République et canton de Genève

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M 2875-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Grégoire Carasso, Léna Strasser, Boris Calame, Sylvain Thévoz, Youniss Mussa, Nicole Valiquer Grecuccio, Glenna Baillon-Lopez, Salika Wenger, Thomas Wenger, Badia Luthi, Françoise Nyffeler, Patrick Saudan pour un soutien à la presse locale et à la citoyenneté
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 11 et 12 mai 2023.
Rapport de majorité de M. André Pfeffer (UDC)
Rapport de minorité de M. Romain de Sainte Marie (S)

Débat

La présidente. Nous passons à l'objet suivant, soit la M 2875-A, classée en catégorie II, trente minutes. La parole est à M. André Pfeffer.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Cette proposition de motion invite, d'une part, à soutenir les communes genevoises qui favorisent l'accès des jeunes à un journal et, d'autre part, «à encourager les autres communes à adopter des mesures similaires». La commission qui a traité ce texte a auditionné un représentant de la Commission fédérale des médias: celui-ci nous a très clairement dit qu'en Suisse, la presse est bonne et que l'équilibre entre les médias privés et les médias de service public est bon. Il a dit en outre que les groupes de presse sont plutôt rentables.

Suite à ces informations - auxquelles nous pouvons ajouter le fait que les jeunes favorisent plutôt les médias en ligne et qu'ils ont à disposition une très large diversité de médias, comme la RTS et certains journaux gratuits, notamment le «GHI» et «20 Minutes» -, l'immense majorité de la commission pense qu'il faut refuser cette proposition de motion pour deux raisons. Premièrement, les invites sont peu claires: comment, en effet, appliquer ce qu'elles demandent ? De plus, selon l'immense majorité, il n'est absolument pas nécessaire que l'Etat participe au financement des communes qui mènent déjà une telle action. Pour ces raisons, je vous recommande de suivre l'immense majorité des commissaires et de refuser cette proposition de motion.

M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. L'immense minorité des commissaires vous encourage à accepter cette proposition de motion qui comporte des invites claires. Tellement claires d'ailleurs que le Conseil d'Etat n'a pas attendu ce texte pour mettre en oeuvre l'idée. C'est du reste plutôt quant à cet aspect-là qu'on pourrait débattre aujourd'hui de son utilité, mais je vais revenir sur le fond.

D'abord, je me permets de répondre au rapporteur de majorité. Je suis un peu étonné: s'il prend tout ce qu'on lui dit pour argent comptant, alors je souhaite lui dire plein de choses. La presse est rentable ! Evidemment, tout le monde le sait: la presse est rentable. On voit des licenciements successifs dans ce domaine, notamment en Suisse romande, depuis des années, mais quand quelqu'un nous dit en commission que la presse est rentable, évidemment, c'est juste ! Non, Mesdames et Messieurs les députés, la presse n'est pas rentable ! On le sait, depuis plusieurs décennies, c'est un domaine meurtri dans lequel nous voyons licenciement après licenciement.

Quant à l'accès des jeunes aux médias en ligne, il s'agit effectivement d'un enjeu essentiel. A quel type de médias voulons-nous que les jeunes aient accès ? Aujourd'hui, sur le web, il y a toutes sortes d'informations dont beaucoup sont des «fake news», des informations tirées de l'intelligence artificielle; même le discours du président du Conseil d'Etat, du moins une partie, est tiré de l'intelligence artificielle. (Rires.)

La qualité de l'information représente un élément essentiel d'un aspect, à savoir le bon fonctionnement de la démocratie, et c'est là que cette proposition de motion est tout à fait pertinente: le fonctionnement de la démocratie est basé sur un accès à une information de qualité. Or, une information de qualité veut dire une information dont les sources sont vérifiées. Aujourd'hui, sur le web, de nombreuses sources d'information, si ce n'est la plupart, ne sont pas vérifiées. Cette information de qualité permet d'éviter ce qu'on peut connaître dans beaucoup de pays, comme aux Etats-Unis avec l'effet Trump: on ne se base que sur des «fake news» et ça induit, malheureusement, une grande partie de la population à parfois adopter des positions basées sur ce qui est qualifié de «fake news», lorsque Donald Trump prétend qu'il existe des faits alternatifs s'agissant de faits pourtant prouvés.

