République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 mars 2023 à 15h
2e législature - 5e année - 11e session - 68e séance
PL 12428-A
Premier débat
Le président. Nous continuons avec notre prochaine urgence, le PL 12428-A, que nous traitons en catégorie II, soixante minutes. Je donne la parole à la rapporteure de majorité, Mme Xhevrie Osmani.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi a été traité lors de 17 séances depuis 2019; les travaux ont ainsi duré presque quatre ans. Il a été mis en suspens pendant quelques mois, entre 2020 et 2021. La commission a auditionné à six reprises le département, les HUG, l'UNIGE, l'IMAD, le Pouvoir judiciaire et les syndicats, ce notamment dans le cadre des discussions autour du premier amendement. C'est dire que certaines institutions qui ont sollicité leurs auditions ont été entendues et ont été amenées à se positionner sur le premier amendement.
Ce projet de loi ainsi que les travaux qui en découlent se sont penchés sur le maintien de l'autofinancement s'agissant de la couverture de la perte de gain en cas de maladie et accident à l'Etat, en donnant formellement une base suffisante pour le prélèvement d'une cotisation auprès des employés soumis à la présente loi. L'Etat de Genève «auto-assure» le risque de perte de gain en cas de maladie. Pour ce faire, il a jusqu'alors prélevé une cotisation sur le traitement des collaborateurs, qui équivaut à 0,1% du salaire brut.
Pour ce qui est des éléments contextuels, la Cour des comptes a publié, en juin 2017, un rapport d'audit de gestion et financier concernant les charges de personnel de l'Etat de Genève, dans lequel il a été formulé que cette pratique ne repose pas sur une base légale formelle suffisante. En effet, seul le règlement d'application de la LPAC en fait mention. Par ailleurs, les magistrats du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes et du Pouvoir judiciaire bénéficient des mêmes prestations sans se voir prélever de cotisation. Ainsi, la Cour des comptes a recommandé que soit soumise au Conseil d'Etat une analyse sur l'opportunité de conserver le système actuel, à savoir l'auto-assurance, ou de contracter une police avec une compagnie d'assurance privée. C'est cette dernière option que le Conseil d'Etat a choisie. Ce projet de loi a été déposé à la suite de ces faits.
Dans ses grandes lignes - le sujet est assez complexe -, ce projet de loi vise à protéger les membres du personnel de l'Etat contre le licenciement pendant qu'ils et elles sont malades et à garantir leur traitement pendant la période de couverture. Ce qui a été relevé dans le cadre de ce projet de loi, c'est qu'il y a un point de tension entre la question du droit au salaire et la question de la protection contre le licenciement en temps inopportun. Lorsqu'une personne est malade, elle bénéficie de deux protections. Premièrement, de ne pas être licenciée alors qu'elle est malade pendant une certaine durée, qui dépend à l'heure actuelle de l'ancienneté des rapports de service. L'autre protection est d'avoir droit à son salaire pendant la période couverte.
Pendant leur audition, les employeurs soumis à la LPAC nous ont dit que d'ores et déjà ils n'ont pas pour pratique de résilier les rapports de service au seul motif qu'un membre du personnel est incapable de travailler pour des raisons de santé. Ce qui a été soulevé et ce qui est aussi un fait, c'est que les syndicats - ils l'ont mentionné par ailleurs pendant leur audition - signalent de plus en plus de situations de licenciement au motif d'absence de longue durée, ce qui est injuste, problématique et constitue un déni de droit. Cela pose un problème en termes de responsabilité de l'employeur. On se rend compte que l'aménagement du poste de travail qu'il y aurait à faire pour la personne suivie par le service santé devient de plus en plus difficile et qu'il est plus simple pour l'employeur de licencier les gens plutôt que d'effectuer tout le suivi de réinsertion. Les employeurs disent que c'est l'AI qui va reprendre contact avec la personne et suivre la situation. Le Cartel intersyndical, pour le citer, nous disait que dans de telles situations, l'Etat a tendance à déléguer à d'autres assurances sociales, voire à l'assistance, quand la personne n'a plus de revenus. On voit donc les limites du rôle de l'employeur.
Ce projet de loi vise en quelque sorte à reprendre ce qui existe actuellement et à octroyer le droit à ces 730 jours. A plusieurs reprises, la majorité de la commission a réaffirmé le soutien à ce projet de loi et a décrié l'introduction d'une assurance privée dans le domaine. On sait qu'il y a des approches médicales qui ne comprennent pas tout le temps un examen sérieux du dossier, sans demander l'apport du dossier auprès du médecin ou même sans prise de contact avec le médecin qui a rédigé le certificat. En plus de toutes ces dérives qui créent beaucoup de réticences, cette option est plus coûteuse à la fois humainement pour les assurés et pour les finances de l'Etat. La seule économie qui a été trouvée par le département, ce sont les économies sur les cotisations sociales qu'il fera en octroyant des indemnités et non plus du traitement, ce qui ne contribue pas aux assurances sociales, péjore les prestations futures du personnel, affaiblit les rentes et précarise les personnes. (Un instant s'écoule. Commentaires.)
Une voix. Allô ?
Le président. Vous avez terminé ?
Mme Xhevrie Osmani. Oui ! (Rires.)
Le président. Très bien ! Merci, Madame la rapporteure. Je passe la parole au rapporteur de première minorité, M. Pierre Conne.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je relèverai tout d'abord qu'effectivement, ce projet de loi a fait l'objet de quatre années de travaux avec une année d'interruption, pendant lesquels quatre amendements généraux ont été présentés par les auteurs du texte, dont les deux derniers le 16 février 2023, c'est-à-dire la veille du jour où il a été voté. Cela montre qu'il a été extrêmement difficile, compte tenu de la complexité du sujet, à la fois pour les auteurs et pour le département qui n'a pas pu réagir et présenter ses commentaires sur le dernier amendement, d'arriver à un travail abouti. Si ce n'est pas du travail bâclé, ce n'est pas du bon travail.
Nous voulons tous une assurance perte de gain, y compris à partir du premier jour de l'engagement pour les employés de l'Etat, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui; nous voulons tous également une protection contre les licenciements inopportuns pour des raisons d'arrêt maladie, mais ce que nous ne voulons pas, c'est introduire la possibilité que des personnes, suite à l'annonce de leur convocation à un entretien destiné à leur faire part du constat d'insuffisances de prestations, voire de comportements inacceptables, comme des comportements de harceleurs, puissent à ce moment-là se mettre en arrêt maladie et, pendant 730 jours, ne pas être licenciées et bénéficier du plein traitement.
Mesdames et Messieurs, vous avez vu que le département nous a présenté pas moins de vingt amendements, si on prend la totalité des alinéas concernés, simplement de manière à rendre ce projet de loi applicable et à faire en sorte que - ce qui est le cas aujourd'hui - ce ne soient pas les abuseurs qui soient protégés au détriment de ceux qui effectuent correctement leur travail.
Compte tenu de l'importance des travaux que nous avons à faire sur la base des amendements présentés par le département, je vous demande de renvoyer raisonnablement ce projet de loi en commission, de manière que nous puissions effectuer un travail consciencieux et qui pourrait être consensuel à la sortie. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Sur le renvoi en commission, Monsieur le rapporteur de seconde minorité ?
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Comme l'a dit mon préopinant, rapporteur de première minorité, il convient de renvoyer ce projet de loi en commission.
Le président. Merci. Madame la rapporteure de majorité, sur le renvoi en commission ?
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je m'opposerai au renvoi en commission. J'invite la salle à le rejeter. Quatre ans ! Quatre ans de travaux, 17 séances, comme je l'ai dit. C'est une loi qui protège les membres du personnel de l'Etat. Nous refuserons aussi par ailleurs les amendements, et j'invite les membres du parlement à refuser les amendements du Conseil d'Etat. Celui-ci aurait eu l'occasion pendant ces quatre ans de les déposer avant. Sans entrer dans le détail, ce sont des amendements qui biffent du projet qui vous est soumis aujourd'hui un ancrage fondamental, l'autofinancement. Ce sera un refus du renvoi en commission.
Une voix. Vote nominal sur le renvoi !
Le président. Etes-vous suivie ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Ce vote se fera donc à l'appel nominal. Le Conseil d'Etat, sur le renvoi en commission ? Mme la conseillère d'Etat ne souhaite pas s'exprimer ? (Commentaires.) Nous votons donc sur cette demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 49 non contre 45 oui (vote nominal).
