République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 20 septembre 2018 à 20h30
2e législature - 1re année - 3e session - 19e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean Romain, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Anne Emery-Torracinta, Mauro Poggia, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet et Serge Dal Busco, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat Julian Alder, Antoine Barde, Jennifer Conti et Stéphanie Valentino, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Jacques Apothéloz, Olivier Baud, Vincent Subilia et Helena Verissimo de Freitas.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrats entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Malini Tosetti, M. Michel Cabaj, Mme Ragnetta Stepanian, Mme Isabelle Daeniker, M. Jacques Pralong, M. Eric Cornuz, M. Pierre-Alain Dard et M. Samuel Tschümperlin.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Débat
Le président. Nous abordons l'IN 165-B en catégorie II, nonante minutes. Le rapport est de M. Sylvain Thévoz, qui a pris son badge et va nous rejoindre sur l'estrade. Monsieur le député, je vous donne la parole.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur. Merci, Monsieur le président. La commission des affaires sociales s'est réunie à deux reprises pour traiter de l'initiative 165. Pour rappel, cette initiative a été signée par plus de 14 000 Genevois et Genevoises. Dans un premier temps, j'exposerai brièvement la volonté des initiants telle qu'ils nous l'ont expliquée en commission. Dans un deuxième temps, je vous ferai part de la position de ladite commission.
Pour les initiants, il faut tout d'abord rappeler que la LAMal avait été proposée pour régler les problèmes posés par les caisses d'assurance-maladie. Cette solution consistait à assurer tout le monde et à laisser le choix aux assurés de changer de caisse au bout d'un an, avec un délai de trois mois pour la résiliation du contrat. Dix ans après l'adoption de ce système, la situation avait empiré: impossible de maîtriser les coûts des primes d'assurance-maladie. Selon les initiants, un projet de caisse unique et publique pourrait aujourd'hui remporter l'adhésion des électeurs. En 2002, une initiative proposant l'établissement d'une assurance cantonale de service public avait été déposée, mais celle-ci a malheureusement été refusée pour cause de non-respect du principe de l'unité de la matière. Le peuple n'a donc pas pu se prononcer sur la question d'une caisse unique cantonale à but social et l'IN 165, lancée par le parti du Travail seul, a été déposée en 2017 pour pallier ce manque.
Pour rappel, voici en quelques mots les éléments qui ont fondé le lancement de cette initiative. Trop de gens refusent de se soigner en raison de franchises trop élevées: ils économisent sur le court terme, repoussant les visites chez le médecin. Laisser le temps à la maladie de se développer plutôt que de la traiter le plus tôt possible engendre, à terme, des frais. Les frais liés aux assurances-maladie coûtent énormément d'argent au canton.
Il faut aussi rappeler que d'autres initiatives sont actuellement sur la table, en parallèle. A Genève, celle de l'Alternative demande un plafonnement des primes à 10% des revenus d'un ménage. Au niveau fédéral, il y a deux initiatives populaires: «Assurance-maladie. Pour une liberté d'organisation des cantons» et «Pour un Parlement indépendant des caisses-maladie». Vous voyez donc qu'il y a plusieurs enjeux. L'initiative 165 visait avant tout à participer à ce débat général et à l'alimenter.
Quels seraient les avantages, selon les initiants, d'une caisse cantonale ? Tout d'abord, une caisse publique cantonale permettrait une alternative aux caisses privées, qui ne sont pas transparentes quant à l'utilisation de l'argent des assurés. Cette caisse publique cantonale n'aurait pas besoin de faire beaucoup de publicité pour attirer des assurés. Le but de l'initiative et des assurances-maladie est avant tout que les gens puissent se soigner et aller chez le médecin. La visée vertueuse des initiants repose sur l'idée qu'avec une assurance cantonale à portée sociale, les gens seraient bien assurés, avec des primes accessibles, et le canton ferait donc des économies, par exemple sur les mises en poursuite. Actuellement, pour rappel, l'Etat paie pour les mauvais risques: lorsqu'un assuré ne peut plus régler ses cotisations, l'Etat, à terme, s'en charge. Et les mauvais risques sont, on le sait, les personnes âgées. Dans son principe, cette caisse d'assurance-maladie serait avant tout une assurance sociale ouverte à tous. Il faut agir contre la chasse aux bons risques.
L'initiative 165 ne propose pas de changer le système de la LAMal - elle n'en a pas le pouvoir: la LAMal est un système fédéral. Mais beaucoup de progrès sociaux ont été réalisés suite à des initiatives cantonales dont la mise en oeuvre a ensuite été généralisée à l'ensemble de la Suisse. On voit là l'effet volontairement innovant, je dirais, de cet objet: pousser, à partir de Genève, à un changement plus général. Cette caisse publique cantonale que souhaite établir l'IN 165 pourrait donc représenter une brèche - c'est comme ça que les initiants la présentent - dans le système en vigueur. D'autres cantons où les primes sont également exorbitantes pourraient ensuite imiter cette pratique genevoise; à terme, l'idéal serait d'avoir une caisse publique à l'échelle du pays. De la manière dont nous l'ont présentée les initiants, il faut donc résolument envisager l'initiative 165 comme un premier pas. Une caisse transparente, sans intérêts privés et à but social aurait un impact sur le coût des primes et amènerait, à terme, une plus grande transparence dans la gestion des caisses maladie. Pour les initiants, elle aiderait à mieux connaître le coût de la santé face à l'opacité des caisses - faisant en quelque sorte office d'agent infiltré dans ce monde opaque - et permettrait ainsi de rendre le système plus vertueux.
Pour résumer, la volonté des initiants est de créer une nouvelle caisse maladie, qui s'ajouterait aux quarante assureurs déjà admis dans notre canton à exercer dans le cadre de la LAMal, et de lutter contre l'augmentation déraisonnable des primes. Les initiants constatent que la situation empire: le montant des primes continue d'augmenter alors que ce n'est pas le cas des rentes. Les coûts liés à la maladie ne sont pas maîtrisés, et la situation profite uniquement aux assureurs. Pour les initiants - je l'ai dit - il y a un problème évident de manque de transparence des caisses; on n'arrive pas à obtenir les informations pertinentes pour établir le lien entre l'augmentation des primes d'assurance-maladie et celle des coûts de la santé. Les assurances, on le sait aussi, n'ont en principe pas le droit de faire des bénéfices sur l'assurance-maladie; pourtant, elles en font tout de même et ils sont conséquents. Les réserves constituées sur le montant des primes payées par les citoyens étaient déplacées d'un canton à l'autre - on l'a vu, c'était un scandale.
Les dépenses des caisses privées en matière de personnel ou d'immobilier sont par ailleurs fastueuses; ce n'est pas acceptable alors que les Genevois doivent, eux, se serrer la ceinture pour payer les primes. Cela détériore la qualité de vie de la population, et s'il est théoriquement possible de choisir sa caisse librement, en réalité, il n'est pas facile pour les assurés de le faire. Pour résumer cette position des initiants qui est, je pense, assez largement partagée: en établissant une caisse d'assurance-maladie cantonale à but social, ils ne veulent pas mettre en place une caisse unique - ce qui n'est pas possible puisque la législation fédérale l'interdit. Mais si elle est performante, cette nouvelle caisse cantonale pourrait faire pression sur l'offre des caisses privées pour faire baisser les primes, simplement en s'insérant dans le système existant de la LAMal et en entrant directement en concurrence avec elles. Voilà les objectifs vertueux, je dirais, des initiants.
Je vais maintenant vous donner en quelques mots la position de la commission, qui s'est grandement ralliée à la position du Conseil d'Etat. En gros, celui-ci estime que l'initiative 165 ne respecte pas, pour une partie du texte, les critères de validité d'une initiative populaire cantonale, à savoir la conformité au droit supérieur. Il l'a donc d'abord partiellement invalidée pour supprimer les termes «aux personnes domiciliées dans le canton». Pour la commission, la nouvelle caisse maladie de droit public que demande l'initiative 165 serait soumise aux mêmes contraintes légales et économiques que les quarante autres assurances-maladie reconnues sur le territoire genevois. C'est peut-être là le noeud du problème, car, en l'état actuel du droit fédéral, ladite caisse ne pourrait pratiquer l'assurance-maladie sociale qu'en concurrence avec les autres assurances-maladie. Cela reviendrait quelque part à mettre un poisson rouge, ou tout autre petit poisson, dans un banc de requins.
