République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 16h, sous la présidence de M. Alberto Velasco, président.

Assistent à la séance: M. Pierre Maudet et Mme Delphine Bachmann, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Anne Hiltpold et Carole-Anne Kast, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, Diane Barbier-Mueller, Virna Conti, Patrick Dimier, Joëlle Fiss, David Martin, Xhevrie Osmani, Charles Poncet, Skender Salihi, Geoffray Sirolli, François Wolfisberg et Yvan Zweifel, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Rémy Burri, Stéphane Fontaine, Gabrielle Le Goff, Philippe Meyer, Daniel Noël et Nicole Valiquer Grecuccio.

Annonces et dépôts

Néant.

M 2926-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Françoise Nyffeler, Jocelyne Haller, Aude Martenot, Christian Zaugg, Sylvain Thévoz, Pierre Eckert, Ruth Bänziger, Marta Julia Macchiavelli, Maria José Quijano Garcia, Philippe Poget : Débâcle du Credit Suisse : à Genève de prendre ses responsabilités !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 16, 17, 23 et 24 novembre 2023.
Rapport de majorité de M. André Pfeffer (UDC)
Rapport de minorité de M. Pierre Eckert (Ve)

Débat

Le président. Nous reprenons nos travaux en commençant par la M 2926-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapporteur de majorité n'étant pas encore présent, Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez la parole.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Ça m'embête un peu de parler en premier, j'aurais aimé que le rapporteur de majorité donne ses divers arguments sur ce sujet...

Une voix. Attends-le !

M. Pierre Eckert. ...mais voilà ! Je vais commencer par vous dire que la débâcle du Credit Suisse en mars 2023 a constitué un traumatisme pour l'ensemble de la population suisse. Une entreprise qu'on pensait solide s'est effondrée en quelques jours à la suite de la faillite d'une banque américaine mineure et d'un dégât de réputation allégué. Cela montre bien que le système élaboré par le Credit Suisse était construit sur du sable. La banque a par ailleurs été impliquée dans une série de malversations allant du blanchiment d'argent au contournement d'embargo et à l'aide active à l'évasion fiscale. Ce modèle ressemble davantage à celui d'un grand casino qu'à celui d'une banque délivrant des services à destination des particuliers et des PME. Je reviendrai sur la motion elle-même une fois que le rapporteur de majorité aura développé ses arguments.

Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Pfeffer, qui était en retard.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président, et mille excuses pour ce retard ! Pour la majorité des commissaires, cette motion est un peu un mélange de différentes requêtes; certaines ont déjà été réalisées, d'autres ne sont pas vraiment utiles. Surtout, une des requêtes, à savoir la première invite, est à refuser très vivement. Quant à la dernière, consistant à inviter le Conseil d'Etat à s'interroger et à intervenir sur la problématique d'éventuelles pertes d'emplois à Genève, je souligne que lors d'une de nos auditions, on nous a expliqué qu'une task force avait été créée après le 19 mars 2023. Le Conseil d'Etat est donc intervenu, il a fait le nécessaire dans ce sens-là. Lors de la même audition, on nous a indiqué que le Credit Suisse et l'UBS employaient à Genève environ 1700 collaborateurs et surtout, c'est un élément important, que 80% de tous ces employés sont du front office, donc au contact avec la clientèle, et travaillent en tant que gestionnaires, responsables de dossiers clients. Heureusement, pour ces collaborateurs ou ces cadres, le risque de perdre leur emploi est - ou devrait être, du moins nous l'espérons - très faible.

Cette motion donne un peu l'impression de vouloir aborder des domaines très différents les uns des autres. La première invite demande au Conseil d'Etat d'«intervenir le plus rapidement possible auprès de la BNS [...] pour exiger [...] le versement de plusieurs centaines de milliards [...] à l'UBS [...]». Plusieurs des requêtes de cette motion sont déjà réalisées ou s'avèrent heureusement d'une utilité très limitée. Encore une fois, deux ou trois d'entre elles sont franchement à refuser. Pour ces raisons, la majorité - et je précise qu'il s'agissait d'une très large majorité des commissaires - vous invite à rejeter ce texte. Merci de votre attention.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Est-ce que le rapporteur de minorité souhaite encore s'exprimer ?

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. Bien sûr, il souhaite poursuivre ! Je vous remercie, Monsieur le président. J'ai expliqué tout à l'heure ce que je pensais du comportement de Credit Suisse et de sa faillite. Pour en venir à la motion elle-même, c'est vrai qu'au moment de son traitement à l'automne 2023, nous avons remarqué que l'UBS avait déjà renoncé aux garanties de la Confédération et de la BNS - ça, c'est arrivé en août 2023 -, si bien que la première partie des invites est totalement caduque, puisque nous n'avons plus aucun moyen de pression sur l'UBS à travers ces éléments. A mon avis, la deuxième partie reste tout à fait pertinente. Nous allons proposer un amendement sur cette deuxième partie, sachant que la première n'a plus de sens et que donc nous la laissons tomber très volontiers.

J'aimerais encore faire un commentaire sur un des sous-points qui était contenu dans la première invite et qui est cher aux Verts. Il concerne le désinvestissement de la BNS des énergies fossiles. Comme vous le savez, nous sommes déjà intervenus un certain nombre de fois sur ce sujet. Chaque fois, ça a été refusé, on dit qu'on ne peut pas. Mais la BNS continue à avoir différents investissements dans le fossile qui ne sont pas acceptables. Afin de ne pas mélanger les débats, nous renonçons à conserver cet élément dans cette motion - mais je ne vous promets pas qu'on ne reviendra pas à la charge sur ce sujet une autre fois.

Je pense qu'en tant qu'importante place bancaire, Genève ne peut pas rester indifférente et se doit de donner un signal fort à l'entité restante, soit l'UBS. L'absorption du Credit Suisse conduira fatalement à des pertes d'emplois, qui pourraient se compter par centaines dans le canton de Genève. Il convient donc d'éviter des pertes d'emplois trop massives et de faire en sorte que des plans sociaux durables...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Pierre Eckert. Merci, Monsieur le président. ...comportant non seulement des indemnisations décentes, mais aussi de solides possibilités de reconversion - tiens, on y revient ! - soient mis en place.

Il est en outre essentiel pour l'économie genevoise que l'on puisse estimer quelles seront les conséquences de ne disposer plus que d'une grande banque au lieu de deux. Cela ne concernera pas seulement le nombre d'agences, qui sera certainement réduit, mais aussi et surtout les services qui seront proposés aux privés et aux entreprises. Une évaluation de ces conséquences est dès lors absolument nécessaire.

La deuxième invite conserve donc toute sa pertinence. Nous l'avons reformulée. Dans mon rapport de minorité, j'ai essayé de la réécrire différemment par rapport au texte initial; je renonce à cet amendement. M. Baertschi avait lui aussi proposé hier une nouvelle invite, à laquelle il renonce également. Nous avons déposé un amendement général dans lequel nous avons reformulé les invites de la façon suivante:

«invite le Conseil d'Etat

- à intervenir auprès de l'UBS pour limiter au maximum les licenciements du personnel suite à l'absorption du Credit Suisse et, si ces licenciements étaient inévitables, à mettre en place un plan social;

- à intervenir auprès de l'UBS pour ne pas affaiblir les prestations existantes pour les PME locales;

- à intervenir auprès du Conseil fédéral pour qu'il demande à l'UBS de respecter les mêmes exigences que ci-dessus.»

Afin de montrer que le Grand Conseil soutient l'ex-personnel du Credit Suisse et se préoccupe des conséquences de cette faillite pour l'économie genevoise, nous vous invitons à soutenir cette proposition de motion reformulée par l'amendement.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, la première bonne nouvelle dans le cadre de cette débâcle du Credit Suisse, c'est que la succursale de Genève s'en sort mieux que les autres, car elle affichait une santé financière beaucoup plus saine que d'autres succursales en Suisse, notamment celle de Zurich.

J'aimerais rappeler et souligner encore une fois que s'agissant des invites qui mentionnent le soutien financier octroyé à l'UBS par la Confédération, soit une garantie contre les pertes de 9 milliards de francs, et celui donné au Credit Suisse par la BNS, soit une garantie de 100 milliards de francs pour la couverture des prêts d'aide sous forme de liquidités, l'UBS a indiqué le 11 août 2023 qu'elle résiliait le contrat de garantie de la Confédération et l'accord entre le Credit Suisse et la BNS - Monsieur le rapporteur de minorité, je vous remercie de l'avoir relevé. Les reformulations des invites que nous proposent les Verts en tiennent compte.

Je ne reviens donc pas sur la première invite et ses premier, deuxième et troisième points, qui ne s'appliquent plus. Le quatrième point, qui invite le Conseil d'Etat à demander à la BNS de se désinvestir des énergies fossiles, introduit un mélange des genres assez peu propice à l'adoption de cette motion, mais je réserve encore la décision du Centre, suite aux nouvelles invites déposées par les Verts. Cela étant, pour l'instant, notre position est le refus de ce texte. Je vous remercie.

M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, bien que l'Union démocratique du centre soit évidemment attachée à la sauvegarde de la place financière suisse et à la limitation des dégâts collatéraux subséquents à la débâcle du Credit Suisse, nous estimons que cette motion arrive comme la grêle après les vendanges - et c'est le cas de le dire, en cette période de récolte. En effet, elle s'est noyée dans les méandres de l'imposant ordre du jour du Grand Conseil puisque la fusion entre le Credit Suisse et l'UBS est largement entérinée depuis longtemps. Cela démontre que la politique cantonale a son inertie et ses limites face à la raison économique.

Contrairement à ce que le rapporteur de minorité indique, je vous invite à pianoter sur internet et à regarder le nombre d'offres d'emplois ouvertes chez Credit Suisse. Au moment même de la discussion de cette motion en commission, personne au sein d'UBS Genève n'aurait été capable de donner des réponses aux commissaires, car le secret qui s'applique au niveau de la gestion des RH dans des dossiers aussi complexes que ceux-ci rendait la situation totalement opaque. En tant que professionnel du milieu, j'ai pu me montrer inquiet de la situation bancaire nationale, certes. Cependant, nous tenons à rappeler qu'à Genève, l'impact est moindre par rapport à d'autres cantons, car Credit Suisse avait déjà entamé un processus de dégraissage - excusez-moi du terme, mais c'est celui qui était employé par la banque elle-même - en diminuant le nombre de succursales dans le canton ces dernières années. De fait, nous ne voyons pas l'utilité de cette motion, puisque l'Etat n'a pas le pouvoir d'intervenir au niveau national dans ce domaine.

