République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Pierre Maudet et Mauro Poggia, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que MM. Antoine Barde, Frédéric Hohl, Carlos Medeiros, Eric Stauffer, Ronald Zacharias, Daniel Zaugg et Yvan Zweifel, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Christian Decorvet, Patrick Malek-Asghar, Françoise Sapin, Nathalie Schneuwly, Charles Selleger et Alexandre de Senarclens.

Annonces et dépôts

Néant.

E 2333-A
Prestation de serment de Mme Marion HEYER, élue Juge au Tribunal civil, à demi-charge
E 2328-A
Prestation de serment de Mme Catherine AMMON, élue Juge assesseur au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, travailleurs sociaux ou autres spécialistes du domaine social
E 2335-A
Prestation de serment de M. Patrick BLASER, élu Juge assesseur au Tribunal administratif de première instance, spécialisé en matière immobilière pour statuer en matière d'estimation et d'indemnisation en cas d'expropriation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du pouvoir judiciaire. Je prie Mme le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)

Mesdames et Monsieur, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;

- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;

- de me conformer strictement aux lois;

- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;

- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;

- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»

Ont prêté serment:

Mme Marion Heyer, Mme Catherine Ammon et M. Patrick Blaser.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse et fructueuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)

PL 11688-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'action publique en vue d'un développement durable (Agenda 21) (LDD) (A 2 60)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 17 et 18 décembre 2015.
Rapport de majorité de M. Boris Calame (Ve)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.)

Une voix. Chut ! (Le président agite la cloche.)

Le président. ...nous entamons les urgences sur lesquelles nous avons voté tout à l'heure. La première urgence concerne le rapport de la commission de l'économie sur le projet de loi 11688. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. (Brouhaha.) Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Boris Calame. Je vous demande un peu de silence, Mesdames et Messieurs !

M. Boris Calame (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, chères et chers collègues, la loi sur l'action publique en vue d'un développement durable, dite aussi loi sur l'Agenda 21, a été abrogée le 31 décembre 2015, conformément à ses dispositions transitoires. Souvenez-vous, déjà en 2014, nous avions prorogé d'une année ladite loi pour éviter qu'elle ne disparaisse. Cette fois, c'est bien le cas. Genève a pourtant été le premier canton à inscrire dans son ordre juridique, en mars 2001, une loi sur le développement durable. (Remarque.) De fait, aujourd'hui, nous sommes le premier canton à ne plus avoir de loi en la matière. Il faut alors espérer que nous saurons y remédier ce jour. Sans entrer dans la polémique de savoir qui est responsable de ce vide juridique et du peu d'empressement d'y remédier, il faut véritablement regretter cette situation. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Notre ancienne loi a été initiée par les cinq motions déposées ici, au tout début du XXIe siècle, par les anciens députés Thomas Büchi, Roger Beer et Hervé Dessimoz. (Commentaires.) Elle a accompagné l'Etat et les collectivités publiques, mais aussi leurs partenaires, pendant ces quelque quinze dernières années. Il convient de se souvenir aussi que l'article 10 de notre constitution oblige l'Etat, soit le canton, les communes et les établissements publics, à inscrire leurs activités dans le cadre d'un développement équilibré et durable. Que Genève doive inscrire son activité dans ce cadre n'est pas tombé du ciel ! C'est effectivement l'aboutissement d'une prise de conscience que l'activité humaine a des impacts bien réels en matière d'environnement, de cohésion sociale et d'économie. Vouloir trouver un équilibre entre ces trois composantes est une façon de s'assurer de ne laisser personne au bord du chemin. En effet, ce n'est qu'avec le respect de l'autre... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...mais aussi de notre environnement et des ressources qu'il nous procure, que nous pourrons assurer aux générations futures un avenir durable.

Pour entrer dans le vif du sujet, vous verrez dans le rapport que le projet de loi n'a pas fait grand débat à la commission de l'économie et que nous avons respecté les délais qui nous étaient donnés pour mettre ce projet à disposition devant notre Grand Conseil avant fin 2015. Les nouveautés du projet sont les suivantes: d'une part, il rend la loi sur l'Agenda 21 pérenne, de sorte qu'elle n'aura plus besoin d'être révisée tous les quatre ans, sous peine d'être abrogée, et, d'autre part, il définit les outils nécessaires à la mise en oeuvre de notre constitution. Ces outils sont composés notamment du concept du développement durable, qui sera présenté à notre Conseil pour validation, ainsi que du plan d'actions et son bilan qui devront être élaborés par le gouvernement en place et non pas, comme trop souvent, par le nouveau gouvernement. La nécessité de donner une convergence aux différentes politiques publiques est la raison première de l'application transversale du développement durable. Pour ce faire, les organes spécifiques sont décrits et rattachés au département présidentiel, qui est chargé de s'assurer de la cohérence de l'action gouvernementale. Enfin, les lois présentées par le Conseil d'Etat devront dorénavant être accompagnées d'une évaluation qui ne se limitera plus qu'aux coûts mais intégrera aussi les conséquences en matière de développement durable, qu'elles soient potentiellement positives ou négatives. Pour ces raisons, la majorité de la commission de l'économie vous invite à voter le PL 11688, avec l'amendement qui est mentionné dans le rapport de majorité et que vous avez reçu ce jour. Je vous remercie de votre attention.

Une voix. Bravo !

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Là, nous avons véritablement affaire à une posture idéologique, pour ne pas dire politicienne, et à du politiquement correct. On a mis en place un concept qui est celui du développement durable et qui, à mon sens, est une sorte de compromis entre diverses valeurs. Cela peut, au mieux, être un concept qui ne mange pas de pain, c'est-à-dire qui ne sert pas à grand-chose, au pire être quelque chose qui a un coût. Ce n'est donc pas quelque chose de dramatique en soi. En revanche, l'Etat de Genève doit traiter un autre problème, à savoir celui de la dette et des éléments les plus importants que nous avons à gérer: dans le cadre de notre budget, il y a des problématiques essentielles, comme l'enseignement et l'aide sociale, qui doivent aujourd'hui bénéficier de tous nos moyens. Il y a aussi la problématique, bien évidemment, de l'emploi, qui a besoin de moyens conséquents et la minorité a estimé que cette structure qu'on veut à tout prix développer a un coût, qu'elle n'est pas du tout nécessaire et que les personnes qui font actuellement partie de ce service du développement durable peuvent être dirigées à la centrale d'achats ou dans d'autres services afin de faire ce qu'ils pourraient faire au sein de l'actuel service, mais de manière beaucoup plus efficace. C'est un problème d'efficience. Alors, soit le développement durable est partout, mais il n'est pas nécessaire d'avoir un service qui lui est consacré, soit c'est une posture idéologique, auquel cas c'est sans doute aux partis politiques de prendre en charge cette question et non pas à une administration. Il faut être très clair: la position de la minorité, c'est de dire qu'actuellement avec plus de 12 milliards de dettes, avec des exigences importantes dans la gestion de l'Etat, nous n'avons plus les moyens de dépenser de l'argent pour ces structures qui n'ont pas une utilité patente. Il y a des choix à faire et, au sens du groupe que je représente, le MCG, ces choix doivent être l'emploi, la formation qui est très importante... (Remarque.) ...et, pour ceux qui n'ont pas de chance dans la vie, l'aide sociale. Je vous recommande donc de ne pas voter ce présent projet de loi.

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, Genève a été précurseur dans la mise en place de son Agenda 21 en 2001 déjà. Aujourd'hui, elle met le développement durable en difficulté en tardant à voter cette loi sur l'action publique en vue d'un développement durable. L'Agenda 21 est un programme qui donne les structures et les moyens pour s'orienter vers un développement durable, dont l'un des objectifs est d'agir en prenant en compte tant le niveau local que le niveau global, le court terme que le long terme, et en considérant à la fois l'efficacité économique, l'équité sociale et la préservation de l'environnement. L'Agenda 21 permet d'agir sur les questions environnementales en dehors de l'Etat. Il accompagne les grandes entreprises, réussit à faire baisser leurs coûts tout en réduisant leurs impacts environnementaux. Il assure aussi un travail essentiel de sensibilisation dans les écoles et dans les communes. L'Etat doit être exemplaire en la matière. Il a déjà été privé de son système de management environnemental, le SME. Qu'il maintienne aujourd'hui son Agenda 21, alors que le Conseil fédéral a adopté au début de l'année sa stratégie pour le développement durable 2016-2019 ! L'Etat doit être exemplaire. La constitution genevoise inscrit d'ailleurs le développement durable comme un principe directeur de l'action publique. Le service cantonal du développement durable rattaché au département présidentiel a pour mission de piloter et de coordonner la mise en oeuvre de cette loi. Ce travail est capital. Nous vous encourageons à voter cette loi au plus vite. Je vous remercie. (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la députée. (Un instant s'écoule.) Merci. Je passe la parole à Mme la députée Geneviève Arnold.

Mme Geneviève Arnold (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le PDC reconnaît la réflexion et le travail engagé dans toute notion de développement durable et est prêt à s'investir sur le long terme afin que la loi devienne pérenne et qu'elle s'intègre dans tout concept futur au sein de l'Etat. Le PDC reconnaît le travail accompli et approuve le projet de loi dans une volonté de poursuivre et d'intensifier les actions en matière de durabilité, notamment auprès des générations futures. A l'heure actuelle, la vision du développement durable a bien évolué: bien loin est le temps du sommet de Rio, en 1992, où la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement posait les bases de notre Agenda 21. A ce jour, si la problématique est toujours nôtre, les différentes fractions politiques se sont dorénavant emparées presque naturellement de ces principes de reconnaissance de l'environnement et du développement en adoptant des principes de gestion et en cherchant à les intégrer tant au niveau écologique que social et économique. Il s'agit pourtant maintenant de poser des jalons pérennes, de ne pas négliger les impacts négatifs et, au contraire, de s'assurer que le processus s'inscrit bien dans la constitution. Nous votons ici sur un concept; un plan d'actions doit trouver sa place dans la constitution. Si Genève a été précurseur en adoptant une loi sur le développement durable, il ne s'agit pas de rester maintenant en retrait, mais bien d'affirmer notre direction et de la transmettre par voie législative. Confirmons donc notre position et faisons de nos actes une réalité face à l'évolution de notre planète, pour nos familles et pour nos générations futures ! Ce n'est pas une question de finances, mais bien une ligne de conduite indispensable. Le PDC vous encourage donc à voter ce projet de loi.