De plus, les conditions à remplir pour être autorisé à pratiquer l'assurance-maladie sociale sont les mêmes pour tous les assureurs, quelle que soit leur forme juridique - ou leur statut, privé ou public. Cette nouvelle caisse qui verrait le jour serait donc soumise, comme les autres caisses, à l'obligation de disposer de réserves suffisantes lors du dépôt de la demande d'autorisation de pratiquer. Il faudrait donc commencer par déposer 8 millions de francs sur la table. Dans ce contexte, il n'était guère pensable pour la commission que cette nouvelle caisse maladie puisse pratiquer des primes inférieures, ses tarifs étant soumis à l'approbation de l'autorité de surveillance à l'instar de ce qui est pratiqué pour les autres assureurs. Elle aurait des difficultés à attirer les bons risques précisément parce qu'elle serait exposée à la concurrence des autres caisses. Il lui serait difficile d'attirer autre chose que les mauvais risques, ce qui conduirait à des montants importants à payer au titre des prestations. Elle se retrouverait donc à devoir augmenter ses réserves et, par voie de conséquence, ses primes - vous voyez le cercle vicieux. Pour être crédible en tant que caisse cantonale d'assurance-maladie, elle ne pourrait pas non plus, comme le font certains autres assureurs, adopter des pratiques telles que celle du tiers garant pour l'achat des médicaments, système selon lequel les médicaments sont payés par les assurés puis l'assureur les rembourse. Bien qu'une telle caisse publique présente certainement la garantie d'une plus grande transparence, dans le cadre du droit fédéral actuel, il a semblé peu envisageable à la commission qu'elle puisse se soustraire à la spirale de l'augmentation constante des primes pour pouvoir pratiquer des primes inférieures à celles des autres assureurs du marché - c'est la volonté des initiants - et atteindre ainsi son but. Dans le contexte actuel, qui admet la coexistence d'une multitude de caisses qui se font concurrence et fixent leurs primes sur la base de leur propre intérêt, une seule caisse, aussi bien gérée et transparente soit-elle, n'est pas en mesure de lutter toute seule contre l'augmentation des primes.
Pour conclure, la commission a renoncé à formuler un contreprojet viable et pertinent. Pour une large majorité de la commission, le problème de cette initiative réside dans sa soumission au droit fédéral strict; elle ne laisse pas de marge de manoeuvre. Certes, ce texte est une initiative populaire importante; il participe au débat général sur les primes d'assurance-maladie et leur coût, mais la commission a dû constater qu'elle n'arrivait pas à proposer un contreprojet solide. Je l'ai dit et je le répète, cet enjeu, tel que la commission l'a pensé, doit se discuter à Berne et non au niveau genevois. Je vous remercie pour votre attention.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien ne va pas voter pour cette initiative ni pour un contreprojet. Il part du principe qu'il faut réfléchir à une manière de sortir enfin du système actuel; on sait que celui-ci ne fonctionne pas, et il faut trouver une autre solution. S'agissant de l'assurance-maladie, il faut changer de paradigme. Rester dans le même système, créer une assurance-maladie dans le même système, le rapporteur l'a très clairement dit, ça n'apportera strictement rien de plus par rapport à la situation que nous connaissons actuellement ! Que va-t-il se passer ? Les médecins, les physiothérapeutes, les pharmaciens, nous avions fondé une assurance-maladie à la création de la LAMal en 1996; nous avions décidé de lancer une caisse d'assurance-maladie. Nous nous sommes rendu compte que nous nous sommes fait avoir en long, en large et en travers par les autres caisses, et M. Couchepin a fermé la nôtre du jour au lendemain ! Sans raison valable, nous n'avons plus eu de caisse maladie. Pourquoi ? Parce qu'en participant au système, nous commencions à comprendre comment il marchait et nous commencions à avoir quelques doutes sur le système des caisses maladie.
Comme l'a très bien dit le rapporteur, si vous créez une caisse maladie publique genevoise, elle va recueillir tous les mauvais risques. Que va-t-il se passer si vous fixez des primes trop basses ? Les gens vont aller dans votre assurance parce que les primes y seront très basses, mais ils y iront sans réserve. Ce qui fait que vous devrez constituer des réserves en fonction des dizaines et des dizaines de milliers de personnes qui vont s'affilier à votre caisse, et l'année suivante vos primes vont augmenter. Garder des primes basses, c'est donc illusoire. La Confédération décide quelles sont les primes que vous devez pratiquer, et si vos primes sont trop basses, elle va vous demander de les augmenter. Dans le système actuel, il est donc illusoire de penser que créer une caisse maladie unique permettra aux Genevois de se faire soigner tout en ayant des primes d'assurance basses.
Le rapporteur vous a dit qu'il y a trois initiatives qui sont en discussion - deux fédérales et une cantonale - et je pense que c'est là que réside peut-être la solution, surtout dans l'initiative relative à la caisse de compensation. Elle permettrait d'obtenir de Berne le droit d'essayer d'abord de gérer les réserves au niveau cantonal, de gérer l'ensemble des primes d'assurance-maladie et de décider une prime unique pour toutes les caisses maladie en fonction du système que le patient - l'assuré - décide d'adopter.
Ce n'est pas en restant dans le système actuel qu'on va trouver une solution au problème des primes d'assurance-maladie. Il faut quand même dire aux 14 000 personnes qui ont signé cette initiative qu'elles n'obtiendront strictement rien avec ce système-là. Nous vous recommandons donc de rejeter ce texte, même s'il a un but vertueux. Il ne sert à rien de lui opposer un contreprojet puisqu'il y a d'autres possibilités, dont l'initiative de mon parti sur les coûts de la santé, et qu'elles seront soumises au peuple prochainement. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites, notamment par notre excellent rapporteur, et je ne vais donc pas les répéter. Une caisse publique cantonale, dans le cadre du système actuel, ne va pas résoudre quoi que ce soit. Elle ne va pas résoudre le problème des primes, qui resteront fixées comme à l'heure actuelle et donc soumises à cette spirale de l'augmentation des coûts; elle ne résoudra pas non plus le problème de la chasse aux bons risques ni le fait de vouloir se débarrasser des mauvais risques. Les prestations seront toujours celles fixées par la loi - là non plus, la caisse n'a pas de marge de manoeuvre.
Les socialistes veulent agir sur les primes avec le plafonnement à 10% du revenu que nous avons proposé au niveau cantonal, mais que nous allons également présenter au niveau fédéral. Et puis intervenir aussi sur le système - et sur cette espèce de fausse concurrence que l'on connaît actuellement - en permettant aux cantons d'opter pour un système différent basé notamment sur une mutualisation des réserves et une fixation d'un montant de prime unique, comme cela a été expliqué par le préopinant PDC. Les alternatives que nous proposons sont aussi une forme de réponse aux personnes qui ont signé ce texte: celui-ci ne permettrait pas d'apporter des solutions. C'est pourquoi nous rejetterons également cette initiative. Je vous remercie.
M. Patrick Saudan (PLR). Le groupe PLR fait siennes tant les conclusions du rapport du Conseil d'Etat que celles qui ont été énoncées par le rapporteur - et je souligne d'ailleurs l'excellence de son rapport. Le lancement de cette initiative est clairement le reflet de l'exaspération de la population genevoise face à l'augmentation constante des primes. Malheureusement, la solution proposée par ce texte est inadéquate pour les raisons rappelées par mes préopinants, c'est-à-dire le corset des obligations fédérales, qui font qu'une caisse publique cantonale serait totalement inopérante. Nous ne soutiendrons pas non plus un contreprojet.
Je finirai en vous disant que c'est quand même illusoire de penser que nous allons diminuer l'augmentation des coûts de la santé en changeant le système de financement. Parce que l'augmentation des primes d'assurance-maladie est quand même le reflet - même indirect, même s'il y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte - d'une augmentation des coûts de la santé qui est très multifactorielle. Plusieurs interventions seront donc nécessaires, à plusieurs niveaux, pour essayer de la juguler. N'agir que sur le système des primes d'assurance-maladie ne sera malheureusement pas suffisant. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). C'est l'exemple type de la fausse bonne idée ! C'est une fausse bonne idée parce que l'on crée une caisse publique au milieu d'acteurs privés, c'est-à-dire qu'on met un agneau au milieu des loups ! On ne laissera à cette caisse publique que le choix de se faire manger par le lobby des caisses maladie. J'en veux quelque part aux initiants d'avoir commis une erreur politique, c'est-à-dire d'avoir lancé ce texte pour un simulacre - un simulacre - de caisse publique, alors qu'il s'agit en fait d'une caisse privée déguisée en caisse publique puisqu'elle est soumise à la concurrence. Elle n'aura que les assurés coûteux et malades, et le plus grave, ce en quoi cette initiative est dangereuse, c'est qu'elle détourne l'attention du véritable combat: celui en faveur de l'initiative fédérale qui demande qu'on ait un système sous forme de caisse de compensation. Elle détourne aussi l'attention de l'autre initiative fédérale qui demande que les membres du conseil d'administration d'une caisse maladie ne puissent pas siéger au Parlement fédéral. Ce sont les deux axes importants qui nous permettront de changer le système. Le MCG s'oppose résolument à l'initiative 165 et déplore qu'environ 14 000 électeurs genevois aient été trompés. Nous vous demandons de véritablement vous opposer, de manière systématique et ferme, à cette initiative.
