République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 13488
Projet de loi de Jacques Blondin, Jacques Jeannerat, Caroline Marti, David Martin, Sandro Pistis, Alia Chaker Mangeat, François Erard, Jean-Marc Guinchard, Raphaël Dunand, Djawed Sangdel, Stefan Balaban, Jean-Louis Fazio, Masha Alimi, François Baertschi, Patricia Bidaux, Laurent Seydoux, Francisco Taboada, Ana Roch, Xavier Magnin, Leonard Ferati, Léna Strasser, Xhevrie Osmani, Jacklean Kalibala, Jean-Charles Rielle, Christina Meissner, Thierry Arn, Nicole Valiquer Grecuccio, Sylvain Thévoz, Diego Esteban, Amar Madani, Sophie Demaurex, Skender Salihi, Souheil Sayegh, Thomas Wenger, Arber Jahija, Jean-Marie Voumard, Grégoire Carasso, Gabriela Sonderegger, Danièle Magnin, Patrick Dimier, Jean-Pierre Tombola, Thierry Cerutti, Yves Magnin, Caroline Renold, Sébastien Desfayes, Christian Flury, Cyril Mizrahi modifiant la loi sur les Transports publics genevois (LTPG) (H 1 55) (Pour des transports publics abordables en faveur des jeunes et des seniors)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 30 et 31 mai 2024.

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous continuons les urgences et traitons à présent le PL 13488, en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. David Martin.

M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, après de longues... (Remarque.)

Le président. Excusez-moi, Monsieur le député, on m'indique que c'est l'auteur qui doit s'exprimer en premier; je suis désolé. Je passe donc la parole à M. Jacques Blondin.

M. Jacques Blondin (LC). Merci, Monsieur le président. Excusez-moi, Monsieur Martin. Mesdames et Messieurs les députés, le vote du PL 13344 sur les tarifs TPG, lors de la session du jeudi 2 mai vers 23h - vous vous en souvenez -, a eu lieu dans la confusion et a abouti, contre toute attente, au refus de l'ensemble des propositions formulées de part et d'autre de l'hémicycle. Pour tirer cet imbroglio au clair et ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain, les partis socialiste, Vert, MCG, Le Centre et LJS se sont alliés pour déposer, le lendemain du vote déjà, un projet de loi commun visant à offrir la gratuité promise aux jeunes, respectivement les baisses de tarifs annoncées pour les retraités - la question du maintien ou non de la grille tarifaire dans la loi devant quant à elle faire l'objet d'un traitement séparé.

C'est ce nouveau texte, signé par 47 d'entre nous, que nous traitons en ce moment. Avec cet objet, les auteurs entendent permettre de trancher l'enjeu relatif à l'introduction de tarifs avantageux pour certains segments de la population sans que les discussions soient parasitées par des considérations étrangères relatives au degré de latitude dont devrait disposer la régie publique pour régler les autres éléments de tarification. C'est dans l'objectif de pouvoir respecter le calendrier initialement prévu et de permettre ainsi une entrée en vigueur dès 2025, comme annoncé par le Conseil d'Etat, que la discussion immédiate et l'urgence ont été demandées ce jour.

Les signataires de ce projet de loi se réjouissent de pouvoir ainsi aller de l'avant sur ce sujet important à plusieurs titres, d'une part pour la sauvegarde du pouvoir d'achat des ménages de notre canton, fragilisé par la conjoncture actuelle et l'augmentation des primes d'assurance-maladie et des loyers, d'autre part pour la lutte contre le dérèglement climatique et la saturation de nos routes à travers un encouragement à l'utilisation des transports collectifs, enfin pour honorer les promesses émanant tant du Conseil d'Etat que de plusieurs partis de faire profiter la classe moyenne des excellents résultats financiers qu'affichent les comptes de l'Etat pour l'exercice 2023.

