République et canton de Genève

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IN 188-C
Rapport de la commission de l'environnement et de l'agriculture chargée de rédiger un contreprojet à l'initiative populaire cantonale 188 « OUI au recyclage des déchets non biodégradables »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 28 et 29 août 2025.
Rapport de M. François Erard (LC)
PL 13666
Projet de loi de Lionel Dugerdil, Patrick Dimier, Raphaël Dunand, François Erard, Thierry Cerutti, Céline Bartolomucci, Julien Ramu, Philippe de Rougemont, Thomas Bruchez, Léna Strasser, Jean-Pierre Tombola modifiant la loi sur les déchets (LDéchets) (L 1 21) (Contreprojet à l'IN 188)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 28 et 29 août 2025.
M 3143
Proposition de motion de Lionel Dugerdil, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Thierry Cerutti, Patrick Dimier, Raphaël Dunand, François Erard, Julien Ramu, Philippe de Rougemont, Léna Strasser, Jean-Pierre Tombola : Stop à la litière minérale qui produit inutilement des mâchefers !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 28 et 29 août 2025.
R 1070
Proposition de résolution de Lionel Dugerdil, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Thierry Cerutti, Patrick Dimier, Raphaël Dunand, François Erard, Julien Ramu, Philippe de Rougemont, Léna Strasser, Jean-Pierre Tombola pour réduire la quantité de mâchefers à stocker en décharge (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 28 et 29 août 2025.

Premier débat

La présidente. Nous passons à l'IN 188-C et aux objets qui lui sont liés, à savoir le PL 13666, la M 3143 et la R 1070. C'est un point fixe que nous traitons en catégorie II, cinquante minutes. Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. François Erard (LC), rapporteur. Merci, Madame la présidente. Chers collègues, je commencerai par un bref rappel du contexte. Lors de notre séance plénière du 13 décembre 2024, nous avons refusé l'IN 188, nommée «OUI au recyclage des déchets non biodégradables», tout en décidant à l'unanimité de lui opposer un contreprojet, la commission de l'environnement et de l'agriculture étant chargée de sa rédaction. Lors de sa séance du 6 février 2025, la commission a décidé de constituer une sous-commission chargée d'élaborer ledit contreprojet.

Pour les non-initiés, il me paraît utile de rappeler un peu de quoi on parle. Tout d'abord, qu'est-ce que le mâchefer ? Il s'agit des résidus solides issus de l'incinération des déchets, en l'occurrence à l'usine des Cheneviers, et qui représentent environ 20% du volume incinéré. Dans un processus idéal, il ne devrait sortir des fours que moins de 5% de cendres, principalement composées d'imbrûlés sous forme de carbone résiduel. Dans les faits, tel n'est pas le cas, puisque des fractions non incinérables entrent dans les fours, notamment via nos sacs-poubelles gris, et se retrouvent à leur sortie dans les mâchefers.

Il s'agit notamment des litières minérales pour chats, dont le volume est important, et de divers métaux lourds, que l'on retrouve notamment dans les piles ainsi que dans différentes choses qui ne devraient pas être jetées dans nos poubelles - aluminium, fer, zinc, j'en passe et des meilleures ! On trouve également des minéraux, par exemple de la porcelaine. Tout cela n'a rien à faire dans nos poubelles et devrait être recyclé en amont. L'usine des Cheneviers produit environ 40 000 tonnes de mâchefer par année, dont 5000 sont issues des litières minérales pour chats.

Se pose ensuite la question du stockage de ces 40 000 tonnes de mâchefer. Au regard de leur composition et des risques de lixiviation de certaines fractions «toxiques», entre guillemets, leur mise en décharge normale (à savoir les décharges A à C) est impossible; elles doivent donc être stockées dans une décharge de type D, dite bioactive. Depuis des décennies, les mâchefers issus de l'usine des Cheneviers sont stockés dans la décharge du Nant de Châtillon, sur la commune de Bernex. Or, ce site est arrivé à saturation et est fermé depuis 2024.

