République et canton de Genève

Grand Conseil

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IN 191
Initiative populaire cantonale 191 « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.
IN 191-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative populaire cantonale 191 « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 22 et 23 juin 2023.

Débat

La présidente. J'appelle le deuxième point fixe, soit l'IN 191 et l'IN 191-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. La parole échoit à M. Cédric Jeanneret.

M. Cédric Jeanneret (Ve). Merci, Madame la présidente. La terre reçoit en une heure plus d'énergie du soleil que l'humanité n'en consomme en une année entière. Pendant des millénaires, les humains ont fonctionné en valorisant l'énergie solaire et ses dérivés: cycle de l'eau, vent et biomasse. Léonard de Vinci, Jean-Jacques Rousseau, Olympe de Gouges ont vécu dans un monde 100% renouvelable.

Puis, la révolution industrielle est arrivée, et nous sommes devenus dépendants d'énergies fossiles dont nous cherchons aujourd'hui à nous passer, comme cela a été confirmé par la votation sur le climat du week-end dernier, grâce à des mesures de sobriété énergétique, d'efficacité énergétique et à un recours accru aux énergies renouvelables.

Le plan directeur de l'énergie genevois mentionne que le photovoltaïque pourrait couvrir la moitié de la consommation d'électricité du canton. Or bien qu'il s'agisse d'une technologie complètement mature, nous en sommes loin, en comparaison avec l'Allemagne ou les Pays-Bas, par exemple, où 10% de l'électricité est déjà d'origine solaire. On peut s'interroger quant à l'opportunité de faire venir des capteurs de l'autre côté de la planète, mais à l'heure où certains envisagent de tapisser les Alpes de panneaux solaires, on ne peut plus remettre en question la pertinence d'en poser sur nos toits, à proximité des appareils consommateurs.

Les Verts souscrivent à l'objectif d'accélérer l'utilisation de l'énergie photovoltaïque dans le canton ainsi que le propose l'initiative 191, qui a été pour partie inspirée de la motion 2835 déposée l'an dernier par notre parti, mais nous préférons utiliser ce texte comme base pour un contreprojet qui permettra de prioriser les installations les plus rentables afin de viser un développement rapide, de valoriser les surfaces les plus prometteuses, notamment celles situées en zone industrielle, et d'éviter le surplus de bureaucratie qu'introduiraient les mécanismes de garantie de prêts et de tarifs de rachat envisagés par les initiants.

Chers collègues, nous vous recommandons de renvoyer cette initiative à la commission de l'énergie en vue de la rédaction d'un contreprojet basé notamment sur les éléments développés dans le rapport du Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

M. Jean-Pierre Tombola (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, cette initiative est dans l'air du temps, puisqu'elle a pour objet la transition écologique et la lutte contre le réchauffement climatique. L'IN 191 répond à des préoccupations réelles, tout comme la loi fédérale sur le climat et l'innovation, qui a été plébiscitée par la population genevoise - ou plutôt suisse - le 18 juin dernier, confirme la volonté politique de la Confédération s'agissant de la lutte contre le changement climatique et de la transition énergétique. L'IN 191 aborde donc des sujets d'actualité.

Le parti socialiste soutiendra le principe d'un contreprojet: nous sommes prêts à discuter de sa teneur, mais surtout nous veillerons à ce que les efforts déployés en faveur de la transition écologique, en l'occurrence l'installation de panneaux photovoltaïques, n'aient pas d'impact sur les locataires. Il est important que nous puissions évoquer cette question dans le cadre des travaux de la commission sur le contreprojet.

