République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 janvier 2023 à 18h
2e législature - 5e année - 9e session - 54e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 18h, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Diane Barbier-Mueller, Jacques Béné, Pierre Eckert, Christian Flury, Fabienne Monbaron, Alberto Velasco, Salika Wenger, Raymond Wicky, François Wolfisberg et Christian Zaugg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Rémy Burri, Jean-Charles Lathion, Aude Martenot, Maria José Quijano Garcia, Helena Rigotti, Gabriela Sonderegger et Pascal Uehlinger.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Nous passons à notre urgence suivante, le PL 13209-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Didier Bonny, à qui je cède la parole.
M. Didier Bonny (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, rappelons tout d'abord que ce projet de loi s'inscrit dans un catalogue de mesures prises par le Conseil d'Etat. Trois mesures sur les quatre concernent des modifications réglementaires, de sorte qu'il ne lui a pas été nécessaire de passer devant notre parlement.
Il s'agit premièrement de l'indexation de 3,7% au 1er janvier 2023 des allocations naissance et accueil, des allocations pour enfants et des allocations de formation, pour un montant de 30 millions financé par le fonds de compensation des allocations familiales; deuxièmement, de l'adaptation du forfait d'entretien pour l'aide sociale dont le montant est passé de 986 francs à 1006 francs depuis le 1er janvier 2023, l'augmentation de 3,8 millions étant intégrée dans le budget du canton que nous avons voté, du moins une majorité, le 16 décembre dernier; troisièmement, de la modification réglementaire, valable uniquement pour l'année 2023, relative à l'allocation de logement et consistant à faire passer le financement maximum par pièce de 1000 francs à 1400 francs par an à partir du 1er avril 2023 pour un coût estimé de 6 millions, également couvert par le budget que nous avons voté au mois de décembre.
La mesure relative aux subsides d'assurance-maladie seule nécessite un changement de loi; c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat a déposé ce texte. Celui-ci a pour but d'augmenter le montant destiné à la réduction des primes de certaines assurées genevoises et de certains assurés genevois, en tant que mesure de soutien destinée à protéger leur pouvoir d'achat dans un contexte de fort renchérissement. A cet égard, pour l'année 2023, l'augmentation moyenne des primes à Genève s'élève à 4,7% par rapport à l'année 2022. L'augmentation des montants des subsides d'assurance-maladie, pour un total de 26 millions de francs également inscrits dans le budget voté le 16 décembre, est prévue pour l'année 2023 uniquement. Il s'agit donc d'une dérogation aux montants normalement applicables figurant à l'article 22 LaLAMal.
Les personnes du groupe 9 ne sont pas concernées par ces augmentations, qui visent à apporter une aide ciblée à la classe moyenne inférieure. L'adaptation du montant des subsides proposée par ce projet de loi concerne 137 000 personnes. Les bénéficiaires de prestations complémentaires à l'AVS/AI et pour familles, ainsi que les personnes au bénéfice de prestations financières de l'aide sociale, ne sont pas mentionnées dans le présent projet de loi, puisque ces personnes sont soumises à une autre législation.
Si l'ensemble de la commission partage le constat que l'augmentation des assurances-maladie met, une fois encore, à rude épreuve le porte-monnaie de la population genevoise, les avis divergent sur la manière de lui venir en aide. Pour la majorité, une augmentation des subsides de 20 et 10 francs pour les adultes des groupes 1 à 8, de 15 francs pour les jeunes adultes et de 10 francs pour les enfants correspond à l'augmentation moyenne de la prime genevoise pour 2023. Elle n'a donc rien d'un arrosage, puisqu'elle ne fait que mettre à niveau des subsides qui sont d'ores et déjà progressifs depuis leur introduction en 2020. Dans le contexte inflationniste que nous connaissons, pouvoir bénéficier d'un subside de 720 francs supplémentaires pour une famille de deux adultes et deux enfants n'a rien d'anecdotique. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite à soutenir ce projet de loi.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de première minorité. Le caractère social de ce projet de loi est très discutable. En réalité, c'est un arrosage tous azimuts pour compenser l'inflation. L'UDC est pour une aide sociale, mais pas pour un tel arrosage; selon nous, l'aide sociale doit avoir un équilibre entre les incitations à la réinsertion et l'aide accordée. L'aide sociale doit être juste et équitable entre ceux qui la touchent et ceux qui la paient. Cet arrosage est inacceptable, d'autant qu'il est couplé à toute une série d'augmentations de prestations dont le coût est d'environ 70 millions.
Genève est le canton qui dépense le plus pour l'aide sociale; il est en outre le canton où les coûts augmentent le plus année après année. Genève est aussi le canton qui a le plus de personnes à l'aide sociale. Le taux d'aide sociale, au sens large, est de 14,6% de notre population, soit 74 000 Genevoises et Genevois. Je répète: 74 000 Genevoises et Genevois. Ces dix dernières années, le nombre de personnes à l'aide sociale a explosé de 67%. Si la situation est dramatique à Genève, ce n'est pas le cas en Suisse: dans le pays, en 2022, ce nombre a même baissé de 0,2%. A Genève, l'aide sociale est un échec total: il n'est plus question de département de cohésion sociale, mais de bureau d'arrosage de prestations sociales. Il faut une aide sociale, dont le principe n'est discuté par personne, mais un tel arrosage, sans équité, sans aucun rapport avec ceux qui travaillent, fait que ce bureau d'arrosage de prestations sociales est devenu une fabrique de dépendance, et surtout une fabrique de pauvres.
Il faut rappeler quelques faits. A Genève, il y a 320 000 postes de travail; si on tient compte des 100 000 frontaliers, des 35 000 Suisses habitant en France et des 40 000 pendulaires suisses, il faut relever que seulement 45% ou 50% des travailleurs de Genève habitent à Genève. Cette situation constitue un déséquilibre dramatique. En plus, 75% des habitants à Genève vivent avec l'aide sociale, au sens large je précise, cela en rapport avec les 150 000 travailleurs à Genève qui habitent à Genève. Cela aussi représente un déséquilibre absolument inacceptable.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. André Pfeffer. Merci. 74 000 personnes habitant à Genève et vivant avec l'aide sociale, et seulement 140 000 personnes travaillant et habitant à Genève: voilà une situation que vous n'avez certainement nulle part ailleurs. Le constat est dramatique. En plus, tous les chiffres, toutes les tendances que j'ai données vont plutôt dans le mauvais sens. Bref !
Pour limiter l'arrosage, l'UDC vous propose d'offrir ces prestations uniquement et exclusivement aux groupes 1 à 4. Ces groupes correspondent à des revenus allant jusqu'à 48 000 francs par année pour les personnes seules. Je propose de limiter cet arrosage tous azimuts et d'accorder cette prestation exclusivement aux groupes 1 à 4. Si ce parlement accepte cet amendement, alors le groupe UDC acceptera ce projet de loi. Merci de votre attention.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de deuxième minorité. Chers collègues, le rapporteur de majorité l'a dit, ce projet de loi s'inscrit dans un paquet de mesures prises par le Conseil d'Etat d'une valeur totale de 60 millions de francs - il a été présenté en novembre dernier. Concernant trois des quatre mesures proposées, il n'est pas nécessaire de passer par le parlement. Voici donc la seule mesure qui exige un changement législatif relatif aux subsides d'assurance-maladie; c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat a déposé ce texte. Je vous rappelle que le montant des aides impliquées dans ce projet de loi est de 26 millions de francs.
Comme le rapporteur de majorité, M. Bonny, l'a dit, l'argument principal est la réduction des primes individuelles par une hausse de subsides pour soulager la classe moyenne de l'inflation. Le député Bonny a même parlé de la classe moyenne inférieure. L'objectif sur lequel, je pense, on s'accorde tous est plus qu'honorable: il faut soulager cette classe moyenne inférieure qui ne bénéficie habituellement pas de subsides et se trouve dans la difficulté.
Le problème de ce texte, selon nous, c'est la méthode choisie, qui ne soulagera pas les gens: ce projet ne va aider ni les personnes très précaires ni la classe moyenne initialement visée dans le texte. Personne ne pourra vraiment en bénéficier, voilà le problème. Pourquoi ? Parce que les sommes sont trop petites; elles sont distribuées à tout le monde, à toutes les catégories de barèmes de subsides. Or en donnant à tout le monde, on ne soulage personne: on attribue 20 francs mensuels aux groupes 1 à 6 et 10 francs aux groupes 7 à 8; on ne cible pas vraiment les bénéficiaires, ni les personnes en situation précaire, ni la classe moyenne qui a besoin d'un coup de pouce. Le PLR se demande si le choix de cibler une catégorie de bénéficiaires plutôt que de couvrir huit groupes avec des montants de 10 francs ou de 20 francs n'aurait pas été bénéfique à plus de personnes. En prenant des petites mesures pour tout le monde, on finit par n'aider personne. Voilà où se situe le problème, à notre sens.
Par ailleurs, j'aimerais souligner que le Conseil d'Etat avait assuré à la commission, comme pour la convaincre, que la loi peut être mise en oeuvre très rapidement, sans une adaptation complexe du point de vue administratif ou informatique: un système automatisé permet la facilitation des subsides assez rapidement. Je vous ferai remarquer qu'une loi n'est pas adoptée pour faciliter la tâche administrative du Conseil d'Etat. Il faut en premier lieu s'assurer que les personnes qui en ont vraiment besoin puissent accéder à l'aide. Tel est l'argument principal. Soulager les personnes les plus précaires, oui ! Soulager la classe moyenne qui ne reçoit actuellement pas de subsides, oui ! Mais malheureusement, ce projet de loi manque l'un de ces deux objectifs. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'avoue qu'entendre parler d'arrosage m'étonne un petit peu. Si c'est de ça qu'il s'agit, je vous conseille de souffler dans la pomme d'arrosoir, car un certain nombre de ses trous sont bouchés. Très sincèrement, pour parler d'arrosage quand il s'agit d'une augmentation de 20%, c'est-à-dire de la compensation de 4,7% en moyenne d'augmentation des primes d'assurance-maladie, il faut quand même être un peu à côté de la question. Si on n'adapte pas les prestations sociales à l'augmentation du coût de la vie, cela veut dire qu'on ne donnera plus aux gens les moyens de faire face à ces besoins et de couvrir ces charges. Il s'agit d'une adaptation.
Je corrigerai deux ou trois éléments, parce que je ne peux pas entendre certains propos. Vous dites que 75% de la population vit de l'aide sociale. Attendez ! Regardez les statistiques de l'OCSTAT: 14,6% de la population bénéficie des prestations, au sens large, donc toute prestation sociale confondue de type RDU, soit 73 841 personnes. Et puis, dire que les aides sociales fabriquent de la dépendance... Excusez-moi, mais un certain nombre de ces dispositifs visent précisément, autant que faire se peut, à ce que les gens retrouvent une autonomie et n'aient plus à bénéficier des aides sociales.
Quant à celles qui ne sont pas destinées à cela et servent à compenser la difficulté à affronter un certain nombre de charges, eh bien excusez-moi, mais la responsabilité n'est pas à chercher auprès des dispositifs d'aide sociale ou des personnes. Si on parle de ce qui nous occupe ce soir, à savoir une adaptation du système des subsides d'assurance-maladie à l'augmentation des primes, excusez-moi, mais il faut dire que la fabrique de la dépendance est due à cette augmentation constante ! Si vous craignez que les gens perçoivent trop d'allocations logement, abordez la question du montant des loyers dans notre canton, ne dites pas que la faute incombe aux dispositifs qui viennent corriger cette distorsion ou aux bénéficiaires de ces prestations. Prenez le problème à sa racine ! Revenez-en aux causes et luttez contre elles ! En l'occurrence, le dispositif prévu par le projet de loi qui nous est soumis vise simplement à donner aux bénéficiaires d'un subside d'assurance-maladie la possibilité de faire face à l'augmentation de leur prime.