Le canton a trouvé une solution temporaire d'une durée de trois-quatre ans, consistant à exporter les mâchefers genevois dans le canton du Jura - qu'il soit ici remercié -, ce qui constitue une dérogation à la loi fédérale sur la protection de l'environnement. Celle-ci prévoit en effet à ses articles 31 et suivants que la planification et l'élimination des déchets relèvent de la compétence des cantons, jusqu'à et y compris leur stockage. A court terme, Genève doit donc trouver un nouveau site de stockage qui réponde aux normes imposées par l'ordonnance sur la limitation et l'élimination des déchets.

J'en viens à l'impact d'une décharge de type D (décharge bioactive). J'ai calculé des ordres de grandeur pour nos 40 000 tonnes de mâchefers, qui doivent être stockées pendant vingt-cinq ans. Tout d'abord, sa surface est de l'ordre de 10 à 15 hectares. Par ailleurs, une telle décharge nécessite également la création de dessertes stabilisées pour le passage des camions.

Le volume de stockage est un trou d'environ un million de mètres cubes (ce qui représente à la louche quatre cents piscines olympiques), exploité par étapes, qu'il faudra bien entendu d'abord creuser avant de pouvoir procéder au stockage. La durée d'exploitation de la décharge est de l'ordre de vingt-cinq ans, suivie d'une période de surveillance d'une durée au moins équivalente. Cela signifie que la décharge est en fonction durant cinquante ans.

Dans le respect des obligations légales supérieures (LPE et OLED), le canton mène depuis une dizaine d'années des investigations ayant pour but de trouver un nouvel emplacement pour le stockage des mâchefers. A ce jour, un site est retenu, en zone agricole, sur la commune de Satigny. Mesdames et Messieurs, inutile de vous dire qu'il suscite une forte opposition de la population de la commune et des milieux agricoles, avec pour slogan: «L'époque où l'on enterrait nos déchets, charge aux générations futures de les gérer, est révolue !» Le fait de soustraire 15 hectares au maigre solde du quota genevois de surfaces d'assolement pose également un problème.

L'ensemble de ces éléments démontre que nous avons tout intérêt à réduire la quantité de mâchefer produit, pour diminuer l'impact d'une décharge bioactive. Le canton n'est pas inactif pour réduire le volume des mâchefers destinés à être entreposés. En effet, il collabore avec les SIG et développe depuis de nombreuses années des techniques de tri et de transformation des mâchefers en sable épuré, qui permettraient de recycler jusqu'à 75% de leur volume. En théorie, ces sables pourraient - j'insiste sur le conditionnel ! - être valorisés, notamment dans la construction ou encore pour des soubassements de route. Si ces valorisations sont aujourd'hui techniquement possibles, elles sont interdites par l'OLED, qui impose la mise en décharge de la totalité du volume des mâchefers sortant d'une usine d'incinération.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. François Erard. Oui, merci, Madame la présidente. J'en viens aux travaux de la sous-commission. Celle-ci s'est réunie à sept reprises entre les mois de février et juin de cette année. Elle a été secondée dans ses travaux par Mme Christine Hislaire, M. Philippe Royer, M. Clément Magnenat et M. Gianluca Cornaz. Les procès-verbaux ont été rédigés avec rigueur par Mmes Clara Veuthey, Méline Carpin et Caroline Dang. Que toutes ces personnes soient chaleureusement remerciées pour leurs précieux apports et judicieux conseils.

Dans le cadre de ses travaux, la sous-commission a procédé à sept auditions, dont vous trouverez les détails dans le rapport. Elle a commencé par débattre de la forme à donner au contreprojet. D'un commun accord, il a été décidé qu'il devait être réalisé au niveau de la loi, en l'occurrence la loi genevoise sur les déchets, et non pas à l'échelon constitutionnel. Le texte qui vous est proposé est donc un contreprojet indirect.

