République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 17 janvier 2020 à 18h05
2e législature - 2e année - 9e session - 51e séance
RD 1169-A
Débat
Le président. Nous passons au point suivant, dont nous débattons en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Alberto Velasco, à qui je cède la parole.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Les points 43, 44 et 45 de l'ordre du jour - soit les RD 1169-A, 1201-A et 1250-A - concernent respectivement les plans financiers quadriennaux des années 2017-2020, 2018-2021 et 2019-2022. Ces trois rapports, par ailleurs déjà obsolètes, ont été rejetés par la commission des finances. Le troisième a toutefois obtenu un oui de la part du MCG, raison pour laquelle il a fait l'objet d'un rapport de minorité.
Mesdames et Messieurs, il ne sert à rien de débattre de ces plans financiers quadriennaux: nous sommes en 2020, nous attendons donc maintenant le PFQ 2020-2023 que le Conseil d'Etat va nous proposer. C'est là-dessus qu'on devra discuter, sur des faits concrets ! On pourrait s'étendre sur chacun de ces PFQ, sur les motifs de leur rejet, mais ils sont déjà loin des réalités qu'on a vécues et qui sont liées aux différents budgets tels qu'ils ont été refusés ou acceptés par l'un ou l'autre des groupes. Par conséquent, Mesdames et Messieurs, je vous propose de rejeter déjà le premier, soit le RD 1169, comme l'a fait la majorité de la commission.
Le président. Je vous remercie, Monsieur Velasco. Je rappelle que le RD 1201-A a été traité à 14h lors de la séance des extraits. (Remarque de M. Alberto Velasco.) Oui, il figurait à l'ordre du jour de la séance des extraits ! Je passe la parole à M. Jean Burgermeister.
M. Jean Burgermeister (EAG). Merci, Monsieur le président. Ma prise de parole vaut pour les deux PFQ à l'ordre du jour qui, comme l'a indiqué le rapporteur, sont un peu obsolètes et n'ont plus beaucoup d'intérêt. En vérité, il faut le dire, ces plans financiers quadriennaux ne présentaient pas de réel intérêt dès le départ, puisque pour le gouvernement l'idée consiste à montrer que les finances vont retrouver l'équilibre dans les années à venir, et ce, vous le savez bien, grâce à l'effet magique que le Conseil d'Etat appelle l'effet dynamique de la RFFA, qui redresse la courbe des finances du canton. Personne ne peut nous expliquer quel est ce phénomène ni comment il est calculé, mais c'est comme ça, Mesdames et Messieurs, croyez-nous, tout va bien se passer ! Le résultat, on le voit: le budget 2020 voté par une majorité de droite affichait un déficit de presque 600 millions de francs, et bien sûr la situation ne va faire que s'aggraver au fur et à mesure que la RFFA déploiera ses effets, avec un déficit abyssal et une dette qui enfle.
Le plan du gouvernement n'en est pas réellement un; il n'est en tout cas pas convaincant ! Heureusement, Mesdames et Messieurs, Ensemble à Gauche veille au grain et a préparé un programme... (Exclamations.) ...dont nous avons aujourd'hui posé la première pierre avec l'initiative visant à taxer à 100% les dividendes des gros actionnaires, ce qui devrait ramener au canton une centaine de millions de francs. Comme le Grand Conseil dans sa majorité est resté sourd à cette nécessité, nous faisons directement appel au peuple, et ce n'est qu'un début, Mesdames et Messieurs. Nos tubes contiennent d'autres initiatives, qui nous permettront de nous attaquer à l'ensemble des privilèges fiscaux des plus fortunés de ce canton, qu'il s'agisse des gros héritages, de la spéculation immobilière ou de l'impôt sur la fortune. C'est à tout cela qu'Ensemble à Gauche va s'attaquer, dans l'idée de reconquérir le milliard de francs qui manque chaque année à l'Etat suite à la multiplication - voulue par ce parlement et ce gouvernement - des cadeaux fiscaux accordés aux plus riches de ce canton depuis vingt ans. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs. (Exclamations. Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Eric Leyvraz (UDC). Quand on relit ces plans financiers quadriennaux, on ne peut évidemment que sourire. Dans le PFQ 2017-2020, on nous annonçait l'équilibre ainsi qu'un modeste bénéfice en 2020. Le PFQ suivant était sensiblement plus prudent: on nous disait qu'il y aurait un faible déficit en 2020, mais que l'équilibre reviendrait en 2021. Quant au PFQ 2019-2022, il prévoyait un léger déficit de 123 millions - soit cinq fois moins que le déficit actuel - mais en nous promettant qu'on retrouverait l'équilibre des finances en 2022, alors qu'on savait déjà que la caisse de pension et la RFFA allaient coûter très cher. C'est extraordinaire ! On dépense donc beaucoup d'argent pour faire des plans financiers quadriennaux qui ne servent strictement à rien ! Dans le fond, ces PFQ sont des pilules de Prozac destinées à des députés dépressifs. Merci quand même. (Rires. Applaudissements.)