Si on peut de bonne foi accorder la paternité du projet au Conseil d'Etat, en tout cas pour ce qui est de la gratuité en faveur des jeunes, on doit aussi, avec la même bonne foi, en laisser la maternité et l'accouchement à notre assemblée. Le premier pouvoir reste ce parlement. Comme la majorité qui se dégage pour soutenir cette proposition sait être généreuse, elle suggère au PLR et à l'UDC d'adopter ce texte. Mesdames et Messieurs les députés, Le Centre vous remercie d'accepter à une large majorité cet objet, avec l'amendement proposé par le député Jeannerat, et de refuser tout autre amendement. Merci beaucoup.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Martin.

Une voix. Ah voilà, enfin !

M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président; cette fois, c'est la bonne ! Le groupe des Vertes et des Verts se réjouit de pouvoir soutenir ce projet de loi après les nombreux soubresauts vécus dans notre hémicycle à propos de cette gratuité. Comme l'a dit M. Blondin, nous avons cosigné ce texte avec le parti socialiste, LJS, Le Centre et le MCG, pour trouver enfin une majorité sur ces éléments, à savoir la gratuité pour les jeunes et une réduction des tarifs pour les seniors, sans mélange des genres avec l'autre sujet que nous traitons au point suivant de la soirée, à savoir la question de l'inscription ou non des tarifs dans la loi - mon collègue de parti s'exprimera à ce sujet. Pour cette raison, nous refuserons également l'amendement qui tente de recréer un mélange des genres et qui risque de nous mener à nouveau dans une impasse où, en raison d'amendements croisés, on se retrouverait face à un échec sur ce sujet, alors que nous sommes nombreux à soutenir la solution proposée.

La gratuité pour les jeunes et le rabais de 50% pour les seniors ont été proposés par le Conseil d'Etat pour offrir une redistribution utile des bénéfices mirobolants des comptes de l'année passée. Il s'agit donc effectivement d'utiliser cette manne pour activer ce que nous souhaitons, c'est-à-dire un report modal de la voiture vers les transports publics, le tarif étant l'un des leviers pour activer ledit report. Ce n'est pas l'unique levier; on le répète souvent, ce qui est déterminant, c'est le déploiement de l'offre, mais quand même, pour l'utilisateur, en particulier pour les jeunes, le fait de pouvoir utiliser le bus sans la contrainte de savoir s'ils ont un abonnement ou pas, s'ils doivent prendre un billet ou non, joue un rôle. Ce texte garantit donc une utilisation facilitée des transports publics, en particulier pour les familles, qui s'éviteront de devoir acheter des abonnements. Ces derniers sont certes les moins chers de Suisse, mais lorsqu'on a un, deux, trois enfants, ça commence à peser de façon très conséquente sur le budget annuel.

Nous pensons donc que cette gratuité pour les jeunes va rendre beaucoup plus facile, fluide et attractive l'utilisation des transports publics pour les familles, que ce soit en semaine ou pour les loisirs. Par conséquent, nous nous réjouissons d'arriver enfin à une majorité sur cette mesure. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. François Baertschi (MCG). L'accessibilité des TPG pour les jeunes et les aînés est un élément important, le MCG défend cette proposition depuis des années, en particulier en ce qui concerne la gratuité pour les jeunes. Nous avions dans un premier temps proposé une gratuité pour les jeunes de moins de 18 ans, ensuite nous avons fait des propositions plus importantes dans le but d'élargir cette offre, parce qu'il est vrai que la demande de mobilité est importante et que les familles ont beaucoup de peine à financer les divers frais que représentent les jeunes, et ce de plus en plus longtemps. La classe moyenne se retrouve prise en étau par des dépenses contraintes qui deviennent de plus en plus insupportables; ce projet de loi apporte une solution.