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Faute de quoi, vous remettriez en question ce que nous avons voté au moment où nous avons modifié la loi sur les subsides d'assurance-maladie.
Le président. C'est terminé, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Par conséquent, je vous invite à soutenir ce projet de loi sans aucun amendement. Je vous remercie de votre attention.
Mme Badia Luthi (S). J'aimerais remercier ma préopinante d'avoir corrigé certaines imprécisions qu'on a voulu faire passer.
Cela fait des décennies que les primes des assurances-maladie augmentent d'une manière systématique chaque année. En 2021, les augmentations ont été de l'ordre de 4,5%; il s'agit de la plus forte hausse qu'a connue le canton depuis 2013. En 2022, la hausse était de l'ordre de 2,6%, alors qu'en 2023 elle a battu les records pour atteindre 6,6% pour certaines assurances.
De plus, nos concitoyennes et concitoyens paient les primes les plus chères de notre pays, plus particulièrement les jeunes de 19 à 25 ans. Cette tranche de population représente la cible la plus recherchée, car elle est considérée comme étant généralement en très bonne santé, donc la moins coûteuse pour le système.
Les primes d'assurance-maladie sont le reflet des coûts de la santé, qui ne cessent de flamber. Les charges augmentent, le coût de la vie aussi, mais en face, les salaires n'augmentent pas, ils stagnent ou connaissent une très faible augmentation qui ne répond pas à la réalité du coût de la vie. Il est donc évident que les salaires ne suivent plus l'inflation, et cela pose beaucoup de problèmes pour les familles à revenus modestes. En effet, les travailleuses et les travailleurs à bas et moyens revenus n'arrivent plus à suivre économiquement pour assumer les charges obligatoires. La population a subi, et continue à subir, une perte assez conséquente de son pouvoir d'achat.
Comme je l'ai déjà dit, les primes des assurances-maladie représentent une part très importante des dépenses des ménages genevois; la détresse financière des familles à revenus modestes mérite un regard attentif pour trouver une solution soulageant leur porte-monnaie. C'est le combat que le parti socialiste mène sans cesse, avec l'ambition que l'Etat reprenne le contrôle des coûts de la santé.
Le parti socialiste salue les mesures proposées par le département en vue d'augmenter les subsides d'assurance-maladie pour l'année 2023. Nous remercions également le Conseil d'Etat pour toutes les mesures qu'il a prises afin de limiter les impacts de l'inflation sur les classes précaires, voire la classe moyenne. Pour toutes ces raisons, le parti socialiste votera ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Mme Véronique Kämpfen (PLR). Cela a été dit, ce projet de loi s'inscrit dans un paquet d'aides lié au renchérissement, d'un montant total de 66 millions. De ces 66 millions de francs, seule l'augmentation des subsides d'assurance-maladie est soumise à l'appréciation du parlement; les autres aides ont été décrétées directement par le Conseil d'Etat.
L'augmentation prévue, entre 10 et 20 francs par mois pour les bénéficiaires de ces subsides d'assurance-maladie, ne représente pas grand-chose, c'est vrai, on peut le regretter. Cependant, avec 137 000 personnes subventionnées, la facture s'élève au total à 26 millions. La rapporteure de deuxième minorité l'a dit, le groupe PLR regrette que cette manne ne soit pas utilisée à meilleur escient: au lieu de donner la même somme à quasiment toutes les classes de revenus, il eût été préférable d'augmenter de manière plus substantielle les subsides pour les classes de revenus les plus faibles.
Il est à noter aussi que ce texte ne prévoit cette augmentation que de manière temporaire, soit pour l'année 2023, ce qui est étonnant. Je n'imagine pas une minute que le département revienne dans une année pour annoncer une diminution des subsides par rapport aux sommes qui nous sont proposées ce soir.
J'ajouterai un mot sur l'inflation, qui est la raison invoquée pour l'augmentation des subsides. Elle s'est établie à 2,8% à Genève et en Suisse à fin décembre. La moyenne de l'inflation depuis les années 1960 jusqu'à aujourd'hui est de 2,4% par année. Avec un taux de 2,8%, il ne s'agit pas d'une inflation extraordinaire; ce n'est certes pas une inflation agréable, mais elle n'est pas extraordinaire. Il faut aussi relever que l'augmentation moyenne des salaires s'est établie à 2,2% pour 2022, venant ainsi compenser en grande partie cette inflation. Il est juste que les employeurs ne compensent pas totalement l'inflation sur une année, puisque celle-ci est par essence fluctuante alors que les salaires ne le sont pas. Il faut éviter de prendre des mesures pérennes pour corriger des effets conjoncturels. Pour 2023, d'ailleurs, les prévisions conjoncturelles sont meilleures qu'en 2022.
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe PLR vous propose de refuser ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Je serai rapide, puisque beaucoup des arguments que j'avais préparés ont été avancés. Je tiens à relever que ce texte est le seul chemin pour libérer les fonds nécessaires à une aide financière supplémentaire dans le cadre des subsides d'assurance-maladie. Ce projet de loi vise à absorber l'augmentation des primes, avec une moyenne de 20 francs par mois, selon le schéma qui nous a été décrit.
Le PDC-Le Centre tient à relever que la lutte contre la hausse des primes d'assurance-maladie ne doit pas se faire au sein de ce parlement, mais devrait être énergiquement menée à Berne. Le PDC acceptera ce projet de loi sans aucun amendement. Je vous remercie.
Mme Ana Roch (MCG). Notre groupe acceptera ce projet de loi pour les raisons qui ont été expliquées jusqu'ici. Je ne qualifierai pas cette mesure d'arrosage. Je pense que chaque aide qui peut être amenée pour payer nos primes d'assurance-maladie... Nous sommes toutes et tous pris à la gorge avec l'augmentation de ces assurances. Peu importe le montant qui peut être donné, ce sera de toute façon un petit soulagement. C'est pourquoi nous aussi, nous soutiendrons cet objet. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Bertrand Buchs pour deux minutes.
M. Bertrand Buchs (PDC). Ce sera très court, Monsieur le président, je vous remercie. Chers collègues, il faut remarquer que, parmi ces aides de 60 millions proposées et appliquées par le Conseil d'Etat, une grande partie vient des privés, puisque ces aides sont notamment des allocations familiales: même si le fonds de compensation a beaucoup d'argent et qu'il peut le mettre à disposition, les deux tiers des aides proviennent de l'économie privée. Il faut quand même le dire: une aide importante est apportée par l'économie privée. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole au rapporteur de majorité. (Remarque.) Auparavant, M. Pfeffer, rapporteur de minorité, a demandé à intervenir. Je lui cède la parole pour une minute quarante.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de première minorité. Merci beaucoup. J'aimerais quand même préciser une chose. Je le répète, le taux d'aide au sens large est de 14,6% de la population, soit 74 000 Genevois. Ce point a aussi été relevé hier par M. Wenger; s'il y a une confusion au sujet de ce chiffre, je propose aux membres de la gauche de voir avec leurs collègues. Un tel déséquilibre, je regrette, n'existe dans aucun autre canton suisse et montre quand même l'échec de notre politique sociale.
Un deuxième déséquilibre est très inquiétant: une moitié, ou même un tout petit peu plus, des gens qui travaillent à Genève habitent ailleurs. Je répète encore une fois ces chiffres: Genève compte environ 320 000 postes de travail; si nous prenons les 100 000 frontaliers, auxquels nous ajoutons les 30 ou 35 000 Suisses qui habitent en France voisine et les pendulaires du canton de Vaud, on arrive à une moitié, voire plus, de gens qui travaillent à Genève sans y habiter.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. André Pfeffer. Où existe-t-il un autre exemple d'un tel déséquilibre ? Je vous pose cette question. Maintenant, j'aimerais quand même revenir...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député, vous n'avez plus de temps de parole.
M. André Pfeffer. Il reste encore quelques secondes. (Rires.)
Le président. C'est fini. Je passe la parole à Mme Joëlle Fiss pour vingt secondes.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. C'est un objectif honorable de soulager des personnes précaires ou la classe moyenne. Oui ! Mais ce projet de loi donne de petites sommes à tout le monde et finit par n'aider personne. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur le rapporteur de majorité, il vous reste une minute trente.
M. Didier Bonny (Ve), rapporteur de majorité. Plus !
Le président. Deux minutes quatorze, pardon.
M. Didier Bonny. Ah ! Ça fait toute la différence. Merci, Monsieur le président. Je reviens sur deux ou trois éléments évoqués au cours de ce débat, peut-être en reprenant le dernier qui a été relevé par Mme Fiss. Peut-être que pour certaines personnes, certaines familles, 720 francs de plus n'ont aucune importance, mais je crois que pour la plupart des familles, bénéficier de 720 francs supplémentaires de subsides d'assurance-maladie sur un an est plutôt quelque chose d'intéressant.
Ensuite, je répondrai à Mme Kämpfen - ça tombe bien, elle est juste en face de moi -, qui a tenu un discours sur l'inflation. On parle de l'augmentation des assurances-maladie, et on sait très bien qu'elles ne sont pas comprises dans l'inflation. Ce sont deux choses totalement différentes dont on parle.
Je voudrais également répondre à M. Pfeffer. Le débat, qui va se terminer à présent, ne porte pas sur l'aide sociale - on sait qu'il adore parler de cela -, mais sur l'augmentation des subsides d'assurance-maladie. Et les assurances-maladie, Monsieur Pfeffer - vous transmettrez, Monsieur le président -, on les paie toutes et tous; il n'est pas question de personnes qui sont ou non à l'aide sociale, le sujet concerne tout le monde !
Les subsides d'assurance-maladie, comme je l'ai dit précédemment, ont déjà différents paliers, qu'il s'agit d'indexer pour les garder tels qu'ils étaient auparavant. Si vous souhaitez les changer, il faut déposer des textes; il est ici simplement question d'une mise à niveau, non par rapport à l'inflation, je le répète, mais par rapport à l'augmentation moyenne des primes d'assurance-maladie à Genève ! Pour celles et ceux qui s'apprêtent à refuser cette augmentation, je pense que le peuple saura s'en souvenir le moment venu, soit pas plus tard que le 2 avril. Merci. (Commentaires.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, au-delà des questions purement électorales, je pense qu'on a le devoir de formuler l'interrogation suivante: comment pouvons-nous soutenir celles et ceux pour qui les fins de mois sont particulièrement difficiles, notamment celles et ceux qui commencent à compter déjà à partir du 10 ou du 15 de chaque mois? Le Conseil d'Etat a pris un train de mesures en novembre dernier, on l'a rappelé et je ne vais pas y revenir; j'ai toutefois le devoir de rappeler quelques éléments en réponse à ce que j'ai entendu dans ce débat.
Quand, Monsieur le député Pfeffer, vous confondez l'aide sociale avec les subsides d'assurance-maladie, alors que vous siégez depuis quatre ans à la commission des affaires sociales, permettez-moi de m'inquiéter. En imaginant que les subsides d'assurance-maladie sont un moyen d'aide sociale au sens strict, vous les confondez et cela ne va pas. Ce d'autant que dans l'aide sociale que vous confondez sont comprises toutes les prestations complémentaires, toutes les aides financières accordées aux personnes à l'assurance-invalidité. Vous dites à ces personnes-là qu'elles sont à l'aide sociale, c'est faux ! Elles sont indépendantes, mais ont un revenu insuffisant, pour les retraites par exemple, que le canton a le plaisir, l'honneur de compléter afin qu'elles vivent dignement à Genève au vu de la cherté que nous y connaissons.