M. Marc Falquet (UDC). Cette initiative a au moins l'avantage de nourrir le débat sur le coût des primes, sur le coût de la santé et surtout sur la politique de la santé. C'est la politique préventive en matière de santé qui est à la base des augmentations régulières des coûts des soins - il ne faut pas parler des coûts de la santé mais des coûts des soins, puisque la santé n'engendre pas de coûts. Les initiants ont raison; ils ont soulevé des problèmes réels. Les gens modestes et la classe moyenne renoncent effectivement aux soins: des dizaines de milliers de personnes y renoncent car elles ont des franchises élevées.
Je ne vais pas répéter tout ce qui a été dit. Une des solutions serait d'abroger la LAMal, et là on pourrait en effet proposer des solutions cantonales qui iraient dans le sens du bien-être de la population. Elles seraient associées à une politique globale de santé publique préventive, d'éducation à la santé dès le tout jeune âge, d'éducation des parents, comme on l'a déjà expliqué maintes fois. L'UDC, comme presque tous les partis, je crois, refusera malheureusement cette initiative: si elle découle d'une bonne idée, elle ne représente pas la bonne solution. Merci.
Mme Salika Wenger (EAG). A écouter les députés qui viennent d'intervenir, nous devrions attendre un miracle fédéral; tenter quelque chose, tenter d'infléchir la politique de la santé serait totalement téméraire. Aux 14 000 signataires, tout le parlement répond: «Vous vous êtes trompés, on ne peut pas faire ça: nous allons être en concurrence avec les caisses privées !» Je vais vous dire: ce discours, c'est celui qu'on entend depuis toujours ! Depuis toujours, on nous explique qu'une assurance-santé d'Etat serait en concurrence. Pas obligatoirement ! La situation est devenue totalement intolérable depuis la LAMal ! J'aimerais rappeler à mes camarades que la LAMal ne s'est pas votée toute seule. Elle a été proposée par certaines personnes affiliées aux mêmes groupes politiques qui aujourd'hui viennent nous expliquer que la LAMal n'est pas terrible et qu'elle fait du mal. Que depuis qu'on a la LAMal, les montants des... des...
M. Rémy Pagani. Des primes.
Mme Salika Wenger. Pardon ?
M. Rémy Pagani. Des primes !
Mme Salika Wenger. Oui, les montants des primes; merci, Monsieur Pagani ! (L'oratrice rit.) Les montants des primes sont devenus absolument intolérables ! La classe moyenne et la classe populaire ne peuvent plus faire face à ce genre de politique de la santé. Si cette assurance-maladie et accidents publique sans but lucratif existait, peut-être - peut-être - aurions-nous certains avantages. Comme l'a expliqué tout à l'heure le rapporteur, il n'y aurait pas de pub, ce qui permettrait effectivement de faire des économies. On ne ferait pas de publicité, c'est très bien, mais il ne s'agirait pas seulement de ça: cette assurance ne serait pas affiliée à un groupe - à un de ces énormes groupes ! - qui de fait se fichent totalement de la santé des citoyens. Pour eux, l'obligation de s'affilier est un prétexte pour attirer vers les assurances complémentaires, qui sont plus chères.
Cette assurance nous procurerait un autre avantage: nous pourrions par exemple y affilier les fonctionnaires. L'Etat paie tous les ans 300 millions pour les personnes qui ont des difficultés à payer leur assurance. Ces 300 millions pourraient revenir dans les poches de l'Etat plutôt que de finir dans celles des assurances privées. Le canton de Genève paie et ça va dans la poche des assurances privées ! Quand on a introduit la LAMal, l'idée était de créer une assurance sur le même modèle que l'AVS, un système relativement juste, social et efficace. Et la droite a réussi à nous mettre en place un système de marché ! Couverture obligatoire - très bien - mais auprès d'une assurance privée.
Il faudra m'expliquer où se trouve la... ou plutôt justifier la raison pour laquelle la prime peut passer du simple au double d'une caisse à une autre alors que pour l'assurance de base les obligations sont les mêmes pour toutes les caisses ! Personne ne nous l'explique, et comme le disait très bien le rapporteur, le mode de fonctionnement économique des assurances est un tout petit peu opaque - c'est un euphémisme. Ce système n'est ni social ni libéral: la population est captive et les assurances absolument toutes-puissantes ! Elles décident quand elles veulent augmenter les primes et ne pas les augmenter ! L'année dernière, nous avons eu 4% d'augmentation, cette année 3%. Le journal est là, je vous ai amené la «Tribune de Genève»: nous aurons 3% d'augmentation ! Une fois de plus ! Jusqu'à quand allons-nous supporter la situation actuelle ? Supporter - personne ne la supporte plus. Mais ouvrons la discussion ! Il faut exprimer ce que nous ne voulons pas, sans se contenter de dire: «Non, votre projet est un peu faible !»
L'idée, avec cette initiative, était vraiment de dire que dans le canton de Genève, alors que nous payons un maximum, que nous avons payé des surplus - je vous le rappelle - qui ne nous ont jamais été remboursés... C'était trop compliqué de rembourser ! Par contre, ce n'est pas compliqué de venir prendre l'argent dans les poches des assurés ! Il se peut que ce texte ne soit pas compatible avec le droit supérieur, et patati et patata; ça, ce sont des discussions de techniciens ! Là, je parle de la base ! Et les gens de la base, des gens comme moi et comme plein d'autres, trouvent que les primes d'assurance que nous payons aujourd'hui ne correspondent en rien à la réalité de la santé. Ce n'est pas le coût de la santé qui est prohibitif, ce ne sont pas les coûts des médicaments, mais tout simplement le coût des primes d'assurance qui font qu'un citoyen normal ne peut pas se sentir normalement assuré aujourd'hui - travaillant ou pas, homme ou femme, peu importe. Ce système n'est plus valable, tout le monde le sait, et cet objet est un signal d'alerte pour dire que ce n'est plus acceptable.
L'initiative a été signée par 14 000 personnes et je pense que ce serait faire preuve d'un minimum de respect que de leur dire que nous soutenons leur révolte, que nous soutenons leur appréciation de la situation. Et que même si ce texte n'est pas vraiment compatible avec la loi, nous sommes d'accord avec cette lutte et avec cette discussion ! Or là, tout le monde a refusé ! Vous avez tous refusé ! Tout le monde recule et se met à plat ventre devant qui ? Devant les assurances privées ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Madame. Je rappelle aux députés que nous ne pouvons pas prendre de boissons à l'intérieur de la salle: c'est une exigence de ceux qui nous la prêtent. Pendant que vous réfléchissez à cela, je passe la parole à Mme la députée Frédérique Perler.
Mme Frédérique Perler (Ve). Merci, Monsieur le président. S'agissant de cette initiative, je relève qu'un certain nombre de citoyens - 14 400 personnes - se sont mobilisés pour proposer une solution. Je crois qu'on ne peut pas ignorer ce cri de colère de la population qui en a tout simplement assez de payer des primes beaucoup trop importantes, beaucoup trop chères, par rapport à son budget. Sans rappeler tout ce qui a été dit sur la non-conformité au droit fédéral, etc., le seul avantage que nous, les Verts, trouvions dans cette initiative, c'est qu'elle a le mérite d'offrir un peu plus de transparence quant aux coûts d'une caisse maladie. Ça, c'est important. Hélas, Mesdames et Messieurs les députés, bien que cet objet soit a priori assez séduisant, il faut bien constater qu'en l'appliquant, nous nous retrouverions finalement dans une impasse. Mais il s'agit tout de même de tenir compte du fait que 14 400 personnes ont signé l'initiative et qu'elles attendent une réponse de notre parlement - et même du Parlement fédéral. Cette initiative pose des questions cruciales, des questions très importantes, et on ne peut pas ignorer toutes ces personnes qui se sont mobilisées en sa faveur.
