République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du mercredi 10 avril 2019 à 17h
2e législature - 1re année - 11e session - 65e séance
RD 1247-A et objet(s) lié(s)
Débat
Le président. Nous passons à la seconde urgence demandée par le Conseil d'Etat, à savoir les objets liés RD 1247-A et R 861-A. Le débat est classé en catégorie II, soixante minutes. Le rapport de majorité est de Mme Nicole Valiquer Grecuccio, à qui je donne la parole.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la majorité de la commission que je représente aujourd'hui va accepter la première mise à jour du plan directeur cantonal et donc la résolution du Conseil d'Etat nous invitant à l'approuver.
Au nom de la commission, j'aimerais tout d'abord remercier l'ensemble des collaborateurs du département du territoire qui ont suivi nos travaux, particulièrement le directeur de la planification directrice cantonale et régionale, M. Leutenegger, qui est entre-temps parti pour une retraite bien méritée, mais qui a assumé cette fonction pendant de nombreuses années.
On parle de révision, mais il s'agit en réalité d'une mise à jour. Le plan directeur cantonal a été adopté par le Grand Conseil en 2013, soit il y a peu, puis en 2015 par la Confédération qui a cependant émis des réserves, limitant le développement de Genève aux projets en extension sur la zone agricole à l'horizon 2023, au-delà duquel le quota cantonal de surfaces d'assolement - les fameuses SDA - n'aurait pu être respecté en l'état des connaissances. Le canton a dû travailler afin de lever ces réserves tout en déployant l'ensemble de son dispositif de planification.
La commission relève le travail sérieux effectué par le département en vue de diminuer l'emprise sur la zone agricole, qui a été divisée par deux - d'ici 2030, elle passera de 3% à 1,5% - garantissant ainsi le nombre de surfaces d'assolement exigé pour notre canton. Deuxième point important: il n'y a pas d'empiétement supplémentaire sur la zone villas, le taux reste de 11%, ce qui est peu, comme dans le plan directeur de 2013 - je relève cet élément car il fait écho à la discussion que nous avons eue précédemment. Ensuite, la coordination urbanisation-transports a été renforcée afin de penser l'urbanisation vers l'intérieur; il y aura une meilleure utilisation de la zone à bâtir et, par là même, une meilleure protection des terres agricoles. Ces choix ont été opérés afin de lever les obstacles posés par la Confédération.
Il faut encore rappeler que les communes et la commission d'aménagement du territoire ont été consultées; cet organe où l'ensemble des partis sont représentés a suivi les travaux et les a validés. Nous avons profité de l'occasion pour consolider les outils fonciers qui permettent un aménagement de qualité: signalons le FIDU qui accompagne les projets de développement en garantissant des équipements, notamment des écoles, ainsi que le fonds LUP en faveur des coopératives qui fournit des logements à certaines catégories de la population, dont la classe moyenne. Les auditions ont été menées surtout pour répondre à des demandes ciblées que nous avions reçues - puisqu'il s'agit d'une mise à jour, nous n'avions pas besoin de refaire toute une série d'auditions. Des amendements ont complété le travail - 17 au total - et chacun a su faire des concessions.
Au final, nous avons démontré que le plan directeur cantonal sert avant tout à privilégier l'intérêt général, et non les intérêts particuliers. La majorité de la commission, à l'exception des groupes UDC et MCG, a approuvé cette mise à jour de même que la résolution qui l'accompagne.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le MCG s'est opposé de manière fondamentale au plan directeur cantonal 2030 quand il a été soumis à consultation en 2012. Nous maintenons notre contestation s'agissant de sa mise à jour, nous rejetons la ligne directrice de cette stratégie. Pour le MCG, la méthode choisie est, d'un point de vue politique, inadéquate et nocive. Nous vivons dans une fiction qui est le «concept Grand Genève», à cheval entre deux pays, la Suisse et la France, lesquels présentent deux systèmes politiques, économiques et juridiques totalement différents. Croire que l'on peut créer un ensemble sans tenir compte des frontières objectives n'est pas seulement illusoire, mais également dangereux.
Le MCG estime que la méthode choisie, connue sous le nom de Grand Genève, consiste à créer un tout supranational qui n'existe pas et ne pourra jamais être autre chose qu'un bricolage dangereux. Cette construction d'un grand ensemble par-delà les frontières, selon les principes de la planification à la française, a démontré son inefficacité et son danger - je pense à l'organisation hasardeuse de l'Union européenne. Dès lors, la démarche choisie par le Grand Genève ne peut que nous conduire dans le mur.
Le MCG n'est pas absolument contre une politique régionale entre le canton de Genève et les territoires environnants, mais nous devons bien définir la manière de procéder. Il est important de nous en tenir à des principes sains et de bon sens, sans dériver vers l'à-peu-près et des concepts déconnectés de toute réalité. La méthodologie que propose le MCG s'écarte de l'idée d'un grand ensemble qui serait créé à partir d'éléments hétéroclites, composés de territoires vaudois, savoisiens et gessiens. Cet assemblage artificiel réunissant des régions si différentes ne pourra jamais constituer un bloc cohérent.
