République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 3 février 2023 à 16h
2e législature - 5e année - 9e session - 58e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 16h, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat-Julian Alder, François Baertschi, Jean Batou, Virna Conti, Xavier Magnin, David Martin, Youniss Mussa, Patrick Saudan, Adrienne Sordet et Raymond Wicky, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Anne Bonvin Bonfanti, Denis Chiaradonna, Jean-Charles Lathion, Aude Martenot, Jean-Pierre Pasquier, Philippe Perrenoud, Maria José Quijano Garcia, Helena Rigotti et Gabriela Sonderegger.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de procureurs extraordinaires. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les procureurs extraordinaires entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme magistrat du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
M. Pierre Aubert et M. Bernard Dénéréaz.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Le président. Le projet de loi suivant est retiré par ses auteurs:
Projet de loi de Mmes et MM. Daniel Sormanni, Ana Roch, Florian Gander, Christian Flury, Jean-Marie Voumard, Françoise Sapin, Patrick Dimier, Sandro Pistis sur l'aide financière extraordinaire de l'Etat destinée aux entreprises, tous secteurs confondus, définis par la loi fédérale COVID-19 du 25 septembre 2020 (PL-12861)
Premier débat
Le président. Nous reprenons nos travaux avec les deux derniers délais de traitement en commission dépassés. J'appelle d'abord le PL 12711, qui est classé en catégorie II, trente minutes. La parole va à M. Pierre Eckert.
M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président. Ce sujet a déjà été traité un certain nombre de fois à la commission de l'économie. C'est même le troisième ou plutôt la troisième conseillère d'Etat qui suit ce dossier, si je me souviens bien. En fait, nous attendons des réponses de la part du Conseil d'Etat, il s'agit de déterminer si la bonne loi est concernée. Je vous propose donc, Mesdames et Messieurs, de renvoyer cet objet à la commission de l'économie.
Mme Caroline Marti (S). Je suis d'accord sur un renvoi en commission, mais pas sur la destination. En ce qui concerne le groupe socialiste, nous considérons qu'il s'agit véritablement d'une problématique de logement: Genève connaît une crise du logement, il y a un manque d'appartements à destination de notre population, et un certain nombre d'entre eux sont soustraits à la location de longue durée, ne peuvent pas être utilisés pour héberger des familles, car ils sont retirés du marché pour être proposés sur des plateformes de location temporaire.
De plus, Mesdames et Messieurs, on constate que la commission de l'économie n'a pas su traiter ce texte dans les délais, que ce soit par manque de temps ou d'intérêt pour la question, raison pour laquelle je vous propose son renvoi à la commission du logement.
M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs, le groupe UDC ne soutiendra pas ce projet de loi et vous invite tous à le refuser. Ce texte est aujourd'hui périmé, il n'a plus aucune raison d'être, car la problématique qu'il voulait traiter a été réglée entre-temps. En effet, Airbnb paie maintenant la taxe de séjour, ce qui fait que le problème est résolu, cet objet n'a plus de sens.
Je rappelle ce qui était visé par le projet de loi: l'objectif était que ce type de plateformes intermédiaires annoncent lorsqu'elles louent un appartement et que si la taxe n'est pas payée, elles deviennent même codébitrices pour le règlement de celle-ci. Cela a été fait, donc ce texte n'a plus aucun sens ni aucune raison d'être, et je vous propose de classer le dossier. Merci de votre attention.
M. Jean Burgermeister (EAG). L'intervention de M. Pfeffer montre pourquoi il faut renvoyer ce projet de loi à la commission du logement. La commission de l'économie nous a indiqué qu'elle attendait des réponses du Conseil d'Etat - nous les attendons encore alors que le projet de loi a été déposé en 2020 -, voilà pourquoi il a été gelé. Et maintenant, M. Pfeffer nous dit: «C'est terminé, nous votons contre.»
Ce texte doit faire l'objet d'un traitement attentif en commission, c'est évidemment une question démocratique de fond. Si la commission de l'économie et notamment M. Pfeffer ne sont pas intéressés à effectuer ce travail ou n'en ont pas le temps - je ne vais pas faire de procès d'intention à tous ses membres ni même à sa majorité -, alors il faut examiner l'objet à la commission du logement, laquelle avait d'ailleurs fait une demande pour traiter ce texte. Pourquoi ? Parce que la commission du logement a déjà réalisé un travail sur cette question.
Par ailleurs, il y a une certaine urgence à se pencher là-dessus: Genève connaît une crise du logement aiguë, et on ne peut pas se permettre d'accepter qu'autant d'appartements soient finalement soustraits de l'offre pour les locataires du canton sous prétexte qu'il est parfois plus rentable de les louer, même si c'est la moitié de l'année, à des touristes sur des plateformes de type Airbnb. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, comme le proposait la députée Caroline Marti, à voter le renvoi à la commission du logement.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). C'est bien la première fois que j'entends dire dans cette salle que le problème du logement n'est plus d'actualité à Genève ! Je ne peux pas souscrire aux propos du député Pfeffer à ce sujet, tout comme je ne partage pas non plus l'avis exprimé par la porte-parole du parti socialiste qui estime que la commission de l'économie n'a pas su - je trouve cela un petit peu méchant - traiter ce projet de loi.
Nous avons entamé son étude et attendons effectivement un certain nombre de réponses de la part du Conseil d'Etat. Voilà pourquoi - cela a été rappelé - le texte a été gelé. Notre groupe, compte tenu de l'actualité de cet objet et des travaux déjà amorcés, juge plus logique de le renvoyer à la commission de l'économie. Je vous remercie.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui nous concerne, nous pensons que ce projet de loi est aujourd'hui dépassé: un certain nombre de règles ont déjà été imposées aux plateformes de type Airbnb et des contrôles sont effectués par l'Etat. On ne peut pas louer son appartement la moitié de l'année, c'est maximum nonante jours. Par conséquent, nous sommes d'accord avec la proposition de mon collègue, M. Pfeffer, à savoir de ne pas renvoyer ce texte à la commission du logement, mais de le rejeter. Merci.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Alberto Velasco, c'est à vous pour deux minutes.
M. Alberto Velasco (S). Oui, merci, Monsieur le président. Je ne comprends pas comment on peut dire, dans une ville où le taux de vacance est pratiquement de zéro, où il n'a jamais été aussi difficile de se loger qu'aujourd'hui, que ce projet de loi est dépassé. La vérité, c'est que le système Airbnb soustrait une partie des appartements à la location, voilà la réalité. Et le département, malgré les moyens dont il dispose, n'arrive pas à contrôler ce qui se passe.
Ensuite, un deuxième problème se pose, à savoir qu'il y a des gens qui exercent une profession pour laquelle ils n'ont ni autorisation ni formation, c'est-à-dire la profession d'hôtelier. Les choses se passent comme ça, et on ne dit rien du tout ! On peut très bien contrôler les hôteliers, vérifier si les personnes qui travaillent dans un établissement perçoivent le salaire adéquat, mais là, par contre, on est face à des gens qui pratiquent la profession d'hôtelier et on ne dit rien, ça se passe comme ça.
Sans parler du fait qu'ils soustraient des logements à la location. On l'a vu en Vieille-Ville, deux immeubles étaient quasi entièrement occupés par des appartements Airbnb pendant toute l'année. Il a fallu que le département intervienne, et la situation s'est rétablie. Mais soutenir que le sujet n'est pas d'actualité...! Je suis désolé, il est plus que jamais d'actualité. Aussi, Mesdames et Messieurs, je vous demande de renvoyer ce projet de loi à la commission du logement, s'il vous plaît. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci bien. Je rends la parole à M. André Pfeffer pour une minute quarante.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Je crois qu'il y a un malentendu pour certains, notamment pour M. Guinchard. Soit ils n'ont pas compris, soit ils n'ont pas lu ce projet de loi. Je le répète: dans ce texte, il n'est absolument pas question de la crise du logement, il ne s'agit pas non plus de déterminer s'il y a trop ou pas assez d'appartements qui sont soustraits à la location de longue durée. Si vous vous donnez la peine de le lire - il n'y a qu'un seul et unique article -, il est question de contrôler les logements soumis à la location temporaire, il s'agit également de faire payer la taxe de séjour aux personnes qui louent leur appartement de manière temporaire.
Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, c'est un fait, le problème est réglé. Je rappelle qu'Airbnb annonce les appartements loués à Genève depuis sa plateforme et que les gens paient la taxe de séjour. Aussi, le problème soulevé par ce projet de loi a été résolu. Maintenant, évidemment, il y a une crise du logement, mais décider si trop ou pas assez d'appartements sont mis à disposition pour de la location temporaire constitue une autre question. Je vous recommande de rejeter ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Yvan Zweifel (PLR). Personne ici ne remet en cause le fait qu'il y a une crise du logement et que cela n'est évidemment pas acceptable en soi que des appartements qui ont pour fonction de servir de logements soient retirés du parc immobilier. Des mesures ont été prises par le Conseil d'Etat, nous avons été saisis d'une proposition de motion de Mme Caroline Marti sur le sujet, sauf erreur, qui est encore à l'ordre du jour ou a peut-être déjà été votée. Le gouvernement et notamment M. Hodgers nous ont indiqué maintes fois que des mesures avaient été prises et que des contrôles sont mis en place, personne ici ne s'y oppose.
Le PLR était contre ce projet de loi sur le fond dans la mesure où il s'agit pour nous d'un transfert de responsabilités qui n'est tout simplement pas tolérable. La responsabilité d'annoncer qu'un logement a été mis à disposition sur une plateforme de type Airbnb est celle du propriétaire du bien. A l'image du client qui réserve ses vacances via Booking ou un autre portail, celui-ci ne sert que d'intermédiaire pour mettre en relation des personnes avec des hôtels; la vraie relation contractuelle s'établit entre le client et l'établissement.
Ici, c'est exactement la même chose: la relation contractuelle s'opère entre le client et le propriétaire du bien, la plateforme ne servant que d'intermédiaire. On veut refiler la patate chaude à quelqu'un qui n'entretient pas de relation contractuelle avec le client de base ni avec le bailleur mettant son logement à disposition. Voilà pourquoi, sur le fond, nous étions opposés à ce texte, nous étions partis pour le refuser.
Maintenant, Mesdames et Messieurs, si vous souhaitez absolument continuer à l'étudier, alors qu'on le fasse au moins dans la commission qui en a déjà commencé l'examen. La commission du logement, pour sa part, a traité la proposition de motion - je ne sais plus si elle a été votée ou non, mais si elle figure encore à l'ordre du jour, elle le sera prochainement -, que le présent projet de loi retourne à la commission qui l'a examiné, c'est-à-dire à celle de l'économie. Néanmoins et sur le fond, le PLR y sera opposé pour les raisons que j'ai expliquées.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à M. Jacques Blondin pour deux minutes.