Aujourd'hui, nous avons suffisamment de recul pour confirmer que le secteur bancaire et spécifiquement la place financière genevoise ont été faiblement touchés. Comme je viens de le dire, le Credit Suisse avait déjà fortement élagué ses effectifs dans le passé. Actuellement, il y a une érosion, mais volontaire, de ses employés et donc un certain transfert de compétences en faveur d'autres banques de la place, notamment Raiffeisen et la BCGE ainsi que d'autres banques «retail» et privées. Le solde des collaborateurs étant repris par UBS, nous pourrions éventuellement reprocher à la grande banque son manque de transparence vis-à-vis de ses employés, ceci pour des raisons somme toute assez évidentes. Mais cette motion ne traite pas de cette problématique, et nous sommes tous conscients que ce n'est pas dans cet hémicycle que nous allons pouvoir débattre de ce sujet.

Mesdames et Messieurs les députés, au vu de tous ces éléments, le groupe de l'Union démocratique du centre vous invite à suivre le vote de la majorité en rejetant cette motion. Merci de votre attention.

M. Vincent Subilia (PLR). Chères et chers collègues, vous connaissez l'attachement de notre famille politique à la place financière genevoise, et nous ne sommes pas les seuls à y être attachés, on vient de l'entendre. Elle représente 13% de notre PIB et 38 000 emplois. J'aimerais souligner, à l'instar de mes préopinants issus des rangs des Verts, que cette place financière a connu les mutations que l'on sait - pour ne pas parler de changements de paradigme - non seulement en matière de transparence, mais aussi sous l'angle de la durabilité. Et Genève est aujourd'hui considérée comme une capitale de la finance dite durable - je pense que ça, c'est un point qu'il ne faut pas perdre de vue.

Cela étant, je tiens aussi à dire que naturellement - je crois que nous sommes unanimes ici à le considérer -, la disparition de la deuxième banque suisse est une réelle débâcle et va laisser des stigmates profonds sur la réputation de notre place financière. Je reviens de l'étranger, où effectivement, la disparition d'une banque telle que Credit Suisse, qui portait le nom de notre pays, a aussi été vécue comme une forme de traumatisme.

Le problème de cette motion est double. Le premier vient d'être énoncé: ce texte arrive comme la grêle après les vendanges - c'est de saison. En réalité, cela illustre la décorrélation fréquente entre le temps économique et le temps politique. Nous étions saisis de ce texte le 30 octobre dernier; depuis lors, de l'eau - ou du vin - a coulé sous les ponts. Par conséquent, sauf à imaginer que, sur un malentendu, on puisse se mettre d'accord, cette motion n'a plus lieu d'être dans les termes qui sont les siens. Et puis, aux yeux de notre famille politique, sa seconde faiblesse tient à sa dimension très interventionniste - vous savez que nous ne sommes pas absolument des défenseurs d'une vision étatiste des choses.

Pour le surplus, je crois que nous serons tous ici capables d'admettre que cette motion, issue d'une famille politique qui n'est désormais plus présente au sein de notre hémicycle, est surtout marquée d'une méconnaissance crasse de notre fonctionnement économique: cela a été reconnu, elle est marquée du sceau d'un mélange des genres, avec la BNS qui devrait se substituer à ce qui pourrait être réalisé via des activités privées.

Encore une fois, du point de vue de la réputation, la disparition de Credit Suisse est un drame. Sous l'angle de l'emploi, on pouvait craindre que ce soit le cas. Comme cela a été répété ici, il semblerait, en tout cas pour Genève, que sur le plan humain, la casse, pour le dire ainsi, ait été limitée - je suis d'accord que c'est un point sur lequel il faut être vigilant, vous transmettrez, Monsieur le président.

Compte tenu de ces éléments, nous considérons que ce texte n'a aujourd'hui plus de raison d'être et qu'il doit par conséquent être refusé. Je vous remercie de votre attention.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que le temps parlementaire est relativement long, trop long ! En effet, cette motion aurait dû être discutée bien plus tôt. Maintenant, il faut prendre les choses telles qu'elles sont aujourd'hui. Et dans ce sens, l'amendement proposé par les Verts et le MCG correspond à la réalité et demande simplement à l'Etat d'agir pour faire en sorte d'éviter un maximum de licenciements dans le canton de Genève avec la reprise du Credit Suisse par UBS.

Je pense en effet que cette question est absolument essentielle, puisque - cela a été dit - cette débâcle de Credit Suisse représente une menace pour les emplois dans la mesure où Genève compte beaucoup sur sa place financière. On sait qu'aujourd'hui, un grand nombre des salariés de notre canton travaille dans le secteur financier.

Face à ce constat, ce qui est proposé n'est pas de l'interventionnisme de la part de l'Etat, c'est simplement une volonté d'avoir un Etat responsable et qui cherche à agir pour limiter la casse. L'Etat doit en effet prendre langue avec le secteur privé pour trouver et mettre en place des plans sociaux permettant d'éviter ces licenciements. Je crois que c'est justement ce que propose cet amendement, même si j'émets un petit doute sur la deuxième invite concernant les prestations - je ne suis pas complètement certain de l'utilité d'agir à ce niveau en ce qui concerne l'Etat.

En parlant d'emploi, je ne peux quand même pas m'empêcher de faire part de la grogne, vraiment, que j'ai intérieurement vis-à-vis de Credit Suisse; je pense que je dois la mentionner. Quand je me suis engagé en politique, dans les années 2009, 2010, avec la jeunesse socialiste, on parlait de l'initiative 1:12, pour laquelle on récoltait des signatures. Cette dernière, déposée au niveau fédéral, visait à limiter les écarts salariaux de façon à ce qu'au sein d'une même entreprise, le plus haut salaire ne soit pas plus de douze fois plus élevé que le salaire le plus bas.

Je me rappelle très bien qu'à l'époque, le salaire du grand dirigeant de Credit Suisse, Brady Dougan, était 1812 fois plus élevé que le salaire le plus bas au sein de l'établissement. Quand on débattait de ces questions, j'entendais - je suis désolé de le dire - de la part des bancs de la droite: «Oui, mais il s'agit de responsabilités. Quand des personnes ont de telles responsabilités, le salaire doit être équivalent.» Eh bien des années après, alors que je me suis investi sur les objets en lien avec ces écarts salariaux indignes et que j'assiste à la débâcle d'une aussi grande banque, d'un aussi grand employeur, je me demande comment il a été possible de légitimer ces fameuses responsabilités, car il n'y a eu aucune responsabilité de la part des dirigeants de Credit Suisse ! (Applaudissements.)

M. François Baertschi (MCG). J'abonde dans le sens de ce que vient de dire mon préopinant: c'est vrai que la débâcle du Credit Suisse a été une véritable catastrophe pour notre pays. Nous sommes, en tant que parlement cantonal, légitimés à intervenir sur ce sujet. Pourquoi ? Parce que les contribuables genevois, comme tous les autres contribuables suisses, ont donné des cautions qui se montent à des centaines de milliards de francs. Des montants considérables ont été réservés, et même si tout cet argent n'a pas été dépensé en tant que tel, il était bien présent, c'est donc quand même une responsabilité. Les contribuables suisses et genevois auraient pu perdre ces montants. Cela nous donne certains droits, peut-être même aussi certains devoirs auprès des contribuables que nous devons représenter dans cette enceinte.

Ces droits et ces devoirs, c'est quoi ? C'est d'avoir des exigences: «Nous vous avons soutenus dans les moments difficiles. Ok, c'est bien, mais vous nous devez la réciproque. Et la réciproque, c'est quoi ? Je n'ose pas dire que vous nous donniez des gages, mais en tout cas qu'un dialogue se fasse avec le canton, qu'il soit fructueux et qu'il se développe même si nous nous trouvons des années plus tard.» Parce que c'est trop facile de recevoir des garanties, si ce n'est de l'argent cash dans les caisses, car malgré tout, c'est ce qui a permis à Credit Suisse et à la place financière de ne pas sombrer. Nous sommes donc quand même légitimés à en discuter et à instaurer des négociations avec un gouvernement cantonal comme celui de Genève, où nous avons une place financière importante, comme cela a été indiqué par un préopinant.

Dans un premier temps, j'avais reformulé les invites, parce qu'il est vrai qu'elles n'étaient plus du tout d'actualité. J'avais préparé cet amendement, mais je le retire. Avec mon collègue Pierre Eckert, nous avons déposé un autre amendement que nous vous demandons de soutenir. Il vous a été présenté par le rapporteur de minorité et vous a été distribué. Je vous demande vraiment de le soutenir. C'est véritablement une politesse que nous demandons à Credit Suisse: «Nous - Genève, la Suisse - avons été sympas avec vous; en retour, vous avez des obligations.» Comme le disait mon préopinant, une forme d'arrogance de certains managers de Credit Suisse doit sans doute disparaître. Maintenant, ce qu'il faut, c'est avoir une approche beaucoup plus amicale et citoyenne sur ces questions. Merci, Monsieur le président.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. En introduction, j'ai dit ce que je pensais de la débâcle de Credit Suisse - vous n'étiez pas tous là, mais vous relirez le Mémorial. J'ai parlé essentiellement d'une économie de casino; on n'y reviendra pas.

La fusion n'est pas encore totalement actée, les enseignes de Credit Suisse existent toujours. Je vois tous les jours en passant à la place Bel-Air qu'on est en train de déménager probablement les meubles qui se trouvent dans le siège de Credit Suisse à cet endroit-là. J'espère qu'on ne déménage pas trop le personnel qui va avec, mais c'est vrai que cette situation n'est pas encore totalement actée - je ne sais pas du tout ce que ça va donner notamment quant aux emplois, mais même quant au nombre de succursales qui vont encore exister. Bien entendu, il ne restera pas partout deux agences de Credit Suisse et d'UBS.

Ce que je voulais aussi dire par rapport à la deuxième invite que nous avons reformulée, c'est qu'il va finalement rester une grande banque à Genève. Alors pour les clients privés, je ne sais pas ce qu'ils vont pouvoir faire. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Mais pour les PME, il n'y aura plus qu'une banque. Vous pouvez bien dire qu'elles peuvent essayer d'aller à la Raiffeisen, à la BCGE ou je ne sais où, mais comme à droite vous aimez bien les situations de concurrence, il faut bien se rendre compte qu'il y en aura beaucoup moins. D'un point de vue purement économique, je pense que ça peut nous donner du souci.