La qualité de l'information est essentielle au fonctionnement de la démocratie. Une information de qualité accessible aux jeunes - c'est ce que demande ce texte, que les jeunes, dès 18 ans, puissent avoir accès à une information locale et de qualité - va faciliter l'apprentissage de la citoyenneté. C'est la raison pour laquelle l'immense minorité de la commission vous invite à accepter cette proposition de motion.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs les députés, chères et chers collègues, il est intéressant de constater - et le rapporteur de majorité l'a rappelé - que nous avons auditionné M. Besençon, de la Commission fédérale des médias, sur ce sujet. Il nous a expliqué que, outre que la presse est rentable - et sur ce point, je rejoins le rapporteur de minorité -, historiquement, toutes les actions similaires qui avaient pu être lancées n'ont jamais porté leurs fruits. De plus, il nous a incités à développer d'autres systèmes, encourager par exemple les écoles à favoriser un enseignement aux médias au profit des élèves afin de développer chez eux un esprit critique bienvenu et, surtout, de les mettre en garde contre les «fake news» dont le rapporteur de minorité a parlé également.

D'autre part - le rapporteur de majorité ne l'a pas mentionné, mais je pense que c'est aussi important -, nous avons auditionné le président de l'Association des communes genevoises qui, lui, s'est déclaré au nom de son comité et de son assemblée générale opposé à ce type d'action en disant: «Certaines communes ont déjà pris l'initiative de le faire, d'autres ne le font pas. Laissez-nous au moins cette petite parcelle d'autonomie.» Sur cette base, le groupe Le Centre vous recommande de refuser cette proposition de motion. Je vous remercie.

M. Grégoire Carasso (S). Chères et chers collègues, j'aimerais tout d'abord saluer l'engagement du rapporteur de minorité, qui a rappelé à notre assemblée tous les éléments fondamentaux et utiles au débat. Je me contenterai donc, si vous le voulez bien... Le groupe socialiste a le plaisir d'être isolé au sein du parlement sur ce sujet, mais c'est à peu près tout: le constat que la presse, l'information et l'information sourcée sont un enjeu de société est assez unanimement reconnu. Je ne sais pas qui exactement vous avez auditionné en commission ni quelles sont les questions que vous avez posées. Il en va de même concernant l'enjeu de l'autonomie des communes. Est-ce que ce texte la limite ? Si vous aviez le moindre doute, vous auriez eu, éclairés comme vous êtes dans cette commission, toute latitude d'amender le texte.

La raison pour laquelle je me permets d'être un brin taquin et assez peu enclin à chercher à convaincre quant à l'enjeu de la jeunesse, de la citoyenneté, des médias, de l'information et d'une information sourcée, c'est que les exécutifs de tous les cantons romands - j'y arrive, Madame la présidente - qui avaient, en leur temps, accepté la loi sur les médias et le train de mesures d'aide aux médias, Fribourg et Vaud en particulier, mais aussi le Conseil d'Etat genevois il y a quelques mois, ont mis en place de telles mesures. Franchement, si ce parlement considère qu'il n'y a là rien à étudier, qu'un texte à balayer alors qu'il ne parlait même pas de soutiens financiers - à ce propos, nous avions eu un débat pour déterminer si c'était trop timoré -, je pense qu'on peut le regretter et, dans l'intervalle, saluer l'action des autres cantons romands en faveur de la citoyenneté et des médias, ainsi que celle du Conseil d'Etat qui a déjà mis en place ce projet pilote. Vous pouvez donc balancer cette proposition de motion comme bon vous semble, le groupe socialiste félicite celles et ceux qui, dans ce dossier, le méritent. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, bien entendu, cette proposition de motion rejoint totalement les objectifs que nous avons, nous, les Vertes et les Verts; nous avons du reste déjà déposé un certain nombre de motions. L'une d'elles demandait qu'on soutienne une information locale et sourcée, de qualité et citoyenne, à travers des mandats de prestations. Je ne sais d'ailleurs plus ce qu'il est advenu de ce texte dans ce parlement; il a probablement été refusé, parce qu'on nous a dit qu'on soutenait trop «Le Courrier». Voilà le genre d'argument qui nous avait été donné.