Le président. Nous poursuivons notre débat. Je vous redonne la parole, Monsieur Pierre Conne.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Voilà, donc nous continuons nos débats. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi n'est pas à l'avantage de l'immense majorité des collaboratrices et collaborateurs de l'Etat. Ces personnes vont payer pour celles et ceux qui abusent du système. Imaginez l'étendue des dégâts provoqués par l'absence des personnes qui se mettent systématiquement en arrêt, alors qu'il y a des problèmes réels dans la délivrance de prestations fournies par ces personnes ou en raison de leur comportement. Tout cela fera peser sur les présents une charge de travail supplémentaire, avec la double peine de l'augmentation des cotisations d'assurance perte de gain, et provoquera de la frustration, poussant par conséquent ces collaborateurs malmenés à être en arrêt maladie à leur tour.
La baisse de la qualité et de la sécurité des prestations offertes à la population en sera la conséquence. Toutes les entités concernées par ce projet de loi ont expliqué les mesures existantes destinées à soutenir et à réintégrer ou réorienter les professionnels qui se trouvaient en absence maladie de longue durée. A ce jour, les statistiques sur plusieurs années montrent qu'il n'y a pas de licenciement pour motif exclusif de maladie, ni à l'Etat ni dans les institutions soumises à la LPAC. Nous voulons tous continuer à protéger les collaborateurs en cas de maladie, mais ce projet de loi n'atteint pas cet objectif.
En voulant protéger celles et ceux qui ont besoin de protection, il en arrive à protéger les abuseurs du système et à leur donner une prime à l'abus. Les employeurs veulent tous maintenant le statu quo: ne pas étendre la protection à 730 jours à toutes les situations et continuer à pouvoir se séparer de personnes dont les prestations sont insuffisantes, même si ces personnes tombent en arrêt maladie en réaction à l'annonce de cette insuffisance. Les employeurs veulent aussi conserver la souplesse de pouvoir panacher la nature des couvertures d'assurance perte de gain, en contractant, là où c'est utile, à la fois pour l'employeur et l'employé, des assurances privées.
Ce projet de loi menace et met en péril l'employeur. Des conditions lui sont imposées et vont rendre le travail des ressources humaines et des cadres quasiment impossible et ainsi nuire aux conditions de travail des employés et à la qualité des prestations. Non seulement le passage en force de ce projet de loi par une majorité de gauche incluant le MCG va figer les relations employeurs-employés, ce qui entravera la bonne marche des services et la sérénité sur le lieu de travail, mais en plus ce texte fait fi des négociations paritaires entre employeurs et employés. En effet, l'amendement général qui avait été présenté par le département des finances suite aux discussions entre le Conseil d'Etat et les associations représentatives du personnel n'a nullement été retenu par la commission. Il est important de reconnaître et de valoriser les différents métiers composant la fonction publique. Les travaux de la commission ont fait fi de cette reconnaissance.
Les employés de la fonction publique ne sont pas juste des personnes soumises à un contrat de droit public: ce sont des professionnels qui ont besoin d'entretenir des relations motivantes et respectueuses dans le cadre de leur métier et de leurs compétences, avec leurs collègues et leur hiérarchie.
Or ce projet de loi - et c'est là sa plus grave conséquence - sera une prime à la médiocrité, en décourageant celles et ceux qui veulent progresser et offrir des prestations de haut niveau, de qualité et sûres, à la population. La minorité de la commission vous invite à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi et, si elle est acceptée, à voter les amendements présentés par le Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre attention.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le point de départ de ce projet de loi 12428 est une recommandation de la Cour des comptes émanant de son rapport n° 119 datant de 2017. Elle demandait de réfléchir au système actuel d'auto-assurance en matière de perte de gain maladie et de contracter une police avec une compagnie d'assurance.
L'office du personnel de l'Etat a fait une proposition au Conseil d'Etat en mettant en place une assurance perte de gain maladie pour résoudre les lacunes, comme le fait qu'il n'y ait pas de libre passage, ce qui était un facteur de préoccupation, notamment pour le personnel. De plus, le personnel ayant moins d'un an d'ancienneté est nettement moins bien couvert que le reste du personnel de l'Etat. Enfin, l'absence d'assurance perte de gain maladie se traduit par un paiement, pour une grande partie du personnel de l'administration cantonale, alors que l'on pourrait ne pas payer de charges sociales.
Comme je l'ai dit, l'office du personnel de l'Etat a fait une proposition au Conseil d'Etat consistant à mettre en place une assurance perte de gain maladie pour résoudre les lacunes qui viennent d'être citées, avec laquelle les cotisations aux caisses de pension resteraient payées.
Comme l'assurance est associée à des coûts, ils ont cherché à économiser sur ceux-ci. L'astuce qu'ils ont trouvée, ce n'est pas vraiment le contrat qui était un contrat d'assurance. En pratique, il s'agit donc de se réassurer. Cette proposition avait été validée en novembre 2018 par le Conseil d'Etat. La première étape étant un appel d'offres auprès de courtiers qui doivent accompagner l'Etat pour les procédures et pour le travail administratif de collecte et de vérification des données. S'agissant du périmètre, le projet du Conseil d'Etat inclut l'administration cantonale, les HUG, l'IMAD, l'Hospice général, certains EMS, certains EPH, les enseignants du DIP, de l'université, des HES, etc.
Les nombreuses auditions de toutes les entités publiques ont été édifiantes. Comme cela a été dit par mon préopinant, toutes trouvent que ce projet de loi n'est ni efficace ni efficient. Je vais citer deux cas. La première audition, c'est celle des HUG, dont le directeur général a présenté les raisons pour lesquelles le remède est pire que le mal, puisque ce qui est proposé dans le PL 12428 ne résout pas vraiment le problème réel à leurs yeux et coûterait à l'Etat sans forcément amener des gains en retour.
L'audition de l'IMAD a également été fort intéressante. Depuis 2012, l'IMAD fonctionne avec une assurance-accident et une assurance perte de gain maladie gérées par le même assureur, ce qui entraîne plus de synergies et une plus grande efficacité dans la gestion des dossiers.
Ce PL 12428 est un peu un serpent de mer. Il a été traité pendant plus de quatre ans, puis gelé et réactivé par le président de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat pour le traiter cette année, ce dont on peut le remercier. Les initiants de ce projet de loi ont décidé de passer en force au mépris des négociations et des rapports de travail entre l'employeur, l'Etat de Genève, et les employés, ce pour des raisons purement et simplement électoralistes. Il y aura de la casse, et une éventuelle acceptation de ce projet de loi va créer des précédents qui vont certainement finir devant la justice, car certains éléments de ce texte sont purement et simplement inacceptables et, sur un plan juridique, pas du tout conformes aux lois de la république.
Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat vous recommande de refuser l'entrée en matière sur ce PL 12428. J'ai dit, Monsieur le président.
M. Alberto Velasco (S). Je constate que chaque fois qu'on propose un projet de loi amenant une avancée sociale dans ce Grand Conseil, la droite est contre. Et les arguments que j'entends toujours, c'est: «abuseurs», «profiteurs»... C'est quand même assez incroyable.
Le rapporteur de première minorité, M. Conne, dit qu'il ne connaît pas de cas de licenciement lié à un congé-maladie. Et pourtant, les journaux, il y a quelque temps, mentionnaient le cas de femmes qui avaient eu le covid et avaient été licenciées de l'hôpital. Le covid est une maladie, que je sache - entre nous, hein ! Eh bien, elles ont été licenciées de l'hôpital, voyez-vous !
Une voix. C'est vrai !
M. Alberto Velasco. Et voilà, Monsieur Conne, un exemple ! Mais il y en a d'autres à l'hôpital, qu'on connaît. Vous n'avez qu'à aller trouver les syndicats, ils vous donneront pas mal de cas ! Pas mal de cas ! Donc, si vous dites cela, Monsieur Conne, vous n'êtes pas très informé. Alors peut-être que c'est le département qui vous a informé - là, effectivement, c'est autre chose ! (Rire.) Je comprends que c'est orienté !
Mais voyez-vous, les assurances, en général, c'est une action de solidarité, c'est-à-dire que, par exemple, certains paient pendant des années les assurances et ne tombent jamais malades, mais d'autres tombent plus souvent malades. Et ça, c'est ce qu'on appelle la solidarité. C'est pour cela que les assurances sont nées. Et ce qui est dit ici, c'est qu'il y a des profiteurs. Par exemple, imaginez une personne qui travaille à l'Etat depuis six mois, elle est rentable, et puis on la licencie. Cette personne a des enfants, a une famille; vous connaissez le marché du travail aujourd'hui, c'est très difficile; eh bien, c'est normal que peut-être cette personne tombe dans une dépression, la maladie, et qu'elle soit effectivement une année à l'assurance. Vous trouvez ça profiteur et antisocial ! (Commentaires.) Eh bien, moi je trouve que ce n'est pas du tout le cas ! Il s'agit de faire en sorte que les citoyennes et les citoyens de ce canton, les travailleurs et les travailleuses puissent avoir dans un cas pareil l'assurance de pouvoir se relancer dans la vie. Parce qu'effectivement, ensuite, la personne devra trouver un travail. Si elle a quelques mois pour se remettre du coup lié au fait de devoir partir de l'administration, ce n'est pas profiter, c'est tout à fait le contraire. Je suis donc vraiment choqué des propos qui ont été tenus ici au sujet de cette assurance.
