République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 2200-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition : N'asphyxions pas le quartier des Eaux-Vives, ne faites pas mourir nos commerces !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 10 et 11 avril 2025.
P 2209-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la pétition : Pour un quartier des Eaux-Vives tourné vers l'avenir !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 10 et 11 avril 2025.

Débat

Le président. Le point suivant regroupe les P 2200-B et P 2209-B (catégorie III). Monsieur Thévoz, c'est à vous.

M. Sylvain Thévoz (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, il s'agit ici de deux pétitions opposées, respectivement d'habitants et de commerçants, les enjeux sont intéressants. Leur contenu est étayé, je vous rappelle d'abord les demandes du deuxième texte, qui invite à «faire une étude du trafic dans le quartier afin de quantifier précisément le volume du trafic de transit, sa provenance et sa destination; préserver la santé et la qualité de vie des habitantes et habitants des Eaux-Vives en prenant des mesures courageuses pour diminuer le trafic de transit [...]; développer un processus participatif [...] incluant les habitant-e-s, commerçant-e-s [...] visiteuses et visiteurs [...] afin de développer une mobilité durable et de qualité pour le quartier des Eaux-Vives». Là, c'est une pétition des habitants du quartier - ou du moins d'une partie d'entre eux - qui veulent moins de trafic de transit.

De l'autre côté, vous avez des gens qui défendent l'accès au coeur du quartier avec des véhicules motorisés et qui proposent - il y a quatre requêtes, je vous les lis aussi - «de garantir l'accès aux livraisons pour les commerçants et artisans du quartier, ainsi que pendant toute la durée des travaux; de laisser accessible le coeur du quartier à tous les modes de transport sans le rendre plus compliqué, soit tel qu'il l'est aujourd'hui; de maintenir un nombre suffisant de places de stationnement et de livraison; de ne pas réaliser l'ensemble des travaux en même temps».

Vous admettrez qu'on retrouve ici un florilège de tous les problèmes en lien avec la mobilité à Genève. D'ailleurs, s'agissant de ces enjeux, plusieurs objets sont actuellement en traitement dans notre parlement. Or que répond le Conseil d'Etat, Mesdames et Messieurs ? «Face aux demandes opposées des 2 pétitions, le Conseil d'Etat estime que la Ville de Genève doit poursuivre les processus de participation citoyenne et piloter les projets d'aménagement de rues avec le soutien des services de l'Etat.» Alors certes, il en dit un peu plus, mais en résumé, c'est à la Ville de s'occuper de cette affaire.

Nous estimons que c'est largement insuffisant, que M. Maudet a une vision ou en tout cas quelque chose à apporter et le Conseil d'Etat des réponses à fournir aux citoyens qui ont signé les deux pétitions. Dès lors, nous vous proposons de renvoyer son rapport au Conseil d'Etat afin que celui-ci réserve un traitement de ces textes à la hauteur des problématiques soulevées et propose de véritables solutions, sans se défausser sur la Ville de Genève. Merci.

Mme Joëlle Fiss (PLR). Le PLR avait accueilli favorablement les préoccupations exprimées dans ces deux pétitions, que nous avons transmises au Conseil d'Etat le 1er novembre dernier, et nous sommes aujourd'hui très satisfaits de sa réponse. Il est essentiel que les Eaux-Vives demeurent un quartier vivant, dynamique, accessible, offrant une circulation sereine à tous les modes de transport. Il faut assurer un nombre suffisant de places de stationnement et de livraison, condition indispensable au bon fonctionnement des commerces et établissements de restauration qui nourrissent vraiment le coeur et l'esprit des Eaux-Vives.

Nous prenons bonne note du rapport du Conseil d'Etat, qui mentionne plusieurs points déterminants. D'une part, les rues de Montchoisy, du 31-Décembre et des Eaux-Vives appartiennent au réseau structurant et, à ce titre, relèvent de la compétence cantonale. Il s'agit d'un élément important que la Ville de Genève devra garder à l'esprit dans le cadre de ses projets.

