République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 23 juin 2023 à 18h10
3e législature - 1re année - 2e session - 12e séance
PL 13184-A
Premier débat
La présidente. Notre prochaine urgence est le PL 13184-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité était de M. Olivier Baud; Ensemble à Gauche n'étant plus représenté dans ce parlement, il est repris par Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Le rapport de première minorité de M. Patrick Malek-Asghar est repris par Mme Diane Barbier-Mueller. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), députée suppléante et rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Pour ne pas allonger les débats, je vais proposer le renvoi de ce projet de loi en commission. En effet, il nous semble important que le Conseil de surveillance du marché de l'emploi soit réentendu par l'ensemble des députés, pour montrer qu'il y a des règles, négociées de manière paritaire, sur lesquelles on ne peut pas s'asseoir, quoi que l'on en pense. Il nous semble important que ces explications soient à nouveau fournies, raison pour laquelle je demande le renvoi de cet objet en commission. Merci beaucoup.
La présidente. Je vous remercie. Nous allons d'abord donner la parole aux rapporteurs de minorité sur le renvoi en commission. Madame la rapporteure de première minorité, vous avez la parole sur le renvoi.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR), rapporteuse de première minorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Je vais rappeler que l'autorité de surveillance a été auditionnée au cours des travaux sur les M 2785 et 2789 et qu'elle a pu s'exprimer. Je rappellerai aussi les propos de l'OCIRT qui ont été très clairs. Je ne vais pas le faire maintenant pour ne pas allonger le débat.
La présidente. Je vous remercie. Monsieur Christo Ivanov, rapporteur de deuxième minorité, sur le renvoi en commission ?
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. La deuxième minorité refusera le renvoi en commission.
La présidente. Je vous remercie. Madame Patricia Bidaux, rapporteure de troisième minorité, vous avez la parole, sur le renvoi.
Mme Patricia Bidaux (LC), rapporteuse de troisième minorité. Merci, Madame la présidente. Je n'ajoute rien à ce qui a été dit à l'instant.
La présidente. Je vous remercie. Je mets donc aux voix cette demande.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13184 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 49 non contre 31 oui.
La présidente. Nous poursuivons le débat. La parole est à la rapporteure de première minorité, Mme Diane Barbier-Mueller.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR), rapporteuse de première minorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Ce projet de loi résulte du constat qu'il manque plus de 3000 places de crèche à Genève et qu'aujourd'hui, les places de crèches municipales ne permettent pas de répondre à la demande. L'application des usages est en train de tuer l'alternative que représentent notamment les crèches privées, et c'est bien dommage.
Maintenant, ce qui intéresse tout le monde, c'est le point de vue de l'OCIRT. Je vais donc rappeler quelques éléments liés à l'application, en citant le rapport d'unanimité sur les motions 2785 et 2789. Je ne vais pas le citer entièrement, mais le représentant de l'OCIRT indique qu'il s'agit de l'application d'une loi élaborée au parlement. A partir du moment où il existe des usages, il est normal qu'ils s'appliquent à des crèches subventionnées ou non, peu importe ensuite si... Bon, là, je ne cite plus, parce que c'est un peu long et fastidieux. Si les usages sont obligatoires, c'est une norme en matière de contrôle du travail et ce sera au Grand Conseil de procéder à des modifications, car c'est à lui d'élaborer les lois et c'est lui qui confie l'édiction d'usages dans le cadre de la LIRT. C'est le législateur qui peut faire potentiellement ce qu'il veut.
Partant de ce constat, je ne vois pas en quoi l'OCIRT aurait aujourd'hui quelque chose de nouveau à apporter. Par ailleurs, dans le cadre des dix auditions qui ont été menées sur les motions, le DIP a été entendu, de même que le SIT, l'OAC, l'Association des cadres des institutions de la petite enfance, plusieurs crèches, la Ville de Genève et évidemment les deux signataires des motions. Par conséquent, je pense que le travail parlementaire a été fait sur cette problématique-là. Enormément de parents ont des difficultés à trouver des places de crèche. Aujourd'hui, je ne comprends pas l'intérêt d'étouffer cette offre alternative. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. J'ai vu que la rapporteure de majorité, qui s'est limitée à demander le renvoi en commission, a sollicité la parole. Je vais donc la lui redonner. Madame Nicole Valiquer Grecuccio, c'est à vous.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), députée suppléante et rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. J'aimerais rappeler que ce Grand Conseil avait adopté la motion 2785 pour un soutien et le développement des écocrèches, qu'il avait aussi adopté la motion 2789 pour mettre fin à l'étranglement des crèches privées, que nous avions passé plus d'une dizaine de séances en 2022 à essayer de trouver un compromis, que nous avons trouvé, et, ensuite, Mme Barbier-Mueller a déposé ce nouveau projet de loi.