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Pierre Eckert. Je vous remercie donc de soutenir l'amendement et la motion.

Le président. La parole est au rapporteur de majorité.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement...

Le président. Il vous reste quatorze secondes.

M. André Pfeffer. ...la débâcle du Credit Suisse a été un choc pour nous tous, de la gauche à la droite. Evidemment, tout le monde déplore cette catastrophe, mais pour revenir à cette motion, qui demande une intervention au Conseil d'Etat quasiment huit mois après les événements, il faut rappeler que le gouvernement a déjà effectué toutes ces démarches. Je crois même qu'il faut le remercier pour la manière dont il est intervenu juste après cette débâcle.

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le périmètre d'action du Conseil d'Etat quant à la débâcle du Credit Suisse est ce qu'il est. Je me contenterai donc de vous rappeler ce que nous avons mis en place et qui relève effectivement de notre responsabilité. Dès l'annonce de ce rachat par le Conseil fédéral, un groupe de travail au niveau genevois a été lancé par les milieux concernés, que ce soit Genève Place financière ou la FER, mais aussi un certain nombre de personnes de mes offices, afin d'avoir un échange sur les conséquences pour Genève, tout particulièrement dans le domaine de l'emploi.

Toute une réflexion a été menée. Je rappelle que le nombre de postes concernés devrait être de 1700, dont 80% concernent le front office. Mais Genève, dans cette débâcle et ce malheur, reste un canton qui sera relativement épargné comparativement à d'autres, on peut penser à Zurich.

En l'état, nous ne disposons pas d'informations plus précises qui nous permettraient d'avoir une action ciblée. On sait que cela se fera autant que possible via des départs naturels, des départs à la retraite. Nous participons également au groupe de travail et de suivi mis en place par la Confédération. A ce stade, l'ensemble des membres du groupe de travail estime qu'il n'y a pas matière à intervenir de manière préventive. Par contre, nous suivrons attentivement la situation; les personnes qui participent à ces réflexions ont clairement exprimé qu'elles estimaient que le secteur, important pour Genève et son développement, serait à même d'absorber le choc issu de cette crise du Credit Suisse.

Voilà ce que je peux vous dire. Mon département continue à suivre attentivement la situation au sein de ces groupes de travail, tant au niveau fédéral que cantonal. Si cela est nécessaire - et nous ne l'espérons évidemment pas -, nous prendrons toutes les mesures qui s'imposent pour assurer l'employabilité des personnes qui pourraient être touchées. Je vous invite donc à refuser ce texte. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons tout d'abord sur l'amendement général de MM. Pierre Eckert et François Baertschi, dont la teneur est la suivante:

«invite le Conseil d'Etat

- à intervenir auprès de l'UBS pour limiter au maximum les licenciements du personnel suite à l'absorption du Credit Suisse et, si ces licenciements étaient inévitables, à mettre en place un plan social;

- à intervenir auprès de l'UBS pour ne pas affaiblir les prestations existantes pour les PME locales;

- à intervenir auprès du Conseil fédéral pour qu'il demande à l'UBS de respecter les mêmes exigences que ci-dessus.»

Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 47 non contre 42 oui.

Mise aux voix, la proposition de motion 2926 est rejetée par 44 non contre 29 oui et 14 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

M 2932-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Jean-Louis Fazio, Vincent Canonica, Laurent Seydoux, Djawed Sangdel, Masha Alimi, Jacques Jeannerat, Francisco Taboada, Raphaël Dunand, Stefan Balaban pour pérenniser l'existence des entreprises genevoises
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 14 et 15 décembre 2023.
Rapport de majorité de M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve)
Rapport de première minorité de M. François Baertschi (MCG)
Rapport de deuxième minorité de M. André Pfeffer (UDC)
Rapport de troisième minorité de M. Vincent Canonica (LJS)

Débat

Le président. Nous poursuivons nos travaux avec la M 2932-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Nicolet-dit-Félix.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais laisser mes collègues prendre place avant d'admettre que j'ai été hier un petit peu sarcastique quand j'ai comparé certaines motivations à des personnages de dessin animé. Il faut dire qu'en procédant à une lecture peu attentive, on aurait pu imaginer ranger ce texte dans cette catégorie-là, car il est sans doute un peu maladroit. En fait, il n'en est rien. Cette maladresse résulte plutôt du désarroi incontestable dans lequel les entreprises suisses, et genevoises en particulier vu que nous sommes dans ce canton, se sont retrouvées au printemps 2023, lorsque la Confédération a annoncé de façon unilatérale, brutale, rapide que les prêts covid vendus avec un intérêt de 0%, on va dire, donc sans intérêt, du moins pour la tranche allant jusqu'à 500 000 francs, seraient soumis à un intérêt, certes modeste, de 1,5% avec une échéance de moins d'un mois. Il est parfaitement compréhensible, je crois que la commission l'a tout de suite relevé, que les entreprises qui se sont retrouvées face à cette annonce, alors que certaines d'entre elles cumulaient toute une série de difficultés liées à la période post-covid ou à d'autres circonstances, n'aient pas du tout apprécié cela.

Vous vous le rappelez sans doute, nous avons été saisis de cette motion que le groupe LJS avait souhaité faire passer en urgence. Elle demande à l'Etat, via la loi sur l'aide aux entreprises et la Fondation d'aide aux entreprises, de cautionner ces prêts covid, plus précisément de cautionner les intérêts que ces entreprises devaient désormais honorer sur les prêts covid.

Nous avons auditionné l'auteur de cet objet et la Fondation d'aide aux entreprises, et nous avons réalisé - nous le supposions évidemment auparavant - que cet outil n'était pas adéquat: comme vous le savez, Mesdames et Messieurs, un cautionnement ne génère pas de liquidités et ne peut porter que sur un emprunt d'une somme assez importante. Or, sur les 1366 millions de prêts covid octroyés à des entreprises genevoises, environ la moitié (un petit peu plus) a été remboursée et le prêt moyen est d'environ 100 000 francs. Des intérêts à 1,5% sur des montants de 100 000 francs représentaient, à l'époque, 1542 francs; le chiffre nous avait été donné par la FAE et a légèrement évolué entre-temps, il est passé un peu en dessous de 1500 francs, mais on se retrouve dans la même tranche de valeur.

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. On imagine évidemment mal une entreprise contracter un emprunt pour 1500 francs et demander le cautionnement de cet emprunt.

Par la suite, nous avons reçu plusieurs amendements, dont un de l'auteur de cette motion. Il était très problématique, parce qu'il introduisait une automaticité de l'aide de la FAE à ces entreprises et qu'il posait comme conditions d'obtention de cette aide des critères s'étendant largement au-delà de la problématique du covid et pas clairs du tout. Nous avons reçu un autre amendement par l'intermédiaire du rapport de minorité de M. Pfeffer, qui vous l'expliquera tout à l'heure; il est d'ordre extrêmement général. Nous venons de recevoir un troisième amendement qui se calque sur le premier, mais dont le principe d'automaticité est retiré, si j'ai bien compris, et dans lequel est par contre maintenu le problème des critères d'application. A notre sens, tous les trois sont à refuser, ne serait-ce que parce qu'ils dénaturent le sens premier de cette motion, qu'ils ne sont plus en phase avec les considérants et transforment le travail en une sorte de patchwork sans véritable sens.

Pour ces raisons, la majorité de la commission vous invite à refuser cet objet et ces amendements, et invite les personnes qui souhaiteraient se relancer dans ce travail de soutien aux entreprises, qui peuvent légitimement demander de l'aide de l'Etat à la suite de la hausse de ces intérêts et d'autres déconvenues, de repartir sur de nouveaux textes. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. C'est vrai que c'est une affaire très délicate. Ces prêts covid sont un peu comme le sparadrap du capitaine Haddock: on ne sait ni comment s'en débarrasser ni comment résoudre le problème. Pour avoir contracté ces prêts covid, de nombreuses PME genevoises se retrouvent en difficulté. En outre, la Confédération a brutalement remonté les taux d'intérêt. Des chefs de petites entreprises se retrouvent en grande difficulté, ont trouvé des solutions avec les prêts covid et maintenant doivent régler des montants de manière précipitée.

Pour sortir de cette impasse, pour donner une réponse à de nombreuses entreprises, une solution a été présentée dans cette motion; elle a été étudiée en commission, ainsi que divers amendements, afin d'améliorer quelque chose de problématique à la base, d'améliorer une affaire pour laquelle il faut trouver la solution. C'est dans cette optique que nous avons travaillé en commission, que nous avons essayé de défendre les intérêts de ces petites entreprises genevoises, pour leur permettre de rester la tête hors de l'eau. Pour ces raisons, la première minorité vous demande de soutenir cette motion telle qu'amendée.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Il faut rappeler les faits. Premièrement, les crédits covid accordés étaient d'une absolue nécessité et ont réellement permis à de très, très nombreuses PME de survivre. Je crois que sur ce point-là, il y a consensus. La légitimité de ces prêts fait certainement aussi consensus. Il faut également rappeler que les difficultés dans lesquelles nos PME se sont trouvées étaient tout simplement dues à l'interdiction de travailler décrétée par l'Etat. Selon moi, ces deux points font l'unanimité chez les députés.

La Confédération avait accordé des crédits covid sur la base de 10% du chiffre d'affaires pour une durée de huit ans et, dans un premier temps, avec 0% d'intérêt. Par la suite, le 1er avril 2023, les taux des prêts allant jusqu'à 500 000 francs ont augmenté de 0% à 1,5%, et pour les plus grandes sociétés - on n'en parle pas vraiment ici - ils ont même monté à 2%. Quel est l'impact à Genève ? A Genève, presque 11 000 PME ont sollicité ces crédits covid (10 908, exactement), pour un montant global de 1,3 milliard, ce qui fait des prêts de 125 000 francs en moyenne; c'est donc relativement faible. La hausse du taux de 0 à 1,5% représente à peu près 1800 francs par entreprise et par année. C'est un élément important !

En tant que rapporteur de deuxième minorité, je propose dans mon rapport de changer l'invite, parce que, selon ma lecture, elle était écrite de telle manière que l'on soutiendrait les entreprises en raison de l'augmentation du taux. On parle uniquement d'environ 1800 francs par année. Je recommande de modifier l'invite pour que toutes les charges des PME, y compris le remboursement, soient incluses. S'il faut rembourser 125 000 francs sur une période de sept ou huit ans... Vous devez rembourser à peu près 16 000 à 20 000 francs, plus les intérêts.

