République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 mars 2024 à 18h
3e législature - 1re année - 10e session - 66e séance
M 2664-A
Débat
La présidente. Nous poursuivons avec notre ordre du jour ordinaire et passons à la M 2664-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité était de M. Jean-Luc Forni et est repris par M. Magnin; le rapport de minorité, de M. Patrick Hulliger, est repris par Mme Conti. Je donne la parole à M. Xavier Magnin.
M. Xavier Magnin (LC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Je reprends en effet le rapport de majorité de mon ancien collègue Forni. Cette proposition de motion soulève le problème de l'équivalence des niveaux entre les maturités suisses et les baccalauréats français lors de l'inscription des étudiants à l'Université de Genève. Les détenteurs des titres suisses ont, selon les signataires de ce texte, un meilleur niveau que les détenteurs de baccalauréats français. Cette motion demande donc que l'université relève le niveau d'exigence pour les titres français à une moyenne générale de 14 sur 20, au lieu de 12 sur 20 comme exigé actuellement. La commission s'est attachée à comprendre comment et par qui étaient fixés les critères d'admission pour les porteurs des baccalauréats français s'inscrivant à l'université et si cette dernière avait bien adapté ses exigences aux recommandations émises.
En conclusion des débats, la commission de l'enseignement supérieur a rejeté à une large majorité cette proposition de motion demandant l'augmentation des exigences en vue d'une inscription à l'Université de Genève pour les détenteurs d'un baccalauréat français. Tant le rectorat de l'université que la conseillère d'Etat chargée du DIP - à l'époque - ont convaincu la majorité des commissaires que la commission d'admission et des équivalences des hautes écoles (swissuniversities) procède, chaque année, à une évaluation et à une comparaison des exigences de la maturité suisse avec celles des baccalauréats étrangers. Elle fournit ainsi des recommandations à l'intention des universités de notre pays. L'Université de Genève, même si elle a gardé la moyenne d'admission des baccalauréats français à 12 sur 20, a relevé son niveau d'exigences pour ces futurs étudiants en n'admettant que les cursus qui comptaient un certain niveau en mathématiques et dans les branches scientifiques.
L'université a ainsi pris les mesures nécessaires pour assurer l'équivalence des exigences entre porteurs de maturité suisse et de baccalauréat français lors de l'inscription dans un cursus. Cette proposition de motion ne se justifie donc plus et la grande majorité de la commission de l'enseignement supérieur vous invite à la rejeter.
Mme Virna Conti (UDC), rapporteuse de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, bon, je n'ai pas eu la même chance que le député Alexis Barbey qui, lui, a repris le rapport d'un député de qualité. Là, ce n'est pas mon cas et je vais donc évidemment faire ce que je peux. (Commentaires. Rires.) Je dis ce que je pense ! (L'oratrice rit.)
Cette proposition de motion avait effectivement pour vocation de soulever la problématique de l'équivalence entre la maturité suisse et le baccalauréat français. Actuellement, l'exigence est la suivante - on l'a déjà dit: il faut à un collégien suisse la note de 4 sur 6 pour entrer dans une université en Suisse; un lycéen français a besoin d'un 12 sur 20, ce qui ne correspond pas exactement aux deux tiers de la note maximale, comme c'est le cas pour les diplômes suisses. Raison pour laquelle cette motion a été lancée: pour qu'on s'approche de nos minimaux suisses.
La motion considère que le plus important est que les étudiants puissent partir d'une base commune, autrement dit qu'ils soient soumis aux mêmes exigences pour entrer à l'université. Le recteur de l'Université de Genève a très clairement dit que le taux de réussite des titulaires d'une maturité cantonale était bien supérieur à celui des détenteurs d'un bac français. Il a par ailleurs également dit que les exigences étaient moins strictes pour entrer à l'UNIGE que pour accéder à l'université dans d'autres cantons - il y avait effectivement cette question du cours... sur le truc des mathématiques... Enfin bref ! (L'oratrice rit.)
Ce qu'on veut dire par là, c'est que le but est de donner une impulsion pour relever le niveau d'admission. L'EPFL, par exemple, a augmenté ses exigences en demandant un minimum de 16 sur 20: leur argument part du constat qu'ils avaient beaucoup trop d'étudiants étrangers et ils se sont dit qu'ils allaient donc augmenter le niveau exigé pour les bacs étrangers. Toujours est-il que le constat et la conclusion, c'est finalement que le niveau a été relevé et qu'une nette différence a effectivement été observée depuis. La conseillère d'Etat alors en charge du DIP a également dit, lors de son audition en commission, que plus les exigences sont hautes, moins il y a d'échecs. Partant de tous ces constats, de tous ces éléments, l'UDC vous invite à accepter cette motion.
Mme Sophie Demaurex (S). Mesdames et Messieurs les députés, la motion est dépassée car le baccalauréat a été réformé. L'Université de Genève a déjà renforcé ses conditions d'admission en demandant des garanties. Et, en effet, elle a pris les mesures nécessaires pour assurer l'équivalence des exigences entre porteurs de maturité suisse et de baccalauréat français lors de l'inscription dans un cursus; il semblerait plutôt que cet objet vise à supprimer tous les baccalauréats français. Par conséquent, le groupe socialiste refusera cette proposition de motion, car il s'agit d'une attaque discriminatoire de l'UDC vis-à-vis des origines culturelles des étudiants de l'UNIGE. La diversité est importante pour la qualité de l'enseignement, aussi, vous l'aurez compris, nous vous invitons à rejeter cette motion.
