République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 28 février 2020 à 18h10
2e législature - 2e année - 10e session - 56e séance
M 2376-A
Débat
Le président. Nous poursuivons nos travaux avec la M 2376-A, classée en catégorie II, quarante minutes. Je cède ma place à la deuxième vice-présidente.
Présidence de Mme Salima Moyard, deuxième vice-présidente
La présidente. Et je passe immédiatement la parole à Mme Patricia Bidaux.
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente de séance. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la commission de l'enseignement a souhaité travailler sur deux propositions de motions en parallèle, la M 2328 déposée par les Verts en 2016 et la M 2376 déposée par le PLR en 2017, ces deux textes traitant du même sujet.
En novembre 2018, le groupe des Verts retirait la M 2328. En 2015, la M 2151 avait déjà entraîné de vifs débats au sein de cette assemblée et elle avait été balayée avant même d'être étudiée par la commission de l'enseignement. Cela démontre qu'aborder l'organisation des vacances scolaires n'est pas sans risques, tant les avis diffèrent, notamment sur les conséquences pouvant bouleverser non seulement les rythmes scolaires, mais inévitablement aussi le rythme de la société en général. Cependant, cette noble assemblée a choisi d'ouvrir la boîte de Pandore en donnant mission à la commission de l'enseignement d'étudier les deux objets.
Grâce à la M 2376 qui vous est présentée amendée, la majorité a pris en compte les difficultés d'apprentissage engendrées notamment par la durée de l'écart entre les vacances de Pâques et les vacances d'été ainsi que les besoins des enfants et des familles, éléments soulevés par l'étude du DIP à ce sujet. La commission, grâce aux auditions, a entendu les parents concernés par le rythme des vacances scolaires. Si, in fine, il y a une demande de refonte totale, cela aussi de la part des associations d'enseignants et de leurs porte-parole, la motion permettra, si vous l'acceptez, un début de remise en question du rythme scolaire.
Le texte ne demande pas un changement absolu; il vise à la mise en place d'une meilleure répartition durant le dernier trimestre de l'année scolaire, avec des vacances maintenant le lien avec les fêtes de Pâques en aval et augmentant les jours de congé en amont, soit des vacances débutant le vendredi saint et s'étendant sur les deux semaines suivantes. S'ajoute encore durant ce trimestre le vendredi du pont de l'Ascension. Pour ce faire et pour ne pas diminuer le nombre de jours d'enseignement, il est proposé de réduire les vacances d'été d'une semaine. Effectivement, selon la date de Pâques, l'écart entre le congé pascal et les vacances d'été peut atteindre treize semaines. L'ajout d'un vendredi de congé pour un pont lors du Jeûne genevois faisait partie au départ des demandes de la M 2376 du groupe PLR et cela imposerait tout simplement au département d'offrir ce congé aux enseignants.
La majorité - composée de 3 PLR, 3 socialistes, 2 PDC, 1 UDC et 2 MCG - a accepté l'amendement qui proposait justement de ne pas offrir de pont au moment du Jeûne genevois, tout en maintenant celui de l'Ascension et en rallongeant les vacances de Pâques. Comme je le disais, cela permet de garder le nombre de jours de vacances total sur l'année scolaire, mais surtout - et c'est une priorité tout de même - de maintenir le nombre de jours scolarisés. Je pense que nous reviendrons plus tard sur l'amendement proposé par M. le député Murat Alder, qui nous est parvenu hier.
Ce qui vous est proposé n'augmente pas les coûts de l'école: le nombre d'heures d'enseignement reste identique et les vacances d'été de sept semaines sont maintenues - ce qui demande certes un changement d'habitudes.
Parler de changement climatique et utiliser les températures en août comme argument pour réfuter la faisabilité des invites de la proposition de motion n'est pas justifié par les statistiques. Effectivement, les températures mesurées au mois d'août ne sont pas comparables à celles vraiment élevées du mois de juillet. Pour 2019, elles sont même à peine plus hautes que celles du mois de juin - je tiens le tableau des mesures des températures moyennes cantonales mois par mois depuis 2017 à disposition de M. le député Baud, rapporteur de minorité, vous transmettrez, Madame la présidente.
Mesdames les députées et Messieurs les députés, en acceptant cet objet, vous avez la possibilité d'initier une réflexion plus large de la part du Conseil d'Etat. La majorité de la commission vous encourage donc à accepter cette proposition de motion telle qu'amendée par la commission. Je le rappelle, cela ne coûtera rien de plus au canton et permet de maintenir le nombre de jours d'enseignement et de jours de vacances prévus.