Bien sûr que le niveau de l'offre est bien loin de répondre à l'ensemble des besoins. Nous en sommes tous et toutes conscients. Par contre, pour la majorité de la commission, il ne saurait être question de passer sur les usages et sur les recommandations du Conseil de surveillance du marché de l'emploi.
Nous avons bien compris que Mme Barbier-Mueller disait qu'on n'avait qu'à appliquer le salaire minimum. Mais vous créez une disparité complète dans les salaires des personnes engagées dans les crèches. Je vous rappelle qu'on parle, pour une éducatrice, d'un salaire horaire de 35,75 francs; pour les ASE, de 29,20 francs et, pour les auxiliaires, de 31,86 francs. On n'est pas en train de parler de salaires mirobolants. Ce sont ces salaires-là qui font l'objet d'une convention collective de travail... (Remarque.) ...et d'un accord avec le Conseil de surveillance du marché de l'emploi.
Très clairement, nous contestons le fait que ce Grand Conseil puisse remettre en question des accords négociés paritairement, et c'est bien de cela qu'il s'agit sur le fond. Donc, encore une fois, nous vous demandons de ne pas créer une situation conflictuelle, qui ne manquera pas d'arriver, non seulement avec les salariés de ce secteur, mais aussi avec les représentants syndicaux employeurs-employés.
Les usages, c'est une chose qu'on doit respecter... (Commentaires.) ...pour que les institutions puissent fonctionner correctement, avec les acteurs économiques de ce canton, de même qu'avec les acteurs syndicaux. Raison pour laquelle je demande encore une fois le renvoi de ce projet de loi en commission, pour que les acteurs en question puissent venir vous l'expliquer, si vous ne croyez pas la majorité de cette commission. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Est-ce qu'un rapporteur de minorité souhaite s'exprimer sur le renvoi en commission ? (Commentaires.) Très bien, nous pouvons donc passer directement au vote. (Brouhaha.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13184 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 48 non contre 29 oui.
La présidente. Je rappelle que les personnes qui souhaitent discuter ont la salle des Pas-Perdus à disposition, si on peut... (Remarque.) Monsieur Florey, vous êtes directement concerné ! Mon rappel vous semble peut-être inutile, mais je vous assure que vous pouvez le suivre ! Je donne la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, avec un manque de 3200 places de crèche, dont plus de 1000 en Ville de Genève, le constat sur le manque de places dans notre canton de Genève est quand même d'une rare évidence.
Ce projet de loi propose une offre alternative qui répond, je pense, aux besoins de notre population. Il demande que la délivrance et le maintien de l'autorisation d'exploitation d'une structure d'accueil préscolaire soient subordonnés au respect par l'exploitant de la crèche d'une convention collective de travail pour le personnel de la petite enfance ou du statut du personnel de la collectivité publique dont la structure fait partie ou, à défaut, du salaire minimum prévu à l'article 39K de la loi sur l'inspection et les relations du travail, du 12 mars 2004.
Pour toutes ces raisons, la deuxième minorité de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport vous demande d'accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Patricia Bidaux (LC), rapporteuse de troisième minorité. Beaucoup de choses ont déjà été dites. Le but de ce projet de loi est effectivement d'accroître les possibilités d'ouvrir des lieux d'accueil pour la petite enfance. Je rappellerai ce que j'ai noté dans mon rapport de minorité sur la situation de l'accueil extrafamilial institutionnel des jeunes enfants en Suisse et à Genève, avec des circonstances compliquées. La Suisse échoue largement à s'inscrire en tant que levier de lutte contre les inégalités sociales. Il y a beaucoup de choses qui sont mentionnées dans ce très bref rapport, je souhaitais ici les confirmer. Je souhaite aussi rappeler qui sont les personnes contraintes de rester à la maison ou de prendre le relais: ce sont toujours les femmes et les grands-mères. Donc merci d'accepter ce projet de loi.