Au contraire d'une planification déconnectée des réalités, nous proposons un travail commun sur des axes précis. Les principes devant prévaloir sont les suivants: respecter la liberté de chaque territoire, donc ne pas forcer la main; respecter la réciprocité; accorder la priorité aux résidents de chaque territoire; accorder la priorité aux entreprises de proximité sur chaque territoire; prendre des mesures pour éviter les avantages concurrentiels dus aux différences monétaires, économiques et géographiques; agir sur la base de contrats internationaux. La politique régionale genevoise a un historique séculaire avec l'existence de traités internationaux - toujours en vigueur ! - qui ont créé des zones franches. Une politique régionale ne pourra se développer de manière efficace et intelligente que sur une base contractuelle internationale.
Lors de la présentation de la révision du plan directeur cantonal 2030 en commission, il nous a été indiqué un élément qui nous paraît inquiétant: depuis le début du processus, Genève a connu une augmentation de plus de 2000 pendulaires par an, alors que le plan directeur cantonal en prévoyait une hausse annuelle de 1000; c'est un doublement par rapport à la croissance prévue, déjà conséquente. Voilà qui démontre que le nombre de frontaliers s'est accru de manière non maîtrisée.
En résumé, Mesdames et Messieurs, la politique dite du Grand Genève nous mène dans une impasse. Nous proposons d'abandonner cette vision purement quantitative au profit d'une politique qualitative au service des citoyens et des résidents genevois. Le groupe MCG vous invite dès lors à ne pas accepter la mise à jour du plan directeur cantonal et donc à refuser ces deux objets.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Après cette première mise à jour, ce n'est plus un plan directeur cantonal, mais un plan destructeur cantonal ! Je commencerai pas dénoncer la méthode de travail qui nous a été dictée en commission. D'abord, plusieurs semaines ont été nécessaires juste pour obtenir les documents papier avec lesquels nous étions censés travailler, le département manifestant toutes les réticences du monde à nous les fournir.
Ensuite, on nous a imposé des règles totalement antidémocratiques. On nous a dit: «Vous n'avez le droit d'intervenir que sur les fiches qui font l'objet d'une révision.» Eh bien je suis désolé, mais quand on examine un objet, rien ne nous empêche de proposer autre chose, d'aller plus loin que ce qui est présenté, et je ne vois pas de quel droit le département, qui a été adoubé par une majorité censée défendre le citoyen, nous interdit d'en faire plus que ce qu'on nous demande.
Sur le fond, cette mise à jour n'apporte rien de très encourageant pour la suite, puisqu'on va continuer à grignoter la zone villas, on va continuer à détruire notre territoire en le surdensifiant. Avec ça, on en revient toujours à la même question. Vous pouvez la poser pour vous amuser, si vous le souhaitez, même si la plupart d'entre vous n'oseront sans doute pas, de peur d'obtenir une réponse déjà connue de tous: pour qui construit-on à l'heure actuelle ? Ce n'est pas pour nos habitants. Quand M. Hodgers affirme le contraire, c'est un pur mensonge.
L'Etat subit la démesure d'une immigration totalement incontrôlée, et c'est pour ces personnes-là qu'on construit aujourd'hui, c'est uniquement pour faire venir les gens de l'extérieur. Des réserves de terrains, nous en avons suffisamment. Calculez toutes les zones de développement déjà existantes, calculez l'ensemble des parcelles détenues par les fondations immobilières: nous avons de quoi construire au minimum pour les trente prochaines années sans avoir forcément à déclasser. L'UDC s'était déjà opposée au plan directeur en tant que tel et vous invite maintenant à refuser sa première mise à jour ainsi que la résolution qui va avec. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, chers collègues, je suis le fruit de cette prétendue immigration incontrôlée ! Mon grand-père est venu du Tessin en 1903, c'était un émigré qui crevait de faim, et je trouve scandaleux - scandaleux ! - qu'on puisse dire ici, alors que nous sommes tous des produits de l'immigration, alors que Genève est une terre de refuge, que «nous subissons une immigration incontrôlée». Ma grand-mère a quitté l'Alsace pour se réfugier à Ferney-Voltaire, parce qu'elle était poursuivie par les nazis, menacée avec son frère d'être enrôlée de force dans leurs brigades. Je trouve cette attitude déplorable, parfaitement déplorable !
Cela étant, revenons-en au sujet. A la base, nous étions plutôt enclins à voter ce plan directeur révisé. Bon, pour l'anecdote, afin de gagner des surfaces d'assolement, M. Hodgers n'a rien trouvé de mieux que d'aller planter des pommes de terre dans les parcs publics, notamment à La Grange; je trouvais ça déjà un peu limite. Mais le gros problème, pour nous, c'est le Pré-du-Stand, Mesdames et Messieurs. Ce périmètre est encore en zone agricole aujourd'hui et nous espérons bien que le peuple, qui devra voter le déclassement de cet excellent terrain de 14 hectares, fera en sorte qu'il le reste. Or dans le plan qui nous est proposé, cette zone agricole disparaît au profit de bureaux alors qu'il y a déjà plus de 330 000 mètres carrés de surfaces de bureaux vides à Genève !
Pour finir, nous avons décidé de nous opposer fermement à cette mise à jour, parce qu'elle fait croire à la population qu'il reste - et qu'il restera - de la zone agricole à déclasser alors que le canton n'en compte plus que 80 hectares. Et si on enlève les 12 hectares du Pré-du-Stand, elle se limitera à peau de chagrin ! Il faut arrêter de se cacher derrière son petit doigt, il faut militer - comme vous l'avez fait, Monsieur Hodgers, conseiller d'Etat - pour que la zone agricole ne soit plus dilapidée au profit de bureaux, notamment au Pré-du-Stand, qu'elle soit protégée et que les 55% de terrains constructibles en zones villas soient réexaminés à la lumière de ces circonstances. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). L'UDC combat ce plan directeur cantonal depuis le début. Selon nous, une stratégie aussi importante aurait nécessité un vrai débat populaire et une légitimité via un vote. Parce qu'il ne présente pas de base solide, ce plan directeur cantonal fait l'objet de constantes discussions, voire contestations. Beaucoup de communes l'ont combattu, tandis que la Confédération ne l'a accepté que partiellement: les projets ne respectant pas le quota de surfaces d'assolement ont été biffés.