Ensuite, les travaux ont en effet duré quatre ans. Mais, franchement, qui est-ce qui a joué la montre ? Parce que le projet de loi, que je sache, provenait de la gauche, de M. Dandrès. Ce n'est donc pas la gauche qui va jouer la montre contre son propre projet de loi ! Il y a quand même un problème, là ! Il y a eu effectivement, soit de la part du département, soit de la part des rangs d'en face, parfois une façon de jouer la montre avec des demandes d'auditions ou avec des propositions du département. Et je regrette que ce projet de loi n'ait pas été voté au tout début, parce qu'on avait presque un consensus en commission.
C'est vrai, on est passés en force. Pourquoi ? Parce qu'on est arrivés en fin de législature, et si on ne passait pas en force - enfin, «en force»... On avait une majorité, quand même ! Et Mme la conseillère d'Etat, que je remercie d'ailleurs, est venue en commission avec des amendements, avec des propositions, que nous avons... peut-être pas étudiées à fond, mais en tout cas écoutées, et nous... (Rires. Commentaires.)
Une voix. Poliment ! (Rires.)
M. Alberto Velasco. Poliment ! Mais nous avons écouté, Madame !
Une autre voix. Ce dont je vous remercie ! (Commentaires.)
M. Alberto Velasco. Voilà. Et nous sommes venus aussi avec des amendements, que vous avez écoutés, Madame ! (Rires.) Et à la fin, comme toujours, il y a une majorité et une minorité. Et la majorité a décidé de voter ce projet de loi, avec nos amendements. Et, Mesdames et Messieurs, je vous encourage à voter ce projet de loi, qui est une avancée pour les fonctionnaires de l'Etat de Genève et pour ceux et celles qui, malheureusement, peut-être tombent malades, parce que parfois des chefs de service se comportent comme des roitelets et imposent des sanctions inacceptables. Nous voterons ce projet de loi et je vous engage à le voter.
Mme Ruth Bänziger (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, tout et son contraire a été dit, en tout cas dans le cadre de la préparation de ce projet de loi, de la préparation de cette plénière et tout au long des séances de commission. Nous relèverons en particulier que le travail en commission et les nombreuses auditions ont permis de produire un projet de loi se concentrant sur l'essentiel, contrairement à ce que l'on veut nous faire croire. Il a été élagué et adapté. Il prévoit une assurance perte de gain sous forme de traitement dès la première année d'engagement. Cela permet aux salariés de la fonction publique de financer les assurances sociales sans lacune de cotisation. Pour rappel, cela permet d'éviter des baisses de prestations lors de la retraite ou en cas de recours au chômage.
Il s'agit de renoncer à l'externalisation et à la privatisation de la couverture perte de gain en cas de maladie ou d'accident. Cela évitera le risque de diminution de la qualité de traitement des cas résultant de l'optimisation des bénéfices d'une assurance privée. Cela réduira aussi le risque non négligeable d'une augmentation des primes payées par l'Etat et les salariés à court ou à moyen terme. Nous avons beaucoup d'exemples de ce genre de déviation liée à des externalisations dans le cadre de l'Etat ou de la Confédération.
Il s'agit également de transférer du règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale à la loi elle-même la garantie de couverture de la perte de gain en cas de maladie et d'accident, pendant 730 jours, sous forme de traitement. Rappelons que les dispositions en cas d'abus et de cas graves sont inchangées. Enfin, il s'agit d'inscrire dans la loi le mode de prélèvement des cotisations à l'assurance perte de gain, soit une base légale claire, qui est attendue et indispensable.
L'amendement général du Conseil d'Etat n'amène pas d'élément nouveau, cohérent avec l'esprit du projet de loi par rapport à ce qui a été vu en commission. Surtout, il supprime, entre autres, deux des éléments essentiels de ce projet de loi: la volonté claire d'un droit au traitement, permettant des cotisations employé-employeur aux assurances sociales, et le principe de l'autofinancement ou de la non-externalisation de l'assurance perte de gain, maladie et accident.
Au vu de ce qui précède, les Verts vous invitent à voter l'entrée en matière sur ce projet de loi, à refuser l'amendement général du Conseil d'Etat et à voter le projet de loi tel qu'issu de commission. Merci.
M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous avons affaire à un projet de loi très important, puisqu'il permet de protéger les personnes dans leur dignité, dans leur corps, pendant qu'elles sont exposées à la maladie ou à l'accident.
Toutes et tous ici, nous pouvons être touchés par la maladie et par l'accident, et ce projet de loi vise à protéger au mieux les personnes en garantissant deux choses essentielles: premièrement, le traitement, c'est-à-dire que ces gens puissent continuer à vivre de leur salaire; deuxièmement, qu'ils soient protégés contre le licenciement pendant cette période de fragilité. Deux choses qui paraissent assez basiques et nécessaires, mais qui sont pourtant contestées par la droite et par le Conseil d'Etat.
D'abord, par la droite. Mais pourquoi par la droite ? Parce qu'en ce qui les concerne, s'agissant de ce projet, ce n'est pas la question de la protection qui les rend fous; ce n'est pas l'idée qu'on va prétendument péjorer les équipes sur place qui les rend fous. C'est parce qu'il y a un business gigantesque à donner aux privés et que ces gens veulent servir leurs petits amis ! (Remarque.) C'est ça, la vraie raison ! Ils ne supportent pas l'idée de l'auto-assurance par l'Etat. Pourtant, c'est la solution la plus économique, c'est la plus juste socialement parlant et la plus éthique. (Rires.) Oui, exactement ! Pourquoi ? Parce que, quand vous confiez cela au privé, que se passe-t-il ? Les médecins-conseils sont d'une agressivité farouche pour faire sortir les gens de l'assurance. (Remarque.) C'est ça ! Il y a une mise sous pression des collaborateurs et des collaboratrices. Pour en avoir suivi plus d'un dans ces processus-là, c'est exactement ce qu'il se passe. Les médecins-conseils et les assureurs font pression massivement pour que les gens quittent l'assurance, pour que les traitements ne soient plus... (Commentaires.) Evidemment, puisque ce sont eux qui paient et que ce sont leurs profits qui sont entamés ! (Remarque.) Le fond de l'histoire, ce que la droite défend, ce n'est pas la bonne marche des services, c'est évidemment la question du pognon, comme d'habitude, et du pognon pour leurs amis !
La position du Conseil d'Etat est à peine plus subtile, à peine plus subtile ! Elle introduit un autre biais encore: non seulement les amendements du Conseil d'Etat attaquent la notion d'auto-assurance, qui est centrale dans ce projet de loi et qui est une option bien meilleure, mais en plus, ils anticipent déjà une facilitation au licenciement, telle qu'elle est prévue dans la réforme de la LPAC, que veut faire avancer le Conseil d'Etat. Par conséquent, c'est de manière sournoise que, là-dedans, on place déjà ses pions pour pouvoir faciliter le licenciement dans la fonction publique.
J'aimerais rebondir quand même sur les paroles prononcées par un des rapporteurs de minorité, sur l'idée que cela protégerait les méchants contre les gentils. La maladie et l'accident n'ont que faire des méchants et des gentils; la maladie et l'accident frappent indépendamment de la morale et des comportements de chacun et de chacune. Et, oui, qu'ils soient gentils ou méchants, les gens ont le droit d'être protégés dans leur dignité, ont le droit d'avoir un traitement assuré et de ne pas être mis à la porte pendant leur maladie. Il y a des maladies graves. Des gens ont par exemple été licenciés suite à des cancers ou des maladies de ce type. C'est malheureusement une réalité et cela ne doit pas se produire.
