République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 10 avril 2025 à 17h
3e législature - 2e année - 12e session - 64e séance
PL 13416-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous poursuivons nos travaux avec le PL 13416-A, la P 2214-A et la M 3005-A. Le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je signale que les deux premiers textes font l'objet d'un rapport de M. Guy Mettan; s'agissant du dernier point, M. Thierry Oppikofer est rapporteur de majorité et M. François Baertschi rapporteur de minorité, remplacé ici par Mme Ana Roch. Monsieur Mettan, c'est à vous.
M. Guy Mettan (UDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, vous vous en souvenez peut-être, il y a deux ans, la presse et le Grand Conseil s'étaient inquiétés de situations relatives à ce qu'on a appelé du népotisme, c'est-à-dire au fait que dans des établissements - certains établissements - publics, des personnes ou des proches de la famille du directeur ou de cadres supérieurs avaient été embauchés; c'était notamment le cas aux SIG, puisque quatre membres de l'entourage du responsable de l'époque y avaient été engagés.
Il ne s'agit pas de personnaliser la problématique: il y a eu d'autres cas ailleurs, dans des départements de l'Etat, tant et si bien que M. Dugerdil avait déposé, au nom de l'UDC, un projet de loi dans le but de mettre fin à ces pratiques qui nous paraissaient discriminatoires vis-à-vis de tous les autres candidats à des postes au sein de la fonction publique ou d'institutions de droit public qui se voyaient écartés parce qu'ils n'avaient pas la chance de bénéficier de liens privilégiés avec de hauts dirigeants. De plus, cela nous semblait porter ombrage à la bonne réputation, à la crédibilité de l'administration.
Le problème a été reconnu, la commission sur le personnel de l'Etat a examiné ce texte pendant de nombreuses séances; elle s'est notamment attachée à définir les liens de parenté possibles, ce qui était susceptible ou pas de relever du népotisme, etc. La commission a réalisé un bon travail de fond; elle a auditionné le Conseil d'Etat à plusieurs reprises, à savoir Mme Fontanet, responsable du personnel de l'Etat.
A l'issue des discussions, les commissaires ont adopté un amendement général. C'est vrai qu'il a été compliqué de trouver la bonne formule, mais finalement, la commission s'est unanimement rangée derrière un amendement de Mme Caroline Marti, à qui je rends hommage, car elle a mis toute la commission d'accord autour de sa proposition.
A partir de là, en ma qualité de rapporteur, je ne peux que vous encourager à adopter le projet de loi tel que sorti des travaux de commission. Je reviendrai peut-être ensuite sur la pétition et la motion, mais voilà ce que je voulais dire en préambule, Monsieur le président.
M. Thierry Oppikofer (PLR), rapporteur de majorité. La M 3005 a été déposée le 14 mars 2024 par des députés MCG, soit la veille du dépôt du projet de loi dont on vient de parler, qui porte sur le même sujet et qui, à une exception près, était signé par des membres de l'UDC.
Mon rapport de majorité porte sur la proposition de motion, laquelle contient des termes assez vifs: «républiques bananières», «tour de passe-passe», «complicité de l'exécutif», «confusion lamentable». Il s'agissait en fait d'une réaction à la nomination du père de la magistrate Delphine Bachmann à la direction de l'OCSIN, juste après l'élection de sa fille à l'exécutif du canton.
Voici ses invites au Conseil d'Etat: renoncer aux pratiques de népotisme; s'engager, par une déclaration sur l'honneur, à ne pas embaucher de personnes ayant des liens de parenté avec l'un ou l'autre de ses membres; enfin, faire annuler toutes les décisions prises précédemment en contradiction avec cet engagement. Bien entendu, cet effet rétroactif a suscité des débats animés au sein de la commission.
Lors de son audition, la première signataire a évoqué «une manière médiévale d'accéder à des postes importants au sein de l'Etat». La notion plutôt vague de liens de parenté a troublé plusieurs commissaires. Dans le cadre de son audition portant sur le projet de loi, la pétition et la proposition de motion, la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet a notamment souligné l'illégalité de la troisième invite, celle sur la mesure rétroactive.
