République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 11 octobre 2018 à 20h30
2e législature - 1re année - 4e session - 24e séance
PL 12127-B
Premier débat
Le président. Nous allons maintenant traiter le PL 12127-B en catégorie II, trente minutes. Il s'agit de la deuxième urgence acceptée tout à l'heure. Madame Valiquer Grecuccio, vous avez la parole.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission d'aménagement vous recommande dans sa très grande majorité d'adopter ce projet de loi. Il est en effet question du secteur en mutation du grand projet Châtelaine, secteur dans lequel il y a la volonté de proposer une modification de zone pour permettre la construction de pas moins de 400 logements, dont 300 à court terme. Pourquoi favoriser aujourd'hui ce secteur en mutation ? Eh bien il s'agit de pouvoir densifier ce périmètre, comme le veut le plan directeur cantonal, et l'objectif est double: non seulement on va densifier et créer de la mixité en introduisant notamment de la PPE dans une commune qui en compte peu, mais ce projet permet en outre de reconstruire les immeubles de la fondation immobilière Emile Dupont qui sont extrêmement dégradés, sachant que le renouvellement de ce parc permet également d'augmenter le nombre de logements de cette fondation immobilière.
Aujourd'hui, le plan localisé de quartier a bien évolué et répond à différents éléments comme la protection contre les risques majeurs, puisque vous savez que ce secteur a été largement concerné par le transport de chlore. Il permet aussi - et c'est notable - de créer un parc public en faveur de la commune de Vernier ainsi que d'élaborer une charte des aménagements extérieurs, ce qui est bien sûr extrêmement important pour permettre à cette commune qui se développe de le faire selon les objectifs du plan directeur, mais aussi avec des espaces publics et des espaces verts de qualité.
Comme cela a été relevé par la commune de Vernier - dont le Conseil municipal a d'ailleurs accepté le projet - on arrive aujourd'hui à un très bel équilibre, avec environ 50% d'HBM et 50% de PPE, et à une augmentation du nombre de logements permettant, comme je l'ai dit tout à l'heure, une meilleure mixité. Pour toutes ces raisons, la commission d'aménagement vous recommande l'adoption de ce projet de loi ayant pour but une modification de zone.
J'aimerais enfin insister sur un point. Vous l'avez vu, l'UDC et le PLR se sont abstenus lors des votes, et pourtant un rapport de minorité a été déposé, quand bien même il faut souligner que le rapporteur de minorité n'a pas demandé de corriger le procès-verbal en vue d'indiquer qu'il se serait opposé au projet de loi. Quoi qu'il en soit, ce rapport de minorité existe bel et bien. Je vous remercie.
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, pour ma part c'est avec un grand étonnement que je prends la parole sur cette question, suite au fabuleux débat précédent dans lequel on a entendu l'excellent député Jean Batou défendre la zone villas et la députée Caroline Marti défendre la qualité de vie et de travail en zone commerciale des employés du groupe Richemont. L'aile humaniste du parti libéral-radical, que je représente, va quant à elle défendre le fait qu'il faut peut-être se poser la question de la qualité de vie des personnes habitant à côté d'une voie de chemin de fer et des citernes, dans des logements pour les plus précarisés que sont les HBM. Je dois donc vous dire que je suis particulièrement à l'aise d'avoir pris ce rapport de minorité après ce que je viens d'entendre de mes préopinants, et au-delà de la partie liée à la forme - que je concède volontiers à Mme Valiquer Grecuccio - sur le fond il est très surprenant de constater que la commune de Vernier, qui supporte quasiment 19% de l'effort des LUP sur le total de notre territoire cantonal, se voie imposer plus de 50% d'HBM sur une parcelle relativement restreinte et dans des conditions extrêmement coûteuses en termes de préservation de la qualité de vie, puisqu'il va falloir construire à côté d'une voie de chemin de fer et d'une route. Comme on peut le lire dans le très bon rapport de majorité de ma collègue, cette route est censée voir sa vitesse réduite à 50 km/h selon le projet, mais les gens qui ont circulé sur cette dernière et qui la connaissent savent que ça va quand même être relativement compliqué. On est donc là à l'intersection d'une voie de chemin de fer, d'une route extrêmement rapide et d'une pénétrante, à côté des citernes, et qu'est-ce qu'on y construit, Mesdames et Messieurs, sachant que la commune en question est déjà celle qui porte l'effort le plus important en matière de logements sociaux ? Eh bien on y construit plus de 50% de logements pour les plus défavorisés, c'est parfaitement normal.