Ensuite, après un examen détaillé de la problématique du stockage des mâchefers en décharge bioactive, la sous-commission a décidé d'orienter ses travaux autour de trois angles. Premièrement, agir en amont de l'usine des Cheneviers en réduisant les volumes à incinérer. Deuxièmement, toujours en amont de l'usine, diminuer le volume des déchets toxiques - batteries, bris de porcelaine, etc. -, qui n'ont rien à faire dans les sacs gris et qui se retrouvent dans les mâchefers, les rendant toxiques au regard de la législation fédérale, plus particulièrement de l'ordonnance sur la limitation et l'élimination des déchets. Troisièmement, encourager et renforcer les démarches du canton ayant pour objectif de recycler certaines fractions des mâchefers et donc d'en limiter le volume à stocker.

La question d'une révision de l'OLED a également été évoquée, car comme je l'ai dit, les dispositions actuelles de cette ordonnance interdisent de faire un autre usage des mâchefers que le stockage en décharge bioactive.

Le contreprojet indirect élaboré par la sous-commission est un projet de loi qui introduit un nouvel article 2A dans la loi cantonale sur les déchets. Vous trouverez cette nouvelle disposition à la page 3 du rapport. Son alinéa 1 reprend intégralement celui de l'IN 188. L'alinéa 2 demande au Conseil d'Etat de prendre des mesures pour réduire d'une part le volume et d'autre part la toxicité des mâchefers, et de ce fait répondre aux objectifs généraux de l'IN 188.

La présidente. Monsieur le député, je suis obligée de vous couper, vous vous exprimez depuis sept minutes, il vous faudra reprendre la parole plus tard dans le débat.

M. François Erard. Je n'ai pas compris, Madame la présidente.

La présidente. Vous avez atteint la limite des sept minutes.

M. François Erard. Aïe !

Une voix. Tu parles trop !

M. François Erard. Bon, ma foi...

La présidente. Vous pourrez redemander la parole plus tard.

M. François Erard. J'arrivais au bout, de toute façon.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je cède le micro à M. Lionel Dugerdil.

M. Lionel Dugerdil (UDC). Merci, Madame la présidente. Tout d'abord, je tiens à remercier mes collègues de la sous-commission et de la commission de l'environnement et de l'agriculture ainsi que le département, avec qui nous avons travaillé efficacement. En effet, nous étions tous animés par les mêmes objectifs. Un Etat responsable ne peut se contenter d'enfouir les résidus toxiques d'incinération de ses déchets, laissant cette patate chaude aux générations futures, sans faire le maximum pour les détoxifier et les valoriser dans l'industrie.

C'est précisément ce que propose ce projet de loi, à savoir fixer des objectifs clairs et donner à l'Etat les moyens d'agir au mieux, en tenant compte de l'évolution des techniques et des connaissances. Tout cela afin que ces résidus soient traités, détoxifiés et utilisés de manière responsable, tant pour la nature que pour les générations futures.

Ce contreprojet élaboré en réponse à l'IN 188 satisfait pleinement les initiants. S'il est accepté ce soir, l'initiative sera retirée ! C'est pourquoi, chers collègues, le groupe UDC soutiendra ce texte et vous invite à en faire de même. Quant à la M 3143 et à la R 1070, toutes deux issues des travaux de commission, ce sont des outils qui contribuent à la réalisation des buts du projet de loi. Nous allons évidemment les soutenir et vous demandons d'en faire de même. Merci.

La présidente. Merci beaucoup. Monsieur Erard, je vous repasse la parole pour deux minutes cinquante.

M. François Erard (LC), rapporteur. Merci, Madame la présidente. Je voulais juste conclure mon intervention en disant que ce contreprojet a été adopté en commission par 11 oui et 4 abstentions. La motion et la résolution ayant été abordées par mon collègue Dugerdil, j'en ai terminé. Je vous remercie.