M. Charles Pict, directeur du service d'audit interne de l'Etat, a pour sa part expliqué qu'au sein de l'administration, un problème pouvait se poser si un membre de la famille d'un cadre hiérarchique direct était engagé, mais que s'il ou elle travaillait dans un autre service, cela semblait admissible. Dans le cas de Mme Bachmann et de son père, il a précisé que les décisions avaient été prises de manière neutre, sans la présence de la magistrate, que des situations comme celles qui avaient motivé les deux textes - motion et projet de loi - étaient très rares et qu'il en avait vu extrêmement peu en vingt-cinq ans de carrière.
Il existe par ailleurs une fiche MIOPE - il faudrait peut-être songer un jour à changer cet acronyme ! -, pour «mémento des instructions de l'office du personnel de l'Etat», qui réglemente ces incompatibilités; celle-ci pourrait certainement être renforcée.
Lors des travaux, alors que nous étions tombés d'accord sur le projet de loi, on a assisté à de louables efforts du groupe MCG pour sauver sa motion; il a tenté d'abord de reformuler la deuxième invite, puis de supprimer la déclaration sur l'honneur et enfin de remplacer la troisième invite par une proposition plus générale, à savoir: «à améliorer la gestion des ressources humaines».
Mme Fontanet a souligné que ces amendements ne modifiaient en aucun cas la position du Conseil d'Etat; ne considérant pas qu'il existe des pratiques de népotisme au sein des ressources humaines, celui-ci restait opposé à la motion, amendée ou non.
Après une discussion finale où la nouvelle version de la troisième invite a été retirée par les motionnaires, le vote de la commission s'est avéré limpide: l'amendement général du MCG réduit à deux invites a été rejeté par 11 non contre 3 oui, et la M 3005 dans sa version originale n'a obtenu qu'une seule voix, celle du MCG.
Dès lors, malgré l'acharnement thérapeutique dont il a fait l'objet de la part de nos respectables collègues du MCG, la large majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser ce texte qui n'a aucune utilité eu égard au projet de loi qu'on vient d'évoquer et sur lequel nous nous apprêtons à nous prononcer dans ce Grand Conseil. Merci, Monsieur le président.
Mme Ana Roch (MCG), rapporteuse de minorité ad interim. La majorité a soutenu que le texte ne servait à rien, était mal formulé et que les différents amendements que nous avions déposés ne respectaient pas la légalité. Nous avons essayé de les modifier; cela n'a pas plu à la commission, puisque, comme cela a été mentionné, une large majorité s'est formée pour les refuser.
Il n'empêche que cette motion a donné lieu à un certain débat, a permis en tout cas d'apporter un éclairage quant aux pratiques liées à l'engagement de membres d'une même famille au sein de l'Etat. Pour cette raison, nous pensons qu'elle avait encore toute sa valeur. Merci.
M. Jean-Louis Fazio (LJS). Chers collègues, le projet de loi vise à rectifier la pratique suite à certains recrutements qui ont défrayé la chronique et ébranlé la confiance que le peuple doit avoir envers nos institutions; il met l'accent sur la transparence et l'éthique qui doivent présider à l'engagement de fonctionnaires. Il s'agit réellement d'une question de bon sens politique.
Le groupe LJS soutiendra ce projet de loi ainsi que les amendements socialistes, qui nous paraissent adéquats et équilibrés. Par ailleurs, nous voterons le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil et refuserons la motion du MCG. Je vous remercie de nous suivre.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Ce projet de loi tout comme cette motion sont vraiment dans l'air du temps, c'est-à-dire que toute émotion, toute éventuelle erreur du Conseil d'Etat doit mener à une réponse législative. De toute évidence, le gouvernement a commis une erreur - et je pense qu'il a compris la leçon -, non pas que la personne qui a été nommée ne disposait pas des compétences requises - elle les possède certainement -, mais parce qu'effectivement, cette décision donne une mauvaise image ou peut générer un certain soupçon.
Toutefois, la réaction politique est complètement disproportionnée. Encore une fois, c'est vraiment dans l'air du temps, c'est-à-dire qu'on estime que tout faux pas politique doit conduire à une mesure législative: il faut légiférer, il faut réguler, il faut corseter l'action de l'Etat. On ne supporte plus un quelconque risque, donc on doit inscrire l'entier des possibilités dans la loi, comme si toute question devait trouver une réponse légale.