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. André Pfeffer. Merci. A mon avis, l'invite doit être changée pour que soit incluse la totalité des frais.

Il faut également rappeler que l'aide de l'Etat genevois existe déjà. Le Grand Conseil avait alloué à la Fondation d'aide aux entreprises une somme de 50 millions de francs pour, je cite, «une aide supplémentaire en faveur de nos PME locales». Vu que seule la moitié a été utilisée, il reste 25 millions à disposition. Le Conseil d'Etat nous le confirmera peut-être.

Pour terminer, le rapporteur de deuxième minorité, fort d'un tout petit soutien, d'un petit oui - un commissaire de notre groupe s'était en effet abstenu alors que j'avais soutenu cet objet - vous propose d'accepter cet objet. Merci de votre attention.

M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de troisième minorité. Les commissaires ont unanimement admis l'importance du problème, mais ont suggéré une reformulation des invites. Je rappelle qu'en commission, lors d'un échange entre commissaires, l'audition de la FAE, de la NODE, de la BCGE et de la CCIG a été évoquée. La motion a ensuite été suspendue. La question de l'audition de la NODE, de la BCGE et de la CCIG a été reportée et finalement jamais votée. Seule l'audition de la FAE a été acceptée; la fondation a donc été entendue. La motion a été mise au vote sans que l'on revienne sur les demandes d'audition de la NODE, de la CCIG et de la BCGE.

Certains commissaires ont regretté le refus de la première invite de la motion amendée et un autre commissaire a suggéré un nouveau texte pour traiter de la problématique. Il est indéniable que le sujet interpelle tous les commissaires, mais que le fond n'a en définitive pas été abordé. Au détriment des entreprises genevoises, de nombreuses questions sont restées sans réponse. Lors d'une séance ultérieure de la commission, il a été relevé que le décompte des votes sur la première invite de la motion amendée était erroné; en réalité, la majorité l'avait acceptée, mais ni nouveau vote sur la motion amendée dans son intégralité ni nouvelle discussion n'ont pourtant eu lieu.

Je vous rappelle également la Q 3955-A, dont il ressort que sur la totalité des prêts covid octroyés pendant la pandémie dans le canton de Genève, le montant encore dû en octobre 2023 restait très élevé, car seuls 44% des prêts avaient été remboursés. Vous avez indiqué les montants, je parle en proportion pour ne pas répéter ce que vous avez déjà dit, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité. Il en est de même s'agissant des prêts octroyés par la FAE.

Si l'on reprend les données fédérales, on remarque que certaines branches d'activité sont beaucoup plus touchées que d'autres. Pour s'en convaincre, il suffit de constater que la restauration n'a pu entièrement rembourser que 32% des sommes prêtées à la fin du mois d'octobre 2023, alors que d'autres branches, comme des activités pour la santé humaine, ont pu rembourser jusqu'à 62%.

Pour ces motifs, j'ai soumis le nouvel amendement que je propose à votre vote, et je tiens à préciser que la deuxième invite, qui a été reformulée pour tenir compte des remarques des commissaires...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Vincent Canonica. ...tient compte également de ce qui se fait au niveau européen. Un article de la presse locale, qui date du 5 septembre 2024, indique que de plus en plus, les pays européens soutiennent l'économie de leur pays, ce qui n'est pas le cas de la Suisse; les Etats membres aident le secteur privé dans des domaines aussi variés que la culture, les effets de la pandémie du covid, la guerre en Ukraine, la transition énergétique ou le développement de régions moins favorisées. On voit donc bien que des mesures européennes viennent contrer les effets post-covid, de nouveaux effets, qui péjorent l'économie locale. Il faut donc vraiment inciter le Conseil d'Etat à prendre des mesures pour soutenir l'économie locale, que ce soit s'agissant des effets post-covid ou de nouvelles situations qui dégradent l'économie locale en corrélation avec ce qui se passe en Europe. Pour ces raisons, je vous recommande de voter les amendements que je vous ai soumis. Merci, Monsieur le président.

Mme Sophie Demaurex (S). Mesdames et Messieurs les députés, la commission de l'économie a traité avec sérieux et intérêt - c'est le cas de le dire - la question du cautionnement des intérêts des prêts covid alloués aux entreprises. Alors qu'on soit clairs ! Il ne s'agit pas de s'opposer à un soutien aux entreprises, comme essaient de l'insinuer les rapporteurs de minorité. Oui, la commission a été sensible et interpellée par la situation financière de ces entreprises après la crise covid, mais, pendant son audition, le département nous a assuré examiner au cas par cas les situations post-covid de ces entreprises en difficulté. Or, ce texte demande une automaticité des aides, mais ce n'est pas la bonne cible. C'est la raison pour laquelle il faut le refuser. Nous vous invitons également à refuser les amendements du député Canonica, car ceux-ci s'écartent de la question des intérêts aux prêts covid. Essayer par tous les moyens de sauver cette motion n'a pas d'intérêt. Le travail a été fait, et le département complétera certainement les propos très clairs du rapporteur de majorité. Aussi, nous vous remercions de refuser ce texte et les amendements.

Le président. Merci bien. Je donne la parole à M. Fazio, qui dispose de deux minutes.

M. Jean-Louis Fazio (LJS). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce texte demande d'aider les PME qui ont contracté un prêt covid pour passer le cap du confinement, cela afin de verser des salaires et de sauver des emplois, donc de donner une chance de survie à des entreprises contraintes d'arrêter de travailler, comme cela a été dit. Pour certaines d'entre elles, avec la hausse du prix des matières premières, la crise énergétique et d'autres charges diverses qui se sont greffées, les remboursements des échéances sont devenus insupportables. Les faillites ont secoué les PME et d'autres sont hélas en vue; ce sont les conséquences de ces aléas.

C'est pourquoi, par cette motion et les amendements du député Canonica, nous demandons que le Conseil d'Etat prenne enfin ses responsabilités et qu'il trouve des solutions pour aider ces entreprises à passer ce cap qui peut leur être fatal. Chères et chers collègues, ce pays a dégagé à maintes reprises des milliards pour sauver de très grandes entreprises mondialement connues (Swissair, Credit Suisse, UBS), et je m'en réjouis. Il est donc temps de penser davantage à la survie de nos PME genevoises. Merci de votre attention.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, à deux reprises durant cette session, on a parlé de dessin animé ou de bande dessinée. Je suis un amateur de bandes dessinées et ce que je préfère, dans ces volumes, c'est par exemple la ligne claire telle qu'initiée par Hergé, Jacobs ou Schuiten, qui ont réalisé de véritables petits chefs-d'oeuvre. Cet objet et les différents amendements qui nous sont proposés ce soir n'ont rien d'une ligne claire. Nous l'avons déjà affirmé pendant les travaux en commission et je réitère cette affirmation pendant les travaux en plénière. Je fais aussi remarquer que nous avons voté hier aux deux tiers de la majorité une urgence qui concernait le même thème. Compte tenu de ces aspects, je vous recommande de refuser les amendements ainsi que la motion. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. (Un téléphone sonne.) Je prie la personne qui a le téléphone de bien vouloir le mettre sur... Merci ! Monsieur Béné, c'est à vous.

M. Jacques Béné (PLR). Merci, Monsieur le président. C'est un petit peu problématique, parce que sur le fond, on peut être d'accord avec cette motion, compte tenu de ce que la Confédération a fait: elle a annoncé ça très rapidement et avec un délai pour se retourner très, très court fixé aux entreprises concernées. Il est évident que ce n'est pas en deux jours qu'on lève des fonds pour rembourser un prêt, prêt dont les intérêts qu'on va nous demander sont estimés trop élevés. Maintenant, toutes les entreprises qui ont signé ces contrats de prêt savaient très clairement qu'il existait une clause stipulant qu'à terme, des intérêts devraient être payés.

Le problème de cette motion, c'est qu'initialement, elle visait un cautionnement pour le paiement de ces intérêts. Voilà l'objectif du texte. On s'est rendu compte qu'il n'était pas possible de cautionner le paiement des intérêts. Qu'est-ce qu'on a alors fait ? On a dit: «On veut aider les entreprises, il faut donc trouver autre chose ! Qu'est-ce qu'on fait ? On propose des amendements ! Toutes les entreprises qui ont subi le covid et ont demandé des prêts, il faut quand même les aider ! Et comment fait-on pour celles qui n'ont pas demandé de prêt ? C'est quand même un problème ! Alors on va demander à la FAE de regarder si elle ne peut pas faire quelque chose.» Franchement, c'est du bricolage !

On ne peut pas accepter une distorsion de concurrence engendrée par le fait d'arroser ceux qui ont bénéficié d'aide au détriment de ceux qui n'en ont pas bénéficié parce qu'ils ont fait des efforts ou de ceux qui ont remboursé ces prêts. Malheureusement, même si on peut effectivement critiquer l'attitude de la Confédération dans ce dossier, il n'y a strictement aucune raison, aucun intérêt public à subventionner des entreprises qui auraient bénéficié de certaines aides pendant le covid. Je vous invite à refuser non seulement les amendements mais aussi ce texte.

M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, l'Union démocratique du centre est évidemment acquise à la cause des PME genevoises et souhaite, une fois de plus, soutenir et aider à pérenniser la santé financière des artisans, entrepreneurs et petits commerçants qui ont subi de plein fouet la crise covid et qui, afin de survivre, ont dû contracter un prêt covid initialement prévu avec un taux zéro, je le rappelle et comme l'a rappelé l'excellent rapporteur de minorité numéro deux. Il est peut-être important de se souvenir qu'à ce moment précis, il n'était aucunement question de facturer des intérêts, mais bel et bien de fournir une aide durable aux entreprises qui en avaient besoin.

A la sortie de la crise, ce fut la douche froide lorsque le Conseil fédéral décréta finalement qu'il fallait facturer cette prétendue prestation d'aide aux entreprises, imposant ainsi des frais parfois conséquents à une population captive, qui dut se résoudre à payer ces charges supplémentaires.

En outre, on peut se poser la question du comment du pourquoi: pourquoi le Conseil fédéral, par le biais de la BNS, décide-t-il d'abaisser le taux directeur du franc suisse qui, je le rappelle, est à 1% depuis la semaine dernière, taux qui correspond à la rémunération octroyée aux déposants de cette institution, tandis qu'il décide de facturer le double aux entreprises dans la panade qui ont contracté un prêt covid ? Ceci revient donc à dire que la Confédération ne souhaite pas seulement couvrir son coût de refinancement, mais aussi et avant tout faire de l'argent sur les commerçants déjà durement touchés par la crise.