M. Philippe de Rougemont (Ve). Souvenons-nous, comme le disait M. Erard, qu'au début, il y avait une initiative cantonale qui visait à ce que le canton travaille sur les mâchefers, réduise leur toxicité et les réutilise. On a réalisé que c'était un peu la méthode du «y a qu'à». Ce qui fut agréable à constater en commission dans ce cas précis, c'est que les partis, les personnes qui avaient lancé cette initiative se sont rendu compte des obstacles, des difficultés présentes dans ce domaine. Durant nos travaux, nous avons notamment organisé la visite d'un centre de tri à Lyon et mené plusieurs auditions très intéressantes. Une union sacrée s'est constituée autour de certaines méthodes, qui se déclinent dans ce projet de loi, présenté par le collègue Erard, ainsi que dans les propositions de motion et de résolution.

Le maître mot est prévenir. Evidemment, l'Etat n'a pas attendu ces textes pour commencer à prévenir, il a même été assez loin, si loin que le géant orange de la consommation, entre autres, a déposé des recours pour bloquer la nouvelle loi sur les déchets. Le texte qui fait office de contreprojet à l'initiative donne des compétences supplémentaires au canton et demande d'aller plus loin dans la sensibilisation du public.

Chez les Verts, on aurait souhaité que l'injonction à la sensibilisation du public soit permanente, parce que nous sommes toutes et tous, de façon indiscriminée, confrontés sans arrêt à des injonctions à acheter toujours plus. Ce sont des messages que nous recevons tout le temps, qu'ils soient numériques, présents dans les rues ou dans les médias. Cette proposition aurait donc été une bonne chose, malheureusement il n'y a pas eu de majorité pour la soutenir. Cela n'empêche pas l'Etat de mener des campagnes de communication sur les produits les plus nocifs (à éviter pour réduire les volumes de mâchefer) ainsi que sur les habitudes de tri.

Il a aussi été très intéressant d'assister à des discussions entre des commissaires PLR et LJS - donc plutôt de droite - portant sur les différentes vertus de l'interdiction des produits qui créent le plus de mâchefer ou sur la taxation de ces produits dans le but que les gens ne les consomment plus. On observe que beaucoup d'eau a coulé sous les ponts, que des décennies sont passées et qu'il arrive que le camp de gauche trouve des outils libéraux intéressants. De même, il arrive que la droite se rende compte que des outils plutôt attribués à la gauche sont aussi pertinents. J'espère qu'il s'agit d'une tendance de fond.

On peut aussi relever que les outils en question ne constituent pas une grande nouveauté. Les ampoules à incandescence ont été interdites, de même que les CFC, à savoir les gaz propulseurs qui détruisent la couche d'ozone, et des solutions libérales ont été adoptées dans d'autres cas.

Je pense que ce dossier restera comme un bon souvenir collectif de cette législature. J'espère que la résolution aura un écho positif au niveau fédéral - on est déjà à notre écoute et observe ce qui se passe dans notre canton ainsi qu'à Fribourg s'agissant du traitement des mâchefers dans le but de les rendre le moins toxiques possible et de pouvoir les utiliser dans des travaux de construction.

Les Vertes et les Verts vous enjoignent de voter oui au projet de loi, à la résolution et à la motion. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Le PLR se réjouit de l'adoption - probablement à l'unanimité ce soir - de ces trois textes qui viennent compléter la loi sur les déchets, que nous avons adoptée il y a plus d'une année et dont on espère qu'elle pourra bientôt entrer en vigueur.

Il en va de la responsabilité de notre société de gérer les déchets générés par notre mode de vie. La loi sur les déchets avait bien fait le tour de cette question, mais effectivement, les mâchefers étaient peu traités. On a donc profité de l'initiative de l'UDC, qui a été vidée de sa substance par les tribunaux, pour proposer un contreprojet beaucoup plus ambitieux, qui vise vraiment à réduire la toxicité des mâchefers pour permettre leur réutilisation, évidemment dans le respect de la santé publique.

Le but est d'éviter de construire une nouvelle décharge, à Genève ou ailleurs, l'objectif n'étant pas d'exporter nos déchets. Cela a été peu dit dans ce débat pour l'instant, mais je rappelle cet enjeu: la volonté du Conseil d'Etat de créer une nouvelle décharge est toujours présente. On n'a pas voté dernièrement sur ce sujet, mais le parlement s'y était opposé en 2018. Je n'ai pas trop de doute que le moment venu, cette opposition sera toujours là. Il faut donc trouver d'autres solutions.