Ce que je relève maintenant, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, ce sont les paroles du MCG, que nous considérons comme irrecevables, à savoir que les initiants ont commis une erreur politique. Ça, c'est irrecevable ! Ils n'ont pas commis d'erreur politique; ils ont le mérite, en tant que citoyens, d'avoir fait une proposition. Même si elle n'est pas adéquate, même si elle n'est pas totalement réaliste, une proposition a été faite ! Dire que c'est une initiative dangereuse et qu'elle masque le véritable combat à mener est d'une hypocrisie crasse car l'on sait bien que nos députés au Parlement fédéral ne sont pas vraiment pressés d'agir à ce sujet. C'est outrageant, Monsieur le président, de dire que ces 14 400 électeurs ont été trompés; ces 14 400 électeurs ont les pieds sur terre et savent très bien ce qu'ils font. Quand ils signent un texte, ils se renseignent ! C'est outrageant pour eux ! Par conséquent, les Verts continueront à s'abstenir sur cette initiative, comme ils l'ont fait en commission. Car la refuser, c'est nier la mobilisation de tous les signataires, et l'accepter n'est vraisemblablement pas réaliste. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est de nouveau à M. le député Cyril Mizrahi, pour cinq minutes vingt au maximum.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais revenir sur un certain nombre de choses qui ont été dites; on a l'impression que la majorité de ce parlement est d'accord pour refuser ce texte, mais il y a quand même des désaccords politiques que j'aimerais souligner. Mon collègue Falquet - vous transmettrez, Monsieur le président - nous dit qu'il suffirait d'abroger la LAMal. Mais qu'y avait-il avant la LAMal, Mesdames et Messieurs, chers collègues ? Un système d'assurance privée qui n'était pas obligatoire, soit une logique comme celle des Etats-Unis, où des gens ne sont pas assurés et n'ont donc pas accès aux soins, même si c'est un peu moins le cas maintenant. Bien sûr que la LAMal est très imparfaite, bien sûr que la LAMal fait mal - on l'a dit - mais pas de LAMal pourrait faire plus mal encore, si vous me permettez la formule !
Reste un problème central dans cette LAMal, et je prends là le contrepied de ce qui a été dit par M. Saudan - vous transmettrez, Monsieur le président: selon lui, ce n'est pas seulement une question de montant des primes et de proportion par rapport au revenu, c'est aussi une question de coût des soins. Oui, c'est bien une question de coût des soins, mais la question des primes est néanmoins tout à fait centrale dans la LAMal puisque la fixation des primes se fait par tête. Cela signifie que, hors les aides de l'Etat, on paie exactement le même montant qu'on soit riche ou qu'on soit pauvre. L'augmentation du coût des soins a donc forcément un impact extrêmement différent selon le revenu. Je crois qu'il est maintenant démontré et admis que cette augmentation du coût des soins - mais aussi des primes, c'est pour ça qu'on parle en général de coûts de la santé même si, comme l'a dit mon collègue Falquet, le terme est impropre - a un impact fondamentalement différent selon le revenu. Les personnes à revenus bas à moyens renoncent aux soins, ce à quoi contribue le système des franchises et des quotes-parts. Ce système ne pousse pas à la responsabilisation parce que les personnes avec de hauts revenus ne sont évidemment que marginalement touchées, voire pas du tout. Les personnes à bas revenus sont par contre massivement touchées et renoncent à se soigner.
Certes, ce qui est arrivé récemment dans les Grisons et dont la presse s'est fait l'écho... Pour rappel, une personne atteinte du VIH n'a pas été soignée parce qu'elle était en défaut de paiement. Elle n'a pas du tout eu accès aux soins parce qu'on disait que ce n'étaient pas des soins d'urgence. Et cette personne a fini par mourir ! Certes, d'après les indications qu'on a eues à la commission des Droits de l'Homme - il y aura un rapport sur cette question - ce cas ne pourrait vraisemblablement pas se produire dans le cadre du système genevois. Mais c'est quand même un signal alarmant, qui doit nous préoccuper, par rapport à la question fondamentale de l'accès aux soins dans notre pays. C'est pourquoi on doit agir pour réformer le système; simplement, cette initiative n'est pas la bonne manière de faire. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Pour une minute dix-sept, je passe la parole à Mme la députée Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je prends la parole pour insister sur un aspect: les 14 400 personnes qui ont signé cette initiative ont poussé un véritable cri de colère et d'exaspération à l'égard des caisses maladie ! Elles ont dit leur ras-le-bol à l'égard des caisses maladie, qui pompent littéralement le budget d'une grande partie des ménages de notre canton ! Elles ont en partie réitéré l'opinion exprimée par les électeurs, qui ont accepté la caisse unique dans notre canton ! Vous pouviez entendre dans le tram, à l'époque de la récolte des signatures, des gens qui disaient: «Tu as signé l'initiative sur la caisse maladie ?»
La population porte véritablement un grand intérêt à ces questions - c'est un point auquel nous devons être particulièrement sensibles. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) La mainmise des lobbies des caisses maladie sur cette problématique, le fait que la LAMal ne soit plus une assurance sociale puisqu'elle est soumise aux lois du marché, qui sont impitoyables, ne sont plus acceptables aujourd'hui. C'est cela que les signataires ont remis en question ! Pour ces raisons, nous pensons important, quelle que soit la fragilité du dispositif prévu, de donner un signal positif à ces 14 400 personnes. C'est pourquoi nous avions accepté ce projet en comité...
Le président. C'est fini, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Je vais terminer, si vous permettez !
Le président. Non, je ne permets pas: c'est fini, je suis désolé.
Mme Jocelyne Haller. Le groupe Ensemble à Gauche... (Le micro de l'oratrice est coupé. Remarque. Applaudissements.)
Le président. Merci, la parole est à M. le député Daniel Sormanni.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, Mme la députée Salika Wenger a raison sur le diagnostic - vous transmettrez, Monsieur le président: ces primes deviennent insupportables. Mais elle a tort sur la solution ! La solution n'est pas de créer une caisse cantonale qui sera confrontée aux mêmes problèmes que ceux que nous connaissons aujourd'hui avec les caisses privées. Elle fixera peut-être des primes sociales la première année, mais l'année d'après elle aura capté tous les mauvais risques - tout le monde voudra aller là où c'est le moins cher, c'est normal - ne pourra plus assumer ses obligations et va faire exploser ses cotisations. Ou bien alors il faudra faire payer ça par le budget de l'Etat; je vous laisse imaginer si c'est possible. Ce n'est pas possible ! Ce n'est pas raisonnable ! C'est une mauvaise initiative, et je pense que les 14 000 personnes qui l'ont signée n'ont pas compris les enjeux. Elles n'ont pas compris qu'une caisse cantonale soumise aux mêmes règles que les caisses privées nous mènerait dans une impasse !
La solution est ailleurs, et c'est là qu'il faut concentrer les efforts: en signant les initiatives fédérales. La première demande une liberté d'organisation des cantons de façon à leur donner du pouvoir pour créer ces caisses de compensation, ce qui permettra d'avoir de la transparence et de contrôler les coûts. Et puis la deuxième initiative veut dire stop à ces lobbyistes à Berne en interdisant à tous ceux qui de près ou de loin sont rémunérés par les caisses de siéger au Parlement fédéral. Et là, on pourra peut-être changer la LAMal et l'améliorer, et faire en sorte qu'on arrête cette course, cette spirale sans fin des coûts qui met à mal tous ceux qui ne parviennent plus, ou de moins en moins, à payer leur assurance-maladie. Le paiement des primes se fait d'ailleurs partiellement aux frais de la Confédération et des cantons qui aident une grande partie de nos contribuables, et toujours plus chaque année. Il y a donc bel et bien un problème et je pense que c'est là qu'il faut agir: il faut signer ces initiatives fédérales qui permettront de corriger le tir ! Parce que tant qu'on ne pourra pas changer ou améliorer la loi fédérale, on sera pris dans cette tourmente !
Votre caisse cantonale ne tiendra pas plus de deux ans et elle aura mis à mal les finances du canton, qui sont déjà bien mises à mal ! Je crois que vous faites fausse route, Mesdames ! (Remarque.) Oui, justement; joli jeu de mots ! C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de rejeter cette initiative, mais de soutenir les initiatives fédérales qui circulent, seules à même de résoudre ces problèmes. Je vous remercie de suivre les mots d'ordre du MCG. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je signale que le temps de parole est calculé sur cent vingt minutes au lieu des nonante prévues parce que l'ordinateur est configuré ainsi. Je vous interromps donc à la seconde près, mais il est vrai que ça ne correspond pas exactement à ce qui est affiché sur l'écran devant vous. Quoi qu'il en soit, je passe maintenant la parole à M. le député Marc Falquet.