M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, la question des vacances scolaires est un serpent de mer; ça revient souvent, tout le monde a de bonnes idées. C'est un peu comme pour l'horaire scolaire, tout le monde a de bonnes idées, mais une fois qu'on a tout tenté, tout essayé, on constate qu'en bougeant une chose, tout le reste bouge et, pour finir, la solution est de revenir au point de départ.
Pourquoi s'opposer à des vacances de Pâques plus longues et à des ponts supplémentaires ? Essentiellement parce que les vacances d'été seraient en conséquence amputées d'une semaine en août, ce que le titre de la proposition de motion s'abstient précisément de mentionner. Il ne s'agit pas juste de mettre en place des vacances plus longues; non, il s'agit de rétrécir celles d'été ! Or, Mesdames et Messieurs les députés, l'enquête du SRED montre que la majorité des parents - 57% - ne désire pas une diminution de la pause estivale ; les familles sont même satisfaites à 81% de la répartition actuelle des congés scolaires. Cette enquête est récente, elle a été conduite en 2016, justement à un moment assez crucial, quand la période d'enseignement de fin d'année scolaire a duré treize semaines, ce qui était assez exceptionnel. C'est long, c'est vrai, et on aurait pu penser que ça aurait justement pu influencer les familles. Eh bien non ! Ça rejoint l'enquête du GAPP - le groupement des associations de parents d'élèves, qui s'appelle maintenant la FAPEO - qui présupposait que les familles voulaient diminuer la durée des vacances scolaires d'été. Or, sur les 8629 réponses reçues, 67,4% des parents rejetaient la réduction des vacances d'été.
Mesdames et Messieurs les députés, changer quelque chose, c'est prendre le risque de tout chambouler: en 1976 déjà, une semaine de congé avait été enlevée en été. Avant, on commençait début septembre; maintenant, fin août. Plus aucune rentrée scolaire n'a lieu au mois de septembre. Si on enlève encore une semaine, les écoliers feront leur rentrée scolaire à la mi-août. J'ai cru comprendre qu'il y avait une urgence, avec le réchauffement climatique, etc. Si c'est pour ouvrir les écoles mi-août, en pleine canicule, quand il fait 40 degrés dans les classes, et les fermer ensuite parce que ce n'est pas tenable, je ne vois pas très bien ce qu'on aura gagné !
Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche vous recommande donc la prudence: jusqu'à présent, ces vacances satisfont la grande majorité. Ne bougeons pas, laissons les vacances telles qu'elles sont. Huit semaines en été, ce n'est ni trop ni trop peu; ça permet de faire beaucoup de choses, notamment l'entretien des bâtiments. C'est court, mais ce n'est pas négligeable quand on voit l'état des écoles de notre canton.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de deuxième minorité. Madame la présidente de séance, Mesdames et Messieurs les députés, pour nous, les Verts et les Vertes, le compromis voté par la commission est minimaliste, même si cela va dans le bon sens. En effet, il arrive certaines années, comme en 2016, que le troisième trimestre dure plus de treize semaines, menant à une fatigue généralisée des élèves et du corps enseignant. C'est la raison pour laquelle les Vertes avaient déposé une proposition de motion Verte, la M 2328, «Des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques». Le titre est explicite et cette motion invitait le Conseil d'Etat, dans la perspective de mieux répartir les périodes de travail et de repos, à fixer une semaine de vacances scolaires au printemps découplée de la date fluctuante des fêtes de Pâques.
La question du calendrier scolaire est centrale car elle influence toute notre société. En effet, les adultes se calquent sur le système scolaire pour organiser son fonctionnement. Or, à Genève, les dernières modifications des vacances scolaires datent de 1976: il y a quarante-trois ans ! Pour les Vertes, une telle réflexion aurait nécessité une large consultation et non une petite enquête sur un panel étroit de parents avec des questions orientées. Mais très peu a été fait et aucun débat incluant la population n'a eu lieu hormis à la commission de l'enseignement. Le DIP a préféré choisir l'option inverse, à savoir attendre la décision de ce plénum, puis éventuellement ouvrir une large consultation en fonction du vote. Mais, une fois le vote accompli, à quoi bon consulter ? Voilà le premier non-sens que nous, les Vertes, souhaitions mettre en avant.
