherchez un prétexte, en définitive, pour pouvoir lutter contre cette loi. Si le fait de donner deux administrateurs de plus à la Ville de Genève vous fournit ce prétexte, et si ce prétexte apportait une contradiction par rapport à ce qui est souhaité par tout le monde il serait bien mince, et je vous laisse le soin d'aller le défendre, en votation populaire, en disant au peuple qu'en Ville de Genève on cherche des places d'administrateurs au sein de la BCG!
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je reviens sur un seul point puisque, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il incombera au Grand Conseil de prendre ses responsabilités en ce qui concerne la répartition des sièges. Mais il y a un seul point sur lequel vous ne devez pas céder, c'est la répartition un tiers un tiers un tiers, comme l'a rappelé M. Lachat. Je vous rappelle que l'actionnariat privé -- et c'est quand même un plus, comme dans le cas de la Banque cantonale du Valais qui, il y a quinze jours, a procédé à une souscription qui a été totalement couverte -- représentera, une fois le capital réservé totalement vendu dans deux à trois ans, 41% du capital et pourrait même aller jusqu'aux deux tiers du capital pour 49% de voix, puisque les collectivités publiques, en voix, auront toujours la majorité.
Il est donc important que l'on maintienne absolument un tiers pour les administrateurs désignés par les communes, un tiers pour les administrateurs désignés par le canton et un tiers, réservé par gradation, pour le capital privé de la banque qui est une source de développement.
Voilà pourquoi je pense qu'à ce niveau il faut, en tout état, rester à cette répartition.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 12, alinéa 2, (modification: «Il se
compose de 21 à 24 membres et comprend: a) 18 membres représentant l'actionnariat nominatif, dont 9 désignés pour le canton par le Conseil d'Etat et 9 désignés conformément à l'article 13 par les communes, dont 6 par la Ville de Genève et 3 par les autres communes, sur lesquels 2 sont choisis dans les communes de plus de 10 000 habitants.») est rejeté.
Mis aux voix, l'article 12 est adopté.
Art. 13
M. Pierre Meyll (T). L'Association des communes qui, bien qu'on dise qu'elle représente 53% des habitants, ne tient souvent pas compte des communes suburbaines de plus de dix mille habitants. Ces grandes communes sont très mal représentées. Il me semble que, si l'on retire les communes de plus de dix mille habitants de cette représentation de 53%, il ne doit plus rester grand-chose à la représentativité de l'Association des communes.
Comme on sait que tout le tissu des PME se trouve dans ces communes de plus de dix mille habitants, ces dernières ont, à mon avis, voix au chapitre autant, si ce n'est plus, que les autres communes réunies.
C'est pourquoi je demande à ce que soit ajouté à «l'Association des communes genevoises»: «ainsi que l'Association des communes suburbaines». C'est peut-être une association en veilleuse, mais qui pourrait très bien revivre. Il me semble donc qu'elle doit être ajoutée à cet article 13.
La présidente. Monsieur Meyll, vous faites une autre proposition d'amendement que celle que nous avons sur les tables. Alors, apportez-moi votre amendement rédigé. Pour l'instant, je mets aux voix l'amendement du parti du Travail qui figure sur vos tables.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 13, alinéa 2, (modification: «...sont désignés par les délégués des conseils municipaux des communes du canton, selon les dispositions prévues dans le règlement d'application de la présente loi.) est rejeté.
La présidente. Nous attendons l'amendement de M. Meyll. Il nous dit renoncer à le déposer.
Mis aux voix, l'article 13 est adopté.
Art. 14
M. David Lachat (S), conseiller d'Etat. M. Vodoz, conseiller d'Etat, s'est exprimé tout à l'heure sur la nomination du président. Effectivement, la commission a considéré que la contrepartie de la garantie offerte par l'Etat et canton de Genève imposait que le président soit nommé par le Conseil d'Etat.
S'agissant du second amendement qui vise à assurer un siège à la Ville de Genève au comité de banque, le texte de loi qui vous est proposé ne le prévoit pas expressément. J'ai le sentiment, sans trahir la volonté de la commission, qu'il était implicitement admis que, dans le comité de banque, la Ville de Genève aurait un représentant.
Par conséquent, à titre personnel, je soutiens cette proposition d'amendement.
M. Nicolas Brunschwig (L). L'amendement proposé par M. Menoud me paraît totalement contradictoire avec l'article 12 que nous venons de voter. Dès lors, la question est close.
Je soutiens l'autre amendement proposé, qui correspond à l'état d'esprit dans lequel les travaux de la commission ont été conduits, par rapport à la composition du comité de banque.