M. Jacques Blondin (PDC). Monsieur le président, merci. Vous transmettrez à M. Velasco que je partage l'entier de ses propos... (Remarque.) Si, si ! ...quant à la pertinence de cette thématique. Je ne le rejoins pas sur un seul point, à savoir sa conclusion. Pourquoi renvoyer l'objet à la commission du logement alors que vous n'avez évoqué que des aspects économiques ? Vous avez parlé de concurrence, de personnes qui exercent une profession pour laquelle elles ne sont pas formées... Il est certain que la problématique est réelle, on doit la discuter, on doit aller au bout du travail.
Je ne sais plus pourquoi la commission n'a pas finalisé le produit - est-ce que le rapport a été déposé trop tard ou pas du tout ? -, mais il est évident qu'il s'agit d'un problème économique et que c'est à la commission de l'économie d'aller au bout de la question. Nous avons déjà commencé l'étude, une certaine idée se dégage des travaux en ce qui concerne ces activités, il est sûr qu'on doit savoir qui fait quoi comment et que tout cela doit être contrôlé. J'incite dès lors le parti socialiste - si on tient compte de la teneur de vos propos, Monsieur Velasco - à renvoyer ce texte à la commission de l'économie. Merci.
Mme Fabienne Fischer, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, une fois encore, nous nous trouvons confrontés à la difficulté de réguler l'activité d'une entreprise dite de plateforme. Cette nécessité d'un contrôle par l'Etat est totalement d'actualité aujourd'hui, je suis persuadée qu'il faut avancer sur la question.
Un certain nombre de mesures ont été prises depuis le dépôt du projet de loi, mais la pratique actuelle reste essentiellement insatisfaisante. En effet, nous sommes dans la situation où nous réclamons des informations à une plateforme qui n'a pas envie d'en donner et où nous n'avons aucun autre moyen d'agir que sur la base des renseignements extrêmement lacunaires qu'il est possible d'obtenir, sans leviers de contrainte vis-à-vis de cette société.
Aujourd'hui, il existe un groupe de travail interdépartemental piloté par le département du territoire - il a été créé en 2017 - qui vise à coordonner l'action des différents offices concernés par ces questions, parmi lesquels les services concernant la mise à disposition de logements - c'est donc le département du territoire -, mais aussi la PCTN qui a la capacité de procéder aux contrôles. Les lignes directrices selon lesquelles ce groupe de travail fonctionne sont au nombre de deux et guident l'ensemble des réflexions et propositions: d'une part traiter de façon égale les différents acteurs du secteur de l'hébergement, d'autre part ne pas soustraire des objets au marché du logement.
Certes, la taxe de séjour est perçue maintenant, mais nous n'avons aucun moyen de vérifier qu'elle l'est sur l'ensemble des appartements mis à disposition. La limite fixée dans le règlement de la LDTR (le RDTR) est de nonante jours par an, et une partie de la réglementation se trouve dans le RRDBHD, qui soumet à autorisation la mise à disposition et applique le critère des nonante jours. Cela étant, nous n'avons pas la possibilité d'identifier les bailleurs ni les objets proposés, nous ne pouvons donc pas contrôler le respect des nonante jours.
Pour ces raisons, la situation actuelle n'est pas satisfaisante. La difficulté que nous rencontrons en ce moment, c'est de trouver les moyens techniques pour opérer les vérifications. Le groupe de travail a mis en avant des options, notamment autour de la mise en oeuvre d'une demande d'autorisation préalable à la mise à disposition de logements via une plateforme de type Airbnb, ce qui obligerait les propriétaires à s'annoncer et les objets à être communiqués. Cela nous permettrait d'instituer - c'est en tout cas la piste étudiée en ce moment - un registre avec des données territorialisées, c'est-à-dire que les informations dont nous avons besoin pour exercer le contrôle seraient créées à Genève, gérées par un maître de fichier à Genève et nous permettraient d'aller au bout de nos objectifs.
Maintenant, le siège dans lequel se trouvent l'ensemble des outils pour atteindre nos buts, soit la loi sur le tourisme qui est ciblée dans le projet de loi dont vous êtes saisis maintenant, ne semble pas du tout adéquat, notamment parce que la Fondation Genève Tourisme n'a aucun moyen de procéder elle-même à des contrôles et d'opérationnaliser les objectifs poursuivis. Il semblerait plus judicieux de fixer ces dispositions dans la LRDBHD qui, comme vous le savez, fait l'objet d'une procédure de refonte, mais la PCTN, pour avoir été largement occupée par une autre entreprise de plateforme, n'a malheureusement pas encore eu le temps d'arriver au bout de ce qu'elle peut présenter, notamment sur le thème d'Airbnb dans le cadre de la réforme de la LRDBHD, et n'a donc pas pu apporter les réponses nécessaires attendues par la commission de l'économie.
Mais tout cela avance, nous avons repris le travail sur cette question et devrions pouvoir vous présenter des résultats prochainement, sans doute au tout début de la prochaine législature, en commission. C'est la raison pour laquelle je vous propose de renvoyer le projet de loi dont il est question ici à la commission de l'économie: nous devons pouvoir avancer sur la base de l'acquis des discussions et travaux déjà effectués, sur la base des retours attendus par le groupe interdépartemental, et tout cela devrait vraiment se faire sans plus de délai. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes saisis de deux différentes demandes de renvoi, d'une part à la commission de l'économie, d'autre part à la commission du logement. Je mets aux voix la première proposition.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois du projet de loi 12711 à la commission de l'économie est adopté par 77 oui contre 7 non.
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Voici le dernier texte figurant dans la rubrique des délais de traitement dépassés: la M 2645. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. Thomas Bläsi.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Au travers des différents budgets, nous avons vu qu'il était difficile d'instaurer des baisses d'impôts à Genève, mais nous nous étions dit qu'une exonération de la taxe sur le tourisme devait être possible sur une année où il n'y avait pas eu de tourisme, puisque tout le monde était enfermé chez soi à cause de la pandémie. Eh bien non, le texte n'a pas été traité, et trois ans après, malheureusement, le groupe UDC va devoir le retirer. Je trouve tout de même assez extraordinaire qu'on n'ait pas pu aborder ce sujet à temps.
Le département de l'économie et Genève Tourisme n'arrivent pas à identifier les bailleurs, à vérifier je ne sais quoi, ils ne sont pas capables de contrôler ce qu'ils devraient, par contre, il est tout à fait possible de taxer des commerçants sur le tourisme quand il n'y a aucun tourisme sur place. Voilà, merci beaucoup, Monsieur le président. Nous retirons donc cet objet.
Une voix. Bravo.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Il est pris acte de ce retrait.
La proposition de motion 2645 est retirée par ses auteurs.
Débat
Le président. Nous reprenons notre ordre du jour ordinaire avec la M 2504-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Thomas Wenger. (Un instant s'écoule.) Monsieur Wenger, c'est à vous.
M. Thomas Wenger (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, d'abord, toutes mes excuses, j'étais juste à l'extérieur, je ne pensais pas que l'ordre du jour allait avancer aussi vite ! Nous parlons donc de la M 2504-A, qui s'intitule «Voies de bus: impact de l'usage accru du domaine public sur les temps de parcours des Transports publics genevois». C'est une motion qui date un petit peu, étant donné qu'elle a été déposée en 2018 et que nous avions fait les auditions à cette époque-là.
Ce texte demandait deux choses. Premièrement, de «mener une étude sur l'impact réel des usagers qui font un usage accru des voies de bus sur le domaine public». Deuxièmement, de mettre en place une phase test plus étendue de l'usage des voies de bus par les deux-roues motorisés. Pourquoi une phase test plus étendue ? Parce qu'il y en avait déjà eu une, je crois qu'elle avait été menée à l'époque de M. Barthassat - le prédécesseur de M. Dal Busco -, qui avait décidé d'étudier la possibilité de mettre les deux-roues motorisés sur les voies de bus. Un essai sur deux axes avait été fait, avec les résultats que vous trouvez dans le rapport.
En gros, que montraient ces résultats ? Que les deux-roues motorisés sur les voies de bus avaient tendance à augmenter leurs infractions, notamment de vitesse: on voyait qu'il y avait plus de dépassements de vitesse de la part des deux-roues motorisés sur les voies de bus. On relevait aussi une certaine dangerosité non seulement par rapport aux véhicules TPG - on y reviendra -, mais aussi par rapport aux vélos ou aux taxis, si ces voies de bus étaient également ouvertes à ces derniers. Après, c'était moins clair sur le fait que cela ralentissait d'une manière ou d'une autre les transports publics. Des tests ont montré que cela pouvait les ralentir, notamment à certaines heures de pointe; c'était un peu moins le cas selon d'autres horaires.
La majorité vous invite donc à refuser cette motion, parce qu'une étude a déjà été réalisée. Cela ne sert à rien, pour la majorité, d'étendre cette étude. Par ailleurs, les conclusions étaient assez claires: il ne fallait pas pouvoir introduire les deux-roues motorisés sur les voies de bus, premièrement, je l'ai dit, en raison d'infractions; deuxièmement, en raison de la dangerosité; troisièmement, en raison de problèmes de cohabitation avec les véhicules TPG.
Et puis, de manière générale, s'agissant de la politique de mobilité que nous voulons mener dans le canton de Genève, nous avons la LMCE, la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, qui veut donner la priorité aux transports publics et à la mobilité douce dans les zones urbaines; nous voulons agir également sur le stationnement pour réduire les possibilités de stationnement au centre-ville et qu'il y ait moins de véhicules motorisés... (Remarque.) ...notamment les voitures, mais également les deux-roues motorisés. Je vous rappellerai juste que ceux-ci sont des véhicules à moteur thermique, qui polluent - parfois plus qu'une voiture, ce que les gens ne savent pas toujours - et qui font énormément de bruit. Or dans ce parlement, on a souvent rappelé que nous avons aujourd'hui encore 120 000 Genevoises et Genevois qui habitent dans des endroits du canton où les normes fédérales de protection contre le bruit sont dépassées. Nous devons agir par rapport à cela. Agir par rapport à cela ne signifie pas donner, entre guillemets, un «avantage» aux deux-roues motorisés en leur permettant d'emprunter les voies de bus, mais bien donner la priorité à la mobilité douce et aux transports publics. Merci beaucoup.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la M 2504 propose de «mener une étude sur l'impact réel des usagers qui font un usage accru des voies de bus sur le domaine public» et de mettre en place une phase test afin que les deux-roues motorisés puissent utiliser les voies réservées aux bus munies du marquage «Taxi» sur cinq axes transversaux du canton de Genève.
J'aimerais rappeler qu'il y avait eu deux phases tests à l'époque du magistrat Luc Barthassat, une dans le périmètre de la Praille et l'autre sur la route de Ferney. Il est regrettable que ces phases d'essais aient été réalisées sur une durée trop courte (on parle de quatre et six mois). Les résultats sont néanmoins positifs, avec un gain de deux à trois minutes sur l'axe d'essai. Il n'y a pas eu de problème durant ces essais, ni pour les TPG ni pour les cyclistes. Il est regrettable que les deux phases tests n'aient pas duré plus de six mois et qu'elles aient été faites du mois de mars au mois de septembre. Cela est largement insuffisant, d'où la proposition de faire des essais durant une année sur cinq axes transversaux.