Et ce faisant - il s'agit d'un vrai débat philosophique que l'on amène ici -, on déresponsabilise les acteurs politiques, on ne leur permet plus de faire preuve d'un comportement éthique ou moral, puisque tout doit être prévu dans la loi. Ce qui figure dans la loi est autorisé, ce qui n'y figure pas n'est pas autorisé. On déresponsabilise ainsi les personnes. A l'avenir, le Conseil d'Etat appliquera scrupuleusement les lois alors qu'au contraire, il devrait faire appel à sa responsabilité, à sa jugeote et éviter ce genre de décision.
Ce projet de loi est mal foutu, car il ne prévoit pas la question du concubinage ni celle des liens d'amitié importants. Il faudrait plutôt réglementer ces cas par le biais de la fiche MIOPE, et c'est d'ailleurs ce qu'a fait le Conseil d'Etat. On peut effectivement réfléchir à des modifications de cette fiche MIOPE, mais ce n'est pas par des dispositions légales qu'il faut gérer ce type de problématique. Voilà pourquoi le groupe PLR vous invite à rejeter tant le projet de loi que la proposition de motion. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Louise Trottet (Ve). Beaucoup de choses ont déjà été dites, en particulier sur le projet de loi. Effectivement, cet objet s'inscrit dans un contexte politique récent. Il convient toutefois de rappeler qu'il se concentre sur les relations entre le Conseil d'Etat et les hauts fonctionnaires, et ne traite pas du tout de situations similaires entre d'autres échelons à l'intérieur de l'administration.
Par ailleurs - et cela a été signalé par mon préopinant -, ce texte élude la question des liens d'intérêts qui concerneraient par exemple des amitiés, des liens amoureux plus officieux, etc., mais on peut imaginer que dans ces cas de figure, le bon sens joue en général son rôle, la loi ne peut pas et ne pourra jamais tout régler.
Le projet de loi d'origine était complètement excessif: son périmètre portait jusqu'à des parents du troisième degré, par exemple un arrière-petit-enfant, et concernait toute l'administration: l'arrière-petite-fille d'un conseiller ou d'une conseillère d'Etat n'aurait pas pu aspirer à un quelconque poste au sein de l'Etat, y compris probablement à l'hôpital ou dans d'autres régies publiques.
Cette aberration du champ d'action comme des postes visés a heureusement été corrigée par un amendement socialiste qui rend le texte plus réaliste. Partant, le groupe Vert vous invite à accepter ce projet de loi ainsi modifié.
S'agissant de la motion MCG sur le même sujet, comme cela a été relevé, elle est inacceptable, tant sur le plan de ses invites que des considérants, qui sont assez limite. En particulier, la demande de ne pas nommer de personnel ayant des liens de parenté est trop vague et pose problème sur le plan du recrutement à l'Etat. Quant au fait de renoncer aux pratiques de népotisme, cette proposition n'a pas sa place dans une motion: elle relève davantage du niveau moral que normatif et législatif.
Par conséquent, les Verts ne soutiendront pas cette motion et voteront également le dépôt de la pétition des Vert'libéraux sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, il me semble que les membres de la commission sur le personnel de l'Etat convergeaient sur plusieurs points, et c'est également la position du parti socialiste. Le premier élément, c'est que les processus de recrutement à l'Etat, a fortiori quand il s'agit de hauts fonctionnaires, doivent être irréprochables. Cela nécessite évidemment de la transparence, mais aussi l'assurance d'une absence totale de favoritisme ou de décision pouvant être perçue comme tel, même si ce n'est pas fondamentalement avéré. Il s'agit d'une question de crédibilité pour l'Etat et de confiance des citoyens envers les institutions.
Le deuxième point de convergence, c'est que dans l'idéal, on ne devrait pas avoir à légiférer sur ce sujet, parce que cela comporte certains risques, cela requiert de faire une sorte d'inventaire à la Prévert qui serait inscrit dans la loi. Or quand on liste un certain nombre de conflits d'intérêts ou d'engagements qui seraient potentiellement prohibés, on a toutes les chances d'en oublier ou de tomber à côté dans certaines situations.