C'est aussi l'une des raisons qui ont poussé les Vertes à retirer la M 2328 afin de lancer un signal au département et à la commission et de marquer un temps d'arrêt pour mener à bien cette démarche de consultation et de débat public cruciale à nos yeux.
Les enjeux touchent la société dans son ensemble, mais prioritairement les élèves et en particulier leurs besoins ainsi que les rythmes d'apprentissage. L'école inclusive en fait partie. La vision Verte de l'école est de répondre aux besoins des enfants. Or, la M 2376 sur laquelle nous nous penchons ce soir satisfait une catégorie de parents d'élèves qui souhaitent notamment faire des ponts et partir en vacances. Selon nous, cette motion ne répond pas à certaines recherches scientifiques qui préconisent entre autres des rythmes d'apprentissage réguliers: huit semaines d'apprentissage, deux semaines de vacances, huit semaines d'apprentissage, deux semaines de vacances, etc. Ce texte ne répond pas non plus aux demandes des associations de parents d'élèves de l'enseignement obligatoire et postobligatoire. La M 2376 n'offrira pas non plus le pont du Jeûne genevois.
En conclusion, les Vertes sont insatisfaites parce que cette proposition ne va pas jusqu'au bout du raisonnement et ne prend en considération ni nos demandes réitérées en matière de consultation large, ni les besoins des élèves, ni ceux des enseignants, ni les études sur la chronobiologie et la chronopsychologie, ni les revendications des associations de parents d'élèves depuis des années, ni les revendications des fédérations d'associations d'enseignants depuis des années, ni l'école inclusive, ni la question de l'adaptation des loisirs, etc.
Mesdames et Messieurs, suite aux auditions et aux discussions internes, une partie des Vertes vous recommande donc de refuser cette motion afin d'organiser une consultation générale auprès de la population: que chacune et chacun puisse participer à un dialogue constructif et fondamental pour nos enfants et nos jeunes. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Madame la présidente, ce débat frise le ridicule ! On cherche des problèmes là où il n'y en a pas. Je l'ai dit à maintes reprises, à chaque fois qu'on a abordé cette question, et je le redis volontiers ici: s'il y a bien un sujet sur lequel il n'y a pas de problème à l'école, c'est celui des vacances scolaires ! On peut dire tout ce qu'on veut sur le DIP, mais il n'y a jamais eu de problème par rapport aux vacances, les études le démontrent. Madame la conseillère d'Etat, vous connaissez très bien ces études, elles datent du temps où j'étais encore à la commission de l'enseignement. (Commentaire.) Même la plus récente que vous pouvez avoir sous le coude le démontre: la majorité des familles est satisfaite du système actuel. Alors pourquoi vouloir en changer ? C'est un peu la question qu'on s'est posée au caucus en étudiant cet objet. Finalement, on veut réinventer la roue et tout chambouler à chaque fois. Peut-être que ça tombe bien, avec le changement climatique, mais nous passerons bientôt nos vacances d'été à Noël et ainsi de suite à force de tout modifier ! Ou on fait comme en France, les vacances à la carte: c'est aussi une possibilité.
La seule vraie question que soulève cette motion est celle des ponts. Effectivement, là-dessus, on aurait pu trouver une autre solution que celle de vouloir tout changer dans les vacances. Une des solutions possibles qui ne coûterait pas grand-chose serait de compenser les quelques ponts annuels avec - je le dis à la louche - cinq à dix minutes de cours de plus par jour. Ça suffirait largement pour donner les ponts et ça ne coûterait pas plus cher puisque le nombre d'heures de cours serait tout à fait identique. Avec dix minutes en plus quotidiennement, l'élève ne voit pas de différence et cela contenterait tout le monde. Pour le reste, qui ne sert strictement à rien, le groupe UDC refusera cette motion et vous invite à faire de même.
M. Grégoire Carasso (S). Quel beau sujet que les vacances scolaires ! En préambule, le groupe socialiste est évidemment favorable au compromis - certes minimaliste, mais c'en est un malgré tout - sorti de commission, et nous appelons de nos voeux la large consultation à laquelle il a été fait référence. C'est une évidence que de modifier les vacances scolaires en passant par la consultation des associations de parents d'élèves et nous avons pleine confiance dans la capacité du DIP à mener cette consultation le moment venu. Oui, c'est un compromis minimaliste, mais qui va dans le bon sens. Je cite la rapporteuse de minorité, qui doit finalement être un peu embarrassée, parce que le statu quo est encore moins confortable par rapport au rythme d'apprentissage des enfants, point qui nous réunit pourtant.