M. Florian Dugerdil (UDC). Nous sommes heureux d'apprendre, au groupe UDC, que ces mesures ont effectivement été corrigées au sein de l'université - ce qui montre donc la légitimité de la motion. Quant aux garanties, est-ce qu'il s'agit des notes ? Nous n'en sommes pas sûrs: nous n'avons pas de confirmation, ce qui confirme encore la légitimité de cette motion. Ce qui est sûr et certain ce soir, c'est que les auditions menées par la commission ont permis de mettre en exergue l'inégalité de traitement en la matière.
Ce texte pose une vraie question de fond, sans faire de procès d'intention, je précise, sur les besoins de swissuniversities - on l'a évoqué tout à l'heure -, tout en demandant de relever le niveau, en renforçant les matières et en maintenant la diversité dans nos universités. Ça garantit également un contrôle équitable pour tous les pays, en assurant des conditions d'admission adéquates et en donnant la même chance à tout le monde.
Mesdames et Messieurs les députés, les améliorations évidentes, en tout cas pour nous, que propose cette motion retiennent notre attention et c'est pourquoi nous la soutiendrons.
La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Florey pour une minute quarante.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Madame la présidente. Je suis quand même surpris des propos de Mme Demaurex - vous transmettrez, Madame la présidente - qui admet en fait que l'EPFL pratique de la discrimination ! Vous pourrez regarder dans le Mémorial: c'est exactement ce que vous avez dit...
La présidente. Je vais continuer à transmettre.
M. Stéphane Florey. ...puisque vous avez déclaré que cette motion était discriminatoire ! On peut donc aisément en conclure que l'EPFL fait de la discrimination, mais pire encore que ce que propose mon texte puisqu'elle demande, elle, 16 ! Ça montre bien que les diplômes proposés par la France et la Suisse ne sont aucunement équivalents, puisqu'elle a très justement placé la barre très haut. Nous, nous l'avions mise un peu en dessous parce que nous ne voulions pas nous calquer sur l'EPFL, mais ça, c'est notre choix politique !
Aujourd'hui, vous parlez de mesures. Mais quelles sont ces mesures, comme l'a dit mon collègue ? On n'en sait rien du tout ! A mon avis, ce ne sont même pas les notes; ils prennent des garanties pour vaguement s'assurer que... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...pour justement - ouh ! - ne surtout pas brusquer les choses ! Vous voulez donc continuer à prendre tout et n'importe quoi, quel que soit le niveau; ça, on l'a bien compris ! La population prendra acte de votre refus...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Stéphane Florey. ...de valoriser nos propres étudiants, au profit du tout et du n'importe quoi ! Je vous remercie.
Mme Laura Mach (Ve). Chers collègues, Mesdames et Messieurs les députés, les Vertes et les Verts vont refuser cette motion et laisser la main à l'université. En effet, c'est bien à l'université et non au politique de décider des critères d'admission nécessaires à ses programmes. Or swissuniversities a récemment émis des recommandations qui ont été prises en compte par l'Université de Genève. Cette motion n'en tient pas compte, raison de plus pour ne pas l'accepter.
M. Sami Gashi (MCG). Chers collègues, cette motion propose de relever les critères d'admission à l'Université de Genève pour les détenteurs de titres scolaires étrangers. Par exemple, on sait que les systèmes éducatifs suisse et français ne sont pas similaires: la maturité s'obtient en quatre ans tandis qu'en France, c'est seulement trois ans. L'idée avec cette motion est donc de réduire l'inégalité de traitement en matière d'accès aux études supérieures, alors que les étudiants genevois sont aujourd'hui défavorisés. (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
La présidente. Oui, je sais, ils vous dérangent, mais c'est volontaire. Ils font exprès et je ne vais donc pas intervenir. (Rires.)
M. Sami Gashi. De ce fait, le MCG votera en faveur de cette motion et vous invite à la soutenir également. Merci de votre attention !
Une voix. Bravo, Sami !
M. Xavier Magnin (LC), rapporteur de majorité ad interim. Je vais essayer de finir sans que vous soyez obligée de sortir des personnes, Madame la présidente. J'ai entendu parler de mesures corrigées; non, elles ne sont pas corrigées ! Elles sont adaptées chaque année selon les préconisations de swissuniversities. Et swissuniversities a bien entendu attendu notre détermination pour prendre des mesures et les adapter chaque année ! Je pense qu'ils attendent véritablement qu'on se positionne !
Il faut savoir que les exigences des études augmentent, il y a donc chaque année des recommandations dans certains domaines pour atteindre le niveau souhaité, tant dans les universités qu'à l'EPFL. S'agissant de l'EPFL, il faut savoir aussi qu'un certain niveau en mathématiques à la maturité fédérale ou cantonale ne suffit parfois pas pour entrer en première année: une année préparatoire est également recommandée pour les étudiants ayant réussi leur maturité suisse, en fonction du niveau en maths.
Swissuniversities n'a donc pas eu besoin de cette motion pour émettre, depuis très longtemps, des recommandations. Ce qu'elle fait pour le bien des universités, pour assurer un certain succès, mais aussi pour permettre à chacun d'avoir accès aux études, et cela par le biais d'un curseur qu'il faut, de nouveau, bien ajuster entre réussite et accessibilité aux études.
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mise aux voix, la proposition de motion 2664 est rejetée par 52 non contre 18 oui (vote nominal).