Nous sommes tout à fait satisfaits qu'il n'y ait pas de confusion avec l'autre texte, qui propose en réalité de libéraliser les tarifs des TPG, parce qu'on ne peut pas donner d'une main et prendre de l'autre - ce n'est pas du tout cohérent. Je pense que c'est très bien de proposer de manière différenciée ces gratuités et la baisse des tarifs pour les aînés - c'est une excellente chose - et de ne pas confondre cela avec l'autre question, qui est celle de savoir si le Grand Conseil peut fixer les tarifs ou si c'est au Conseil d'Etat et à la direction des TPG de faire ce qu'ils veulent. Traiter ces deux aspects ensemble créait une confusion qui n'est pas du tout acceptable; nous sommes tout à fait satisfaits que le débat se déroule désormais dans la clarté, ce qui est le plus important au sein de ce parlement. Le MCG soutiendra donc avec conviction ce projet de loi. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Le fait que les deux sujets soient séparés et traités différemment ne change finalement rien sur le fond. Vous le savez, car on en a déjà débattu il y a un mois, l'UDC restera opposée à la gratuité telle que proposée, parce qu'il faut bien être conscient que la gratuité, ça n'existe pas; quelqu'un paiera derrière, ce sera... (Remarque.) ...le contribuable, encore une fois. Ça, il faut juste l'avoir à l'esprit. Maintenant, dire qu'il faut que les deux questions soient séparées, ce n'est pas totalement juste non plus, parce qu'il faut en contrepartie que les TPG puissent dégager eux-mêmes de nouvelles ressources, justement pour contrebalancer la gratuité que vous allez voter aujourd'hui - ce sera notre prochain débat. L'idée qui se trouve derrière la proposition de sortir les tarifs de la loi est de permettre des tarifs différenciés, notamment aux heures creuses, avec une nouvelle tarification, ce qui n'est pas possible aujourd'hui - encore une fois, on en parlera après.

Pour le présent texte, on en a également déjà débattu. Aujourd'hui, on est face à un texte qui est à la limite de ce qui est admissible au niveau fédéral: on mettrait en place une extension de la gratuité pour les personnes jusqu'à 24 ans révolus et on offrirait environ 50% du prix sur les abonnements pour les bénéficiaires de l'AVS.

On annonce dans ce débat qu'un amendement est déposé prévoyant que le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution du présent article. Sur ce point, ce que propose cet amendement est parfaitement logique parce qu'à un moment donné, il faudra bien trouver des solutions d'application, et c'est le Conseil d'Etat qui sera à même de les exécuter. Malgré tout, cet élément reste lié au fait que si vous voulez une mise en oeuvre complète de ce projet de loi, nous aurons inévitablement besoin de l'entrée en vigueur du deuxième texte - vous faites comme vous voulez, mais bien qu'ils soient séparés, dans les faits, ces deux objets sont liés. Par conséquent, il nous faudrait inévitablement voter les deux.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Stéphane Florey. Par contre, encore une fois, nous refuserons ce projet de loi, pour les raisons que je vous ai expliquées. Merci.

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à vous dire la satisfaction, même le plaisir, du parti socialiste de pouvoir débattre et, on l'espère, de voir aboutir ce projet de loi qui consacre la gratuité pour les moins de 25 ans et la réduction de moitié des tarifs des transports publics pour les personnes de plus de 65 ans. Cela fait écho à une revendication ancienne formulée par le parti socialiste, et d'autres partis d'ailleurs, dans ce Grand Conseil. On se réjouit également que sur la base d'un projet qui prévoyait au départ seulement la gratuité pour les moins de 25 ans, on ait pu élargir cette mesure à travers une gratuité partielle, à savoir une réduction de moitié des tarifs, pour les seniors de notre canton. A notre sens, les juniors - on va dire -, ceux qui ont moins de 25 ans, tout comme les seniors, sont des groupes de population qui disposent de revenus moins importants et qui doivent donc pouvoir bénéficier d'un soutien financier pour l'acquisition de leurs titres de transport.