M. Georges Vuillod (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le projet de loi sur le développement durable qui nous est proposé par le Conseil d'Etat est à mon sens important pour le maintien de l'équilibre de notre société. Il permet de répartir les efforts sur les trois piliers essentiels, soit l'efficacité économique, la solidarité sociale et la responsabilité environnementale. Bien qu'uniquement incitative dans sa rédaction, puisqu'elle «encourage», «veille» et «soutient» les actions mais à aucun moment ne les impose, cette loi nous permet à tous de garder à l'esprit, notamment lors de chacune de nos décisions parlementaires, qu'il faut atteindre un objectif équilibré en maintenant une économie saine et concurrentielle, une juste répartition des richesses, le tout en ménageant au mieux notre environnement. Mais - est-il nécessaire de le rappeler ? - avec une économie forte et concurrentielle, il est possible de faire des répartitions judicieuses, efficaces et surtout durables, tant pour notre responsabilité sociale que pour notre responsabilité environnementale. Mais alors, nous devons pouvoir compter sur l'intelligence et la solidarité collective pour consommer ce que nous produisons localement en acceptant les coûts qu'engendre la politique de développement durable dans notre canton.

Par conséquent, prenons garde dans nos décisions, car dès que les écarts se creusent trop dans le respect des règlements entre nos activités locales et celles de nos voisins, qu'ils soient suisses ou européens, aux exigences et standards moins élevés, les sanctions tombent immédiatement par une délocalisation d'une partie des achats et de la consommation en général. Nous en avons un exemple concret avec la chute de l'euro qui a très rapidement impacté notre économie. Nous sommes actuellement dans une période instable qui perturbe très sérieusement le commerce et déstabilise nos entreprises et l'économie en général. Il nous faudra peut-être revoir nos choix et les adapter en les harmonisant autant que faire se peut vis-à-vis de cette nouvelle situation de concurrence avec ceux dont les règles diffèrent largement des nôtres pour maintenir une cohésion entre les trois piliers fondamentaux de la vie en société: efficacité économique, solidarité sociale et responsabilité environnementale. Le groupe PLR soutiendra ce projet de loi mais nous resterons extrêmement attentifs à l'équilibre des trois piliers, afin que celui de l'économie garde des conditions-cadres qui lui permettent de rester concurrentiel. C'est indispensable pour réaliser une politique de développement durable. Je vous remercie.

Une voix. Très bien !

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, c'est surtout parce que j'ai présidé les débats de la commission de l'économie que je prendrai la parole au nom de notre groupe, l'Union démocratique du centre. Je remercie très sincèrement le rapporteur de majorité, une fois n'est pas coutume, pour la synthèse de son rapport sur cet objet, un objet très important étant donné que nous avons une obligation constitutionnelle de légiférer en la matière - il l'a relevé, mais peut-être pas suffisamment - et que l'ancien projet de loi n'est pas arrivé à terme puis a été retiré et qu'en somme, depuis le 31 décembre 2015, date à laquelle la dernière prorogation de la loi est arrivée à échéance, nous n'avons plus rien. Il est clair que nous pourrions discuter de certains détails, mais ce projet de loi est une nécessité constitutionnelle et il faut pouvoir entériner ce qui a été quand même discuté en commission et largement adopté - vous pouvez consulter les détails dans le rapport. Raison pour laquelle l'Union démocratique du centre, même si le vote a été partagé, a décidé dans son caucus de soutenir ce projet de loi et vous recommande d'accepter l'entrée en matière et de voter ce projet de loi. Je vous remercie.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous parlons là d'un projet de loi qui évoque l'action publique en vue d'un développement durable. Je vais revenir un peu sur les articles parce que cela me paraît intéressant. Beaucoup de choses ont déjà été dites sur les objectifs de ce projet de loi, mais je vais juste relire certains articles pour vous signifier que le parti socialiste, bien sûr, à l'instar de tous les groupes, sauf le MCG - j'y reviendrai... (Remarque.) ...soutiendra ce projet de loi, mais quand même avec quelques bémols et vous allez comprendre pourquoi. On lit dans son article 1, «Buts», que «L'ensemble des activités des pouvoirs publics s'inscrit dans le cadre d'un développement équilibré et durable de Genève et de la région [...]». On parle ensuite à l'article 4 d'un concept cantonal du développement durable qui «traite notamment des thématiques suivantes: changement climatique, [...] promotion de la santé, [...] prévention des maladies, [...] développement territorial, [...] système économique et financier». Puis, surtout à l'article 2 de ce projet de loi, on parle des «convergences des politiques publiques». Or, Mesdames et Messieurs, qui dit «convergences des politiques publiques» dit cohérence entre les politiques publiques de la mobilité, de l'environnement, de la santé publique, et les politiques publiques financières, etc., et alors là on commence à avoir de sérieux doutes ! On se dit que c'est bien de voter une loi sur le développement durable qui doit être cohérente avec tous les autres projets de lois que le Conseil d'Etat va déposer, mais je vais prendre deux exemples auxquels vous êtes habitués venant de moi.

Le premier - je ne m'y attarderai pas - c'est le développement pour l'instant incontesté de l'aéroport avec un horizon de 25 millions de passagers en 2030. Mais est-ce que, dans le cadre de cette loi sur le développement durable, nous allons nous poser quelques questions sur le développement de l'aéroport ? Nous sommes bien sûr pour un aéroport qui soit important à Genève, pour la Genève internationale et pour l'économie, mais avons-nous besoin de l'augmenter autant, jusqu'à 25 millions de passagers ? Nous pourrions nous poser la question avec cette loi. Le deuxième exemple, c'est bien sûr celui du projet de loi - enfin, pour l'instant c'est une initiative, un jour ce sera un projet de loi de crédit - sur la traversée autoroutière du lac. (Protestations.) Est-ce que dépenser 5 milliards... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...est-ce que dépenser 5 milliards pour une traversée autoroutière du lac qui va augmenter le trafic, la pollution de l'air, la pollution sonore et diminuer la qualité de vie... (Commentaires.) ...est vraiment compatible et cohérent avec cette loi sur le développement durable ? Je ne pense pas !

Je terminerai simplement en disant que je trouve vraiment dommage qu'en 2016, après la COP21, donc après la conférence sur le climat à Paris, après la sortie de films comme «Demain», qui ont été regardés par énormément de gens et qui parlent d'alternatives, qui parlent de protéger notre planète, qui parlent d'autres modèles dans le domaine économique, dans le domaine social, et bien sûr dans le domaine environnemental, un groupe dans ce parlement, c'est-à-dire le MCG, puisse refuser de voter une loi sur le développement durable ! Comment est-ce possible pour un parti politique aujourd'hui ? Cela devrait couler de source ! C'est quasiment honteux ! (Commentaires.) J'espère vraiment que la majorité de ce Grand Conseil pourra voter cette loi, qu'elle pourra être mise en oeuvre - je regarde M. Longchamp - et qu'il pourra y avoir un vrai contrôle aussi sur la cohérence entre cette loi... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et certaines autres lois déposées par le Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président.

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, au nom du Conseil d'Etat, je vous invite à voter cette loi pour laquelle vous avez demandé l'urgence. Elle comble un vide juridique qui n'avait à vrai dire pas de conséquences dramatiques, mais qu'il s'agit aujourd'hui de combler et je vous remercie de consacrer une partie de votre soirée à le faire. Cette loi est nécessaire parce qu'elle nous permet précisément - un certain nombre de députés viennent de le dire - d'avoir une cohérence dans les politiques publiques. C'est la loi qui nous permet de sceller un plan climat cantonal. Nous vous en avons présenté la première étape au mois de novembre dernier et la deuxième étape est en cours. C'est une loi qui permet d'élaborer un concept cantonal du développement durable qui donne une cohérence aux diverses actions publiques. Certaines choses ici ou là doivent encore être améliorées, c'est l'évidence, mais on ne peut pas se passer de cette loi dans le canton qui a été le premier canton suisse à parler de développement durable. C'est dans cette salle, dans ce parlement genevois, que le terme de développement durable a été utilisé pour la première fois dans une législation de notre pays. C'était il y a maintenant près de quinze ans. Cela doit être scellé dans une loi plus stable et c'est ce que le Conseil d'Etat vous propose. C'est la raison pour laquelle je vous invite à voter cette loi. On ne peut pas dépasser le stade des promesses et des constats... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...sans, à un moment, donner une cohérence à nos actes. La cohérence, ce soir, c'est de voter ce projet de loi.

Une voix. Excellent !

Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 11688 est adopté en premier débat par 68 oui contre 11 non et 1 abstention.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 5.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 6 que vous avez reçu et que M. le député Boris Calame vous a expliqué mais que je vous relis:

«Art. 6 Conséquences des projets législatifs (nouvelle teneur)

Les conséquences, en matière de développement durable, d'un projet de loi sont identifiées avant son traitement parlementaire. Elles figurent dans l'exposé des motifs.»

Je donne la parole à M. Boris Calame.

M. Boris Calame (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'expliquerai très rapidement la différence entre les deux éléments: dans le projet de loi, il est question d'identification des conséquences en matière de développement durable «avant son adoption», ce qui veut dire que dans le cadre du traitement d'un projet de loi, les explications pourraient arriver jusqu'à maintenant, au moment du vote en plénière. L'amendement propose de remplacer «avant son adoption» par «avant son traitement parlementaire», ce qui signifie tout simplement que le projet de loi doit être accompagné d'explications en matière de développement durable. Autrement dit, quand le Grand Conseil recevra un projet de loi du Conseil d'Etat, le texte contiendra déjà un certain nombre d'explications en termes de développement durable. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. J'ai beaucoup de respect pour le rapporteur de majorité, dont je connais le sérieux et l'intelligence. (Commentaires.) Sans lui lancer des fleurs ! Mais, malheureusement, je ne pourrai pas être d'accord avec lui, car cela amènerait des complications législatives qui, à mon sens, ne sont pas acceptables - enfin, qui ne sont pas judicieuses, disons; je vais rester plus conforme à mes idées. Pour nous, le plus important, c'est que l'Etat soit au service du citoyen et non pas au service d'une idéologie. C'est pour cela que nous nous opposons à ce projet de loi. Je vous recommande donc de ne pas voter l'amendement.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Je mets donc aux voix l'amendement tel qu'il vous a été proposé et tel que je l'ai lu.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui contre 23 non.

Mis aux voix, l'art. 6 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 7 est adopté, de même que les art. 8 à 14.

Troisième débat

La loi 11688 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11688 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 70 oui contre 14 non.

Loi 11688

PL 11916
Projet de loi de Mmes et MM. Lydia Schneider Hausser, Roger Deneys, Alberto Velasco, Jean-Charles Rielle, Christian Frey, Romain de Sainte Marie, Magali Orsini, Jean-Marie Voumard, Sandro Pistis, Jocelyne Haller, Olivier Baud, Jean Batou, Isabelle Brunier, Thomas Wenger, François Baertschi, Daniel Sormanni, Francisco Valentin, Florian Gander, André Python, Henry Rappaz, Pascal Spuhler, Nicole Valiquer Grecuccio, Salima Moyard sur le versement des indemnités et aides financières 2016 conformément au mécanisme des douzièmes provisoires (LSubv2016)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 12 et 13 mai 2016.