L'autre élément sur lequel j'aimerais revenir, c'est le mot d'arrosage que vous appliquez à ce projet de loi. Vous oubliez, Mesdames et Messieurs les députés qui avez dit cela, que si nous avons mis en oeuvre en 2020 une réforme complète des subsides d'assurance-maladie, c'est parce que nous avons obtenu un accord entre le Conseil d'Etat et le parlement s'agissant d'une révision fiscale dite RFFA; et que vous avez vous-mêmes voté la réforme. On ne peut donc pas qualifier ces subsides d'arrosage, puisque nous avons convenu de la cible que nous voulions atteindre: le gouvernement a été clair, le département tout autant, sur le fait que nous souhaitions cibler un peu plus la classe moyenne, notamment inférieure, soit celles et ceux qui gagnent juste trop pour obtenir une aide régulière, mais pas assez pour vivre dignement dans notre canton. Il est regrettable que vous disiez qu'il s'agit d'un arrosage massif, car vous omettez l'accord obtenu et le vote favorable de la RFFA et de son pendant pour les subsides d'assurance-maladie.
Troisièmement, quant à la compensation d'assurance-maladie pour 2023 seulement, il faut se rappeler que chaque franc reçu par une personne est immédiatement réinjecté dans le circuit économique. Ces personnes n'ont en effet pas la possibilité d'épargner et utilisent chaque franc disponible pour vivre à Genève. Or ce retour à l'économie est aussi important, notamment pour celles et ceux qui ont besoin d'un plus grand soutien à une économie la plus locale possible.
Encore un mot à propos de la démonstration relative aux places de travail. Oui, il y a environ 320 000 places de travail à Genève, mais je trouve la démonstration incomplète: il manque, Monsieur le député, le nombre de personnes actives dans le canton et capables de remplir ces places de travail, soit 238 000. 100 000 places environ ne seraient par conséquent pas pourvues si nous devions nous arrêter au seul chiffre que je viens d'articuler.
Je réagis à présent à l'intervention de Mme Fiss. Comme il s'inscrit dans une loi déjà existante, le projet de loi permet des économies d'échelle en matière administrative: cela nous permet par exemple d'éviter de reconstruire un processus administratif et financier, et d'utiliser des outils connus et reconnus. En ce sens, je pense qu'on a le devoir - auquel je vous sais particulièrement sensible - d'utiliser les deniers publics pour la prestation plutôt que pour le back-office; nous avons utilisé les subsides d'assurance-maladie en ce sens et en fonction de cette volonté.
J'ajouterai un mot à propos des personnes précaires que vous avez mentionnées à plusieurs reprises: les primes moyennes des personnes dans la précarité sont assumées par le canton, la couverture est donc assurée au maximum. Je prends l'exemple d'un couple avec deux enfants, au salaire minimum, avec un revenu brut de 106 000 francs. Grâce à ce projet de loi, cette famille, qui fait partie du groupe 5, bénéficierait ainsi en 2023 d'une augmentation des subsides de 100 francs par mois, à savoir 20 francs pour les adultes, 10 francs pour les enfants. Un couple avec deux enfants qui touche un revenu brut de 140 000 francs bénéficierait lui aussi d'une augmentation de 10 francs par adulte et par enfant. On peut effectivement considérer les efforts comme ciblés; la prime est individuelle, il n'y a pas d'arrosage. Le subside est calculé en fonction de la cible d'une part et des conditions de ressources de l'autre. Le gouvernement vous propose de ne pas voter l'amendement et de suivre le vote favorable de la commission.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13209 est adopté en premier débat par 88 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. A l'article 51, nous sommes saisis d'un amendement présenté par le rapporteur de première minorité:
«Art. 51, al. 9 (nouvelle teneur)
9 En dérogation à l'article 22, alinéa 1, le montant des subsides pour l'année 2023 est de:
- Groupe 1: 320 francs par mois;
- Groupe 2: 270 francs par mois;
- Groupe 3: 220 francs par mois;
- Groupe 4: 180 francs par mois.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 31 oui.
Mis aux voix, l'art. 51, al. 9 à 11 (nouveaux), est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13209 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 28 non (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, le PL 13011-A, classé en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Hiltpold, qui remplace M. Béné.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Juste une petite information aux membres de ce plénum: ce projet de loi a été travaillé en parallèle du PL 13010 concernant les équipements, et il y avait pas mal de discussions en lien avec cette éducation «au» numérique et non «par» le numérique. Au vu des enjeux autour de ce projet de loi, le rapporteur de majorité que je représente ici souscrit à la demande du Conseil d'Etat de renvoyer ce projet de loi à la commission des travaux pour différents compléments. J'ai terminé.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Sur le renvoi, Madame Gavilanes ?
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Nous acceptons ce renvoi en commission.
Le président. Merci. Monsieur Blondin, rapporteur de seconde minorité ?
M. Jacques Blondin (PDC), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Nous acceptons également ce renvoi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce que le Conseil d'Etat souhaite s'exprimer aussi ? (Remarque.) Non, très bien. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13011 à la commission des travaux est adopté par 83 oui et 1 abstention.
Débat
Le président. Nous passons à notre prochaine urgence, le RD 1502, classé en catégorie II, trente minutes. La parole est à M. Pierre Nicollier.
M. Pierre Nicollier (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous souhaiterions étudier ce rapport en commission. Je demande donc un renvoi à la commission de l'enseignement, s'il vous plaît.
Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce que le Conseil d'Etat souhaite s'exprimer ? (Remarque.) Le Conseil d'Etat formule la même demande, que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 1502 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 85 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Notre prochaine urgence est le RD 1474-A, traité conjointement avec la R 1011. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes, et je passe la parole à la rapporteure de majorité, Mme Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des transports a traité du rapport divers sur le plan d'actions du stationnement 2020-2025 durant trois séances, entre octobre et décembre 2022. Le département est venu présenter ce plan d'actions: selon cette présentation, il s'agit d'un plan ambitieux et tourné vers des objectifs d'avenir. En effet, le stationnement est l'un des axes les plus importants pour réguler le trafic individuel motorisé, en lien avec l'un des objectifs principaux du plan climat cantonal, soit diminuer de 40% le trafic individuel motorisé d'ici à 2030. Selon le département, page 16 du rapport, «le stationnement est un outil majeur. Pour cette raison, il faut absolument agir et combattre les 100 000 places à destination des collaborateurs [et des collaboratrices] des entreprises. L'Etat a agi dans ses parkings, encourage les communes et de nombreux parkings à faire de même, et travaille maintenant sur la sensibilisation [des entreprises]».
Concernant le RPSFP (le règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés), l'objectif est de juguler l'utilisation de la voiture et non d'empêcher les gens de posséder un véhicule. Le département des infrastructures a besoin aussi d'autres outils, comme la loi de la compensation, qui a été assouplie, ou des exceptions à la LMCE qui permettent de réduire l'incitation à utiliser sa voiture.
En bref, durant cette séance de présentation, le département a expliqué que la politique du stationnement est l'un des piliers de la politique de la mobilité du canton, élaborée en coordination avec les autres politiques, comme les transports individuels, les transports collectifs, la mobilité douce et les transports de marchandises.
Ce plan comporte trois grands axes thématiques et treize actions. Un débat et des discussions ont eu lieu, avec de nombreuses questions sur ce nouveau règlement de stationnement sur fonds privés - dont l'un des principes est que la demande de stationnement privé doit trouver une solution sur le domaine privé et ne pas être reportée sur le domaine public; sur les incitations aux promoteurs et investisseurs à réduire le nombre de places de stationnement; sur les périmètres du zonage; sur la motorisation électrique; sur le principe de mutualisation et sa généralisation à tous les types de parkings, publics et privés.
Dans le cadre de la deuxième action phare, il y a également eu de nombreuses questions sur la tarification du stationnement; sur le macaron habitant genevois (parmi les moins chers de Suisse); sur les tarifs des macarons pour les entreprises et sur les mesures d'incitation et les labels; sur l'offre de P+R; sur le stationnement des vélos, des deux-roues motorisés, des trottinettes, des vélos-cargos, et sur la thématique du stationnement pour les PMR (les personnes à mobilité réduite) - à noter que l'action 13 consiste justement à agir sur le stationnement pour celles-ci. Je ne vais pas vous la lire, puisque j'arrive bientôt à la fin de mon temps et que j'aimerais aussi en laisser à mon collègue.
La majorité de la commission des transports vous invite à approuver ce plan d'actions du stationnement en prenant acte de ce rapport divers et en votant bien évidemment la résolution qui l'accompagne.
Petite remarque conclusive quand même: ce plan d'actions est ambitieux et cohérent face à l'urgence climatique; il est transversal et touche à différentes politiques publiques, comme je l'ai mentionné, il s'articule autour des objectifs principaux du plan climat cantonal. A ce titre, il est quand même pertinent de relever que la résolution votée en commission a été amputée de son deuxième considérant, qui justement faisait le lien entre les objectifs du plan climat cantonal et l'amélioration du stationnement des habitantes et des habitants, ainsi que la maîtrise du stationnement des pendulaires.
Au nom de la majorité, je vous remercie de prendre acte de ce rapport divers et de voter la résolution. Merci.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. La minorité de la commission refusera le projet de résolution, car il y a une réduction drastique des places de stationnement public dans les communes, spécialement en Ville de Genève, sans compensations. Il y a quelque temps, nous avons eu une présentation dans le cadre de la Ville de Genève entre autres du plan de stationnement et de toute la stratégie du développement durable sur le territoire de la Ville, qui contenait des mesures illégales et qui violent la LMCE.
Il est évident que ce rapport et la résolution qui l'accompagne manquent la cible en faveur des entreprises. Il convient de noter que les possibilités de stationnement en places jaunes diminuent. La situation ne s'améliore donc pas pour les entreprises de notre canton. J'ai vu à plusieurs reprises qu'un certain nombre de places jaunes sont retirées, ce qui péjore le commerce et les entreprises, qui doivent essayer de se déplacer tant bien que mal dans cette ville de Genève dans laquelle le stationnement est de plus en plus difficile. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission des transports refusera le rapport et la résolution. Merci.
M. Stéphane Florey (UDC). Cette manière de faire du Conseil d'Etat, avec ces rapports sur les plans d'actions - là, on parle du plan d'actions du stationnement, mais des plans directeurs, on en a à foison - devient totalement insupportable. Elle devrait même être déclarée illégale, puisque c'est le pire objet antidémocratique qu'on puisse traiter dans ce parlement. La population, une fois que ce plan d'actions sera adopté, n'aura absolument plus rien à dire. Et après, on subira, année après année, des projets de lois, des motions, des résolutions, et le seul mot qu'aura à la bouche le conseiller d'Etat - enfin, le futur conseiller d'Etat, puisque l'actuel nous quittera bientôt - chargé de ce département, c'est: «Oui, oui, mais ne vous inquiétez pas: c'est conforme au plan d'actions du stationnement !» Et, à partir de là, la majorité qu'on a aujourd'hui dira: «Ah, c'est conforme ? Alors allons-y gaiement !» Et on votera... Enfin, vous voterez - parce que nous, certainement pas - la tête dans le sac, puisque le seul mot d'ordre aura été: «C'est conforme au plan de X.» Ça, on le retrouve dans tous les domaines: dans le plan directeur cantonal d'aménagement, chaque fois qu'on nous propose un déclassement, on nous dit: «C'est conforme !» Et on retrouve des majorités qui votent, à nouveau, la tête dans le sac. Mobilité douce: «C'est conforme !» On vote des millions et des millions, et le seul mot d'ordre: «Non, non, mais c'est conforme.» Et là, de nouveau, on vote la tête dans le sac.