Dans un premier temps, le Conseil d'Etat a cherché à requalifier des terrains non construits en surfaces d'assolement afin de réaliser l'ensemble des projets prévus à l'horizon 2030. Aujourd'hui, après avoir changé d'avis, il tente de redimensionner certains projets ou de les reporter de quelques années ou décennies. Or cette tergiversation a des effets dans les communes: les plans directeurs communaux s'établissent sans règles claires, chaque municipalité effectue sa planification selon des critères différents. C'est le petchi. (Rires.)
A notre avis, deux raisons expliquent cette situation. La première est l'absence de décentralisation: l'ensemble des tâches - planification, déclassements, plans localisés de quartier, autorisations de construire - sont concentrées au niveau de l'Etat, une approche typiquement «top-down», c'est-à-dire du haut vers le bas. Cette manière de procéder ne favorise pas la participation et la collaboration avec tous les acteurs. Ensuite, le plan directeur cantonal 2030 contient plusieurs objectifs, au lieu d'une seule mesure: il regroupe l'aménagement, la politique sociale, l'ingérence de l'Etat qui va jusqu'à contrôler les prix de vente des parcelles, la surveillance des coûts de revient des immeubles, etc.
En résumé, le travail préparatoire a été négligé, la planification est défaillante et l'issue, floue, prête à débat. Le Crédit suisse a publié l'année dernière une étude sur la situation du logement à Genève. Le constat de ces experts est sévère et sans appel; il est dommage que notre Conseil d'Etat ne consacre pas un peu de temps pour prendre connaissance des résultats de cette analyse. Le groupe UDC refusera ce rapport. Merci de votre attention.
M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce plan directeur cantonal a connu une gestation longue et difficile, c'est certain. Il a été déposé en 2009 par Mark Muller avant d'être retiré par son successeur, François Longchamp, lequel a ouvert un débat qui ne s'est pas très bien passé au début. Puis, le projet a trouvé une majorité au sein de la commission et du Grand Conseil autour de certains principes de planification sur lesquels je reviendrai tout à l'heure lorsque je critiquerai la position du MCG.
Une fois adopté, ce plan directeur s'est heurté aux réserves du Conseil fédéral. La commission a alors déposé une motion pour recueillir un large soutien politique - elle a d'ailleurs été suivie par le parlement en 2015 - en vue de lever les réserves émises par la Confédération. Plusieurs axes ont été définis dans ce texte dont j'ai eu l'honneur d'être le premier signataire.
Il s'agissait tout d'abord, pour les nouveaux secteurs, d'augmenter la densité prévue - par exemple aux Cherpines - afin de ne pas gaspiller le sol. C'est d'ailleurs la ligne directrice du plan directeur que la commission avait anticipée, soutenue par le peuple dans le cadre d'un référendum contre la loi qui prévoyait cette densification, référendum lancé par l'UDC et, sauf erreur, soutenu par le MCG.
Ensuite, nous proposions de densifier vers l'intérieur, notamment les zones villas. Il y en a beaucoup dans notre canton, et si on ne touche pas à la zone agricole, on ne peut pas continuer à développer sans empiéter sur la zone villas, mais de manière planifiée et intelligente, comme le plan directeur cantonal le prévoit.
Il y avait encore une invite intéressante que le Conseil d'Etat n'a malheureusement pas reprise dans le cadre des travaux sur ce rapport, c'était d'améliorer la coordination avec la France voisine. Nous vivons dans une région, c'est un fait, c'est une réalité; on peut la nier pour des raisons politiques, mais c'est une réalité, même si le MCG la déplore, ce qui n'est pas mon cas. Considérant que la zone agricole doit être protégée d'un point de vue environnemental tant d'un côté de la frontière que de l'autre, nous voulions instaurer une concertation pour porter auprès de la Confédération un projet commun. Certes, cette démarche aurait pu se heurter à un obstacle lié aux surfaces d'assolement, parce que celles-ci ne visent pas à préserver l'environnement et l'agriculture, mais la souveraineté alimentaire. L'approche aurait été difficile à faire passer à Berne, mais on aurait pu ouvrir un débat et faire changer les mentalités sur cette thématique. Hélas, le Conseil d'Etat n'a pas choisi cette voie.
Ce que le Conseil d'Etat a retenu, et il faut le saluer, c'est qu'on doit inverser les proportions entre bureaux et logements: aujourd'hui, très clairement, le logement doit prendre le dessus, c'est un point absolument essentiel. Malgré tous ses efforts, j'ai l'impression que notre gouvernement va être douché par le Conseil fédéral qui n'autorise pas de modifications des surfaces d'assolement s'agissant des constructions futures. Quelles sont les conséquences politiques pour notre république ? Je crois que c'est assez simple...
Le président. Un instant, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, serait-il possible de ne pas vous asseoir sur les tables près du public ? (Un instant s'écoule.) Voilà, je vous remercie. (Remarque.) Oui, vous pouvez vous asseoir sur les tables à l'extérieur, il n'y a aucun problème !