Premier débat

Le président. Nous passons au PL 11916 en catégorie II, trente minutes. La parole revient à la première signataire, Mme Lydia Schneider Hausser.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Oui, merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a trait à tout ce qui s'est passé depuis le dépôt du budget 2016 - beaucoup de choses, me direz-vous, en particulier une mobilisation importante non seulement des employés mais aussi des utilisateurs des services publics du petit et du grand Etat durant l'automne et la fin de l'année 2015. En ce qui concerne ce Grand Conseil, je rappellerai juste deux éléments, à savoir le refus du budget par tous les groupes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...en décembre 2016, et qui dit refus du budget dit application des douzièmes provisoires - depuis peu, vu que nous savons depuis avril seulement qu'il n'y aura pas de second budget - ainsi que l'acceptation par la majorité de ce parlement, lors de la dernière session, de la résolution 807 demandant de ne pas appliquer la coupe de 1% au sein du petit et du grand Etat.

Ce projet de loi ci demande de ne pas appliquer la coupe de 1% aux entités indemnisées, c'est-à-dire celles qui reçoivent des aides financières via la LIAF, la loi sur les indemnités et les aides financières. En effet, ces entités, fondations ou associations ont déjà fait, depuis que cette loi existe, c'est-à-dire environ dix ans, des économies directes, demandées via les contrats de prestations ou, si ce n'est des économies, du moins des contrats de prestations avec des indemnités ou des aides financières qui ont peu voire pas du tout augmenté - quand elles n'ont pas diminué ! Avec le terme d'entités, nous parlons des grandes institutions de droit public telles que l'Hospice général, les soins à domicile, les HUG et beaucoup de fondations et d'associations qui reçoivent des aides financières dans le domaine du social, de la santé, même de la culture. Dans ces entités, les marges d'économie n'existent plus, les réformes structurelles ont souvent déjà eu lieu, et nous en arrivons maintenant, avec cette coupe de 1% voire d'autres, à des diminutions d'actions et de prestations en faveur de la population.

Pour nous, appliquer les douzièmes signifie les appliquer sur la base du budget 2015, c'est ainsi que la LGAF le comprend. Ici, le Conseil d'Etat veut faire autrement, malgré tous les signaux qui lui ont été envoyés par la majorité de ce parlement, et nous ne sommes pas d'accord. Nous ne sommes pas d'accord et nous avons beaucoup d'exemples, notamment récents. A l'Hospice général, bien sûr, le nombre de personnes augmente alors que le budget de fonctionnement, lui, n'augmente pas; ça veut dire que non seulement on a déjà changé beaucoup de choses, mais on en vient maintenant à se demander si on recevra les gens une fois par mois ou une fois tous les deux ou trois mois ! Il ne s'agit pas de réformes structurelles liées à la qualité des services ou d'indicateurs liés aux personnes, c'est juste imposé par des restrictions budgétaires. Nous pourrions certainement citer beaucoup d'autres exemples, mais il nous semble important, s'agissant de la période que nous vivons au niveau social dans notre république, qu'il y ait un message de ce Grand Conseil via ce projet de loi et, nous l'espérons, du Conseil d'Etat également.

Certes, il faut faire des économies, mais le canton de Genève est aussi connu pour la qualité de ses prestations; les diminuer, cela revient également à péjorer l'image de Genève, qui est souvent cité en exemple dans les domaines du social, de la santé et de la culture. Pour ces raisons, nous vous demandons d'accepter ce projet de loi afin que les entités du grand Etat - au moins elles ! - puissent délivrer leurs prestations à la population et n'aient pas toujours à se demander ce qu'elles doivent garder. Merci beaucoup et merci de votre soutien.

M. Cyril Aellen (PLR). Le PLR a toujours affirmé qu'il n'était pas un grand partisan des coupes linéaires, il aurait d'ailleurs souhaité affiner le projet de budget 2016 en commission et a toujours regretté de ne pas avoir pu le faire, précisément pour éviter cette situation. Cependant, le PLR est tout aussi allergique aux augmentations linéaires, tout comme il est préoccupé par la transformation d'une autorisation de dépense en une obligation de dépense, qui pose un certain nombre de problèmes juridiques. Le projet de loi, s'il part d'un bon sentiment, s'applique indistinctement à toutes les subventions: pas seulement à celles mentionnées par Mme Schneider Hausser, mais également, le cas échéant, à des subventions ponctuelles. Pour toutes ces raisons, le groupe PLR vous demande de bien vouloir renvoyer ce projet de loi en commission pour examen, notamment sur un plan juridique. Merci.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat appuie la demande de renvoi en commission pour deux raisons. Premièrement, parce que l'occasion lui sera donnée, je l'espère, d'expliquer de quelle manière il applique la règle de gestion qu'il a décidé de se fixer, qui est empreinte de bon sens et de discernement. Deuxièmement, et ainsi que l'a supputé le député Aellen, parce qu'il y a un véritable problème juridique avec cette loi et la manière dont elle a été rédigée. En effet, les lois doivent fixer des règles de droit - ce n'est pas le cas ici - lesquelles doivent avoir un caractère général et abstrait - ce n'est pas le cas non plus. Aussi, si le parlement devait débattre et voter une telle loi, cela poserait un grand problème juridique, et c'est ce que nous vous proposons de bien vouloir examiner en commission. Merci donc de réserver un bon accueil à cette demande de renvoi.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat, et invite l'assemblée à se prononcer sur le renvoi de ce texte à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11916 à la commission des finances est adopté par 62 oui contre 32 non.

PL 11333-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Patrick Lussi, Christina Meissner, Marc Falquet, Christo Ivanov, Bernhard Riedweg, Stéphane Florey, Pascal Spuhler, Eric Stauffer, Henry Rappaz, Christian Flury, Jean-François Girardet, Carlos Medeiros modifiant la loi sur les agents de la police municipale, les contrôleurs municipaux du stationnement et les gardes auxiliaires des communes (LAPM) (F 1 07) (Pour une police municipale titulaire du brevet fédéral de policier)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 17, 18, 24 septembre et 2 octobre 2015.
Rapport de majorité de M. Murat Julian Alder (PLR)
Rapport de minorité de M. Patrick Lussi (UDC)

Premier débat

Le président. Nous traitons à présent notre dernière urgence, soit le PL 11333-A. Le débat est classé en catégorie II, quarante minutes, et je cède immédiatement la parole au rapporteur de majorité, M. Murat Julian Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, très chers collègues, le projet de loi 11333 a pour but, à l'avenir, de faire suivre aux futurs agents de la police municipale la formation qui mène à l'octroi du brevet fédéral de policier. La commission a consacré huit séances au traitement de ce projet de loi, et j'aimerais, au nom de celle-ci, remercier M. le député Cyril Mizrahi, qui a présidé la commission jusqu'en janvier 2015, ainsi que M. le député Vincent Maitre, président pendant l'année 2015. Je me réfère à la page 2 du rapport s'agissant des autres remerciements d'usage et vous propose d'entrer dans le vif du sujet.

A l'heure actuelle, les agents de la police municipale, également appelés APM, ne sont pas titulaires du brevet fédéral de policier, le BFP. La raison en est très simple: du point de vue de l'Institut suisse de police, les APM genevois ne sont pas considérés comme des policiers. La majorité de la commission judiciaire et de la police a jugé inopportun de former les APM de la même manière que les policiers cantonaux, et ce pour les raisons suivantes: tout d'abord, les missions de la police municipale ne sont absolument pas les mêmes que celles de la police cantonale. Partant, il ne nous a pas paru nécessaire de faire suivre toute la formation de police aux APM, étant donné, comme je viens de le dire, que leurs missions sont différentes.

Ensuite, les conditions d'admission à la police municipale et à la police cantonale ne sont pas identiques; elles sont plus élevées, plus exigeantes s'agissant de la police cantonale. Enfin, si on devait à l'avenir exiger des futurs APM qu'ils suivent la formation menant au BFP, les communes devraient faire face à des coûts supplémentaires et à des délais d'attente plus longs puisque, d'une part, les salaires qu'ils devraient verser à ces futurs APM seraient plus élevés que ceux touchés par les policiers cantonaux, d'autre part, la formation menant au BFP est tout simplement plus longue que celle des APM. J'ajoute à cela que, selon les personnes auditionnées, notamment le représentant de l'Institut suisse de police, il est possible que les policiers soient à l'avenir formés non plus sur une durée d'une année mais carrément de trois ans.

Néanmoins, la commission, et c'est là où se rejoignent la majorité et la minorité, a été sensible aux préoccupations présentées par les deux principaux syndicats des APM, à savoir l'absence de reconnaissance de la formation qu'ils ont suivie ainsi que leur difficulté à la faire valoir dans un autre canton - dans le cas où ils seraient amenés à déménager à l'extérieur de Genève. C'est pourquoi nous en sommes arrivés à la solution qui vous est proposée aujourd'hui, soit celle d'une certification décernée par la police cantonale à l'intention...

Le président. Trente secondes, Monsieur.

M. Murat Julian Alder. ...des futurs APM. Cette solution est un compromis, ce qui ne nous empêche naturellement pas de mener une réflexion future sur ce qu'il adviendra des APM à partir de l'année 2020, et cela nous paraît être une solution équilibrée, à tout le moins pour le court et le moyen terme. Je vous remercie de votre attention.

Une voix. Très bien !

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de commencer en disant que la présentation de ce rapport de minorité a un côté totalement surréaliste ! Est-ce que vous êtes conscients que pour tout un chacun, venant de n'importe où, le droit à la formation est réclamé en hurlant ? Les gens qui travaillent pour notre société genevoise - car l'objectif de ce projet de loi ne se situe que là - malgré tout ce que vient de dire le rapporteur de majorité, ont droit à une certaine reconnaissance en accédant à une formation qui décerne un titre. La Fédération suisse des fonctionnaires de police l'a admis: le brevet fédéral de policier, c'est la traduction du certificat fédéral de capacité.

Le rapporteur de majorité n'est pas entré dans ce sujet mais, en commission, on a entendu beaucoup d'arguties, notamment qu'il s'agit d'un prétexte pour obtenir des augmentations de salaire, pour accéder au statut de policier - bref, on a entendu plein de choses. Mesdames et Messieurs, dans la vie, tout le monde a le droit d'être formé, surtout les personnes qui dépensent beaucoup de temps pour le bien-être de la collectivité, et si on a pu entendre des critiques à l'égard de la gendarmerie, que je veux bien prendre en considération, la population, à ce jour, est contente du travail fourni par les agents de la police municipale, toutes communes confondues et spécialement en Ville de Genève. A cet égard, je me réfère au rapport: le magistrat de la Ville de Genève en charge des APM est bien entendu venu dire que ça créait des difficultés mais, au final, a reconnu que sa commune serait capable de s'adapter si la formation au brevet fédéral de policier était donnée. Qu'est-ce que ça signifie, s'adapter ? Est-ce que cette demande d'une formation adéquate, d'une reconnaissance complémentaire requiert vraiment des efforts surnaturels ? En affirmant ceci, je crois qu'on se trompe de sujet et de problème.