Encore une fois, cette manière de faire devient insupportable. Elle est totalement antidémocratique. C'est pour cela que l'UDC vous recommande de refuser ce plan d'actions et d'inviter le Conseil d'Etat à trouver d'autres solutions un peu plus démocratiques pour faire adopter ses plans directeurs. Ne serait-ce qu'un exemple: on pourrait imaginer que ces plans directeurs et ces plans d'actions fassent l'objet d'une loi spécifique, avec la possibilité qu'offre la législation, à savoir que ces plans devraient figurer en annexe. Et chaque fois que vous modifiez l'annexe, vous modifiez la loi et vous laissez au moins à la population la possibilité de se déterminer via un référendum, si celle-ci l'estime nécessaire. Voilà. Donc refusez ce rapport divers ainsi que la résolution ! Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, je vais abonder dans le sens de la rapporteure de majorité, en rappelant les objectifs inscrits dans le plan climat cantonal renforcé, deuxième génération, qui prévoit d'ici 2030 - et 2030, en termes politiques et sociaux, c'est littéralement demain - 60% de diminution des émissions de gaz à effet de serre: traduit dans la politique de la mobilité - une politique qui engendre une part importante des gaz à effet de serre, avec un impact sur le climat non négligeable -, c'est une diminution de 40% des déplacements en transports individuels motorisés. Ce sont des plans et un certain nombre d'objectifs qui nous permettent de répondre aux engagements qui ont été pris non seulement par notre canton, mais aussi par la Confédération, vis-à-vis de l'international, je pense en particulier aux accords de Paris.
Pour nous permettre d'assumer nos responsabilités et de répondre aux objectifs que nous nous sommes donnés, il faut, dans toute une série de domaines, et en l'occurrence dans le domaine de la mobilité, un changement de cap qui soit radical, une petite révolution dans notre manière de nous déplacer, de sorte à pouvoir entamer cette transition vers une mobilité résolument et véritablement plus durable.
Dans ce cadre-là, bien entendu, la question du stationnement - et la rapporteure de majorité l'a rappelé tout à l'heure - est incontestablement un levier, et un levier puissant, permettant d'opérer cette transformation profonde de nos moyens de déplacement. D'abord, parce que la disponibilité du stationnement favorise la mutualisation des véhicules, ce qui a bien sûr un impact positif sur le nombre de déplacements en transports individuels motorisés et permet une économie de l'énergie grise liée à ces véhicules. Et puis cela favorise également le transfert modal en encourageant à renoncer à des déplacements en transports individuels motorisés pour se diriger vers d'autres modes de transport beaucoup plus durables.
Et puis, c'est important de le rappeler également, la réduction du stationnement permet aussi d'améliorer considérablement la qualité de vie dans les quartiers urbains, notamment en luttant contre les îlots de chaleur: une voiture stationnée capte la chaleur et la diffuse dans le quartier, alors que, si on supprime ces places de stationnement pour les remplacer, par exemple, par des espaces arborés ou végétalisés, cela permet d'avoir un urbanisme qui soit plus durable, contribuant à améliorer la qualité de vie dans les centres-villes.
Pour terminer, j'allais dire que la population est prête pour cette révolution des transports, mais en réalité, ce n'est pas qu'elle est prête: elle l'a déjà amorcée, et ce depuis bien longtemps. On le voit, parce qu'il y a une baisse considérable du nombre de ménages possédant une voiture. La part modale des transports individuels motorisés se réduit année après année. Quand on construit de nouveaux bâtiments, on crée des stationnements en surnombre qui restent vides. Tout ça pour vous dire que la population genevoise a fait son choix, a opéré cette modification de ses habitudes de transport, et je vous enjoins de ne pas mener aujourd'hui des combats d'arrière-garde, mais plutôt d'accompagner ce changement solide qui a été choisi par la population, de prendre acte de ce rapport divers et donc de ce plan d'actions du stationnement et d'accepter la résolution de la majorité de la commission des transports pour le valider ainsi. Je vous remercie.
M. Francisco Valentin (MCG). Le groupe MCG fait partie de la minorité, bien que nous n'ayons pas déposé de rapport, et s'oppose totalement à ces plans qui sont toujours pétris de bonnes intentions: on va sauver la planète, on va sauver le citoyen, on va sauver, on va sauver, on va sauver ! Techniquement, on ne voit absolument rien, si ce n'est qu'on commence à pratiquer de plus en plus la politique à la française: l'administration décide, le citoyen se tait et paie. Si c'est comme ça que vous voyez la démocratie, ce n'est pas encore ce qui prime à Genève, et j'espère pour encore très longtemps.
Ce genre de plans de stationnement, de diminution du trafic et de la vitesse, sans aucune compensation, comme cela a été dit à plusieurs reprises, me fait penser à une certaine interprétation de la LMCE - dans certains domaines, si on interprète d'une certaine façon des livres religieux, on appelle ça des terroristes; ici, je ne sais pas comment il faut le prendre, parce que c'est vrai que ça devient vraiment le citoyen payeur, enfin, le citoyen automobiliste n'ayant pas forcément le choix ou les personnes à mobilité réduite ayant besoin de leur véhicule qui sont pris en otage par quelques ayatollahs qui ont décidé que le simple fait d'enlever les places de parc, de diminuer la vitesse - surtout des Genevois -, allait sauver le monde.
Maintenant, la pollution importée - et je ne parle pas de Colmar, je parle simplement de la région frontalière du Grand Genève - ne dérange personne, mais la pollution des Genevois leur paraît insupportable. (Commentaires.) Plus de 100 000 véhicules par jour qui entrent et qui ressortent: j'ai cru que le CEVA devait supprimer ça, visiblement ce n'est pas le cas; la seule chose qui supprime les voitures à Genève et qui permet d'avoir des places de parc un peu partout, c'est les grandes vacances: ils sont tous dans le Sud de la France ! Je vous remercie.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, aujourd'hui, en 2023, en matière de mobilité, on en est à regretter la politique qui était menée par Christian Ferrazino en Ville de Genève dans les années 2000; on en est à regretter la politique qui avait été menée à la fin des années 2000 et au début de la décennie précédente par Mme Michèle Künzler. Vous m'aurez compris, aujourd'hui, Genève subit une politique de l'immobilité, qui est bien plus restrictive que ce que nous avons connu par le passé et qui n'a cessé d'agiter les débats politiques cantonaux.
On est probablement l'un des seuls cantons de Suisse où on parle véritablement d'une guerre politique des transports, parce que nous avons des façons très très différentes de concevoir la mobilité. J'entends très volontiers le discours de Mme Marti, qui consiste à regarder la politique du stationnement et de la mobilité à travers le prisme de la politique climatique. Mais la question de la mobilité n'a pas à être réduite à un simple paramètre de la politique climatique. La mobilité, cela va bien plus loin. La politique de la mobilité, c'est de permettre à tout un chacun de se déplacer en fonction de ses besoins. Et vous m'avez souvent entendu ici invoquer le principe du libre choix du mode de transport et celui de complémentarité des modes de transport; ces principes n'ont pas une vocation déclamatoire ou décorative dans notre charte fondamentale. Ce n'est rien d'autre que du bon sens ! Il y a des gens qui n'ont pas d'autre choix que de prendre la voiture pour se déplacer: il y a les entreprises, il y a les petites et moyennes entreprises, il y a les microentreprises, les livreurs qui doivent impérativement se déplacer en voiture.
Je ne comprends pas cette haine de l'automobiliste et de la voiture à une époque où, justement, les nouvelles technologies nous permettent d'espérer une mobilité moins consommatrice d'énergie, moins consommatrice de carburant, moins consommatrice de pétrole. Moi, ce que j'aimerais, c'est une politique de la mobilité qui soit véritablement libérale et incitative, où finalement on crée des voies de circulation réservées à certains types de véhicules, et non pas qu'on punisse l'ensemble des automobilistes et celles et ceux qui se déplacent avec des moyens de transport motorisés privés.
Tout le problème de ce rapport divers, c'est qu'il s'agit d'un instrument de plus au service de la politique menée par le Conseil d'Etat pour restreindre sans arrêt le libre choix du mode de transport, mais aussi la liberté personnelle dans ce qu'elle a de plus précieux, c'est-à-dire la liberté de mouvement. A ce titre, il y a probablement une explication, en réalité: la voiture, depuis toujours, c'est un formidable symbole du capitalisme. Et c'est probablement pour cette raison-là que la gauche peine à accepter le fait que les gens se déplacent en voiture dans notre canton ou ailleurs. Mais encore une fois, il y a des gens qui n'ont tout simplement pas le choix. Oui, le Léman Express est un succès, nous pouvons en être fiers ! Mais il ne suffit pas à répondre à la demande; les pistes cyclables ne suffisent pas à répondre à la demande. Il faut donc accepter le fait qu'on doit avoir un certain nombre de places de stationnement à la disposition de chacun, parce qu'une voiture qui circule dans le vide, qui ne trouve pas de place de stationnement, c'est une voiture qui fait tourner son moteur pour rien et qui pollue. C'est un non-sens absolu ! Plus vite la voiture est garée, moins elle va polluer. Pour l'ensemble de ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser ce plan d'actions qui n'en est pas un. Merci beaucoup de votre attention.
Une voix. Bravo !
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, pour couper le suspense, vous ne serez pas surpris d'apprendre que le PDC vous recommandera d'accepter cette résolution.
Une voix. Dans la joie et la bonne humeur !
M. Souheil Sayegh. Naturellement ! (Commentaires.) Ce plan de stationnement se veut ambitieux et courageux, tout comme la politique menée par le magistrat et le département durant cette législature. Nous avons cependant quelques réserves, et je vais me permettre de les énoncer un petit peu.
Je rejoins mon camarade PLR s'agissant de la liberté de se déplacer, à laquelle tout un chacun a droit, il est vrai, et s'agissant du respect de chacun et de chacune dans ses déplacements. Il se trouve que tout le monde ne peut pas se déplacer à pied, en transports en commun ou en train. Il existe des personnes à mobilité réduite, on l'a dit; il existe des personnes âgées, dont le temps de parcours sur 100 mètres n'égale de loin pas celui d'Usain Bolt ! Il existe également des familles qui, avec poussette, courses, caddie et enfants sur les bras, ne peuvent pas se parquer dans des ouvrages situés à plus de 500 ou 700 mètres de leur habitation; il existe aussi des entreprises qui ont besoin d'effectuer des livraisons, et j'en passe. Cela, le département en est conscient... (Remarque.) ...et tente de le mettre en application, plutôt dans le bon sens.
Nous sommes, et nous l'avons rappelé, pour enterrer un maximum de personnes sous terre. (Exclamations.) Je parle des véhicules ! (Commentaires.) Je parle des véhicules ! Je parle des...
Une voix. Et c'est un toubib qui dit ça ! (Rires.)
M. Souheil Sayegh. ...je parle des... (L'orateur rit.) ...je parle des véhicules, naturellement, et pas de leurs propriétaires ! Et nous sommes donc pour la réalisation d'un maximum d'ouvrages et pour y placer le maximum de véhicules. Ces ouvrages doivent être situés - je prie M. Romain de me pardonner - autour des «hubs» de déplacement. (Rires.) Je suis, et nous sommes, Le Centre, attachés à la réalisation de P+R autour des points d'entrée dans notre canton, autour des gares du CEVA et, je l'espère, du futur CEVA, quand il sera là. (Remarque. Rires. L'orateur rit.) Que dire de plus ? La mobilité a changé...
Une voix. Laisse tomber !
M. Souheil Sayegh. Ben non ! Je continue ! (Commentaires.) Même les deux-roues aujourd'hui prennent plus de place, on pense aux vélos-cargos. Bientôt, on aura peut-être des tandems ou des biplaces les uns à côté des autres. Les voies de circulation cyclables permettent aujourd'hui à deux vélos de circuler et de discuter l'un à côté de l'autre. (Commentaires.) Nous sommes pour la protection des deux-roues, pour la protection des cyclistes, pour rendre attentifs les usagers des trottinettes dans leurs déplacements, mais, pour en revenir au stationnement, il faut que la population puisse arriver près de son lieu de domicile et de son lieu de travail, par des moyens les plus écologiques, les plus économiques et les plus respectueux de l'environnement possible.
Nous sommes par contre opposés à la culpabilisation de la population dans son ensemble quant au plan climat. C'est pour cela que nous avons accepté l'amendement du PLR consistant à supprimer le deuxième considérant. Nous ne voyons pas pourquoi les familles, les personnes à mobilité réduite et les personnes âgées accepteraient que Paris décide finalement de leurs déplacements à Genève et de leur faire accomplir plus de 500 ou 700 mètres pour arriver à leur domicile.