Nous continuons à soutenir les objectifs, bien entendu, mais en commission, nous avons eu quelques doutes sur les invites, qui demandent de soutenir les communes qui favorisent déjà l'accès à la presse et d'encourager les autres à faire de même. Nous nous sommes aussi interrogés sur l'autonomie communale telle que présentée. C'est pour ça que nous avons eu des doutes. Cela dit, comme la composition du parlement a changé, y compris celle du groupe des Vertes et des Verts, il y aura peut-être des sensibilités un peu différentes. A l'époque, des commissaires s'étaient opposés et un autre, qui vous parle, s'était abstenu. Je pense qu'à présent, nous allons plutôt balancer entre l'abstention et le soutien. Je vous remercie de votre écoute.

M. Yves Nidegger (UDC). Madame la présidente, chers collègues, le groupe UDC, quant à lui, ne va pas balancer, il va soutenir la position majoritaire et vous recommander de rejeter cette proposition de motion; en effet, celle-ci ressemble un peu trop à ce qu'elle est, c'est-à-dire un encouragement donné à l'Etat, par le biais du financement d'abonnements, à apporter à la presse un soutien qui devient un soutien direct.

Ça ressemble terriblement - et peut-être est-ce pour ça que le texte est soutenu sur les bancs du parti socialiste - à ce qu'on voit en France, où l'Etat abonne les ministères et à peu près tout le monde dans les ministères, ainsi que les mairies; l'Etat devient alors l'abonné numéro un du pays. De cette relation entre l'Etat et la presse, qui serait supposée représenter une forme de contre-pouvoir critique, se dégage ce que vous connaissez en France et ce qu'on voit aussi trop souvent en Suisse: un rapport incestueux entre le politique et les journalistes, qui mangent ensemble et font parfois d'autres choses ensemble. Cela aboutit à une presse de moins bonne qualité que ce qu'elle est lorsqu'on la laisse se battre et tâcher de se vendre grâce à son côté attractif et aux bons articles qu'elle produit; c'est ça qui donnera envie aux jeunes de lire, ce n'est pas le fait qu'on leur paie un abonnement pour un journal qu'ils n'ouvriront pas.

M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la presse subit actuellement une crise, une véritable révolution, c'est-à-dire l'arrivée d'internet et de l'intelligence artificielle. Tous ces éléments déstructurent entièrement ce que la presse a été et ce qu'elle est actuellement. Il faut tenir compte de ce fait. Si on peut comprendre les auteurs de cette proposition de motion et si on peut penser qu'ils posent une vraie question, parce que, il est vrai, l'information est importante... Il faut déjà informer de ce que fait notre Grand Conseil de manière synthétique par des articles de presse; il faut renseigner sur ce qui se passe dans les tribunaux, non pas seulement par des articles que personne ne lit dans des feuilles confidentielles ou dans des revues juridiques. Une demande d'information existe et est, je pense, plus importante maintenant qu'autrefois.

Face à cette demande, quel est le rôle de l'Etat ? Doit-il intervenir de manière imposante, comme l'a dit un préopinant, en achetant la bienveillance des médias par la souscription d'abonnements? Doit-il trouver d'autres dispositifs qui sont peut-être boiteux, pour ne pas dire foireux ?

Je pense qu'il faut définir les tâches d'intérêt public et voir s'il y a la possibilité d'avoir des contrats de prestations qui resteraient à définir, avec un financement qui serait très précis, pour une information d'intérêt public - je parle en mon propre nom, comme ancien journaliste, je ne parle pas au nom de mon groupe, puisque nous n'avons pas encore étudié ça, et je dois dire que même en parlant avec des journalistes, j'ai beaucoup de peine à faire avancer cette idée. Voilà, à mon sens, la bonne piste à choisir.

Avec ce texte, nous avons une mauvaise réponse à une bonne question. Cette mauvaise réponse, quelle est-elle ? Soutenir les communes qui offrent des abonnements à des jeunes. Je pense qu'on est un peu à côté de la plaque: les jeunes ont une autre manière de voir l'information, et nous devons entrer à fond dans cette logique-là. Je pense qu'il faut refuser cette proposition de motion, non pas refuser de réfléchir à la question, mais se dire que la piste est mauvaise et qu'il faut aller ailleurs. Merci de votre intérêt.

M. Jacques Béné (PLR). J'ai bien aimé cette proposition de motion de M. Carasso, même si je n'ai pas apprécié son intervention de tout à l'heure, parce que, quand les socialistes déposent un objet et disent que ça ne va rien coûter, au final ça coûte très, très cher. Je ne vois pas comment on peut soutenir les communes, si ce n'est en leur donnant des fonds pour qu'elles-mêmes puissent encourager, comme le texte le demande, les jeunes qui obtiennent la citoyenneté à avoir accès à un journal dont la rédaction est établie à Genève.