M. Djawed Sangdel (LJS). Chers collègues, l'avenir de notre canton et de notre pays dépend des enfants d'aujourd'hui, qui sont les créateurs de valeur de demain. Le groupe LJS précise que, jusqu'au 1er janvier 2021, les crèches privées disposaient de leur propre règlement interne du personnel, conforme au droit du travail et soumis à la validation des autorités cantonales.
Aujourd'hui, entre 4000 et 5000 places de crèche manquent dans notre canton, plus particulièrement 1100 places en Ville de Genève. De nombreuses familles sont en difficulté, face à des pénuries importantes de places, à une demande trop élevée, à des listes d'attente souvent assez longues et, surtout, au prix: une place à plein temps dans les crèches privées est déjà sensiblement plus élevée que dans le public, c'est-à-dire entre 2500 francs et 3900 francs suisses. En appliquant cette procédure de salaire harmonisé municipal dans les structures privées, nous allons créer encore des tensions, avec des augmentations de prix qui vont indirectement pénaliser les citoyens, les jeunes et les enfants.
Les crèches offrent un environnement stimulant et éducatif pour les enfants; elles favorisent leur développement cognitif, social, émotionnel et physique. Les crèches préparent les enfants à la vie scolaire, en les familiarisant avec les routines, les règles et les activités d'apprentissage de base. Hélas, aujourd'hui, plusieurs familles attendent depuis des mois, voire des années, car elles ne trouvent pas de place libre ou parce que le prix est trop élevé pour elles.
Les usages de la petite enfance imposent non seulement l'harmonisation des salaires, mais aussi l'ensemble des règles du personnel, à savoir: allongement du congé maternité de 16 à 20 semaines; un treizième salaire obligatoire; sept semaines de vacances, ainsi que le financement de l'assurance perte de gains de deux tiers par les employeurs, contre une répartition de 50-50. Ces nouveaux usages pénalisent indirectement les citoyens par une augmentation du prix des crèches ou par la fermeture de certaines d'entre elles, car elles n'arrivent pas à gérer les charges importantes de leur personnel.
Ce projet de loi demande de laisser les crèches privées survivre en ne leur imposant pas le salaire municipal, mais en leur demandant de respecter le salaire minimum. Au vu de nos explications et dans l'intérêt de nos concitoyens et de nos enfants d'aujourd'hui, créateurs de valeur de demain, le groupe LJS approuve ce projet de loi et demande à l'ensemble des honorables députés d'en faire de même, pour l'intérêt de notre canton et des familles qui attendent depuis des mois voire des années une place libre. Je vous remercie beaucoup de votre attention.
M. Sébastien Desfayes (LC). Je crois que ce qui vient d'être dit a été parfaitement clair, mais je tiens à souligner que c'est un combat qui est absolument fondamental, parce que, pendant dix ans, l'ancienne conseillère d'Etat chargée du département de l'instruction publique a mené une politique visant la mort programmée des crèches non subventionnées, ce qu'on appelle les crèches privées. Cela a eu un effet désastreux, à savoir que, pour des raisons de pure idéologie, quasiment aucune place de crèche privée n'a pu être créée, aucune entreprise n'a voulu, du fait de la jungle réglementaire, créer ses propres places d'accueil. On arrive donc à la situation que l'on connaît tous aujourd'hui; quasiment l'ensemble des intervenants l'a répété, si ce n'est la rapporteure de majorité.
Cette situation actuelle a des effets par rapport à l'égalité, simplement parce que, dans le cas d'un couple marié qui a des enfants, mais qui n'arrive pas à les placer en crèche, un des conjoints va renoncer à son activité professionnelle, et c'est bien entendu le principe de l'égalité entre hommes et femmes qui est atteint. (Commentaires.)
