République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 novembre 2020 à 14h
2e législature - 3e année - 7e session - 37e séance
PL 12751-A
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous commençons notre séance des extraits avec le PL 12751-A. Le rapport est de Mme Francine de Planta... (Un instant s'écoule.) ...à qui je passe la parole.
Mme Francine de Planta (PLR), rapporteuse. J'attendais que vous me la donniez ! Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous expliquer en quelques mots, car nous sommes aux extraits, pourquoi la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport a demandé l'ajout de cet objet à notre ordre du jour.
Le PL 12751, qui a été traité en commission le 11 novembre dernier, confère une base légale à une première ordonnance covid de la Confédération dans le secteur de la culture afin de mettre à disposition pour l'année 2020 32,4 millions, répartis pour moitié entre la Confédération et le canton - soit 16,2 millions pour ce dernier.
Ce crédit supplémentaire, Mesdames et Messieurs, est évidemment le bienvenu dans la situation que nous connaissons. Il a déjà permis de répondre à quelque 560 demandes, et les remboursements ont d'ores et déjà commencé. L'ordonnance en question est valable jusqu'au 31 octobre et un nouveau guichet a été ouvert pour les mois de novembre et décembre, avec une dotation de 3,8 millions supplémentaires de la part de la Confédération. Pour l'année 2021, un montant de 22 millions est porté au budget - à nouveau partagé pour moitié entre le canton et la Confédération - mais ce n'est pas l'objet du présent projet de loi.
J'ai envie d'ajouter que le seul bémol de cette ordonnance, c'est qu'elle exclut certains secteurs, tels que les fondations de droit public, le domaine du livre, les galeries d'art et les cours de musique, ce qui est assez pénalisant. En effet, pour vous donner un exemple, le Grand Théâtre de Genève notamment est une fondation de droit public, ce qui n'est pas le cas de celui de Zurich, qui est pour sa part constitué en société anonyme.
Pour répondre à ces exclus, le Conseil d'Etat a prévu un financement quadripartite, partagé entre la Loterie romande, l'ACG, la Ville de Genève et le canton, mais il ne s'agit bien entendu que d'un coup de pouce, et il n'est pas suffisant.
Cela étant, il faut évidemment accepter le présent projet de loi - qui répond déjà dans l'immédiat à des demandes pressantes - comme vous le recommande l'ensemble de la commission. Je vous remercie.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la rapporteuse a dit l'essentiel. Je voulais juste insister sur le fait que ce projet de loi assure effectivement une base légale à court terme, mais qu'il y a une véritable urgence à répondre aux besoins des actrices et acteurs culturels touchés par la crise sanitaire.
La commission - dont j'ai présidé la séance consacrée à cet objet - a voté à l'unanimité ce projet de loi et espère, comme l'a mentionné la rapporteuse, que notre plénum en fera de même. Je vous remercie.
M. Grégoire Carasso (S). Chers collègues, dans le cadre des quelques secondes que durera l'intervention du groupe socialiste, j'aimerais naturellement vous inviter à voter cet objet avec la même unanimité qu'en commission, mais aussi et surtout mettre en lumière les oubliés ou plutôt les exclus de l'ordonnance fédérale dans laquelle s'insère ce projet de loi. Certaines institutions ont été mentionnées, mais je voudrais, au nom du groupe socialiste, mettre en évidence le sort tragique réservé à plusieurs domaines, tels que l'art contemporain ou les arts visuels. De manière transversale, les petits indépendants, les acteurs et actrices culturels ayant des mandats à durée déterminée sont les exclus de cette ordonnance. Alors que nous sommes au milieu de la deuxième vague et que la troisième se profile malheureusement à l'horizon, nous attendons du Conseil d'Etat des mesures énergiques et déterminées permettant de resserrer les mailles du filet social afin de sauver les artistes aujourd'hui abandonnés et d'éviter, chers collègues, une terrible asphyxie culturelle. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, on l'a rappelé, ce projet de loi a été accepté à l'unanimité par la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport. Ce texte vise simplement à mettre en oeuvre une ordonnance fédérale covid culture, et notre groupe, comme en commission, va le soutenir.
Je me permets cependant de souligner certains manquements de la loi, que le Conseil d'Etat lui-même a reconnus lors de sa présentation en commission. Certains secteurs sont mis de côté, comme les fondations de droit public, le domaine du livre, les galeries d'art et les cours de musique, mais le Conseil d'Etat nous a assuré qu'un mécanisme de financement était déjà en marche pour donner un coup de main à ces milieux.
En plus de ces exclus, il y a les artistes en tant qu'individus, qui n'ont pas de statut et ne sont pas déclarés en tant qu'indépendants, mais qui exercent pourtant une activité professionnelle dans le domaine de la culture, en particulier de l'art contemporain. Ce point-là n'a pas été abordé lors de notre discussion en commission. A ce propos, nous avons entendu avant-hier la lecture d'un courrier rédigé par le collectif d'artistes «Je n'y ai pas droit», lequel dénonce à juste titre le fait que certains acteurs du milieu - qui a priori remplissent pourtant les conditions de l'article 3 du PL 12751, dans la mesure où ils sont actifs dans le domaine de la culture - se sont vu refuser leur demande de soutien auprès de l'Etat, et ce depuis le début de la pandémie.
Aujourd'hui, ce sont ces individus qui, de manière générale, même avant la pandémie, sont les plus précarisés. Ils demandent un statut d'artiste depuis plusieurs années et enchaînent les tables rondes et les réunions avec les autorités. Ils s'entendent promettre des améliorations mais au final n'obtiennent rien, même au milieu d'une crise, alors que le domaine de la culture fait partie des plus touchés.