Une voix. Merci, Monsieur le président !
Le président. Je vous remercie. Excusez-moi de vous avoir interrompu, Monsieur Dandrès, je vous laisse poursuivre.
M. Christian Dandrès. Vous êtes tout excusé, Monsieur le président. Je disais donc: quelles sont les conséquences politiques de ce choix de la Confédération ? Eh bien il s'agit de sortir du paradigme qui a longtemps été porté par l'Entente et qui consiste à jouer sur le mécanisme de l'offre et de la demande comme si c'était le seul point de régulation des prix de l'immobilier et des loyers - abusifs ! - pratiqués dans notre canton. Comme il n'est pas possible de bétonner toute la Champagne, eh bien il faut mettre en avant les outils de planification prévus par la zone de développement.
De ce point de vue, on se réjouit de la campagne menée par la Chambre genevoise immobilière alors que l'on fête les cinq ans du torpillage du projet des Corbillettes réalisé par cette dernière et par le conseiller national Genecand, qui avait ouvert une période de chaos - c'était du reste souhaité, il avait indiqué qu'il revendiquait une politique d'aménagement du chaos et il l'a obtenue dans ce secteur - où on se dirigeait gaillardement vers le déclassement en zone de développement, comme le préconise aujourd'hui la Chambre genevoise immobilière.
Vous me permettrez une petite remarque à ce propos, Mesdames et Messieurs, puisque le secrétaire général, M. Aumeunier, s'est abondamment exprimé hier à la télévision, expliquant d'une part que pour éviter les loyers hyperabusifs pratiqués par les adhérents de son organisation, il fallait que l'on puisse acquérir un bien immobilier en propriété par étage, soulignant d'autre part que l'on ne réalise pas à quel point il est facile d'accéder à la propriété. Très honnêtement, et on le verra dans le cadre du débat sur le quartier des Adrets, je ne crois pas que tout un chacun puisse se permettre pareille acquisition.
Ce qui a été relevé par le Conseil d'Etat dans ses rapports, c'est qu'une trentaine de pourcents de la population le peut aujourd'hui en raison des taux d'intérêt hypothécaires bas, sans faire courir de risque systémique à l'économie du canton - vous vous souvenez tous de la Banque cantonale de Genève - mais que passé ce cap, il ne sera plus possible de continuer à développer la propriété par étage au détriment des besoins essentiels de la majorité de la population qui continue à payer des loyers exorbitants.
Quelques remarques enfin, puisque mon temps de parole touche à sa fin, sur la position du groupe MCG. Ce qui est préconisé par le MCG constitue un mauvais réflexe susceptible de pousser une bonne partie de la population à croire que pour résoudre les situations de dumping et de pression ainsi que les problématiques liées au marché du travail - il y a effectivement un chômage constant et important à Genève - il faut refuser la planification prévue dans le plan directeur cantonal. C'est une grave erreur; notre croissance est réelle et le dumping salarial n'est pas lié au plan directeur cantonal. Au contraire, celui-ci permet de mener un développement harmonisé et d'éviter le chaos dont je vous parlais tout à l'heure.
La seule et unique réponse crédible à la question du dumping, ce n'est pas un retour à la politique des quotas qui n'a strictement rien apporté en matière de protection des travailleurs, mais de constater précisément que l'absence totale de droit du travail en Suisse n'a pas déployé, pour les patrons s'entend, tout son potentiel, parce qu'il y avait une politique de quotas. Aujourd'hui, à l'inverse, il faut renforcer le droit des travailleurs, notamment celui de négocier des conditions de travail, de défendre et d'obtenir des CCT avec un réel contenu. Voilà ce à quoi il faut oeuvrer, notamment à Berne, puisque le débat a lieu maintenant sur la protection des délégués et de la liberté syndicale. J'en resterai là, Monsieur le président, merci. (Applaudissements.)
Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Cette première mise à jour du plan directeur permet de répondre à la demande de la Confédération de mieux préserver notre zone agricole. Elle atteint donc son objectif de lever les réserves fédérales et, ce faisant, elle a quand même permis de maintenir l'accord politique trouvé en 2012, auquel le PLR était attaché, prévoyant de déclasser environ 11% de la zone villas, ce qui veut dire que 89% doit en subsister, pour de l'habitat individuel ou éventuellement groupé. C'est pour nous fondamental et le PLR a clairement réussi à obtenir la réinscription de cet objectif dans la mise à jour du plan directeur.
Grâce à cette mise à jour, nous pensons que le canton pourra mieux répondre aux besoins en logements des Genevois, notamment de ceux qui ont dû s'exiler en France voisine, pour leur permettre de revenir dans notre canton et d'y payer des impôts. Ainsi, le PLR soutiendra cette mise à jour.
Toutefois, nous avons des inquiétudes pour la suite. En effet, cette mise à jour vise 2030. Or, les besoins pour 2040 ont déjà été évalués et il est clair qu'à l'heure actuelle, le canton ne pourra pas y répondre. Dans cette optique, le PLR a déposé un amendement qui demande de discuter avec Berne, de négocier pour trouver des solutions, notamment pour avoir une plus grande flexibilité sur la zone agricole. Nous incitons vraiment le Conseil d'Etat à aller voir la Confédération. Sur ce dernier point, nous nous étonnons du reste que le conseiller d'Etat n'ait pas plus de contacts avec celle-ci. Aujourd'hui, Genève a été sanctionnée par le gel de sa zone à bâtir parce qu'on n'a pas fait une petite mise à jour législative; il est surprenant que le conseiller d'Etat soit si peu prévoyant, nous appelons donc M. Hodgers à trouver rapidement une solution à ce problème.