D'autre part, il est fondamental de mettre en place un réel processus pour engager la participation de la population. Je ne sais pas pourquoi cet aspect a été critiqué par M. Thévoz - vous transmettrez, Monsieur le président. Il convient de garantir une concertation de qualité avec les habitants et acteurs économiques du quartier.

Enfin, juste pour la boutade, je me permets de rappeler ceci - avec le sourire: quand des travaux sont nécessaires, ce qui arrive évidemment, tâchons de ne pas les réaliser tous en même temps, comme c'est le cas ces temps-ci - et c'est une résidente des Eaux-Vives qui le dit, Monsieur le président ! Nous prendrons acte de la réponse du Conseil d'Etat. Je vous remercie beaucoup.

M. Christian Steiner (MCG). Eh oui, on continue à parler des Eaux-Vives ! Ça fait vingt ans que ça dure, ça fait vingt ans que rien n'est entrepris. Il y a environ vingt ans, le Conseil d'Etat avait décidé un moratoire sur les travaux face aux oppositions entre les différentes parties. Depuis, les prérogatives ont changé, mais le canton reste compétent s'agissant du réseau structurant, à savoir les rues citées par ma préopinante.

En matière de concertation, il faut signaler qu'on pourrait s'approcher d'un plus petit dénominateur commun entre les deux associations; on en a par exemple trouvé un à l'occasion d'une pétition municipale demandant de limiter les places de stationnement sur la partie encore utilisable de la place du Pré-l'Evêque.

Seulement, le problème, c'est que la Ville de Genève ne fait rien ! Des associations ont reçu une réponse de l'ordre du «ni oui ni non» - on sent la fin de législature - alors qu'elles étaient sans nouvelles depuis deux ans ! On voit que quand le dogme absolu anti-voitures ne peut pas être appliqué, eh bien la magistrate chargée de l'aménagement à la Ville de Genève n'intervient tout simplement plus. On ne la laisse pas choisir la couleur de son jouet, alors elle ne s'en occupe pas !

Une voix. On n'est pas au Conseil municipal !

M. Christian Steiner. Pardon ?

Le président. On n'est pas au Conseil municipal, Monsieur.

M. Christian Steiner. Non, Monsieur le président, mais il est important de mettre en lumière la problématique ainsi que la potentielle nécessité de l'intervention du Grand Conseil, de l'une de ses commissions, puis du Conseil d'Etat pour faire avancer les choses, car elles traînent; elles traînent depuis maintenant vingt ans, rien n'a été lancé durant cette législature, à l'exception de projets plus ou moins délirants qui ne tiennent pas compte de la population, du genre supprimer toute place de parc devant le garage Auto Secours ou proposer des vélos-cargos pour livrer des caisses de motos de 300 kilos au magasin de motos de la rue de Montchoisy. Non, ce n'est pas sérieux !

Je pense que le Grand Conseil et ensuite le Conseil d'Etat doivent intervenir dans le cadre de leur champ de compétences, c'est-à-dire les axes structurants, donc je propose le renvoi du présent rapport à la commission des transports.

M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs, certains discours ici sont assez contradictoires en ce qui concerne les communes. Si vous admettez qu'elles disposent d'un certain nombre de compétences - et la réponse du Conseil d'Etat va exactement dans ce sens, à savoir qu'il estime (à juste titre, selon nous) que cette question relève des prérogatives de la Ville de Genève -, vous ne pouvez pas venir soutenir: «Ce rapport ne nous convient pas, c'est le Conseil d'Etat qui doit s'en occuper.» Soudain, vous ne voulez plus de l'autonomie communale que vous chérissez tant et c'est au gouvernement de régler le problème ?! Il faudrait vous mettre d'accord une bonne fois pour toutes, parce que ce n'est pas la première fois qu'on entend ce double discours, même de la part de certains conseillers d'Etat ici présents.