Mesdames et Messieurs les députés, au vu de tous les éléments précédemment relevés, le groupe de l'Union démocratique du centre vous invite à soutenir nos PME en acceptant cette motion telle qu'amendée par mon éminent collègue Pfeffer. Merci.

Mme Ana Roch (MCG). Je souhaite corriger certains éléments évoqués dans ce parlement. Pour rappel, ces intérêts vont dans la poche des banques et non dans celle de la Confédération. On a octroyé ces prêts covid, mais je crois qu'on oublie à quel moment ça a été fait et dans quelles conditions. Le monde s'était arrêté de tourner, on ne savait pas si nos entreprises allaient rouvrir et si on allait survivre à cette crise. Je pense que les entreprises qui ont décidé de solliciter ce prêt covid ne l'ont pas fait par envie mais par nécessité. On nous avait promis, à nous et à beaucoup d'entreprises, une aide pour nos loyers et nos charges, chose qui n'a jamais été faite.

Je rappelle que ces intérêts vont dans la poche des banques et que les modalités de remboursement ont été décidées unilatéralement: dans les dispositions fédérales sur le prêt covid, la manière de rembourser ne figure pas, seulement une date butoir. On n'a jamais demandé à ces entreprises comment elles allaient faire pour rembourser et si les modalités qui leur ont été imposées leur convenaient. Aujourd'hui, le dialogue avec les banques, c'est zéro ! On doit se tourner vers le cautionnement romand, qui nous renvoie à la banque. On n'a absolument aucun moyen pour discuter en cas de difficulté.

Je crois qu'on se doit de soutenir ces entreprises, et je suis ravie - vous transmettrez à M. Béné - que certaines entreprises n'en aient pas eu besoin ou aient pu le rembourser. Je suis ravie de savoir que ces entreprises continuent à travailler et à employer. Néanmoins, il y en a qui aujourd'hui n'y arrivent plus ! Pas seulement en raison des prêts covid, mais aussi en raison d'une situation économique post-covid difficile ! On verra l'année prochaine quels problèmes pour nos entreprises la nouvelle loi va générer. On se doit de les soutenir sans réserve ! Merci.

Le président. Je vous remercie. C'est au tour de M. Canonica, à qui il reste trente-neuf secondes.

M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de troisième minorité. Merci, Monsieur le président. Je serai donc rapide. Je précise que toutes les entreprises n'ont pas été touchées de la même manière et que certaines le sont plus que d'autres. Les amendements que je propose visent justement à adapter les aides octroyées aux entreprises qui continuent à être plus touchées que d'autres. Ça ne va que dans le sens de la motion que le Grand Conseil a votée hier; voter aujourd'hui différemment reviendrait à avoir une attitude contradictoire et le message ne serait pas bien perçu par les commerçants. Je vous invite à voter l'amendement que je vous ai soumis.

Le président. Merci bien. Je donne la parole à M. Pfeffer pour neuf secondes.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. L'utilité et la légitimité des crédits covid sont indiscutables. La question est la suivante: y a-t-il encore des PME qui ont des difficultés à rembourser ? Oui !

Le président. Merci.

M. André Pfeffer. L'excellent rapporteur n° 3... (L'orateur rit.) ...l'a relevé...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. André Pfeffer. ...dans le secteur de la restauration, 66%... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro.) Je retire mon amendement et soutiendrai celui du rapporteur n° 3.

Le président. La parole revient à M. Baertschi, à qui il reste une minute vingt-quatre.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Alors c'est vrai qu'il y a un peu quelque chose de surréaliste, entre le débat qu'on a eu tout à l'heure sur Credit Suisse... On se rend compte qu'on a un peu jonglé avec des centaines de milliards de francs; ce n'était certes pas du cash, mais il s'agissait quand même de moyens conséquents. Néanmoins, quand il s'agit de petites PME locales, certains dans cet hémicycle sont d'une rigueur et d'une fermeté qu'on aurait bien voulu voir dans d'autres cas. Cette rigueur vis-à-vis des petits... Je pense que nous devons éprouver un peu de bienveillance. C'est la raison pour laquelle la première minorité soutiendra l'amendement du député Canonica et, bien évidemment, la motion telle qu'amendée, si l'amendement est accepté. Même si celui-ci est refusé, nous voterons ce texte, parce que nous voulons envoyer un signal fort non seulement aux PME genevoises, mais également à leurs employés. Nous le voterons pour qu'on puisse encore créer une substance économique, pas seulement avec les grands groupes, avec les grands trusts, avec certains secteurs qui ramènent beaucoup de cash à Genève...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. François Baertschi. Merci beaucoup, Monsieur le président. ...pas seulement avec ces milieux-là, mais aussi avec ces petites entreprises qui font toute la richesse de notre tissu social et économique. Il faut les aider, et ce, avec cette motion telle qu'amendée.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède le micro au rapporteur de majorité, M. Nicolet-dit-Félix.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je vous remercie déjà de m'accorder quelques secondes de plus, vu que je suis seul face à trois ténors de ce parlement. (Exclamations.)

Je souligne quelques éléments sur le fond et sur la forme. Sur le fond, nous l'avons dit, l'outil proposé dans la version originale de ce texte pose des problèmes. Pour cette raison, elle n'est juste pas recevable. Je n'ai pas tout à fait compris quelle version de quel amendement est retirée, maintenue, ni quelle version M. Dugerdil propose de soutenir avec un amendement que l'auteur a fini par retirer. On se retrouve avec au mieux une motion qui, pour reprendre une expression commune, ne mange pas de pain et qui, en gros, demande à la FAE de faire son boulot, c'est-à-dire de soutenir les entreprises en difficulté avec les outils que la loi sur l'aide aux entreprises lui donne. Dans ce sens-là, pourquoi pas ? Mais à force de dire aux gens de faire le travail qu'ils font déjà sans qu'on le leur dise, on se demande quelle est l'utilité de ces textes.

Le problème relève surtout de la forme, ainsi que l'a très bien relevé M. Guinchard. On est face à une forme de palimpseste, ce texte mille fois effacé et réécrit pour le sauver, ou à ces couches de papyrus que l'on retrouve sur les sarcophages et sur lesquels on ne parvient plus à lire les hiéroglyphes. Pour reprendre la métaphore ou l'idée de M. Guinchard, on ne sait plus si on se trouve dans «Le Mystère de la grande pyramide» ou dans «Les Trois Formules du professeur Fazio». Pour ces raisons, il faut évidemment refuser les amendements et ce texte. Je vous remercie.

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais juste reprendre l'invite originale de cette motion, parce que les amendements proposés n'ont strictement plus rien à voir avec l'exposé des motifs et la situation évoquée. On demande que la FAE puisse cautionner des prêts bancaires auprès d'établissements pour que des PME remboursent les intérêts contractés auprès d'établissements bancaires et cautionnés par la Confédération. Ça veut dire qu'on veut permettre de cautionner des entreprises qui contractent des prêts bancaires pour rembourser les intérêts d'un autre prêt bancaire.

Alors j'entends, oui ! Je rencontre d'ailleurs régulièrement les PME dans mon bureau, et j'y suis particulièrement sensible; ma porte leur est toujours ouverte. Toutefois, à un moment donné, laisser une entreprise s'endetter pour qu'elle rembourse une autre dette... Le problème n'est pas là ! Le problème réside dans la pérennité du modèle d'affaires de certaines de ces entreprises. En raison des transformations du monde dans lequel nous vivons, certains modèles n'arrivent plus à survivre et doivent se transformer, c'est vrai. J'aimerais rappeler que l'action du Conseil d'Etat, et de mon département en particulier, vise à accompagner les entreprises dans ces transformations pour qu'elles restent performantes malgré ça. Il est néanmoins illusoire de penser qu'une entreprise qui ne peut pas assumer une hausse de taux d'intérêt... Franchement, comme vous, j'ai été scandalisée par le fait que... Mais enfin, on parle d'établissements bancaires privés qui ont augmenté des taux d'intérêt ainsi que c'était légalement prévu dans un contrat. Ma marge de manoeuvre dans ce domaine et celle de la Confédération sont extrêmement faibles. Une entreprise qui ne peut aujourd'hui pas assumer une augmentation d'intérêt d'une moyenne de 1800 francs par année et qui a besoin d'un prêt bancaire pour payer ses intérêts a probablement d'autres difficultés, des difficultés beaucoup plus structurelles que le simple remboursement d'intérêt. A partir de là, on peut choisir de basculer dans une attitude qui consisterait à dire: «Il faut soutenir les entreprises, soutenir les PME.» Mais arrêtons de nous voiler la face ! Une entreprise qui ne peut pas assumer cette hausse d'intérêt a d'autres problèmes !

Oui, l'action de mon département vise à les soutenir ! Oui, le dispositif de soutien aux entreprises, à savoir la FAE, peut être là pour accompagner certaines d'entre elles ! L'invite initiale de ce texte ne permettra cependant en aucun cas de le faire. Oui, soutenir les entreprises ! Oui, accompagner les PME !

J'ai entendu la critique suivante: il faut arrêter de soutenir les grandes sociétés. Pour mémoire, 1 ETP dans une multinationale correspond à 1,5 ETP dans les PME locales. Je rappelle aussi ce que j'ai déjà dit avant: on met en place des campagnes de promotion, de soutien de nos PME locales au quotidien. Or, en l'occurrence, je pense qu'on a une vraie action, parce qu'on leur crée de l'activité; ces entreprises ne demandent qu'à travailler !

Maintenant, concernant les amendements, j'ai entendu tout à l'heure que l'Europe... Oui, c'est vrai, des pays en Europe mettent en place une politique industrielle, financent des entreprises, mais actuellement, ce n'est pas le choix de la Suisse. Il pourrait être questionné et je suis tout à fait disposée à discuter de la politique industrielle, mais vous demandez que le Conseil d'Etat subventionne des entreprises - la discussion a eu lieu en commission. Il faudra alors m'expliquer sur quels critères on se base pour éviter la distorsion de concurrence. On nous demande presque d'accorder des dons à des entreprises en difficulté. Malheureusement, ce n'est pas notre rôle ! Si le parlement souhaite accorder cette compétence au Conseil d'Etat, vous en avez toute la liberté par la rédaction d'une base légale, mais je pense qu'on perdrait du sens, parce qu'une entreprise qui a besoin d'un subventionnement étatique pour survivre n'est probablement pas viable à terme. Il vaut donc mieux l'accompagner dans ses difficultés structurelles pour qu'elle s'en sorte, plutôt que simplement, je dirais, distribuer de l'argent sans un objectif derrière.