M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le plan directeur cantonal est un outil de planification du territoire. Notre plan directeur 2030 n'est peut-être pas parfait - j'y reviendrai - mais il faut bien reconnaître que, s'il n'existait pas, le développement du canton se ferait de façon complètement chaotique, ce qui n'est nullement souhaitable. Personne ne remet donc en question la pertinence de cet instrument d'aménagement.
Si l'on décortiquait des heures durant les pages de ce document imposant, en l'assaisonnant de quelques amendements bien relevés et si possible bien verts, on passerait à côté d'une réalité que certains s'entêtent à ne pas vouloir regarder en face: nous faisons partie d'une agglomération de près d'un million d'habitants, parmi les plus dynamiques d'Europe. Or, il se trouve que cette agglomération est transfrontalière et intercantonale: il est grand temps que nous l'assumions afin de travailler d'intelligence avec tous les partenaires du Grand Genève ! Dans leur argumentaire d'opposition au plan directeur, le MCG et l'UDC confondent la politique d'aménagement du territoire et les questions de stratégie économique et de politique migratoire: c'est fort dommage ! Puissions-nous nous inspirer de nos amis bâlois qui ont au moins dix ans d'avance sur nous dans leur gouvernance transfrontalière !
Mais revenons à notre plan directeur cantonal. Cette mise à jour a permis l'amélioration essentielle - qui satisfait pleinement les Verts - qui consiste à minimiser l'impact de la croissance urbaine sur la zone agricole, soit en renonçant à certains déclassements, soit en augmentant la densité de grands projets tels que ceux de Bernex et des Cherpines. Il s'agissait en particulier de garantir à long terme le quota de surfaces d'assolement; il manque en effet toujours 45 hectares de SDA, qu'il faut récupérer pour réaliser les quartiers et les infrastructures prévus d'ici 2030. La question du quota de surfaces d'assolement cache un enjeu bien plus concret, celui de protéger notre potentiel de sols fertiles à proximité de la ville. Rappelons que la population genevoise a soutenu à plus de 60% les initiatives pour la souveraineté alimentaire et les aliments équitables en septembre 2018.
En commission, les Verts ont déposé trois amendements sur des points qui ne sont pas suffisamment pris en compte à ce jour dans la planification cantonale. Le premier est le changement climatique, avec la question des îlots de chaleur et de l'arborisation. Compte tenu de l'augmentation des températures en ville - déjà ressentie aujourd'hui et amenée à se renforcer - les Verts demandent une action plus proactive de l'Etat sur l'arborisation et la végétalisation des quartiers. A titre d'exemple, l'étude «Nos arbres», menée par l'Université de Genève, propose d'atteindre une couverture arborée de 25% en 2050. Cela pourrait prendre la forme d'un plan d'action identifiant clairement les secteurs à arboriser ces dix prochaines années, avec des mécanismes incitatifs pour les communes et les privés ainsi que des arbitrages entre les différents usagers de l'espace public et du sous-sol. Le département nous a indiqué qu'une fiche «climat» est prévue pour une prochaine mise à jour du plan directeur. Toutefois, considérant l'urgence des enjeux ainsi que le nombre d'années qu'il faut à un arbre pour déployer son ombrage, nous demandons au Conseil d'Etat d'agir sur cette question sans plus attendre.
Le deuxième amendement porte sur l'acceptation de la densité au sein de la population. La densité fait peur et Genève est déjà une des villes les plus denses d'Europe, mais dans d'autres villes du monde, les gens vivent bien la densité lorsqu'elle s'accompagne de qualité ! Les Verts soutiennent la poursuite de la densification vers l'intérieur - comme unique façon de construire plus de logements en préservant la nature et la zone agricole - mais nous souhaitons plus d'efforts du département du territoire pour densifier avec qualité et en préservant le patrimoine naturel dans les quartiers; nous souhaitons plus de participation et de débat citoyen sur la question de la densité dans les PLQ, par exemple grâce à de la vulgarisation par les architectes-urbanistes sur des projets bien réussis ici et ailleurs.
Le troisième point est la suroffre de locaux administratifs en regard de la pénurie de logements actuelle. En effet, alors que ces surfaces peinent déjà aujourd'hui à trouver preneurs, près de 700 000 m2 de surfaces de bureaux sont prévus rien que sur la façade aéroportuaire. A l'heure où les modes de travail évoluent, avec le télétravail et les espaces de coworking, les projections du plan directeur sont certainement surévaluées en ce qui concerne les surfaces nécessaires. De plus, les opérations de reconversion de bureaux en logements sont à ce jour anecdotiques car rien n'y incite les propriétaires. Les Verts souhaitent que l'Etat mène une action proactive pour soutenir la reconversion de bureaux en logements au centre-ville, par exemple avec la mise en place de mécanismes incitatifs pour les propriétaires. Ces diverses propositions ont été intégrées par le département, mais de façon un peu frileuse. Les Verts reviendront donc avec des propositions sur ces sujets.