En Suisse et à l'étranger existent des essais et des tests extrêmement encourageants. On peut parler de la ville de Baden, où le bus déclenche le feu 300 mètres avant d'y arriver, laissant ainsi le temps aux motards et aux cyclistes de passer au vert; cela fonctionne depuis dix-sept ans. A Zurich, il y a des essais avec des feux adéquats et cela fonctionne également. Il existe à Bâle - Bâle-Ville, pour faire plaisir à notre collègue André Pfeffer -, à Porto ou à Lisbonne des feux spéciaux pour les motos. A Londres, à Stockholm, des tests concluants ont été effectués. Les avantages constatés ont été une sécurité accrue et une meilleure fluidité du trafic. Je m'arrête là, Monsieur le président, et je reprendrai la parole plus tard. Merci.
Mme Fabienne Monbaron (PLR), rapporteuse de deuxième minorité. Les propos du rapporteur de majorité ont donné le ton quant à la volonté de la commission sur le devenir de cette motion. Ce sont en effet plutôt les points de vue politiques sur le sujet que les rapports sur les tests qui ont parlé en défaveur de celle-ci. Ces rapports méritent une lecture attentive, que vraisemblablement trop peu ont faite. Ceux qui s'y sont penchés auront relevé qu'il est dit que la fluidité du trafic sur la voie des transports individuels motorisés n'a pas été améliorée par la mesure, ce qui est somme toute assez normal, puisque les contrôles sont effectués par la police et qu'en présence de celle-ci, les motos n'empruntent pas les voies de bus, ce qui génère à ces moments des allongements des temps de parcours sur la voie des transports individuels motorisés. On peut donc légitimement en conclure que la fluidité du trafic sur la voie des transports individuels motorisés est améliorée par la mesure.
La circulation des bus n'est pas péjorée par celle des deux-roues motorisés dans la voie de bus. Effectivement, aucune gêne n'a été relevée. Seule la suppression de la pré-phase bus à la route de Ferney a légèrement dégradé la situation pour le franchissement de certains carrefours régulés. En effet, le rapport précise que «les temps de parcours sont variables d'un trajet à l'autre (temps d'arrêt en station, temps d'arrêt aux feux, conduite du chauffeur...). Les différences observées ne sont pas imputables à la présence de motos sur la voirie, mais aux adaptations apportées à la régulation».
Les bus peuvent en revanche être fortement ralentis par la circulation dans leurs voies des vélos. Bien qu'interdits sur la voie de bus (largeur de voie inférieure à 4,50 mètres), la route de Ferney n'ayant pas d'aménagement propre aux cyclistes et le trottoir étant très étroit, les vélos circulent sur la voie de bus selon un trafic non négligeable allant jusqu'à 50 à 70 vélos par heure.
Les tests n'ont eu qu'un impact limité sur le nombre de deux-roues motorisés sur les voies de bus; il est en effet précisé que les motos les utilisent principalement aux heures de pointe, lors des remontées de files d'attente, sinon elles restent dans leur voie. Aucun comportement dangereux n'a été observé pendant les semaines de relevés.
S'agissant des infractions, il a été relevé que 1,95% de motos étaient en infraction de vitesse sur la voie de bus de Ferney contre 6,25% sur la chaussée normale. Pour la route des Jeunes, il y avait 4% de motos en infraction sur la voie de bus contre 16% sur leur voie légale. Ce qui démontre que les motos ne roulent pas plus vite sur les voies de bus que sur celles qui leur sont autorisées.
Une voix. Exact !
Mme Fabienne Monbaron. Il y avait trois conditions cumulatives de succès à ces tests pour que la mesure soit pérennisée: une fluidification du trafic, aucun impact pour les TPG, pas de détérioration des conditions de sécurité pour les usagers. Au vu des rapports, nous estimons que ces trois conditions peuvent être remplies sur certains tronçons. Mais il est vrai que tant le choix de la route de Ferney, qui induisait d'office une péjoration pour les transports en commun avec la suppression du privilège de départ anticipé du bus, que celui de la durée très courte et de la période hiver-printemps du test semblent avoir été orientés pour aboutir à un échec programmé.
Nous relevons donc la pertinence de cette motion et notons que lancer une vraie et sérieuse étude permettrait aussi d'inclure les vélos afin que leur sécurité soit augmentée. Je précise aussi que la demande n'est pas de légaliser l'accès de l'entier des couloirs de bus du canton aux deux-roues motorisés, mais bien de certains d'entre eux. Le test effectué sur la route des Jeunes est la preuve que cela n'aurait aucun impact négatif à cet endroit et nous estimons qu'il y a dans le canton bien d'autres voies de bus qui pourraient présenter les mêmes conditions.
Pour ces raisons, nous vous recommandons d'approuver cette motion.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de troisième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, notre rapporteuse de deuxième minorité a tout dit. Elle a relevé le pragmatisme et le bon sens de cette motion. On va au-delà de la démagogie des socialistes et de la gauche en général, accompagnés par le PDC, comme un petit mouton de Panurge...
Une voix. Oh !
M. Thierry Cerutti. ...qui pense pouvoir sauver ses fesses lors des prochaines élections ! (Commentaires.) C'est ça, la réalité ! Vous pensez pouvoir sauver vos fesses en suivant naïvement la gauche dans sa débandade de mobilité douce ! Ce qui est intéressant avec M. Wenger, c'est que lorsqu'il parle de motos, il parle de motos motorisées... (Rires.) ...qui consomment de l'essence. Mais je vous rappelle, Monsieur Wenger, qu'il y a des motos qui sont électriques ! La preuve en est que j'ai aujourd'hui une Vespa électrique. Donc ça voudrait dire que moi, avec ma Vespa électrique, je ne pourrais pas utiliser les voies de bus, mais vous, avec votre vélo électrique, qui foncez à 45 km/h, qui grillez les feux rouges et tout ce qui va avec, vous avez le droit d'y aller ! (Commentaires.) Voilà, bravo, Monsieur Wenger, et vous polluez la même chose que moi ! Ou plus ! Parce qu'en pédalant, vous provoquez du CO2 qui pollue l'atmosphère, sans compter tout le reste ! (Commentaires. Rires.)
Plus sérieusement, lorsqu'on a du bon sens dans cette république, on peut simplement se dire: ben tiens, il y a une idée pour justement diminuer le trafic, faire en sorte que la mobilité soit beaucoup plus souple en permettant aux deux-roues d'utiliser ces voies de bus. Elle l'a dit, la rapporteuse de minorité: ça a zéro impact sur les Transports publics genevois ! Ils ne sont pas du tout péjorés, leur vitesse commerciale est maintenue, ils ne sont pas gênés par les deux-roues qui roulent sur la voie de bus - au contraire des vélos ! S'il y a bien un élément qui est accidentogène et qui crée des ralentissements pour les Transports publics genevois, ce sont les vélos ! Ce sont les vélos ! Les bus doivent d'ailleurs faire des écarts pour les éviter parce qu'ils sont beaucoup trop lents et qu'ils sont sur leur territoire, parce qu'ils pensent que les trottoirs, c'est à eux, les pistes cyclables - on dirait que c'est des autoroutes, on pourrait presque utiliser ces autoroutes cyclables pour y mettre des avions, pour faire un nouvel aéroport, parce qu'on voit que l'aéroport de Genève est contrarié, enfin bref ! (Commentaires.) A un moment, on est dans une ville, dans un canton-ville, où il y a des gens qui vivent, qui ont besoin de faire des activités, et M. Wenger vient nous parler de bruit ! (Remarque.) C'est sûr, Monsieur Wenger, qu'on n'est pas en Valais, on n'est pas au chalet de mes parents ni à celui des vôtres à Verbier...
M. Thomas Wenger. Si seulement ! (L'orateur rit.)
M. Thierry Cerutti. ...où vous êtes tranquille pour passer votre week-end ! (Rire. Commentaires.) C'est vrai qu'en passant votre week-end à Verbier, à part entendre le chant du coq et le son des cloches des vaches, vous n'entendez pas grand-chose ! Tout le monde rêve de cette vie, mais on vit à Genève, avec les réalités genevoises, dans une ville où il y a 500 000 habitants; il y a beaucoup de frontaliers qui viennent à Genève avec leurs véhicules polluants, et ça ne vous dérange pas ! (Commentaires.) Le MCG demande qu'on n'ait plus trop de frontaliers chez nous en mettant une priorité dans l'embauche, une priorité cantonale pour nos résidents justement pour qu'ils puissent circuler avec nos Transports publics genevois. Non ! Vous, vous préférez faire venir les Français, avec leurs véhicules qui puent et qui polluent ! (Exclamation. Rire.) C'est votre choix ! (Commentaires.)
Pour revenir plus sérieusement sur cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, votez-la ! Elle est pragmatique, parce que, tout d'abord, elle permet, une fois de plus, à la mobilité de fonctionner, c'est quand même le but, lorsqu'on utilise le terme mobilité, c'est de pouvoir se mouvoir, donc lorsque les motos et les deux-roues plus largement utilisent les voies de bus, ça permet aux véhicules de circuler plus librement, ça ne mange pas de pain... (Remarque.) Ça ne crée pas de foin, pas de pain - merci, Monsieur Ivanov ! (Rire.) Et pour revenir à ce qu'a dit notre rapporteuse de deuxième minorité, cette motion est juste pragmatique et pleine de bon sens. Merci donc de la voter et au diable les démagos ! (Rire.)
Une voix. Bravo ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe maintenant la parole à Mme Marjorie de Chastonay. Avec un langage apaisé, je l'espère - et apaisant ! (Brouhaha.)
Mme Marjorie de Chastonay. Il y a un petit peu de bruit, hein, quand même ? (Brouhaha.)
Le président. ...quand il y aura un peu moins de bruit, parce qu'on ne va pas l'entendre ! (Commentaires.) S'il vous plaît, un peu de silence, pour qu'on entende Mme de Chastonay !
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, voici encore une motion MCG que nous allons refuser. (Commentaires.) Je peux donc comprendre le mécontentement de M. Cerutti - vous transmettrez, Monsieur le président. En effet, les premiers résultats des tests de l'usage par les deux-roues motorisés des voies de bus avaient confirmé à quel point c'était une mauvaise idée. Cela va à l'encontre de la fluidité des transports publics et même à l'encontre de la LMCE, la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, votée à plus de 60% par la population genevoise. C'est pourquoi, pour les Vertes et les Verts, il est exclu de mener encore une fois ces tests.