M. Marc Falquet (UDC). Merci, Monsieur le président. Cette initiative a été signée par 14 400 personnes, mais ce sont 500 000 personnes qui, à Genève, sont vraiment fâchées de cette LAMal ! Toutes les solutions que vous allez proposer sont des emplâtres sur des jambes de bois. La seule solution, c'est l'abrogation de la loi sur l'assurance-maladie. Avant son adoption, il n'y avait effectivement pas d'obligation de s'assurer mais il y avait dix fois moins de gens qui ne payaient pas leurs primes ! (Remarque. Rires. Commentaires.) Exactement ! Les gens payaient leurs primes ! Maintenant, les gens ne paient plus leurs primes - si on continue comme ça, c'est clair que dans dix ans, elles s'élèveront à 1000 F par mois ! Aucune initiative, quelle qu'elle soit, ne va empêcher l'augmentation des primes, parce que c'est le système qui veut ça: abrogeons donc la LAMal et façonnons-en un nouveau qui puisse donner satisfaction à la population au niveau cantonal, avec une politique de santé globale. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. On va peut-être abroger la LAMal, mais faites attention à ne pas abroger le micro ! Merci de ne pas toucher les micros, s'il vous plaît: on n'est pas obligé de les gifler ! Je passe la parole à M. le député Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (PLR). Merci, Monsieur le président, ce sera très bref. Je vous prie de rappeler à M. Cyril Mizrahi que l'Etat de Genève a une politique relativement redistributive par rapport aux primes d'assurance-maladie: 40% des Genevois touchent des subsides. Ce poste est l'un des plus importants de notre politique sociale, il représente à peu près 340 millions. L'Etat genevois assure donc une politique redistributive dans la mesure de ses moyens. Merci.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote sur la prise en considération de cette initiative.
Mise aux voix, l'initiative 165 est refusée par 60 non contre 9 oui et 19 abstentions.
Le président. Je mets maintenant aux voix le principe d'un contreprojet.
Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est refusé par 90 non et 2 abstentions.
Débat
Le président. Nous allons maintenant traiter l'IN 169 et le rapport IN 169-A en catégorie II, trente minutes, et je cède la parole à Mme Delphine Klopfenstein Broggini.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, après un accueil extrêmement favorable de la part de la population lors de la récolte de signatures - 6500 paraphes ont été engrangés en plein coeur de l'hiver - après un accueil positif de la part du Conseil d'Etat, exprimé dans l'un de ses derniers points presse, les Verts vous encouragent aujourd'hui à réserver vous aussi un bon accueil à cette initiative intitulée à juste titre «De l'air, moins de bruit. Préservons notre santé face à la pollution.»
En quelques mots, cette initiative exige de l'Etat des actions concrètes de lutte contre la pollution de l'air et contre le bruit, cela non seulement pour préserver notre santé, mais aussi pour améliorer la qualité de l'environnement. Il s'agit ici simplement de faire respecter dans l'ensemble du canton les normes actuellement en vigueur au niveau fédéral en matière de pollution. L'initiative présente également des mesures concrètes, comme la limitation du trafic motorisé, l'installation de systèmes de chauffage plus efficients ou la réduction des émissions de l'aéroport, mesures qui iraient bien entendu dans le sens d'une diminution de la pollution. Le canton devra aussi réagir rapidement en cas de pic de pollution, sachant que ces pics sont des états qu'on aimerait à terme ne plus devoir vivre, dans la mesure où ils constituent évidemment un moment de pollution extrême. Quoi qu'il en soit, lors de ces pics l'Etat devra mettre en place des mesures rapides, telles que la gratuité des transports publics ou la limitation des véhicules les plus polluants. L'initiative instaure également un nouvel article sur la question du bruit, et c'est extrêmement intéressant, parce que la pollution sonore affecte bel et bien directement la qualité de vie de tout un chacun.
En Suisse, 40% de la population souffre des valeurs excessives de la pollution de l'air, tandis qu'à Genève, 60% de la population souffre de l'excès de bruit. Il s'agit donc bien là d'un vaste problème de santé publique. On sait aussi que chaque année en Suisse, la pollution entraîne jusqu'à 20 000 jours d'hospitalisation et provoque 3000 décès prématurés, soit l'équivalent de l'ensemble des habitantes et habitants de Perly-Certoux, Satigny ou Bellevue, par exemple. Les maux auxquels s'attaque cette initiative sont intimement liés aux maladies chroniques, que ce soit l'asthme, les difficultés respiratoires, les bronchites aiguës, les maladies cardiovasculaires, le stress, la fatigue, etc. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) La pollution est donc un danger sanitaire, cela ne fait aucun doute, mais également un gouffre financier, puisqu'elle induit des coûts liés à la santé qui peuvent atteindre 4 milliards de francs annuels en Suisse. C'est donc avec le regard de spécialistes de la santé que les Verts souhaitent entamer la réflexion et l'étude autour de cette initiative en commission, car le texte vise spécifiquement à protéger la santé de la population en neutralisant les nuisances sonores et la pollution de l'air. Pour les Verts, une approche via la commission de la santé a dès lors tout son sens. Je vous remercie d'avance de votre bon accueil. (Quelques applaudissements.)
Mme Simone de Montmollin (PLR). Monsieur le président, chers collègues, le PLR accueille avec une certaine bienveillance cette initiative qui touche à des sujets souvent débattus dans ce Grand Conseil, notamment la question de l'assainissement de l'air, de la qualité de l'air. De nombreuses dispositions ainsi que des plans stratégiques existent déjà dans le canton pour améliorer la qualité de l'air et diminuer les pollutions sonores, mais sur ce dernier point il est vrai que le plan stratégique du Conseil d'Etat doit maintenant s'arrimer au nouveau plan édité par la Confédération et qu'il y a lieu d'étudier la question au niveau environnemental de manière plus détaillée. Cette initiative a suscité une réserve quant à l'une des dispositions qu'elle veut voir instaurées, à savoir les mesures de restriction du trafic en cas de pic de pollution, il nous paraît donc judicieux d'étudier tout cela en commission, mais nous proposons le renvoi à la commission de l'environnement et non pas de la santé. Voilà la proposition que nous formulons.
Le président. Merci, Madame la députée. Nous procéderons donc à un vote puisque nous sommes saisis de deux demandes de renvoi en commission différentes. En attendant, la parole est à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs. C'est une erreur, Monsieur le président !
Le président. Très bien. Je cède donc le micro à Mme Delphine Bachmann.
Mme Delphine Bachmann (PDC). Merci, Monsieur le président. Le PDC prend acte de ce rapport qui met en évidence que les mesures sont déjà mises en oeuvre ou en voie de l'être. Nous saluons le travail effectué à ce propos et encourageons le Conseil d'Etat à poursuivre sur cette voie, sachant que les coûts de la santé induits par la pollution environnementale augmentent chaque année. En effet, les maladies non transmissibles connaissent une explosion alarmante, et c'est un sujet de préoccupation majeur pour nos concitoyens. La pollution constitue dès à présent un enjeu de santé publique qui ne saurait attendre. Nous rendons cependant le Conseil d'Etat attentif au fait que l'OMS a notamment relevé que nos normes étaient désormais trop légères. Il sera donc intéressant de voir comment le plan sera adapté à cet enjeu lors du travail en commission. Je vous remercie.
M. Jean Burgermeister (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit ici, la pollution de l'air est un sujet sérieux, grave, dont il faut mesurer l'ampleur, parce qu'elle engendre des répercussions importantes sur la santé - avec à la clé des décès prématurés et le développement de maladies, notamment respiratoires - ainsi qu'une hausse des coûts de la santé, qu'il s'agirait peut-être parfois d'intégrer lorsqu'on parle de politique de mobilité, ce que la droite se refuse à faire pour l'instant. La pollution a évidemment aussi des répercussions environnementales, et nous savons aujourd'hui que nous avons le devoir d'agir fortement et rapidement dans ce domaine.