Pourquoi le statu quo est-il moins satisfaisant ? Parce que vous savez bien que Pâques ne tombe pas chaque année à la même date. Pâques tombe le premier dimanche après la pleine lune qui suit l'équinoxe de printemps. (Exclamations.) Autrement dit, au plus tard le 25 avril, ce qui ne pose pas de problème par rapport au rythme d'apprentissage des enfants, mais au plus tôt - cela arrive aussi - le 21 mars. Lorsque les vacances de Pâques tombent tôt, cela signifie que les élèves ont à enchaîner treize semaines de cours, soit trois mois d'école: avril, mai, juin. Vous transmettrez, Madame la présidente de séance, c'est dur pour les élèves !
C'est la raison pour laquelle un compromis échafaudé en commission propose d'étudier l'hypothèse suivante: ôter la dernière semaine des vacances durant l'été. On y gagne cinq jours. Sur ces cinq jours, collons les vacances de Pâques systématiquement après le vendredi saint de sorte que, même quand Pâques tombe tôt, cela fera toujours une semaine de moins sur cette longue période jusqu'aux vacances d'été. Et puis, ce faisant, quatre jours sont mobilisés, le cinquième et dernier jour gagné grâce aux vacances d'été ainsi raccourcies d'une semaine. Eh bien, ce cinquième jour, nous proposons de le placer précisément au milieu de cette période - au moment de l'Ascension dont la date est fonction de celle de Pâques, je ne vous apprends rien ! Placer ce jour de congé ce vendredi-là donne une petite pause bienvenue pour les enfants au milieu de cette période d'apprentissage potentiellement très longue.
Oui, c'est un compromis minimaliste; oui, au-delà de ce compromis, il faudra mener une consultation au terme de ces votes, mais c'est en pensant précisément au rythme d'apprentissage des enfants que le groupe socialiste vous invite à voter le compromis proposé par la commission. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. Murat Julian Alder (PLR). Au nom du groupe PLR, j'aimerais remercier la commission de l'enseignement pour l'accueil semi-favorable réservé à la motion déposée par la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet lorsqu'elle était encore députée dans notre parlement, il y a quelques années. Semi-favorable, vous l'aurez compris, parce que nous ne comprenons pas la justification qu'il y a à faire le pont de l'Ascension mais pas celui du Jeûne genevois. Surtout que si l'on enlève une semaine de vacances en été, cela a pour conséquence d'augmenter l'intervalle séparant la rentrée scolaire de ce fameux week-end du Jeûne genevois, l'une des principales célébrations de notre canton, au cours de laquelle beaucoup de familles aimeraient prendre encore quatre jours de congé avant de rentrer dans le vif du sujet de l'année scolaire.
Le groupe PLR se réjouit de ce compromis, mais ne peut s'en contenter; raison pour laquelle il a déposé un amendement que je vous présenterai tout à l'heure. En substance, la question qui se pose à vous, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, est de savoir si nous voulons les deux ponts et deux semaines à Pâques ou si nous ne voulons qu'un seul pont, deux semaines à Pâques et un jour en plus durant cette même période.
Finalement, c'est ce point que nous devrons trancher, et à ce stade, Mesdames et Messieurs, j'aimerais vous inviter, au nom des libéraux-radicaux, mais aussi des libéraux-radicales et des libérales-radicaux, à entrer en matière sur cette proposition de motion.
Mme Katia Leonelli (Ve). Messieurs les députés, Mesdames les députées, notre groupe s'opposera ou s'abstiendra en partie sur ce texte parce qu'il ne correspond pas à nos souhaits de mettre en place des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques, mais a aussi l'avantage d'améliorer la situation actuelle. Il y a quelques mois, notre groupe a retiré l'excellente proposition de motion qui demandait justement des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques, car le département avait promis aux associations de parents d'élèves et aux associations professionnelles de mener au préalable une large consultation, ce qui permettrait une discussion à grande échelle pour répondre aux besoins et aux souhaits des principaux concernés. L'objectif de notre texte était de fixer deux semaines de congé au milieu de la longue période qui sépare les vacances de février des vacances d'été, cela indépendamment de la date des fêtes pascales. En effet, comme l'a souligné M. Carasso, la date de Pâques varie d'année en année et tombe parfois très tôt, ce qui laisse jusqu'à treize semaines d'enseignement non-stop.