Nous attendons donc de la part du Conseil d'Etat de véritables mesures pour toutes ces personnes qui sont dans le besoin, dans une grande précarité, et qui souvent - on l'a également dit en commission - demandent de petits montants, parce que ce sont les sommes avec lesquelles elles sont habituées à fonctionner. Je vous remercie.
M. Patrick Dimier (MCG). Juste pour reprendre ce qui a été dit à l'instant, ce projet de loi n'est certes pas parfait, on vient de l'entendre de la part de notre collègue Katia Leonelli, mais en réalité - et le centre ne me contredira pas - ce texte est fait pour combler «des failles»... (Exclamations.)
Je voulais également relever que la culture est ce qui reste quand on a tout perdu. Veillons donc à ne pas tout perdre et à protéger la culture ! Un jour, quelqu'un a demandé à quoi servait Mozart. Réponse: à pas grand-chose, pour ceux qui sont sourds... Merci. (Commentaires.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'aimerais commencer par vous remercier, tout d'abord de la rapidité avec laquelle vous avez traité ce projet de loi, qui vise à ancrer une base légale - Mme la rapporteure l'a rappelé - suite à l'ordonnance 1 du Conseil fédéral. En effet, contrairement à ce qui a été dit, il s'agit d'une décision non pas du Conseil d'Etat, mais bien du Conseil fédéral; c'est lui qui a décidé d'exclure un certain nombre d'actrices et d'acteurs culturels. Nous tentons, avec l'ordonnance 2, de compléter ce dispositif fédéral par certaines mesures, lesquelles ont pour but de réduire le nombre de personnes qui ne pourraient pas obtenir des financements de la part de la Confédération et du canton. Fort heureusement, dans le cadre de la deuxième ordonnance, le Conseil fédéral laisse une petite marge de manoeuvre aux cantons pour qu'ils puissent prévoir ici et là des améliorations notables, entre autres, on l'a dit, dans le domaine de l'art contemporain, du financement des cours privés de musique, et dans d'autres secteurs encore.
Je remercie Mme la rapporteure d'avoir réussi la mission qui lui a été confiée par la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport. Il s'agissait pour elle de vous présenter ce rapport de façon qu'une décision soit prise cet après-midi. J'adresse également mes remerciements aux collaboratrices et collaborateurs de l'office cantonal de la culture et du sport qui, depuis le mois de mars, consacrent leur entière activité à la gestion des 560 demandes que nous avons reçues. Tout le quotidien a été laissé de côté pour permettre d'une part que les futurs bénéficiaires obtiennent une réponse et d'autre part que l'argent leur soit versé.
On l'a mentionné, ce texte vise à assurer une base légale pour l'année 2020 dans le cadre de l'ordonnance fédérale 1 et d'une partie de l'ordonnance fédérale 2. Je reviendrai avec un autre projet de loi concernant l'année 2021, dès lors que le Conseil d'Etat l'aura approuvé, bien entendu.
J'aimerais encore ajouter quelques éléments. Vous appelez de vos voeux un certain nombre de mesures énergiques, et nous les avons prises dans deux domaines. Il s'agit d'abord des secteurs qui se trouvent en dehors du périmètre de l'ordonnance fédérale 1. Je pense aux fondations de droit public - on a cité le Grand Théâtre, mais il y a aussi par exemple le Musée d'art moderne et contemporain de notre canton - le but étant que nous puissions permettre aux galeries qui soutiennent les artistes genevoises et genevois d'obtenir également une aide financière bienvenue. C'est ensuite le cas dans le domaine du livre. Pour cela, nous avons réparti le financement entre quatre entités: l'Association des communes genevoises, le Fonds genevois de répartition des bénéfices de la Loterie romande, la Ville de Genève et bien sûr le canton.
Je voudrais maintenant vous dire deux mots au sujet des artistes et de celles et ceux qui vous ont fait parvenir ce courrier. Nous les avons déjà reçus deux fois, et je les recevrai à nouveau le 15 décembre prochain. Les demandes qu'ils formulent sont de deux ordres. La première consiste en l'obtention d'un statut, qui pour l'instant n'existe pas. En effet, ils ne sont pas indépendants, ils ne sont pas au bénéfice d'une quelconque aide, et cela pose évidemment problème. La création d'un statut est une problématique qui doit bien sûr être traitée au niveau fédéral, mais nous avons déjà saisi le conseiller fédéral Alain Berset à ce propos. Il a rencontré il y a quinze jours l'ensemble des faîtières, qui ont fait remonter la nécessité d'une réflexion et d'un ancrage légal permettant à ces artistes de bénéficier d'une structure. Nous y travaillons également sur le plan cantonal, avec la Ville de Genève.
Le deuxième train de mesures que nous avons à l'égard des artistes consiste en la création d'un fonds d'urgence de soutien immédiat. Il y a désormais de bonnes perspectives, que j'aurai l'occasion de présenter très prochainement à l'intention du Conseil d'Etat d'une part, et des artistes d'autre part. Les mesures sont donc là, présentes, concrètes, pour que l'on relève ce défi.
Je vous remercie également du précieux appui que vous apportez à ce domaine qui souffre énormément de la situation: votre soutien financier, bien entendu, mais aussi politique est absolument nécessaire.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je lance le vote sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12751 est adopté en premier débat par 63 oui et 2 abstentions.
Le projet de loi 12751 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12751 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui (unanimité des votants).