Pour le parti socialiste, à travers ce projet de loi, on adopte une mesure sociale, un soutien au pouvoir d'achat des ménages de notre canton, qui est érodé depuis plusieurs mois et qui nécessite un certain nombre de coups de pouce - ce texte en fait partie. Je veux aussi rappeler que si effectivement les mesures - que ce soit la gratuité ou la réduction de tarifs - ne touchent, entre guillemets, «que» les jeunes et les plus âgés, c'est l'ensemble des familles de notre canton qui pourra en bénéficier puisque bien souvent, ce sont encore les parents qui financent l'abonnement de transports publics de leurs enfants. C'est également une mesure d'incitation à l'usage des transports publics comme moyen de déplacement durable avec tous les avantages sociaux, sociétaux, environnementaux que cela entraîne. Le fait de focaliser cette mesure en particulier sur les jeunes permet aussi d'agir sur les habitudes de mobilité, que l'on garde évidemment toute sa vie.

Le troisième point est que ce texte représente une forme de reconnaissance d'un droit à la mobilité: la reconnaissance qu'on a toutes et tous besoin de se déplacer - pour travailler, pour étudier, pour se divertir, pour entretenir une vie sociale et culturelle -, mais que certaines personnes ont moins de moyens pour assumer les coûts qu'engendre cette nécessité de se déplacer. Or, accorder la gratuité pour les jeunes et une réduction de tarifs pour les seniors permet de faire un premier pas vers la concrétisation de ce droit, à savoir l'accès à la mobilité à un prix abordable. C'est pour l'ensemble de ces raisons que nous sommes très contents aujourd'hui d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Fabienne Monbaron (PLR). Vous le savez, Mesdames et Messieurs, le PLR a toujours été défavorable à la gratuité, quel que soit le sujet. Comme indiqué récemment dans la presse par nos collègues vaudois, lorsque l'on parle de gratuité, il s'agit en réalité d'une pseudo-gratuité. Il faut bien s'imaginer que les entreprises de transports publics ne vont pas faire de cadeaux en transportant certaines personnes gratuitement. Ces abonnements dits gratuits seront donc bien payés aux différents partenaires, en l'occurrence seulement par le canton.

Avec cette pseudo-gratuité, le seul vrai cadeau sera offert aux communes, qui subventionnent actuellement leurs jeunes et/ou leurs seniors. Il faut savoir qu'en 2023, elles ont versé près de 3 300 000 francs de subventions, montant qu'elles pourront conserver dans leurs comptes puisqu'elles n'auront aucune obligation de reporter ces aides sur les abonnements pour adultes. Je suis bien placée pour en parler puisque j'habite dans une commune qui subventionne déjà chaque catégorie d'usagers à hauteur de 300 francs, qui ne va donc pas faire de report, et qui, avec les près de 500 000 francs qu'elle n'aura pas à dépenser, pourra envisager de baisser son centime additionnel - ses habitants vous en remercieront ! (Rires.)

Pour ceux qui l'auraient oublié, j'aimerais rappeler que le plan des transports en commun 2025-2029 prévoit une augmentation de l'offre de 29% ces cinq prochaines années, qui nécessitera une augmentation du parc de véhicules de 88 trams et bus et un renforcement des ressources humaines, notamment via l'engagement de 160 nouveaux conducteurs par an dès 2025 - s'ils les trouvent ! Il y aura donc inévitablement une hausse des tarifs, ce qui ne nous dérange pas sur le fond si l'offre augmente. La question est de savoir qui va payer et combien cela va coûter: à ce jour, personne n'en sait rien. Le canton paiera bien sûr pour la part de la pseudo-gratuité. Pour le reste, ce sera vraisemblablement financé par le biais d'une augmentation des impôts, indépendamment du fait que le contribuable utilise ou non les transports publics, ainsi que par une hausse du prix des billets de parcours - journaliers ou autres - et de certains abonnements, ce qui est normal si l'offre augmente, comme je l'ai déjà dit.