Ce qu'on a constaté, dans le cadre de nominations récentes qui ont poussé au dépôt de ces différents objets parlementaires, c'est que le Conseil d'Etat avait l'air de considérer que ce qui n'était pas formellement interdit par une loi ou un règlement était autorisé et donc légitime. Or le Grand Conseil n'a pas cette même appréciation, et c'est la raison pour laquelle la majorité de la commission a malgré tout décidé de légiférer pour instituer un cadre à l'engagement de hauts fonctionnaires, en particulier s'agissant des liens d'intérêts qui peuvent exister avec des conseillers et conseillères d'Etat.
Le troisième principe sur lequel nous étions également toutes et tous d'accord, c'est que le projet de loi tel que rédigé à l'origine n'était pas applicable: il était bien trop extrême et aurait conduit à des situations tout à fait arbitraires, comme l'a démontré Mme Trottet tout à l'heure.
Dès lors, nous avons déposé des amendements afin de réglementer l'embauche de proches de conseillers et conseillères d'Etat, mais également du chancelier ou de la chancelière, de manière à éviter les potentielles situations de conflit d'intérêts ou présentant l'apparence de conflits d'intérêts.
Il est important de préciser que cette nouvelle version ne comporte pas d'effet rétroactif. En effet, il est absolument hors de question de remettre en cause des décisions qui ont été prises précédemment, décisions prises dans la légalité, même si elles ont pu être contestées.
Enfin, je rappelle - M. de Senarclens a eu raison de le mentionner - qu'il n'est pas possible de lister l'intégralité des cas de figure qui pourraient mener à un conflit d'intérêts. Aussi ce texte n'exempte-t-il pas le Conseil d'Etat de faire preuve de prudence, d'analyser non seulement la légalité, mais également la légitimité d'une candidature et, le cas échéant, d'y renoncer s'il peut y avoir une suspicion de conflit d'intérêts.
Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à accepter le projet de loi, à voter le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil - elle n'a plus d'objet, puisque le problème est réglé à travers le projet de loi - et à refuser la proposition de motion qui, comme l'ont indiqué nombre de mes préopinants, est vraiment extrême. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, par souci de transparence, il est important de rappeler de quoi il est question: on ne parle pas de l'engagement d'un nouveau collaborateur, mais bien d'une personne qui, à l'époque des faits, officiait déjà à l'Etat, était numéro deux de son département et, par la force des choses, aurait très bien pu finir numéro un si la magistrate à laquelle on se réfère (et que je ne nommerai pas) avait été élue un an après.
Que s'est-il passé ? Le chef du département de l'OCSIN, qui était le numéro deux, est passé numéro un, mais le hasard de la temporalité a voulu que l'élection du gouvernement ait lieu avant et que sa fille devienne conseillère d'Etat. Pour cette seule et unique raison, ce fonctionnaire n'aurait pas dû obtenir le poste que le temps lui aurait accordé de toute façon. Il ne s'agit pas là d'un quelconque favoritisme, mais d'un hic de temporalité lié au scrutin. Encore une fois, on ne parle pas d'un nouvel engagement, mais d'une personne qui était déjà en fonction, donc le conflit d'intérêts est ici moyen.
Comme on a eu l'occasion de l'évoquer en commission... Le directeur du service d'audit interne de l'Etat est venu nous expliquer que le Conseil d'Etat a procédé correctement en nommant cet individu, la conseillère d'Etat concernée s'étant récusée lors du vote, étant sortie de la salle. Le bon sens a primé lors du processus. Le Centre n'y voit aucun problème sur le plan de la procédure.
Graver les conditions d'élection ou de nomination des membres de la fonction publique dans le marbre d'une loi, lister les liens familiaux et déterminer jusqu'à quel degré de parenté une personne pourrait ou non être autorisée à travailler au sein de l'Etat, c'est s'immiscer finalement dans la vie privée des gens, c'est décider: aujourd'hui, telle personne n'est pas en couple ou en ménage avec telle autre, ça passe, mais si elle entre en concubinage avec untel, ça ne passe plus.
Je rappelle que Genève est un tout petit canton de 500 000 habitants, tout le monde se connaît. Il est illusoire de croire que les gens ne se connaissent pas, n'entretiennent pas de liens d'amitié ou de relations privées et, le cas échéant, de vouloir éliminer certains candidats. Comme l'a souligné Mme Trottet tout à l'heure, quelqu'un pourrait se voir refuser une position à l'hôpital en raison d'une personne en fonction à un autre poste ailleurs, ça deviendrait problématique.
