République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 31 octobre 2024 à 20h30
3e législature - 2e année - 6e session - 33e séance
IN 197-CJ et objet(s) lié(s)
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons à présent examiner l'IN 197-CJ ainsi que l'IN 197-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. de Rougemont.
M. Philippe de Rougemont (Ve). Merci, Monsieur le président. Il y a un mois, la Cour de justice déclarait le recours des initiants non valide et rappelait que c'est aux cantons de traiter leurs déchets; Genève se retrouve donc à la case départ. Les Verts soutiendront le renvoi en commission de ce texte, parce que la question reste finalement ouverte. En effet, Genève va continuer à construire et l'usine des Cheneviers à brûler, il y aura des mâchefers et des déchets de chantier, et si, malgré tout, le projet du CERN est accepté, vous pouvez imaginer la quantité supplémentaire et considérable de déchets à traiter. Bref, pour les Verts, c'est une question de prévention: il s'agit d'éviter les déchets autant que faire se peut. Du reste, la marge de manoeuvre est grande, dans le canton, pour réduire la quantité de déchets qui finissent en mâchefer: les deux axes prioritaires sont la litière pour animaux (litière minérale) et la porcelaine qui se retrouve dans les sacs noirs. Tout cela est évitable, moyennant un bon plan d'action.
La mise en oeuvre d'un projet de loi Vert est en ce moment travaillée au Conseil d'Etat; ce texte envisage la sobriété dans les chantiers pour que les déblais soient le plus possible utilisés comme matériau de construction. Il y a donc beaucoup à faire. Nous voterons le renvoi de cette initiative en commission, car la question reste ouverte. Je vous remercie de votre attention.
Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Le PLR étudiera cette initiative, ou ce qu'il en reste, puisque c'est principalement une coquille vide qui est renvoyée en commission, mais continuera surtout à s'occuper des questions de mâchefer, comme on le fait déjà à la commission de l'environnement et de l'agriculture. Nous rappelons l'opposition à une nouvelle décharge, et donc la volonté de trouver des solutions.
Effectivement, ainsi que mon préopinant vient de le relever, le meilleur déchet est celui que l'on ne produit pas. Il faut réduire les déchets, trier, et on attend impatiemment que notre loi sur les déchets entre en vigueur pour qu'on avance sur ces questions. Dans ce cadre-là, nous traiterons de l'initiative ou de ce qu'il en reste, comme j'ai dit, mais nous serons attentifs et nous encourageons vraiment le Conseil d'Etat à chercher des alternatives; il y a notamment les questions de surtri à l'entrée des Cheneviers IV. Il faut chercher des alternatives ! Or, on a le sentiment que l'exécutif s'obstine dans l'idée qu'on va céder à un moment donné et voter cette nouvelle décharge. Je ne suis pas du tout sûre que ça se produise comme ça, et j'invite donc à chercher sérieusement toutes les alternatives. Merci, Monsieur le président.
M. Lionel Dugerdil (UDC). J'essaie de ne pas répéter ce qu'ont dit mes préopinants, mais j'abonde dans le sens de Mme Zuber-Roy: nous ferons tout notre possible afin d'éviter cette décharge, parce qu'il est aujourd'hui absolument intolérable de laisser aux générations futures des décharges de déchets toxiques, qui sont toutes problématiques, toutes décharges confondues. On sait et on voit qu'on peut dépolluer ces mâchefers - les travaux de commission ont permis de mettre au jour ce point -, qu'on peut mieux faire et qu'on a un ministre de l'environnement qui ne veut pas entendre et être raisonnable sur ce sujet; nous ferons donc tout pour éviter cette décharge et pour dépolluer ces produits toxiques.
Nous ferons également tout pour que Cheneviers IV ne devienne pas une chaudière qui fonctionne aux poubelles, mais bien une usine d'incinération qui n'incinérera que les déchets qu'il est nécessaire d'incinérer. Nous vérifierons qu'il y ait un surtri et que tous les déchets passant par les Cheneviers ne peuvent pas être utilisés autrement.