Ce qui vous est proposé avec ces textes, c'est de réduire la quantité de mâchefer, notamment en limitant au maximum les litières minérales, qui produisent 100% de mâchefer (la litière minérale, c'est directement du mâchefer !), car il existe des alternatives végétales, qui fonctionnent très bien et sont viables.

En effet, on utilise parfois des outils de la gauche, mais je ne pense pas que ça va devenir une habitude. On les utilise dans ce cas précis parce qu'il existe une autre option, et je pense que c'est cet élément qui est important: quand il y a des alternatives valables, il faut les saisir et mettre en place une très forte incitation à les utiliser, ce que font ce projet de loi ainsi que les deux textes annexes.

L'objectif est donc de réduire les mâchefers et leur toxicité, en espérant que Berne nous permette de les réutiliser, toujours dans le but d'éviter une décharge et de préserver notre zone agricole en la réservant à d'autres utilisations que l'enfouissement de nos déchets. Pour ces raisons, le groupe PLR soutiendra ces trois textes. Je vous remercie, Madame la présidente. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo, Céline !

M. Raphaël Dunand (LJS). Chers collègues, l'IN 188 visait à interdire la création de nouvelles décharges pour les mâchefers et à promouvoir le recyclage des déchets non biodégradables. Toutefois, en 2023, le Conseil d'Etat l'a partiellement invalidée. En effet, le paragraphe 1, qui interdisait l'implantation de nouvelles décharges, a été jugé contraire au droit fédéral, en particulier à la loi fédérale sur la protection de l'environnement. Seul le paragraphe 2 a été retenu. L'initiative a ainsi été vidée de sa substance et de sa partie la plus contraignante.

Suite à cela, comme certains l'ont relevé, la commission a décidé à l'unanimité de présenter un contreprojet, afin d'élaborer une solution pérenne ayant pour but d'agir en complément de la loi sur les déchets, que l'on attend toujours, malheureusement. Cela a aussi été dit, l'objectif est d'intervenir en amont, soit avant l'incinération, en améliorant le tri, ainsi qu'en aval, en dépolluant autant que faire se peut les mâchefers, afin de favoriser un matériau réutilisable dans les circuits courts.

Pour concrétiser ces axes, un nouvel article a été consacré spécifiquement à cette problématique. Je ne vais pas répéter ce qui a été dit par l'excellent rapporteur. Cette disposition consiste à décrire l'utilisation, la gestion et l'étude de ces mâchefers. Elle prévoit que l'Etat doit prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter la toxicité et la production de ces résidus avant l'incinération, pour en permettre le recyclage et la valorisation.

Ma préopinante l'a dit, s'ajoutent à ce contreprojet deux objets liés. Comme cela a été relevé, 1,5 kg de litière minérale produit 1 kg de mâchefers, je ne vais pas revenir là-dessus. Pour LJS, ce point était important, surtout dans la mesure où il existe une alternative à ces litières minérales, à savoir les litières organiques: les premières ne sont donc pas irremplaçables.

Quant à la résolution, elle demande que soient revues les normes de l'OLED, autant que faire se peut et dans le respect de l'environnement et de la protection de la population, afin de pouvoir revaloriser les matières issues des mâchefers recyclés - on appelle ça du sable - et qui pourraient être utilisées dans des matériaux de construction ou pour les routes, comme cela se fait en France.

En définitive, ce contreprojet, accompagné de la motion et de la résolution, renforce la position du canton face à la Confédération dans les négociations sur l'OLED et consolide notre politique cantonale de gestion des déchets. Au nom du groupe LJS, je vous invite à soutenir la motion, la résolution ainsi que le contreprojet. Merci.

Mme Léna Strasser (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous n'éviterons certainement pas la décharge, mais le travail sur le contreprojet à l'IN 188 a permis de proposer un renforcement de la nouvelle loi sur les déchets, récemment votée par notre parlement, avant même son entrée en vigueur.