Le PLR trouve toutefois particulier qu'on nous vende aujourd'hui une mesure sociale, qui ne sera en réalité qu'une petite mesure environnementale avec un faible report modal, puisque ce sont les personnes que nous souhaitons le plus voir abandonner leur voiture que nous allons prétériter. Pensez-vous réellement que le canton augmentera de façon équitable les tarifs des abonnements entre ceux qu'il subventionne et les autres ? Il y a fort à parier que ce seront les abonnements adultes qui subiront la plus grosse hausse de prix, réduisant par là le report modal que nous appelons de nos voeux.

Nous aurions souhaité un réel travail en commission, avec une projection chiffrée en lien avec l'augmentation de l'offre pour les années qui suivront, validée par les TPG, notamment en cas de comptes cantonaux déficitaires. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous aurions surtout aimé évaluer une mesure différente, par exemple une diminution du prix des abonnements répartie sur chacune des catégories d'usagers, soit une mesure plus équitable, qui aurait de plus le mérite de permettre aux communes de maintenir leurs subventions; cela aurait abouti quasiment au même résultat pour les jeunes et les seniors.

Le président. Merci, Madame la députée.

Mme Fabienne Monbaron. Et même si l'usager devait payer 100 francs son abonnement annuel, cela lui reviendrait à 27 centimes par jour, pour voyager 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, Léman Express compris. Pour toutes ces raisons, le PLR refusera la mesure telle que proposée. (Applaudissements.)

M. Jacques Jeannerat (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est ambitieux, il s'inscrit dans une ligne politique que nous devons définir. Je retiendrai deux éléments. D'abord, l'aspect financier. Ça fait quand même trois ou quatre ans qu'il y a un contraste dans ce canton. Nous avons d'un côté des recettes fiscales très importantes, grâce à certains secteurs de l'économie - dans trois semaines, notre session sera consacrée aux comptes: 1,4 milliard et quelques poussières de bénéfice -, donc une collectivité qui produit des richesses, et, d'un autre, un pouvoir d'achat qui, pour un certain nombre d'habitants et de familles, souffre en raison du prix de l'énergie, etc., etc. Grâce à certains pans de l'économie qui nous apportent une certaine richesse, nous avons l'ambition, à travers ce projet de loi, de rendre un peu de pouvoir d'achat à une partie de la population, à savoir les jeunes et les personnes âgées. Je pense que ce soir notre parlement doit voter ce projet ambitieux consistant à restituer un peu de pouvoir d'achat.

Mesdames et Messieurs les députés, la deuxième dimension est encore plus importante. Les routes de notre canton sont saturées. En donnant la possibilité aux jeunes d'utiliser gratuitement les transports publics, on va les inciter à prendre de bonnes habitudes. C'est un pari sur l'avenir, il faut que les gens prennent l'habitude de rouler en transports publics et qu'on laisse ainsi les rues et les routes aux personnes qui en ont véritablement besoin. Je parle ici des artisans - un vitrier, un menuisier ou je ne sais quoi - qui doivent se déplacer et qui perdent actuellement beaucoup de temps dans les bouchons. Je le répète, c'est un pari sur l'avenir: si les jeunes de moins de 25 ans prennent l'habitude d'utiliser les transports publics, cela sera bénéfique pour notre collectivité. Il y aura moins d'incidences négatives et plus de facilité de se déplacer pour ceux qui doivent vraiment le faire avec des véhicules.

Vous voyez donc que ce ne sont pas des calculs d'épicier, on ne se demande pas si c'est un franc cinquante ou un franc soixante - ce n'est pas ça ! Ce soir, nous devons adopter un projet de loi ambitieux. Nous avons de l'argent, 1,4 milliard, nous en débattrons dans trois semaines; nous pouvons donc nous permettre de rendre ce pouvoir d'achat à une partie de la population. Nous devons être ambitieux pour inciter les jeunes à prendre les transports publics. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Lionel Dugerdil (UDC). Je prends la parole très brièvement parce que je sais qu'on n'a plus de temps. L'UDC souhaite, face à des problèmes, proposer des solutions; on ne peut pas lier le pouvoir d'achat à un âge, ce n'est pas parce qu'on est jeune qu'on n'a pas de pouvoir d'achat. Mes préopinants l'ont assez dit, on va soulager des familles, mais lesquelles ? Est-ce qu'on va soulager ceux qui en ont vraiment besoin ?