Si l'on veut rediscuter de politique industrielle, si l'on veut rediscuter... On mentionnait l'idée que la FAE devrait pouvoir octroyer des prêts, mais ce n'est aujourd'hui pas forcément son domaine d'expertise. On évoquait le fait qu'il faudrait aider les entreprises à faire face à des hausses de charges d'électricité. Ok ! Sur quelles bases ? On peut discuter de tout ça, mais ce n'est pas le sujet initial de cette motion. En outre, je pense que l'invite très précise qui a été déposée ne permet malheureusement pas de répondre aux entreprises en difficulté.

Vous avez cependant l'assurance non seulement de la préoccupation du Conseil d'Etat à cet égard, mais aussi que mon département travaille au quotidien avec les équipes pour soutenir les entreprises concernées. Je vous remercie donc de refuser ce texte.

Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement de M. Vincent Canonica que vous avez toutes et tous reçu; il vise à remplacer l'invite unique par les deux invites suivantes:

«- à étudier les mesures d'accompagnement supplémentaires à octroyer aux entreprises au bénéfice d'une aide financière en relation avec la période COVID octroyée par la Confédération, le canton et/ou la Fondation d'aide aux entreprises (FAE);

- à soutenir les entreprises au bénéfice d'une aide financière en relation avec la période COVID qui n'ont pas retrouvé le niveau d'affaires d'avant la crise COVID, et qui sont directement touchées par d'autres facteurs impactant leur trésorerie, notamment la hausse des coûts de l'énergie.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 33 oui et 18 abstentions.

Mise aux voix, la proposition de motion 2932 est rejetée par 40 non contre 32 oui et 20 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

M 2960-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Vincent Subilia, Yvan Zweifel, Murat-Julian Alder, Darius Azarpey, Thierry Oppikofer, Diane Barbier-Mueller, Alexandre de Senarclens, Celine van Till, Geoffray Sirolli pour un registre du commerce efficace et au service des administrés
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 2 et 3 mai 2024.
Rapport de majorité de M. Pierre Eckert (Ve)
Rapport de minorité de M. Yvan Zweifel (PLR)

Débat

Le président. Nous passons à la M 2960-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je précise qu'il s'agit du dernier objet relevant du département de l'économie et de l'emploi dans notre ordre du jour. Le rapport de minorité de M. Yvan Zweifel est repris par M. Vincent Subilia. Monsieur Pierre Eckert, vous avez la parole.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Bienvenue au rapporteur de minorité ad interim à cette table. Comme je sais qu'on ne peut pas tout miser sur notre physique - enfin, surtout moi... (Rires.) ...je vais essayer de rester factuel et de vous dire tout ce que nous pensons du registre du commerce.

Le registre du commerce est une banque de données dans laquelle sont contenues les principales informations sur les entreprises domiciliées dans le canton. Alors on y retrouve bien entendu des entreprises, des associations, parmi elles des petites et des grandes, ça peut aller d'une personne jusqu'à des multinationales. C'est donc une base de données relativement riche au sein de laquelle on peut s'inscrire pour pouvoir opérer dans le canton de Genève. C'est également un registre qu'on peut consulter.

Un certain nombre de critiques ont été faites. Nous avons examiné la motion qui nous est proposée en auditionnant l'auteur, la Chambre des notaires, le département ainsi que la CCIG. On a aussi auditionné EXPERTsuisse, qui nous a également fait part de ses observations.

Il se trouve que le dépôt de la motion a surtout été motivé par un événement qui s'est passé au registre du commerce l'été dernier, en 2023, avec un certain nombre de problèmes d'effectifs, qui ont en effet rendu la mise à disposition de ces services assez difficile.

Je ne vais pas vous lire l'entier des invites, mais je vais simplement vous expliquer pourquoi la majorité a refusé cette motion. En fait, on a remarqué que le terme de dysfonctionnements était largement excessif, même si quelques améliorations sont possibles. Je reviendrai peut-être après sur les recommandations. L'audition du DEE, de l'OCIRT et de la direction du registre du commerce a montré qu'ils étaient à l'écoute de toute doléance au sujet du fonctionnement du RC. Comme je l'ai dit tout à l'heure, l'été 2023 était particulier du fait du départ de trois des cinq juristes et de l'entrée en vigueur du nouveau droit fédéral sur la société anonyme. Le RC de Genève est souvent cité en exemple: les statistiques comparatives du nombre d'inscriptions par ETP et du temps de traitement sont très bonnes en comparaison intercantonale. Vous les trouvez dans l'annexe 3 de mon rapport.

Les procédures d'inscription au RC sont fortement cadrées par des bases fédérales strictes, constituées du code des obligations et de l'ordonnance sur le registre du commerce. Certaines de ces procédures peuvent être considérées comme un peu plus lourdes à Genève...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Pierre Eckert. Allez-y ! Euh, merci, Monsieur le président ! (Rires.) Mais cela provient de quelques abus constatés dans le cadre de la lutte contre le travail au noir, qui a rendu nécessaires des vérifications supplémentaires. Ensuite, la digitalisation est en marche. Contrairement à ce que demande la motion, c'est déjà en cours; la plupart des échanges sont effectués par e-mail et les possibilités de dépôt par e-démarches existent. Certains utilisateurs comme les notaires préfèrent toutefois encore le papier.

L'ordre des notaires est satisfait des prestations du RC; cas échéant, il dispose d'un comité de suivi permettant de traiter les diverses problématiques. Selon les notaires, la demande d'extraits en anglais est très faible, et il est facile de se tourner vers les traducteurs jurés, qui répondent rapidement aux demandes.

Je l'ai dit, comme il n'y a quand même pas tout qui fonctionne bien, j'émettrai une ou deux recommandations. Tout d'abord, il serait utile que les faîtières des fiduciaires et des entreprises organisent, comme c'est le cas pour les notaires, des réunions régulières de suivi et d'amélioration avec le RC, qui y est totalement ouvert. Par ailleurs, le site internet du RC pourrait être augmenté d'un certain nombre de procédures et formulaires mis à jour selon les dernières normes. Et j'ajouterai peut-être une remarque personnelle: je trouve que l'orientation client aux guichets du RC pourrait également être améliorée. C'est une autre recommandation que je pourrais inclure. Je m'arrête là, merci, Monsieur le président.

M. Vincent Subilia (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Moi aussi, je vais oublier que je n'ai aucune chance et je vais donc foncer en tant que rapporteur de minorité sur le texte qui vous est ici présenté. Dans les excellents propos qui viennent d'être tenus, je relève la notion de potentiel d'amélioration, qui figure d'ailleurs noir sur blanc dans le rapport, dans les propos des députés Verts.

Encore une fois, l'objectif qui nous a animés dans le cadre du dépôt de ce texte n'était certainement pas de clouer au pilori une administration dont chacun ici mesure aussi la qualité. En tant qu'administration, elle doit être au service du public, c'est son objectif et la nature même d'un service public. Sur la base des observations de terrain qui nous ont été adressées, en particulier à celui qui vous parle, on peut dire en l'état, si le terme de dysfonctionnement est probablement un peu excessif, que ce service connaît des difficultés. Ces dernières étaient circonstancielles, probablement imputables à une période difficile et générées par des absences - tout cela a été rappelé -, mais au-delà de ça, d'après les praticiens, et d'ailleurs certains de ceux qui ont été entendus le disent de façon extrêmement claire, le RC connaît un certain nombre de défaillances, dont on espère qu'elles ne sont que ponctuelles, mais qui ont une incidence extrêmement claire sur le fonctionnement des entreprises.

Parce que, comme cela a été rappelé, le registre du commerce, situé à un jet de pierres d'ici (c'est le cas de le dire vu qu'il se trouve à la rue du Puits-Saint-Pierre; puits sans fond !), incarne ce qu'on appelle le principe de la confiance. C'est-à-dire que c'est lui qui, dans le cadre de toute création ou modification de société - je ne vais pas vous faire un cours de droit des sociétés, d'ailleurs j'en serais incapable -, joue un rôle tout à fait déterminant et est l'interlocuteur des acteurs économiques. Une fois de plus - je le redis et je regrette de devoir le dire -, j'ai des exemples encore très récents de cas où des problèmes se posent; beaucoup de ceux qui ont des contacts avec le registre du commerce se plaignent de la façon dont leur cas est instruit. C'est imputable parfois à des lenteurs, ça peut l'être à des erreurs, ça peut l'être aussi, vous l'avez vous-même souligné, Monsieur le rapporteur de majorité, à cette orientation client qui vous est chère - elle me l'est également.

Oui, l'administration, pour laquelle nous payons des impôts dont je considère pour ma part qu'ils sont bien trop élevés - je lance ici un appel vibrant au vote le 24 novembre prochain -, doit être financée, mais le retour sur investissement doit être des prestations de qualité. Or, la qualité ne semble pas toujours être au rendez-vous, je ne dirais pas que c'est systématique. Encore une fois, l'objectif de ce texte était de constituer un incitatif à l'amélioration. Alors ensuite, les notaires viennent dire la bouche en coeur - j'ai beaucoup de respect pour cette profession - en substance: «Circulez, y a rien à voir.» Mais un grand nombre d'entre eux sont venus, de façon plus discrète, nous expliquer qu'ils n'enregistraient plus de sociétés à Genève et qu'ils préféraient le faire dans d'autres cantons...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Vincent Subilia. Je me permets d'abuser encore un instant. ...peut-être parce que les impôts y sont moins lourds, mais surtout parce que les services demandés leur sont délivrés avec le sourire et dans des temps sensiblement moins longs qu'à Genève. Je le redis, il y a ici un véritable déficit d'attractivité d'un service clé pour le monde de l'entrepreneuriat, notamment pour l'employeur que je représente ici. D'ailleurs, la Chambre de commerce est parfois confondue avec le registre du commerce; quand cela arrive, on s'empresse d'adresser les entreprises au registre du commerce, et certaines reviennent vers nous en disant qu'elles ont trouvé porte close. Il y a là à mon sens un vrai potentiel d'amélioration, qui est nécessaire, pour ne pas dire indispensable, pour nos acteurs économiques.