Pour le bien-être des élèves et pour leur assurer de meilleures conditions d'enseignement, nous aurions préféré pouvoir alterner un nombre maximum de semaines de cours - par exemple huit - avec des vacances suffisamment longues pour être reposantes - par exemple deux. Il se trouve que ce texte ne va pas aussi loin que notre idée et ne répond pas aussi bien au rythme d'apprentissage des élèves, mais l'amendement PS voté en commission rend cette motion plus proche de notre idée initiale en proposant que les deux semaines de vacances suivent le vendredi de Pâques pour rendre un peu moins difficiles les années extrêmes où Pâques tombe très tôt dans l'année. Nous n'allons évidemment pas voter l'amendement PLR qui, dans sa substance, revient au texte initial et s'éloigne de notre volonté.
Ce n'est pas une solution idéale, mais c'est déjà mieux que la situation actuelle. Le pont qui suit l'Ascension permettra aussi d'apporter une pause supplémentaire durant cette longue période printanière. Vous l'aurez compris, nous aurions préféré des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques et c'est la raison pour laquelle nous allons à la fois nous abstenir et voter contre ce texte. Dans tous les cas, ce que nous aurions voulu, c'était une large consultation pour avoir une vision globale sur le calendrier scolaire et le considérer comme un ensemble cohérent, et répondre au mieux au rythme d'apprentissage des élèves.
La présidente. Je vous remercie. Je passe la parole à M. Jean Romain.
M. Jean Romain (PLR). Pour combien de temps, Madame la présidente ?
Une voix. Trois heures !
M. Jean Romain. Trois heures, ça va !
La présidente. Pour deux minutes quinze, Monsieur le député.
M. Jean Romain. Merci. Lorsque Pâques tombe très tôt surgissent les récriminations, vous le savez, Madame la présidente. En revanche, lorsque Pâques arrive plus tard, on se claquemure dans un silence compassé parce qu'en fait, ça va pas mal ! (Rire.) Pour nous, parce que ce n'est pas raisonnable, il est hors de question de dissocier les vacances de Pâques de la fête de Pâques. Ça, c'est important: nous devons conserver ce synchronisme ! En touchant aux vacances, on risque la seule chose qui ne va finalement pas si mal avec l'école genevoise: l'école genevoise, on y est très bien quand on n'y est pas ! (Rires.) On risque d'ouvrir une boîte de Pandore, une boîte à problèmes dans laquelle s'engouffrera toute une série de personnes qui se disent que nous devons changer les vacances quelles qu'elles soient. Trente-huit semaines et demie de vacances... (Commentaires.) ...ça semble intouchable - et ça doit l'être, évidemment, vous l'avez compris.
A l'école, je crois que le gros problème, ce sont les huit semaines d'été. Pour une partie des gens, c'est beaucoup trop: j'entends certaines personnes de chez nous qui disent que c'est l'horreur d'occuper nos enfants pendant huit semaines. Pour d'autres, vous vous en souvenez, c'est pas mal, les grandes vacances ! Quel rêve c'était, lorsque nous pouvions partir en grandes vacances, à seize ans, dix-sept ans ou même un peu plus tard ! Je crois que ces grandes vacances sont importantes, et moi, je suis finalement assez favorable à ces huit semaines. (Commentaire.) C'est ça ! En revanche, s'il faut modifier...
La présidente. En revanche, il va falloir conclure, Monsieur le député !
M. Jean Romain. C'est fini ?
Une voix. Vas-y !
La présidente. Je vous ai dit qu'il allait falloir conclure - vous avez encore cinq secondes.
M. Jean Romain. Cinq secondes pour conclure ! Je vous remercie de votre générosité, Madame la présidente de séance ! Pour conclure, je crois qu'on peut évidemment toucher aux vacances, mais il faut faire attention, en y touchant...
La présidente. Terminez votre phrase !
M. Jean Romain. ...de ne pas avoir plus de problèmes que de solutions ! Je vous remercie.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de première minorité, M. Olivier Baud, pour cinquante secondes.
M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, bon, ça m'a amusé d'entendre le député Romain dire qu'il y avait 38,5 semaines de vacances ! Lapsus intéressant. Non, ce sont 38,5 semaines d'enseignement, et les élèves ont 13,5 semaines de vacances.