Cette idéologie de gauche visant à détruire les places de crèches créées par le privé ou à empêcher la venue d'acteurs privés dans le monde de la petite enfance a connu un nouveau développement en 2020, et ce n'est pas du tout le partenariat social... C'est-à-dire que le SASAJ est venu avec des normes qui n'ont jamais été négociées avec les acteurs privés (les crèches non subventionnées), et ces règles voulaient simplement imposer des conditions de travail de la fonction publique à des entités qui ne bénéficient d'aucune subvention. Bien entendu, économiquement, ce n'est pas viable.
Raison pour laquelle, si cette loi n'est pas votée urgemment - soit aujourd'hui -, les rares crèches qui subsistent aujourd'hui disparaîtront, alors même que l'on a une opportunité extraordinaire, c'est-à-dire qu'en faisant simplement comme l'ensemble des autres cantons suisses, en permettant un marché libéral, on pourra répondre à la demande par le privé, sachant que l'étatisation des crèches voulue par la gauche, si elle coûte cher, ne crée aucune place de crèche supplémentaire. Merci, Madame la présidente.
Mme Laura Mach (Ve). J'aimerais revenir sur le fait que la motion 2785 «pour le soutien et le développement de projets d'éco-crèches sur le canton de Genève», ainsi que la motion 2789 «pour mettre fin à l'étranglement des crèches privées» ont été votées et renvoyées au Conseil d'Etat le 14 octobre 2022. Cette dernière motion (la M 2789) invite notre Conseil d'Etat «à procéder à toute modification législative ou réglementaire nécessaire à favoriser le maintien et la création de structures de la petite enfance non subventionnées». Le travail doit donc se faire.
Cependant, ce projet de loi vient court-circuiter ce processus, sans tenir compte de toute la complexité du problème, et propose simplement qu'on puisse appliquer le salaire minimum, sans spécifier aucune autre condition. Même si, dans l'urgence, l'assouplissement autour des salaires peut paraître une solution pour permettre à une structure particulière de survivre, le fait de demander un changement de loi ouvre la possibilité d'une perte de protection pour l'ensemble des employés des crèches du privé, dont la majorité sont des femmes. S'il s'avère que les crèches privées doivent être soutenues, car elles sont source de créativité et peuvent répondre à un besoin, elles doivent l'être autrement que par la baisse des salaires.
Pour toutes ces raisons, nous ne soutiendrons pas ce projet de loi sous cette forme. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Sophie Demaurex (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, l'objectif commun est bien de créer des places de crèches et non pas de déplacer du personnel des crèches non subventionnées vers les subventionnées. Il manque cruellement d'éducatrices et d'éducateurs, et j'ose imaginer que vous êtes toutes et tous d'accord avec le fait que ce sont bien des professionnels de la petite enfance, on n'est pas là en train de proposer que nos enfants soient accompagnés durant leurs journées par des personnes non formées. On ne l'imaginerait pas dans le département de l'instruction publique: on n'imaginerait pas un professeur... Il ne s'agit donc pas de savoir si on doit payer au salaire minimum ou à un salaire adéquat une personne, il s'agit de savoir si on doit recruter des éducateurs et éducatrices ou du personnel non formé. Vous ne trouverez pas et nous ne trouverons pas d'éducateurs et d'éducatrices qui travailleront au salaire minimum ! Les salaires qui ont été exposés par Mme Valiquer sont tout à fait conventionnels pour un éducateur et une éducatrice, et ce sont bien là les professionnels dont nous avons besoin. Nous n'allons donc pas créer des places de crèche en déplaçant ces professionnels. Et, je peux vous le dire, ces professionnels vont là où le salaire est le meilleur. Il y a une grosse pénurie d'éducateurs et d'éducatrices. Pour ces raisons-là, je vous prie de refuser d'entrer en matière sur cette proposition, puisqu'elle ne crée pas de places, elle crée un déplacement de personnes. Merci. (Applaudissements.)
Mme Ana Roch (MCG). Il est indéniable qu'il y a un véritable intérêt à ce que les professionnels s'occupant des jeunes enfants, une population particulièrement sensible, soient correctement formés et rémunérés. Or le salaire minimum actuel ne représente pas une rémunération à la hauteur du niveau de formation souhaité pour ces professionnels. Cette situation soulève des inquiétudes quant à une possible dégradation de la qualité de la formation dispensée et, par conséquent, des prestations offertes aux enfants.