M. Cyril Aellen (PLR). Personnellement, j'aime bien ces PFQ, et j'ai d'ailleurs toujours demandé qu'ils nous parviennent en temps et en heure. J'en profite pour relever que c'est dorénavant le cas, ce qui est une bonne chose à mon sens. Pourquoi ? Parce que ces plans financiers quadriennaux - je me réfère là à la page 20 du RD 1169-A - permettent d'avoir une vision à moyen terme. C'est le premier objectif. Ils sont présentés par politique publique et mettent en évidence les priorités politiques du Conseil d'Etat pour les trois prochaines années. Je pense qu'il est bénéfique d'avoir une vision de ces priorités sur trois ans, car il est important de les connaître. C'est aussi l'occasion d'obtenir une estimation des charges et des revenus de fonctionnement - notamment en fonction des hypothèses macro-économiques connues au moment de l'élaboration de ces PFQ - de même qu'une estimation de l'évolution de la dette, des risques financiers et de la réserve conjoncturelle, puisque celle-ci a été réintégrée. Il s'agit donc d'un outil de pilotage pour les dépenses et les recettes de l'Etat qui est à mon avis bienvenu pour autant qu'on s'y conforme et qu'on s'y réfère chaque fois que c'est nécessaire.
Il est du reste intéressant de traiter ces PFQ avec un peu de retard, parce que ça nous permet de voir quelles étaient les projections de l'époque et ce qui s'est passé en réalité. Selon moi, ce n'est pas seulement le résultat qui présente de l'intérêt, même si c'est le cas; j'apprécie surtout de pouvoir constater ce qui s'est réalisé et ce qui ne s'est pas réalisé. Je remercie d'ailleurs M. Leyvraz de l'avoir évoqué ! Je vais vous citer quelques exemples. Le premier point concerne les recettes, qui sont si chères à M. Burgermeister et son groupe, ainsi qu'à toute la gauche en général. Que remarque-t-on ? Eh bien qu'elles sont largement supérieures à ce qui était envisagé, bien que les hypothèses macro-économiques aient été élaborées de façon assez juste - ce dont il faut féliciter le département. Dans les faits, il se trouve que les recettes ont progressé beaucoup plus que prévu. On n'a donc pas accordé de cadeaux aux contribuables ! Au contraire, on a prélevé dans leurs poches un peu plus que ce qui avait été envisagé.
A l'inverse, si on considère les dépenses qui ont été engagées, on constate là aussi qu'elles ont été nettement supérieures à ce qui avait été estimé. Une fois encore, les hypothèses macro-économiques - c'est-à-dire le chômage, la précarité, la pauvreté, etc. - avaient été correctement évaluées, mais les dépenses ont malgré tout fortement augmenté. Pourquoi ? Parce que c'est là que des cadeaux non planifiés ont été accordés ! Je pense aux nombreuses lois votées par ce Grand Conseil - et parfois par le peuple - qui ont multiplié les dépenses par centaines de millions et qui font que la situation est aujourd'hui catastrophique sur le plan budgétaire. Nous verrons ce qu'il en est sur le plan comptable, mais il y a fort à parier que, l'économie allant plutôt bien, les recettes seront encore plus importantes que celles qui ont été planifiées.
Le président. Il vous faut terminer, Monsieur Aellen.
M. Cyril Aellen. En conclusion, Monsieur le président, je pense qu'il est important de pouvoir analyser ces éléments sous cet angle, sachant que ces plans financiers quadriennaux doivent être examinés en temps et en heure en commission, mais avec un certain délai en plénière.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'aimerais dire à notre collègue Eric Leyvraz qu'il s'agit d'une obligation inscrite dans la LGAF: le Conseil d'Etat doit nous transmettre ce document année après année. Cela étant, le PFQ 2017-2020 prévoyait par exemple 90 millions de francs d'économies, or il s'est avéré par la suite que les comptes présentaient un excédent. Oui, on nous a dit en 2017 qu'il était nécessaire de réaliser une économie de 90 millions sur les charges, puis on a constaté que les comptes étaient excédentaires ! Ce que je veux dire, c'est donc qu'il y a quand même une grande imprécision. C'est vrai - je suis d'accord avec M. Aellen - ces éléments de référence nous permettent de voir en quelque sorte le guidage du Conseil d'Etat, mais enfin ce n'est pas une bible. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous prononcer sur ce rapport, en vous rappelant que la commission l'a refusé.
Mis aux voix, le rapport du Conseil d'Etat RD 1169 est rejeté par 53 non contre 8 oui et 15 abstentions.