Alors évidemment, pour les notaires, il est un peu difficile de venir le dire, vu que c'est une profession réglementée. Ils sont aussi sous tutelle pour une partie de leur activité ministérielle. Il leur est donc difficile de critiquer les autorités et surtout la conseillère d'Etat chargée du dossier, qui fait par ailleurs un excellent travail, chacun en conviendra. On se retrouve donc dans une situation un peu compliquée.

Le constat qui est posé ici, c'est que le potentiel d'amélioration existe, comme dans tout type de service, mais peut-être de façon un peu plus prononcée. Et c'est à ce titre que j'accueille avec beaucoup de bienveillance, et je crois d'autres familles politiques avec moi, un amendement qui vous a été soumis par LJS et qui vise à supprimer notamment la première invite, qui, elle, faisait état de dysfonctionnements. Je conçois volontiers que le terme puisse être un peu excessif et s'il devait avoir heurté quiconque au sein de ce service, nous prions ces personnes d'accepter nos plus plates excuses. Mais nous tenons à identifier qu'il y a quand même ici probablement une difficulté. Il serait bon que cette motion soit instruite et acceptée avec cet amendement que LJS vous proposera dans un instant, de façon à ce qu'on s'assure que demain les entreprises du canton puissent continuer à être prospères en s'appuyant sur des services de qualité. C'est tout ce que nous souhaitons pour notre belle république. Je vous remercie de votre attention.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, oui, le PLR a cherché à planter le bâton au sein du registre du commerce, mais je crois que cette motion n'était pas le bon objet. Du reste, il aurait été préférable de déposer une question écrite à l'intention du Conseil d'Etat et d'obtenir ainsi les réponses souhaitées, puisque finalement, on a assisté, et c'était tout à fait intéressant, à un échange de questions-réponses entre quelques députés PLR et l'administration, et plus précisément le registre du commerce, sur certains cas particuliers qui manifestement entraînaient certains dysfonctionnements, il faut l'admettre, mais qui ont été parfaitement expliqués. Quelle était cette explication ? Eh bien que durant l'été 2023, sur les cinq juristes que possède le registre du commerce, trois avaient quitté le service. Naturellement, cela a entraîné un certain retard, le temps de repourvoir les postes.

Alors c'est vrai que ça a été l'occasion pour la commission de l'économie d'effectuer, on va dire, l'analyse du bon fonctionnement du registre du commerce. Vraisemblablement, ce service fonctionne. Nous avons pu relever différents éléments statistiques, aussi en comparaison intercantonale, qui nous ont notamment permis de constater que le registre du commerce genevois a le ratio entre le nombre de dossiers traités et le nombre de collaborateurs et collaboratrices le plus élevé de Suisse - c'est à saluer. Le temps d'attente de traitement des dossiers est particulièrement admirable; on parle d'environ cinq jours seulement, ce qui est quand même extrêmement court.

On relève quand même aussi - et c'est somme toute logique - une tutelle, on va dire, au niveau du droit, qui tient davantage de la Confédération que du canton, puisque le registre du commerce dépend avant tout du droit fédéral et non pas du droit cantonal. Il y a donc là aussi peu de moyens d'agir au niveau du canton par rapport à certains éléments d'efficacité, au-delà de la gestion du registre du commerce.

Et puis, finalement, s'agissant des retours des auditionnés, notamment des principaux - entre guillemets - «clients» du registre du commerce, des principaux utilisateurs, à savoir les notaires: nous avons en effet reçu la Chambre des notaires, qui s'est montrée particulièrement satisfaite à l'égard du registre du commerce.

Après ce travail d'analyse dont le résultat est quand même assez clair, il est ressorti des auditions que cette motion et ses différentes invites, même si l'amendement proposé vise à en supprimer deux, n'ont pas de raison d'être dans leur globalité. Il aurait été peut-être plus utile de simplement adresser une question écrite urgente au Conseil d'Etat, raison pour laquelle le groupe socialiste vous invite à refuser ce texte. (Applaudissements.)

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, lorsque nous avons commencé à traiter de cette motion à la commission de l'économie, j'étais un peu surpris, et je n'étais pas le seul, par son côté alarmiste, on peut le dire, qui a finalement contrasté avec la très grande retenue et la pondération de toutes les personnes que nous avons auditionnées par rapport au fonctionnement du registre du commerce.

Dire ici que les notaires ont peur de s'exprimer parce qu'ils sont sous tutelle est, à mon avis, exagéré. Ces notaires-là sont des Genevois, et je connais peu de Genevois, même en dehors de cette enceinte, qui hésitent à s'exprimer lorsqu'ils ne sont pas contents ! Cela étant, il y a eu des couacs, c'est vrai, ils ont été expliqués, le rapporteur de majorité l'a détaillé, et on peut considérer qu'à l'heure actuelle, nous assistons à un retour à la normale. J'ai parfois recours au registre du commerce et je reconnais qu'un certain côté pointilleux m'agace de temps en temps, mais ces collaborateurs exercent une charge qui est importante pour le département, pour l'Etat, à savoir assumer la responsabilité que les renseignements transmis le soient dans les temps et également avec la plus grande exactitude possible.

Je remercie également le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport et pour les propositions d'amélioration qu'il a faites, qui, je pense, seront reçues avec beaucoup d'empathie par le département. Concernant l'intervention de notre collègue, M. Romain de Sainte Marie, qui aurait privilégié une question écrite urgente, je lui rappelle que le Conseil d'Etat n'aime guère les questions écrites urgentes et qu'une question écrite pourrait tout aussi bien convenir. (Rires.) Je vous remercie dès lors de refuser aussi bien l'amendement que la motion elle-même.

Mme Ana Roch (MCG). Je tiens à souligner que le registre du commerce fonctionne bien dans son ensemble; il s'agit d'un des rares services qui, malgré quelques difficultés, offrent une prestation généralement satisfaisante. Certes, la période entre mai et septembre 2023 a été particulièrement fastidieuse, comme cela a été souligné précédemment, en raison du départ de trois juristes sur cinq, ce qui a temporairement perturbé le fonctionnement.

Toutefois, il est important de noter que même durant cette période, le RC a toujours été joignable par mail, garantissant ainsi une continuité des services. L'été 2023 a sans doute engendré des frustrations légitimes chez les usagers, mais il est essentiel de rappeler qu'il s'agissait d'un problème conjoncturel et non structurel. De ce fait, la motion proposée me semble trop forte dans la mesure où elle concerne une situation qui n'était que temporaire. C'est pourquoi le MCG se positionne en défaveur de ce texte.

Il est évident que l'on peut toujours chercher à s'améliorer. L'amabilité de certains fonctionnaires, par exemple, pourrait être un axe de progrès. Cependant, je tiens à réaffirmer que dans l'ensemble, ce service de l'Etat fonctionne et remplit son rôle. Pour toutes ces raisons, le MCG ne soutient ni l'amendement ni la motion. Merci.

M. Vincent Canonica (LJS). J'ai remarqué lors de ce débat qu'on a surtout parlé de dysfonctionnements. Or, je trouve que cette motion a le mérite de mettre en avant des points d'amélioration. Et n'est-ce pas notre rôle, en tant que parlementaires, d'anticiper les besoins de demain pour avoir des outils plus performants qui répondront aux besoins des commerçants, des petits et des plus grands ? On parlait également du fait que les multinationales ne doivent pas non plus être oubliées. L'objectif du registre du commerce, qui est un registre public...

Le point que je voudrais relever dans la motion, qui est particulièrement intéressant et qui anticipe un besoin futur, c'est cette notion d'examen préalable des réquisitions. Aujourd'hui, lorsqu'un dossier est soumis au registre du commerce, ce dernier l'examine. S'il n'est pas conforme, le dossier est renvoyé à l'expéditeur, et il faut tout recommencer. Ici, l'idée est de demander au registre du commerce un examen préalable du dossier avant que celui-ci ne soit déposé, pour gagner du temps, de l'efficacité et donner ainsi au RC un rôle de conseil plutôt que de contrôle.

Je souligne également la dernière invite, qui vise à faciliter la délivrance des extraits du registre du commerce en anglais. Cela relève du simple bon sens et répond à un besoin des multinationales qui se trouvent à Genève et qui font des transactions internationales.

Je pense que cette motion ne mange pas de pain, comme cela a été dit plusieurs fois, et qu'elle est plutôt le signe que nous sommes précurseurs d'une amélioration. Il faut la voir sous cet angle-là, celui de l'amélioration et de l'anticipation des besoins de demain. Je vous remercie d'accepter l'amendement qui vous a été proposé dans ce sens.

M. André Pfeffer (UDC). Le plus important, c'est que le registre du commerce soit efficace, car il joue un rôle déterminant pour notre économie et nos entreprises. Maintenant, en lisant les invites, certains ont effectivement été surpris. Je cite: «corriger les dysfonctionnements constatés», «RC plus efficient», «réduire la durée de traitement», «garantir la sécurité des communications», etc., etc.

Comme d'autres l'ont déjà relevé, les auditions ont donné une image un peu différente. Je relève quelques éléments qui nous ont été rapportés. A la conférence suisse sur les registres du commerce, on a constaté que le canton de Genève était cité comme exemple. On a certes reconnu le départ en pleine période estivale de trois des cinq juristes, mais on a également relevé que malgré cela, la situation était largement régularisée. On a aussi constaté qu'il n'y a jamais eu de dysfonctionnements systématiques, que la plupart des communications s'effectuaient par e-mail et que le dépôt se fait par voie électronique, via un canal sécurisé. Evidemment, je donne aussi une citation du Conseil d'Etat, qu'on retrouve dans énormément de rapports: «Le RC fonctionne bien au regard des moyens qui lui sont alloués.»

Cependant, le groupe UDC vous propose tout de même d'accepter cette motion. La raison principale est que le RC joue effectivement un rôle déterminant; il faut absolument que nous sachions exactement ce qu'il en est dans ce domaine. Nous vous encourageons vivement à accepter cette motion afin qu'un rapport soit demandé au Conseil d'Etat sur cette problématique, parce que nous devons absolument être rassurés.

Ah, et puis, dernier point, si je peux encore me permettre: le groupe UDC soutiendra l'amendement du PLR.

Des voix. De LJS !

M. André Pfeffer. De LJS, merci ! (Commentaires.) Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Sangdel pour cinquante secondes.