Au départ de cette proposition de motion, l'idée était de raccourcir la période de cours après les vacances de Pâques jusqu'aux vacances d'été. Elle y répond en partie, mais le problème, je le répète quand même, c'est cette réduction au mois d'août. Le questionnaire date de 2016; on peut faire chaque année des questionnaires du SRED, si vous voulez, et je ne sais pas combien d'études Mme la conseillère d'Etat a encore sous le coude, mais 23% des familles sont très satisfaites de la répartition actuelle, 58% assez satisfaites, 15% peu satisfaites, 4% pas satisfaites.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Olivier Baud. Ah, j'ai encore beaucoup de temps !
La présidente. Absolument !
M. Olivier Baud. C'est un peu compliqué de naviguer comme ça, à vue, sans aucune indication ! J'ai peut-être accéléré inutilement. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de prendre en compte cet avis des familles. C'est l'enquête du SRED, ce n'est pas l'enquête des associations professionnelles ou autres. C'est véritable, ça date de 2016; comme l'a dit M. Romain, qui a un peu confondu les semaines de vacances avec les semaines d'enseignement - mais ce n'est pas grave - il faut veiller à ne pas tout chambouler. Si on change ça, on ne sait pas très bien ce qu'on aura, et je crois sérieusement, pour l'avoir vérifié sur le terrain, que huit semaines pour faire des travaux dans les écoles l'été, c'est très peu ! Parce que le reste du temps, ce n'est pas possible, ça oblige à fermer une école entière; on n'a pas beaucoup de bâtiments libres à Genève. Donc soyons raisonnables, c'est un statu quo, même s'il dure depuis 1976; au fil des ans, de génération en génération, personne ne s'y est opposé frontalement, l'enquête du SRED de 2016 le prouve !
Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Le Conseil d'Etat a eu une position claire au sujet du temps disponible pour faire des travaux dans les écoles: sept semaines sont suffisantes. Notre conseillère d'Etat a clairement dit que c'est possible, je tenais à le souligner.
D'autre part, cette étude sur la modification de la durée des vacances scolaires relève que ce sont les vacances d'été qui seront les plus faciles à organiser pour les familles en cas de diminution. Voilà, je m'en tiendrai là, je garde un peu de temps pour discuter de l'amendement.
La présidente. Si vous souhaitez vous exprimer sur l'amendement, il faut le faire maintenant, Madame la rapporteuse !
Mme Patricia Bidaux. OK, excusez-moi ! Je vais le faire tout de suite. J'ai été surprise de recevoir cet amendement de la part de M. Murat Alder, puisque trois députés PLR ont tout de même accepté le changement. Ça m'étonnait un peu de voir réapparaître la demande de revenir sur le pont du Jeûne genevois. Je rappelle aussi que si on le fait, ce sera un gain pour les enseignants puisqu'il n'y a pas de compensation. Cela veut dire qu'on enlève non seulement un vendredi, mais encore un autre vendredi et, en plus, il n'y aurait pas de compensation sur les heures scolaires ! Si effectivement certains à droite veulent offrir un jour de congé supplémentaire aux enseignants, je les laisserai peser le pour et le contre !
La présidente. Je vous remercie et je passe la parole à M. Murat Alder.
M. Murat Julian Alder (PLR). Merci, Madame la présidente. L'objectif de cet amendement...
La présidente. Je ne passe en fait pas la parole à M. Murat Alder, car ma collègue de gauche me dit que vous n'avez plus de temps de parole.
M. Murat Julian Alder. Mais je peux juste présenter mon amendement ?
La présidente. Vous l'avez fait préalablement, Monsieur le député.
M. Murat Julian Alder. Si vous me laissez juste trente secondes...
La présidente. Je vous rappelle que nous sommes dans un débat unique puisqu'il s'agit d'une motion et non d'un projet de loi; il y a visiblement un peu de flottement chez les rapporteurs aussi; nous avons un seul débat, l'amendement ou les amendements doivent être discutés à ce moment-là. Et vous avez épuisé votre temps de parole !
M. Murat Alder. Ayant été mis en cause par la rapporteure de majorité, je demande trente secondes pour présenter mon amendement. (Exclamations. Rires.)
La présidente. Bien essayé, mais vous n'avez pas été mis en cause ! Je vous remercie de vous asseoir.
M. Murat Julian Alder. Si, si !
La présidente. Non, Monsieur le député ! Je cède très brièvement la parole à M. Olivier Baud.
M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. C'était juste pour dire - j'ai oublié de le faire avant - qu'Ensemble à Gauche vous recommandait de rejeter cet amendement.