Cette initiative vient malheureusement un peu tard, puisque le Grand Conseil avait examiné, lors de la dernière législature, les possibilités d'allégement de certaines procédures, notamment l'accélération des procédures administratives. Cela étant, nous soutiendrons un contreprojet et travaillerons dans ce sens, tout en veillant, je le répète, à ce que les locataires ne subissent pas les conséquences des coûts des travaux en vue de la transition énergétique. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

M. Philippe Morel (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, l'initiative 191 est extrêmement louable, elle poursuit un but auquel nous aspirons tous. Son réalisme, en revanche, est un peu plus douteux. Je salue au passage les observations très factuelles du Conseil d'Etat, qui a émis des réserves quant aux obligations, à l'éligibilité des bâtiments, aux aspects financiers et aux garanties. Pour ma part, je voudrais formuler quelques commentaires généraux.

En Suisse, 40% de l'énergie consommée est de l'énergie électrique, dont environ 32% pour les transports - un tiers -, 28% pour les ménages et 20% pour l'industrie. On sait déjà que la part dévolue aux transports va augmenter significativement avec les modes de déplacement par voie électrique, que ce soit les voitures ou d'autres véhicules. L'énergie est produite à 60% par les barrages, avec les limitations qu'on connaît, à 35% par le nucléaire et les énergies fossiles et, actuellement, à 3,7% par le photovoltaïque. 0,4% de la production solaire fournit de l'énergie sous forme de chaleur; en ce qui concerne les éoliennes, c'est 0,2%, et nous avons en Suisse environ 40 éoliennes - il y en a plus de 1000 en Autriche.

Voyons un petit peu comment sont fabriqués ces fameux panneaux photovoltaïques que nous installons avec beaucoup de discernement chez nous: pour une grande partie - plus de 70% -, ils sont confectionnés en Chine et en Inde. Il faut des mines de quartz, et à partir du quartz chauffé à de très hautes températures, on extrait du silicium. Ces très hautes températures sont obtenues par le biais d'énergies fossiles, essentiellement le charbon. 3000 kilos de quartz fournissent environ une tonne de silicium, et une tonne de silicium permet la fabrication de quelque 1000 panneaux solaires d'un mètre sur un mètre. Pour cela, il faut 12 000 kilowatts-heure ou l'équivalent de 3922 kilos de charbon, et bien sûr qu'en Chine et en Inde, c'est le charbon qui est utilisé. C'est dire que la pollution est énorme pour fabriquer ces installations à partir du quartz et du silicium. De plus, d'autres produits dangereux sont utilisés.

La fabrication de panneaux photovoltaïques et leur provenance ont dès lors un impact écologique majeur, aussi s'agissant du transport de la Chine et de l'Inde jusqu'à nos maisons. Le recyclage constitue également un problème: si l'aluminium et le cuivre peuvent être recyclés, de même que le verre, ce n'est pas le cas du silicium. En Allemagne, en 2021, on comptait 150 000 tonnes de silicium dont on ne sait pas très bien quoi faire.

Ma conclusion est la suivante: bien sûr qu'il faut développer le photovoltaïque, mais il faut le faire chez nous; il s'agit d'un facteur économique important, cela peut stimuler des industries et c'est dans cette orientation-là qu'il faut s'inscrire. Mesdames et Messieurs, nous vous recommandons le renvoi de cette initiative à la commission de l'énergie. Merci. (Applaudissements.)

M. Stefan Balaban (LJS). Sur le principe, le groupe LJS accueille favorablement les projets visant à améliorer l'autonomie énergétique de notre canton. Développer l'installation de panneaux solaires est pertinent. Néanmoins, en l'état, cette initiative est trop restrictive et précise dans son application. De ce fait, un renvoi en commission est souhaité; les travaux nous permettront de prendre en compte ces éléments. Merci, Madame la présidente.

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat, à l'instar de tous les intervenants, partage les buts de l'initiative, mais insiste sur la nécessaire réflexion quant aux modalités de mise en oeuvre de celle-ci dans un contexte particulier. Il convient dès lors de la renvoyer en commission et d'élaborer un contreprojet pour affiner les questions pertinentes qui ont été soulevées. Merci.

La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat.

L'initiative 191 et le rapport du Conseil d'Etat IN 191-A sont renvoyés à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.