Pour les raisons que j'ai énoncées, pour le projet ambitieux du département, nous vous recommandons, nous vous invitons, si vous le souhaitez, à accepter cette résolution. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à M. Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président.
Une voix. Ne déraille pas ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey. On va essayer ! Moi, je suis toujours impressionné quand j'entends dire: «Oui, mais la population a fait son choix, regardez, on a déjà diminué le nombre de véhicules en ville, etc.» Mais le choix de quoi ? De rien du tout ! Elle subit simplement un bon nombre d'obligations ! Puisque tout devient obligatoire: suppression de parkings, on interdit les voitures... C'est ça, le régime aujourd'hui, c'est le régime de l'interdiction. Et vous dites qu'on laisse le choix à la population ? Mais c'est juste un mensonge ! Aujourd'hui - on a déjà eu ce débat -, soyez-en certains, si la population votait la LMCE, je ne suis vraiment, mais alors vraiment pas sûr qu'elle serait adoptée à - quoi ? 68% ? 78% ? On ne sait même plus. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Des voix. 68% !
M. Stéphane Florey. Toujours est-il que le résultat serait totalement différent, puisque, depuis la LMCE - et je le redis encore une fois volontiers... La LMCE, le Conseil d'Etat en a fait une lecture erronée et une application abusive...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. ...ce qui est aussi purement scandaleux...
Le président. Sept secondes !
M. Stéphane Florey. ...puisque après, on vient avec ce genre de plan dire: «Oui, mais la LMCE est conforme, le plan est conforme...»
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. Donc refusons ce plan de je ne sais plus quoi - et puis voilà ! (Rires.)
Le président. Merci, on a bien compris.
M. Stéphane Florey. Parce qu'avec tous ces plans, on ne sait même plus comment ils s'appellent !
Le président. Je passe maintenant la parole à M. Pablo Cruchon.
Des voix. Ah !
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. Le groupe Ensemble à Gauche soutiendra ce plan. (Remarque.) Sans un grand enthousiasme, mais, comme j'ai coutume de le dire maintenant, il va globalement dans le bon sens.
Par contre, j'aimerais réagir aux propos du député Valentin, qui parle d'une prise en otage de toute la population par les ayatollahs. Qui prend en otage qui ? Les automobilistes quand ils passent au centre-ville, qu'ils polluent, qu'ils font du bruit, qu'ils atteignent la santé de la population, qu'ils mettent en danger la vie des personnes, avec leur gros SUV de deux tonnes ? Qui est-ce qui... (Commentaires de désapprobation.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Pablo Cruchon. Sans parler de la participation au réchauffement climatique ! Et j'aimerais revenir sur ce point, parce qu'il me semble qu'une partie de l'hémicycle ne sait pas très bien de quoi on parle quand on évoque le réchauffement climatique. (Exclamations. Commentaires.)
Une voix. Mais non !
Le président. S'il vous plaît !
M. Pablo Cruchon. Si ! (Commentaires.) Oh oui, vous ne savez pas ! Parce que les chiffres sont juste alarmants ! S'il y avait une augmentation de 2 degrés de la température, qu'est-ce que cela signifierait ? 250 000 morts de plus par année entre 2030 et 2050. (Commentaires.) Ce sont les chiffres de l'OMS. Il y aurait 1 milliard de personnes qui connaîtraient une réduction drastique de leur accès à l'eau; 62% de la population de l'Asie du Sud-Est qui risquerait de mourir prématurément. (Remarque.) C'est ça, la réalité ! Ce sont des morts par centaines de milliers, des déplacements de personnes, des famines: c'est ça, les conséquences !
Alors quand on prend la question de la mobilité, qui représente 13% des émissions de gaz à effet de serre globalement, on doit évidemment réfléchir à ça ! C'est criminel de ne pas le faire ! Et c'est criminel de ne pas le faire juste en vue d'avoir la liberté de prendre son SUV de deux tonnes, tout seul dans la voiture pour pouvoir se pointer au centre-ville et faire ses courses ! (Remarque.) Oui, c'est irresponsable ! C'est complètement irresponsable ! Ensemble à Gauche et la Liste d'union populaire défendront une autre vision de cette société, une société où on essaie de réduire les dangers pour la vie des personnes ! Merci. (Vive remarque.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Le MCG, si vous voulez prendre la parole, appuyez sur le bouton, s'il vous plaît. (Commentaires.) Je passe la parole au MCG - maintenant vous l'avez -, par l'intermédiaire de M. Patrick Dimier. (Commentaires.) Allez-y, Monsieur le député, c'est à vous.
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. C'est une situation assez incroyable. Je remercie M. Cruchon, parce qu'il est toujours dans la caricature et on a besoin de la caricature pour comprendre ce qui tient debout. Quel est le pourcentage de véhicules que vous décrivez ? Quel est le pourcentage de gens qui se déplacent dans ces véhicules ? Vous êtes dans la caricature de la lutte des classes, mon cher ! Et rien de plus ! De 17 à 23, avec un siècle d'écart, vous n'avez pas encore compris la différence !
Ce que je veux dire, c'est qu'on est quand même dans une république assez extraordinaire ! Malheureusement, il n'y a pas de place pour y planter des bananiers, mais ce serait bien de pouvoir le faire ! On nous serine des fadaises à propos de l'utilisation des véhicules, qui est un droit consacré par la constitution - d'accord ? -, et pendant ce temps-là, on détruit 75 peupliers dans la plaine de la route de Base pour y mettre un tram, et on ne fait aucun remplacement ! Quand on parlait de déraillement tout à l'heure, c'en est un beau !
Et le deuxième, qui est extraordinaire - extraordinaire ! Pour pouvoir installer la voie verte, qu'est-ce qu'on fait ? On détruit des arbres ! Et on ne détruit pas n'importe lesquels ! On détruit des arbres matures ! Et, comme vous le savez, vous avez tendance à confondre canopée et canapé ! Donc si vous voulez protéger la canopée, et c'est bien l'objectif, ce n'est pas en plantant des mini-jardins au milieu des places de parking que vous allez y arriver, c'est en protégeant les arbres ! Et pour protéger les arbres, il faut arrêter de jouer aux bûcherons irresponsables ! Merci.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Pablo Cruchon, il vous reste une minute soixante.
M. Pablo Cruchon (EAG). Ça fait deux minutes. Merci, Monsieur le président.
Une voix. C'est pas faux ! (Commentaires.)
Le président. Je vois que vous êtes attentif !
M. Pablo Cruchon. Euh, donc... (L'orateur rit.) Pardon, ça m'a déconcentré ! (Commentaires. Rires.) J'aimerais réagir aux propos de l'autre caricature de ce parlement, M. Dimier, puisqu'il faut rendre à César ce qui appartient à César. Vous nous parlez de la coupe de peupliers versus un drame de l'humanité - parce que c'est de ça qu'il s'agit: le réchauffement climatique. (Remarque.) Le réchauffement climatique est en train d'endommager... Tout à l'heure, j'ai dit: «S'il y avait une augmentation de 2 degrés de la température [...]». On n'est pas du tout sur cette ligne ! On est sur une ligne qui va nous mener bien au-delà des 2 degrés, et les conséquences seront bien plus fortes.
Donc oui, il y a un point sur lequel je n'ai pas insisté - et c'est vrai que j'ai donné une version dramatique de la situation, parce que la situation est dramatique -, un point qui est très important, c'est que, pour permettre cette transition modale et cette transition écologique, il faut évidemment inciter les gens à changer. Sauf que ce sont les mêmes partis qui refusent ce plan... (Remarque.) ...qui refusent les incitations à ces personnes. Ce sont les mêmes qui s'opposent aux pistes cyclables, ce sont les mêmes qui crient au scandale dès qu'on installe un feu rouge, dès qu'on crée une piste cyclable dans une rue... (Commentaires.) ...et vous faites des recours, vous attaquez dans tous les sens ! Vous faites exactement l'inverse de ce que vous dites, c'est-à-dire que vous forcez les gens à continuer à devoir prendre leur transport individuel motorisé, parce que vous ne développez pas d'offres alternatives ! (Remarque.) Alors, Messieurs, soyez conséquents: dites-le, dites-le, vous voulez juste circuler comme bon vous semble au mépris de la population genevoise et du reste de la population mondiale ! C'est la seule raison. Merci.
Une voix. On va régler le problème de la transition énergétique de la Chine et des Etats-Unis à Genève !
Le président. Monsieur Daniel Sormanni... (Vive remarque.) ...s'il vous plaît ! (Vive remarque.) Monsieur Sormanni, appuyez sur le bouton si vous voulez vous exprimer ! (Remarque.) Taisez-vous, Monsieur Sormanni ! (Rires.) Nous passons à l'intervention suivante. Monsieur David Martin, vous avez la parole.
M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président. Mon préopinant PLR se demandait - vous transmettrez - pourquoi Genève est le seul canton où il y a encore une guerre des transports. Peut-être que c'est parce que certains groupes, comme le sien, campent sur des postures quelque peu archaïques quand on parle de mobilité. Prendre en otage les personnes à mobilité réduite pour dire que, parce que ces personnes-là existent et qu'elles ont besoin d'une voiture - et c'est vrai -, il ne faut rien faire pour encourager le report modal, c'est franchement un peu scandaleux. Parce que si certaines personnes qui peuvent facilement se passer de leur voiture le faisaient, les personnes à mobilité réduite n'auraient aucun problème à circuler en ville, au même titre que les plombiers, etc., etc.
Maintenant, en admettant que la voiture soit un moyen de transport qui garde son utilité dans certains cas de figure, il faut reconnaître qu'en ville, l'espace est particulièrement rare. Le territoire et l'espace public sont sous pression, on en a besoin pour revégétaliser et pour différents programmes. Dans ce contexte-là, stocker un véhicule inutilisé dans un espace contraint a un coût, et cette notion d'efficience et de causalité devrait être le principal argument notamment de la droite libérale - ça devrait leur parler.
D'ailleurs, si je peux me permettre une analogie peut-être un peu saugrenue, les avions restent le moins de temps possible à l'arrêt, parce que cela coûte extrêmement cher de les laisser à l'arrêt. Si on fait l'analogie pour la voiture, comment est-ce que ça s'appelle ? Ça s'appelle Mobility. De nouvelles manières d'utiliser les voitures existent, qui permettent d'avoir accès à une voiture sans qu'elle soit possédée, sans qu'elle passe 80% de son temps à l'arrêt et en particulier dans l'espace public. D'ailleurs, les acteurs immobiliers, de nouveau, majoritairement à droite, vont dans ce sens et se plaignent régulièrement de parkings souterrains qui restent vides dans la couronne urbaine. Il y a donc véritablement quelque chose à faire en matière de stationnement, des rééquilibrages à opérer.
Sans revenir sur tout ce qui a été dit, le groupe des Verts salue bien évidemment ce plan d'actions qui donne de la visibilité, une stratégie en matière de stationnement, n'en déplaise à M. Florey, qui préfère - comment est-ce qu'il a dit ? Faire des choses «la tête dans le sac» ? (Remarque.) Je ne vois pas comment on peut faire des choses en ayant la tête en dehors du sac si on n'a pas de plan d'actions ou de stratégie. (Remarque.)
Je veux juste relever, pour terminer, que dans ce plan d'actions figurent certaines actions essentielles, notamment la révision du ratio de stationnement sur fonds privés - je vous rappelle qu'une motion de ce parlement adoptée largement demandait cette baisse de ratio, or maintenant, c'est effectif; la révision du prix du macaron en zone bleue - qui est le moins cher de Suisse -, et pas juste en vue de l'augmenter, mais en vue de créer des vases communicants et de rendre les parkings souterrains moins chers et plus attractifs; et finalement, aussi des leviers auprès des entreprises. Bref, c'est un excellent plan d'actions que nous saluons et que nous vous encourageons à adopter ce soir.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Francisco Valentin, il vous reste vingt secondes.