Je reprendrai la parole par la suite parce que nous vous inviterons à contrer l'amendement présenté en commission, qui est une genevoiserie de plus. Mesdames et Messieurs les députés, décerner un petit titre, dire que c'est la gendarmerie qui le donne, est-ce si compliqué ? Nous demandons juste qu'il y ait en Suisse - et, en ce moment, on parle beaucoup de la Suisse - une formation menant à un certificat qui ait son équivalent dans tous les cantons. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, après tout ce que je viens de vous dire, notre minorité vous recommande d'accepter l'entrée en matière de ce projet de loi et, ensuite, de rectifier le mauvais pli pris en commission en votant l'amendement présenté. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe estime que toute personne a le droit d'être formée et ne voit donc pas de raison majeure à refuser ce droit aux agents de la police municipale. Les différents représentants des syndicats que nous avons auditionnés en commission ont tous défendu ce principe et bien montré l'intérêt pour eux d'obtenir le brevet fédéral de policier, qui leur permettrait une mobilité professionnelle ainsi qu'une liberté qu'ils souhaitent vivement obtenir. Bien sûr, on peut comprendre que des magistrats communaux défendent leur pré carré ou invoquent le coût que cette formation élargie pourrait représenter; nonobstant, nous ne voyons pas pourquoi nous refuserions à nos agents d'élever leur niveau de capacité alors même que la loi leur a attribué un certain nombre de tâches qui relèvent de la protection des biens et des personnes. A cet égard, il convient de constater que le RAPM - le règlement sur les agents de la police municipale - a récemment été modifié et qu'il attribue aux agents des compétences d'ordre judiciaire - le poste de police municipale des Acacias dispose par exemple de cellules d'audition et de rétention.

Il a par ailleurs été clairement établi en commission que les inquiétudes quant au fait de voir les agents de la police municipale passer au canton n'étaient pas fondées puisque plusieurs des agents que nous avons auditionnés avaient pu travailler auparavant dans la gendarmerie. Travailler au sein d'une police de proximité, qui privilégie les contacts avec la population et la présence dans les quartiers relève donc bien d'un choix professionnel. En réalité, c'est plus dans le sens contraire que l'on pourrait craindre un exode, c'est-à-dire celui d'agents de notre police cantonale vers un travail plus social, moins tourné vers la sécurité, avec des horaires moins continus et donc moins pénibles qu'à l'Etat. D'aucuns s'inquiètent d'un pas qui serait fait vers l'attribution d'une arme de poing, mais les APM sont d'ores et déjà armés de bâtons tactiles ou de sprays, et cela suffit amplement à leur sécurité. J'en profite pour rappeler que le groupe Ensemble à Gauche est totalement opposé à l'idée que les APM portent ou utilisent des armes à feu.

On peut ratiociner, trouver de bonnes ou de mauvaises raisons pour refuser une formation complète à nos agents de la police municipale, mais mon groupe pense que nous devrions sauter le pas, ce d'autant que, contrairement à ce qu'a dit le rapporteur de majorité et à ce que Mme Bonfanti a déclaré en commission, les prérequis sont pratiquement équivalents en matière d'expérience professionnelle, de CFC, de sport ou de niveau en français. Je précise d'ailleurs que les APM sont déjà formés par leurs collègues de la police cantonale; il ne s'agit donc plus du tout de gardes municipaux ou de gardes champêtres - ce temps est révolu - mais bien d'agents de la police municipale qui doivent pouvoir disposer, comme tout citoyen, de leur avenir. Nous n'allons pas non plus discuter des modalités, que nous laissons, si cette loi devait être adoptée, au département de la sécurité et de l'économie. Considérant qu'il s'agit d'une question de principe plutôt que d'une loi ou d'un règlement d'application, notre groupe acceptera ce projet de loi...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Christian Zaugg. Oui, j'y arrive ! ...et, une fois n'est pas coutume, les conclusions du rapport de minorité de notre collègue Lussi. Et je déclare maintenant déjà que nous accepterons l'excellent amendement du groupe socialiste.

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une décision importante à prendre aujourd'hui s'agissant de nos agents de la police municipale. En effet, nous sommes l'unique canton de Suisse où les APM ne sont pas titulaires du brevet fédéral de policier. Ainsi, n'importe quel agent genevois qui voudrait, pour une quelconque raison, après quinze ou vingt ans de métier, changer de canton et travailler dans une autre commune, par exemple à Tramelan dans le Jura, ne pourrait même pas prouver qu'il est équivalent à l'un de ses collègues policiers de la commune de Tramelan. Voilà qui est complètement aberrant ! C'est une Genferei de plus, Mesdames et Messieurs, qui a été créée sous les auspices de M. Maudet alors qu'il était conseiller administratif et de Mme Rochat alors qu'elle était à la tête du département de justice et police de l'époque. On a voulu constituer un statut hybride, un demi-policier - un demi-poulet aux «amendes», d'une certaine façon ! (Rire.)

Aujourd'hui, nous aimerions que ces policiers, qui effectuent un énorme travail de proximité et dont toutes les communes du canton ont besoin, puissent bénéficier de la formation et prétendre au titre de policier afin de tirer profit des avantages et collaborer avec la police cantonale. Nous sommes sans arrêt en train de nous plaindre que nous n'avons pas assez d'effectifs, que nous en avons besoin de davantage. M. Maudet nous a concocté une belle loi sur la police avec une organisation en silos et une police de proximité, laquelle est aujourd'hui misérable en termes d'effectifs. Avec la possibilité de former les agents de la police municipale, de leur offrir l'accès au brevet fédéral de policier, nous obtiendrions en quelques années 200 à 250 - voire même plus, 300 ! - policiers supplémentaires au sein de nos effectifs, et ce relativement facilement. Ces gens seront largement formés, ils devront évidemment suivre une formation complémentaire basée sur le brevet fédéral pour parvenir au même niveau que la police cantonale, mais bien sûr qu'ils suivront cette formation ! Il est clair qu'il y aura des mesures d'adaptation s'agissant d'APM en fin de carrière qui n'auront peut-être pas forcément envie de la suivre, et il faudra sans doute instaurer un système de coulissage, mais nous pouvons obtenir ce résultat afin de favoriser nos policiers et, comme ça a été dit, leur donner accès à la formation complémentaire.

Dans tous les services, nous nous cassons la tête à former nos fonctionnaires, nos agents de l'Etat avec des possibilités d'amélioration, de formation continue, mais les policiers municipaux, non, on les laisse en bas ! On les laisse comme de simples agents qui ne ressemblent à rien, sans aucune correspondance avec les agents de la police municipale de toutes les autres communes de Suisse. Est-ce que vous trouvez ça normal ? Mesdames et Messieurs, ce projet de loi est sensé, il nous faut voter l'amendement proposé par M. Lussi, qui consiste à revenir au projet de loi originel, ce qui nous permettra d'obtenir pour tous nos APM une formation menant au brevet fédéral de policier. Je vous remercie.

M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais d'emblée dire une chose, c'est que nous reconnaissons bien évidemment tous dans ce parlement le travail accompli par les policiers municipaux - certains propos qui tendent à dire l'inverse sont donc, à mon avis, un peu dénués de sens. J'aimerais rappeler quatre éléments qui ont été cités lors des auditions: tout d'abord, on nous a expliqué que seuls 50% des APM étaient formés aux nouvelles tâches qui leur ont été confiées par loi et règlement... (Remarque.) Si, Monsieur Spuhler ! ...parce que les communes n'ont pas le temps de les mettre à disposition pour la formation. Deuxièmement, les communes genevoises ont très clairement dit, et il s'agit de leurs employeurs, qu'elles n'étaient pas du tout favorables à l'obtention du brevet - ça a été souligné par le rapporteur de majorité.

Troisièmement, l'organisation du monde du travail n'est pilotée ni par le Conseil d'Etat ni par le Grand Conseil de Genève; c'est une organisation fédérale, qui détermine les critères d'accès à la formation. Or il a été très clairement exprimé, notamment lors de l'audition d'un représentant et de Mme la cheffe de la police, que la majeure partie de nos policiers municipaux ne pourraient malheureusement pas entreprendre une telle formation - je vous rappelle par ailleurs que l'idée est étudiée de faire passer cette formation d'un à trois ans. Enfin, les critères de recrutement qui, comme je le disais, sont particulièrement stricts vont représenter une sérieuse encouble à la possibilité de rejoindre ce monde du travail.

A l'avenir, il faudra bien sûr - pourquoi pas ? - faire évoluer les choses, comme l'a indiqué le rapporteur de majorité; mais, en l'état actuel, ça nous paraît bien difficile. C'est pourquoi le groupe PLR demande le renvoi en commission: la proposition d'amendement est quand même assez fondamentale, et il me paraît quelque peu délicat de la voter sur le banc. Je vous remercie.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Ayons le courage de nos opinions, ayons le courage de nos demandes et ne nous abaissons pas, s'agissant de la police municipale, à des manoeuvres que je qualifie de goujateries. Je suis contre le renvoi en commission. Merci.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. J'aimerais juste attirer l'attention de tout un chacun et de toute une chacune, puisqu'il faut parler épicène dans ce plénum, sur le fait que le projet de loi tel qu'issu de la commission judiciaire et de la police constitue une amélioration substantielle par rapport au statu quo. A l'heure actuelle, les APM ne reçoivent aucune reconnaissance de la formation qu'ils ont reçue sous la forme d'un certificat, et c'est précisément ce que nous voulons changer. Si vous voulez retarder encore le moment où on répondra enfin à leurs attentes en leur offrant cette certification, alors oui, on peut renvoyer le projet de loi en commission et faire traîner les choses éternellement.

Ceci dit, je constate que M. le député Cyril Mizrahi dépose un amendement par rapport au projet de loi de base alors que, en commission, les socialistes ont voté en faveur du projet de loi modifié; il semblerait donc qu'il se produise des changements d'opinion, peut-être animés par des éléments nouveaux que la commission judiciaire et de la police serait tout à fait enchantée de connaître et, pour ces motifs, je vous invite à voter en faveur du renvoi en commission.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Très brièvement, Monsieur le président, et simplement pour la forme, j'avoue avoir encore un peu de peine à comprendre ce qui justifie l'urgence du débat de ce soir - bon, elle a pourtant été acceptée tout à l'heure. Si d'aventure une majorité se dessinait dans ce plénum pour souscrire à l'amendement proposé, je vous inviterais alors à renvoyer le projet en commission pour une raison extrêmement simple, à savoir que vous créeriez une servitude supplémentaire aux communes, et notamment des charges financières, par rapport au strict respect de ce que la constitution impose. Je me fais ici le porte-parole de l'ACG, de son président Thierry Apothéloz et des magistrats des 17 communes qui disposent d'un corps d'APM, qui souhaitent évidemment être entendus sur cet aspect-là afin que nous puissions ne serait-ce que chiffrer la conséquence éventuelle de votre décision pour les communes. De ce point de vue là, le renvoi en commission s'impose absolument.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi en commission, que je soumets à vos votes.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11333 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 53 non contre 42 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons le débat, et je passe la parole à Mme la députée Emilie Flamand-Lew.

Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on en a encore assez peu parlé au cours du débat, mais ce projet de loi est le dernier épisode en date d'un feuilleton qui dure depuis longtemps et qui voit l'UDC et le MCG lutter pour armer les agents de la police municipale. La nouveauté de ce soir, c'est qu'ils sont rejoints dans ce combat par le parti socialiste et Ensemble à Gauche, ce qui est assez surprenant pour nous, je vous l'avoue. Les auteurs ont beau nous dire que la question de l'arme est totalement indépendante de celle du brevet, il suffit de relire, dans le Mémorial, les débats sur la LAPM ou encore de prendre connaissance de la résolution déposée par l'UDC en Ville de Genève au sujet du brevet pour se convaincre que le projet de loi qui nous est soumis ce soir représente un premier pas vers le port d'arme pour les agents de la police municipale. C'est là l'un des aspects problématiques du projet de loi, mais pas le seul.

En effet, à Genève, le métier d'APM n'est pas le même que celui de policier, il comporte des tâches de proximité, ce qui est tout à fait différent de la situation que connaissent d'autres cantons, où la police est précisément municipale et où il n'existe pas de police cantonale à proprement parler. En tant que canton-ville, Genève dispose d'une organisation tout à fait différente, et c'est ce même Grand Conseil qui avait ancré cela dans la loi en votant la LAPM il y a quelques années seulement. D'ailleurs, les principaux concernés, à savoir les communes, ça a déjà été évoqué, ne veulent pas du brevet fédéral pour leurs APM - la commission judiciaire a auditionné l'Association des communes genevoises et la Ville de Genève représentée par M. Barazzone - car, ainsi que l'a évoqué M. Maudet, elles devraient faire d'énormes efforts financiers si elles offraient ce brevet à l'ensemble de leurs APM, et cela poserait ensuite des problèmes de recrutement puisqu'il ne serait pas certain de trouver suffisamment de personnes titulaires du brevet fédéral de policier pour remplir les effectifs de la police municipale. Avec l'amendement tel que proposé, cela poserait par ailleurs la question de l'égalité de traitement entre les anciens qui, par hypothèse, n'auraient pas suivi la formation, et les nouveaux brevetés qui pourraient prétendre à une reconnaissance salariale; on se retrouverait ainsi avec une police municipale à deux vitesses, ce qui n'est absolument pas souhaitable.

Nous, les Verts, sommes satisfaits du statut actuel des agents de la police municipale tout comme du travail qu'ils fournissent, ce qui ne semble pas être le cas de tout le monde ici. On a l'impression que certains les considèrent comme des semi-policiers; non, pour nous, ils ont une tâche différente de celle des policiers cantonaux et la remplissent parfaitement bien. Le besoin de reconnaissance des agents de la police municipale par rapport à leur formation est parfaitement légitime, nous le reconnaissons, et il ne s'agit pas de faire obstacle à une potentielle évolution professionnelle - si toutefois celle-ci est souhaitée, car tous les APM ne désirent pas forcément passer un brevet fédéral de policier, c'est souvent pour eux un choix de carrière que de se diriger vers la police municipale. Nous voulons soutenir cette évolution, et c'est la raison pour laquelle nous avons voté les amendements apportés en commission, qui ouvrent des possibilités de passerelles entre la formation d'APM et le brevet fédéral de policier. Nous vous recommandons d'adopter le projet de loi tel qu'issu des travaux de commission et de ne pas ouvrir la porte à l'instauration du port d'arme pour les agents de la police municipale. (Quelques applaudissements. Quelques huées.)

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, la dernière intervention de ma collègue des Verts m'interpelle ma foi à plus d'un titre parce que la question du port d'arme est effectivement l'une des questions sous-jacentes qui a animé les débats en commission, tout comme celle du brevet fédéral en termes de formation professionnelle. Mais ce que j'ai envie de dire à mes chers amis Verts, c'est que vouloir empêcher l'obtention d'un brevet fédéral au prétexte qu'il permettrait d'instaurer le port d'arme, c'est un peu comme si un groupe anti-avortement voulait fermer la faculté de médecine pour éviter de former des futurs médecins qui pourraient pratiquer des avortements... (Exclamations. Commentaires. Applaudissements.) Je pense donc que...

Une voix. Monsieur le député !

M. Roger Deneys. Je pense que la réflexion sur le lien entre formation professionnelle et port d'arme est légitime et pertinente. Les socialistes, comme nos collègues d'Ensemble à Gauche, sont a priori défavorables au port d'arme pour les policiers municipaux mais, en même temps, c'est aussi lié aux missions qu'on leur confie, donc on ne peut pas dire que c'est un dogme absolu, ça dépend de leurs missions. En effet, on ne peut pas non plus envoyer des agents de sécurité au casse-pipe en leur demandant d'accomplir des missions potentiellement dangereuses pour eux. Ainsi, selon les circonstances, peut-être le port d'arme est-il légitime. Mais ce n'est pas la question ce soir. (Remarque.) Ce soir, la question est de déterminer s'il faut accorder aux policiers municipaux genevois un diplôme au rabais qui n'a une validité que cantonale. Pourquoi, Mesdames et Messieurs, si vous défendez le principe de la formation professionnelle, voulez-vous que les APM soient titulaires d'un diplôme exclusivement cantonal ? Mesdames et Messieurs les députés, il n'y a pas de question qui se pose particulièrement avec les communes, et nous vous invitons à soutenir le rapport de minorité ainsi que notre amendement, que mon collègue Cyril Mizrahi va développer tout à l'heure, afin que les agents aujourd'hui en activité puissent bénéficier d'une disposition transitoire. (Quelques applaudissements.)

M. Vincent Maitre (PDC). S'agissant de la question qui vient d'être soulevée par le député Deneys, celle d'accorder un diplôme ayant une validité sur le seul plan cantonal, la réponse est assez simple, elle est constitutionnelle: il n'appartient en tout cas pas au canton de Genève de décider ce qui est fédéralisable ou non. Au-delà de ce propos émanant d'un député qui n'a pas suivi les travaux de la commission et ferait peut-être mieux de lire un peu plus attentivement le rapport avant de s'exprimer, ce projet de loi comporte un vrai problème de coût, cela a été mentionné par le conseiller d'Etat Maudet et avant lui par les magistrats communaux - d'aucuns ont pu le relever ce soir - en particulier par le président de l'Association des communes genevoises qui, à ma connaissance, n'est pas un dangereux sécuritaire à tout va. Il soulève également d'autres questions qui, je dirais, découlent du pur bon sens. Vous voulez, Mesdames et Messieurs, former des gens à grands frais s'agissant de compétences que la loi genevoise ne les autorise tout simplement pas à exercer ! Vous aurez demain des APM avec un brevet fédéral de policier en poche, lesquels auront accompli - avec succès ou non d'ailleurs, c'est un autre problème - par exemple la formation au tir et à la détention d'arme à feu, alors que précisément, la loi genevoise ne leur octroie pas du tout ce genre de compétences - et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.

Cela a été également relevé ici, un certain nombre de modules qui constituent ce brevet fédéral requièrent des exigences accrues, supplémentaires à celles qu'il faut pour obtenir le titre d'agent de la police municipale. Dans ces circonstances, il est tout sauf avéré que les APM actuels puissent tous et à 100% décrocher ce brevet avec le succès escompté aux examens. Partant, que ferons-nous des agents qui resteront sur le carreau parce qu'ils auront échoué ? En commission, d'aucuns prétendaient qu'il suffirait tout simplement de les réaffecter, par exemple à la brigade des marchés - je ne me souviens plus de la dénomination exacte de cette fonction; eh bien il me semble qu'en termes de valorisation, puisque chacun se complaît à dire qu'il s'agit de reconnaître les APM à leur juste valeur, on est en train de faire à peu près le chemin inverse ! En effet, ceux qui, aujourd'hui, embrassent avec conviction le métier d'APM et précisément pas celui de gendarme, pour les raisons qui les regardent, c'est sans doute aussi et justement parce qu'ils n'ont pas envie de se retrouver à mesurer les centimètres carrés autour des marchés publics à Plainpalais ou à Rive. Tout ça pour dire que...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Vincent Maitre. ...en entendant dire, notamment de la part du député Lussi, et ça a été récupéré par le député Zaugg, que tout le monde a droit à une formation, j'irais pour ma part encore plus loin en arguant que dans notre république, en tout cas en ce qui concerne les postes d'Etat, chacun n'a pas seulement le droit mais surtout l'obligation de se former, toutefois exclusivement aux compétences qui lui sont dévolues, et pas au-delà - cela découle, comme je le disais en préambule, tout simplement du bon sens.

C'est la raison pour laquelle non seulement l'amendement socialiste est évidemment à refuser mais, dans les circonstances qui ont déjà été évoquées, il est impératif de renvoyer ce projet de loi, s'il était encore nécessaire de le refaire, en commission pour que la question de sa constitutionnalité puisse au moins être examinée jusqu'au bout car il est évident que Genève ne peut pas tout à coup s'arroger la prérogative de décréter qui sera breveté fédéral ou non.

Le président. C'est terminé, merci. Monsieur le député, si je vous ai bien compris, vous déposez une demande formelle de renvoi en commission ? (Remarque.) Bien, alors je donne la parole au rapporteur de minorité sur cette requête.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Monsieur le président, gagnons du temps, j'ai plusieurs choses à dire pour la suite. Nous refusons le renvoi en commission.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, contrairement à ce qu'a dit le député Deneys tout à l'heure, la vraie question qui se pose par rapport à ce projet de loi, que ce soit dans sa version initiale ou dans la version sortie de la commission judiciaire et de la police, est celle de savoir s'il est opportun, s'il est judicieux, et surtout si nous avons les moyens de faire suivre aux agents de la police municipale la totalité de la formation cantonale pour devenir policier, y compris, donc, la formation au tir. Dès lors, on ne peut pas, d'un simple revers de main, écarter la problématique du port de l'arme. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Monsieur Deneys - vous transmettrez, Monsieur le président - je doute fortement que vous ayez déjà eu une arme entre les mains, et je doute fortement que vous ayez déjà eu l'occasion d'en faire usage. Sachez simplement qu'on n'apprend pas à tirer comme on apprend à faire la cuisine: c'est une formation exigeante, longue, et surtout... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans le cadre du rôle et de la mission de la police municipale, cette arme à feu n'est pas nécessaire. Dès lors, il ne s'impose pas de dispenser aux APM la même formation qu'aux policiers cantonaux. Bref, ce débat démontre surtout une chose: visiblement, l'idée n'est pas assez mûre pour pouvoir faire l'objet d'une décision correcte et suffisamment réfléchie aujourd'hui, et c'est pour cette raison que je vous invite à appuyer la demande de renvoi en commission formulée par le député Maitre.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je passe la parole... (Brouhaha. Le président attend que le silence se fasse.) Merci. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet... (Remarque.) ...qui ne la prend pas. J'invite donc l'assemblée à voter sur le renvoi en commission proposé par M. le député Vincent Maitre.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11333 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 52 non contre 43 oui.