L'enjeu de notre commission était de construire un contreprojet bâti sur une vision partagée de la problématique à laquelle s'attaque l'initiative, à savoir la production de mâchefer. A cette fin, nous avons cherché à renforcer toutes les mesures permettant de réduire la production de mâchefer, à savoir ce résidu incompressible composé de tout ce qui n'est pas brûlé après l'incinération de nos sacs-poubelles. Il s'agit de restes divers, parfois extrêmement toxiques et dans d'autres cas cachés, comme la litière minérale pour chats - on l'a dit -, la porcelaine, les piles électriques, des métaux ou des morceaux de vitre.

Dans le cadre d'un débat extrêmement constructif, nous avons évalué différentes approches pour limiter la production de mâchefer, en nous intéressant aux actions envisageables avant que les déchets soient placés dans des sacs noirs à domicile, mais aussi après l'incinération, afin de réduire au maximum la toxicité des mâchefers et de permettre ainsi leur réutilisation, par exemple dans la construction.

Le groupe socialiste soutiendra ce texte ainsi que la motion et la résolution, qui s'inscrivent dans une dynamique très positive. Toutefois, sans une communication et une formation efficace des citoyennes et citoyens - nous toutes et tous compris ! - visant à renforcer nos habitudes de tri et à prendre conscience qu'acheter, consommer et jeter ne sont pas des actes anodins, il nous semble illusoire de penser que nous pourrons nous passer d'une nouvelle décharge sur notre territoire, le stockage de nos mâchefers dans un autre canton n'étant pas non plus une solution à nos yeux. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, je constate que la plupart des gens ne trient pas leurs déchets. On parle beaucoup de recyclage, mais si vous ouvrez les sacs-poubelles, vous y trouvez de tout. Je pense qu'on peut donc largement améliorer le recyclage des déchets. Dans le canton de Vaud, ils sont très stricts, il y a des amendes et chaque déchet est vraiment trié.

A Genève, c'est vraiment le petchi total, tout le monde s'en fout, on peut le dire ! Je suis d'avis qu'il y a une marge de progression à ce niveau, peut-être via des campagnes de sensibilisation ainsi que des approches répressives, je ne sais pas. On ne pense jamais à ça, mais au fond, si les gens sont trop indisciplinés, il ne faut pas se limiter à des mesures incitatives, mais aussi prévoir des dispositifs qui forcent un peu les gens à trier. Sinon, on ne va jamais améliorer le système. Commençons effectivement par mieux trier les déchets ! Merci.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à dire quelques mots, tout d'abord pour remercier les membres de la sous-commission d'avoir mené ces travaux, de s'être renseignés et d'avoir compris la complexité de la gestion de ces déchets. Celle-ci correspond au premier principe de Carnot: rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme. La loi de l'entropie fait qu'au bout d'un moment, on se retrouve avec des déchets, dont on ne sait que faire.

Leur place est bien dans le sac noir pour tout un chacun, mais tout ne brûle pas, tout ne part pas en fumée, et ce sont ces résidus qu'il nous appartient de gérer. Cela a été dit largement, l'essentiel du travail se situe bien entendu dans la production de ces biens, leur distribution et leur régulation au moment de la vente. C'est là que se trouve l'essentiel des possibilités de réduction de production de mâchefer. Mais tout cela est de compétence fédérale.

Il s'agit de la liberté du commerce et de l'industrie, sur laquelle les cantons n'ont rien à dire. On ne peut que recommander, par exemple, d'acheter une litière végétale pour chats plutôt qu'une litière minérale. La limitation de ces produits est de compétence fédérale. Il est peut-être temps que les Chambres, comme vous, Mesdames et Messieurs les députés, s'intéressent à la limitation de certains produits extrêmement polluants.