M. Djawed Sangdel (LJS). Merci, Monsieur le président. Bien sûr, tout le monde reconnaît que ça fonctionne, c'est bien ! Mais nous, on vise l'excellence ! Cette motion vise la qualité. J'étais étonné de voir certains députés refuser ce texte. Qu'est-ce qui se passera dans trois, cinq ou six ans ? Il faut démarrer dès à présent; l'avenir, c'est maintenant ! Il faudrait commencer dans cinq ans quand on vise l'excellence ? Je vous invite tous à soutenir cette motion, qui répond aux besoins de nos entreprises et s'inscrit dans l'image de Genève. Comment pouvez-vous accepter que lorsque le registre du commerce vous donne un document en français qui doit être traduit en anglais il faille perdre trois, quatre jours ? Je vous invite tous à approuver cette motion, qui répond aux besoins et s'inscrit dans l'image de notre pays et de notre canton. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Subilia pour une minute et quelques.

M. Vincent Subilia (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Oui, je reprends la parole, je vais faire bon usage des quelque soixante secondes qu'il me reste pour abonder dans le sens de ce qui vient d'être dit. Je le répète, l'objectif de la motion n'était pas de clouer au pilori des représentants de la fonction publique qui exercent leur activité le plus consciencieusement possible, mais de nous inscrire - ça vient d'être rappelé - dans une dimension permanente d'amélioration. C'est valable pour le secteur privé, ça doit aussi l'être pour le secteur public.

Or, comme je l'ai déjà dit, on a pu identifier un certain nombre d'erreurs commises - ça peut arriver à tout le monde, on est humains, faillibles, perfectibles - qui font que le service mérite vraiment d'être amélioré, certaines erreurs ayant eu des conséquences assez graves. Je ne vais pas revenir sur ce qui a pu être relaté en commission, notamment, pour ne citer qu'un exemple, lorsqu'une société se retrouve en faillite à l'insu du plein gré de la personne qui l'anime - ça reste des cas isolés.

Il y a donc un vrai potentiel; je crois que le constat est unanime, peut-être même dans les rangs du MCG, pour reconnaître que des améliorations peuvent être apportées. Utilisons donc cette motion, avec l'amendement très magnanime de LJS... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...pour faire en sorte que ce service, avec tout le respect que nous lui devons, puisse progresser. Il y a notamment un volet sur lequel le RC doit avancer conformément à ce qui se pratique au niveau suisse pour ne pas perdre en productivité et donc en attractivité...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Vincent Subilia. ...c'est celui de la digitalisation de ses services, qui est absolument indispensable. J'invite donc le MCG à s'abstenir, au mieux...

Le président. Merci.

M. Vincent Subilia. ...pour reconnaître que nous pouvons ici, ensemble, viser à l'excellence - ça vient d'être dit. Je vous remercie.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de majorité. On ne va pas faire une grande polémique sur cette affaire: on a le choix de voter oui en disant qu'on peut faire mieux ou non en disant toujours qu'on peut faire mieux. C'est un peu le choix qu'on doit faire ici. La majorité vous propose de dire non. (Commentaires. Rires.) J'ai présenté diverses recommandations. En tant que rapporteur de majorité, je vous invite à refuser cette motion, tout en acceptant les recommandations que j'ai formulées. La raison pour laquelle c'est notre position, c'est que nous avons reçu le registre du commerce, et personnellement, j'ai rarement vu un service être autant ouvert à la discussion, aussi compétent. Je pense que tout le monde doit profiter de cette ouverture pour discuter avec le registre du commerce, ce qui permettra à ses services de s'améliorer.

Juste encore une remarque: quelqu'un parlait d'examen préalable; je crois que le registre du commerce et le département n'y sont pas opposés, mais évidemment, cela demande des moyens en personnel, qu'il faudra voter. Je laisse la conseillère d'Etat s'exprimer sur la question.

Et puis, sur les amendements, on peut bien essayer d'éplucher la motion jusqu'à ce qu'elle n'ait plus tellement de sens, mais je pense que ça ne changera pas grand-chose. La majorité vous recommande donc de refuser à la fois les amendements et la motion. Je vous remercie.

Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai trouvé particulièrement intéressants les travaux de la commission sur ce texte, qui ont permis, je pense, au registre du commerce de donner un certain nombre d'informations sur son fonctionnement et de démontrer en tout cas sa capacité d'écoute. Evidemment, on doit tous viser l'excellence, et j'y suis particulièrement attentive dans mes services.

J'aimerais juste vous rappeler un ou deux chiffres: sur les 271 000 inscriptions que l'on trouve au niveau suisse, Genève est classée en troisième position, avec près de 24 000 inscriptions effectuées chaque année. Et quelle est la situation en termes de moyens ? Ce sont seulement 11,4 ETP qui sont dédiés à cette tâche. Cela représente 2061 inscriptions par année par ETP, soit le taux le plus élevé de Suisse. C'est assez parlant, et je note d'ailleurs que la directrice du registre du commerce relevait que c'était très difficile pour les autres cantons, à qui on mettait du coup la pression face à l'excellence genevoise quant à la capacité de travail par ETP. Je pense que c'est suffisamment rare pour être souligné ! Voilà !

C'est vrai, le registre du commerce a connu à l'été 2023 un moment difficile, cela a été dit. Il y a eu des départs. Quand on a 11,4 ETP, il suffit que trois ou quatre personnes quittent le service et qu'il faille les remplacer... Il faut bien sûr les remplacer en engageant de nouvelles personnes, mais ensuite, il y a aussi un temps de formation. C'est vrai qu'il y a eu un delta avec des délais qui n'étaient pas acceptables dans le traitement des requêtes. Le Conseil d'Etat le reconnaît. Cela a également été dit en commission par la directrice du registre du commerce.

Maintenant, il faut savoir qu'on est parfaitement revenu à la normale. Le délai pour procéder à une inscription est actuellement de moins de cinq jours ouvrables. Bien sûr, ce délai s'applique dès le dépôt d'un dossier complet. Souvent, un amalgame est fait lorsqu'on dit qu'une demande prend du temps, parce que oui, quand on doit renvoyer trois fois la demande ou qu'il manque des pièces, forcément, cela peut traîner en longueur.

La notion d'examen préalable a été évoquée. C'est assez intéressant, et je suis tout à fait prête à me pencher sur cette question, mais je rappelle, concernant ces examens préalables, que, un, les notaires n'en veulent pas, et deux, c'est aujourd'hui souvent fait par des avocats ou des fiduciaires: je ne suis donc pas certaine que le rôle de l'Etat soit accessoirement de leur enlever ces mandats et ce travail. Si on peut en discuter, je vous rends quand même attentifs au fait que c'est un travail aujourd'hui effectué simplement par des privés. Se pose donc une vraie question: le secteur public doit-il s'en emparer ?

Je rappelle aussi que la directrice du registre du commerce et moi-même avons toujours dit que la porte était ouverte quand il y a des plaintes. S'il y a des situations problématiques, elles peuvent être remontées. J'entends dire qu'il y a des plaintes; il y en a au final peu qui arrivent soit auprès de la directrice soit dans ma boîte aux lettres. En tout cas, elles sont traitées toujours avec célérité si on remarque qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Je rappelle aussi qu'une commission est instituée entre la direction du registre du commerce et la Chambre des notaires: c'est aussi un lieu où le dialogue existe, où les procédures qui seraient problématiques peuvent être traitées. J'invite évidemment la Chambre des notaires et le registre du commerce à poursuivre ces échanges.

Voilà ce que je peux vous dire. J'estime donc aujourd'hui que le registre du commerce fonctionne bien. Oui, le service client est extrêmement important, c'est d'ailleurs le sujet que j'ai choisi pour le prochain séminaire ouvert du département - c'est dire mon attachement à pouvoir proposer, via l'administration, un service client et entreprise de qualité à chaque étape où l'administré pourrait être en contact avec mes services.

Je tiens à vous dire aussi la sensibilité de ce service, que j'ai choisi de renforcer, en réallouant pour 2024... Puisque les ETP qui devaient être dédiés au registre du commerce ont été refusés, pour 2025, je n'ai pas eu l'audace d'en remettre et je réalloue donc en interne. Mais sachez que pour 2026, il y aura en plus l'entrée en vigueur du nouveau droit des faillites. Le registre du commerce verra sans aucun doute son activité augmenter ces prochaines années - on peut regretter que ce soit malheureusement parfois pour des motifs liés à des difficultés.

Il est évident que si l'on veut renforcer son rôle dans l'examen des dossiers préalables, qu'il puisse assumer les changements législatifs fédéraux à venir et, en plus, éventuellement, qu'il puisse effectuer son rôle... On en a discuté en commission, le registre du commerce contribue à identifier des sociétés qui pourraient être frauduleuses et qui rouvrent systématiquement. Si on veut aussi renforcer le rôle du registre du commerce à ce niveau-là, eh bien, Mesdames et Messieurs, je n'en ai pas demandé jusqu'à maintenant, mais cela nécessitera quand même, au-delà des moyens que j'ai réalloués, un renforcement des ETP au sein de ce service.

Voilà ce que je souhaitais vous dire sur le registre du commerce. Quoi qu'il en soit, si cette motion est refusée - comme j'estime qu'elle peut l'être aujourd'hui, parce que le travail est en cours, il est en route et, comme je le disais, la porte est ouverte -, n'hésitez pas, si d'ici quelques mois ou années le service n'était pas à la hauteur, à déposer une question écrite, urgente ou non. Je me réjouirais d'y répondre, ce sera toujours avec grand plaisir ! Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons passer au vote, en commençant par l'amendement de M. Vincent Canonica visant à supprimer la première et la cinquième invites.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 51 oui contre 40 non.

Mise aux voix, la proposition de motion 2960 ainsi amendée est rejetée par 53 non contre 38 oui (vote nominal).

Vote nominal

Le président. Nous passons aux objets relevant du département de la santé et des mobilités, en remerciant tout d'abord Mme la conseillère d'Etat chargée du département de l'économie et de l'emploi.

Mme Delphine Bachmann. Merci à vous, Mesdames et Messieurs les députés, c'était un plaisir ! (Brouhaha.)

Une voix. On fait vingt minutes de pause, non ? (Commentaires.)

Une autre voix. On change de département !

Le président. Vous voulez prendre une pause ? (Remarque.) Bon, Mesdames et Messieurs les députés, nous allons prendre quinze minutes de pause.

Une voix. Merci, Jacques, c'est grâce à toi !

La séance est levée à 17h40.