Le président. Nous poursuivons nos travaux sur ce projet de loi. Je passe la parole pour trente secondes à M. le député Jean-Marie Voumard.

M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. Je suis tout de même surpris par les paroles de M. Maitre, vous transmettrez, Monsieur le président: quand on parle de reconnaissance envers les agents municipaux, il faut aussi penser à la reconnaissance pour leur sécurité dans leur travail. Quand on élargit leurs compétences à la loi fédérale sur les stupéfiants, à la LEtr, la loi sur l'établissement des étrangers, et autres, je crois qu'il faut penser à la sécurité de ces personnes, c'est un sujet important. (Remarque.) Le gouvernement socialiste, à Paris, a déjà pris cette décision... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et je vous rappelle que dernièrement, à Genève, notre conseiller d'Etat en charge de la sécurité, M. Pierre Maudet, a monté très haut le degré de sécurité par rapport aux attentats, mais n'a pas pensé à la police municipale, qui est tout de même l'une des institutions principales de la Ville de Genève.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Jean-Marie Voumard. Suite à cela, il faut quand même prévoir que ces personnes...

Le président. C'est terminé !

M. Jean-Marie Voumard. ...exercent leur profession en étant assurées de leur propre sécurité.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Sarah Klopmann pour quarante-cinq secondes.

Mme Sarah Klopmann (Ve). Merci, Monsieur le président. Si les APM ont choisi d'être APM, c'est parce qu'ils veulent faire précisément un travail d'agents de police municipale, c'est-à-dire de proximité et de résolution des conflits. Mais le brevet fédéral est la première porte d'accès à l'arme à feu, comme on l'a déjà dit, et cela signifie que dans la rue, il y aura plus d'agents armés; cela signifie aussi qu'il y aura plus d'armes en circulation, une chose, par ailleurs, que la police ne souhaite pas. Cela signifie aussi que nous aurons de manière générale une police municipale beaucoup plus répressive... (Commentaires.) ...et cela, les Verts ne le souhaitent absolument pas. (Remarque.) En aucun cas l'arme n'apaise les conflits: l'arme donne simplement, dans une situation, de l'animosité autant à la personne qui la porte qu'à la personne qui se trouve face à elle, et souvent, les situations dégénèrent et tournent mal parce qu'il y avait une arme en jeu. Nous ne souhaitons donc pas cela. (Commentaires.) Par ailleurs, les agents de police municipale ont déjà des bâtons tonfa, arme qui sert aussi à taper et à tuer.

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Sarah Klopmann. Ensemble à Gauche, à l'époque au Municipal, avait refusé aussi ce bâton tonfa. Nous sommes déçus de ce retournement. (Remarque.) Bref, l'arme, c'est plus de violence...

Le président. Bref, c'est terminé, Madame la députée !

Mme Sarah Klopmann. ...et nous nous y opposons.

M. André Pfeffer (UDC). Les difficultés liées à la durée de la formation, au coût, aux problèmes d'adaptation ont déjà été discutées et présentées. Mais avons-nous pensé aux besoins de la population ? Les Genevois veulent des policiers armés efficaces à leur disposition. (Commentaires.) Tous les autres centres urbains suisses possèdent des policiers municipaux armés et actifs... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...comme policiers à part entière. (Remarque.) Faut-il maintenir et favoriser la situation actuelle qui consiste à avoir une multitude d'agents privés armés ? Des centaines, des milliers qui sont soit moins formés que les APM, ou dont la formation en tout cas est peu connue. L'UDC veut des policiers formés, armés et efficaces. (Remarque.) Nous vous prions de corriger cette situation et de former les APM.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Nous entendons beaucoup de choses. Dire que personne n'a raison n'est pas démocrate. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous pouvons avoir nos opinions, mais il y a des faits. Le premier, qui me heurte le plus, c'est quand j'entends la majorité dire qu'on va leur faire un nouveau brevet, quelque chose de magnifique au niveau cantonal. Ont-ils la mémoire si courte qu'ils oublient qu'il n'y a pas si longtemps, il y avait une école d'apprentis de police qui faisaient trois ans, comme apprentis, et obtenaient un certificat cantonal de capacité qui ne valait rien ? Raison pour laquelle cette formation a été abandonnée, non pas qu'ils étaient moins bons que les autres, mais faire tous ces efforts... Donc ceci me semble en tout cas le premier argument pour dire que ce que propose la majorité comme amendement est une erreur grave. (Brouhaha.)

Deuxième point que j'aimerais soulever, Mesdames et Messieurs les députés, et ce n'est peut-être pas très UDC de le dire: nous vivons à l'époque de la mobilité des travailleurs; et je choisis expressément le terme de travailleurs. Vous êtes en train de concocter, ou de maintenir un projet de loi qui empêche toute mobilité, alors même que quelqu'un a suffisamment de civisme pour se mettre au service de sa communauté. (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, vous devez assimiler que si vous voulez l'ère de la mobilité, cela doit s'adapter à tous les gens qui travaillent pour la collectivité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...agents de police municipale compris, et s'ils veulent quitter pour aller ailleurs, dans un autre canton, est-ce une raison suffisante pour dire: «Non, on ne leur donne pas un brevet fédéral de policier, parce que cela équivaudrait à ce qu'ils aient une équivalence dans d'autres cantons» ? Ceci, pour moi, ne tient pas la route et ne peut pas être entendu.

Enfin, nous venons de voter une loi sur le développement durable, c'est-à-dire d'assurer une forme de pérennité. Mesdames et Messieurs les députés, nous en parlerons à propos de l'amendement que j'ai inséré dans mon rapport de minorité et de celui ajoutant l'article 22 que nous soutiendrons, et qui consiste à laisser le choix à ceux qui veulent. Mesdames et Messieurs les députés, une formation n'a pas d'effet rétroactif. Je vous entends monter sur vos grands chevaux et dire: «Nous ne voulons pas qu'ils soient armés !» Ce n'est pas le cas ! En commençant cette formation, pour ceux qui commencent, et par rapport à l'avenir, et même par rapport à ce que M. Maudet ne nous dit pas tout à fait ce soir dans sa finalité - il réagit par rapport à des coûts, rendez-vous compte, alors qu'on dépense des millions pour former des gens qui n'ont rien à faire avec notre société... (Protestations. Le président agite la cloche.) ...vous refusez de former des agents de police municipale avec un certificat fédéral de capacité. (Quelques applaudissements.) Mesdames et Messieurs les députés, au niveau de la philosophie, au niveau de l'entendement, je ne le comprends pas. Mais j'en reviens à la pérennité: qu'ils aient une formation pour utiliser les armes représentera un plus qui ne sera pas à faire plus tard. Et nous avons déjà discuté, nous avons un projet de loi où l'on dit qu'on refuse que nos agents municipaux soient armés. Donc s'il vous plaît, alors que vous ne cessez de dire que l'UDC fait de l'amalgame, vous êtes en train de faire un amalgame terrible en disant: «On refuse à des gens de se former parce qu'ils pourraient éventuellement être armés !» Ce n'est pas sérieux de défendre cela, Mesdames et Messieurs les députés, je persiste à le dire. Nous allons entrer en matière sur ce projet de loi, puis demander que notre amendement entre en vigueur pour annuler l'article 3, alinéa 2 tel que sorti de la commission, et nous accepterons l'article 22, qui, il est vrai, permet aux anciens de la police municipale de choisir s'ils veulent intégrer un nouveau système jusqu'à leur retraite. Mais pour les nouveaux, pour tous ceux qui arrivent, dès que cette loi sera votée, eh bien le brevet fédéral de policier est une nécessité incontournable. Je vous remercie. (Quelques applaudissements. Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Lorsque le calme sera revenu, je passerai la parole à M. le rapporteur de majorité. (Le silence revient.) Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. J'aimerais juste rappeler le contexte de l'étude de cet objet: il a été traité parallèlement à trois autres projets de lois dont un visait à fusionner la police cantonale et la police municipale et l'autre à donner l'arme aux APM. On ne me fera donc pas croire que ces questions sont complètement annexes et qu'elles doivent être totalement écartées des débats. Puisqu'on parle de l'arme, j'aimerais rappeler au député Pfeffer que dans la police comme dans l'armée - c'est la même chose - ce n'est pas la taille de l'arme qui compte, mais la manière dont on s'en sert. Personnellement, je préfère voir des agents doués de la force publique avec l'arme à la ceinture plutôt que dans les mains.

La question qui doit aussi se poser ici est la suivante: que fait-on de tous ces agents de la police municipale qui ne veulent pas devenir des policiers cantonaux ? Et que fait-on de celles et ceux... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui choisissent volontairement de devenir APM précisément parce que c'est un métier à part, parce que c'est un métier différent de la police cantonale ? Nous allons perdre des ressources, des vocations, des personnes intéressées par une fonction, mais qui ne veulent pas nécessairement revêtir la fonction qu'une majorité semble vouloir leur imposer, ce que je ne peux que déplorer. Ce débat a été passionnant, il a été passionné, mais manifestement, il n'est toujours pas mûr...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Murat Julian Alder. Je vous remercie, Monsieur le président. ...et l'amendement déposé par le député Mizrahi à la dernière minute, alors que ce projet de loi traîne à l'ordre du jour de notre Grand Conseil depuis de nombreux mois, démontre bien que la situation n'est pas claire et que nous ne sommes pas prêts pour voter ce texte maintenant. C'est la raison pour laquelle une dernière fois - parce que jamais deux sans trois ! - je demande formellement le renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. Le rapporteur de minorité veut-il reprendre la parole sur le renvoi en commission ? (Un instant se passe.) Apparemment pas.

M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Oui, oui, bien entendu ! Merci, Monsieur le président. J'étais encore sous le...

Le président. Sous le choc !

M. Patrick Lussi. ...sous l'influence de l'excellent discours du rapporteur de majorité, dont je reconnais l'éloquence. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Malheureusement, il n'a pas réussi à me convaincre, tous ses arguments sont plats. Pour moi, on parle de formation, on parle d'avenir humain, on parle de mobilité, on parle de gens; on ne parle pas de porter des flingues à la ceinture et de canarder tout ce qui bouge. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser une dernière fois le renvoi en commission.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur le conseiller d'Etat, sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Non, très bien. Mesdames et Messieurs les députés, le vote sur le renvoi est lancé.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11333 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 50 non contre 44 oui.