Alors moi je vous dis mon étonnement, parce que je ne conçois pas qu'une majorité de ce Conseil puisse soutenir le logement à tout prix dans des conditions pareilles pour les plus défavorisés de ce canton, et je le comprends d'autant moins que pour le reste, la commune de Vernier va déjà devoir porter des investissements extrêmement importants. La vraie priorité qu'on devrait avoir dans ce genre de développement, ce serait donc de se demander comment la Ville de Vernier va pouvoir payer tous ces développements. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et elle va avoir besoin, Mesdames et Messieurs, de ce que décrivait M. Jean Batou concernant la partie plutôt riche de ce canton s'agissant des communes, à savoir de PPE et de gens qui peuvent payer le développement, qui peuvent contribuer au développement nécessaire et à l'effort commun grâce à leur solidarité. En l'occurrence, c'est pour toutes ces raisons que la minorité vous encourage vivement à refuser ce projet de loi. (Commentaires.)
M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, pour tout dire, la position du groupe Ensemble à Gauche est un peu particulière. Nous allons voter ce projet de loi, mais franchement du bout des lèvres... (Commentaires.) ...parce que dans un premier temps nous nous étions opposés à ce projet, nous l'avions renvoyé en commission, et je vais vous dire pourquoi. C'est vrai que du point de vue environnemental, c'est franchement limite: le périmètre en question où la fondation Emile Dupont va rénover ses immeubles est compris entre une voie CFF - sur laquelle transitent régulièrement des transports massifs de chlore et d'ammoniac - et la route de Vernier de l'autre côté. Sans parler des citernes situées un peu plus loin. C'est donc franchement tout à fait limite, et c'est la raison pour laquelle nous avions demandé le renvoi de ce projet à la commission d'aménagement. Alors maintenant si on va le voter du bout des lèvres, c'est parce que j'ai personnellement demandé en commission au conseiller d'Etat Antonio Hodgers de prendre acte de ces revendications et de s'engager à faire quelque chose concernant les CFF, etc. Il a déclaré qu'il le ferait, dont acte, mais en tous les cas je peux comprendre les propos du rapporteur de minorité.
M. André Pfeffer (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, densifier en ville et aux endroits où les conditions sont appropriées n'est contesté par personne. (Brouhaha.)
Le président. Une seconde, Monsieur le député ! Mesdames et Messieurs, merci de respecter ceux qui s'expriment. (Commentaires.)
Une voix. C'est plus Ensemble à Gauche, c'est l'UDC !
M. André Pfeffer. Je reprends: densifier en ville et aux endroits où les conditions sont appropriées n'est contesté par personne. Toutefois, la densification de l'ensemble de ce périmètre pose plusieurs problèmes. Lors des travaux en commission qui ont mené au refus de ce projet de loi par la majorité des commissaires, j'avais proposé de séparer ce périmètre en deux parties. L'une des parties, respectivement la zone au nord occupée actuellement par de très anciens bâtiments de la fondation immobilière Emile Dupont, mérite effectivement d'être modifiée. Ces petits bâtiments doivent être démolis et il fera sens d'augmenter la taille des nouvelles constructions et par conséquent le nombre de logements dans ces futurs immeubles. De ce fait, une modification en zone de développement 2 de la partie nord n'est contestée par personne.