Pour toutes ces raisons, le groupe Ensemble à Gauche vous appelle à voter le projet de loi tel qu'issu de la commission, à refuser en bloc l'ensemble des amendements - il ne me semble pas que ce soit un amendement général, ce sont plusieurs amendements, si j'ai bien lu, il faut donc refuser chaque amendement, point par point - et, évidemment, à confirmer le fait d'aller dans cette direction, parce que, je le répète, c'est une mesure à la fois plus économique pour l'Etat et socialement et éthiquement plus juste, qui protège mieux les salariés, tant dans leur traitement que contre le licenciement. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Le Conseil d'Etat a initialement déposé un projet pour instaurer une assurance perte de gain privée. Une assurance privée comporte un certain nombre de risques et de dangers: imaginons seulement qu'une société privée ait entre ses mains le dossier d'assurance d'un juge, en lien avec une maladie. Il y aurait danger; chacun peut comprendre que des données confidentielles se retrouveraient ainsi à l'extérieur de l'Etat. C'est pour cela qu'une assurance perte de gain des fonctionnaires d'Etat doit rester interne à l'Etat. Il ne faut pas que cela soit externalisé et que cela passe dans les mains de sociétés privées, dont nous n'aurions jamais le contrôle alors que, quoi qu'on en dise, sur l'Etat, nous pouvons avoir un contrôle. Si nous ne l'avons pas, nous devons l'avoir.
Durant les débats, nous avons entendu beaucoup de propos déplacés sur le manque de confiance - confiance qui doit exister - dans la relation entre l'employeur Etat et les fonctionnaires employés. Certains, on l'a entendu ce soir, parlent d'abuseurs. Mais ces abuseurs, il y en a partout: il y en a dans le privé, dans le public. Or qui soutient ces abuseurs ? Qui les soutient, objectivement ? Ce sont les médecins, qui leur permettent d'abuser; ce sont les avocats, qui les aident à commettre ces abus ! (Commentaires.) C'est cela qu'il faut chaque fois attaquer. Or c'est cela qu'une certaine droite défend; elle défend ces milieux qui ne sont pas tout à fait honnêtes ou honorables - je parle d'individus et non de catégories générales. (Commentaires.)
Mais ces brebis galeuses, vous ne les voyez pas ! Vous ne les voyez pas ! Il ne s'agit pas de troupeaux, alors que vous pensez que les fonctionnaires de l'Etat sont tous des abuseurs et des gens dangereux ! C'est scandaleux ! Quand on entend ce genre de discours dans cette enceinte... Et c'est ce qu'on a entendu de la part d'un certain rapporteur de minorité, qui lui-même d'ailleurs était dans la fonction publique. J'ai donc quand même quelques doutes sur sa façon de considérer le comportement des gens dans la fonction publique. Il avait d'ailleurs un rôle important, mais ça, c'est son problème. (Rires.) C'est son problème et c'est à lui de le gérer. (Commentaires.)
En revanche, dans le privé, nous avons des assureurs - donc des sociétés privées - qui, comme cela a été dit, agissent sans vergogne contre les employés de l'Etat. Nous pourrions trouver, et nous le voyons dans le privé, des abus - parlons de la fameuse clinique Corela, qui travaillait pour (sauf erreur, si je me souviens bien) diverses institutions sociales ! Malheureusement, il y a eu cette externalisation au secteur privé afin d'exercer un contrôle sur des personnes malades. Cela, c'est quelque chose qui n'est pas acceptable.
Une couverture de la perte de gain bien étudiée, sans externalisation, avec un autofinancement payé par les employés, les fonctionnaires, c'est ce que défend ce projet de loi. Le MCG défend les salariés du privé et du public. Le MCG a le sens de l'Etat. Pour toutes ces raisons, nous voterons ce projet de loi avec l'amendement des députés. (Commentaires.)
M. Cyril Aellen (PLR). Vingt-quatre heures. Que dis-je ? Vingt heures ! (Remarque.) Vous avez tenu vingt heures avant de trahir les promesses que vous avez faites en votant le rapport sur le foyer de Mancy ! Je ne suis pas fou, Monsieur Cruchon, mais j'ai honte ! Les procédures seront encore plus longues et plus difficiles. Alors je ne sais pas si vous voulez empêcher les assureurs de réaliser des gains qui sont à votre avis indus, mais en tout cas, vous alimenterez la profession qui est la mienne.
Vingt heures, c'est le temps qu'il a fallu à la gauche pour oublier les leçons tirées du foyer de Mancy. Alors c'est bien beau ! Il fallait accabler sa magistrate, en disant qu'elle chargeait elle-même ses seconds. Celle-ci nous expliquait qu'il s'agissait de problèmes budgétaires. Mais non ! La réalité est autre. La gauche s'obstine à protéger les seuls fonctionnaires qui dysfonctionnent, et c'est une infime minorité, mais ce sont eux que vous protégez aujourd'hui. C'est vous, les responsables ! Et c'est en votre nom, lorsque la procédure du foyer de Mancy se reproduira, qu'il faudra présenter des excuses. (Commentaires.) C'est en votre nom qu'il faudra le faire ! (Commentaires.)
Dire qu'on n'a pas écouté les fonctionnaires, c'est un mensonge ! Nous avons entendu M. Tavernier, directeur de l'OPE, nous avons entendu la cheffe juridique de l'OPE, nous avons entendu la responsable politique de ce département. Nous avons entendu les HUG, l'université, l'IMAD, le palais de justice. Tous sont venus nous dire que s'ils voulaient pouvoir gérer correctement, sans problème, leurs équipes et que cela profite aux fonctionnaires qui font bien leur travail, il ne fallait surtout pas voter ce projet de loi ! Mais c'est vous qui n'avez pas écouté les collaborateurs et les managers qui essaient de faire au mieux ! C'est vous qui les méprisez, c'est vous qui aujourd'hui prenez la défense de ceux qui n'ont rien à faire dans la fonction publique ! (Commentaires.)
Une voix. Bravo, Cyril !
Une autre voix. Bravo !
M. Cyril Aellen. Actuellement, la LPAC garantit le versement du salaire pour 730 jours civils. Il est faux de dire que ce n'est pas le cas. Vous, ce que vous voulez aujourd'hui, c'est supprimer le garde-fou qui permet de prononcer un licenciement pour motif fondé. Ce projet de loi prétend protéger les personnes malades contre le licenciement, or les fonctionnaires bénéficient déjà de 730 jours de protection contre le licenciement pendant une absence pour cause de maladie. Par ailleurs, ce texte va rendre dysfonctionnelles les situations qui ne sont pas purement médicales. En commission, un médecin a dit qu'une attestation d'incapacité n'était pas forcément objective. Un médecin prescrit un arrêt de travail aussi en fonction de critères subjectifs, par exemple dans le cas d'un parent maltraitant, qui, probablement pris de remords, est en difficulté; ça peut aussi être le cas d'un conjoint violent, mais aussi, éventuellement, d'un manager en difficulté.
Avez-vous lu le rapport sur le foyer de Mancy ? Avez-vous constaté le nombre de fonctionnaires mis en cause, qui eux-mêmes se sont immédiatement mis en arrêt ? Savez-vous que les premières alertes ont été données en 2019 ? Avez-vous constaté qu'on n'a rien pu faire avant le départ volontaire de la plupart d'entre eux en septembre 2021 ?
Avez-vous mesuré les conséquences du vote de ce projet de loi ? Avez-vous mesuré que même les employés dysfonctionnels qui seraient en arrêt pourraient être nommés fonctionnaires avec ce projet de loi ? (Commentaires.) Ce texte aura probablement pour conséquence une précarisation des contrats, un management déficient, plus précautionneux face à des engagements, une augmentation des contrats temporaires, un allongement des périodes probatoires et une précarisation de la fonction publique.
Au niveau politique, le message donné est catastrophique: l'impunité des auteurs d'atteinte à la personnalité, des harceleurs qui coincent les stagiaires dans les couloirs ou de ceux qui terrorisent leur équipe ! A titre d'exemple, si le projet de loi passe, la plupart des gens dysfonctionnels au foyer de Mancy auraient été totalement impunis. (Commentaires.)
C'est de cela qu'on parle aujourd'hui et c'est pour cette raison, pour que nous étudiions cela avec sagesse, avec recul, avec discernement, que je vous demande de renvoyer ce projet de loi en commission. (Applaudissements. Huées.)
Des voix. Bravo !
Le président. Sur le renvoi en commission, Monsieur le rapporteur de seconde minorité ?
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Il faut effectivement voter le renvoi en commission.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Je soutiens le renvoi en commission.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. J'invite la salle à refuser le renvoi en commission.
Le président. Merci. Est-ce que le Conseil d'Etat souhaite s'exprimer ?
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Oui, merci, Monsieur le président. Non, le Conseil d'Etat n'est pas fâché, je ne reprendrai pas vos mots ! Le Conseil d'Etat a déposé bon nombre d'amendements, parce que les différents amendements à ce projet de loi que la gauche - pensant que l'administration n'avait que ça à faire - a soumis en commission ont chaque fois été transmis vingt-quatre heures avant les séances. Qui aime bien châtie bien, c'est à l'image du manque de respect dont ont fait preuve les bancs de gauche dans le cadre de nombre de dépôts d'amendements à ce projet de loi. Evidemment, le Conseil d'Etat n'a donc pas eu l'occasion d'en proposer d'autres. Mais il l'a fait hier: il a en effet déposé de très nombreux amendements, qui démontrent à quel point ce projet de loi n'est pas abouti et à quel point il a besoin d'être retravaillé. Le Conseil d'Etat est aussi favorable au renvoi en commission.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons sur cette demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 50 non contre 44 oui.