En attendant, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à approuver cette mise à jour du plan directeur cantonal qui va dans le sens d'un développement équilibré de notre canton.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, s'il pleut ce week-end, je vous incite à lire ce plan directeur cantonal, il est passionnant. Je le rappelle, l'accompagnement du développement de Genève est décrit là-dedans. Les grands principes y sont, avec une hypothèse sur l'évolution de la population: 100 000 nouveaux résidents et la volonté de faire revenir nos enfants et ceux qui travaillent à proximité, 60 000 emplois en plus. Il faut donc créer les structures pour cela !
Je voudrais relever que je suis surpris d'entendre certains députés envisager d'étendre sur la périphérie au-delà de la frontière les 8400 hectares de surface d'assolement dont il est question et dont on vient de parler: ça va être difficile, les surfaces d'assolement faisant quand même partie de la défense nationale !
Il s'agit d'une mise à jour, puisque la stratégie a déjà fait l'objet d'une votation en 2013. Cette première mise à jour vise à adapter le plan directeur cantonal aux nouvelles directives fédérales accompagnant l'entrée en vigueur de la loi sur l'aménagement du territoire - la LAT 1 - afin de lever certaines réserves émises par la Confédération lors de son approbation. Pour répondre à ces réserves essentiellement liées au dimensionnement de la zone à bâtir et à la protection des surfaces d'assolement qui sont les meilleures terres agricoles, le canton est tenu de minimiser l'emprise sur la zone agricole et de mieux tirer parti des secteurs constructibles. J'en reviens à la thématique dont nous avons parlé tout à l'heure par rapport à la zone de l'aéroport. Le redimensionnement et la priorisation des extensions urbaines sur la zone agricole en fonction de la maturité des projets et du respect du quota cantonal ont été opérés pour répondre aux besoins à l'horizon de quinze ans, soit 2030. Les densités proposées dans les grands projets qui impactent la zone agricole ont également été revues et des mesures ont été prises pour accélérer leur réalisation. Il est aussi nécessaire de favoriser l'urbanisation dite vers l'intérieur - ces propos ont déjà été tenus - et de mettre en oeuvre la densification des zones à bâtir identifiées par le plan directeur. Ce sont donc des contraintes fédérales que nous appliquons, mais cela n'empêche évidemment pas de faire les choses bien !
Parallèlement, le canton a procédé au recensement des projets de différentes politiques publiques touchant l'espace rural et il a mis en place un suivi précis des gains et des pertes possibles de SDA. L'entrée en vigueur de la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée en 2016 et l'approbation de plusieurs planifications-cadres et règlements ont en outre impliqué un remaniement important de la mobilité, permettant dans le même temps de renforcer et d'améliorer la coordination urbanisation-transports.
Enfin, cette mise à jour a donné l'opportunité d'introduire deux nouvelles fiches de mesures, l'une sur la politique forestière, l'autre sur l'élaboration d'une stratégie d'aménagement pour les lieux de vie nocturnes, culturels et festifs. Elle a aussi permis de développer les thématiques transversales de l'énergie, du changement climatique et de la santé afin de promouvoir un cadre de vie de qualité.
Le parti démocrate-chrétien adhère à la politique générale de développement de la cité genevoise et de ce canton; il est fort heureux que ça se développe, mais il faut accompagner ces changements. Il faut le faire bien, et même s'il n'est pas parfait, comme on l'a dit, ce plan directeur va dans ce sens. C'est la raison pour laquelle le parti démocrate-chrétien vous invite à prendre acte de ce rapport et à accepter la résolution.
M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, vous vous rappelez qu'il y a quelque temps, tout le monde parlait d'un développement de l'aéroport avec une augmentation du trafic jusqu'à 25 millions de passagers par an. Tout le monde était d'accord, jusqu'à une levée de boucliers générale des riverains qui s'y opposent fermement. Aujourd'hui, ce plan directeur cantonal est un vrai plan schizophrénique: on nous parle de 100 000 habitants de plus d'ici 2030. On inscrit des chiffres et après on essaie de les atteindre ! Il y a quelque chose qui ne joue pas, Mesdames et Messieurs, c'est un plan totalement égoïste.
Quelqu'un a dit qu'il n'y aurait plus de place d'ici trente ans; effectivement, si on continue à construire à cette allure, que va-t-on laisser aux générations futures ? Rien du tout ! En fait, ce n'est pas un plan directeur politique, c'est un business plan - un business plan de promoteurs, c'est tout, il faut être réaliste ! Parler du bien des habitants me fait rire: chaque jour, Genève est de plus en plus invivable, tout est saturé, et on veut continuer à accueillir et à construire plus. Mais on ne sait pas où on va mettre les gens et on ne sait pas comment on va vivre ! Mesdames et Messieurs, c'est une réalité dont on ne tient pas compte. C'est bien beau de faire des discours sur la qualité de vie, etc. La réalité est qu'on est en train de détruire cette qualité de vie, sans s'occuper des générations futures. L'UDC s'opposera donc fermement à ce plan égoïste, ce plan schizophrène et ce business plan qu'on nous présente sous une bannière totalement erronée !
Le président. Merci, Monsieur le député. Pour la douzième fois, je vous prie de ne pas plier le micro, il vous servira encore, vraisemblablement, dans un futur proche. Et je passe la parole à M. le député Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, vous transmettrez à M. Pagani que je trouve ses propos particulièrement choquants: l'UDC ne s'est jamais opposée aux vrais réfugiés qui subissent la guerre et qui demandent protection. (Exclamations.) Ce que nous dénonçons, ce sont tous ces émigrés économiques, ceux qui viennent profiter de notre richesse, ceux qui sont des sans-papiers, qui volent nos emplois, qui occupent des appartements illégalement ! C'est ça que nous dénonçons !