Aujourd'hui, la presse a malheureusement de plus en plus de peine à investir dans le contenu et, comme l'a dit en commission le représentant de la Commission fédérale des médias, la qualité a tendance à baisser. Ce qu'il faut faire, et on l'a également dit, c'est sauvegarder la mission et non les médias en tant que tels, peu importe où se trouve la rédaction d'ailleurs. Il vaut du reste mieux que cela soit fait par la Confédération que par les cantons: cela évite les risques de dépendance, qui sont également ceux qu'on pourrait reprocher au texte dans sa volonté de soutenir les communes.

Le problème, c'est que l'efficacité de ce qui a été mis en place au niveau fédéral, à savoir l'aide à la distribution avec la diminution du taux de la TVA, est discutable: on voit bien que ce n'est pas parce qu'on aide les médias dans leur distribution qu'ils arrivent à s'en sortir. Ce qui est difficile, c'est que... Tout le monde a le sentiment - et on le voit bien - que le papier est à peu près fini. Il faut donc inciter à investir dans d'autres canaux, sinon on reste à la situation actuelle et ce n'est pas ce qu'on souhaite. L'aide apportée aux jeunes pour des abonnements gratuits - c'était un peu ça l'idée, n'est-ce pas ? - n'a pas montré son efficacité. Les médias eux-mêmes doivent mettre en place un modèle économique, s'ils le souhaitent.

Il faut plutôt développer - comme on l'a aussi dit en commission - une formation aux médias; des ateliers «fake news» sont menés notamment par la RTS. C'est en effet beaucoup plus porteur en termes de qualité pour la consommation des médias. En résumé, le but n'est pas de soutenir les structures, mais le contenu média, la production des contenus; il ne s'agit pas de soutenir les journalistes en tant que tels, mais la production éditoriale. Ça ne doit pas passer par des subventions qu'on donnerait aux communes ou directement aux médias, car avec ces subventions on créerait plutôt des dissymétries. Je vous invite donc à rejeter cette proposition de motion. Cela ne veut toutefois pas dire que le débat est terminé en matière de presse et d'accès des jeunes à celle-ci. Je vous remercie.

M. Vincent Canonica (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, le mouvement Libertés et Justice sociale vous invite à voter contre cette proposition de motion. La limitation du soutien à la presse locale et aux jeunes est trop restrictive. Pourquoi se limiter à la presse locale et à la jeunesse ? Les difficultés chroniques des médias ne s'arrêtent pas au territoire de la commune ou du canton. Par ailleurs, les sources d'information des jeunes ne se réduisent non plus à la presse écrite. Pour le mouvement Libertés et Justice sociale, les limites posées par ce texte sont inéquitables et cause d'injustice. Aussi, cette proposition de motion sera refusée par notre mouvement et nous vous invitons à en faire de même. Merci.

La présidente. Merci. Monsieur Sylvain Thévoz, vous avez la parole pour quarante-sept secondes.

M. Sylvain Thévoz (S). Merci beaucoup, Madame la présidente. Je réagis brièvement à l'intervention de M. Nidegger - vous transmettrez - qui a eu des propos assez méprisants sur la presse, sur les journalistes aux relations «incestueuses». Il prend l'exemple français, mais il faut plutôt prendre l'exemple de l'UDC: Blocher avait racheté la «Basler Zeitung» et voulu racheter le «GHI» et «Lausanne Cités», M. le conseiller national Roger Köppel a racheté la «Weltwoche». On comprend donc que du côté de l'UDC, on ne veut pas que la presse s'en mêle, parce que les grands capitaines d'industrie formatent les esprits en achetant eux-mêmes des journaux. C'est évidemment quelque chose contre quoi il faut lutter. On soutient bien l'agriculture, on soutient des secteurs de l'agriculture, parce qu'on pense que ce sont des éléments essentiels, fondamentaux et qu'on doit en garantir la qualité.

