République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 3 juin 2021 à 20h30
2e législature - 4e année - 1re session - 7e séance
M 2593-A
Débat
Le président. Nous passons à la M 2593-A, objet classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Souheil Sayegh à qui je donne la parole.
M. Souheil Sayegh (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport s'est penchée sur cette proposition de motion rafraîchissante «pour des horaires d'accès aux piscines genevoises qui correspondent aux besoins de la population». Ce texte invite le Conseil d'Etat, «dans les lieux subventionnés par l'Etat, à intégrer dans l'évaluation du contrat de prestations les horaires et l'extension de l'offre; à soutenir techniquement les communes qui s'engagent pour ouvrir les piscines extérieures annuellement».
Nous l'avons appris durant les travaux de la commission, la natation est le deuxième sport le plus pratiqué à Genève et il est vrai que cette activité est facile d'accès: sauf si vous ne savez pas nager, la natation est un sport dont on ne peut que vanter les mérites ! Quand on leur pose la question, 53% des nageurs estiment toutefois que l'offre en infrastructures est insuffisante - en tout cas l'hiver. C'est vrai qu'avec l'hiver qui se prolonge comme on l'a vu ces derniers temps, les nageurs sont bien en peine de trouver une eau qui leur soit agréable !
Ce texte demande qu'un partenariat soit engagé pour élargir l'offre et les horaires dans les lieux subventionnés. Il s'avère que Genève-Plage est aujourd'hui le seul lieu subventionné par le canton, lié par un contrat de prestations et non par un marché public à mettre au concours. L'Etat doit encourager les communes qui s'engagent à ouvrir les piscines à l'année et il doit mettre en place le concept d'un abonnement valable dans toutes les infrastructures du canton. Pour l'exemple, on apprendra qu'à Berne, l'accès à la plus grande piscine de Suisse est gratuit ! Et je sais que vous vous posez toutes et tous la question pour Bâle-Ville, mais j'attends encore les informations concernant l'accès aux piscines de ce canton !
L'objet visé par la proposition de motion est le contrat de prestations de 750 000 francs par année pour une ouverture de seulement quatre mois pour Genève-Plage. Vous apprendrez encore, pour les personnes qui nous écoutent aujourd'hui derrière leur télévision, que la température cible pour nager de manière agréable est comprise entre 24 et 28 degrés. (Commentaires.) Genève-Plage fonctionne avec un système de pompe à chaleur, et cette pompe à chaleur ne fonctionne que si la température du lac est supérieure à 8 degrés - ce qui rend de facto impossible la nage toute l'année à Genève-Plage.
Quelques faits encore: jusqu'au 15 septembre, la température de l'eau est aux environs de 28 degrés. Divers scénarios ont été évoqués pour envisager de transformer Genève-Plage: les coûts vont de 1,2 million de francs pour l'installation d'une couverture chauffante à 8 à 9 millions de francs pour transformer Genève-Plage en un lieu accessible toute l'année. Des sondages étaient prévus, mais un virus s'est invité dans leur planification et tout a été reporté, probablement à cet été ou au suivant.
Tout ceci pour vous dire qu'au fil des auditions, cette proposition de motion s'est transformée et, pour finir, a été amendée: son titre a été modifié...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Souheil Sayegh. Le titre est devenu «pour un accès aux piscines genevoises qui corresponde aux besoins de la population» et le texte invite désormais à «poursuivre l'élargissement des horaires et de l'accès aux piscines» et à «garantir une non-discrimination tarifaire et d'accès» pour ces piscines. A la suite de ses travaux, la majorité de la commission vous recommande de donner un accueil favorable à cette proposition de motion.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons auditionné beaucoup d'entités qui sont venues nous expliquer les problèmes existants. Les piscines relèvent quand même avant tout de compétences communales. Lors des discussions, il a été question d'égalité tarifaire entre les communes, mais le problème est que Meyrin n'a pas les mêmes moyens financiers que Vernier, par exemple ! Meyrin a la chance d'avoir un casino qui verse 5 à 6 millions de francs dans la corbeille: c'est plus facile pour proposer des tarifs réduits aux communiers ! D'autres communes sont plutôt les parents pauvres. On ne peut donc pas instaurer une forme de discrimination en instaurant une égalité tarifaire.
Il faut encore relever que beaucoup de piscines ne sont pas accessibles car elles sont utilisées par les écoles; or, les communes n'ont pas le personnel suffisant pour les ouvrir à leurs communiers en dehors des horaires scolaires. C'est un véritable problème !