Ce qui est difficile à comprendre, c'est pourquoi certaines personnes choisiraient de travailler dans un secteur privé où les salaires sont inférieurs à ceux du secteur public. Cette disparité salariale est d'autant plus préoccupante que le secteur de la petite enfance connaît une pénurie de professionnels.
En l'absence d'alternatives viables, seuls les travailleurs frontaliers seraient disposés à accepter un emploi rémunéré au salaire minimum dans le secteur privé. (Commentaires.) Par ailleurs, les salaires conventionnés et l'application des usages ne sont pas des phénomènes propres à la branche de la petite enfance: on observe cela également dans d'autres domaines d'activité, ce qui a un impact significatif sur l'activité commerciale dans son ensemble. Déroger à ces règles pour un seul secteur d'activité, même s'il s'agit de celui de la petite enfance, constituerait une inégalité de traitement et ouvrirait la voie à une multitude de demandes similaires de la part d'entreprises d'autres secteurs.
Il est évident que l'offre de places en crèches privées doit être soutenue en tant qu'alternative valable pour les parents. Cependant, la solution ne réside pas dans une telle dérogation salariale. Il serait plus approprié de trouver des moyens d'encourager les professionnels de la petite enfance à travailler dans le secteur privé en offrant des avantages et des perspectives de carrière attractives, plutôt que de les contraindre à accepter des salaires inférieurs à la valeur de leur travail et de leur formation.
En conclusion, il est crucial de reconnaître l'importance d'une formation adéquate et d'une rémunération équitable pour les professionnels de la petite enfance. Déroger aux règles salariales établies pour un seul secteur d'activité serait injuste et pourrait entraîner des conséquences imprévues. Il est essentiel de trouver des solutions plus globales et durables pour résoudre cette problématique et garantir la qualité des services offerts aux enfants et aux parents. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
La présidente. Je vous remercie. Je donne la parole à M. François Baertschi pour trente-quatre secondes.
M. François Baertschi (MCG). Comme cela a été bien dit par ma préopinante, c'est une bonne question qui est posée, malheureusement, on donne une mauvaise réponse. Mauvaise réponse, parce qu'on arrive à un engagement massif de frontaliers avec ce dispositif. Le véritable problème, c'est la formation. On a un déficit de formation, qui est dû notamment au salaire minimum, que le MCG a toujours dénoncé, et le problème du salaire minimum... (Commentaires.)
La présidente. Il vous faut conclure.
M. François Baertschi. ...dans le domaine de la formation se situe au niveau des stages, et ça... (Commentaires.)
La présidente. Merci.
M. François Baertschi. ...ça doit être résolu impérativement, dans ce domaine, mais...
La présidente. Vous avez terminé.
M. François Baertschi. ...dans d'autres domaines aussi, c'est essentiel si on veut réinsérer les Genevois.
La présidente. Merci.
M. François Baertschi. Là, quelque part, on ne s'attaque pas... (Le micro de l'orateur est coupé.)
La présidente. Merci. Je donne la parole aux rapporteurs - s'ils souhaitent la prendre, il faut la demander. (Un instant s'écoule.) Madame Patricia Bidaux, Monsieur Christo Ivanov ? Madame Diane Barbier-Mueller, rapporteure de première minorité, vous avez la parole.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR), rapporteuse de première minorité ad interim. Merci, Madame la présidente. L'argumentation de la gauche me laisse assez perplexe. Elle qualifie le salaire minimum de conditions indignes et diabolise complètement ce montant. Il représente quand même 24 francs de l'heure ! (Commentaires.) Quand il a été voté, il était censé justement rétablir un petit peu de dignité dans les conditions de travail, donc je ne comprends pas très bien. Là, ce que je trouve indigne - enfin, indigne dans le discours -, c'est de dire que le secteur privé sous-paie ses employés, alors qu'il faut savoir que le privé ne touche aucune subvention, contrairement au public, et que... J'ai le temps du groupe après, non ?
Une voix. Oui !
Mme Diane Barbier-Mueller. Merci. (Commentaires.) ...d'obliger des entités privées, qui font avec les moyens du bord... Elles reçoivent les rémunérations des clients, donc des parents en l'occurrence, et doivent faire tourner une entreprise avec les revenus qu'elles reçoivent et pas avec de l'argent qui tombe du ciel, comme c'est le cas pour l'Etat ! (Commentaires.) Donc comparer le privé et le public, je trouve ça vraiment assez injuste ! Vraiment injuste !