Cela étant, histoire d'éclaircir définitivement la problématique, je suis plutôt favorable au renvoi à la commission des transports: on auditionne le Conseil d'Etat, qui viendra peut-être nous rappeler quelles sont les compétences respectives des communes et de l'Etat, et on aura enfin une réponse s'agissant de ce genre de pétitions qui, disons-le franchement, n'apportent pas grand-chose au débat. Clarifions au moins cette affaire une fois pour toutes ! Voilà pourquoi nous voterons le renvoi à la commission des transports; à défaut, nous prendrons acte du rapport du Conseil d'Etat. Je vous remercie.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ces deux pétitions, qui sont effectivement antagonistes, montrent vraiment ce qui se passe sur le terrain en ville de Genève... (L'oratrice s'interrompt.) Qu'est-ce qu'il y a, on me fait signe ? Non, d'accord. On essaie constamment d'opposer, comme c'est le cas aujourd'hui, suite à ce qui s'est passé à la commission des pétitions, les habitants aux commerçants ou les commerçants aux habitants.

Or que veulent les habitants dans la deuxième pétition ? Une meilleure qualité de vie, une diminution du transport individuel motorisé, des zones à 30 km/h, davantage de rues piétonnisées... Bref, mieux vivre dans leur quartier ! Et que demandent les commerçants ? Eh bien de pouvoir travailler de manière adéquate.

Dernièrement, une étude est parue qui démontre que les mesures de piétonnisation en général - et en particulier en ville de Genève, que ce soit aux Eaux-Vives, aux Pâquis ou dans d'autres quartiers du centre - sont favorables aux commerces locaux. Ce sont les habitants de la cité se déplaçant à pied ou à vélo qui consomment dans les magasins des différents quartiers de la ville. Ces faits sont prouvés, étayés dans l'étude.

Certes, il y a toujours une période de transition entre les travaux des différents chantiers, et il est important de gérer les choses: il faut informer, séquencer en plusieurs phases, faire en sorte que ça n'impacte pas trop le chiffre d'affaires des commerçants et commerçantes, mais il faut aussi prendre en compte la qualité de vie des habitants et habitantes. Ces enjeux sont essentiels dans le cadre de la politique de mobilité.

Ce d'autant qu'une décision de justice a été rendue récemment sur la question du 30 km/h qui appelle les autorités à procéder rue par rue pour déterminer dans quelles zones il est possible, faisable d'instaurer une telle limitation de vitesse. Pour toutes ces raisons, précisément pour ne pas opposer la Ville de Genève et le canton, puisque les deux instances sont concernées, pour inclure la participation citoyenne, les Verts et les Vertes soutiennent le renvoi de son rapport au Conseil d'Etat. Merci. (Applaudissements.)

M. Jacques Jeannerat (LJS). Une majorité de la commission des pétitions n'avait pas trouvé les deux pétitions fondamentalement opposées. On relève quand même quelques points d'intérêt ou des problématiques communs. Il est clair - cela a été relevé - que deux ou trois rues aux Eaux-Vives sont des axes structurants, donc placées sous l'égide de l'Etat; le reste, comme le souligne le Conseil d'Etat dans son rapport, c'est l'affaire de la Ville de Genève.

Or le problème, chers collègues, c'est que la Ville ne fout rien dans ce dossier ! Elle fait preuve d'une incompétence crasse, donc je suis d'accord qu'on renvoie ce rapport à la commission des transports, parce que quelques trucs doivent être réglés. On pourrait auditionner les représentants de la Ville et leur demander ce qu'ils entendent entreprendre exactement, comment ils comptent gérer le problème. Je vous remercie.

Le président. Merci bien. On aurait aussi pu renvoyer ces pétitions à la Ville de Genève ! Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une proposition de renvoi du rapport du Conseil d'Etat à la commission des transports - pour une étude extrêmement importante, peut-être même une thèse de doctorat, on ne sait jamais ! Je soumets cette requête au vote du plénum; en cas de refus, nous nous déterminerons sur l'autre demande, à savoir le renvoi au Conseil d'Etat.

Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat sur les pétitions 2200 et 2209 à la commission des transports est rejeté par 54 non contre 26 oui.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur les pétitions 2200 et 2209 est rejeté par 41 non contre 39 oui et 2 abstentions.

Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur les pétitions 2200 et 2209.