République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2953-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Marc Saudan, Charles Selleger, Jean-Marc Guinchard, Souheil Sayegh pour la création d'une caisse maladie cantonale publique
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 20 et 21 juin 2024.

Débat

Le président. Nous enchaînons avec la M 2953-A (catégorie III) et je cède le micro à Mme Natacha Buffet-Desfayes.

Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Merci, Monsieur le président. En raison de l'importance du sujet, nous souhaiterions demander le renvoi de ce texte en commission. Je vous remercie.

M. Marc Saudan (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, je pense que le renvoi en commission n'est pas justifié, étant donné que ce rapport s'inscrit simplement dans une continuité s'agissant du projet de caisse maladie publique. J'aimerais d'ailleurs remercier le Conseil d'Etat pour le courage dont il fait preuve en allant de l'avant avec la création de la caisse publique.

Pourquoi une caisse publique ? Car nous devons agir. Entendre seulement des promesses quand les primes augmentent chaque automne et ne pas voir de réalisations, ça suffit ! Il faut agir, et la création de cette caisse permettra entre autres de développer des modèles de prise en charge afin de confirmer que ces derniers peuvent contenir les coûts.

Aux détracteurs qui crient à l'étatisation de la médecine avec le projet de caisse maladie publique, je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas d'une caisse unique et obligatoire; chacun pourra y adhérer ou non. Par contre, le fait que celle-ci soit gérée par l'Etat permettra une transparence dans les coûts (laquelle manque notamment pour ce qui est des réserves), ce qui poussera peut-être les caisses maladie actuelles à suivre cet exemple.

D'autres disent sans cesse qu'une telle caisse ne sera pas viable, car elle n'aurait que les mauvais risques; cet argument n'a plus vraiment cours, parce que comme vous le savez, ces dernières années ce sont surtout les primes des enfants et des jeunes adultes qui ont considérablement augmenté, chargeant énormément le coût des primes pour les ménages. Il est donc clair qu'une caisse moins coûteuse entraînerait une approbation de ces personnes.

Je pense qu'il ne sert à rien de renvoyer ce texte en commission. Attendons le projet final, et nous pourrons en discuter à la commission de la santé, comme cela a été prévu. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Le MCG est tout à fait favorable au renvoi en commission. C'est même impératif, parce que le projet qui est en train de se dessiner, tel qu'il nous a été transmis par le Conseil d'Etat, est en fait la pire des solutions. Cela créera un système bureaucratique qui ne correspond aux attentes ni des assurés ni de la population, qui constituera un étage administratif supplémentaire et qui coûtera cher. Ce sera cher, inutile et parfois même contreproductif. Ce n'est pas avec une bonne idée qu'on assure une bonne réalisation. Il faut avoir un projet qui corresponde à la réalité.

Le MCG est favorable depuis de nombreuses années, à savoir six ou sept ans... C'était d'ailleurs le fameux projet Poggia-Maillard; il était question d'une décentralisation de la gestion de l'assurance-maladie au niveau du canton, une gestion assumée par une caisse de compensation où l'on réunit tous les risques, les dépenses et les cotisations. C'est géré par des caisses maladie que nous connaissons, qui accomplissent leur travail, les tâches administratives, et qui le font sans problème. Le problème n'est pas le travail de ces caisses ! Il faut laisser la possibilité aux assurés de choisir leur caisse et non créer une sorte de monstre bureaucratique et technocratique qui va représenter un poids supplémentaire pour les finances de l'Etat de Genève et qui ne va rien résoudre. Au lieu d'avoir une solution, nous aurons un problème.

Nous savons qu'à Berne une motion a été déposée tout récemment. Elle est traitée par le Conseil des Etats et a déjà recueilli des soutiens dans tous les groupes, autant à gauche qu'à droite. Le but est d'aller dans cette direction, d'offrir aux cantons la possibilité de créer cette fameuse caisse de compensation, c'est-à-dire une mutualisation des risques, une mutualisation des cotisations; ça permettra de régler une bonne partie des problèmes et d'avoir une politique de prévention ambitieuse, une politique de santé publique menée sur des bases rationnelles, qui correspondent au système suisse et à ce que devrait être un système de santé de qualité.

Voilà le projet que nous portons, et nous espérons que de plus en plus de groupes nous suivront dans cette direction. Ça commence déjà à aller dans le bon sens ! Ne faisons pas une Genferei de plus, soyons sages et renvoyons ce rapport en commission afin qu'on puisse y donner la suite qui convient. Merci, Monsieur le président.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Je ne me prononcerai pas sur le fond, mais j'aimerais rappeler que la commission de la santé a été saisie tout récemment d'une proposition de motion visant à instaurer une caisse de compensation selon un modèle de projet pilote tel qu'il peut être prévu par la législation fédérale, en référence au même texte qui a été déposé à Berne par MM. Mauro Poggia et Pierre-Yves Maillard. Le groupe du Centre soutient donc lui aussi le renvoi en commission.

Mme Jacklean Kalibala (S). Contrairement à ce qui a été dit auparavant, le rapport du Conseil d'Etat sur cette motion met bien en évidence qu'une caisse publique telle qu'elle est demandée par le groupe LJS n'est probablement pas viable, même à l'heure actuelle, et que ce n'est sans doute pas la solution pour résoudre les problèmes de primes d'assurance-maladie, qui augmentent et pèsent lourdement sur les familles à bas revenus. A Genève, on sait que la population a accepté l'initiative socialiste visant à limiter les primes d'assurance-maladie à 10% du revenu. Il faut qu'on trouve une solution viable, qui permette d'aller de l'avant, de soulager les familles, d'améliorer la qualité des soins et d'offrir un accès aux soins équitable pour toutes et tous. C'est pour cette raison qu'il est nécessaire de renvoyer cet objet en commission de façon qu'on puisse travailler sur d'autres propositions qui sont peut-être prometteuses et qui peuvent vraiment changer les choses. Merci.

M. Michael Andersen (UDC). Je serai très bref et commencerai par dire que l'UDC acceptera elle aussi le renvoi en commission. Le député Saudan l'a indiqué - vous transmettrez, Monsieur le président -, il s'agit d'une étatisation, si l'on veut, d'une caisse maladie. C'est surtout une fonctionnarisation d'une caisse maladie. Or est-ce que fonctionnariser toujours plus de choses est bénéfique ? Aujourd'hui, on voit à Genève que tout service supplémentaire fonctionnarisé (on peut penser à la caisse de prévoyance de l'Etat de Genève, à la caisse de prévoyance de la police) nous coûte des millions par année en recapitalisation. A la fin, ce sont nos impôts qui vont financer ce genre de caisse publique. Nous n'aurons pas le choix de financer cette caisse par nos impôts, alors que les autres auront le choix de s'y affilier ou non. Nous renverrons donc ce texte en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2953 à la commission de la santé est adopté par 74 oui contre 10 non.