Le président. Vous n'avez plus de temps de parole.

M. Lionel Dugerdil. Pour nous, ce n'est clairement pas la bonne solution !

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat accueille avec satisfaction les propos qui viennent d'être tenus, même si on a compris qu'il n'y aurait sans doute pas d'unanimité ce soir. De notre point de vue, un signal clair est donné en faveur d'une mesure simple et ambitieuse à la fois - ce qui n'est pas toujours très compatible -, mais qui a pris des chemins un peu sinueux, je le reconnais. La gratuité est un débat plus ardu que prévu.

Du côté du Conseil d'Etat, il a fallu trouver les voies juridiques possibles - nous vous remercions d'en avoir donné quitus. Nous nous sommes accordé un mois de plus et, à la faveur d'un avis de droit, on a effectivement trouvé une perspective qui, je crois, satisfait le plus grand nombre. Pour reprendre les termes du député Blondin, on est passé par un imbroglio parlementaire, mais, ma foi, cela arrive dans certains cas.

Après cette première mouture, nous nous retrouvons actuellement avec une proposition remaniée, qui embrasse une large partie de la population à raison de l'âge - c'est vrai, c'est une forme de discrimination. Mais, comme vous le savez, la mesure est redistributrice pour les parents, parce que ce sont rarement les jeunes qui paient leur abonnement. L'objectif est donc de toucher les familles. Pour une famille avec trois enfants de moins de 25 ans, c'est potentiellement 1200 francs d'économie par année, directement redistribués. C'est une forme de participation; on pense ici notamment à la part de la population qui ne paie pas d'impôts, qui souhaiterait peut-être en payer, mais qui ne le peut pas. Elle doit pouvoir aussi bénéficier de l'excédent de recettes extrêmement important que connaît l'Etat de Genève sur ces trois dernières années.

Je voulais simplement rappeler que pour le Conseil d'Etat, il s'agit d'abord d'une mesure sociale. Je viens de l'illustrer avec le cas concret d'une famille de trois enfants qui fera 1200 francs d'économie, soit autant de pouvoir d'achat restitué. Dans cette enceinte, il y a un an encore, plusieurs partis ont fait de larges campagnes sur le pouvoir d'achat: c'est l'occasion de les concrétiser; c'est au pied du mur qu'on voit le maçon ! Si vraiment on défend le pouvoir d'achat, on a ici une mesure concrète, qui en plus, à teneur du budget global de l'Etat - je rappelle qu'il est de 10 milliards -, représente un investissement d'à peine 30 millions. Cela devrait donc être possible, même pour vous qui êtes visiblement assez à cheval sur ces principes.

Il s'agit ensuite d'une mesure environnementale, c'est important de le souligner. Le député Jeannerat l'a dit - et même fort bien - il y a un instant: l'idée est de favoriser un report modal. En principe, tout le parlement y est favorable. Pour les jeunes, cet aspect est moins fort, car ils utilisent déjà beaucoup l'abonnement, mais en ce qui concerne les seniors de plus de 65 ans, vous le savez, cette catégorie d'âges présente une marge de progression extrêmement importante. Je ne veux pas caricaturer, mais il est vrai que cette partie de la population englobe des personnes qui sont encore souvent attachées au transport individuel motorisé.

A travers cette diminution importante du prix - de moitié -, on peut inciter ces personnes à basculer vers l'usage des transports en commun, notamment durant les heures dites creuses. Par définition, si on a passé l'âge de la retraite, on est moins enclin à emprunter les transports publics lors des horaires de pic liés aux heures de travail. Par conséquent, sans qu'il faille nécessairement augmenter massivement l'offre, on peut utiliser mieux et davantage les transports en commun. C'est donc une mesure à vocation environnementale, qui de notre point de vue se justifie totalement.