M. Francisco Valentin (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce sera rapide. Vous pourrez communiquer au député Cruchon, qui l'a dit lui-même: le véhicule privé motorisé représente 13% des gaz à effet de serre. Qu'est-ce qu'il fait pour les 87% restants ? On ne s'en occupe pas, on s'en fout ! Et puis à part ça, s'il a bien suivi la doctrine de ses parents, puisque je ne pense pas qu'il est né comme ça, en 68, on disait «sous les pavés, la plage» et «il est interdit d'interdire» ! Merci, Monsieur Cruchon !
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Il faut quand même remettre un peu l'église au milieu du village: en Suisse, la population augmente, nous serons bientôt 9 millions d'habitants. A Genève, nous sommes 520 000, sans parler de ceux qui viennent travailler ici, qu'ils soient pendulaires ou frontaliers, pour les besoins de l'économie. Il ne vous a pas échappé qu'il y a eu un report modal important entre ceux qui possèdent une voiture et ceux qui circulent avec des deux-roues motorisés et que Genève est le canton qui a le plus d'immatriculations de deux-roues motorisés. Donc non aux taxes de stationnement prévues pour les motos ! Le report modal de la voiture à la moto est très important dans notre canton et fait baisser la pollution.
Ensuite, je cite le rapport - parce qu'il contient quelques perles assez remarquables: la nouvelle politique du stationnement «vise autant à réduire l'usage de la voiture individuelle qu'à favoriser le transfert vers des mobilités durables, tout en facilitant les activités des entreprises». (Remarque. Un instant s'écoule.) Je poursuis, Monsieur le magistrat, si vous me laissez parler - vous transmettrez, Monsieur le président -, merci ! (Rires.) «Tout en facilitant les activités des entreprises.» Il est sidérant de voir que le nombre d'emplacements pour les livraisons a diminué fortement, ce qui péjore le travail des entreprises dans notre canton; c'est d'une rare évidence. Le rapport parle des axes thématiques «pour limiter l'usage de la voiture individuelle» - c'est inscrit noir sur blanc ! C'est une pollution bien éloignée des gouffres énergétiques que sont les bâtiments de l'Etat, qui n'a jamais été capable de mettre en oeuvre le remplacement des vitrages, malgré une loi votée en 1988. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Oui à des mesures incitatives et non à des mesures restrictives ! La minorité de la commission vous demande de prendre acte du rapport et de refuser la résolution qui a été présentée, et...
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Christo Ivanov. Vous m'avez coupé cinq secondes ! (Rires.)
Le président. Eh bien, c'est terminé ! Madame de Chastonay, vous n'avez plus de temps de parole. C'est donc M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco qui va nous adresser son message.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mais très volontiers, Monsieur le président ! Désolé, Monsieur le rapporteur de minorité, de vous avoir perturbé il y a quelques instants, mais je réagissais à des affirmations que je vais contester tout de suite. C'était une réaction naturelle et je commencerai par cela. C'est très basique. M. le rapporteur de minorité nous a dit à plusieurs reprises, d'autres ont pris le relais, qu'on a diminué ces fameuses places de stationnement. Eh bien non ! On ne les a pas diminuées, on les a augmentées ! Aujourd'hui, il y en a 1500; elles ont augmenté de 100 unités au cours des cinq dernières années. C'est un fait !
Je poursuis de manière sectorielle sur les affirmations qui ont été formulées. Ces plans d'actions - celui-ci en particulier - seraient illégaux, selon certains, voire, si je suis le raisonnement, résulteraient d'élucubrations du Conseil d'Etat. Eh bien non ! Ils sont inscrits dans la loi ! C'est la loi qui exige qu'on élabore des plans d'actions. Ce n'est pas illégal, c'est demandé dans la loi ! (Remarque.) En l'occurrence, pour le plan d'actions du stationnement, il s'agit de l'article 7 de la loi cantonale d'application de la LCR, une loi qui est, comme vous le savez, fédérale. C'est un élément supplémentaire.
Restons-en aux faits. On a entendu un peu tout et n'importe quoi à ce sujet. Je ne vais pas axer mon intervention sur la question climatique - j'y ai d'ailleurs rarement fait référence en parlant de mobilité au cours de ces presque cinq dernières années, pratiquement jamais ! Pourtant, c'est une évidence; mais on a suffisamment d'autres arguments, y compris des arguments économiques, et c'est d'ailleurs souvent - si ce n'est même pratiquement toujours - sur ce point que j'insiste pour parler d'une mobilité plus raisonnable à Genève. Eh bien, pour ce qui est des émissions de CO2, à Genève, la mobilité terrestre représente 26% à 27% des émissions de gaz à effet de serre, c'est le deuxième secteur, effectivement après les bâtiments - vous conviendrez aussi que le Conseil d'Etat est très déterminé s'agissant des bâtiments, puisqu'il a déposé plusieurs projets de lois, notamment un crédit de 1 milliard visant à assainir les bâtiments de l'Etat. On ne peut donc guère lui faire le reproche de ne pas s'en soucier.
Restons-en donc aux faits, si vous permettez, et aux éléments contenus dans ce plan d'actions. Je m'étonne d'ailleurs - j'évoquais la question économique, mais je prends un autre aspect dont on a parlé: ce fameux règlement sur le stationnement sur fonds privés. Il est réclamé de manière très insistante par les milieux immobiliers en particulier. Il y a dix ans, ce n'était pas forcément le cas, c'étaient certains acteurs, disons, un peu alternatifs, ceux qui voulaient construire des immeubles en paille ou avec d'autres matières alternatives, qui disaient: «Il ne faut pas construire trop de places de parking, parce qu'on n'en veut pas !» (Commentaires.) Eh bien, maintenant, tout le monde nous dit ça ! Tout le monde nous dit ça ! Et dans le cadre des PLQ en élaboration, le secteur privé en particulier - celui auquel un certain nombre se réfère, moi en premier - nous réclame, nous supplie de diminuer les ratios de stationnement, parce que c'est de l'argent jeté par les fenêtres: on crée des places de parking en sous-sol, qui sont très chères, comme vous le savez, et qui ne trouvent plus preneur, y compris dans les PPE. Ce n'est pas nous qui l'inventons, ce sont les milieux immobiliers qui nous demandent cela. Le plan d'actions établit donc ces bases-là. Evidemment, ensuite, si vous le refusez, le Conseil d'Etat considérera que ce n'est pas la volonté de ce parlement et on ne fera pas évoluer la situation dans ce sens-là. C'est aussi une réalité. Il faut juste, avant d'affirmer ce que sont les intérêts économiques, en tout cas de certains, ne pas dire n'importe quoi.
Maintenant, si vous permettez, je le répète pour la je ne sais combientième fois - mais visiblement, cela n'a pas d'effet, et j'imagine bien que la période que l'on vit exacerbe les postures... J'ai entendu un député évoquer d'anciens magistrats, notamment des gens qui étaient en poste au début des années 2000. (Remarque.) Mais est-ce qu'on ne pourrait pas imaginer un instant - je pense que le député en question a quand même une certaine ouverture d'esprit et une certaine honnêteté intellectuelle - que, depuis le début des années 2000, les choses ont évolué ? Ou pas ? Il me semble !
Une voix. En mal !
M. Serge Dal Busco. Peut-être ! La réalité, c'est que la population, à plusieurs occasions d'ailleurs - même si je suis surpris par le peu de considération pour les décisions démocratiques -, a suivi les propositions de ce parlement lui-même, la fameuse LMCE dont prétendument on ferait une application abusive. Ce n'est pas du tout le cas ! C'est parfaitement conforme ! D'ailleurs, après la revision de cette même LMCE en automne 2019, la population a confirmé au mois de septembre 2020 - c'était quelques mois après les fameuses pistes cyclables établies nuitamment, chères au même député que je citais il y a quelques instants - le principe qu'on avait proposé et qui a été validé par ce parlement, consistant à contrôler, à limiter et à réduire les possibilités de compensation des places de stationnement. C'est une volonté populaire qui a été exprimée à plusieurs reprises, il faut arrêter de dire que ce sont des choses illégales ou antidémocratiques !
Et je conclurai encore une fois, parce que c'est la énième fois que je le fais... Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez également évoqué la population qui augmente. Mais... Bien sûr qu'elle augmente !
Une voix. Et ils ont des voitures !
M. Serge Dal Busco. Ils ont des voitures, mais imaginez ce que serait la mobilité, dans quelle situation se trouverait l'économie, qui a notamment besoin de faire circuler les biens et les personnes de manière adéquate, si on ne menait pas une autre politique, si on continuait le laisser-faire auquel vous aspirez ! Ce serait le chaos total ! Une catastrophe ! Comment voulez-vous qu'une situation que vous jugez aujourd'hui insatisfaisante, avec un trafic qui est très élevé - on entend tout cela à longueur de séances du Grand Conseil -, aille en s'améliorant si on ne change pas de politique avec une population qui va croissant ? C'est totalement l'impasse ! Et c'est la raison pour laquelle - je vous l'ai indiquée je ne sais combien de fois - l'action de ce département n'est pas mue par l'idéologie, elle n'est pas le fait de l'administration qui déciderait dans son coin, elle résulte, et c'est assumé, je peux vous le garantir, d'une volonté politique, d'un pilotage politique de ce département - et c'est moi qui les assume avec le Conseil d'Etat - qui consistent à dire que si on ne change pas un certain nombre de choses, si on ne devient pas un peu plus raisonnable, on va vers la catastrophe; et c'est pour cela qu'on essaie de faire les choses de manière plus intelligente. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Oui, je vais arrêter ! (L'orateur rit.)
Je vous dirai juste que les personnes qui fustigent tout ce qui se passe de l'autre côté de la frontière... Mais peu importe, fondamentalement ! 87% des personnes qui prennent leur voiture... Il y en a qui viennent de partout, peut-être beaucoup trop, et je suis aussi de cet avis, s'agissant de l'autre côté de la frontière - mais je ferai une petite parenthèse à ce sujet, sur Thônex-Vallard: depuis la mise en service du Léman Express, on a -27% de trafic à Thônex-Vallard, ce qui montre bien que lorsqu'on propose une offre, les choses vont mieux. Ce que je voulais vous dire, c'est que 87% des personnes qui prennent leur voiture pour aller travailler, pour la reprendre le soir vers 19h, 20h, 22h, déclarent n'avoir aucune difficulté à trouver un endroit pour se garer. Eh bien, si vous pensez que mettre un petit peu d'ordre là-dedans, planifier les choses, les faire de manière plus intelligente, ce n'est pas la bonne chose à faire, je ne sais pas où on irait en appliquant une politique comme la vôtre. Par conséquent, ce que nous, nous voulons, c'est quelque chose de raisonnable, qui libère la route, pour que ceux qui en ont besoin, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les entreprises puissent circuler et ne pas être engluées dans le trafic. C'est cela, la politique qu'on veut mener, ce n'est pas de l'idéologie. C'est juste du réalisme et du bon sens. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix la proposition de résolution.
Mise aux voix, la résolution 1011 est adoptée par 50 oui contre 42 non (vote nominal).
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1474.
Premier débat
Le président. Nous abordons notre dernière urgence de la soirée: il s'agit du PL 13241, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à l'auteur du texte, M. Thomas Bläsi.
M. Thomas Bläsi (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, chers collègues, en préambule, je pense essentiel de préciser avoir toute conscience... (Brouhaha. Un instant s'écoule.) ...suite à nos nombreux échanges, que nous sommes finalement d'accord sur le fond du texte dont nous discutons aujourd'hui. Il en découle que mon intervention se concentrera essentiellement sur la forme, qui soulève quelques questions.