Il existe aujourd'hui une fiche MIOPE qui est effectivement perfectible, et tout l'intérêt qu'ont eu ces textes, c'est que nous avons eu l'occasion d'en discuter. Pour ces raisons, Le Centre a choisi de rejeter le projet de loi, de déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil et de refuser la proposition de motion; le bon sens vous commanderait de faire de même. Je vous remercie.
Mme Ana Roch (MCG), rapporteuse de minorité ad interim. Nous estimons que le projet de loi reflète une réalité plus large et que certains engagements, justifiés ou non, suscitent une mauvaise appréciation de l'opinion publique. Il est important que l'Etat montre l'exemple et donne une direction claire, surtout en période de grande exclusion du marché du travail de certains de nos résidents. Même si ce texte ne résout pas tous les problèmes, il est crucial de faire un effort pour agir de manière exemplaire et signifier que l'Etat joue un rôle central.
De plus, grâce aux amendements, nous considérons que l'approche est nuancée et tient compte des nécessités opérationnelles de l'Etat. Il ne faudrait pas aller trop loin et risquer de compromettre le bon fonctionnement des institutions en interdisant à certaines personnes de travailler simplement en raison de leur proximité avec un conseiller d'Etat.
Genève est une petite communauté où il est difficile d'éviter des liens dans certains domaines de la fonction publique ou activités étatiques. En l'état, avec la mesure que propose l'amendement général, nous pouvons soutenir le projet de loi. Merci.
M. Guy Mettan (UDC), rapporteur. Je voudrais rebondir sur les propos de M. de Senarclens. D'ordinaire, l'UDC est assez proche des soucis manifestés par M. de Senarclens, c'est-à-dire que nous n'aimons pas non plus augmenter la bureaucratie et gêner le pouvoir exécutif dans sa tâche, disons... (Remarque.) ...régalienne, absolument ! Merci, Madame la présidente !
C'est vrai que cet argument a son intérêt, mais il n'empêche qu'on a tout de même constaté de nombreuses situations douteuses. Alors il s'agit peut-être d'une pure coïncidence temporelle, mais en l'espace de quelques mois, plusieurs affaires sont sorties. Dès lors, je crois qu'il est légitime de s'interroger, car comme je l'ai indiqué, il faut faire en sorte que la fonction publique soit au-dessus de tout soupçon !
Et c'est vraiment dans cet esprit de concertation que la commission a oeuvré. Mme la conseillère d'Etat nous a annoncé qu'elle n'était pas favorable, sur le principe, au projet de loi, mais les travaux ont été effectués en collaboration avec elle: elle nous a guidés dans la mesure de ses possibilités, donc il y a eu un bon travail de coopération entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Voilà, je tenais juste à préciser ces points.
Enfin, voici la position de mon parti sur la pétition: comme cela a été noté, la pétition a vu ses buts réalisés grâce au projet de loi, donc il faut voter en faveur de son dépôt sur le bureau du Grand Conseil. Concernant la M 3005 du MCG, tout a été dit à ce sujet; notre groupe préconise l'abstention par amitié et respect pour la contribution du MCG au débat.
Mme Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous le savez, le Conseil d'Etat était - et est toujours - formellement opposé au projet de loi tel qu'il avait été déposé et dont la portée était excessive: dans un canton de taille modeste comme Genève, il empêchait toute personne ayant un lien familial, même extrêmement éloigné, avec quelqu'un au Conseil d'Etat ou ailleurs, d'être embauchée dans l'administration, c'était tout à fait problématique.
Le texte tel qu'amendé à l'issue des travaux de commission a fait l'objet de nombreuses discussions. Le Conseil d'Etat, par ma voix, a confirmé qu'il pouvait vivre avec, que contrairement au projet initialement déposé, la nouvelle version était applicable.
Le Conseil d'Etat relève toutefois que la politique des ressources humaines de l'Etat est basée sur la compétence et l'expertise, que les choix se portent sur les meilleurs dossiers suite à un processus impliquant le responsable direct et les responsables RH, garants de la procédure, que lors des recrutements, les postes sont publiés, un comité de sélection est souvent constitué.