L'initiative est donc évidemment bienvenue à ce titre dans la mesure où elle amène des réponses à cette problématique importante - et nous appellerons bien sûr à la soutenir - mais à mon sens elle n'est pas suffisante parce qu'elle ne permet pas de s'attaquer réellement aux racines du problème. Des mesures urgentes doivent naturellement être prises en cas de pic de pollution, et l'initiative le prévoit, c'est très bien, mais elles devraient être instaurées bien en amont pour éviter d'atteindre ces pics de pollution qui sont néfastes pour l'ensemble de la population du canton. A ce propos, il est intéressant de lire par exemple que les transports publics seront gratuits, une disposition qui serait vraisemblablement susceptible de pousser les gens à les emprunter. Pourtant, lorsque nous-mêmes nous défendons la gratuité des transports publics, on nous répond toujours que cela n'a aucune influence...
Le Conseil d'Etat indique qu'il a intégré l'essentiel des propositions dans ses mesures, avec succès, dit-il, puisque la pollution de l'air a diminué ces trente dernières années, avec tout de même une stagnation depuis les années 2000. Mais si ça fait vingt ans que la pollution de l'air ne diminue pas, c'est quand même qu'il faut faire le constat que les mesures prises actuellement sont insuffisantes et qu'il convient d'aller plus loin. Par ailleurs, le Conseil d'Etat a beau jeu d'appeler à soutenir cette initiative et de parler de la lutte contre la pollution de l'air alors qu'il propose aujourd'hui le déclassement de treize hectares de zone agricole en bordure de l'aéroport, là où les normes de pollution sont largement dépassées, pour construire des terrains de foot. On sait en effet que les personnes qui pratiqueront une activité sportive à cet endroit en subiront beaucoup plus fortement les répercussions en termes de santé. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Le groupe Ensemble à Gauche craint donc qu'il s'agisse là d'un prétexte pour déclasser ce terrain... Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Sandro Pistis (MCG). Il est vrai que pour nous la santé de nos résidents est un élément préoccupant, et il est assez surprenant que cette initiative ne traite pas de la problématique des pendulaires, des frontaliers... (Commentaires.) ...qui tous les jours traversent nos frontières, sachant que 50 000 à 60 000 véhicules entrent sur notre territoire le matin et en sortent le soir. Ce genre de va-et-vient importe et exporte inévitablement de la pollution de l'air, alors que ces gens devraient faire un effort et utiliser d'autres moyens pour se déplacer dans notre canton.
Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris, cette initiative parle d'un élément important, la santé de nos concitoyens, mais elle ne relève toutefois pas certains aspects également importants, notamment la question des frontaliers qui tous les jours empruntent nos routes, dans des véhicules qui pour certains ne sont pas forcément réglés comme ils devraient l'être. Le groupe MCG soutiendra donc le renvoi de cette initiative à la commission de l'économie... (Exclamation.) Pardon, à la commission de l'environnement, car nous pensons qu'elle pourra y être traitée de manière convenable, en espérant que nous trouverons une solution à cette problématique des véhicules frontaliers qui ne cessent de venir sur notre territoire du lundi au vendredi et qui ne contribuent pas à ce que l'on ait un air sain. Merci.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, il va sans dire que le parti socialiste soutiendra cette initiative et son renvoi à la commission de l'environnement pour étude. (Remarque.) Oui, de l'environnement ! Quelles sont aujourd'hui les principales causes de la pollution de l'air et de la pollution par le bruit ? Il y a tout d'abord la mobilité, puis tout ce qui concerne la question de l'isolation des bâtiments, sans oublier une problématique qu'on n'évoque souvent pas quand on parle de pollution - qu'il s'agisse de l'air ou du bruit - celle de l'aéroport. Vous connaissez le discours des socialistes: nous sommes pour une mobilité beaucoup plus durable qu'aujourd'hui et nous soutenons les grands projets ferroviaires comme celui du Léman Express, nous soutenons l'extension des lignes de tram, nous soutenons tout le développement de la politique de mobilité douce, que ce soit pour les piétons, les vélos ou les nouveaux modes de déplacement de mobilité douce comme les trottinettes - vous savez que ça m'est cher. Par contre, quand on voit aujourd'hui qu'il y a encore certains projets, comme celui d'une traversée autoroutière du lac qui va nous coûter au minimum 4 milliards, de 4 à 5 milliards... (Commentaires.) ...et qui sera peut-être construite en 2040, alors que nos modes de déplacement auront totalement changé et que la population veut désormais moins de pollution de l'air et moins de pollution par le bruit pour sa santé et celle de nos enfants, Monsieur le président, on se demande comment on peut encore travailler sur une telle traversée autoroutière du lac.
Je n'ai malheureusement pas le temps de développer la question de l'isolation des bâtiments, mais il est clair que l'Etat, les collectivités publiques et les communes doivent faire leur travail dans ce domaine, de même que les régies, notamment privées, les investisseurs, etc., doivent bien entendu penser à ces aspects dans la conception des bâtiments mais également lors de leur rénovation. Je finirai par la problématique de l'aéroport de Genève, dont on a beaucoup parlé dans cette enceinte. Aujourd'hui, l'aéroport accueille environ 17 millions de passagers, avec une projection dans les plans, si l'on peut dire, faisant état de 25 millions de passagers en 2030. Il n'est pas possible, Monsieur le président, d'augmenter le nombre de passagers à 25 millions en 2030 quand on connaît les conséquences que cela entraîne en termes de pollution de l'air et de nuisances sonores. Des dizaines de milliers de personnes résident autour de cet aéroport et la plupart des communes genevoises souffrent aujourd'hui du bruit et de la pollution de l'air. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous devons donc revoir le développement de notre aéroport afin qu'il soit plus maîtrisé, plus équilibré. En conclusion, qu'il s'agisse de l'isolation des bâtiments, d'une mobilité plus durable ou du développement de l'aéroport, nous devons prendre de vraies décisions, qui demandent un certain courage politique, et c'est ce que veut cette initiative. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis de deux demandes de renvoi, d'une part à la commission de la santé, d'autre part à la commission de l'environnement et de l'agriculture. Nous allons procéder à un seul vote, écoutez bien ! Celles et ceux qui souhaitent que cette initiative soit renvoyée à la commission de la santé votent oui, celles et ceux qui souhaitent qu'elle soit renvoyée à la commission de l'environnement et de l'agriculture votent non. Nous sommes bien d'accord ? Le non équivaut à un renvoi à la commission de l'environnement et de l'agriculture, tandis que le oui équivaut à un renvoi à la commission de la santé. (Brouhaha.) Bien, nous pouvons passer au vote.
Mis aux voix, le renvoi de l'initiative 169 et du rapport du Conseil d'Etat IN 169-A à la commission de la santé est rejeté par 76 non contre 16 oui.
L'initiative 169 et le rapport du Conseil d'Etat IN 169-A sont donc renvoyés à la commission de l'environnement et de l'agriculture.
Débat
Le président. Nous passons à notre première urgence, la proposition de résolution 866 que nous traitons avec la R 851-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le député Jean Batou.
M. Jean Batou. C'est sur quoi ? Non, c'est une erreur, ce n'est pas moi.
Le président. C'est une erreur. (Commentaires.) On attend M. Sormanni - qui arrive. Monsieur Sormanni, vous avez la parole.
M. Daniel Sormanni (MCG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez donc reçu aujourd'hui le rapport sur cette résolution 851. Il n'est pas inutile de rappeler qu'avant que la commission de contrôle de gestion traite cette résolution, la commission, par l'intermédiaire de son président, a été contactée par M. Maudet qui demandait une audition en urgence le lundi 14 mai. La commission, après en avoir débattu, a accepté cette audition et M. Maudet a répondu à nos questions et raconté, disons, comment il voyait la problématique de ce voyage à Abu Dhabi. Si vous avez eu le temps de consulter ce rapport, vous avez vu que, ce 14 mai, M. Maudet nous disait bien: «[...] il s'agissait d'un voyage strictement privé, mais il comprend que certains éléments puissent soulever des questions qu'il juge légitimes. Il précise que les informations complémentaires qu'il donnera volontiers à la CCG relèvent toutefois de sa vie privée et il apprécie le fait que cette audition se déroule à huis clos.» Un certain nombre de questions ont été posées pour «savoir s'il est allé aux Emirats arabes unis mandaté par le Conseil d'Etat ou par le département fédéral des affaires étrangères pour quelque mission secrète, M. Maudet répond par la négative. Il ajoute qu'il n'y a pas eu d'argent public utilisé [...] et que son voyage à Abu Dhabi était d'ordre privé au contraire de celui qu'il avait fait six mois plus tôt à Dubaï [...]». Mesdames et Messieurs les députés, l'audition s'est déroulée dans cet état d'esprit, que je vous laisserai découvrir dans ce rapport - je ne vais pas le relire aujourd'hui en plénière, il fait soixante pages.