M. Jean Spielmann (T). Dans le cadre des propositions qui sont présentées, je considère légitime que le Conseil d'Etat nomme le président. Il a aussi une responsabilité toute particulière dont on a parlé tout à l'heure, et je ne crois pas qu'il serait juste d'enlever la compétence au Conseil d'Etat de nommer le président. Sur ce plan, on ne suivra pas la proposition qui est faite.
L'autre proposition que nous faisons était implicite, mais je pense que c'est mieux de la notifier. Je crois que personne ne conteste
fondamentalement cet amendement. Par conséquent, je pense qu'on peut parfaitement ajouter la proposition que nous formulons à la fin de l'alinéa 2 de l'article 14.
M. Denis Menoud (Ve). Cette proposition d'amendement, n'en déplaise à certains, figure dans la résolution du Conseil municipal de la Ville de Genève. En tant qu'élu du Conseil municipal, je me permets de soumettre cette proposition à votre auguste assemblée.
Mis aux voix, l'amendement de M. Denis Menoud portant sur l'article 14, alinéa 2 (visant à supprimer «nommé par le Conseil d'Etat») est rejeté.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann portant sur l'article 14, alinéa 2, (adjonction: «...dont au moins un représentant la Ville de Genève.») est adopté.
Mis aux voix, l'article 14, ainsi amendé, est adopté, de même que les articles 15 à 17.
Art. 18, chapitre V
M. David Lachat (S), rapporteur. Vous allez un peu vite, Madame la présidente. S'agissant du statut fiscal, j'aimerais démontrer à M. Vodoz que la modestie dont je faisais preuve tout à l'heure et qu'il pensait feinte, était tout à fait réelle. Je me suis à nouveau trompé dans mon rapport. A la page 51, j'ai indiqué: «Les deux banques s'acquittent de tous les impôts fédéraux». C'était mal connaître le système d'imposition fédéral. Dans le cas d'espèce, à l'heure actuelle, en vertu d'une disposition particulière de l'arrêté sur l'impôt fédéral direct, nos banques cantonales sont exonérées de l'impôt fédéral direct. Je vous prie d'excuser cette erreur.
La présidente. Nous avons reçu l'amendement suivant de M. Pierre Meyll qui propose d'insérer un chapitre V supplémentaire, intitulé «Droit de préemption» et qui dirait: «Le canton et les communes ont un droit de préemption sur les immeubles mis en vente aux enchères dans le cadre d'une réalisation du gage de la banque».
M. Pierre Meyll (T). En cas de créances douteuses et dans une situation contraignant la banque à accepter une vente aux enchères, il faudrait qu'une possibilité de droit de préemption soit accordée aux communes et à l'Etat. On pourrait prolonger cet amendement par l'inclusion dans ce droit de préemption des immeubles dont la banque est propriétaire. De toute façon, il s'agit de l'Etat et des communes et, dans certains cas, on trouve l'argent et je considère qu'il serait dommage que certaines propriétés puissent échapper.
M. David Lachat (S), rapporteur. Il s'agit d'un amendement qui n'a pas été examiné en commission. A mon avis, il crée certaines difficultés pratiques et techniques. Je ne pense pas que l'on soit en mesure de le traiter maintenant. Il serait préférable que M. Meyll revienne en troisième débat si sa proposition est concrète et véritablement pertinente.
Personnellement, j'ai le sentiment que, si un immeuble -- grevé d'un droit de gage, d'une hypothèque octroyée par la banque cantonale -- est vendu aux enchères, la banque cantonale rachèterait l'immeuble à hauteur de la valeur du gage. Par conséquent, par ce biais, la banque étant détenue majoritairement par les communes et le canton, ces derniers, indirectement, garderaient la propriété de l'immeuble.
Il peut aussi arriver, et là M. Meyll a certainement raison, que ce soit un tiers qui enchérisse, dans quel cas, apparemment, l'amendement pourrait avoir un début de logique, mais j'avoue ne pas très bien en saisir la portée.
M. Nicolas Brunschwig (L). Il n'y a aucun début de logique économique dans la mesure où la banque a intérêt à réaliser au mieux les immeubles gagés, et ce dans l'intérêt de ses actionnaires, c'est-à-dire dans l'intérêt majoritaire des collectivités publiques. C'est donc un non-sens, à notre avis, que cette proposition de M. Meyll.