En revanche, la partie sud qui donnera directement sur une future gare CFF n'est pas appropriée pour un déclassement en zone de développement 2. Premièrement, il y a déjà de très nombreux logements sociaux dans ce secteur, puisque le Lignon, les Libellules, ainsi que les futurs quartiers de l'Etang, de Cointrin-Est et de Cointrin-Ouest sont à proximité immédiate - ce sont quasiment des voisins. Sans compter que la commune de Vernier abrite déjà un très grand nombre des logements LUP et HBM de notre canton. Pour rappel, une telle concentration de logements sociaux ne serait pas autorisée en France, car la législation française interdit une concentration de plus de 50% de logements sociaux dans un périmètre. Le second problème est lié aux divers risques inhérents au transport de matières dangereuses par rail et par route, ainsi qu'aux citernes des pétroliers situées à proximité. Enfin, la troisième raison pour laquelle il ne faut pas déclasser la partie sud en zone de développement 2, c'est la probable gare CFF qui se construira dans ce périmètre. Cette future gare CFF deviendra sans doute un centre important et nécessitera des aménagements, notamment pour que les bus et autres moyens de transport y convergent. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) La construction de bâtiments de logements sociaux de sept à huit étages collés contre les murs de cette future gare n'est donc pas appropriée - elle est même problématique.
Pour toutes ces raisons, le groupe UDC maintient l'avis de l'ancienne majorité qui avait refusé le PL 12127 en commission et vous propose de rejeter à votre tour ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Sandro Pistis (MCG). Le MCG va soutenir ce projet de loi, puisqu'il prévoit la construction de 400 logements, dont 300 à court terme. Plusieurs éléments ont d'ailleurs été mentionnés au sujet de la construction de ces logements. Pour le reste, je suis assez surpris de la position du groupe PLR qui, je vous le rappelle, ne s'était pas gêné pour voter le projet de loi de déclassement concernant le quartier de l'Etang il y a environ un an. De mémoire, ce déclassement était également prévu sur la commune de Vernier, à proximité des citernes, des voies de chemin de fer et de tout ce que le PLR décrie aujourd'hui dans son rapport de minorité. On peut donc voir ce soir, Mesdames et Messieurs, que le PLR mène une politique à géométrie variable: faites ce que je dis, mais pas ce que je fais. Je me demande même si parfois les intérêts ne seraient pas prépondérants par rapport à la nécessité de mener une politique pour le bien de notre canton. Sachant que Genève fait actuellement face à une pénurie de logements, je trouve malvenu de s'opposer de manière systématique à la construction de logements.
Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG va donc soutenir ce projet de loi et je vous invite à faire de même dans l'intérêt du canton, car ce projet permet la construction de 400 logements à long terme, dont 300 à court terme. Merci.
M. Jacques Blondin (PDC). Il s'agit ici de construire des appartements, et le plan directeur cantonal nous impose de densifier la zone périurbaine, faute de quoi les difficultés seront évidentes, vous le savez fort bien. En effet, les surfaces d'assolement sont limitées et Berne nous fait régulièrement remarquer que si nous ne densifions pas, nous ne pourrons pas évoluer dans ce canton. Il est du reste rare de constater qu'il y a unanimité quant à la faisabilité du projet concernant ce périmètre qui est connu, qui a fait l'objet de beaucoup de discussions et qui - il faut le souligner - a reçu l'accord non seulement de la commune, qui l'a préavisé favorablement, mais aussi de tous les propriétaires qui sont vendeurs.
On l'a dit, ce projet permet la réalisation de 400 logements, dont 300 rapidement. La moitié de ces logements vont être construits par la fondation Emile Dupont, qui ne fait que de l'HBM. Elle n'attend d'ailleurs que ça pour rénover les trois bâtiments qui sont dans un triste état. En effet, ils sont clairement vétustes, à la limite de l'habitabilité, sans parler des bilans énergétiques qui nous sont imposés.
Les dessertes sont bonnes, on l'a dit, et il y en aura encore d'autres, donc ce n'est pas un problème de ce côté-là. Le souci, comme l'a relevé le rapporteur de minorité, c'est que ce n'est pas la plus belle zone du canton, on doit bien l'admettre. Les différents problèmes ne sont pas oubliés et il ne faut pas les sous-estimer. Cela dit, il y a actuellement déjà des habitants, ils sont là, et pour eux on n'a pas pris les mesures qui sont bien heureusement prévues pour l'avenir de cette zone. A la route de Vernier, il s'agit de limiter la vitesse et de poser malgré tout du revêtement phonoabsorbant. Pour ce qui est des voies CFF, on prévoit une diminution de la vitesse des wagons, la disparition du transport de chlore d'ici 2025, de nouveaux wagons sécuritaires, parce que c'est absolument nécessaire, et la réalisation d'un mur de protection.
Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien soutiendra ce projet de déclassement en zone de développement 2 qui permettra la réalisation de 400 appartements dont la classe moyenne a grandement besoin. Merci.
M. Yvan Rochat (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, les réalités de ce périmètre dit des voies CFF constituent un assez bon cliché, un assez bon instantané des contraintes environnementales auxquelles nous sommes confrontés à Vernier. Il s'agit d'un triangle situé en zone villas, dont la plus grande partie est dévolue à des immeubles archivétustes de la fondation HBM Emile Dupont coincés entre des bâtiments industriels, des voies ferrées et une route cantonale à fort trafic. La vie aujourd'hui à cet endroit n'est pas facile. La Ville de Vernier a donc vu comme une opportunité qualitative importante le projet développé conjointement par la fondation Emile Dupont et l'entreprise Losinger. Certes, pour s'assurer qu'un nouveau quartier de qualité serait réalisé, il a fallu quelque peu tordre le bras au canton, refuser la modification de zone au Conseil municipal et faire quelques déclarations dans les médias mais, il faut le noter - et le représentant du PDC l'a indiqué en détail - à partir de là le dialogue et les actions menées par le canton, par le conseiller d'Etat Hodgers ainsi que par M. Barthassat ont été très positifs. De plus, des mesures d'assainissement à la source - ce qui est important - des problématiques liées à l'OPAM et à l'OPB ont été entreprises. Certes, tout n'est pas encore parfait, mais une très nette amélioration des conditions environnementales et de vie est désormais garantie. D'ailleurs, alors qu'il avait d'abord refusé la modification de zone, le Conseil municipal de Vernier a finalement accepté le PLQ.
Elément de satisfaction supplémentaire: ce projet permettra de requalifier fortement les espaces publics et de désenclaver le quartier. Et surtout, il y aura grâce à ce projet un rapport plus serein, plus logique, de 50-50 entre les HBM et les autres types de logements, plutôt que d'avoir 90% de logements HBM comme c'est le cas aujourd'hui.
Je remercie le rapporteur de minorité d'avoir évoqué toutes ces préoccupations environnementales, et d'ailleurs je m'étonne que son parti en tout cas ne les ait jamais mentionnées lorsqu'il s'agissait par exemple - cela a été dit auparavant - du quartier de l'Etang, qui voit effectivement passer des trains contenant du chlore et qui se trouve à proximité de citernes et de l'autoroute. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je pense aussi à la Concorde, où passent également des trains vers le chemin des Sports. Ce sont des projets sur lesquels vous avez travaillé, Monsieur, notamment en tant que conseiller municipal de la Ville de Genève.
Pour toutes ces sages raisons, Mesdames et Messieurs, les Verts vous encouragent à voter ce déclassement. Merci. (Quelques applaudissements.)
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit, ce projet de loi permet la réalisation de 400 logements ainsi que la densification d'un secteur déjà bâti, ce qui répond aux exigences de notre plan directeur cantonal et contribue aux efforts de densification vers l'intérieur qui nous sont demandés par la Confédération. Aujourd'hui, tous les signaux sont au vert sur ce périmètre: le PLQ est finalisé et le projet de construction est prêt à démarrer; refuser ce projet de loi ce soir reviendrait donc à mettre un stop à 400 logements qui pourraient être construits dans les tout prochains mois. Mme la rapporteure de majorité l'a également évoqué, il s'agit en outre de remplacer des logements qui sont particulièrement vétustes, et le déclassement permettrait une très nette amélioration de la qualité de vie des habitants de ce quartier.
Certes, je vous l'accorde, Monsieur le rapporteur de minorité - vous lui transmettrez, Monsieur le président - certains points liés à ce déclassement peuvent être jugés problématiques, notamment la question de l'exposition aux risques d'accidents majeurs, mais des mesures extrêmement concrètes ont été prises pour limiter ces risques, je pense entre autres à la réduction de la vitesse des trains transportant des substances dangereuses à 40 km/h, à la réalisation d'un mur de protection et à la disposition des bâtiments dans le quartier.