Le président. Nous reprenons nos débats. (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté ce débat avec beaucoup d'attention et d'intérêt. Je vous en remercie, il est toujours bien de pouvoir s'exprimer sur les questions de sécurité, mais il est mieux de pouvoir le faire sur une base étayée, fondée, et si possible en évitant la validation d'amendements ou de projets de lois rédigés sur un coin de table. En réalité, je devrais me réjouir, Mesdames et Messieurs, si d'aventure ce soir cet amendement était voté, parce qu'en quelque sorte, vous me fabriquez même beaucoup plus que 200 policiers - vos chiffres datent d'il y a quelques années, Monsieur le député Spuhler: vous m'en fabriquez près de 350; car c'est ce que propose cet amendement: par un subtil tour de passe-passe, par un effet magique de la loi, on décrète - alors même, comme certains l'ont rappelé, que c'est Berne qui décide à qui l'on octroie un brevet fédéral de policier - que j'ai finalement 350 policiers supplémentaires à disposition. (Remarque.) C'est génial, pour la sécurité du canton ! L'ennui, c'est qu'il s'agit d'un miroir aux alouettes, et qu'en réalité - plusieurs dans la salle l'ont dit, de part et d'autre d'ailleurs, que ce soient les promoteurs de l'amendement ou ses opposants - il y a deux débats sous-jacents, débats importants, je ne le nie pas, et légitimes.

Le premier est celui de la structure de la police, de celle de proximité en particulier, et de savoir si, à terme, on veut une police municipale fusionnée à la police cantonale. Beaucoup d'arguments plaident pour cela; beaucoup de questions se posent aujourd'hui sur le partage d'informations, les mains courantes, les structures de formation. Mais ce n'est pas à la faveur de ce projet de loi là qu'on va tenir ce débat-là, malheureusement; je salue le fait qu'un certain nombre de députés ou de partis aient posé cette question, qui se trouve encore en suspens à la commission judiciaire et de la police, et ce n'est pas sous cette forme que nous allons pouvoir y répondre.

L'autre question, peut-être plus fondamentale, en réalité, et plus pernicieuse, est celle du port de l'arme. (Remarque.) Oui, c'est une vraie question ! Mais là, on l'aborde par la bande. En substance, l'amendement nous dit: «On aimerait bien faire des agents de police municipale de vrais policiers.» Ce n'est d'ailleurs pas très sympathique de considérer que ce sont de faux policiers: je pense que les agents de la police municipale sont de vrais policiers, mais avec leur vocation de terrain et une notion de prévention qui l'emporte sur des considérations de moyens, et notamment celle de l'arme. En réalité, et j'aimerais être très clair, Mesdames et Messieurs - je salue d'ailleurs le propos de M. Voumard, qui avait l'extraordinaire mérite de la clarté - si l'on fait de «vrais policiers», entre guillemets, avec brevet fédéral de police, avec entraînement au tir, naturellement, ils seront équipés d'une arme ! Il n'y a pas d'ambiguïté là-dessus, parce qu'on ne va pas produire un ersatz, un «Canada Dry» de policiers ! Le message que vous donnez à travers l'amendement est très clair: on veut, encore une fois, de vrais policiers. J'aimerais être parfaitement clair à ce propos, et je m'adresse là à ces bancs. (L'orateur se tourne vers les bancs de la gauche.) Ce sera une revendication des syndicats de police municipale, ce sera une revendication poussée et basée sur un brevet qui exprime clairement la part importante de temps dévolu à cette formation, et vous aurez des policiers qui porteront l'arme. Pourquoi la porteront-ils ? Parce qu'ils auront des compétences qui nécessitent le port de l'arme.

Je reviens maintenant sur un élément central, et là, je donne volontiers quitus aux promoteurs de l'amendement du fait qu'on aimerait répondre aux APM sur cette demande légitime de reconnaissance, car toute personne qui exerce une activité professionnelle aimerait être reconnue, et reconnue à sa juste valeur. Mais est-ce reconnaître les agents de la police municipale ? Je ne sais pas si c'est la majorité d'entre eux, mais en tout cas une grande partie ont choisi cette profession précisément parce que ce n'est pas celle de policier ! Vous entretenez un peu un mythe selon quoi les agents de la police municipale sont ceux qui ont raté l'examen de la gendarmerie. Mais ce n'est pas vrai ! Beaucoup d'agents de la police municipale ont choisi cette formation, ont cette vocation parce qu'il s'agit précisément de cette activité, et ce n'est pas les respecter que de changer les règles du jeu en cours de parcours, de la même façon, Mesdames et Messieurs, que ce n'est pas respecter votre propre travail que, trois ans seulement après le vote d'une très importante modification relative aux prérogatives des APM, qui commence seulement maintenant à déployer ses effets - vous l'avez votée en 2013 sous mon impulsion, et c'est en 2016 que cela se déploie sur le canton - de changer déjà les règles du jeu, de faire repartir en formation des APM qui, soit dit en passant, vont devoir refaire l'ensemble de la formation d'un an et vont donc être divertis du terrain, si bien que précisément au moment où l'on en a le plus besoin, ils ne seront plus dans les communes pour faire leur travail.

J'en viens maintenant, pour être très précis - parce que vous devez voter en votre âme et conscience, mais en connaissant les conséquences - à celles qu'aurait le vote immédiat - et je plaide de nouveau, Monsieur le président, pour un renvoi en commission - de l'amendement tel que proposé. Si l'on veut que les APM aient le brevet fédéral de policier, c'est très clair, ils vont devoir refaire l'ensemble de la formation. On a une curieuse disposition transitoire, sympathique parce qu'elle laisse le choix; mais dans le domaine policier, Mesdames et Messieurs - et là, je m'adresse également à ces bancs, qui connaissent bien ce domaine-là... (L'orateur se tourne vers les bancs de l'UDC et du MCG.) - on ne peut pas laisser ce choix, on ne peut pas consacrer dans une disposition transitoire rédigée sur un coin de table l'idée que la question de savoir si finalement ils suivent la formation ou pas est laissée au bon vouloir des APM. C'est la démonstration même du caractère inepte de cet amendement, qui devrait vous inciter, ne serait-ce que pour ce motif-là, à tout le moins à renvoyer le texte en commission. Mais vous allez donc, en conséquence de cet amendement, consacrer une idée à laquelle les communes sont hostiles - je rappelle que ce sont des charges importantes pour elles - et vous allez créer, de fait, une police municipale à deux vitesses. Et là, la question que je vous pose, Mesdames et Messieurs les députés, est: l'objectif de ce projet de loi est-il vraiment d'améliorer la sécurité ? Si c'est le cas, je crains que vous ne l'atteigniez pas avec ce projet, parce que vous allez créer même, en réalité, trois catégories: il y aura la police cantonale, munie des compétences et bien sûr au bénéfice de la formation; la police municipale, au bénéfice de la formation mais pas forcément munie des compétences - ou alors on les leur donne vraiment, mais il ne faudra pas dans ce cas que les socialistes hurlent parce qu'ils seront équipés d'une arme et qu'ils s'en serviront; et puis vous aurez la troisième catégorie, les APM, qui, en vertu de la disposition transitoire, auront eu toute latitude de choisir ou pas de suivre la formation et évidemment d'avoir les compétences ou pas. Mais il n'y a rien de pire, Mesdames et Messieurs, et vous le savez - une mission, un terrain, un chef - que cette disposition-là pour créer du trouble au niveau sécuritaire: on aura des APM dans la rue, évidemment tous habillés de la même façon, mais dont on ne saura pas s'ils ont suivi la formation ou s'ils ne l'ont pas suivie, s'ils ont choisi de le faire ou pas, s'ils ont les compétences ou pas. C'est précisément ce qui va à l'encontre d'un gain en termes de sécurité.

J'aimerais ajouter une dernière raison, Mesdames et Messieurs: si vraiment vous souhaitiez faire reconnaître par un titre fédéral la formation d'agent de police municipale, il y aurait une possibilité, mais elle n'a pas été étudiée en commission, quand bien même elle a été évoquée par la cheffe de la police: c'est l'idée, vous le savez - on en a d'ailleurs assez parlé ici - qu'on consacre à travers la formation des ASP, des agents de sécurité publique, qui ne sont pas des policiers - ils n'ont pas le brevet fédéral de police, mais une formation de six mois, qui à bien des égards s'apparente à la formation de sept mois qu'ont les APM - et qui pourraient peut-être accueillir dans leur catégorie professionnelle ce que font les APM, si vous avez vraiment le souci d'une reconnaissance. Mais cette seule raison suffirait pour un renvoi en commission, afin d'étudier la chose.

Mesdames et Messieurs, en résumé, si votre volonté est de voter sur l'arme, respectivement sur les fusions de polices, ce n'est pas ce soir que vous le ferez, il s'agit d'autres projets. Si vous voulez réellement plus de sécurité, ce n'est pas ainsi qu'on doit le formuler, et si vous voulez malgré tout aller au fond de l'idée, de grâce, revoyez à tout le moins la disposition transitoire qui est simplement inutilisable et qui concrètement péjorera la sécurité dans notre canton. (Applaudissements nourris.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais d'abord voter sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11333 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 49 non contre 44 oui.

Mis aux voix, le projet de loi 11333 est adopté en premier débat par 50 oui contre 43 non et 1 abstention.

Deuxième débat

Le président. Monsieur Mizrahi ?

M. Cyril Mizrahi. C'est sur l'amendement.

Le président. Je vous donnerai la parole tout à l'heure.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article 3, nous sommes saisis d'un amendement déposé par M. Lussi, qui figure dans son rapport:

«Art. 3, al. 2 et 3 (nouveaux, les al. 2 à 4 anciens devenant les al. 4 à 6)

2 Placée sous l'autorité du département en charge de la police, la formation professionnelle des agents de la police municipale comporte:

a) la formation de base, sanctionnée par le brevet fédéral de policier;

b) la formation continue.

3 Pour le surplus, le Conseil d'Etat détermine, en accord avec les communes, les modalités de la formation des agents de la police municipale.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 48 oui contre 44 non.

Mis aux voix, l'art. 3 ainsi amendé est adopté. (Commentaires à l'issue du vote.)

Le président. Nous sommes ensuite saisis... (Brouhaha. Rires.) Un peu de silence, s'il vous plaît. Nous sommes saisis d'un amendement du député Cyril Mizrahi à l'article 22...

Des voix. Vote nominal !