Le président. Nous continuons notre débat et je passe la parole à M. Souheil Sayegh.
M. Souheil Sayegh (PDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, il est difficile de passer après le bon député Aellen, mais je vais faire un effort. Je cite l'article 24 du règlement du Grand Conseil, «Obligation de s'abstenir»...
Une voix. Bravo !
M. Souheil Sayegh. «Dans les séances du Grand Conseil et des commissions, les députés qui, pour eux-mêmes, leurs ascendants, descendants, frères, soeurs, conjoint, partenaire enregistré, ou alliés au même degré, ont un intérêt personnel direct à l'objet soumis à la discussion, ne peuvent intervenir ni voter, à l'exception du budget et des comptes rendus pris dans leur ensemble.»
Il serait intéressant de savoir qui de nous est au bénéfice d'une assurance perte de gain privée. Qui de nous se soucie du médecin-conseil de son assurance privée et le prend pour un grand communiste qui nous surveille ? Qui de nous, au contraire, dispose d'une assurance perte de gain étatique ? Je serais curieux de voir qui de nous, lors des prochains votes, s'abstiendra ou aura le droit de se prononcer. (Commentaires.)
J'ai entendu dire qu'une maladie - ou un accident - ne frappe pas de manière aléatoire, mais frappe tout le monde de manière identique, c'est ce qui a été affirmé dans les rangs de gauche. C'est faux, Mesdames et Messieurs, et on l'a appris en commission. La vice-rectrice de l'UNIGE, Mme Galliot, nous a expliqué que sur environ dix mille collaborateurs à l'université, certaines personnes étaient sous un régime de droit public, d'autres sous un régime de droit privé. En tout, un tiers du personnel de l'université - un tiers de ces dix mille collaborateurs, donc - a été engagé sous un régime de droit privé.
En 2020, ce tiers a consommé pour 960 000 francs d'assurance perte de gain. 960 000 francs, un tiers des collaborateurs, régime de droit privé. Les deux autres tiers de collaborateurs sont en régime de droit public. Mesdames et Messieurs, faisons une simple règle de trois: trois fois 960 000, ça donnerait environ trois millions, on va dire ça comme ça. Eh bien non, Mesdames et Messieurs: 10 millions ! 10 millions, c'est ce qu'ont coûté en 2020 deux tiers des collaborateurs de l'UNIGE sous régime de droit public en assurance perte de gain. Donc non, la maladie ne frappe pas de manière égale une personne sous régime de droit privé et une personne sous régime de droit public, malheureusement. (Rires.)
Une voix. Bravo !
M. Souheil Sayegh. De là à dire que le statut de fonctionnaire est dangereux, c'est un pas que je refuserai de franchir, parce qu'une majorité de ces personnes sont plutôt en bonne santé et capables de travailler.
De quoi parle-t-on ? On parle de 45 licenciements en 2021, ce qui représente 0,2% pour 19 000 collaborateurs du petit Etat. 45 licenciements en 2021 ! 17 séances de commission - 17 séances de commission ! -, quatre années de travail pour 45 licenciements en 2021, Mesdames et Messieurs. De quoi parle-t-on, où va-t-on avec ce projet de loi ? Demain, on ne distinguera plus les différentes catégories de personnel - auxiliaires, stagiaires, apprentis -, tout le monde sera logé à la même enseigne.
Avec ce texte, vous protégez des personnes qui pourraient dysfonctionner. Plutôt que d'embaucher pour des durées indéterminées, on fera des engagements à durée déterminée: demain, on précarise l'emploi. Qui, au sein des entités publiques - dont aucune, M. Aellen l'a rappelé, n'est favorable à ce projet de loi -, prendra le risque d'engager des gens avec un contrat indéterminé ? On fera des contrats à durée déterminée - deux, trois mois - et on les renouvellera, on prendra les personnes à l'essai. Comment mieux précariser l'emploi ? On ne saurait mieux faire.
Ensuite, on a entendu qu'il y a des brebis galeuses au sein du corps médical - je me permets de les défendre - qui font des certificats de complaisance. Il est clair que...
Des voix. Article 24 !
M. Souheil Sayegh. Pardon ? Article 24, oui ! Non, mais là, je... (Rires.) Ce n'est pas de moi que je parle ! (L'orateur rit.) Je me permets de... (Commentaires.) Je ne pense pas que les médecins soient partie prenante de ce projet de loi. Un médecin est à l'écoute de son patient, et si celui-ci est souffrant, le médecin est là pour valider une certaine souffrance.
Il se trouve, s'agissant de cette souffrance, que nous, du côté médical, nous ne connaissons pas les conditions des gens sur leur lieu de travail. J'ai eu l'occasion de mettre une personne en incapacité de travail pendant deux ans simplement parce qu'à l'Etat, on a été incapable de lui trouver un poste dans un autre endroit. Dès qu'elle a obtenu un autre poste, le certificat médical est passé de 100% à 0%. Ce n'est pas un problème médical, c'est un problème de reclassement des personnes et de leur poste de travail.
Mesdames et Messieurs, nous sommes en train de prétériter le travail et les contrats des nouvelles personnes engagées, nous sommes en train de surcharger les personnes qui travaillent, parce qu'un collaborateur en arrêt maladie, qu'est-ce qu'il fait ? Eh bien il ne fait pas le job. Et pendant ce temps-là, qui fait le job, qui reprend son pourcentage de travail ? Ceux qui sont là, qui sont sur le terrain et à qui on tape dans le dos à la fin de l'année en disant: «Merci, vous avez bien bossé.»
Mesdames et Messieurs, le PDC et la minorité vous demandent de renvoyer ce projet de loi en commission: il n'est pas abouti, beaucoup de choses n'ont pas été travaillées correctement. Voilà pourquoi nous vous enjoignons de renvoyer ce texte en commission. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. En ce qui concerne le renvoi en commission, nous recommençons notre petite consultation. Monsieur Ivanov ?
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Il faut accepter le renvoi en commission.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Oui au renvoi en commission.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. J'invite les députés à refuser cette demande de renvoi en commission, ça devient de l'acharnement.
Le président. Merci. Je mets aux voix le renvoi en commission...
Des voix. Vote nominal ! (Plusieurs mains se lèvent.)
Le président. Vous êtes suivis, donc nous procédons au vote nominal.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 50 non contre 47 oui (vote nominal).
Le président. Nous poursuivons la discussion. Le prochain intervenant est M. Pablo Cruchon, qui dispose encore de deux minutes.
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais réagir à deux interventions. D'abord, en ce qui concerne l'exemple du député PDC sur la masse salariale... enfin, sur les coûts à l'université, mais regardez qui est en contrat privé et qui est en contrat public: évidemment, les vieux professeurs d'université coûtent beaucoup plus cher que les jeunes assistants précarisés ou le personnel de nettoyage ! Arrêtez de comparer des choses qui ne sont pas comparables, faites votre travail correctement.
Quant à l'intervention du député Cyril Aellen, elle est absolument indigne ! Indigne, parce qu'il instrumentalise un grave dysfonctionnement dans une institution en affirmant que c'est laisser les personnes être malades pendant deux ans qui pourrit les institutions ! Mais qu'est-ce que j'entends ?! Ces gens ne sont pas dysfonctionnels, ils sont en arrêt de travail. Vous savez ce qui vous chagrine là-dedans ? C'est le fait que vous devriez voter des budgets pour des remplaçants, voilà ce qui vous met hors de vous ! Parce que le problème, ce n'est pas que les gens soient malades, c'est que vous ne les remplacez pas et refusez les budgets pour les remplacer ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Pablo Cruchon. Vous précarisez les conditions de travail, voilà la réalité ! Et pendant ce temps-là, vous instrumentalisez la souffrance du personnel pour soutenir qu'il faut pouvoir licencier les gens malades à la fonction publique ! C'est un scandale, c'est dégueulasse, je suis désolé ! (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, si nous pouvions garder un peu de dignité dans ce débat, ce serait profitable à tout le monde, notamment à celles et ceux qui nous regardent ou nous écoutent. Nous continuons le débat avec l'intervention de M. Bertrand Buchs, à qui il reste vingt secondes.
M. Bertrand Buchs. Je renonce, Monsieur le président.
Le président. Bien, merci. Monsieur Velasco, c'est à vous pour une minute trente.