M. Jean Opériol (PDC). Je m'inscris également en faux contre cet amendement pour deux raisons. La première, c'est qu'il contredit le but de la loi, tel qu'il figure à l'article 2. L'acquisition d'immeubles ne figure ni dans l'esprit ni dans le texte de cet article. D'autre part, si l'on prend un cas de figure de vente aux enchères d'un immeuble où il n'y a qu'un seul enchérisseur qui serait la banque, je vois également mal qu'on puisse l'empêcher de l'acheter. Par contre, s'il y a d'autres acheteurs, je vois mal qu'on puisse les empêcher de jouer le rôle économique qui est le leur, parce que la banque le leur prendrait. Ce n'est pas le rôle de la banque d'acheter des immeubles. Il y a déjà des zones de développement qui ouvrent des droits de préemption aux collectivités publiques. A mon avis, dans le processus d'étatisation, cela suffit!
M. Pierre Meyll (T). Il me semble que, dans certains cas, des immeubles on pu échapper à la communauté, parce qu'il y avait eu sous-enchère. Je ne demande pas que la banque achète des immeubles. Je demande simplement que dans certaines situations, où manifestement il y a sous-enchère et que des immeubles peuvent être perdus pour la communauté, les communes puissent faire valoir un droit de préemption, peut-être à valeur égale.
Le fait que cela soulève déjà une discussion révèle, effectivement, qu'il y a là un problème qui mérite d'être creusé. Je considère que M. Lachat a fait une proposition tout à fait raisonnable. Que l'on reprenne donc cette discussion dans le cadre de la commission, après la votation populaire. Il s'agit peut-être d'un point de détail, mais qui a toute son importance, croyez-moi.
M. David Lachat (S), rapporteur. Un autre argument me vient à l'esprit: si on accordait -- et vous savez que je ne suis pas, et de loin, opposé au principe des droits de préemption -- dans le cas d'espèce un droit de préemption à la banque, on doit quand même rappeler que l'article 80 A de la constitution permet à la banque de revendre l'immeuble, sans contrôle de la part des collectivités publiques, puisque nous venons de voter une disposition constitutionnelle qui permet, précisément, à la banque de revendre l'immeuble. C'est l'article 80 A, alinéa 3, de la constitution que nous avons voté tout à l'heure. Je ne suis donc pas persuadé que la mesure soit très efficace.
M. Claude Lacour (L). Sur le plan juridique, le droit de préemption est un droit que l'on accorde à une autorité cantonale ou communale. Là, nous avons affaire à une société anonyme, je veux bien de droit public, mais une société anonyme ne peut pas avoir de droit de préemption.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Il y a deux choses qui me font penser que cet amendement n'est pas du tout réaliste et praticable. D'abord, il faut que l'on permette à la banque de pouvoir récupérer les fonds qu'elle a prêtés et avancés et qui n'ont pas été remboursés. Il faut qu'elle puisse, dans le cadre d'une procédure en réalisation de gage, se faire couvrir au moins par les gages qui lui ont été remis lors du prêt. Si vous accordiez un droit de préemption aux communes, dans ce cadre, cela voudrait dire qu'entre la banque et la commune ou le canton, ce serait l'un ou l'autre, alors que la banque doit, et c'est son devoir le plus absolu, à teneur de la loi fédérale sur les banques, réaliser les garanties qu'elle a reçues en contrepartie du prêt consenti et non remboursé.
Le deuxième aspect est que vous parlez de réalisation de gages. Dans ce cas, nous serions dans le cadre de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites qui prévoit une série de procédures. Par conséquent, vous ne pourriez pas court-circuiter, en quelque sorte, les processus de cette loi en donnant un droit de préemption privilégié au canton et à la commune, par rapport à d'éventuels autres créanciers.
Si vous voulez y réfléchir encore, vous avez tout le temps de le faire, puisque le troisième débat n'aura lieu, sur cette loi, qu'après la votation populaire. Pour ma part, il s'agit d'un amendement que je qualifierai d'incompréhensible.
M. Pierre Meyll (T). On peut éventuellement retirer cet amendement et le représenter en troisième débat. Il me paraît pourtant utile d'inscrire dans la loi qu'à valeur égale Etat et communes peuvent se rendre acquéreurs. Prenons l'exemple d'un terrain quelconque qui vaut un million. Le gage de la banque étant de 500 000 F, si ce terrain est revendu à ce montant ou à moins, cet argent serait, de toute façon, versé par l'Etat ou par la commune à la banque qui serait en mesure d'accepter ou de refuser ce droit de préemption. Mais elle aurait la possibilité de le faire.
La présidente. Monsieur Meyll, retirez-vous votre amendement?
M. Pierre Meyll. Je le retire et je le présenterai en troisième débat.
La présidente. Nous en prenons acte.
Mis aux voix, les articles 18 à 20 sont adoptés.