Celles et ceux qui entretiennent des liens personnels, ne serait-ce qu'au sein du comité de sélection - et là, on ne parle pas encore du Conseil d'Etat qui doit nommer un haut cadre -, doivent se récuser, quitter le groupe de travail pour éviter tout conflit d'intérêts.
En ce qui concerne les fonctions dirigeantes, nous veillons par ailleurs à ce que les comités de sélection comprennent des cadres d'autres départements. C'est ainsi que nous avons procédé pour la nomination qui fait l'objet des différents textes soumis ce soir à votre Conseil.
L'amendement adopté - et Mme Marti l'a rappelé, je pense que c'est important - n'exonérera pas le Conseil d'Etat de ses responsabilités. Je rappelle que les membres du Conseil d'Etat doivent se récuser lorsqu'ils ont un intérêt personnel direct dans le dossier traité, selon l'article 24, alinéa 1, du règlement pour l'organisation du Conseil d'Etat de la République et canton de Genève; cette disposition prévoit également que l'article 15 LPA s'applique aux membres du Conseil d'Etat lorsque celui-ci intervient en tant qu'autorité administrative.
Mesdames et Messieurs, tout cela pour dire qu'on aura beau instituer dans la loi toutes les cautèles possibles et imaginables, on ne pourra jamais anticiper l'ensemble des cas susceptibles de se présenter. Si demain un conseiller ou une conseillère d'Etat a différents amants ou maîtresses, ces derniers ne seront pas identifiables ni connus, et ils pourraient être embauchés au sein de l'administration à de hauts postes.
Il est important d'insister sur cet élément, parce que légiférer pour un cas précis ne permettra pas d'éviter toutes les situations potentielles. Personne ne sait avec qui les conseillères et conseillers d'Etat couchent... (Commentaires.) ...et dans ce contexte, il serait possible de nommer à certaines fonctions des personnes entretenant des liens d'intérêts avec eux.
Mesdames et Messieurs, ne créons pas de loi sur la base d'une affaire spécifique. Le Conseil d'Etat est responsable. Dans le cadre de la nomination dont il a été fait mention, la conseillère d'Etat directement concernée s'est bien entendu récusée: elle n'a participé ni au débat ni à la prise de décision. L'entier du processus de recrutement a été assuré par un autre conseiller d'Etat et ses équipes.
En réalité, ce que vous êtes en train de combattre, ce que vous souhaitez régler - et je l'entends tout à fait -, c'est le dégât d'image, c'est la perception tronquée que peut avoir le citoyen vis-à-vis des autorités. Manifestement, nous évoluons aujourd'hui dans un monde où cette vision a plus d'importance que les faits, prend le pas sur la réalité.
Pendant les débats en commission, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai indiqué que le Conseil d'Etat ne pouvait pas cautionner le projet de loi dans sa première mouture, mais qu'en revanche, il pouvait vivre avec sa version amendée, même s'il n'estimait nécessaires ni le dépôt d'un tel texte ni son ajustement par un amendement. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.
Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Nous commençons la procédure de vote avec le PL 13416.
Mis aux voix, le projet de loi 13416 est adopté en premier débat par 53 oui contre 30 non et 2 abstentions.
Le projet de loi 13416 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13416 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 30 non et 2 abstentions (vote nominal).
Le président. En ce qui concerne la P 2214, je mets aux voix le préavis de la commission, à savoir le dépôt.
Mises aux voix, les conclusions de la commission sur le personnel de l'Etat (dépôt de la pétition 2214 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 83 oui (unanimité des votants) (vote nominal).
Le président. Enfin, Mesdames et Messieurs, nous nous prononçons sur la M 3005. Avant de lancer le vote sur sa prise en considération, je vous remercie de vous déterminer sur l'amendement général présenté par la minorité. Il s'agit de remplacer toutes les invites du texte par les suivantes:
«- à renoncer définitivement aux pratiques népotiques dans la gestion étatique des ressources humaines;
- à ne pas nommer du personnel ayant des liens de parenté avec l'un ou l'autre de ses membres.»
Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 65 non contre 10 oui et 10 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 3005 est rejetée par 65 non contre 9 oui et 10 abstentions (vote nominal).