M. Alberto Velasco (S). Oui, merci, Monsieur le président. Je respecte le député Aellen, mais là, franchement, je trouve peu digne qu'il utilise Mancy pour s'attaquer à ce projet de loi. Vraiment, je ne m'attendais pas à ça de votre part, parce que vous savez très bien que le drame de Mancy est lié à un problème d'encadrement et de RH. Or l'encadrement, c'est celles et ceux que vous protégez, Mesdames et Messieurs; vous défendez les cadres, et ce sont les petits qui prennent tout dans la figure. Quelles sont les personnes qu'on met à la porte ? J'ai toujours vu ça autour de moi: ce sont les gens d'en bas ! Vous évoquez l'ancien chef des RH de l'Etat; je ne citerai pas son nom, mais enfin, il a été mis à l'écart, et Dieu merci, parce qu'on ne peut vraiment pas dire que le chef des RH de l'Etat ait été exemplaire pendant ces années.
Je suis tout à fait d'accord avec mon collègue d'Ensemble à Gauche: le problème, c'est que vous n'êtes pas d'accord de doter les services du personnel et de l'encadrement adéquats. Quand un haut cadre qui gagne un bon salaire ne répond pas aux exigences, qu'est-ce qu'on fait ? On le place dans un... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Une voix. Placard !
Une autre voix. Un placard doré !
M. Alberto Velasco. Un placard doré ! Avec son salaire, pendant des années. Quand c'est quelqu'un d'en bas, on s'arrange tout de suite pour le mettre à la porte. Et ça, on l'a vu.
Alors oui, Mesdames et Messieurs, effectivement, dans tout système, il y a des gens qui abusent; on m'a dit que le nombre de personnes par année était de quinze, quinze sur 19 000 employés de la fonction publique.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Quinze ou dix personnes qui ont utilisé, peut-être avec raison...
Le président. C'est terminé...
M. Alberto Velasco. Peut-être avec raison !
Le président. Merci.
M. Alberto Velasco. Je trouve vraiment indigne de tenir de tels propos. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole retourne à M. Cyril Aellen pour une minute trente.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci beaucoup. On n'instrumentalise rien du tout, on lit, on dresse des constats. Le constat, c'est que ça a dysfonctionné parce que certaines personnes n'ont pas été adéquates et qu'on n'a pas pu en faire façon. Voilà la réalité. Et, Monsieur Velasco, je vous rappelle juste que la LPAC s'applique de l'échelon tout en bas à l'échelon tout en haut. La problématique est là.
J'aimerais revenir sur ce qui a été dit, à savoir: «On n'a pas assez d'argent pour des remplaçants.» Ce n'est pas vrai ! A Mancy, il n'y avait que des remplaçants avec les budgets votés. C'était bien le problème. Il n'y avait plus d'infirmiers, on ne pouvait pas les remplacer, ils étaient en arrêt ! Ils étaient protégés en arrêt. On n'avait plus d'éducateurs, parce qu'ils étaient protégés, ils étaient en arrêt. On se retrouvait des week-ends entiers avec seulement des remplaçants, car oui, nous avions voté des crédits supplémentaires. Nous, nous avions assumé nos responsabilités, contrairement à ce qui a été soutenu. Ce n'est juste pas vrai !
En réalité, ce qui se passe aujourd'hui, c'est que vous protégez des employés qui dysfonctionnent, vous empêchez les gens de manager correctement, et c'est ce qu'on a constaté au foyer de Mancy, ce n'est rien d'autre que ça. Lisez les recommandations que vous avez votées hier, lisez-les les unes après les autres, et vous verrez qu'elles sont contraires à ce projet de loi. C'est ça, l'instrumentalisation ? Non, c'est la cohérence d'une politique menée en faveur des bénéficiaires. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Une autre voix. Démago !
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, après avoir écouté tout ce qui a été dit, après avoir vu le résultat des votes, après avoir entendu le Conseil d'Etat, j'aimerais demander au Bureau de se prononcer sur l'article 24. En principe, les fonctionnaires n'ont pas le droit de voter; je voudrais qu'il se détermine, qu'il nous confirme que c'est bien juste et, si tel est le cas, qu'on relance les votes. J'attends une réponse, Monsieur le président, merci. (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, l'article 24 ne s'applique pas aux normes générales, le Bureau ne peut que vous le rappeler. Que voulez-vous qu'il fasse de plus ? (Commentaires.) Ce texte que nous traitons est une loi générale, donc les fonctionnaires dans cette enceinte ne sont pas concernés à titre personnel. C'est comme quand on se prononce sur des objets relatifs aux impôts, sur les budgets, toutes les normes générales. Voilà, c'est l'interprétation qu'on en fait. Il y a un avis de droit de Me Bellanger sur ce sujet qui a été largement distribué. Nous continuons le débat. Monsieur Cruchon, la parole est à vous pour quarante secondes.
M. Pablo Cruchon. Je renonce.
Le président. Bien, alors je la cède à M. Ivanov pour deux minutes.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Oui, merci, Monsieur le président...
Le président. Avec le temps de votre groupe, cela fait un peu plus: sept minutes.
M. Christo Ivanov. Tout va bien, merci, Monsieur le président, je n'aurai certainement pas besoin d'autant. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on sent que c'est un projet qui électrise l'atmosphère, si j'ose dire, mais il faut tout de même rappeler ce que nous avons vécu en commission: il y a eu une succession d'amendements généraux, dont les deux derniers au mois de février 2023, et nous n'avons même pas eu le temps d'en prendre connaissance qu'on a assisté à un véritable passage en force de la gauche et du MCG - MCG, Mouvement des Citoyens de Gauche, en l'occurrence... (Commentaires.) Si, si, sur tout ce qui concerne la fonction publique, vous êtes toujours à gauche, il faut le reconnaître et vous devez au moins l'assumer.
J'aimerais répondre à M. Cruchon. Vous avez utilisé un certain nombre de termes inadéquats, à mon avis. Vous avez d'abord dit que ça nous rend fous; je ne vois pas en quoi on est fous, mais bon, c'est votre problème. Après, vous avez parlé de business à donner au privé. Or toutes les entités qui sont venues devant la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat, que ce soit l'université, les HUG, l'IMAD ou le Pouvoir judiciaire, nous ont dit que pour elles, travailler avec le privé constituait la meilleure des solutions: ça leur permet d'être accompagnées et de définir des stratégies, l'objectif étant que les personnes réintègrent le plus vite possible leur poste de travail.
D'ailleurs, la priorité de l'administration cantonale genevoise, en l'occurrence de l'OPE, du service de santé de l'Etat et de tous les services RH des départements, est de trouver une solution pour que les personnes recouvrent leur santé et leur poste de travail. Il faut quand même être honnête et correct.
A part ça, vous transmettrez à M. Cruchon, Monsieur le président, qu'il a un véritable problème avec l'argent, mais chez vous, il y a quand même quelques millionnaires, au moins en immobilier, donc ne venez pas sans arrêt nous faire la leçon ! En ce qui concerne...
Une voix. Des noms !
M. Christo Ivanov. Mais vous savez très bien ! En ce qui concerne les médecins-conseils, comme indiqué par mon préopinant Souheil Sayegh, ils sont d'abord tenus par le secret professionnel. Le médecin n'est pas censé connaître toute la situation de la personne qu'il ausculte et qui vient en rendez-vous chez lui, et il fait de son mieux pour trouver la meilleure solution pour son patient. Ensuite, il y a le serment d'Hippocrate, ça paraît être une grande évidence. Après, ce qui est sûr, c'est qu'avec ce projet de loi, les avocats auront du travail plein les bras !
Là-dessus, j'aimerais souligner encore autre chose. Lorsque nous avons auditionné les HUG - il s'agit quand même de 12 000 employés -, ils nous ont expliqué qu'en 2022, il y a eu 54 cas de licenciements, ce qui représente 0,2%, soit exactement le même chiffre que nous avons entendu tout à l'heure s'agissant de l'Université de Genève.
Avec ce projet de loi, vous allez casser le partenariat social, vous allez casser la confiance entre l'employeur et les employés. C'est une réalité, les conditions seront péjorées. Vous allez remettre en question des accords importants, vous allez précariser des fonctionnaires et, par conséquent, l'entier de la fonction publique. Pour toutes ces raisons, il convient de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Cruchon, il vous reste quarante secondes.
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. Je reviens rapidement sur deux éléments, d'abord sur l'audition des fonctionnaires. Certes, nous avons reçu de nombreuses structures, mais nous avons surtout entendu les cadres, ceux qui managent, ceux qui licencient, et très peu de salariés, par exemple les infirmières covidées et licenciées ou d'autres. (Commentaires.) Non, exactement: ceux qui ont un intérêt à licencier, pas ceux qui ont un intérêt à être protégés. Ce n'est pas tout à fait la même chose. D'ailleurs, l'une des associations avait un discours un peu différent.