Enfin, rappelons quand même - cela a été fait par le rapporteur de majorité - que les deux-roues motorisés font énormément de bruit et que l'Etat se bat actuellement avec des recours qui visent les stratégies de diminution du bruit, comme la réduction de la vitesse à 30 km/h, une mesure gratuite, efficace et rapide, visant à améliorer la qualité de vie des habitantes et des habitants de Genève, qui souffrent réellement du bruit. C'est un fléau et c'est une question de santé publique. Il s'agit de la santé de 120 000 personnes, quand même. Je pense donc que c'est important de le répéter. (L'oratrice est interpellée.) Ah oui, ça fait beaucoup de bruit ! Alors effectivement, il serait plus adéquat - peut-être pour le groupe MCG ou toutes les personnes qui proposent cette solution - de les inciter, en tout cas d'inciter en priorité les motardes et les motards à passer au vélo ou au vélo électrique. (Protestations. Rires. Commentaires. L'oratrice rit.)
Le président. S'il vous plaît !
Mme Marjorie de Chastonay. Mais je pense que le MCG n'est pas encore prêt à sauter le pas ! (Commentaires.) Bon, vous l'aurez compris, les Vertes et les Verts refuseront cette motion. Merci.
Une voix. Sans aucun argument ! (Commentaires.)
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Je vais essayer de parler avec calme et douceur, parce que dès que l'on parle de mobilité dans ce parlement, nous nous enflammons. En fait, cette motion demande quelque chose d'assez simple: que nous allions au bout des études. Nous avons le sentiment que le département n'a pas voulu aller au bout de celles-ci pour connaître l'intérêt de laisser les deux-roues motorisés circuler sur les voies de bus. Nous voulons une solution pragmatique, sans dogmatisme, et nous considérons qu'il convient d'aller un peu plus loin dans les études et de les mener à terme.
Le PLR est favorable à ce que les deux-roues motorisés aillent sur les voies de bus, à trois conditions: que la fluidité du trafic ne soit pas impactée, qu'il n'y ait pas non plus d'impact sur les TPG et qu'il n'y ait pas de détérioration des conditions de sécurité pour les usagers. Nous pensons que, sur certains tronçons, ces conditions peuvent être réunies et que nous pourrions, de façon pérenne, permettre aux deux-roues motorisés d'y circuler. Evidemment, la mesure ne consiste pas à légaliser sur toutes les voies de bus la circulation des deux-roues motorisés. Pour ces motifs, le PLR soutiendra cette motion. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, deux tests qui ont effectivement été réalisés lors de la précédente législature prévoyaient que les deux-roues motorisés puissent circuler sur les voies de bus, dans deux secteurs spécifiques. Cela a été mentionné, c'était à la route des Jeunes et à la route de Ferney. Ce que le rapport a démontré - n'en déplaise aux minoritaires de la commission des transports qui souhaitent maintenir cette possibilité pour les deux-roues motorisés de circuler sur les voies de bus -, c'est que ces tests n'ont pas été concluants. (Remarque.)
D'abord, parce qu'on a constaté sur un des tracés comme sur l'autre une augmentation des infractions à la circulation routière et donc une détérioration de la sécurité pour l'ensemble des usagers de la route. Et puis, sur un des deux tracés - celui de la route de Ferney -, Mme Monbaron l'a reconnu, cela a occasionné une baisse de la vitesse commerciale des transports publics. Et qui dit baisse de la vitesse commerciale dit baisse de la qualité de l'offre de transports publics et donc de l'attractivité de ce mode de transport. Et puis, il faut le rappeler aussi - c'est assez peu indiqué dans le cadre des débats -, une perte de la vitesse commerciale, c'est aussi une perte financière pour cette régie publique, puisque évidemment, elle est péjorée dans ses activités.
Il faut le dire aussi, et c'est la position du parti socialiste, il n'est pas question aujourd'hui, dans une politique de mobilité durable, responsable et qui doit mettre en oeuvre les objectifs du plan climat, de favoriser les deux-roues motorisés, parce que c'est un mode de déplacement qui pollue - pour certains modèles, davantage que les voitures -, qui engendre énormément de bruit routier et qui nuit très fortement à la qualité de vie et à la santé des riverains. A nouveau, le bruit des scooters et des deux-roues motorisés peut être encore plus important que celui des voitures.
On a parlé du fait que ce serait uniquement sur quelques tracés, pas sur l'ensemble des voies de bus. Cela a aussi été évoqué dans le cadre des travaux de commission, le problème engendré par le fait d'avoir un régime différencié en fonction des différentes voies de bus est que cela détériore la lisibilité et la clarté des règles de circulation, et cela engendre un certain nombre de problèmes: une augmentation des infractions et une diminution de la sécurité.
Je répondrai à un certain nombre d'arguments des bancs de droite, qui fustigent les vélos qui circulent sur les voies de bus, ces vélos qui nuiraient à l'efficacité des transports publics. (Commentaires.) Je dois reconnaître que, d'une certaine manière, ils ont raison: la voie de bus n'a pas pour vocation d'accueillir des cyclistes. La voie de bus a pour vocation d'accueillir des bus, mais force est de constater qu'aujourd'hui, le réseau de pistes cyclables, le réseau d'aménagements dédiés aux cycles manque; et, pour des questions de sécurité, il a été convenu que les cyclistes puissent emprunter les voies de bus plutôt que les voies de circulation usuelles, aussi pour encourager la pratique du vélo, qui, et je ne vais pas revenir là-dessus ici, a énormément de bénéfices pour l'ensemble de la société et la politique de la mobilité dans notre canton.
Pour toutes ces raisons, le parti socialiste vous invite à rejeter cette motion.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Charles Selleger pour deux minutes.
M. Charles Selleger (HP). Je vous remercie, Monsieur le président, de toujours préciser que je ne suis plus qu'un demi-député, puisque je n'ai plus qu'un demi-temps de parole ! (Commentaires.) Je vais essayer de le valoriser au mieux.
Quand on parle des deux-roues motorisés qui sont en infraction, j'aimerais savoir si on comptabilise les infractions qu'il y aura en moins lorsqu'ils pourront rouler sur les voies de bus qui leur seront autorisées, c'est-à-dire celles qui sont permises également aux taxis et aux vélos. Parce qu'actuellement, si vous regardez, vous constatez que tous ces deux-roues motorisés circulent la plupart du temps allégrement - et prudemment - sur ces voies de bus, sans être amendés, mais en infraction. Donc si ces infractions sont retranchées, eh bien probablement qu'ils auront moins d'infractions qu'actuellement.
Maintenant, quand on parle des infractions des deux-roues, on devrait parler des infractions des deux-roues non motorisés ! Des vélos ! Il n'y a pas besoin d'être très malin pour voir, en se postant à n'importe quel carrefour de la ville, le nombre de vélos qui soit passent sur les trottoirs, soit franchissent le carrefour au feu rouge. Je trouve donc qu'on est face ici à un florilège d'exemples de mauvaise foi de la part de la gauche, qui n'a pas encore compris, malheureusement, que pour fluidifier le trafic, il faut tout faire pour favoriser les deux-roues motorisés. Un deux-roues motorisé emploie beaucoup moins de surface de voirie que la voiture. Et s'agissant de pollution, c'est une fausse vérité que nous assène M. Wenger quand il nous dit que les motos et les deux-roues motorisés consomment plus. Je crois qu'il n'a pas regardé les statistiques.
Moi, j'ai l'avantage de rouler à la fois à moto, à scooter, à vélo, en quatre-roues, en bus et à pied. Eh bien, je peux vous dire que ce qui consomme le moins, c'est ma grosse moto BMW, 1200 centimètres cubes, 5 litres aux 100 kilomètres ! Je vous remercie. (Commentaires.)
M. Jacques Blondin (PDC). Tout d'abord, Monsieur le président, j'aimerais que vous transmettiez au rapporteur de cinquième minorité... (Rires.) ...un petit commentaire par rapport aux recommandations qu'il a faites à notre groupe politique. Je le remercie de ses préoccupations et de son souci, mais je lui donne quand même un conseil personnel: il ferait mieux de s'occuper de son groupe, il y a peut-être plus de travail à faire... (Exclamations.) ...mais vous êtes le bienvenu pour les conseils, c'est quand vous voulez ! (Commentaires. Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Jacques Blondin. Maintenant, vous l'avez compris, le premier débat, c'est l'interprétation du résultat des tests qui ont été mis en place. C'est vrai qu'il y a eu un changement de conseiller d'Etat, on a donc un peu joué sur ces interprétations. Certains les... (Remarque.) Non, ce n'est pas vous, Monsieur le conseiller d'Etat, mais, dans la salle, les commentaires ont changé: certains ont mis en doute le résultat de ces tests, le fait qu'ils étaient trop courts, trop ceci, etc.
Alors oui, les tests, c'est une chose, mais il n'y a pas que ça. Tout d'abord, on a fait le choix d'une mobilité en ville qui met en avant les transports en commun, transports publics, et on a toujours dit qu'il fallait que ce soit en site propre. Alors si on commence à polluer les sites propres partout où ils existent, quel que soit le type de moyen de transport utilisé, ce sera un retour en arrière dramatique par rapport à la politique mise en place actuellement.
Nous - que ce soit très clair -, nous n'avons absolument rien contre les quelque 55 000 deux-roues motorisés présents dans le canton de Genève, et le fait que nous allons refuser cette motion n'est pas une attaque contre les motards. (Commentaires.) Ils sont là, ils ont accès à la ville, ils ont le droit de rouler, ils ne posent pas plus de problème - cela a été dit - que certains vélos, c'est vrai, pour lesquels il faudra trouver une solution. On est tout à fait d'accord. Mais la problématique, ce sont les flux séparés, c'est le trafic en ville, c'est la sécurité. Et, de ce point de vue là, il nous paraît quand même étonnant de revenir en arrière - excusez-moi, c'est le terme à utiliser - et de reprendre certains axes sur lesquels les choses seraient permises alors qu'elles ne le seraient pas sur d'autres, pour des résultats qui seraient déterminés dans six mois ou une année.
De notre point de vue, il faut certes régler le trafic en ville - c'est un vaste dossier, et il ne sera jamais fini; nous n'avons rien contre les véhicules motorisés, et en tout cas pas les motos, et je suis tout à fait d'accord, il faut... (Remarque.) Certaines font du bruit, mais en général pas plus que certaines voitures, pas plus que certaines incivilités dans la ville, mais là, il y a un problème de transport, de fluidité de la ville et de trafic. Raison pour laquelle, et nous assumons notre position, nous refuserons cette motion. Merci.
Mme Danièle Magnin (MCG). Mesdames et Messieurs, j'ai entendu tout à l'heure des choses qui m'ont rappelé que, bien souvent, des citoyens me disent: «Mais au MCG, vous avez beaucoup de programmes, mais vous ne faites rien !» (Exclamations. Commentaires. Rires.)