Pour ce qui est des nuisances sonores, d'autres mesures ont également été prises, notamment la pose d'un revêtement phonoabsorbant et la limitation de la vitesse de circulation sur la route de Vernier. A ce titre, le parti socialiste est convaincu qu'il est nécessaire non pas de bloquer les projets de construction de logements, mais de limiter à la source les nuisances sonores et les risques, entre autres, et c'est la politique qu'on mène en ce qui concerne l'aéroport ou le bruit lié au trafic routier en limitant le trafic de transit. Il s'agit donc effectivement d'une pesée des intérêts, et nous la faisons en faveur du déclassement et de la réalisation de logements.
J'aimerais enfin rappeler en quelques mots, Monsieur le président, le contexte dans lequel s'inscrit ce projet de déclassement. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il s'agit d'un contexte de blocage de près de 4000 logements en commission, et le parti socialiste est donc satisfait de voir que le Grand Conseil semble sortir de ce blocage stérile et préjudiciable pour l'intérêt public. Nous espérons du reste qu'il en ira de même dans les autres périmètres, notamment Cointrin-Est, Cointrin-Ouest, les Corbillettes, la Seymaz et la rampe de Lancy - Pont-Rouge. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Mme Salika Wenger (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai l'impression qu'on nage en pleine science-fiction. S'il s'était agi de construire des logements sociaux à Bellevue, j'aurais voté ce projet avec tout l'enthousiasme dont je suis capable. Mais là, on nous propose un ghetto de 400 appartements entre une voie ferrée et une route... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...sur laquelle, si on a un peu de chance, les automobilistes rouleront légèrement moins vite. C'est absolument n'importe quoi ! Pour moi, il est hors de question de voter un projet qui crée un ghetto dans un endroit invivable sous prétexte qu'on aimerait créer du logement et densifier. Je veux bien densifier, mais pas dans un endroit pareil ! Je ne veux pas de logements sociaux ni dans cette commune ni à cet endroit...
Le président. Voilà, c'est terminé, Madame !
Mme Salika Wenger. ...parce que c'est dangereux et que les personnes qui vont voter ce projet...
Le président. On a bien compris !
Mme Salika Wenger. ...ne sont pas celles qui vivront là-bas ! (Applaudissements.)
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. S'agissant de ce qui a été abordé et qui constitue finalement le point central de ce dossier, des indications ont été données par l'un des conseillers administratifs de la commune, qui pensait que quand le pourcentage baisse, ça signifie qu'il y a moins de logements sociaux. C'est faux ! On va quand même doubler le nombre de logements sociaux, et en tous les cas augmenter le nombre total de ces logements sociaux. Ce n'est donc pas parce que le pourcentage baisse qu'il y en a moins. En l'occurrence, il y en aura plus, et on va effectivement construire dans une zone - et je le dis à nouveau avec toute l'incompréhension qui est la mienne dans ce débat - qui est à peu près la plus compliquée et la moins vendable. Eh bien je trouve intéressant de voir que, même dans cette configuration, une majorité qui semble se dégager à gauche, selon moi, ne comprend pas que c'est peut-être l'occasion de faire de la PPE et de proposer à des gens d'acquérir un bien, puisque ce canton compte 18% de propriétaires, je vous le rappelle, alors que la moyenne suisse se situe à 38%. Notre taux de propriétaires est ainsi inférieur de 20%. Alors pourquoi ne permettez-vous pas à des gens d'acheter à l'endroit qui est objectivement le plus compliqué à vendre ? Eh bien non, vous dites que c'est génial, que c'est Vernier, c'est-à-dire la commune qui porte déjà l'effort, et on double la proportion de logements sociaux dans ce quartier. Moi je veux bien, mais je vous dis juste qu'on va créer des tensions innommables à l'avenir, parce qu'on va se trouver dans une situation où on aura construit l'ensemble du parc de logements sociaux sur la rive droite et que, de façon très heureuse, la rive gauche ne fera pas l'effort d'en réaliser car la rive droite - Vernier en particulier - l'aura fait.