La présidente. Merci. Nous arrivons à la fin du débat, je peux passer la parole à Mme la conseillère d'Etat. Madame Anne Emery-Torracinta, vous avez la parole.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. La question des vacances scolaires ne concerne pas que les enseignants et les élèves, mais bien l'ensemble de la société, et on voit combien les débats peuvent être animés à ce sujet. Je rappellerai quelques éléments du contexte pour revenir ensuite sur l'importance du rythme scolaire et ce qu'il faut faire ou pas dans ces cas-là.
Pour le contexte, l'idée de réfléchir aux vacances scolaires ne date pas d'aujourd'hui, elle remonte aux discussions sur le rajout du mercredi matin à l'école primaire. A l'époque, le conseiller d'Etat Charles Beer s'était engagé auprès des associations de parents à proposer une réflexion plus générale sur l'ensemble du calendrier scolaire - et donc des vacances - une fois le mercredi matin en place. J'avais donc été sollicitée par ces mêmes associations de parents et j'avais répondu avec ce fameux sondage auprès des familles. Plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de familles - je ne me le rappelle plus - avaient été interrogées pour savoir s'il fallait changer les vacances scolaires, si elles étaient satisfaites de la situation aujourd'hui, etc. Effectivement, en 2016, environ 80% - ou 70% - des personnes trouvaient que les vacances actuelles étaient satisfaisantes. Par contre, la quasi-totalité des familles interrogées demandaient qu'on discute de la question des deux ponts du Jeûne genevois et de l'Ascension. Ça, c'est la première chose.
Ensuite, deux propositions de motions ont été déposées coup sur coup au parlement: une par les Verts, une par le PLR, ce qui a obligé la commission de l'enseignement à se saisir du sujet. Dans ce cadre-là, nous avons regardé quels étaient les éléments qui militaient ou pas pour une modification du calendrier scolaire. Qu'est-ce que l'on constate, qu'est-ce que les études nous montrent ?
Premièrement, que les vacances d'été sont trop longues; pourquoi ? Parce qu'on sait qu'un certain nombre d'enfants, notamment ceux qui ont des difficultés scolaires, oublient entre juin et septembre ce qu'ils ont appris durant l'année écoulée. Cela veut dire qu'ils démarrent l'année scolaire suivante avec un handicap, en quelque sorte: ils ont perdu un certain nombre de connaissances et ils n'arrivent pas à les rattraper. Toutes les études montrent qu'il faudrait raccourcir l'été ou trouver des solutions pour ces enfants-là. Ce n'est pas un problème dans les milieux stimulants et favorisés, parce que là, les parents peuvent aider leurs enfants, mais dans des milieux plus précarisés, c'est une cause supplémentaire d'échec scolaire.
Deuxième constat, on l'a rappelé, lorsque Pâques tombe tôt, on a une très longue période entre la fin mars et les vacances d'été: les enfants sont fatigués, les enseignants le disent. Il faudrait trouver une façon d'améliorer les choses. Les Verts ont raison, dans l'absolu: si on pouvait avoir des vacances de printemps, on les mettrait où on veut. Toutefois, Mesdames et Messieurs les députés Verts, je vous rappelle que l'ensemble de la population n'a pas les vacances des enseignants, et au-delà de la question de la fête religieuse, si on séparait le week-end de Pâques des vacances de printemps, on aurait de temps en temps trois jours de vacances - le week-end de Pâques du vendredi saint au lundi de Pâques - qui seraient isolés et à ce moment-là, une période beaucoup plus courte de vacances scolaires de printemps à un autre moment. Ça ne répondrait pas à un autre élément qu'on connaît grâce à la recherche scientifique, à savoir que des vacances sont vraiment bénéfiques pour les enfants lorsqu'elles durent au moins deux semaines.
Dernier élément: la chronobiologie. Ce fameux rythme selon lequel il faudrait alterner sept à huit semaines d'enseignement avec deux semaines de vacances n'a aucun fondement scientifique ! Les études divergent à ce propos et on n'a aucune certitude que ce rythme soit favorable ou pas. Je pense qu'il ne faut pas en faire un argument pour ou contre puisque les études divergent à ce propos.
A partir de ces réflexions, qu'est-ce que la commission a fait d'intelligent ? Elle a essayé de rallonger les vacances de Pâques pour avoir ces fameux quinze jours. Elle a aussi essayé de diminuer les vacances d'été pour répondre à l'argument dont je vous ai parlé tout à l'heure. Elle a aussi proposé d'offrir le congé de l'Ascension. En faisant cela, en rajoutant une semaine après Pâques, on est sûr que, même quand Pâques tombe beaucoup plus tôt, on aura une semaine de vacances de Pâques en plus qu'aujourd'hui dans tous les cas. Lorsque Pâques tombe tôt, c'est bien plus favorable aux enfants.