Des voix. Bravo ! (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Danièle Magnin. En fait, une de nos préopinantes a dit: «C'est une motion MCG, nous ne la voterons pas.» Eh bien, nous sommes victimes de cette attitude dans ce parlement: ce qui émane du MCG est refusé parce que ça émane du MCG et pas parce que ce serait stupide, malvenu, erroné, etc. (Commentaires.) Alors dire non à cette motion parce qu'elle émane du MCG, cela démontre votre profonde bêtise ! Voilà ! (Commentaires.) Du moins la bêtise du raisonnement !
Je voudrais dire encore qu'alléguer une perte de chiffre d'affaires pour les TPG, cela relève d'une mauvaise foi à... On se demande comment on peut inventer un niveau de stupidité pareille ! (Commentaires.)
Maintenant, s'agissant du bruit, les deux-roues motorisés ne sont pas bruyants, ce sont les conducteurs qui font «vroum vroum» qui le sont. (Rires.) Et j'ajoute encore que ceux qui passent dans mon quartier de Champel bien tranquille, ceux qui font le plus de bruit, ce sont les deux-roues motorisés qui portent des plaques blanc et bleu - vous voyez ce que je veux dire ? Pas les nôtres ! (Commentaires.) Et actuellement, il y a une fronde anti-voitures et anti-motos à Genève qui ne vise qu'à nous faire tous aller sans transports motorisés, à pied, à vélo ou en transports publics - pas encore à cheval, mais on pourrait bien penser que ceux-là finiront aussi à dos d'âne ! Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Patrick Dimier pour deux minutes.
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Je vais m'exprimer peut-être moins frontalement que mes préopinants, mais surtout pour rappeler un élément essentiel de cette motion. Elle ne vise absolument pas la généralisation de l'utilisation des voies de bus par les deux-roues - motorisés ou autre, d'ailleurs. Elle vise à fluidifier des axes importants et sur lesquels il y a pas mal de deux-roues, qui en aucun cas ne viendront entraver la fluidité du trafic des autobus.
J'aimerais revenir sur deux autres éléments. On entend beaucoup de choses, mais on n'entend pas le coût des accidents. M. Wenger a parlé tout à l'heure de la cohabitation de certains types de trafic. Je lui donne raison, cette cohabitation peut être tout à fait dramatique. Je vous rappelle quand même qu'en 2020, les frais liés à des accidents impliquant des deux-roues non motorisés - c'est-à-dire des vélos - et des piétons ont atteint, selon la Suva, à peu près 180 millions de francs. Ce n'est donc pas anecdotique, ce sont des choses très sérieuses, et je trouve que les socialistes comme les Verts, à force de vouloir scier la même caramel, finissent comme les Français, avec un mythe errant ! (Rire. Exclamations.)
M. Stéphane Florey (UDC). Vous transmettrez à Mme Marti - c'est ce qui m'a fait réagir: je suis désolé, mais c'est juste aberrant, ce qu'on a pu entendre, parce que c'est l'expérience qui parle, moi je le vois tous les jours: il n'y a pas plus nuisible pour la vitesse commerciale qu'un vélo...
Une voix. Ou qu'un socialiste !
M. Stéphane Florey. ...sur une voie de bus ou une voie de tram ! Un vélo, qui roule à même pas 10 km/h... Comment voulez-vous tenir l'horaire ? C'est juste impossible ! Et l'impact d'une moto, eh bien je peux vous dire qu'il est nul ! Vous pouvez faire toutes les études, et le département peut raconter tout ce qu'il veut, la réalité du terrain est qu'un motard ne dérange pas ! D'abord, parce qu'il roule plus vite, il roule à une vitesse constante, et il n'emmerde personne ! Contrairement aux vélos ! Parce que les vélos, je le redis, ils sont nuisibles à la vitesse commerciale !
La motion en question a donc toute sa pertinence. Il est juste - et ce n'est pas la première fois qu'on le demande... On demande un meilleur partage des voies de circulation, et il est parfaitement légitime aujourd'hui d'ouvrir les voies de bus et subsidiairement les voies de tram à l'entièreté des deux-roues, qu'ils soient motorisés ou non. Et le département pourra dire ce qu'il veut, mais la réalité du terrain, elle est là, et les faits sont là. Je vous remercie.
M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai changé trois fois d'angle d'intervention tant les précédentes prises de parole ont été affligeantes. C'est un florilège de mauvaise foi et d'utilisation d'un certain nombre de constats pour défendre une mesure complètement aberrante. (Remarque.)
Reprenons les arguments qui nous ont été présentés: il y a beaucoup d'accidents impliquant des piétons et des vélos; les vélos ralentissent la vitesse commerciale, et pour résoudre ce problème, il faudrait faire quoi ? Il faudrait faire des tests de deux-roues motorisés sur les mêmes voies que les pistes cyclables et les réseaux de bus ? Pour résoudre les problèmes d'accidents ? (Commentaires.) Ça n'a aucun sens ! (Remarque.) Ça ne répond pas du tout à ça ! Vous avez... (Remarque.) Non, ce sont les arguments qui viennent d'être déployés par MM. Dimier, Florey et autres, et c'est complètement aberrant !
Le PLR, l'UDC et le MCG s'obstinent à tout faire pour augmenter l'emprise des véhicules motorisés sur la voirie. Ils veulent tout subordonner à cette fin, alors que c'est l'inverse qu'il faut faire ! D'abord, il faut réduire le trafic, mais surtout, pour protéger les vélos, protéger les piétons et augmenter la vitesse commerciale, que faut-il faire ? Il faut construire des sites propres ! Il faut construire des sites propres pour les pistes cyclables, protégés, différents de la route; il faut construire des sites propres pour les TPG, pour qu'ils puissent circuler plus vite. C'est ça qu'on doit faire. Comment ? Il faut réduire la voirie à disposition des véhicules individuels motorisés, qu'ils soient à deux ou à quatre roues ! (Commentaires.) C'est ça, la logique ! Et votre opposition - qui vire au délire, je m'excuse ! A la commission des transports, vous vous êtes acharnés avec ça ! Alors que ça va à l'encontre de la santé de nos concitoyens, à l'encontre des questions de réchauffement climatique et à l'encontre même de la sécurité basique des enfants et des gens, vous, vous vous acharnez: «On veut passer partout avec nos "vroum vroum", partout, tout le temps, tout le temps, tout le temps !» Mais arrêtez ! Arrêtez ce cirque ! (L'orateur est interpellé.) J'espère bien que la majorité du Grand Conseil va continuer à aller dans cette direction et dire: «Maintenant, basta avec ces vieux modes de transport, qui sont nuisibles ! Passons à une vraie mobilité !» Et j'ajouterai que si vous voulez faire quelque chose, vous pouvez défendre un abonnement d'urgence climatique à 100 francs par an, comme le propose la Liste d'union populaire. Merci.
Une voix. Bravo ! (Remarque.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rends la parole à M. Patrick Dimier pour quarante secondes.
M. Patrick Dimier (MCG). Je n'ai pas besoin d'autant. Monsieur Cruchon, vous avez une voie royale pour faire ça: il faut changer la constitution ! Ayez ce courage, et on discutera après, parce que je doute que le peuple vous donne raison ! Merci.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole au rapporteur de troisième minorité, M. Thierry Cerutti. Il vous reste une minute.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de troisième minorité. Merci, Monsieur le président. Eh ben dis donc ! Bon, je ne vais pas revenir sur les propos de notre collègue Cruchon, qui étaient plus bas que bas - le ridicule ne tue pas. Effectivement, je pense qu'il tient le sommet de l'incohérence et de... (L'orateur s'interrompt.)
Une voix. Dépêche-toi, Thierry !
M. Thierry Cerutti. ...et du reste.
Une voix. Allez !
M. Thierry Cerutti. Toujours est-il, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a des choses qui ont été dites: aujourd'hui, on veut améliorer la mobilité, on veut améliorer le trafic. Alors certains choisissent la mobilité douce, ils pensent que c'est plus intéressant. On n'est pas contre ça. Simplement, aujourd'hui, on veut que les motos puissent circuler aussi de manière pragmatique; cette motion est pragmatique et je vous invite à la soutenir. Merci.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. J'aimerais juste rappeler à certains préopinants, notamment à M. Cruchon, qu'il faudrait peut-être commencer par lire les invites. La première demande de «mener une étude sur l'impact réel des usagers qui font un usage accru des voies de bus sur le domaine public» et la deuxième de «mettre en place une phase test plus étendue de l'usage des deux-roues motorisés sur les voies de bus, cette fois-ci sur cinq axes transversaux du canton de Genève [...]». Il n'y a rien d'exceptionnel. Malheureusement, le débat dérape et c'est vraiment regrettable.
En ce qui concerne le transfert modal, pour répondre à M. Blondin, j'aimerais quand même rappeler qu'aujourd'hui, nous dépassons les 60 000 immatriculations de deux-roues à Genève et qu'une voiture fait en gros 10 mètres carrés, une moto un peu moins et prend également moins de place du point de vue du parking. On l'a vu, et cela a été dit, les phases tests étaient positives et pourraient perdurer. Ce n'est pas le cas des vélos électriques sur beaucoup d'axes et spécialement sur les voies de tram, particulièrement à la rue de Carouge. Il ne faudra pas s'étonner qu'un jour il y ait des blessés et des morts, parce que c'est vraiment fort préoccupant.
Pour revenir à la question des coûts, évoquée tout à l'heure par Patrick Dimier, Londres a mené une étude sur le sujet, et les résultats sont très probants: 42% de baisse des accidents de deux-roues motorisés suite à l'autorisation de circuler sur les voies de bus. La fluidité du trafic s'est par ailleurs améliorée dans la ville. Par conséquent, cette motion a tout son sens et la minorité de la commission vous demande de l'accepter. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rends la parole à M. Pablo Cruchon pour une minute trente.
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. C'est juste pour rassurer le rapporteur de minorité: j'ai très bien lu les invites et je les trouve particulièrement pernicieuses, parce qu'elles sont justement là pour enfoncer un coin et de nouveau revenir avec l'idée qu'il faut étendre l'utilisation de la voirie aux deux-roues motorisés, et c'est l'inverse, je répète, c'est l'inverse qu'il faut faire, Monsieur Ivanov ! Pour réduire les accidents, il faut effectivement changer la structure de notre voirie, réduire l'impact de la voiture, développer des pistes cyclables sécurisées et développer des voies de bus permettant d'augmenter leur vitesse commerciale. C'est ça, l'enjeu. Alors si vous voulez amender vos invites, je vous propose de faire des phases tests consistant à enlever une voie pour les voitures... (Commentaire de désapprobation.) ...et à développer un site propre pour les vélos - une piste de voiture pour les vélos. Et là, je vous soutiendrai avec très grand plaisir, Monsieur Ivanov ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Cerutti, vous n'avez plus de temps de parole. Monsieur Ivanov, je vous rends la parole, sur le temps de votre groupe, pour deux minutes.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais répondre à M. Cruchon - vous transmettrez, Monsieur le président, dans votre grande mansuétude - qu'une voiture, en gros, c'est 10 mètres carrés, une petite moto, on va dire que c'est 2 mètres carrés, et les grosses, disons, 4 mètres carrés. (Commentaires.) Il y a donc un ratio de 40% d'un côté et de 100% de l'autre. Vous qui vous plaignez toujours de l'utilisation du domaine public, comme d'habitude, vous êtes à côté de la plaque.