Je vous dis donc simplement mon incompréhension et celle d'une minorité qui ne comprend pas qu'on agisse ainsi dans une zone où, justement pour éviter la ghettoïsation dont a parlé mon collègue Pfeffer, on doit construire plus de logements libres et à vendre, car ça permet d'éviter un phénomène qu'on connaît depuis dix ans. En effet, depuis dix ans, Mesdames et Messieurs les députés, 2000 personnes quittent chaque année ce canton, 2000 personnes appartenant à la classe moyenne, qui partent principalement parce qu'elles ne peuvent pas acquérir de logement à Genève. Avec cette politique, vous provoquez depuis dix ans l'exode de la classe moyenne qui paie l'impôt dans ce canton. Quand les gens partent en France, ça va bien, parce qu'une partie est récupérée dans l'impôt à la source, mais quand ils vont dans le canton de Vaud, ça va mal, parce qu'on ne récupère rien. On continue pourtant à payer les infrastructures, à payer pour le logement social et les mesures de protection qui permettent d'offrir des logements sociaux acceptables en termes de conditions de vie dans un périmètre comme celui-ci. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Vous pérennisez donc un système dans lequel on va continuer à faire venir des gens qui n'ont malheureusement pas les moyens de subvenir à leurs besoins et qu'il faut aider, et vous faites partir ceux qui constituent la substantifique moelle de la construction sociale, c'est-à-dire ceux qui travaillent, ceux qui paient l'impôt. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce quartier représente effectivement assez bien le défi urbanistique que nous demande de relever la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, qui a été adoptée par le peuple suisse, je vous le rappelle, mais aussi par le peuple genevois - dans des proportions d'ailleurs très importantes - et qui consacre le principe de la densification vers l'intérieur. Il s'agit, Mesdames et Messieurs, vous le savez, de préserver notre terre agricole ainsi que nos espaces naturels. A Genève ils sont du reste majoritaires, mais ils sont rares: notre canton est petit et soumis à une forte pression démographique, elle-même issue de notre succès économique.
Ce périmètre illustre finalement cette demande de la loi fédérale de construire à proximité des axes de transport public. Il est loin le temps où l'on créait des cités ou des quartiers de villas très déconnectés, où l'on devait posséder deux voitures par ménage et les utiliser au quotidien, provoquant l'ensemble des bouchons et de la pollution que nous subissons aujourd'hui à Genève de manière bien plus massive qu'à Zurich, Bâle ou Berne. Nous devons donc densifier vers l'intérieur, et c'est vrai que c'est contraignant: il y a des axes de transport public, les CFF, le transport privé, la route de Vernier, etc. La ville, en s'étendant sur sa couronne, rattrape les zones industrielles d'hier - ici les citernes, ailleurs le PAV. On le sait, la ville s'agrandit, mais c'est un phénomène très ancien - en réalité permanent à Genève - que d'abattre ses fortifications et de s'élargir. Il s'agit d'un mouvement tout à fait naturel, et là encore il se reproduit. Nous devons donc créer la ville et offrir une qualité de vie dans des lieux où il existe des contraintes, et c'est ça le défi. Voilà pourquoi la commune de Vernier a exigé à juste titre certaines garanties de la part du canton, afin que le projet atteigne finalement un niveau qui ne soit pas simplement acceptable et légal, mais qui promette une certaine qualité de vie, sachant que le cadre n'est pas idéal. On ne peut cependant pas tous vivre dans une commune aisée au bord du lac, avec des jardins personnels et vue sur l'horizon. Ce serait beau, mais ce n'est pas la réalité. La réalité, c'est celle d'un canton diversifié, avec aussi une population fragilisée qui doit trouver une place.
En l'occurrence, Mesdames et Messieurs, nous avons ici un projet qui a recueilli l'accord de tous les services préaviseurs de l'Etat ainsi que de la commune qui, contrairement à ce qu'a dit le rapporteur de minorité, ne s'est pas vu imposer ce projet, puisqu'elle l'a adopté. Ce dernier a en outre recueilli l'accord de tous les propriétaires privés de ce secteur, de la fondation Emile Dupont et du promoteur Losinger Marazzi, on l'a dit, ce qui fonde finalement un large consensus.