Par conséquent, le département peut vivre avec cette solution-là, je l'avais dit en commission. Nous avons quand même souhaité la soumettre à une large consultation et cette consultation a eu lieu, auprès de tous les organismes concernés, y compris des partis politiques. Et je me permets de dire que, si le PLR a répondu «très satisfaisant» à toutes les questions qui étaient posées, M. Florey et l'UDC n'ont malheureusement pas souhaité répondre - nous n'avons jamais eu de réponse de l'UDC !
M. Stéphane Florey. On n'a jamais rien reçu là-dessus !
Mme Anne Emery-Torracinta. L'UDC aurait pu se prononcer sur ce fait ! Quels sont les résultats du sondage ? Je simplifie, vous aurez les résultats avec le rapport au Grand Conseil. En gros, les entités interrogées - il y a tous les partis, il y a les mouvements de jeunesse, il y a les associations de parents, il y a le mouvement populaire des familles, les mouvements du handicap, etc. - sont favorables à 75% au calendrier proposé. Par conséquent, si votre Grand Conseil vote cette proposition de motion, le Conseil d'Etat ira dans ce sens-là et la première année d'application serait l'année 2022-2023.
Puisque M. Alder n'a pas pu présenter son amendement, j'explique le contexte de celui-ci, si on m'en laisse le temps, Madame la présidente.
La présidente. Allez-y ! Allez-y !
Mme Anne Emery-Torracinta. Parmi les organismes ou les entités qui se sont opposées à la proposition, il y avait des entités qui disaient qu'elles étaient contre parce que ça n'allait pas assez loin. Ça a été par exemple la réponse des Verts ou de certaines associations d'enseignants; certaines étaient favorables, d'autre pas. Elles auraient voulu le système 8-2-8-2 ainsi que la dissociation des vacances de printemps des fêtes de Pâques. Et le Pouvoir judiciaire nous a dit qu'il y avait un problème avec les féries judiciaires en raison de leur durée. Je vous passe les détails, mais si on devait aller dans ce sens-là, on aurait peut-être l'obligation d'avoir trois semaines d'arrêt pour le Pouvoir judiciaire. Je me suis quand même dit que c'était bizarre, parce que nos voisins vaudois ont ce système-là ! Nous avons donc téléphoné au Pouvoir judiciaire vaudois qui est juste tombé par terre en prenant connaissance de la question que les Genevois se posaient ! La réponse a été qu'il n'y a aucun souci: les féries judiciaires ont lieu ainsi que prévues par la loi et, ma foi, les affaires judiciaires se déroulent normalement durant la semaine supplémentaire de vacances. Ce bémol-là tombe donc, à mon avis.
Quelqu'un a évoqué les travaux sur les bâtiments: sept semaines l'été, c'est peu pour des rénovations, mais l'office cantonal des bâtiments a dit que c'était génial: en rallongeant le congé de Pâques, on pourra faire des travaux à ce moment qu'on n'avait jamais le temps de faire jusqu'à présent ! Donc, voilà une majorité de personnes favorables; si votre Grand Conseil va dans ce sens, le Conseil d'Etat suivra la proposition et, je le répète, dès 2022-2023, nous aurons ce nouveau calendrier scolaire.
La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes en procédure de vote, je vais vous faire voter sur l'amendement général plus ou moins présenté par le PLR. Il s'affiche, il est d'un seul bloc, il y a un seul vote:
«invite le Conseil d'Etat
à modifier la grille des jours de congé et les vacances scolaires des élèves du canton de Genève afin de tenir compte des résultats de l'enquête communiqués par le SRED au mois de janvier 2017 en:
- fixant les vacances de Pâques de manière à ce que celles-ci durent deux semaines complètes et coïncident avec la période des féries judiciaires de Pâques, soit du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques;
- accordant congé aux élèves les vendredis qui suivent les jeudis de l'Ascension et du Jeûne genevois;
- réduisant d'une semaine la durée des vacances d'été, en avançant la date de la rentrée scolaire d'une semaine.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 45 oui et 1 abstention.
La présidente. Nous votons maintenant sur la proposition de motion.
Mise aux voix, la motion 2376 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 62 oui contre 19 non et 11 abstentions.