Maintenant, il faut juste arrêter de vous mentir à vous-mêmes concernant la zone agricole, parce que je vous rappelle que la majorité de la commission a voté un amendement qui demande au Conseil d'Etat de rouvrir la négociation à ce sujet. Cela veut dire que dans un futur proche - puisque 2030, c'est déjà demain - on va continuer à grignoter cette fameuse zone agricole, comme le demande l'amendement que vous avez voté en commission.
C'est exactement la même chose pour la zone villas. On parle aujourd'hui de 11%, mais 11%, ce n'est que jusqu'en 2030 ! Après, vous ferez quoi ? Vous reviendrez pour dire de nouveau qu'il ne faut pas dépasser les 11% ? 11% plus 11% plus 11%: au bout d'un moment... Vous voyez ce que je veux dire, on n'aura quasiment plus de zone villas ! Finalement, on arrivera à cela dans un futur plus ou moins proche.
Ce qui aurait été vraiment novateur comme première mise à jour, ça aurait été d'oser ce qu'a osé la France, Mesdames et Messieurs les députés, c'est-à-dire revenir en arrière, redéclasser des zones à bâtir en zone agricole, arrêter de vouloir surdensifier nos villes: c'est exactement ce qu'a fait la France il y a plusieurs années ! Ça, ça aurait été vraiment novateur et ça aurait constitué une vraie mise à jour de notre plan directeur cantonal. C'est pour ça que je vous invite à refuser à la fois le rapport et la résolution.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Pagani s'est inscrit dans l'intervalle, je lui donne la parole maintenant et les deux rapporteurs termineront. Monsieur Pagani, c'est à vous !
M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président. Je ne sais pas si on vit dans le même monde, Monsieur Florey ! 300 personnes protestaient ici tout à l'heure contre la précarité dans laquelle nous les mettons: il s'agit de réfugiés. Monsieur Florey, je vous rappelle qu'il y a 60 millions de personnes réfugiées, jamais la planète n'a vécu ça ! Elles viennent d'Erythrée, de Syrie et d'ailleurs. Je trouve un peu fort de café de prétendre autre chose. Je le redis ici, mon grand-père qui venait du Tessin était un réfugié économique parce qu'il crevait de faim au Tessin ! Ma grand-mère, elle, s'est réfugiée à Ferney avec son frère... (Commentaires.)
Le président. Monsieur Florey, s'il vous plaît ! Laissez parler M. le député, vous répondrez peut-être après. C'est toujours à vous, Monsieur Pagani !
M. Rémy Pagani. Merci, Monsieur le président. Ma grand-mère s'est, elle, réfugiée ici avec son frère, parce qu'ils étaient alsaciens et que son frère était menacé d'enrôlement dans l'armée nazie. C'est une situation historique. Actuellement, la situation réelle est qu'on ne peut pas, qu'on ne peut plus distinguer entre vos soi-disant réfugiés économiques et les 60 millions de personnes aujourd'hui sur les routes et chemins qui réclament aide et soutien, y compris de notre république ! (Applaudissements.)
M. Marc Falquet (UDC). Evidemment, 60 millions, voire des milliards de personnes sont dans la précarité sur cette Terre. Même si c'est juste, il ne faut pas oublier qu'à Genève, 60 000 personnes sont dans la précarité. Un certain M. Constant vient de nous écrire sur nos mails pour nous indiquer que la précarité est toujours plus importante à Genève. 350 personnes ont manifesté, c'est bien, mais il y a 60 000 personnes qui ne manifestent jamais: ce sont nos enfants, ce sont nos aînés ! Il faudrait peut-être aussi s'occuper de ces gens, pas seulement des minorités ! C'est facile de se mettre sous une bonne lumière en faisant semblant d'aider les autres: occupons-nous également d'aider les nôtres, s'il vous plaît !
Des voix. Bravo !
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, je suis assez surpris par l'intervention du groupe des Verts. Il nous fait une théorie sur la stratégie économique alors qu'on sait que ce même groupe refuse la RFFA. Je suis également assez surpris d'entendre le président de ce groupe traiter certaines entreprises genevoises de prédatrices et d'entendre que ce plan directeur est un élément stratégique économique pour Genève. Pour maintenir un plan stratégique économique, j'invite le groupe des Verts à faire marche arrière, à soutenir nos entreprises, à soutenir la RFFA et à refuser cette mise à jour du plan directeur cantonal. (Applaudissements.)
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Concrétiser le droit au logement, garantir l'emploi, offrir des lieux pour la culture et le sport, préserver des espaces publics de qualité, permettre une agriculture de proximité, eh bien, tout ça passe par un instrument qui s'appelle le plan directeur cantonal ! Celui-ci garantit un développement cohérent du territoire - et ce territoire existe physiquement: il est compris entre le Jura et le Salève. C'est une réalité physique intangible !
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le plan directeur cantonal est avant tout un outil de maîtrise du développement territorial. Sans cet outil, nous serions dans une logique où chaque propriétaire pourrait faire ce qu'il souhaite; nous aurions un développement non coordonné et, surtout, non cohérent par rapport aux besoins de la population. Les fiches du plan directeur cantonal portent pour l'essentiel sur les zones d'interdiction de construire. C'est là aussi un des points importants pour préserver la qualité de vie, pour préserver le grand équilibre des trois tiers: un tiers de zone à bâtir, un tiers de zone agricole et un tiers de zone naturelle. Voilà l'équilibre genevois que le Conseil d'Etat entend préserver, notamment avec la mise à jour de ce plan directeur cantonal.