Sur les engagements en matière d'infrastructures de proximité, non seulement le Conseil d'Etat s'est engagé pour que les trains réduisent leur vitesse à 40 km/h, mais il a aussi signé une convention avec les CFF, la Confédération et les autres cantons concernés pour que les wagons de chlore cessent de passer par Genève de manière générale. En effet, vous savez qu'au-delà de ce secteur, ils passent aussi par la gare Cornavin et par conséquent par d'énormes secteurs habités - il n'est donc pas simplement question des nouveaux quartiers. Le Conseil d'Etat s'est en outre engagé à entamer le mouvement de ces citernes. J'ai du reste renoncé à renouveler le contrat qui arrive à échéance d'ici une dizaine d'années sur plusieurs secteurs de ces citernes. Ça ne fait pas le tout, mais nous entamons un mouvement d'éloignement de ces secteurs à nuisances. Le Conseil d'Etat s'est par ailleurs réjoui d'augmenter la densité globale, car il faut construire pour répondre aux besoins de la population, et par là même d'accroître la part de PPE, puisque l'équilibre social doit aussi se faire à travers un équilibre des typologies.
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet est à juste titre à comparer avec celui de Pont-Rouge - qui est en train d'être finalisé, avec tout un lot de secteurs d'activité mais aussi de PPE - ou celui du quartier de l'Etang, qui se situe non loin du périmètre que nous venons d'évoquer. Il est donc vrai que le Conseil d'Etat s'interroge sur l'opposition qui est celle de l'aile humaniste du PLR... (Exclamations.) ...peut-être aussi de l'aile non humaniste, on le verra lors du vote - je ne sais pas s'il y a une division au sein du PLR sur cette question ! En effet, si je résume la position de ce parti d'une manière générale, débat après débat, je comprends qu'il ne faut pas construire sur zone de fond villas, je comprends qu'il ne faut pas construire plus de logements au PAV - 1900 logements supplémentaires, en l'occurrence - bien qu'ils aient été acceptés par la population, je comprends maintenant qu'il ne faut pas construire à proximité des futures gares parce que c'est effectivement dangereux, ni à proximité des routes, et la Confédération nous dit qu'il ne faut pas construire en zone agricole. Mesdames et Messieurs les humanistes ou non du PLR, où devons-nous donc construire ? J'attends impatiemment vos propositions de motions pour rééquilibrer le logement social entre la rive gauche et la rive droite ! (Applaudissements.) Voilà un acte qui serait fort, un acte qui nous engagerait à aller voir les communes plus aisées qui, contrairement à celle de Vernier, ne veulent ni 200, ni 100, ni 50 logements sociaux mais qui, grâce peut-être à l'aile humaniste du PLR, nous permettraient d'enfin rééquilibrer les efforts nécessaires non seulement pour la classe la moins aisée, mais aussi pour la classe moyenne qui, comme cela a été dit, doit s'exiler.
Mesdames et Messieurs, j'espère qu'il y aura une majorité pour concrétiser le plan directeur que vous avez adopté en 2013 et que le Conseil d'Etat s'applique scrupuleusement à développer, sans trop inventer d'autres périmètres. Il s'agit ici de matérialiser tout simplement les engagements que nous avons pris, que vous avez pris en 2013. La population de Vernier et les milieux de la construction vous remercient donc de trouver des majorités pour continuer à développer notre canton.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'entrée en matière de ce projet de loi.
Des voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenus ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous allons donc procéder au vote nominal. (Le président est interpellé.) Vous avez eu le temps de prendre la parole avant ! (Commentaires.) Nous sommes en procédure de vote. (Protestations.) J'ai bien compris ! Nous passons tout de suite au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12127 est adopté en premier débat par 60 oui contre 34 non (vote nominal).
Deuxième débat
Le président. Je passe la parole au numéro deux... pardon, à M. Martin Staub. (Exclamations.)
M. Martin Staub (S). Je vous remercie. J'aimerais juste annoncer que je n'ai pas voté et que je ne prendrai pas part aux votes parce que je suis membre du conseil de la fondation Emile Dupont. Voilà pourquoi j'ai demandé la parole ! Merci, Monsieur le président.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Monsieur le président, je continue à demander le vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenue ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, c'est le cas.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 5.
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12127 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 60 oui contre 31 non (vote nominal).