L'application des usages est purement et simplement une ingérence dans la liberté du marché, puisqu'on force... Je prends le temps qu'il me reste du groupe maintenant pour expliquer un peu quand même le concept du projet de loi, puisqu'on a dit beaucoup de contrevérités. Il ne demande pas de brader les salaires, il demande de fixer un salaire minimum qui est un prix plancher, d'accord ? Donc un minimum. Après, vous l'avez tous dit, il y a une pénurie de personnel, ce qui veut dire que les employés ont le choix: ils ont le choix d'aller travailler soit dans le secteur privé, qui sous-paie, comme vous le dites, au salaire minimum - minimum ! -, mais qui peut payer plus pour attirer justement des bons éléments... Et dans le cadre des travaux sur les motions, on a auditionné du personnel de certaines crèches, et ces personnes ont très clairement dit qu'elles préféraient travailler dans des crèches qui les payaient moins que le secteur public, parce qu'elles avaient d'autres conditions de travail: d'autres avantages en nature, plus de flexibilité, elles peuvent importer de nouveaux processus d'éducation. Elles avaient donc fait le choix de ne pas travailler dans une structure publique, mais de travailler dans une structure privée.
Aujourd'hui, l'alternative, ce n'est pas privé/public: soit ces personnes-là, qui ont fait le choix de ne pas travailler dans le secteur public, peuvent travailler dans une structure privée, soit ces structures-là ferment. Maintenant, on s'intéresse effectivement beaucoup au cas du personnel, mais moi je dirais: laissez le personnel choisir ce qu'il a envie de faire ! Il y a une pénurie de places, donc si les gens ne veulent pas toucher le salaire minimum, ils peuvent aller dans le secteur public, mais laissez aussi les parents avoir une alternative ! Parce qu'aujourd'hui, la grande majorité des parents n'ont pas de place en crèche ! Il y a une pénurie de crèches. (Commentaires.) 50% des parents aux Eaux-Vives ne trouvent pas de place en crèche ! Je trouve que c'est un peu facile de votre part, vous qui n'avez pas forcément tous rencontré le cas de figure... Vous avez peut-être eu une place en crèche à l'époque, moi je n'en ai pas eu, et je suis directement impactée, parce que je dois payer au salaire minimum une personne privée et je n'ai pas le moyen de faire autrement, mais heureusement, je peux me permettre une situation où les deux parents travaillent ! (Commentaires.) Oui, je sais, je pleure, les violons... Effectivement, je suis privilégiée, je peux me le permettre, mais ce n'est pas le cas de tout le monde: certaines femmes doivent renoncer à travailler à cause de ça, et je ne comprends pas que la gauche, qui s'est déjà opposée au congé parental, vienne encore maintenant s'opposer aux crèches ! (Commentaires.)
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à soutenir ce projet de loi. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
La présidente. Merci. J'invite les personnes, même si elles ne sont pas d'accord avec ce qui est dit, à respecter l'orateur et à ne pas intervenir, que ce soit dans un sens ou dans l'autre. Madame Valiquer Grecuccio, il vous reste une minute vingt-quatre sur le temps de votre groupe. Vu que vous êtes seule face à trois rapporteurs, il est possible que je vous laisse un peu plus de temps, mais je vous prie d'être brève.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), députée suppléante et rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Vous transmettrez que, d'abord, la gauche n'a pas de leçon de politique à recevoir en matière de petite enfance. Je vous rappelle que c'est Manuel Tornare, conseiller administratif de la Ville de Genève, qui, le premier, a porté cette politique haut et fort. Nous n'avons donc vraiment pas de leçon à recevoir.
Deuxièmement, dire que les usages sont une ingérence dans le marché... J'espère que le Conseil de surveillance du marché de l'emploi, où sont représentés les employeurs et les représentants syndicaux, saura apprécier cela, parce que les usages, cela existe dans de nombreux secteurs, y compris dans le secteur du bâtiment - que, Madame Barbier-Mueller, vous devez bien connaître. Je trouve que parler d'ingérence est proprement scandaleux.