Et puis surtout, Mesdames et Messieurs, c'est assez rare pour que cela soit souligné, c'est une mesure généreuse. Là, je m'adresse principalement au PLR. La générosité... Alors évidemment, on aimerait la cibler. Vous avez été généreux le mois passé, notamment avec les diminutions d'impôts; Mme la conseillère administrative de Plan-les-Ouates doit s'en rendre compte - parce qu'elle est certes résidente de Plan-les-Ouates, mais elle est surtout conseillère administrative de cette commune. Jusqu'à maintenant, les communes dépensent 3,3 millions pour soutenir les citoyennes et citoyens en les incitant à acheter l'abonnement TPG. Elles pourront reporter ces montants sur d'autres catégories.

Prenons l'exemple de Satigny, commune modèle qui finance les transports en commun à hauteur de 400 francs par année pour tous ses citoyennes et citoyens. Cette commune pourra contribuer encore davantage, notamment en complétant les 100 francs qui manquent, et offrir ainsi l'abonnement à ses résidents. A Plan-les-Ouates, c'est près d'un million par année qui est investi pour les résidents dans ce domaine - je le souligne et je le salue. Sur ce montant, environ un tiers, soit 350 000 francs, est utilisé pour les jeunes. Ce montant... Je regarde l'autre conseiller administratif de Plan-les-Ouates qui est dans la salle et qui, lui, est en faveur de cette mesure - je ne sais pas de quel côté penche la majorité de Plan-les-Ouates, mais je serais heureux de le savoir après le débat ! Ces 350 000 francs, Monsieur le conseiller administratif, Madame la conseillère administrative, peuvent être utilisés par exemple pour les seniors pour compenser les 200 francs qui manquent, ou encore pour la population adulte si vous le souhaitez; Mesdames et Messieurs, faisons preuve de générosité, parce que c'est dans l'ADN de la Suisse et de Genève.

Soutenons la mobilité, la liberté de déplacement, qui est l'une des libertés principales, soutenons nos transports publics et surtout, surtout, donnons un signal favorable pour l'avenir à nos jeunes, à nos seniors sur l'évolution des transports dans notre canton et le transfert modal.

Je vous remercie, au nom du Conseil d'Etat, de soutenir l'amendement qui permet que soient réglées les modalités, comme l'a rappelé le député Florey. Enfin, je vous remercie de soutenir de manière plus générale ce projet de loi sur la gratuité. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 13488 est adopté en premier débat par 62 oui contre 34 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement, déposé par M. Michael Andersen, dont la teneur est la suivante:

«Art. 36, al. 2 (nouvelle teneur) et al. 3 (abrogé, l'al. 4 ancien devenant l'al. 3)

2 Les Transports publics genevois fixent les tarifs en accord avec le Conseil d'Etat.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 33 oui.

Le président. Nous traitons à présent l'amendement déposé par MM. Jacques Jeannerat et Jacques Blondin. Il modifie deux dispositions. J'invite dans un premier temps l'assemblée à se prononcer sur la modification proposée à l'article 36, alinéa 5, qui se présente comme suit:

«Art. 36, al. 5 (nouveau)

5 L'Etat prend en charge l'intégralité du prix des abonnements mensuels et annuels UNIRESO pour les jeunes de 6 à 24 ans révolus, domiciliés ou en formation à Genève, sous condition de formation ou de revenu, ainsi que la moitié du prix des abonnements mensuels et annuels UNIRESO pour les personnes bénéficiaires de prestation AVS/AI domiciliées sur le canton de Genève. Le Conseil d'Etat édicte les dispositions d'exécution du présent article.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 95 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, l'art. 36, al. 5 (nouveau), ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté.

Le président. Je soumets à présent à votre approbation la modification proposée par l'amendement de MM. Jeannerat et Blondin à l'article 2 souligné:

«Art. 2 Entrée en vigueur (nouvelle teneur)

Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 97 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) ainsi amendé est adopté.

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 13488 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 34 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Loi 13488 Vote nominal