Sur un plan législatif tout d'abord: un député des Verts, M. Yannick Maury, a déposé une motion dans le canton de Vaud. A Fribourg, des députés socialistes ont interpellé le Conseil d'Etat, et une commission du Conseil national a également voté dans ce sens récemment. Après plusieurs dizaines d'années et de nombreux textes déposés, plusieurs parlements cantonaux donnent des signes clairs quant à leur volonté de légiférer dans le sens d'une interdiction des symboles nazis. Il est essentiel, dans ce contexte, que Genève se manifeste pour contribuer à la synergie intercantonale actuelle. A cet égard, s'agissant de la forme, le rapport de l'Office fédéral de la justice publié le 15 décembre 2022 a élargi le champ des possibles et exposé les obstacles rédactionnels à éviter. Sur la forme, le rapport admet donc sans détour la capacité législative des cantons dans ce domaine.
La difficulté de légiférer, telle qu'exposée dans le rapport, tient au fait que le niveau législatif idéal est interdépendant de l'approche souhaitée. Ainsi, dans l'hypothèse que le législateur souhaite mettre en place une approche répressive, l'idéal serait de renforcer l'article 261bis du code pénal afin de viser - dans l'idéal - une uniformité cantonale. L'article 261bis du code pénal pourrait alors être complété pour qu'il interdise explicitement les symboles nazis. Une autre option serait d'adopter une loi spéciale permettant l'interdiction des symboles nazis de manière plus détaillée. Si le législateur souhaite une approche plus préventive, l'interdiction devrait plutôt être réglée dans le droit policier des cantons. Excusez-moi, mais j'aimerais juste pouvoir parler; c'est vraiment pénible. (L'orateur s'adresse à quelqu'un sur sa gauche.)
Une voix. Pardon.
M. Thomas Bläsi. Le rapport de l'OFJ précise, s'agissant des difficultés liées à un passage par la voie législative simple, que la mise en place d'une norme cantonale est par ailleurs possible - une norme cantonale est par ailleurs possible ! Cette norme devrait être rédigée de manière claire, précise, compacte et en prévoyant des exceptions pour que l'utilisation des symboles visés à des fins scientifiques, éducatives, artistiques ou journalistiques reste possible.
La description, dans le rapport de l'OFJ, des possibilités et des obstacles rédactionnels converge très clairement vers l'établissement d'une norme constitutionnelle comme étant le meilleur recours. Cela permet au parlement d'affirmer sa volonté de légiférer, tout en respectant la séparation des pouvoirs - la forme proposée répond parfaitement aux exigences fédérales. Pour le dire d'une autre manière, une nouvelle norme constitutionnelle permettrait au parlement d'affirmer sa volonté sur le fond, comme cela a été réaffirmé en préambule s'agissant de notre base de travail commune de ce soir.
Il est évident que ce texte, dont la portée symbolique est intrinsèquement forte, prend encore un relief particulier ce 27 janvier. Aujourd'hui est célébrée la journée internationale de la commémoration de la Shoah et de prévention des crimes contre l'humanité. Ce jour pourrait également être celui où Genève s'affirmerait précurseur dans ce débat national. Le fait de mettre notre législation en accord avec nos convictions humanistes rejaillirait sur l'aura de toute la Genève internationale. Pour toutes ces raisons, je vous appelle à refuser les possibles demandes de renvoi en commission et à accepter le vote sur le siège.
En conclusion, je citerai le message du Conseil fédéral lors de cette journée de commémoration: «Retenir les leçons historiques de l'Holocauste est un devoir permanent. Nous devons toutes et tous nous engager, constamment et partout, contre la propagation de l'antisémitisme et du racisme.» Monsieur le président, je vous remercie.
M. Alexis Barbey (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, après avoir parlé de la forme de ce projet de loi, je tiens à rappeler quelques-unes des images qui sont liées à ce projet de loi. Pourquoi vouloir interdire les symboles nazis ? On a l'impression que ça vient un peu comme la pluie après les vendanges, parce que nous sommes quarante ans plus tard - nous sommes même cinquante ans plus tard - et que ça n'aurait pas de raison d'être, mais on se souvient. On se souvient de ces rassemblements de Nuremberg où les foules étaient ramassées et où l'esprit de l'individu était complètement happé par l'esprit de la collectivité, par la haine. La force de ce mouvement était inspirée par la haine qu'il avait des autres, de certaines parties de la population; je pense en particulier aux Juifs, aux Roms, aux homosexuels, et j'en passe.
C'est pour éviter que tout cela revienne que nous déposons ce projet de loi. Ces dispositions nous paraissent une évidence: il ne faut évidemment pas laisser un trou comme ça, béant, dans notre arsenal législatif; cela nous permettrait d'éviter les débordements. C'est à ce titre que je vous demande de voter ce projet de loi sans passage en commission. Je vous remercie.
Une voix. Mais non !
M. Alexis Barbey. Eh bien, si !
La même voix. Ce n'est pas ce qu'on avait dit !
M. François Lefort (Ve). Impérialisme, racisme, antisémitisme, eugénisme, colonialisme, ethnodifférentialisme: ce sont des critères relatifs aux idées nazies ! Plus généralement, ce sont des idées antihumanistes ! Plus que de simples idées mises ensemble, c'est un programme. Alors oui, ici, nous sommes un pays démocratique; nous sommes partisans de la liberté de pensée, de la liberté d'expression de toutes les idées - pour autant qu'elles soient humanistes.
Le Conseil fédéral, récemment, dans ses réponses aux interventions de conseillers nationaux, a plaidé la tolérance dont nous devrions faire preuve envers ce qu'il nomme des idées dérangeantes. Mais, Mesdames et Messieurs, nous avons tous des idées dérangeantes, pour les autres ! Vous avez tous eu, aujourd'hui, des idées dérangeantes: on l'a vu avec les interventions qui ont animé cette salle, et cela est sain ! Cela s'appelle la démocratie ! Personne parmi vous ne nourrit en revanche d'idées haineuses à l'égard des autres, de ceux qui expriment des idées différentes et dérangeantes.
Les idées haineuses visant à l'annihilation, à la spoliation ou à la mise en esclavage d'une partie de la population propagées par le nazisme et d'autres idéologies ne sont pas des idées dérangeantes, ce sont des idées dangereuses ! Ce sont des idées dangereuses pour la démocratie et antihumanistes; des idées ennemies, qui existent et sont celles d'une extrême minorité de nos populations, en Suisse ou en Europe. Une extrême minorité qui se sent libre en Suisse, qui propage ses idées ennemies par le commerce d'objets nazis, attirant ici de toute l'Europe, pour y faire leurs courses, de pauvres âmes cultivant un romantisme morbide.
C'est une anomalie que de tolérer ce commerce ! Ce n'est d'ailleurs plus un commerce de reliques du passé: des bibelots sont fabriqués à la chaîne, comme on fabriquerait des boules à neige et des boîtes qui font «meuh». Alors, j'aime beaucoup les boîtes qui font «meuh», qui sont très suisses; par contre, tout ce qui ferait «Heil Hitler» et «Heili, heilo» n'est pas suisse, est antihumaniste et est notre ennemi. Voilà la raison de voter ce projet de loi constitutionnelle, que nous vous présentons pour interdire les symboles et les objets nazis - et par conséquent leur commerce. Pour quelle raison ? Pour nous protéger de ces idées ennemies qui n'ont rien à voir avec les idées humanistes. Ce soir, nous vous proposons donc un projet anticonstitution... (Exclamations amusées. Rires. L'orateur rit.)
Une voix. Ah ben bravo !
Une autre voix. Ça ne m'étonne pas !
M. François Lefort. Oui, mais ça ne m'arrive pas souvent ! Bon ! Nous vous proposons ce projet constitutionnel de façon à en terminer avec une anomalie européenne: la tolérance du commerce des objets nazis. Merci. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, François Lefort a parlé à l'instant du commerce de croix gammées et d'aspects de détail ! Sur le fond, il y a une bataille d'idées à mener: une bataille politique contre le nazisme bien sûr, contre le fascisme, contre le racisme, contre l'islamophobie, contre l'antisémitisme, contre la xénophobie ! Et moi, je suis réservé par rapport à ce projet de loi; ma religion n'est pas faite à ce stade. Je suis réservé parce que je pense que les batailles d'idées doivent se mener à coups d'idées et non à coups d'interdits ou de mesures administratives. Il serait très facile de voter cet objet et d'avoir bonne conscience, de dire: on a fait ce qu'il fallait, on a bouché - je crois que c'était l'expression de François Lefort - un vide dans notre législation; circulez, il n'y a plus rien à voir !
Or, Mesdames et Messieurs, le fascisme moderne, les régimes autoritaires, antidémocratiques, problématiques à de nombreux titres, ne reviendront pas sans doute avec tous les oripeaux antérieurs du nazisme, avec des croix gammées ! Ils reviendront, ils mûrissent leurs offensives possibles sur le terrain de la xénophobie ordinaire. Ils s'inventeront de nouveaux symboles, ils feront autrement. Ce sont ces batailles-là qu'il faut être capable de mener, et je ne suis pas persuadé que le vote sur le siège, sans débat sérieux en commission, à la hussarde et à la va-vite, sans même que les citoyens aient pu être informés avant hier que cette affaire-là allait être débattue, soit une bonne idée.
Pour ma part, si on devait en débattre, j'aurais pour le moins un ou deux amendements à poser sur la table. Je ne les présente pas maintenant, ce n'est pas le moment, mais j'insiste sur le renvoi en commission de ce texte, parce qu'on se dirige vers une votation populaire - une votation constitutionnelle - et celle-ci doit être préparée: c'est notre fonction de parlementaires ! On a réécrit la constitution, on a cru indispensable de créer une assemblée ad hoc et puis de discuter pendant quatre ans, mais ce n'est pas ce que je demande: cet objet doit évidemment être traité en commission pour revenir avec des rapports qui permettent aux uns et aux autres d'avoir des positions un tout petit peu plus préparées, un tout petit peu plus étayées, à la mesure de l'importance du sujet qui est posé sur la table avec ce projet de loi. Merci.
M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, il y a un temps pour militer et il y a un temps pour légiférer. Je suis signataire de ce projet de loi, ce que j'ai fait comme un acte militant. A partir de maintenant, nous devons apaiser la dimension militante et nous attaquer au fond de la problématique. Il est impensable de faire l'impasse sur un travail en commission pour un projet de loi aussi important ! Il n'y a pas d'urgence; par contre, il y a un problème majeur de fond sur lequel nous devons travailler en commission. Que dirait demain le juge si, devant s'intéresser à l'avis du législateur, il se trouvait face à un vide sidéral ? C'est absolument inconcevable. En plus, inscrire dans la constitution l'interdiction de ces signes sans modalités d'application, c'est comme inscrire dans la constitution «tu ne tueras point» mais ne pas prévoir de loi pénale d'application, ce qui permettrait aux criminels de continuer à égorger dans la joie et la bonne humeur. Non !
Mesdames et Messieurs, nous devons nous poser la question du fond. Nous devons nous poser la question du rang législatif: projet de loi constitutionnelle et projet de loi ou seulement un projet de loi, ce qui aurait l'avantage d'une application beaucoup plus rapide ? Nous sommes dans l'incapacité de décider ce soir et je vous demande d'accepter le renvoi en commission de ce texte. C'est un acte responsable, qui nous permettra vraiment d'agir pour l'avenir afin d'atteindre l'objectif voulu, c'est-à-dire éviter les dérives excessives, les dérives inadmissibles que représentent l'utilisation et l'abus des signes et symboles nazis dans l'espace public. Je vous remercie de votre attention.
Une voix. Bravo !
Mme Patricia Bidaux (PDC). Que dire après cet argumentaire selon lequel le fond n'est pas encore acquis et il faudra mettre en place la législation ensuite ? Mais ce sera le cas, quel que soit le vote de ce soir ! Il faudra bien légiférer, il faudra bien donner un cadre à ce nouvel article constitutionnel. En novembre 2021, une motion a été déposée à Berne, que le Conseil national n'a pas encore traitée: elle demande que soit effectivement interdite et pénalisée l'utilisation dans l'espace public, réel comme virtuel, de symboles nazis connus de tous. Pour son préavis, le Conseil fédéral a analysé ce texte sous l'angle de la propagande; c'était le seul moyen qu'il avait de pouvoir le traiter. Il dit que rien ne peut être fait tant qu'il n'y a pas de volonté de propagande dans l'espace public. Et d'ajouter que l'utilisation de symboles nazis peut indéniablement être choquante et accablante pour les victimes de l'Holocauste et leurs familles.