L'autre volet concerne le réemploi de cette poussière qui sort des Cheneviers, à savoir ce qu'on récupère dans la cheminée, car il reste toujours quelque chose, tout ne part pas en fumée. L'idée est de pouvoir l'utiliser sur des chantiers, sur nos routes, etc. Cela se fait dans d'autres pays. A nos yeux, les méthodes sont stables, mais elles ne sont pas dénuées de risques. Une route peut toujours être soumise à des intempéries et impacter un champ agricole voisin. Ce ne sont pas des processus faciles, mais des pays européens les appliquent depuis des années. On estime que la Suisse devrait elle aussi, avec une certaine prudence quand même, suivre cette voie-là, à savoir utiliser ces poussières, ces mâchefers pour les réemployer dans ces structures. On n'y est pas encore, mais à nouveau, un levier à Berne serait le bienvenu.

Les choix qui nous restent sont ceux que vous avez retenus, Mesdames et Messieurs les députés, et pour lesquels le Conseil d'Etat s'accorde avec vous pour soutenir ce contreprojet. Il faut cependant éviter de se leurrer en pensant qu'on pourra se passer d'une décharge cantonale. La représentante du PLR l'a dit, ils s'opposeront à une décharge; ça va exactement à l'encontre de ce que vient de dire le Tribunal fédéral sur la base de l'initiative.

J'espère donc que ce parlement arrivera enfin à respecter le droit fédéral et les instances supérieures, surtout quand elles s'expriment de manière explicite, comme l'a fait le Tribunal fédéral. Genève ne peut pas se soustraire à ses obligations fédérales, notamment celle consistant à prévoir une décharge pour les déchets qu'elle n'arrive pas à incinérer. C'est le principe fédéral qui a été confirmé par le plus haut tribunal de notre pays et qui contredit dès lors la position du PLR sur ce dossier.

L'autre aspect, c'est qu'une collaboration intercantonale est possible. Nous bénéficions actuellement d'un contrat avec le canton du Jura, sur la base duquel nous exportons effectivement une bonne partie de nos mâchefers. Mesdames et Messieurs, cette solidarité intercantonale est possible, mais elle ne constitue pas une solution pérenne. On ne peut pas décemment demander à un canton confédéré d'être indéfiniment la poubelle de Genève !

Je crois qu'il en va d'une certaine compréhension de ce qu'est le fédéralisme, mais également d'une forme de respect pour les cantons voisins. Quoi qu'il en soit, nous entretenons de bonnes discussions avec le canton du Jura. Je vous l'annonce ce soir, je cherche à prolonger cette collaboration de quelques années, afin que nous puissions nous donner un peu de mou quant aux capacités genevoises, qui, même avec une nouvelle décharge, resteront limitées.

Le canton du Jura entre en matière sur cette prolongation, mais il va de soi que Genève devra contribuer aux efforts consentis par le canton du Jura pour des déchets genevois - je crois que c'est la moindre des choses. Le Conseil d'Etat reviendra certainement sur ce point dans le but de poursuivre cette collaboration pendant quelques années. J'insiste vraiment sur le fait que ça ne concerne que quelques années et que ce sont des solutions transitoires; on ne peut décemment et légalement pas se passer de la construction d'une décharge sur notre territoire. Dès lors, les travaux à ce sujet vont se poursuivre, malgré l'adoption de ce texte. Quoi qu'il en soit, merci encore aux députés d'avoir trouvé la voie du consensus. Cela se fera avec la bénédiction du Conseil d'Etat.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote, en commençant par le PL 13666.

Mis aux voix, le projet de loi 13666 est adopté en premier débat par 86 oui (unanimité des votants).

Le projet de loi 13666 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13666 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 89 oui (unanimité des votants) (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Loi 13666 Vote nominal

Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 188-C.

La présidente. Je lance à présent la procédure de vote sur la proposition de motion.

Mise aux voix, la motion 3143 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 87 oui et 1 abstention (vote nominal).

Motion 3143 Vote nominal

La présidente. Enfin, je soumets à votre approbation la proposition de résolution.

Mise aux voix, la résolution 1070 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 89 oui (unanimité des votants) (vote nominal).

Résolution 1070 Vote nominal