M. Maudet nous a précisé que «leur hôte sur place, un entrepreneur local avec lequel M. Maudet n'a eu aucun rapport professionnel avant ou après, a eu la possibilité d'avoir accès à des invitations, tout le reste a été payé en bonne et due forme». Les paroles de M. Maudet durant cette première audition semblaient recadrer les choses: c'était privé et il n'y avait pas lieu de se préoccuper de la suite. L'histoire a démontré autre chose à ce jour, visiblement, et on laissera la justice régler les problèmes liés à la justice.
Le premier signataire de cette proposition de résolution 851 a été auditionné le 11 juin. Lors de cette audition, il nous a expliqué quels étaient ses désirs: il demandait de dessaisir M. Maudet du département de la sécurité, de la police et de l'aéroport afin de s'assurer que la justice puisse faire son travail. La commission a ensuite longuement discuté, lors de plusieurs séances, de la manière dont elle allait traiter cela, d'abord de cette résolution, ensuite de l'évolution du problème qui s'est présentée, puisqu'il y avait des nouveautés dans la presse tous les jours. Lors d'une séance le 18 juin, elle a finalement pris la décision de demander une nouvelle audition de M. Maudet. Elle a alors évoqué la création d'une sous-commission et a souhaité aussi auditionner M. Patrick Baud-Lavigne, le chef de cabinet de M. Maudet.
Lors de la séance du 25 juin, la confirmation des demandes a été faite: audition de M. Baud-Lavigne, audition de M. Daher et nouvelle audition de M. Maudet qui aura lieu le lendemain, à savoir le 26 juin. Mesdames et Messieurs les députés, le 26 juin, le président d'alors du Conseil d'Etat confirme complètement ses propos tenus le 14 mai, à savoir qu'il s'agissait d'un voyage privé, qu'en aucun cas il ne s'agissait d'un voyage public et qu'il avait bien été financé par l'ami d'un ami dont le nom ne nous avait pas été révélé à l'époque. Il nous informait aussi qu'il avait informé M. Longchamp, le président du Conseil d'Etat de l'époque, puisque ces faits - ce voyage privé - datent de 2015 et qu'un certain nombre d'e-mails avait été envoyé au président du Conseil d'Etat. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On a évidemment demandé à avoir ces e-mails ! M. Maudet nous a répondu qu'ils avaient été détruits, qu'il ne gardait pas ses e-mails au-delà de deux ans. On a vu par la suite que ces e-mails sont réapparus...
Le président. Monsieur le rapporteur, c'est fini. Vous avez fini avec le temps du groupe. (Remarque.) Vous avez eu la parole six minutes ! Je passe la parole à Mme Nicole Valiquer Grecuccio. (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste prend acte de la proposition du Conseil d'Etat de modifier l'organisation des départements. En cela, le Conseil d'Etat a pris ses responsabilités pour que la police en particulier, l'AIG et le département présidentiel soient confiés à d'autres conseillers d'Etat. Cela apportera selon nous un peu plus de clarté; cela permettra aux institutions de fonctionner le mieux possible, dans la sérénité, et, surtout, à la justice de faire son travail. La résolution, telle qu'elle a été votée par la commission de contrôle de gestion, permettait en fait d'aller dans le sens qui a finalement été celui du Conseil d'Etat. Quant au rapport de M. Sormanni, je me permets, en tant que membre de cette commission, de m'étonner d'y voir figurer l'entier des procès-verbaux !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Au fond, les séances de cette commission devaient permettre de décider de la constitution d'une sous-commission, ce qui a été le cas; nous allons continuer nos travaux pas plus tard que la semaine prochaine et nous devrons nous prononcer sur la désignation des membres de cette sous-commission. Aujourd'hui, vous savez que le procureur sera peut-être appelé à examiner les fuites qui ont pu émaner sur ce sujet. Or, ce rapport contient la totalité de nos débats ! (Rires.) Vous permettrez que je m'en étonne, puisqu'on devait poursuivre les travaux. Lorsque nous avions discuté à la commission de contrôle de gestion, j'avais naïvement cru que ce qui allait figurer au rapport était la manière dont nous allions nous organiser, les départements ou services que nous demandions au Conseil d'Etat de déléguer à quelqu'un d'autre, ce qu'il a finalement fait au moyen de sa proposition de résolution. Je vous remercie.
M. Cyril Aellen (PLR). Le groupe PLR accueille favorablement la proposition de résolution 866 déposée par le Conseil d'Etat. Le gouvernement a pris ses responsabilités et a décidé de faire un choix que nous respectons. Nous voterons donc sans aucune arrière-pensée le texte déposé par le Conseil d'Etat.
Sur le fond, la proposition de résolution 851 demandait la même chose. Le PLR s'y opposera, non pas en raison de son fond, puisque c'est le même, précisément, mais parce que notre parti est sensible à la séparation des pouvoirs et qu'il considère que l'organisation du gouvernement appartient au gouvernement et non pas au parlement.
A la forme, le groupe PLR est particulièrement inquiet face à ce rapport. Tous les députés qui participent aux travaux de la commission de contrôle de gestion, en particulier ceux qui ont voté cette résolution, ont l'air d'être extrêmement attachés aux institutions et en particulier à leur crédibilité. C'est en tout cas ce qui semble motiver leur démarche. Mais accorder le huis clos et la confidentialité aux personnes qu'ils entendent pour donner immédiatement après l'intégralité des procès-verbaux dans le cadre de ce rapport est un pur scandale ! Je veux croire - et le groupe PLR avec moi - qu'il s'agit d'une erreur, d'une faute, et il conviendra de tirer ça au clair. Très honnêtement, si ce type de rapport est produit de nouveau, c'est toute la crédibilité de la commission de contrôle de gestion qui est remise en question; y travailler ne sera plus du tout possible, et là, les institutions auront été particulièrement atteintes. (Applaudissements.)
Mme Delphine Bachmann (PDC). Comme mon préopinant, je souhaite relever que l'entier des travaux de la commission est rendu public dans ce rapport: il n'y a aucune confidentialité, il y a tous les noms des personnes que nous avons auditionnées ! Je ne vois pas comment la commission de contrôle de gestion peut travailler de telle manière. Nous pensions que le rapport serait une synthèse. Nous avons conscience du délai relativement court dans lequel il a dû être rendu, mais nous peinons à croire que ce mode de fonctionnement favorisera le bon déroulement d'éventuelles auditions futures dans cette commission.
Sur le fond, nous avons pris acte de la proposition de résolution que le Conseil d'Etat a déposée. Nous sommes attachés au bon fonctionnement des institutions et à la séparation des pouvoirs, nous voterons donc la résolution du Conseil d'Etat comme nous l'avons toujours communiqué jusqu'à présent. (Applaudissements.)
M. Jean Batou (EAG). J'aimerais dire très rapidement que le groupe Ensemble à Gauche se réjouit de la décision du Conseil d'Etat. Il aurait aimé, il aurait voulu que le Conseil d'Etat se montre responsable plus tôt. Bon, il vaut mieux se montrer responsable tard que jamais ! Par ailleurs, nous aimerions avoir des garanties que tout le dossier police a été retiré à Pierre Maudet, y compris l'administration de la police. Nous attendons des réponses précises du Conseil d'Etat à ce propos.
J'aimerais aussi dire que cette décision du Conseil d'Etat porte sur la répartition des responsabilités, mais elle ne résout pas l'ensemble du problème, parce que si vous lisez les textes de lois et la constitution, le collège gouvernemental est responsable de l'ensemble de la politique du gouvernement. Par conséquent, nos amis des bancs d'en face ou d'à côté, PLR ou PDC, qui n'ont à la bouche que la défense de la crédibilité de nos institutions, devraient, surtout en ce qui concerne le PLR, balayer devant leur propre porte, par rapport à la présence de Pierre Maudet. Tout ce problème vient d'un de leurs magistrats. Si un magistrat PLR de Bellevue peut par hypothèse ralentir le travail du ministère public, je pense que nous avons eu raison de dessaisir le principal magistrat de ce gouvernement de la responsabilité de la police: imaginez quelles interférences aurait pu exercer sur le travail du ministère public le président du gouvernement genevois, par rapport à un magistrat de Bellevue. C'est raisonnable, c'est sage et il aurait fallu le faire plus tôt, mais maintenant il faut aller au bout et crever cet abcès. Ce gouvernement est collectivement responsable de la politique qu'il mène et nous ne pouvons pas entendre que Pierre Maudet continue à être responsable de la politique du Conseil d'Etat genevois en tant que membre de ce collège ! Nous reviendrons à la charge, vous le savez, pour demander que Pierre Maudet soit dessaisi de l'ensemble de ses responsabilités et - soyons clairs ! - quitte le Conseil d'Etat. (Quelques applaudissements.)