J'aimerais rappeler ici que pour réaliser un test, il n'y a pas besoin de demander une autorisation; la Confédération et l'OFROU soutiennent néanmoins ces essais. Il s'agirait, vous l'aurez compris, uniquement d'une volonté politique. Le droit supérieur permet de faire cela, car les cantons sont autonomes en matière de gestion de leur circulation. Ne serait-il pas plus intéressant de faire un essai sur tout Genève ? La question mérite d'être posée. La solution existe donc, avec une phase test pendant une année sur cinq axes importants, afin de déterminer la fluidité du trafic. Ce serait une bonne alternative. La minorité de la commission des transports vous demande d'accepter cette motion. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe maintenant la parole à M. Philippe Perrenoud. (Remarque.) Monsieur Perrenoud, vous avez demandé la parole ?
M. Philippe Perrenoud. Non, absolument pas ! C'est une erreur, excusez-moi !
Une voix. Il voulait, mais il n'a pas osé ! (Rire.)
Le président. Merci. Je passe donc la parole au rapporteur de majorité, M. Thomas Wenger, pour une minute.
M. Thomas Wenger (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, je rajouterai quelques éléments. Premièrement, il y a effectivement 55 000 deux-roues motorisés aujourd'hui immatriculés à Genève, plus ceux qui viennent de France voisine et ceux qui viennent du canton de Vaud. Vous nous parlez de report modal, mais je ne comprends pas comment c'est possible qu'il y ait un report modal et que les gens lâchent leur voiture pour prendre leur deux-roues motorisé alors qu'il n'y a jamais eu autant de voitures et de bouchons à Genève, d'après ce que vous n'arrêtez pas de nous dire. (Remarque.)
Je répondrai à M. Cerutti sur les deux-roues motorisés électriques. Malheureusement, aujourd'hui, le marché des deux-roues motorisés électriques à Genève est microscopique. Je n'ai pas le pourcentage, mais on est clairement en dessous des 5% de véhicules électriques. On parle donc bien de gros deux-roues motorisés qui font du bruit et qui polluent. (L'orateur est interpellé.) Pour prendre un exemple, je mentionnerai la route de Malagnou - si, Monsieur le président, vous pouvez m'accorder un tout petit peu de temps supplémentaire, en tant que rapporteur de majorité... (Vives protestations.)
Des voix. Non !
Une voix. Non, ça suffit, tes conneries !
Le président. Vous avez droit à une minute de plus, vu que vous avez...
M. Thomas Wenger. ...en tant que rapporteur de majorité - et, Monsieur Sormanni, je ne raconte pas des «conneries», merci ! (Exclamations.)
Le président. Je vous donne une minute en plus, vu qu'il y a trois rapporteurs de minorité.
M. Thomas Wenger. Très bien, merci beaucoup !
Une voix. Tu viens de perdre dix secondes, ha ha !
M. Thomas Wenger. Pour ce qui est de... (L'orateur rit.)
Le président. Allez-y, Monsieur le rapporteur.
M. Thomas Wenger. Pour ce qui est de la cohabitation sur les voies de bus, on sait qu'il y a déjà aujourd'hui un encombrement sur ces voies, puisque les transports publics, les taxis - environ 1200 taxis circulent aujourd'hui à Genève sur un certain nombre de voies de bus et taxi -, la police, les pompiers, les ambulances, les transports de personnes en situation de handicap les empruntent. Ajoutez les vélos, cela a été dit... (Remarque.) ...et, si vous mettez encore les deux-roues motorisés, bientôt, il vaudra mieux aller sur la voirie normale que sur la voie de bus pour pouvoir circuler plus rapidement. Pour prendre un exemple, sur la route de Malagnou - je la prends souvent avec mon vélo électrique, qui fait du 25 km/h et non du 45 km/h -, combien de deux-roues motorisés empruntent aujourd'hui les voies de bus réservées aux bus et aux vélos et passent à droite, à gauche, dépassent, s'arrêtent, repartent...
Des voix. Les vélos !
M. Thomas Wenger. Mais pas les vélos ! Les deux-roues motorisés, justement, Monsieur Sormanni ! Regardez un peu quand vous roulez en ville ! (Commentaires.) Il ne faut donc bien entendu pas aller de l'avant avec cette motion.
Je finirai en relevant - et vous transmettrez aux membres du MCG et à Mme Magnin - qu'effectivement, des gens disent que le MCG ne fait jamais rien, et c'est bien vrai, parce que les 120 000 personnes...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Thomas Wenger. ...les 120 000 Genevoises et Genevois qui souffrent aujourd'hui du bruit, qui aimeraient une ville et un canton apaisés, se demandent bien ce que vous faites quand vous votez ce genre de proposition. Merci beaucoup, Monsieur le président.
Une voix. T'as eu trois minutes ! (Commentaires.)
Une autre voix. N'importe quoi ! Et en plus, il nous insulte !
Le président. Monsieur Cerutti, vous n'avez plus de temps de parole. Madame Magnin non plus. (Vifs commentaires.) Non, non, non ! (Vive remarque.) Monsieur, l'équité... (Vive remarque.) C'est bon, Monsieur Cerutti, merci... (Commentaires.) Je passe la parole à M. Christo Ivanov pour une minute trente.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste répondre au rapporteur de majorité - vous transmettrez, Monsieur le président. A Genève, le solde net de la population augmente chaque année de 20 000 habitants. Il faut que les gens roulent d'une manière ou d'une autre. Aujourd'hui, nous sommes 520 000 dans le canton, ce qui est l'équivalent de Bâle-Ville et de Bâle-Campagne - pour faire plaisir à notre ami André Pfeffer - et, selon les chiffres de l'office cantonal, le nombre des deux-roues motorisés immatriculés est de plus de 60 000, Monsieur le député. Donc acceptez cette excellente motion, comme vous le demande la minorité de la commission ! Merci, Monsieur le président. (Remarque.)
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Je me dis que le hasard fait quand même mal les choses, en plaçant tous ces sujets de mobilité en période électorale ! (L'orateur rit. Rires.) Néanmoins, je suis très heureux qu'on s'attaque enfin à l'ordre du jour bleu et à mon département en particulier, Monsieur le président.
Je rappellerai quelques éléments. Cette motion a été déposée en septembre 2018. C'était quelques mois après que je suis entré en fonction et que j'ai constaté - il faut peut-être rappeler ces faits, parce que c'est la motivation des motionnaires - que les essais menés n'étaient pas concluants. Et je suis quand même étonné d'entendre des interprétations qui vont exactement dans le sens contraire.
Le deuxième élément, c'est que ces essais étaient arrivés à leur terme. On comprend la logique de cette motion: prolonger ces essais et faire en sorte que les résultats soient plus positifs. Je rappelle juste que les essais qui avaient été initiés par mon prédécesseur, en tout cas l'un d'entre eux - pour le deuxième, je suis un peu moins sûr -, étaient échus avant même que je ne prenne mes fonctions. Je voulais rappeler cela. Vous me direz, ça ne fait pas forcément avancer le débat, mais imaginons quand même - parce que je me suis posé la question: est-ce que ce n'est pas une bonne idée que de faciliter la tâche des motos, qui en effet occupent une surface moindre que les voitures ? Mais leur faciliter la tâche dans quel but, au fond ? On a 55 000, peut-être 60 000 deux-roues motorisés circulant à Genève aujourd'hui - en plus de tous les autres. Le ratio est de loin - de loin ! - supérieur à tout ce qu'on connaît en Suisse, peut-être d'un facteur 2 ou 3 ! (Commentaires.) J'allais même dire que notre ratio de deux-roues motorisés ressemble plus à celui d'une ville de l'Extrême-Orient par exemple qu'à celui d'une ville occidentale.
Est-il donc logique de vouloir encore faciliter, privilégier, favoriser ce mode de transport ? En 2018, la réponse était clairement non, parce qu'on avait au demeurant des problèmes de parking, etc. - qui ont été résolus entre-temps, il y avait donc beaucoup de places supplémentaires, on a fait de l'ordre avec le parcage sur les trottoirs. Est-ce qu'il est souhaitable encore aujourd'hui de le faire - parce que c'est de ça qu'on discute ? La réponse est non ! Bien évidemment ! Bien évidemment, puisqu'on doit, ne serait-ce que parce que la loi le demande, favoriser les transports publics et la mobilité douce, mais on a quand même d'autres enjeux, qui sont effectivement liés à la question climatique, et l'objectif, vous le savez - c'est un objectif partagé dans ce parlement -, c'est d'atteindre une réduction de 60% des émissions de CO2 d'ici 2030. Si on ne veut pas que ce soient simplement des paroles en l'air, nous serons obligés de réduire le trafic motorisé d'environ 40% pour l'atteindre, tout en essayant de convertir 40% du parc. Nous sommes obligés de le faire !
Cela va donc vraiment à rebours non seulement du bon sens, mais aussi des engagements que le gouvernement et le parlement ont pris. Autant de bonnes raisons - et je ne veux pas en rajouter, parce que je pense qu'on aura l'occasion, avec d'autres points, de revenir sur le sujet et de répéter toujours à peu près les mêmes choses. J'en resterai là, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, et évidemment, je vous incite, vous conseille de refuser cette motion. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je mets cette proposition de motion aux voix, en vous rappelant que la majorité conseille de la refuser.
Mise aux voix, la proposition de motion 2504 est rejetée par 49 non contre 44 oui (vote nominal).
Une voix. Monsieur le président, mon vote n'a pas été pris en compte !
Une autre voix. Ah !
Le président. Les votes sont corrects, je suis désolé. (Commentaires.)
Une voix. Ça ne change rien !
Une autre voix. Surtout pas à une voix près !
Débat
Le président. Nous passons au point suivant de l'ordre du jour, à savoir la M 2515-A, qui est classée en catégorie II, trente minutes. La parole va au rapporteur de majorité, M. Sandro Pistis.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission fiscale a étudié la motion «Stop à l'évasion fiscale des véhicules !». Ce texte demande que du personnel soit engagé pour créer une unité chargée du contrôle de l'immatriculation des véhicules motorisés. Les signataires du texte prétendent que plus de trois mille véhicules seraient indûment immatriculés dans d'autres cantons et circuleraient de manière illégale à Genève, avec une perte fiscale pour notre canton de 3 millions. Lors de la présentation de son texte, le premier signataire s'est basé sur les dires du directeur général du bureau des autos, M. Leibzig, selon qui plus de trois mille véhicules seraient en situation de fraude à l'immatriculation. Selon les auteurs du texte, le but de ces détenteurs de voitures serait de faire de l'évasion fiscale - c'est ce qui nous a été dit en commission.