Quant à la position de LJS, elle est incompréhensible: qui peut le plus peut le moins. Soutenez la proposition de motion et on ira plus loin ensuite. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Je me permets de compléter les propos de mes préopinants. L'intérêt principal de cette proposition de motion n'est pas seulement, n'est pas essentiellement de soutenir la presse, même si la presse mérite effectivement notre soutien, mais de soutenir la jeunesse; ce soir, on a relativement peu dit que le problème de l'accès à l'information de qualité chez les jeunes est véritablement très important. La question de savoir comment accéder à une information sourcée, à une information donnée par des professionnels, est effectivement traitée de manière très large dans les écoles, mais elle pose un véritable problème dans les temps dans lesquels nous vivons.

Il a aussi été dit que les budgets qui seraient consacrés à la mise en oeuvre de ce texte seraient énormes; je vous invite à aller comparer les budgets alloués à la jeunesse à ceux alloués aux aînés dans les comptes des communes. C'est très bien d'aider toutes les tranches d'âge, mais il n'est à mon avis pas déraisonnable de suggérer aux communes de notre canton d'inciter les jeunes à s'informer auprès de médias locaux et de qualité. C'est pourquoi je ferai partie du petit groupe au sein du groupe des Verts qui soutiendra ce texte. Je vous remercie.

La présidente. Je vous remercie. La parle va au rapporteur de minorité, M. de Sainte Marie, pour dix secondes.

M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Merci pour les dix secondes, Madame la présidente. Il faut voter cette proposition de motion pour un soutien à l'emploi local et pour un soutien à l'accès à une information de qualité en vue du bon fonctionnement de notre démocratie.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais répondre à la première intervention du rapporteur de minorité: personne ne conteste l'utilité de la presse pour le bon fonctionnement de la démocratie. Là, il est question d'autre chose. Pour rappel, les invites sont floues; les communes ne souhaitent pas une intervention de l'Etat; la diversité des médias et l'accès des jeunes à l'information existent déjà. Encore une fois, je vous invite à suivre tous les commissaires sauf les deux camarades socialistes et à refuser cette proposition de motion. Merci.

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Il ne peut y avoir de démocratie sans presse libre, indépendante et forte; c'est vraiment un enjeu contemporain. Nous le savons, avec la migration de l'information sur les plateformes sociales, ce sont autant de revenus issus traditionnellement des annonces publicitaires qui sont passés sur d'autres plateformes, les fameux GAFAM. A cela s'ajoute l'abonnement, disruptif en matière économique, des gratuits - mais vous connaissez l'adage: quand vous ne payez pas un produit, c'est que le produit, c'est vous-même - qui amène une partie de la jeunesse à s'informer soit à travers des quotidiens gratuits soit à travers des réseaux sociaux. C'est problématique, Mesdames et Messieurs. Le Conseil d'Etat l'a dit dans son discours de Saint-Pierre: il ne peut y avoir de démocratie effective sans des citoyens formés, notamment en Suisse, où l'on vote tous les trois mois sur des sujets complexes.

Cette proposition de motion fait un petit pas dans le bon sens; celui-ci est tellement bon que ce texte est déjà réalisé. Le Conseil d'Etat a en effet lancé l'opération «Mon journal», qui consiste à favoriser l'accès des jeunes à un abonnement à un journal de leur choix, de manière libre, pour garantir cette liberté de la presse et l'esprit critique des jeunes. On ne peut pas à la fois vouloir l'esprit critique et dire aux gens ce qu'ils doivent lire. Le soutien public est délicat dans ce type de situation, mais il doit exister.

Nous devons travailler d'une manière plus large sur les questions soulevées pour donner la possibilité aux médias de subsister à l'échelle cantonale et fédérale, car nous ne pouvons pas nous passer du bien nommé quatrième pouvoir, qui est un pouvoir critique des trois autres et qui permet, par là même, le bon fonctionnement de la démocratie. On sait que les régimes qui n'avaient pas de médias ou qui ont des médias inféodés à certains groupes d'intérêt, comme on l'a bien dit, sont des régimes de tendance plutôt autoritaire; la liberté de la presse implique la pluralité de celle-ci. Dans ce sens-là, Mesdames et Messieurs, aux yeux du Conseil d'Etat, ce sujet mérite peut-être un débat un peu plus large que celui que nous avons ici. Quoi qu'il en soit, les objectifs de ce texte sont d'ores et déjà réalisés, vous pouvez le voter ou le refuser, le Conseil d'Etat a déjà fait sienne cette proposition. (Applaudissements.)

La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote sur cette proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2875 est rejetée par 60 non contre 28 oui et 4 abstentions (vote nominal).

Vote nominal