Un amendement socialiste a un peu transformé le texte mais le groupe UDC n'était pas extrêmement chaud pour cette proposition de motion et il l'a donc refusée en commission. Par conséquent, nous refuserons cet objet ici.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rappelle juste que le port du masque est obligatoire en tout temps au sein de cette salle. Madame Natacha Buffet-Desfayes, c'est à vous.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Merci, Monsieur le président. L'intention de la motion traitée est bonne: à savoir, élargir les horaires d'accès aux piscines, ce qui était le but premier de ce texte. Après de nombreuses auditions, nous avons pu établir un bilan, sachant que des essais sont menés pour essayer d'améliorer les choses: des sondages sont effectués auprès des usagers et les améliorations sont constantes puisque cela répond à un besoin prépondérant de la population qui a envie d'aller se baigner autant que possible dans les piscines et, donc, d'avoir accès facilement à ces piscines. Le problème a déjà été soulevé par mon préopinant: c'est que le texte a été modifié au fur et à mesure, si bien qu'on a maintenant affaire à une proposition de motion dont le titre a changé et qui prévoit une forme d'ingérence du canton dans la gestion communale des infrastructures sportives. Je le rappelle, en matière de répartition des tâches entre canton et communes, on sait que ce sont d'abord les communes qui s'occupent de leurs infrastructures sportives et qui peuvent répondre le plus directement aux besoins de leur population. Toutes ces raisons nous ont poussés à nous opposer à ce texte puisque, comme je l'ai dit, il faut faire confiance aux communes.
J'aurais envie de terminer avec une boutade: faisons surtout confiance à la magistrate responsable des sports en Ville de Genève ! C'est là que nous avons le plus de piscines et d'infrastructures concernées par cette question - avec une magistrate que je sais être PDC !
M. Alberto Velasco (S). Monsieur le président, cette proposition de motion est très importante. Contrairement à ce qu'on pense, ce canton compte énormément de piscines: pratiquement chaque commune en a une. Malheureusement, ces piscines ne fonctionnent que quatre mois par année ! On investit des dizaines de millions de francs pour un fonctionnement de quatre mois par année !
Deuxième élément, même en été, ces piscines n'ouvrent qu'à 9h, certaines à 10h, mais les gens qui vont travailler aimeraient peut-être bien aller nager à 7h, par exemple ! Aujourd'hui, il n'y a que deux bassins dans le canton - Carouge et Lancy - qui permettent aux travailleurs et travailleuses de nager avant 9h, et ces créneaux horaires sont remplis. De nos jours, les gens ne vont pas à la piscine simplement pour se rafraîchir comme avant, mais ils y vont pour faire du sport. Malheureusement, aujourd'hui, ces infrastructures ne sont pas bien utilisées. Cela étant, je récuse totalement ce que dit le PLR: cette proposition de motion ne s'immisce pas dans les prérogatives des communes, elle incite les communes ! C'est le but du Grand Conseil et du canton d'inciter les communes à faire en sorte d'élargir les horaires. Surtout, qu'on puisse nager toute l'année, comme c'est le cas en Suisse allemande ! C'est aujourd'hui une nécessité: la pratique de la nage est fondamentale pour la santé et le bien-être des citoyens.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs, je vous invite, s'il vous plaît, à voter cette proposition de motion. (Applaudissements.)
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Monsieur le président, nous avons mené plusieurs auditions sur cet objet. Durant l'une d'entre elles en particulier, il nous a été rappelé que la gestion des infrastructures sportives est de la responsabilité exclusive des communes: je pense que c'est important de le relever ! Ensuite, il nous a été redit que le rôle du canton est de soutenir lesdites communes dans la planification et l'aménagement. Les objectifs de la première invite de ce texte sont donc déjà remplis.
La deuxième invite demande de convaincre les communes d'élargir les horaires des piscines et de garantir une non-discrimination tarifaire, mais je pense que ce n'est pas au canton d'aller se mêler de ce qui se passe dans les communes. Comme l'a dit mon prédécesseur, M. Ivanov, ce n'est pas au canton d'aller réclamer auprès des communes pour les convaincre de modifier leurs tarifs ou leurs horaires d'ouverture ! Le groupe MCG refusera cette proposition de motion, je vous remercie.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, pour des raisons énergétiques, les Verts n'étaient pas en faveur de la proposition initiale de motion qui demandait au Conseil d'Etat de soutenir techniquement les communes qui s'engagent pour ouvrir les piscines extérieures annuellement. Nous étions également sceptiques quant à la première invite dans sa forme initiale, qui demandait d'intégrer dans l'évaluation du contrat de prestations les horaires et l'extension de l'offre, dans les lieux subventionnés par l'Etat. Heureusement, le travail de commission a permis d'arriver à un compromis grâce à deux amendements socialistes.
Le plan directeur des équipements sportifs 2017-2030 du service d'urbanisme et du service des sports de la Ville de Genève dénonce un manque criant d'espaces aquatiques: 53% des Genevois estiment que l'offre est insuffisante. Nous savons depuis longtemps que les piscines intérieures sont saturées, notamment aux heures de pointe. Les limitations covid ont encore empiré la situation, apparentant la visite d'un bassin intérieur à un véritable parcours du combattant. Selon nous, le simple élargissement des horaires d'accès permettrait de résoudre - simplement - ce problème et de donner ainsi accès à la pratique de la natation à un plus grand nombre, cela sans empiéter sur l'autonomie des communes puisque l'invite ne demande au Conseil d'Etat que de convaincre les communes de cette mesure.