M. Yvan Rochat (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, les Verts accepteront la réorganisation des départements proposée par le Conseil d'Etat. Néanmoins, les Verts sont irrités de voir que le Grand Conseil est une nouvelle fois sollicité pour se prononcer sur ce qu'on appelle l'affaire Maudet. En outre, le rapport qui vient de nous être livré sur l'autre point que nous voterons ce soir nous laisse songeurs de par son irresponsable légèreté. Il n'en reste pas moins que ce rapport relatif à la résolution déposée le 24 mai dernier par le groupe Ensemble à Gauche renvoie à une réalité largement dépassée. On y parlait alors des «contours intrigants» d'un voyage privé à Abu Dhabi. On connaît la suite, elle n'est pas reluisante. Cette résolution a donc déjà reçu une réponse positive du Conseil d'Etat, nous en prenons acte. Le reste, nos propos et votes n'auront pas de portée légale, mais symbolique, puisque la stricte séparation des pouvoirs s'applique dans nos institutions suisses.
Nous voici en train de débattre sur les conséquences des manquements du conseiller d'Etat Pierre Maudet. Si chacun assumait ses responsabilités et respectait l'esprit de nos institutions reposant sur la confiance et le sens des responsabilités, nous ne serions pas ici à mener un tel débat ! A ceux qui n'assument pas ou refusent de voir la gravité des actes commis par le conseiller d'Etat Pierre Maudet, à savoir non seulement une erreur très significative de jugement quant au voyage à Abu Dhabi, mais également - et surtout - l'élaboration et la mise en oeuvre minutieuse d'un mensonge délivré non seulement à la population et aux médias, mais aussi aux institutions de notre canton, à savoir le Conseil d'Etat de la législature 2013-2018, le Conseil d'Etat de la législature 2018-2023, le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif - notre Grand Conseil à travers sa commission de contrôle de gestion - à ceux-là, députés et membres du PLR avant tout, les Verts demandent de regarder la vérité en face: cessez de détériorer nos institutions, de dégrader les rapports de confiance entre elles ainsi que les rapports de confiance que nous devons inlassablement tisser avec l'ensemble de la population de notre canton ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Cessez donc le déni ! Vous le savez, les Verts ont partagé des combats avec le PLR, avec Pierre Maudet: l'opération Papyrus, «J'y vis, j'y vote» et la loi sur la police. Mais cela ne met personne au-dessus des responsabilités à assumer et des lois.
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Yvan Rochat. Il est temps de cesser le déni et la banalisation des choses importantes qui se sont passées ! (Applaudissements.)
Le président. C'est terminé, je vous remercie et passe la parole pour trente secondes - et pas plus - à M. Daniel Sormanni qui a été mis en cause. Trente secondes, Monsieur le député !
M. Daniel Sormanni (MCG), rapporteur. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il n'y a pas l'intégralité des procès-verbaux dans ce rapport. Vous faites fausse route, vous n'avez pas bien lu ! (Exclamations.) Il fallait quand même bel et bien établir une certaine genèse de l'histoire pour comprendre où on en était le 14 mai et où on en est aujourd'hui. Cela aussi à la demande d'un certain groupe politique proche de Pierre Maudet: nous ne faisons pas de rapport de minorité, mais nous voulons entendre et voir figurer dans ce rapport ce que nous avons dit. C'est ce que j'ai fait et il n'y a aucun nom de député dedans ! Je pense que, pour l'audition de M. Maudet, tout le monde savait de qui il s'agit: que j'écrive «PM» ou «Pierre Maudet» ne changeait pas grand-chose et je pense qu'il était raisonnable de faire comme ça. (Commentaires.)
Le président. Je vous remercie, vous avez pu rétorquer. Je passe maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous demande de soutenir la proposition de résolution qu'il a déposée devant vous - et qu'il a acceptée à l'unanimité, je me dois de le rappeler. Résolution qui vise précisément à atteindre les objectifs qui sont au centre de vos préoccupations, c'est-à-dire s'assurer qu'il n'y ait aucune ingérence - même soupçonnée, car si nous avons la conviction qu'il n'y aura pas d'ingérence, il ne faut pas même qu'il puisse y avoir un soupçon - du département de la sécurité envers les acteurs de la procédure en cours. Ce texte vise aussi à éviter que les liens intrinsèques qui existent entre le département de la sécurité et la magistrature ne viennent donner une image douteuse des relations qui peuvent exister entre ces deux institutions, ces deux pouvoirs qui doivent exercer leurs fonctions et leurs prérogatives en toute indépendance. Vous avez demandé que M. Maudet soit dessaisi de l'Aéroport international de Genève pour que ce soit désormais M. Dal Busco, avec le département des infrastructures, qui en soit chargé, ce qui est finalement logique. Cela a lieu de manière provisoire, comme l'ensemble des mesures qui vous sont présentées. Lorsqu'on parle de provisoire, c'est dans l'attente de l'évolution de la procédure pour laquelle vous allez dans quelques instants vous prononcer sur la levée de l'immunité.
En ce qui concerne la police, vous avez demandé à juste titre que M. Maudet n'en soit plus chargé tant que les faits n'auront pas été établis de manière définitive par le ministère public. Vous avez vu que le Conseil d'Etat a agi en deux temps: il a voulu prendre le recul nécessaire pour n'intervenir ni dans l'émotion, ni dans la précipitation, et encore moins sous la pression du temps, quelles que soient les considérations de celles et ceux qui estiment que les choses auraient pu être faites plus rapidement. Nous l'avons fait en deux temps, en considérant d'abord qu'il fallait que l'inspection générale des services - rattachée au ministère public, néanmoins sous le pouvoir hiérarchique de la cheffe de la police et de M. Maudet - soit séparée des prérogatives de notre collègue Pierre Maudet.
Dans un deuxième temps, lorsque nous avons appris que d'autres services de la police judiciaire pourraient être amenés à exécuter des missions et des enquêtes sur ordre du ministère public dans le cadre de l'enquête générale, nous avons considéré devoir étendre ce cloisonnement pour qu'il n'y ait aucune interférence, et c'est votre serviteur qui a repris la responsabilité de la police. D'ailleurs, du point de vue pratique, tout a été mis en place pour que cette étanchéité soit assurée: rendez-vous a déjà été pris avec Mme la commandante de la police, mais également avec le ministère public que je devrais voir en début de semaine prochaine, pour garantir que les contacts avec la magistrature ou avec la police - que ce soient les états-majors ou l'ensemble de la hiérarchie - passent désormais par mon intermédiaire.
Enfin, le Conseil d'Etat est même allé plus loin que ce qui était demandé en prenant la décision de transférer à titre provisoire la présidence du collège à M. Antonio Hodgers. De cette manière, et avec l'accord de M. Maudet, nous estimons avoir pris toutes les mesures qui s'imposent pour que cette enquête puisse être menée sereinement - du moins nous le souhaitons - avec toute l'indépendance voulue et en dehors de tout soupçon d'ingérence de qui que ce soit dans la recherche de la vérité. Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que le Conseil d'Etat avait à indiquer. Nous vous demandons dès lors de soutenir la résolution qui vous est soumise.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter d'abord sur la R 866, puis sur la R 851.
Mise aux voix, la résolution 866 est adoptée par 95 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, la résolution 851 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 51 oui contre 43 non.
Le président. Je passe la parole à M. Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR). Monsieur le président, il y a 101 personnes habilitées à voter !
Le président. Je pense que c'est le badge des conseillers d'Etat qui ne votent pas qui apparaît. Ils ont un badge, et chaque badge est comptabilisé.
Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons à notre troisième point fixe, le RD 1248, que nous allons traiter à huis clos. En conséquence, je demande au Conseil d'Etat de bien vouloir se retirer, à la presse et au public de quitter la salle et le bâtiment de l'UIT, aux huissiers de fermer les portes et à Mme la mémorialiste de couper les micros et la retransmission sur les canaux télévisuels ainsi que sur notre site internet.
La séance publique est levée à 22h05.
Le Grand Conseil continue de siéger à huis clos.
Cet objet est clos.
La séance est levée à 22h45.