Le dernier élément qu'il est nécessaire de rappeler... (Commentaires.) Maintenant, avec toutes ces interventions, je l'ai oublié, je vous prie de m'excuser. Voilà, merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Pierre Conne pour quarante secondes.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Oui, merci, Monsieur le président. Je ne veux pas dire qu'il y a un malentendu, parce que je pense qu'on se comprend bien, mais simplement qu'on n'a pas la même vision. Lorsqu'on parle d'abuseurs, ce ne sont pas des personnes malades avec des arrêts de longue durée, celles-là sont protégées; quand on parle de profiteurs, ce sont des gens qui nous disent: «Je n'ai pas obtenu de ma hiérarchie ce que je voulais» ou «Ma hiérarchie me fait un reproche et je le vis mal» ou «Je me sens menacé et je me mets en arrêt maladie». C'est ce mode de fonctionnement qui, aujourd'hui, pourrit et mine la fonction publique. Avec ce projet de loi, on va renforcer ce processus, décourager toute la chaîne hiérarchique et, au bout du compte, pénaliser ceux qui, au sein de la fonction publique, font du bon travail et ont à coeur d'offrir des prestations de qualité. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole va à Mme Xhevrie Osmani pour quarante secondes.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais dire que les différents amendements proposés ont chaque fois tenu compte de l'évolution des discussions pendant les travaux de commission, il faut le souligner. Je pense que c'est important, et toute la commission en est consciente, parce qu'ils ont toujours été motivés ainsi au moment de leur présentation.
Il y a un acharnement de la droite qui s'est constamment manifesté en commission et qui se poursuit ici en plénière, c'est de vouloir faire du très faible taux de cas qui pourraient poser problème - comme il en existe dans tout système, on l'a dit précédemment - une généralité, quand bien même, et cela a été relevé par les institutions qu'on a auditionnées... Je prends juste un exemple, celui des HUG, puisque ce mot est sorti de leur propre bouche: ces cas sont très marginaux. C'est le mot «marginal» qui est ressorti. C'est en effet très marginal...
Le président. Il vous faut conclure...
Mme Xhevrie Osmani. ...d'avoir des fonctionnaires qui tirent leur arrêt sur 730 jours en essayant...
Le président. C'est terminé...
Mme Xhevrie Osmani. ...de se faire passer pour malades.
Le président. Merci...
Mme Xhevrie Osmani. J'aimerais juste finir, s'il vous plaît, Monsieur le président: pouvez-vous transmettre à la personne concernée que quand on fait recours au travail temporaire ou au travail sur appel, c'est qu'il y a une véritable volonté politique...
Le président. C'est terminé, merci !
Mme Xhevrie Osmani. ...de précarisation du travail, et pas parce que c'est un problème de protéger les gens contre la maladie... (Le micro de l'oratrice est coupé. Applaudissements.)
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le point de départ de toute cette affaire a été la volonté du Conseil d'Etat de mieux protéger une certaine catégorie de collaboratrices et collaborateurs, en particulier celles et ceux qui ne sont pas fonctionnaires et auxquels nous voulions, dans le cadre d'un projet d'assurance perte de gain, garantir une protection maladie. Or mal nous en a pris, nous avons prononcé le mot qui hérisse malheureusement une grande partie de cet hémicycle - une majorité aujourd'hui -, à savoir le terme «privé». C'est pire qu'un gros mot, cela donne lieu à toutes les inquiétudes, il y a une véritable détestation du privé au sein de la gauche.
Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi tel qu'il ressort aujourd'hui de commission représente un coup de canif dans la nouvelle politique des ressources humaines, dans cette nouvelle stratégie, car il ne sera plus jamais possible, avec de telles dispositions, de gérer des équipes, de faire du management.
Vous êtes en train d'établir un texte pour des exceptions. Cela ne signifie pas, contrairement à ce qui a été indiqué, qu'on ne doit pas s'occuper des cas exceptionnels, qui plus est lorsqu'ils sont injustes. Tout à l'inverse, il n'y a pas lieu d'accepter des résiliations de relations de travail qui ne sont pas effectuées correctement, il n'y a pas lieu d'accepter des situations qui prêtent le flanc à la critique.
Mais, Mesdames et Messieurs, le projet de loi tel qu'il ressort aujourd'hui de nos travaux - de vos travaux ! - aura un impact considérable sur la plupart des employeurs publics. D'ailleurs, ce n'est pas la plupart, c'est le total, puisque l'ensemble d'entre eux - et c'est suffisamment rare pour le souligner - se sont montrés opposés à cet objet.
Par ailleurs, le texte prévoit une application indifférenciée de la protection de 730 jours en cas de maladie ou d'accident à l'entier des catégories de personnel. Il serait ainsi valable pour des membres du personnel dont le statut n'est pas conciliable avec la garantie et la protection souhaitées.
Avec ce projet de loi, Mesdames et Messieurs, il y aura une impossibilité absolue - je dis bien absolue ! - de résilier les rapports de travail en cas de maladie ou d'accident. Le texte ne prévoit pas d'exception à l'impossibilité de résilier les rapports de service en cas de maladie ou d'accident. Cela pose les problèmes suivants.
Même en cas d'incapacité de travail réactionnelle, suite à un entretien de service mettant en lumière des insuffisances de prestations, le collaborateur pourra se prévaloir d'un droit à 730 jours de protection. Mais également, Mesdames et Messieurs, lorsqu'un collaborateur qui dysfonctionne est en période probatoire et n'est donc pas considéré comme un fonctionnaire, il lui suffira de prononcer le mot «maladie» et de revenir avec un certificat médical, et il aura le droit à une protection de 730 jours lui permettant, par la même occasion, d'acquérir le statut de fonctionnaire. Mesdames et Messieurs, on marche sur la tête ! Je n'ai pas d'autres mots: on marche sur la tête ! (Applaudissements.)
L'interdiction de résilier les rapports de service empêchera également tout licenciement - écoutez-moi bien, Mesdames et Messieurs - immédiat d'un membre du personnel, même en cas de manquement grave. Mesdames et Messieurs de l'Alternative et de la gauche, vous protégez là des cas certes rares, mais des cas de dysfonctionnement et des cas graves.
Ce que je dis n'est pas politique; ce que je dis découle d'une analyse juridique de la situation. Le chemin que vous souhaitez emprunter constitue une voie inacceptable pour une collectivité publique comme l'Etat de Genève et pour l'ensemble des entités touchées.
Mais ce n'est pas tout, Mesdames et Messieurs: vous prévoyez une augmentation du taux de cotisation perte de gain et, de ce fait, celle-ci sera liée au taux d'absence de l'entité. Qu'est-ce que cela signifie ? Eh bien rien d'autre qu'une perte de pouvoir d'achat pour les collaboratrices et collaborateurs en question ! Mesdames et Messieurs, les employés des HUG et de l'IMAD apprécieront sans conteste cette proposition de votre part lorsqu'ils se rendront compte que plus le taux d'absence augmente dans leur structure, plus il leur en coûte en matière de cotisations sociales. Le résultat est tout simple: les présents paieront pour les absents. Vous allez ainsi opposer les catégories, on ne parlera plus d'arrêts maladie légitimes, on parlera simplement d'absents qui font payer aux présents. C'est inadmissible, personne ne peut diriger une administration de la taille de la nôtre - plus de 19 000 collaboratrices et collaborateurs - de cette manière-là.
Et il ne s'agit pas de ne pas protéger les collaborateurs. Je suis la première, Mesdames et Messieurs, à soutenir qu'il faut les protéger, je suis la première à lutter en faveur d'une tolérance zéro dans les cas de harcèlement. Mais, Mesdames et Messieurs, ce que vous faites là ne protégera pas les collaboratrices et collaborateurs.
Il y aura une exclusion de toute assurance perte de gain maladie ou accident surobligatoire; formidable, Mesdames et Messieurs ! Vous affirmez que vous voulez protéger les collaboratrices et collaborateurs de toute résiliation des relations de travail pendant leur maladie; eh bien c'est le contraire. Les hôpitaux et l'IMAD, par exemple, ont des assurances surobligatoires pour le fait d'être confronté à du sang, parce que ce n'est évidemment pas dans nos bureaux qu'on peut être confronté à des éclats de sang; en revanche, dans les services médicaux, c'est indispensable. Les hôpitaux et l'IMAD bénéficient d'une assurance-maladie surobligatoire. Avec cette loi, ce sera fini ! Parce que le privé est un mot grossier, ils ne pourront plus protéger leur personnel. Voilà ce que vous imposez aux établissements qui protègent mieux leurs collaboratrices et collaborateurs.