Proposition d'un art. 21 bis (nouveau)
M. Jean Spielmann (T). L'article 21 fait partie des dispositions transitoires de la loi. On y parle de la reprise des droits et des obligations. On y parle d'une série de problèmes réels qu'il faut régler au niveau de ces dispositions transitoires. D'après le débat qu'il y a eu, ainsi que les discussions qui ont lieu dans le public concernant la garantie de l'emploi et les acquis sociaux du personnel des deux établissements, il semble important que, du moment que l'on se préoccupe des différentes successions des droits et des obligations de la banque, on se préoccupe aussi des conditions de l'emploi et du travail.
C'est une question importante qui se pose toujours en cas de restructuration et de fusion, et qui est très sensible aujourd'hui. On nous a dit, tout à l'heure dans le premier débat, que l'on avait pris des dispositions pour ne pas faire de licenciements collectifs, comme je l'ai compris, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de licenciements du tout. On a quand même donné des garanties que l'on maintiendrait l'emploi au maximum.
Par conséquent, je crois que ce Grand Conseil se doit aussi de délivrer un message clair pour garantir les emplois et les acquis sociaux dans toute la mesure du possible, et ce en le faisant figurer dans les dispositions transitoires. Cela ne ferait que conforter et confirmer un petit peu, dans le fond, les promesses qui ont été faites tout à l'heure et qui seront beaucoup plus crédibles si vous acceptez de les mettre dans la loi.
M. Nicolas Brunschwig (L). Les relations entre la banque et le personnel des deux établissements sont actuellement régies par des règles de droit privé. Il doit en être de même pour la future banque cantonale. De plus, les propos tenus par M. Olivier Vodoz concernant les conditions de la fusion et, entre autres, les non-licenciements qui s'ensuivront, sont une garantie largement suffisante.
Dès lors, nous vous proposons de ne pas accepter cet amendement.
Mis aux voix, l'amendement de Mme et MM. Deuber-Pauli, Boesch, Meyll et Spielmann visant à la création d'un nouvel article 21 bis avec la note marginale «Personnel des deux établissements» (teneur: «La banque garantit les emplois et les acquis sociaux des deux établissements.») est rejeté.
Mis aux voix, les articles 21 et 22 sont adoptés.
Art. 23
M. Pierre Meyll (T). J'ai une question à poser concernant l'article 23 et j'aimerais avoir une réponse.
On y parle des bons de participation de la Caisse d'épargne. J'aimerais savoir combien il y en a en circulation pour la bonne raison que, ces jours derniers, la Caisse d'épargne a offert à ses clients deux cent mille options d'achat de la CEG. Donc si ces deux cent mille vont participer, je pense, à l'augmentation du capital de la Caisse d'épargne, combien y en a-t-il en circulation? Y a-t-il des gros détenteurs avec une voix de blocage, éventuellement, au conseil d'administration si ces bons de participation sont transformés en actions? Pourrais-je avoir une réponse à ce sujet?
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je vais vous donner la réponse dans un instant. Puisqu'il y a pour 22 millions de bons de participation, il doit y avoir deux cent vingt mille bons. Je vais vous le confirmer dans un instant après m'être assuré du chiffre exact qui ressort du document qui se trouve dans la salle du Conseil d'Etat.
La présidente. Je vous remercie.
Mis aux voix, l'article 23 est adopté, ainsi que les articles 24, 25 et 26 (souligné).
Mis aux voix, l'article 73, alinéa 5 (abrogé) est adopté.
Mis aux voix, l'article 75, alinéa 1, lettres e (abrogée) et f (nouvelle teneur) est adopté.
Mis aux voix, l'article 7, alinéa 1 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. Nous sommes ainsi arrivés au terme de l'examen de ce projet.
Le troisième débat aura lieu après la votation populaire.
Mme Vesca Olsommer (Ve). Au terme de ce débat, je voudrais déclarer que, malgré le fait qu'il y ait eu quelques remarques un peu acerbes de notre ami et collègue Denis Menoud, c'est avec satisfaction que nous saluons ce projet de loi et nous espérons bien que la population fera de même. (Applaudissements.)
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Il y a deux cent vingt mille bons au total. Les options, telles qu'elles ont été prévues dans le cadre du dividende, sont couvertes. Il n'y a donc pas d'augmentation de capital. Par conséquent, les choses sont parfaitement claires.
Puisque j'ai la parole, j'aimerais également qu'il soit considéré comme répondu, si vous le voulez bien, à la question écrite n° 2969 du 23 janvier 1986 de M. Reynald Mettral, député à cette époque, intitulée «Banques cantonales genevoises».