La commission a procédé à diverses auditions. Aucune d'entre elles n'a pu démontrer de manière factuelle que trois mille véhicules seraient en situation de fraude à Genève. Le directeur du bureau des autos nous a expliqué que certains cantons sont plus favorables en matière d'impôts; il a pris l'exemple du Tessin, qui taxe 15 francs une remorque, qu'elle pèse 20 tonnes ou le poids d'une remorque de camping.
Ce texte fait état d'un faux problème, d'un problème qui n'existe pas. Il est clair qu'il n'est pas concevable aujourd'hui d'engager une unité spécifique qui vérifierait si un véhicule est immatriculé de manière correcte ou pas à Genève, partant du principe que le véhicule est quand même immatriculé dans un canton, qu'il en a obtenu l'aval pour avoir des plaques d'immatriculation et qu'il paie donc des impôts.
Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite à refuser cette motion qui soulève un problème inexistant.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Peut-être que M. Pistis a l'habitude de dire «circulez, il n'y a rien à voir», mais en l'occurrence il s'agit d'un vrai problème ! Ce problème n'est pas arrivé de nulle part: en effet, le directeur du bureau des autos a lui-même apporté ces chiffres-là à la commission fiscale il y a plusieurs années. Il est peut-être revenu dessus, je ne sais pas si une pression politique s'est produite entre-temps, mais ce ne sont pas des chiffres inventés: ils viennent de procès-verbaux de la commission fiscale et ont été fournis à l'époque par le directeur du bureau des autos.
Selon ces chiffres, deux à trois mille véhicules seraient immatriculés dans d'autres cantons plus avantageux fiscalement parlant. Je crois que ce n'est un scoop, une découverte pour personne: nous avons l'habitude de voir nombre de plaques d'autres cantons, généralement valaisannes - c'est le canton, je dirais, le plus attractif; ce n'est pas contre le canton du Valais ! (Remarque.) Il s'agit plutôt de grosses cylindrées. On peut avoir de sérieux doutes sur le fait que ces véhicules-là passent plus de la moitié de leurs nuits - puisque tel est le principe pour immatriculer un véhicule dans un canton - en Valais ! Je n'aurais jamais déposé ce texte si nous n'avions pas eu ces éléments très factuels de la part du directeur du bureau des autos.
Force est de constater, face à cette situation - à savoir qu'environ trois mille véhicules échappent à la fiscalité genevoise, que ce sont de grosses cylindrées... Est-ce normal, finalement, de légitimer cela ? C'est-à-dire de légitimer le raisonnement suivant: on réside dans un canton et on y possède un véhicule, donc normalement on paie l'impôt dans ce canton-ci - mais finalement non, parce qu'on a une résidence secondaire dans un autre canton, par exemple le Valais. Il faut bénéficier quand même de quelques moyens pour avoir une résidence secondaire en Valais, aussi pour acquérir une grosse cylindrée. Est-ce normal de ne pas payer ces quelques francs ou centaines de francs en plus dans le canton dans lequel on réside ? (Remarque.) Non ! Ce n'est pas normal, et il faut appeler un chat un chat, il s'agit de fraude fiscale ! C'est un des problèmes de notre système fédéral: la concurrence fiscale entre les cantons, avec des contribuables qui font de la fraude en immatriculant leur véhicule dans un autre canton lorsqu'ils y ont une résidence secondaire.
Cette motion demande simplement que la loi puisse être appliquée, que des contrôles puissent être effectués. Dans d'autres cantons, ce type de contrôle a lieu pour les sacs-poubelle, par exemple, et ça fonctionne très bien. Or, ça paraît encore plus facile pour les plaques d'immatriculation que pour les sacs-poubelle. Le principe de cette motion visant à contrôler un peu plus les immatriculations, c'est de faire en sorte que quand on doit payer des impôts dans un canton, eh bien on paie ces impôts, surtout quand on a les moyens. Cela permettrait aussi d'éviter pour le canton de Genève un manque à gagner qui avait été estimé à 3 millions de francs environ ! Raisons pour lesquelles je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter cette motion.
M. Sébastien Desfayes (PDC). Le groupe PDC-Le Centre est d'accord avec les conclusions du rapporteur de majorité, mais pas avec ses prémisses. Le rapporteur de minorité a raison, il existe un problème fiscal à Genève avec les automobiles. Entre 2 et 3 millions de recettes échappent aux caisses de l'Etat en raison d'une fiscalité qui est aujourd'hui inadaptée.
La solution préconisée par cette motion est totalement obsolète, et elle est aussi aberrante, parce qu'elle vise à créer une usine à gaz, à engager de nouveaux fonctionnaires, à mettre en place une sorte d'unité - des forces spéciales, un commando - chargée de traquer, si ce n'est les Valaisans de Genève, en tout cas les personnes qui ont des plaques valaisannes. On imagine le travail, on imagine le peu de résultats; au final, on aura des coûts bien supérieurs aux recettes qui échappent.
Le Conseil d'Etat, en l'occurrence Serge Dal Busco, n'a pas attendu le vote de cette motion pour intervenir, mais il est intervenu de manière intelligente. Qu'est-ce qu'il a vu ? Il a vu qu'on a une fiscalité obsolète, peu incitative, qui ne tient pas compte des enjeux de la transition énergétique, et il a déposé un projet de loi qui, s'il est voté ou modifié par le biais d'un contreprojet de la commission fiscale, permettra précisément de faire revenir à Genève ceux qui aujourd'hui sont tentés d'immatriculer leur véhicule en Valais, et ainsi d'augmenter les recettes fiscales du canton ! Raison pour laquelle il faut évidemment rejeter cette motion. Merci.
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je peux être d'accord avec mon collègue Guinchard qui s'exprimait hier au sujet de l'obsolescence d'un certain nombre de sujets: ce texte a été déposé en 2018 et pas mal d'eau a coulé sous les ponts depuis. Comme on vient de le rappeler, à la commission fiscale, nous sommes en train de traiter une révision de l'imposition des automobiles qui pourrait - ou pas - résoudre la question qui nous est posée.
Cela dit, il s'agit d'un vrai problème, sachant que l'imposition des véhicules lourds, des véhicules puissants, est relativement élevée à Genève: nous sommes largement au-dessus de la moyenne suisse, alors que pour l'ensemble du parc automobile, nous sommes dans la moyenne suisse - et probablement meilleur marché pour les véhicules les plus légers. Par contre, pour les véhicules les plus puissants, nous sommes au-dessus. Comme l'a évoqué le rapporteur de minorité, ce sont souvent des véhicules qui coûtent, je ne sais pas, 100 000 francs ou plus, qui génèrent des frais de fonctionnement annuels de plusieurs dizaines de milliers de francs, et pour économiser quelques centaines de francs, on va immatriculer son véhicule... (Remarque.) Allez, mettons 2000 francs si vous voulez, mais c'est quand même très nettement inférieur aux frais de fonctionnement d'un pareil véhicule. Donc pour économiser ces quelques centaines ou milliers de francs, on va simplement immatriculer son véhicule dans un autre canton. C'est immoral, c'est pingre, mais c'est surtout illégal, on l'a déjà dit.
Rappelons une autre chose: le véhicule doit être immatriculé non à l'endroit où il se trouve le plus souvent, mais à l'endroit où il dort ! Ce qui amène au problème que j'aimerais soulever. La motion propose d'«engager le personnel nécessaire» et de «créer une unité chargée du contrôle de l'immatriculation des véhicules motorisés». Alors évidemment, s'il faut aller vérifier où le véhicule dort, ce personnel devra enchaîner des services de nuit pour observer si le véhicule passe la plus grande partie de ses nuits à Genève ou en Valais, par exemple. Les auditions réalisées par la commission ont montré que c'était parfaitement inefficace, je voulais essayer de vous le montrer aussi. C'est extrêmement difficile de contrôler où le véhicule dort, et je pense qu'une brigade ne sera pas suffisante pour faire ça. C'est compliqué, c'est difficile.
Une voix. Une armée de fonctionnaires !
M. Pierre Eckert. Les Verts estiment que c'est une solution boiteuse à un véritable problème. En conséquence, nous nous abstiendrons sur cette solution. (Remarque.)
M. Patrick Dimier (MCG). Dans cette salle, de nombreuses personnes aiment l'espace Schengen parce qu'il permet la liberté de mouvement à l'intérieur d'une vaste superficie. Avant Schengen, la Suisse a instauré ce système: il y a donc chez nous des gens qui, librement, s'installent à plusieurs endroits ! Evidemment, pour les néocommunistes, néomarxistes, enfin, néo tout ce que vous voulez, c'est un grand problème parce que ce sont des gens riches ! Mais ils oublient de préciser que c'est grâce à ces gens riches que beaucoup de leur supporters ne paient pas d'impôts. Il faut donc bien dire que les gens utilisent un droit qui est le leur, qui est constitutionnel, celui d'avoir plusieurs domiciles, dont des résidences secondaires. Pardon: pas plusieurs domiciles, puisque seulement deux catégories de personnes peuvent avoir deux domiciles, à savoir les juges fédéraux et les conseillers fédéraux - ce sont les seules exceptions à la règle. Mais il y a des gens qui ont des résidences secondaires et qui y installent une voiture; il s'agit principalement de 4x4 puisque ces véhicules sont principalement immatriculés dans des lieux de montagne, ce qui est tout à fait logique, me semble-t-il - mais la logique n'est pas nécessairement communiste.
L'autre aspect, c'est qu'on a beaucoup de voitures, vous les avez toutes remarquées comme moi, immatriculées soit à Zoug, soit à Schwytz, ou ailleurs encore... (Remarque.) Ou en Appenzell - merci, Monsieur Romain. Appenzell est un cas spécial: il ne faut pas croire que ce sont des voitures qui véhiculent des handicapés parce qu'elles portent les lettres «AI»... (Rire.) Ce n'est pas ça, l'idée ! Simplement, c'est en Appenzell Rhodes-Intérieures que l'impôt sur les flottes est le moins élevé. On ne va pas dire aux gens qui ont des sociétés de location qu'ils fraudent la loi; pourtant, les voitures dorment à Genève comme ailleurs, et principalement à Genève. Mais Genève n'a pas voulu entendre parler du rabais de flotte, ce qui fait que bien entendu, à Genève, comme toujours, tout est plus cher mais rien ne vaut rien. Merci.
M. Emmanuel Deonna (S). On l'a rappelé, M. Didier Leibzig, directeur général de l'office des véhicules, a souligné que la règle pour l'immatriculation d'un véhicule est la suivante: il faut prendre en compte le lieu de stationnement. Par lieu de stationnement, il faut entendre, en règle générale, le lieu où le véhicule est garé pour la nuit; le domicile du détenteur est considéré comme le lieu de stationnement. Selon le département des finances, auditionné à la commission fiscale, ces trois mille véhicules sont de grosses cylindrées immatriculées illégalement dans des cantons voisins. Ces fraudes fiscales, le motionnaire l'a rappelé, entraînent un manque à gagner de l'ordre de 3 millions de francs. Prévenir ces immatriculations frauduleuses serait bienvenu pour nos finances cantonales.