Mesdames et Messieurs, ce projet de loi est inacceptable en l'état. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat a déposé un très grand nombre d'amendements, non pas pour moins protéger les collaboratrices et collaborateurs, mais pour le faire de façon plus intelligente. Et comme je suis transparente, je vous informe d'ores et déjà qu'au vu de la situation, le Conseil d'Etat ne demandera pas le troisième débat. (Applaudissements.) C'est totalement impossible au vu de la teneur actuelle du texte.
Je serai en revanche à disposition de M. Dandrès, l'auteur de ce projet de loi, pendant les vacances de Pâques pour tenter, dès lors qu'il a une formation juridique, qu'il est avocat et que je suis certaine qu'il comprendra ces éléments... (Commentaires.) ...tenter... (Commentaires.) ...tenter...
Une voix. Quelle condescendance !
Mme Nathalie Fontanet. Il n'y a aucune condescendance de ma part, je m'adresserai à l'auteur du projet de loi et... (Commentaires.) ...et... (Commentaires.) J'espère que vous vous sentez mieux ! ...et je tenterai de trouver une solution satisfaisante. Par contre, il va de soi que si vous acceptez les amendements, nous demanderons le troisième débat. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements. Commentaires.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci. Monsieur Aellen, vous souhaitez vous exprimer ? (Commentaires.)
Mme Nathalie Fontanet. C'est une décision de l'ensemble du Conseil d'Etat: pas de la majorité, de l'unanimité du Conseil d'Etat ! Il s'agit d'une question de ressources humaines qui concerne 19 000 collaboratrices et collaborateurs. Ce n'est pas une politique de droite ou de gauche, c'est une décision responsable de l'employeur. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Nous avons donc une demande de renvoi en commission, Monsieur Aellen ?
M. Cyril Aellen (PLR). Oui, Monsieur le président. Le débat a eu lieu, ce serait bien qu'on puisse discuter sereinement de ce projet en commission.
Le président. Merci. Je donne la parole aux rapporteurs ainsi qu'au Conseil d'Etat sur la proposition de renvoi en commission.
Une voix. Oh, mais c'est bon !
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Nous soutenons le renvoi en commission.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. C'est oui pour le renvoi en commission.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Non au renvoi en commission, Monsieur le président, pour une énième fois.
Le président. Je vous remercie. Le Conseil d'Etat ne souhaite pas s'exprimer, nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 48 non contre 45 oui.
Le président. A présent, nous votons sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12428 est adopté en premier débat par 49 oui contre 45 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. A l'article 1 souligné, nous sommes saisis de trois amendements du Conseil d'Etat. Voici le premier:
«Art. 9B Garantie du traitement en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident (nouvelle teneur)
1 En cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident attestée par certificat médical d'un membre du personnel qui exerce une activité régulière faisant l'objet d'une rétribution mensuelle dans le cadre d'une fonction permanente ou non permanente, le traitement est remplacé par une indemnité pour incapacité de travail.
2 Le Conseil d'Etat, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration garantit la totalité du traitement des membres du personnel visés à l'alinéa 1 à concurrence d'une durée maximale de 730 jours civils (520 jours de travail) sur une période d'observation de 1095 jours civils (780 jours de travail).
3 Une participation au financement des prestations en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie est prélevée sur le traitement des membres du personnel visés à l'alinéa 1. Elle est fixée par l'autorité compétente entre 0,1% au minimum et 0,9% au maximum.
4 Le membre du personnel en incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident peut être adressé au médecin du travail ou au médecin-conseil de l'autorité compétente. Il est tenu de collaborer, notamment en levant si nécessaire ses médecins traitants de leur secret médical. A défaut, il perd la garantie prévue à l'alinéa 2.
5 L'indemnité pour incapacité de travail peut être réduite ou supprimée en cas d'abus ou lorsque l'accident ou la maladie sont dus à une faute grave du membre du personnel.
6 Les prestations accordées aux membres du personnel par les assurances sociales cantonales ou fédérales ou par l'institution de prévoyance sont acquises à l'autorité compétente, jusqu'à concurrence des montants versés par elle.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 46 oui.
Mis aux voix, l'art. 9B (nouveau) est adopté.
Le président. Madame la conseillère d'Etat, est-ce que vous maintenez vos autres amendements ?
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Oui, Monsieur le président, le Conseil d'Etat maintient l'ensemble des amendements. Maintenant, si, au vu des majorités et pour éviter de perdre du temps, vous souhaitez les mettre aux voix d'un seul bloc, c'est une question de procédure qui vous regarde. En revanche, bien entendu, tous les amendements sont maintenus.
Le président. Très bien, merci. L'amendement suivant du Conseil d'Etat consiste à biffer l'article 9C.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 45 oui.
Mis aux voix, l'art. 9C (nouveau) est adopté.
Le président. La prochaine proposition d'amendement du gouvernement vise à introduire un nouvel article 20A:
«Art. 20A Résiliation des rapports de service en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident (nouveau)
1 En cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident d'un membre du personnel qui exerce une activité régulière faisant l'objet d'une rétribution mensuelle dans le cadre d'une fonction permanente ou non permanente, le Conseil d'Etat, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration peut résilier les rapports de service au plus tôt pour la fin d'une période de 730 jours civils d'absence (520 jours de travail) sur une période d'observation de 1095 jours civils (780 jours de travail).
2 Le Conseil d'Etat, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration peut résilier les rapports de service avant la fin du délai fixé à l'alinéa 1, à condition qu'un motif de résiliation ait été communiqué au membre du personnel avant le début de l'incapacité de travail.
3 Les articles 20, alinéa 5, et 23 de la présente loi sont réservés.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 47 oui.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté.
Le président. Le Conseil d'Etat nous présente aussi un amendement à l'article 2 souligné: il s'agit de biffer l'alinéa 2.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 47 oui.
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté.
Le président. Enfin, je mets aux voix le dernier amendement du Conseil d'Etat, instaurant un nouvel article 3 souligné:
«Art. 3 (souligné) Modifications à d'autres lois (nouveau)
1 La loi sur l'instruction publique, du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), est modifiée comme suit:
Art. 128A Garantie du traitement en cas de maladie ou d'accident (nouveau)
1 En cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident attestée par certificat médical d'un membre du personnel qui exerce une activité régulière faisant l'objet d'une rétribution mensuelle dans le cadre d'une fonction permanente ou non permanente, le traitement est remplacé par une indemnité pour incapacité de travail.
2 Le Conseil d'Etat garantit la totalité du traitement des membres du personnel visés à l'alinéa 1 à concurrence d'une durée maximale de 730 jours civils (520 jours de travail) sur une période d'observation de 1095 jours civils (780 jours de travail).
3 Une participation au financement des prestations en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie est prélevée sur le traitement des membres du personnel visés à l'alinéa 1. Elle est fixée par le Conseil d'Etat entre 0,1% au minimum et 0,9% au maximum.
4 Le membre du personnel en incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident peut être adressé au médecin du travail ou au médecin-conseil de l'autorité compétente. Il est tenu de collaborer, notamment en levant si nécessaire ses médecins traitants de leur secret médical. A défaut, il perd la garantie prévue à l'alinéa 2.
5 L'indemnité pour incapacité de travail peut être réduite ou supprimée en cas d'abus ou lorsque l'accident ou la maladie sont dus à une faute grave du membre du personnel.
6 Les prestations accordées aux membres du personnel par les assurances sociales cantonales ou fédérales ou par l'institution de prévoyance sont acquises à l'employeur, jusqu'à concurrence des montants versés par lui.
Art. 141A Résiliation des rapports de service en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident (nouveau)
1 En cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident d'un membre du personnel qui exerce une activité régulière faisant l'objet d'une rétribution mensuelle dans le cadre d'une fonction permanente ou non permanente, le Conseil d'Etat peut résilier les rapports de service au plus tôt pour la fin d'une période de 730 jours civils d'absence (520 jours de travail) sur une période d'observation de 1095 jours civils (780 jours de travail).
2 Le Conseil d'Etat peut résilier les rapports de service avant la fin du délai fixé à l'alinéa 1, à condition qu'un motif de résiliation ait été communiqué au membre du personnel avant le début de l'incapacité de travail.
3 Les cas de résiliation des rapports de service avec effet immédiat ou pour suppression de poste sont réservés.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 48 oui.
Le président. Le troisième débat n'étant pas demandé, ce projet de loi sera transmis en héritage à la prochaine législature.
Le troisième débat est reporté à une session ultérieure.