Le fait d'identifier, en collaboration avec les communes, des sites pour la création de nouveaux bassins fermés en fonction des zones géographiques et des besoins de la population ne nous semble pas non plus empiéter sur l'autonomie des communes et permettrait d'avoir une vue d'ensemble plus cohérente en considérant des zones géographiques plus larges que les frontières communales. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous encourageons à voter en faveur de cette proposition de motion telle qu'amendée en commission.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture - et du sport ! On y parle très peu de culture, de sport pratiquement jamais ! Pour une fois qu'on a une proposition de motion qui parle un peu de sport et que cette commission l'a acceptée par huit voix contre sept... Torpillons-la ! C'était trop beau, faut pas rêver ! Je rappelle quand même qu'il s'agit d'un texte PDC bienvenu. Effectivement, la natation est un sport populaire, beaucoup plus écologique et moins cher que le hockey sur glace ! Il est tout à fait légitime de vouloir encourager la population à nager et donc d'avoir des infrastructures qui correspondent à cette attente. C'est une proposition de motion, faisons quelque chose, la population attend !
Ça a été dit, il me semble que ce texte a déjà été amendé - intelligemment - avec un titre bien meilleur. Il n'a peut-être plus la portée et l'ambition initiales, mais donnons pour une fois dans ce parlement un signe en faveur du sport, simplement ! Même si, sur le fond, je suis d'accord avec mon collègue Velasco, je suis quand même un peu obligé de m'inscrire en faux quand il parle du nombre important de piscines à Genève. Quelqu'un faisait aussi référence à Mme Marie Chappuis pour la Ville de Genève, à qui je fais totalement confiance, mais il faut savoir ce qu'on veut: est-ce que le canton veut faire quelque chose pour le sport - ou pas ? En ville de Genève, sauf erreur, il y a une piscine - une pour 250 000 habitants ! - avec une longueur de cinquante mètres, c'est tout ! Est-ce que c'est vraiment du luxe, les Vernets ? Varembé, c'est trente-trois mètres ou vingt-cinq mètres ! On a parlé des écoles, mais de nombreuses écoles ne disposent pas de piscine ou, plutôt, des classes n'ont pas accès à une piscine simplement parce qu'il n'y en a pas dans le périmètre. Il y a donc vraiment quelque chose à faire ! Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche vous encourage à voter cette proposition de motion pour faire un pas dans la direction des attentes légitimes de la population en matière de sports et de santé publique.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à M. le député Emmanuel Deonna pour une minute trente.
M. Emmanuel Deonna (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on sait qu'avec la course à pied et la randonnée, la natation est le sport le plus apprécié des Suisses. Comme l'a mentionné le rapporteur PDC, 53% des nageurs réguliers interrogés disent que l'offre actuelle dans le canton est insuffisante. Les villes de Carouge, Lancy et Genève sont les seules communes à garantir des ouvertures prolongées et précoces. Les communes n'ont pas le personnel suffisant pour ouvrir leurs piscines en dehors des horaires scolaires. Cette proposition de motion a donc le mérite d'encourager un partenariat général pour élargir l'offre et améliorer les horaires d'accès aux bassins. Il faut encourager les communes qui s'engagent pour le sport et aussi, dans l'idéal, pouvoir offrir un accès unique à toutes les infrastructures de toutes les communes du canton.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à M. le député Bertrand Buchs pour deux minutes trente et une.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. J'aimerais rappeler ici l'importance de la natation pour la santé publique. Il est donc primordial que le canton agisse en faveur du sport, mais aussi pour la santé publique: la natation est un des meilleurs sports pour la prévention des problèmes ostéo-articulaires et de plus en plus de personnes ont besoin d'aller nager. Je rappelle que durant la pandémie du covid, la plupart ou la totalité des piscines ont été fermées et on a remarqué une augmentation des problèmes ostéo-articulaires à cause de cette fermeture.
La question n'est pas que le canton donne le «la» ou non, mais il est essentiel que le canton dise et redise que les piscines sont importantes pour la santé de la population. Il faut plus de bassins qu'actuellement: c'est un sujet essentiel qui ne doit pas être négligé !
Donc, pour une fois qu'on propose quelque chose qui est important pour la santé publique et qu'on fait de la prévention, eh bien, il faut l'accepter et non pas se réfugier derrière des histoires opposant les communes au canton ou l'inverse. On doit tous tirer à la même corde, les piscines sont essentielles ! Je vous demande d'aller nager une fois par semaine quarante-cinq minutes et vous n'aurez aucun problème de santé ostéo-articulaire: plus besoin d'aller voir votre médecin ! (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Monsieur le président, j'aimerais rassurer certains députés: le canton est extrêmement attaché à la question du sport ainsi qu'à celle de la santé. D'ailleurs, M. Apothéloz n'a pas manqué d'avoir des contacts avec les diverses communes pour faire en sorte que les piscines puissent être ouvertes. C'est vrai, nous avons malheureusement bénéficié d'un contexte un peu particulier qui n'a pas permis les ouvertures de la façon souhaitée, mais soyez assurés que le canton est très attaché au fait que la population puisse bénéficier de bassins; il prend langue régulièrement avec les diverses communes à ce sujet.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'est plus demandée, j'invite l'assemblée à se prononcer sur cet objet.
Mise aux voix, la motion 2593 (nouvel intitulé) est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 49 oui contre 42 non.