Il s'agit tout d'abord de mieux coordonner. J'ai entendu les Verts regretter qu'il n'y ait pas de mention de l'agglomération. En réalité, ce n'est pas le plan directeur cantonal qui parle de ça, c'est le projet d'agglomération; mais le plan directeur cantonal est bien évidemment réfléchi et cohérent avec le projet d'agglomération. Même si le document s'arrête à la frontière de notre canton, il est pensé en lien avec le projet d'agglomération.
La mise à jour permet d'améliorer la coordination entre transports et urbanisme. Mesdames et Messieurs les députés, il est impératif d'amener les transports publics et la mobilité douce - la mobilité individuelle aussi bien sûr - dans les endroits où nous densifions et construisons. On parlait tout à l'heure de la zone villas: dans cette zone, les ratios pour le stationnement sont de deux places pour 100 m2. Dans les zones telles que celle que vous avez adoptée tout à l'heure, on a 0,8 place de stationnement. On voit donc que les habitants des zones urbaines plus denses utilisent beaucoup moins la voiture individuelle. Ceci est évidemment positif pour l'environnement et pour le climat, mais aussi pour la diminution des bouchons sur nos routes !
L'élément fort de cette révision du plan directeur cantonal est bien la réduction de l'emprise sur la zone agricole: c'est l'élément clé, fondamental. On l'a dit, Berne avait validé partiellement le plan directeur cantonal que vous avez adopté en 2013 parce que nous ne respections pas notre quota de surfaces d'assolement. Avec cette mise à jour, la proposition de l'ancien plan d'une emprise de 3% sur la zone agricole est réduite à 1,5%; on diminue donc de moitié cette emprise. Je peine à suivre la position de M. Pagani qui dit vouloir refuser cette mise à jour à cause du projet du Pré-du-Stand: ce projet figurait déjà dans le plan directeur cantonal, et refuser cette mise à jour maintient le projet du Pré-du-Stand. En revanche, par votre refus, vous empêchez la réduction de l'empiétement sur la zone agricole, notamment du côté de Bernex ou dans tous les autres projets où nous comptons le réduire. Cela est peu compréhensible, et je comprends mal aussi votre critique à mon égard, Monsieur Pagani - camarade Pagani - de cultiver de la pomme de terre dans le parc La Grange ! Je sais que c'est un parc bourgeois qui vous est cher, mais comprenez que l'alimentation des classes ouvrières est importante aussi aux yeux du Conseil d'Etat.
Sur la question de la zone villas, j'aimerais confirmer à l'intervenante du PLR notamment que le contrat politique - ou l'équilibre politique - est maintenu. Il n'y aura pas plus d'emprise sur la zone villas que celle qui est déjà prévue, à savoir ces fameux 11%. Nous respectons dès lors cet équilibre-là, avec des mises à jour à la marge dans un sens ou dans l'autre.
Quelques mots encore sur le gel annoncé ce matin par le Conseil fédéral: il n'est pas étonnant. Au mois de décembre, le Conseil fédéral a communiqué à Genève qu'il estimait que notre seuil de matérialité de 100 000 F pour prélever la taxe sur la plus-value foncière de 20% était trop haut, qu'il fallait l'abaisser à 30 000 F. Soit, c'est une obligation fédérale ! Il y a quelques autres éléments un peu plus techniques. Le Conseil d'Etat a rapidement élaboré en janvier-février un projet de loi; il fait l'objet d'une consultation auprès des communes depuis plus d'un mois et sera déposé devant votre parlement tout prochainement, je l'espère. En l'état, tant que nous ne levons pas cette restriction de Berne, nous ne pourrons pas adopter des PLQ en zone de fond agricole; nous ne pourrons pas non plus adopter des modifications de zones pour des équipements publics ou des modifications de zones en zone ordinaire. Je pense notamment au projet de prison des Dardelles, je pense aussi au projet du CERN que nous venons de révéler à la presse internationale et qui nécessite une petite modification de zone. Au moment d'aborder ce projet de loi, je vous prierai d'être vigilants - comme vous l'êtes toujours - dans vos travaux parlementaires.
Enfin, un mot sur l'arborisation: oui, vous avez parfaitement raison, ce thème monte en puissance, et je suis heureux d'avoir réuni au sein d'un même département l'urbanisme et l'environnement. Nous allons pouvoir optimiser les dynamiques et nous avons l'ambition de planter beaucoup plus d'arbres que ce qu'on a fait ces dernières années. La lutte contre les îlots de chaleur devient un enjeu d'urbanisme majeur, on ne peut plus faire des quartiers de manière exclusivement minérale, nous devons mettre de la verdure en ville ! Là-dessus, je reviendrai également vers vous, indépendamment des mises à jour du plan directeur cantonal, afin qu'on ait une ambition plus marquée en la matière. En attendant, Mesdames et Messieurs les députés, merci d'adopter cette mise à jour du plan directeur cantonal.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote sur la proposition de résolution.
Mise aux voix, la résolution 861 est adoptée par 67 oui contre 26 non.
Le rapport du Conseil d'Etat RD 1247 est approuvé.
Les modifications au plan directeur cantonal figurent dans la résolution 861.