La mise en oeuvre de ce texte demanderait d'engager du personnel. M. Desfayes verse certainement dans la caricature en évoquant une usine à gaz. A-t-il raison d'évoquer une fiscalité obsolète et de dire qu'un projet de loi suffisant pour régler le problème serait à l'heure actuelle entre les mains du Conseil d'Etat ? J'observe que les Verts reconnaissent que le problème est réel et ne souhaitent pas non plus enterrer ce sujet. Quoi qu'il soit, le Conseil d'Etat pourra s'expliquer sur la question dans les six mois; le cas échéant, il pourra présenter un rapport motivant son refus de créer une unité chargée d'effectuer ce contrôle et proposer des solutions alternatives.
Pour le groupe socialiste, la concurrence fiscale intercantonale nuit gravement à la cohésion sociale et aux finances. C'est pourquoi il vous recommande d'accepter cet objet.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, on a un budget de 10 milliards, on annonce 500 millions de déficit et on engage 700 nouveaux fonctionnaires: faudra-t-il continuer longtemps à creuser le trou en engageant de nouveaux fonctionnaires pour des tâches qui rapporteraient très peu d'argent ? En effet, comment allez-vous faire des vérifications sur le domaine public ? Comment irez-vous dans les garages privés pour verbaliser les gens ? Je pense que votre motion est une fausse bonne idée, cette motion qui vise à créer une brigade spéciale digne des «Chevaliers du fiel» avec la «Brigade des feuilles». Moi, j'appellerais plutôt ça «La quatorzième étoile du Valais» !
Mon préopinant Patrick Dimier l'a dit, le canton d'Appenzell domicilie tous les véhicules de location de Suisse, en grande partie les Rhodes-Intérieures, parce que c'est le canton qui prend l'impôt le moins haut sur ces véhicules. Personne n'a rien à redire sur le dumping intercantonal qui existe à ce niveau-là.
Cette motion rate complètement sa cible et il convient de la rejeter. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Yvan Zweifel (PLR). On aborde un sujet qui vise - c'est ce que demande M. de Sainte Marie - à ce que celui qui vit dans un endroit et surtout y utilise sa voiture soit fiscalisé à cet endroit, une sorte de BEPS motorisé. Dans le fond, on peut évidemment rejoindre l'idée sous-jacente.
La question ici est: la solution proposée s'attaque-t-elle réellement au problème ? Et là, je rejoins tout à fait ce qu'a dit mon collègue Desfayes: le problème, c'est d'abord que la fiscalité automobile n'est tout simplement pas adaptée sur deux points. D'abord, elle est tout simplement trop élevée à Genève pour certains véhicules, mais aussi basée sur de mauvais critères, par exemple celui de la puissance. La puissance ne veut pas dire que le véhicule est un grand émetteur de CO2 ou de microparticules, alors que c'est justement là-dessus que la fiscalité automobile devrait agir. Et pour ces raisons, on a en effet des gens qui, malheureusement, pourraient être tentés d'éviter cet impôt. Notre collègue Patrick Dimier l'aurait appelé un «impôt d'échappement» ! (Exclamation.)
La solution que propose M. de Sainte Marie, c'est quoi ? C'est une solution «made in PS» ! Quel que soit le problème qui existe dans ce canton, engageons du personnel sup-plé-men-tai-re ! Il fait froid chez vous ? Engageons des fonctionnaires, ça va sûrement réchauffer l'atmosphère ! Il fait chaud chez vous ? Engageons des fonctionnaires pour ventiler ! Vous avez un problème avec vos voitures ? Engageons des fonctionnaires, ça va évidemment résoudre le problème ! Le tout dans le canton qui a déjà le nombre de fonctionnaires par habitant le plus élevé de tout le pays. On voit bien que dans les autres cantons, on n'engage pas des fonctionnaires pour régler cela, mais on règle le problème de fond.
La solution proposée ici ne résout pas le problème de fond, bien au contraire: lorsque ces fonctionnaires seront engagés, par hypothèse, ils rapporteront un petit peu d'argent supplémentaire, mais une fois que lesdits tricheurs auront été débusqués - tant mieux, c'est évidemment bien pour l'Etat, personne ici n'est pour favoriser la triche -, que vont faire ces fonctionnaires ? La logique voudrait qu'on s'en sépare puisque le problème aurait été réglé, mais vous savez comme moi, Monsieur de Sainte Marie, que ce n'est pas ainsi que ça se passe à l'Etat. On va évidemment recaser ces personnes, et puis à la fin, on aura du personnel supplémentaire, avec un impôt qui n'aura pas bougé, le tout pour un coût supplémentaire payé par l'intégralité de la population. Ce n'est pas ce qu'on souhaite.
Réglons donc le problème - et on est en train de le régler, Monsieur de Sainte Marie ! Vous pourrez en parler avec votre collègue Grégoire Carasso, puisque, avec d'autres députés de tous partis, dans une sous-commission de la commission fiscale, nous sommes en train de revoir la manière d'imposer les véhicules, ce qui réglera, j'espère - c'est en tout cas le but -, notamment le problème de ces gens qui, au lieu d'aller ailleurs, seront contents de payer leur impôt parce qu'ils seront contents de pouvoir rouler à Genève, et seront contents de le faire sur des routes de qualité. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Grégoire Carasso, je vous passe la parole; il vous reste une minute vingt-six.
M. Grégoire Carasso (S). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, très brièvement, puisqu'on vient de faire référence à ce groupe de travail qui planche sur un contreprojet à l'initiative de l'UDC qui vise à diviser par deux les impôts: ce sont là deux objets très différents ! Il y a la conformité fiscale, objet magnifiquement traité par la motion défendue par notre collègue Romain de Sainte Marie, et puis la question d'un contreprojet à l'initiative de l'UDC qui vise simplement à diviser les impôts par deux. Je pense qu'il y a bien deux débats à distinguer et à ne surtout pas mélanger. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité pour cinquante secondes.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez au député Zweifel que d'autres cantons engagent bien des fonctionnaires pour effectuer des vérifications et des contrôles, pas de plaques d'immatriculation certes, mais de sacs-poubelle. Cela paraît encore plus difficile à contrôler que des plaques d'immatriculation, et pourtant, dans ces autres cantons, visiblement, cela fonctionne. Il faut donc penser qu'engager quelques fonctionnaires - et non une armée mexicaine - pour vérifier les quelques véhicules qui effectueraient de la fraude fiscale n'aboutit pas à un enfer. Une fois que cela sera résolu - en espérant que cela le soit un jour et que cela rapporte des recettes supplémentaires... Il faut rappeler que chaque fois qu'on a engagé un nouveau contrôleur fiscal à l'Etat de Genève, des recettes fiscales supplémentaires ont été engrangées. Comme l'a dit Grégoire Carasso, il ne faut pas mélanger le débat sur l'impôt des véhicules motorisés avec d'autres débats; il s'agit simplement ici de faire appliquer la loi.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Monsieur le rapporteur de majorité, il vous reste une minute vingt.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il faut être très factuel en étudiant cette proposition de motion. A aucun moment on n'a apporté la preuve que trois mille personnes auraient immatriculé leur véhicule dans un autre canton et circuleraient dans le nôtre.
Par contre, Monsieur le rapporteur de minorité, lorsque vous faites état d'un certain nombre de véhicules que vous voyez circuler ici immatriculés dans un autre canton, j'ai l'impression qu'on n'habite pas dans le même canton ! Moi, j'ai l'impression d'habiter en France ! Aujourd'hui, à Genève, les véhicules qui empruntent nos routes sont largement conduits par des frontaliers. Il faut clairement l'indiquer: quand ces gens-là viennent travailler à Genève, ils ne paient aucun impôt, ils n'ont aucune imposition pour leurs véhicules à moteur qui tous les jours entrent et sortent. Et le parti socialiste est aux abonnés absents quand il faut s'inquiéter de cette problématique.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, sur ce sujet, le constat fait par les motionnaires est juste: un nombre surprenant, disons, de véhicules immatriculés dans d'autres cantons circulent à Genève, pas seulement issus du canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures. A ce sujet, sachez que l'ensemble des recettes fiscales ne reste pas en Appenzell Rhodes-Intérieures, mais est réparti dans un pot commun au pro rata des contrats de location. Genève récupère donc une partie de cette fiscalité. Parenthèse fermée.
J'en viens au sujet et à l'enjeu dont on parle ce soir. Même si, pour certains d'entre vous, il n'y a peut-être pas de lien entre le niveau de l'impôt auto payé à Genève et ces pratiques qui sont, pour certaines en tout cas, discutables... Et les cantons concernés appliquent l'OAC, l'ordonnance réglant l'admission à la circulation - c'est elle qui établit ces principes -, avec une certaine souplesse, disons-le, il y a un petit problème. Mais ce dont on parle ce soir, c'est bien de la proposition faite par les motionnaires, c'est-à-dire d'engager des fonctionnaires pour effectuer des contrôles, en imaginant évidemment que ça va rapporter des recettes supplémentaires.
Nous pensons - le directeur général de l'OCV, M. Leibzig, l'a largement expliqué en commission - que l'efficacité de telles mesures serait très, très aléatoire. L'OCV travaille d'ailleurs avec l'AFC sur ces questions; quand des cas suspects sont détectés, des enquêtes se mènent; mais le faire de manière systématique, comme le propose cette motion, serait franchement - ce sont les professionnels qui nous l'indiquent - très peu efficace et ne servirait au fond qu'à se donner bonne conscience.
Nous espérons - merci à M. le député Desfayes de l'avoir relevé - que les corrections à la fiscalité, telles que le Conseil d'Etat les a proposées... On sait qu'il y a des discussions et que le projet de loi déposé par le Conseil d'Etat pourrait être largement amendé. C'est une très bonne chose si cela va dans le sens d'atténuer les causes qui se trouvent à l'origine de ce qui est constaté aujourd'hui; si en plus on peut le faire en orientant la fiscalité des véhicules à moteur de manière que l'utilisation de ceux-ci soit plus durable, en tenant compte notamment de l'évolution technologique et des exigences en matière climatique, ce serait évidemment une excellente chose.
Pour toutes ces raisons, le Conseil d'Etat vous invite à ne pas voter ce texte, mais plutôt à travailler dans le sens que je viens d'indiquer.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur cette proposition de motion. La majorité propose de la refuser.
Mise aux voix, la proposition de motion 2515 est rejetée par 51 non contre 25 oui et 14 abstentions (vote nominal).
Le projet de loi 12861 est retiré par ses auteurs.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous interrompons nos travaux et les reprendrons à 18h, dans une nouvelle séance qui va traiter de l'ordre du jour pendant deux heures ! Je vous souhaite une bonne pause !
La séance est levée à 17h40.