Le 12 janvier 2023, la commission des affaires juridiques du Parlement s'empare également du sujet et demande de créer une loi spéciale - une nouvelle loi qui instaurerait une nouvelle forme de peine dévolue à l'utilisation de symboles nazis dans l'espace public. Cette loi spéciale appellerait des sanctions du même niveau que l'amende d'ordre - c'est ce que dit la commission -, et il faudrait mettre en place une ordonnance d'exécution.
Le 15 décembre 2022, M. Bläsi en a parlé, est sorti le rapport de l'Office fédéral de la justice qui confirme que le texte constitutionnel est bel et bien le meilleur moyen aujourd'hui pour marquer notre choix. Le faire en ce jour de mémoire serait une marque de notre engagement: j'ai entendu que nous nous sentons toutes et tous concernés, que nous sommes unanimes à condamner l'exhibition et le commerce de ces objets encore trop souvent visibles dans l'espace public.
Alors quel choix pourrait-on bien avoir ce soir ? Eh bien le choix de ne pas nous cacher derrière l'argumentaire de la Confédération et d'affirmer, comme nos collègues d'autres cantons, qu'ici, à Genève, patrie des droits de l'homme, nous ne tolérons pas l'exhibition ou le port de symboles nazis: non seulement ils portent atteinte à la dignité humaine, mais ils véhiculent une idéologie mortifère que nous n'entendons pas banaliser.
Le PDC-Le Centre soutiendra cet objet sur le siège. Si un renvoi en commission doit se dessiner, notre groupe restera très attentif et très engagé quant au maintien du texte à son niveau actuel - il ne faudra pas lui retirer de sa substance -, tout comme il sera attentif au délai de traitement. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)
Mme Ana Roch (MCG). Ce 27 janvier, cela a été relevé, marque la journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste. Quelle meilleure occasion que celle-ci pour débattre du sujet de ce texte ? Les diverses démarches législatives doivent contribuer fortement à une prise de conscience collective: nous ne pouvons pas banaliser la réalité effrayante de la Shoah et tout ce qui s'est produit en ces circonstances.
Durant la pandémie, nous avons vu ressurgir les démons du passé avec l'utilisation d'emblèmes nazis - à croire que d'aucuns ne mesurent pas leur portée. Avec les dispositions proposées par ce texte, nous pouvons signaler clairement qu'il n'est pas anodin d'utiliser ce genre de symboles. Par la même occasion, nous soutenons la mémoire des victimes et de leurs familles. L'importance de la démarche mériterait un vote sur le siège; cependant, le MCG soutiendra le renvoi en commission. Merci.
Une voix. Bravo !
M. Cyril Mizrahi (S). Tout d'abord, j'aimerais remercier le député Thomas Bläsi pour le dépôt de cet objet: je pense que la question est tout à fait pertinente et que c'est un bon projet - le groupe socialiste pense que c'est un bon projet. C'est un texte qui a sa place au niveau constitutionnel et que nous devons, contrairement à ce que j'ai entendu de la part de certains et certaines, soutenir sur le fond. Parce que M. Lefort nous disait tout à l'heure qu'il y a certaines idées qui sont bien, d'autres idées qui ne sont pas bien. Il faut être très clair: la haine de l'autre n'est pas une opinion ! Et, pour M. Vanek, je ne pense pas que cette histoire des croix gammées est un détail: je crois que ces choses sont véritablement nocives. La haine de l'autre est nocive pour la démocratie et nous devons effectivement légiférer en vue d'interdire ces croix gammées, ces symboles nazis.
J'ai entendu dire qu'il faut de toute façon faire le débat d'idées, qu'il faudra de toute façon concrétiser, etc. J'entends bien ! Mais je pense qu'on tient là une première étape, et cette première étape, on doit y souscrire. Maintenant, le PS votera quand même le renvoi en commission, parce qu'il s'agit d'un projet de loi constitutionnelle. Ce n'est pas une motion, c'est quelque chose de sérieux - c'est un sujet sérieux: on touche à la constitution et ça vaut la peine de se poser un certain nombre de questions. Est-ce qu'on veut, par exemple, interdire les symboles nazis uniquement sur le domaine public, comme le propose le texte ? En ce qui me concerne, je ne suis pas du tout convaincu; je pense qu'il faut discuter pour déterminer jusqu'où on veut aller dans cette interdiction des symboles nazis.
Il y a donc quand même des questions qui se posent, et je pense qu'on ne peut pas faire l'économie de leur traitement parce que ce jour revêt une importance symbolique particulière; ce n'est pas, à mon sens, faire justice à cette thématique. Je vous propose donc, pour traiter le sujet comme il le mérite en ce jour également, de voter le renvoi en commission pour le traiter jusqu'au bout. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Thévoz, il vous reste trente secondes.
M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Monsieur le président. Le «Blick» relevait fin décembre qu'un élu de l'UDC Genève était accusé de néonazisme, et l'article mentionne que ce député suppléant «like» des pages sur Facebook telles que celles de Légion 88, groupe de rock anticommuniste, de la 28e division SS Wallonie, de la Luftwaffe ou de l'Afrikakorps. Ce charmant député suppléant, qui a prêté serment ici même, fait également l'apologie... Il était membre de Kalvingrad Patriote, groupe d'extrême droite néofasciste genevois. (Commentaires.) Mes questions pour l'UDC sont les suivantes: est-ce que ce député suppléant est toujours dans votre groupe - est-ce que vous l'avez mis dehors ? -, et quel est le lien avec ce projet de loi, que vous déposez de manière opportune aujourd'hui ? Merci. (Commentaires.)
M. Patrick Dimier (MCG). Durant la dernière guerre, un de mes oncles était le chef de la résistance dans le Pays de Gex et c'est lui notamment qui a permis à la soeur du général de Gaulle de s'extraire et de venir chez nous. C'est donc naturellement un sujet qui me touche et dans lequel j'ai bien entendu l'occasion de m'impliquer personnellement.
Une voix. Bravo !
M. Patrick Dimier. Mais on n'est pas là pour s'occuper d'affaires personnelles - je renvoie le compliment à M. Thévoz, qui s'est attaqué personnellement à un élu de la république. Que ça lui plaise ou non, c'est un élu de la république ! Et on n'est pas là pour ça ! On est là pour viser la cible absolument centrale de ce débat, c'est-à-dire éradiquer autant que faire se peut la peste - je répète: la peste - nazie ! C'est notre devoir à tous: c'est notre devoir de démocrates et c'est surtout, surtout, notre devoir de mémoire.
Mais j'aimerais quand même, avant de conclure, rappeler une chose très importante, parce qu'elle a malheureusement été effacée. Souvenez-vous de qui a libéré le camp d'Auschwitz: ce sont les Russes. C'est dramatique, et ça montre et ça prouve - ça montre et ça prouve ! - le devoir que nous avons de lutter contre ça, quel que soit notre camp et quels que soient les hasards de l'histoire. Je ne soutiens absolument pas les Russes aujourd'hui, mais je tiens à ce qu'on n'oublie pas que ce sont eux qui nous ont permis de gagner la guerre: ils ont pris Berlin et ont mis à terre les nazis ! Point ! (Commentaires.)
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à M. Thomas Bläsi. (Brouhaha.) Monsieur Thomas Bläsi, vous avez la parole ! (Brouhaha.) Vous vous exprimerez quand il y aura un peu de silence, parce que pour l'instant on ne vous entendrait pas. (Un instant s'écoule.)
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Ecoutez, je ne reviendrai pas sur les propos de M. Thévoz: je lui propose d'échanger avec la personne concernée ou avec la direction du parti. Je ne vois pas quelle explication je pourrais lui fournir ou quelle responsabilité je pourrais avoir personnellement; je pense que mon engagement est assez clair dans ce texte.
Maintenant, ce que j'aimerais tout de même dire, s'agissant de la difficulté de prendre une décision... On parle d'un texte qui a deux alinéas: le premier alinéa fait une ligne et comporte «contre le racisme et l'antisémitisme», plus les verbes qui vont avec. Le deuxième alinéa interdit les symboles nazis sur le domaine public, plus les verbes qui vont avec. Ce texte a été déposé le 4 janvier; vous pouviez le signer jusqu'au 10 janvier. Vos groupes se sont réunis entre le 20 et le 25 janvier pour prendre une décision et arrêter une position de fond sur ce texte - vous avez eu près d'un mois pour décider ce que vous vouliez faire de deux phrases. Ces deux phrases correspondent exactement à la possibilité maximum qu'on a d'un point de vue législatif, et c'est effectivement un texte constitutionnel pour affirmer notre volonté de légiférer et avoir une synergie avec les autres cantons. Alors nous n'aurons pas, je pense, la valeur du symbole ce soir, et j'en suis très triste; je suis par contre heureux que nous soyons d'accord sur le fond. Je vous rends la parole, Monsieur le président, et vous remercie.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, on l'a mentionné, le 27 janvier est un jour important, et c'est vrai qu'il est important que le parlement, sur le fond, donne un signe. Cela dit, et j'y reviendrai, le Conseil d'Etat soutiendra le renvoi en commission, parce que quand on traite un projet de loi constitutionnelle de cette importance, il est nécessaire de vérifier qu'on ait bien tout prévu et qu'on n'ait pas oublié certaines choses, qu'il n'y ait pas certains problèmes qui puissent se poser. Cela étant, sur le fond - et j'aimerais exprimer, là, la position du Conseil d'Etat -, nous défendons bien évidemment ce que demande ce projet de loi. Pourquoi ? Parce que ni le racisme ni l'antisémitisme ne sont d'un seul lieu ou d'un seul temps.
On sait également que lorsqu'il y a un génocide, celui-ci n'arrive jamais par hasard ! Il y a eu le dénigrement, la stigmatisation systématique d'un groupe ethnique, pendant des années, pendant parfois une décennie, parfois même, si on parle des Juifs, pendant des siècles ou des millénaires. Les symboles, les mots préparent donc toujours les actes, et le rôle que vous voulez assigner au canton est extrêmement important - il le remplit d'ailleurs en partie: l'Etat met en oeuvre une politique de lutte contre le racisme et l'antisémitisme.
Nous le faisons dans nos écoles: celles et ceux qui parmi vous sont enseignants savent très bien que la Shoah comme tous les génocides sont extrêmement étudiés dans les programmes d'histoire. Et qu'on rappelle que les mots mènent aux actes ! Que, par exemple, les nazis traitaient les Juifs de parasites et que les génocidaires hutus, au Rwanda, qualifiaient les Tutsis de cancrelats ou de cafards. C'est exactement la même chose: on dénigre, on prépare et, pour finir, on extermine. Et on extermine parce qu'une partie de la population reste passive. On extermine parce que certains se disent: «Ah, mais j'obéis aux ordres et donc je ne suis pas responsable.» Il y a une forme de dissolution de la responsabilité; on ne sait plus très bien qui est le responsable du génocide.
Oui, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat soutient bien évidemment une inscription dans la constitution de l'interdiction des symboles nazis, des symboles liés au racisme, mais il vous demande de renvoyer cet objet en commission pour s'assurer que le texte qui sera au final soumis à la population soit tout à fait acceptable pour chacune et chacun.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une demande de renvoi en commission, sur laquelle je vous invite à vous prononcer.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 13241 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est adopté par 56 oui contre 28 non et 2 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous arrivons au terme de la première partie de cette double session; je vous donne rendez-vous jeudi prochain à 17h pour la suite de nos urgences. Je vous souhaite un bon week-end et une belle semaine. Bonne soirée !
La séance est levée à 20h.