Ensuite, dire que les crèches privées sont condamnées... On a oublié de mentionner que, lors des auditions, il y avait 33 structures non subventionnées, qui fonctionnent et qui fonctionnent bien, qui appliquent les usages.
Et pourquoi défend-on le salaire minimum ? On le défend pour des secteurs hautement précarisés qui ne bénéficient d'aucune protection. Là, on parle d'une convention collective et d'usages, avec des salaires qui sont autour de 35 francs et non pas de 20 et quelques, comme vous l'avez dit. Par respect pour ces personnes et après avoir entendu ce qu'a dit Mme Ana Roch tout à l'heure, je demande le retour en commission.
La présidente. Je vous remercie. Nous votons sur cette demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13184 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 62 non contre 32 oui et 1 abstention.
La présidente. Je donne la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Hiltpold.
Une voix. Enfin la vérité !
Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, j'aimerais vous remercier pour ce baptême du feu, en ce qui me concerne, où je vous exprimerai la position du Conseil d'Etat dans ce dossier qui est plutôt sensible.
Effectivement, quelques discussions ont bien eu lieu en commission dans le cadre de travaux sur des motions, mais le département n'a pas été formellement entendu sur ce projet de loi. Cela étant, nous prenons acte du fait qu'il ne repartira pas en commission.
J'aimerais vous dire que le Conseil d'Etat n'est pas tout à fait à l'aise avec ce projet de loi. Nous partageons certes le constat selon lequel il manque cruellement de places de crèche et de solutions de garde pour les parents. La question qui se pose est la suivante: est-ce que ce projet répondra à cette problématique ? Peut-être. Pas complètement, mais peut-être.
Nous pouvons partager, et je partage l'idée que les crèches privées peuvent peut-être avoir des salaires qui ne sont pas les mêmes que ceux du secteur public, comme les écoles privées d'ailleurs, dont les enseignants ont un statut différent de ceux de la fonction publique. Néanmoins, la suppression des usages s'appliquera aussi à des crèches qui sont subventionnées par des communes, mais pas affiliées à une CCT, et ce point pourrait être problématique, parce que certaines des crèches subventionnées seront soumises à des conventions collectives de travail et d'autres pas. Cela ne veut pas encore dire que les communes qui subventionnent ces entités diminueront les salaires. Cela pourrait être le cas, mais pas forcément.
Par conséquent, si on veut aider les crèches privées et qu'on veut donner un peu de flexibilité, oui, ce projet de loi répond à ce point et pourrait permettre à certaines crèches privées de peut-être un peu mieux tourner en agissant sur les salaires, mais, comme vous le savez, et cela a été dit, il s'agit quand même d'un personnel qui est hautement féminin, un personnel qui souhaite que sa fonction soit valorisée, reconnue, considérée, et on peut s'interroger sur le message qui serait donné si finalement on agissait uniquement sur les salaires pour obtenir plus de places en crèche.
Si ce projet est voté, ce qui est certain, il faudra néanmoins maintenir le taux d'encadrement, parce que c'est absolument crucial. Il faudra maintenir les qualifications de ce personnel, parce qu'on ne peut pas se permettre de faire garder des enfants par du personnel non qualifié. Il est vrai aussi qu'il existe une pénurie, et, comme cela a été dit, il n'est pas exclu que le personnel souhaite postuler et travailler dans des crèches publiques ou qui appliquent les CCT - les CCT de la Ville de Genève ou les CCT intercommunales. Il n'est pas exclu non plus, comme je le disais, que ces communes qui subventionnent des crèches qui ne sont pas sujettes à des CCT maintiennent ces salaires-là.
Il existe encore un risque d'un autre ordre: comme vous le savez, les communes qui subventionnent des crèches perçoivent des soutiens de la fondation pour l'accueil préscolaire, et on pourrait se demander s'il serait juste, avec des traitements du personnel différents, de distribuer les fonds de la même manière. Mais cela constitue une autre problématique, qui devra être débattue si ce projet de loi est voté. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Merci. Mesdames et Messieurs, nous allons procéder au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13184 est adopté en premier débat par 52 oui contre 43 non et 1 abstention.
Le projet de loi 13184 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13184 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 51 oui contre 44 non et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)