Mme Caroline Renold (S). Pour ne pas répéter ce qu'ont dit mes préopinants, je vais aborder un autre sujet: le parti socialiste partage bien évidemment la préoccupation des initiants quant au besoin de protéger les habitants du canton des émissions dangereuses pour leur santé, tout en étant conscient du fait qu'il est nécessaire de gérer les déchets produits dans le canton et d'en diminuer la production. D'ailleurs, il faut une protection bien plus large que celle mentionnée dans cette initiative, puisque cela concerne les émissions provenant des décharges et des gravières, mais aussi celles provoquées par les autoroutes ou l'aéroport.
Si les habitants du canton ont besoin de logements, ceux-ci ne doivent pas être construits dans des lieux qui mettent en péril la santé des habitants. Je vous rappelle que c'est pourtant ce que tente de faire la droite au Parlement fédéral en limitant la protection contre les nuisances sonores ou ce que vous faites ici en vous opposant aux 30 km/h.
Les questions de protection de la santé soulevées par cette initiative doivent être examinées à la commission d'aménagement du canton, afin que, tout en protégeant la santé des habitants et habitantes du canton, on dégage les critères les plus pertinents pour gérer les gravières et les décharges qui s'occupent des déchets produits dans le canton et afin que l'on examine la manière la plus pertinente de mettre en oeuvre ces différents critères. Le parti socialiste soutiendra donc le renvoi en commission.
M. François Erard (LC). Chers collègues, on a beaucoup parlé de décharge; c'est effectivement le terme employé dans ce texte. Cela dit, il s'agit bien plus de dépôt de matériaux d'excavation que de décharge au sens où l'on peut l'entendre. Le problème qui se pose à Genève est le suivant: on n'a plus suffisamment de trous, de gravières pour déposer nos remblais de construction, et ceux-ci partent par milliers de tonnes tous les jours en France voisine, ce qui est peu acceptable. Les préoccupations des riverains de ces remblais doivent être prises en considération. Le Centre soutiendra un renvoi en commission. Je vous remercie.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Il m'appartient de vous adresser quelques mots de la part du Conseil d'Etat en lieu et place de notre ministre de l'environnement, dûment excusé ce soir. L'initiative 197, qui prévoit de modifier la loi sur les gravières et exploitations assimilées pour reculer la distance des gravières aux habitations à 300 mètres, a fait l'objet d'un recours s'agissant de la détermination initiale du Conseil d'Etat sur l'invalidation partielle, ce qui a amené une députée à parler à juste titre de coquille vide, puisqu'il s'agit ce soir de renvoyer une initiative dont l'essentiel a été invalidé.
Il est important pour le Conseil d'Etat de citer brièvement l'arrêt de la Cour: «[...] le législateur cantonal n'est habilité à adopter une distance limite de 300 m ni en vertu de la protection contre les nuisances en tant que telles, ladite protection étant réglée s'agissant du bruit et de la pollution atmosphérique exhaustivement par le droit fédéral, ni en vertu du principe de prévention, qui ne permet pas l'adoption d'une distance de sécurité de manière générale et abstraite sans examen concret du cas d'espèce.»
Il revient donc maintenant à votre Conseil de se déterminer sur la prise en considération de cet objet, sur l'opposition d'un éventuel contreprojet d'ici au 15 mai prochain. Il convient surtout, Mesdames et Messieurs les députés, d'observer que la distance minimale, qui représentait le coeur de l'initiative, a été invalidée, on l'a dit, et c'est l'essentiel de mon propos ce soir sur ce point. Le texte restant se résume à invoquer un principe général du droit de l'environnement déjà connu par ailleurs. L'intérêt de cette initiative et son opportunité apparaissent donc à tout le moins amoindris. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat.
L'IN 197-CJ et le rapport du Conseil d'Etat IN 197-A sont renvoyés à la commission d'aménagement du canton.