Le président. Je n'ai pas encore soumis l'amendement aux votes, mais je vois que vous êtes soutenus, merci ! (Commentaires. Brouhaha.) Puis-je demander aux bancs des Verts un peu de calme, s'il vous plaît ? (Exclamations. Commentaires.) Je disais donc que nous sommes saisis d'un amendement du député Cyril Mizrahi, à qui je donne la parole pour qu'il nous l'explique.

M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Je vais le faire brièvement. Quand on présente un projet de loi comme celui-ci, une question de droit transitoire se pose. Certains semblent tout à fait passionnés par les considérations de respect du droit supérieur, etc.: c'est bien de cela qu'il est question, et on ne peut pas, comme cela a été dit, je crois par M. Maudet, changer les règles du jeu pour des personnes qui sont déjà là. Il est donc clair qu'il faut leur laisser un choix; c'est, juridiquement, ce qu'évidemment il faut faire. Quand j'entends le conseiller d'Etat nous dire qu'il y aura finalement une police à plusieurs vitesses, je m'en étonne un peu: d'un côté, on nous dit que la formation actuelle convient très bien, et d'un autre, que cela va être catastrophique si certains continuent avec elle. Il faudrait savoir ! Je crois simplement qu'on ne peut pas laisser sur le carreau à l'occasion d'un tel projet de loi des gens qui travaillent depuis des années dans la police municipale, et c'est cela que cet amendement signifie.

Ensuite, il ne faut pas, parce qu'on veut conserver ces gens qui travaillent depuis des années, jeter le bébé avec l'eau du bain et dire qu'on rejette le droit à la formation; et je me réjouis d'avoir entendu le rapporteur de minorité, M. Lussi, soulever cette question du droit à la formation, ce n'est pas si courant que l'UDC parle de cela - petit clin d'oeil que je fais tout à fait gentiment à l'égard de mes collègues des bancs d'en face. Car c'est là la question centrale, et comme l'a avoué M. le conseiller d'Etat à la fin de son intervention, si en réalité vous voulez le port d'arme, eh bien ce n'est pas aujourd'hui que cette question va être tranchée. Pourquoi ? Parce qu'il existe le PL 10920 qui traite justement de la question du port d'arme. Ici, on parle bien du droit à la formation, et c'est sur cette question qu'on va devoir voter. Enfin, toutes ces questions ont été abondamment discutées en commission: celle du droit transitoire l'a été, celle des ASP aussi. J'ai proposé en commission des amendements pour un compromis, pour aller vers une reconnaissance fédérale. On m'a rétorqué que c'était irréaliste...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Cyril Mizrahi. ...qu'on ne pouvait pas mettre cela dans un projet de loi. Maintenant, il faut arrêter de se montrer contradictoire et hypocrite... (Commentaires.) ...le débat en commission a eu lieu, et je pense qu'il est l'heure de voter. Je vous encourage à voter cet amendement ainsi que le projet de loi. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je pense qu'il est nécessaire de lire cet amendement, Mesdames et Messieurs, même si vous l'avez reçu à vos places et qu'il a été expliqué:

«Art. 22 Disposition transitoire (nouveau)

Modification du ... (date à compléter)

Les agents de police municipale ayant entrepris leur formation avant l'entrée en vigueur de la loi 11333, du ... (date à compléter), demeurent en fonction en choisissant librement s'ils entendent ou non entreprendre la formation sanctionnée par le brevet fédéral de policier.»

Je vous rappelle que le vote nominal a été demandé. Le vote est lancé.

Mis aux voix, cet amendement (création d'un art. 22) est adopté par 50 oui contre 44 non (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Le président. Le troisième débat... (Remarque.) Vous n'avez plus de temps de parole, Monsieur Alder, je suis désolé. Le troisième débat est-il demandé ? (Remarque.) Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez la parole.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en vertu de l'article 135 de la constitution, qui prévoit le processus de concertation avec les communes, nous renonçons à demander le troisième débat; nous rediscuterons donc de ce sujet dans un mois, après consultation des communes. (Exclamations. Applaudissements. Huées.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'utilisation de l'article 134 de la LRGC par le Conseil d'Etat est une prérogative qui lui appartient, ce n'est pas qu'une formalité, et cette décision est, comme une autre, tout à fait respectable; elle doit être respectée. Je trouve donc regrettables les manifestations de mauvaise humeur. (Quelques applaudissements.)

PL 11599-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant le Conseil d'Etat à aliéner la part de copropriété constituée en propriété par étages no 4469-1 de la commune de Genève-Cité
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 4 et 5 juin 2015.
Rapport de majorité de M. Eric Stauffer (MCG)
Rapport de première minorité de Mme Magali Orsini (EAG)
Rapport de deuxième minorité de M. Roger Deneys (S)
PL 11600-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant le Conseil d'Etat à aliéner les parts de copropriété constituées en propriété par étages nos 3142-46 et 3142-7 de la commune de Genève-Eaux-Vives
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 4 et 5 juin 2015.
Rapport de majorité de M. Eric Stauffer (MCG)
Rapport de première minorité de Mme Magali Orsini (EAG)
Rapport de deuxième minorité de M. Roger Deneys (S)

Suite du premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, après le traitement des urgences, nous reprenons notre ordre du jour. Je vous rappelle que nous avons interrompu nos débats sur les PL 11599-A et 11600-A. Il restait la prise de parole des rapporteurs de minorité ainsi que du rapporteur de majorité et de M. le conseiller d'Etat. Je donne donc la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Roger Deneys, pour deux minutes quarante-cinq.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je vous rappelle que nous revenons à deux projets de lois qui visent à aliéner deux propriétés de l'Etat rentables, qui rapportent certes peu, mais qui rapportent, pour les vendre sans considération particulière. Mesdames et Messieurs les députés, si vous lisez le projet de loi concernant la copropriété aux Eaux-Vives, vous voyez que c'est un appartement. Certains ont évoqué le fait que ça ne servait à rien. Eh bien j'aimerais vous rappeler que des associations cherchent des appartements pour héberger plusieurs personnes, et contrairement à ce qui a été dit, il y a eu un cas très précis, celui de La Pâquerette des Champs, contestée dans son emplacement précédent, et qui à un moment donné en cherchait un nouveau. Mesdames et Messieurs les députés, ce genre d'objet immobilier isolé, situé au milieu d'un immeuble qui n'a pas forcément une vocation particulière pour l'Etat, peut aussi avoir un aspect anonyme qui permet de mener certains projets. Ainsi, je vous invite une nouvelle fois à ne pas voter l'entrée en matière sur ces projets de lois, et je vous rappelle que concernant la cave, par exemple... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Le niveau sonore n'est pas triste, en effet ! Monsieur le président, je vous remercie d'intervenir fermement pour que cela cesse. J'aimerais rappeler que la cave située dans la Vieille-Ville rapporte 40 000 F par année ! Vous me direz que ce n'est rien; j'aimerais quand même vous rappeler que c'est l'équivalent de trois quatorzièmes salaires que certains d'entre vous ont soutenus tout à l'heure. Arrêtez de dire que ce sont des montants ridicules: ils sont toujours là, présents, chaque année, de façon récurrente dans les comptes. Plutôt que de vendre un bien qui permet une recette une fois, il est bien plus raisonnable de garder ces biens aussi pour un usage ultérieur. N'oubliez pas que quand il y a des changements d'affectation...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Roger Deneys. ...quand il y a des changements de disposition des bureaux, des propriétés, il y a des intérêts à avoir, des enjeux actuellement pour aller négocier demain. Mesdames et Messieurs les députés, il n'y a aucune raison de brader ces biens aujourd'hui. Je vous invite encore une fois à refuser l'entrée en matière.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la rapporteuse de première minorité Magali Orsini, pour deux minutes vingt.

Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Comme l'a bien dit mon excellent collègue Jean Batou, qui a bien fait de répéter ce qui figurait dans mes rapports... (Remarque.) ...en effet ces projets de ventes ne sont que les préludes à toute une affaire qui concerne plus de 600 millions de francs, valeur comptable - je ne vous parle pas de la valeur vénale, qui nous entraînerait peut-être aux alentours de 1 milliard. Il ne s'agit pas d'une petite affaire, mais d'un processus qui consiste à se défaire de tout ce patrimoine qui, par les temps qui courent... Quelqu'un a dit, dans le camp des Verts, je pense, qu'il ne fallait pas vendre, que ce n'était jamais le moment de vendre: je pense qu'en effet, ce n'est pas actuellement le moment de se défaire de biens immobiliers pour garder des actions et des obligations qui sont plus qu'aléatoires. Je vous rappelle que le patrimoine immobilier fait partie des actifs qu'apprécient les agences de notation quand elles nous évaluent s'agissant des conditions de prêt. Le jour où nous n'aurons plus que des titres, que nous nous serons défaits de tout ce qui est solide, j'aimerais bien savoir si nous pourrons continuer à emprunter dans les mêmes conditions.

Pour ce qui concerne le détail de l'un de ces deux objets, je constate également qu'il s'agit d'un legs, qui date d'il y a à peine quatre ou cinq ans, et je me demande bien si les personnes qui ont légué ce bien à l'Etat, en toute bonne conscience, s'imaginaient que l'Etat allait s'empresser de le revendre pour réaliser une plus-value. Pour toutes ces raisons, je vous recommande de ne pas entrer en matière, de ne pas mettre le moindre doigt dans cet engrenage qui risque de nous entraîner sur une pente extrêmement dangereuse. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le rapporteur de majorité Jean Sanchez, pour trois minutes vingt.

M. Jean Sanchez (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des finances a pris bonne note que selon le Conseil d'Etat, l'Etat n'a véritablement aucun intérêt à garder le bien dans son patrimoine, ce qui lui permet de se décharger des frais d'entretien et de se désendetter. En ce qui nous concerne, nous faisons confiance au travail de l'office des bâtiments, y compris des cadres qui n'ont plus de prime à l'encadrement, et en effet - vous transmettrez à M. Batou - d'autres projets de lois pour d'autres objets seront déposés dans les mois ou les années à venir, il est donc un peu prématuré de déclarer qu'on ne peut pas réduire ainsi la dette de l'Etat en réalisant certaines ventes. Comme cela a déjà été dit deux fois... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...si les petits ruisseaux font les grandes rivières, attendons de voir le total de ces différentes ventes. Il est bien, de toute façon, de commencer à prendre des mesures concrètes pour rembourser, même s'il s'agit de montants faibles. A mon avis, ils ne seront pas faibles à l'avenir, en vue du remboursement de la dette. Merci, Monsieur le président.

Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de première minorité. Je voulais juste ajouter que l'amendement de M. Batou me paraît inutile, dans la mesure où nous avons déjà demandé aux caisses de retraite si elles étaient intéressées, comme cela a été signalé. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. (Brouhaha persistant.) Mesdames et Messieurs les députés, il est tard, et il est tard pour tout le monde. Je vous demande encore un peu de discipline, nous avons encore trois quarts d'heure de travail devant nous. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Vous êtes sûr, Monsieur le président ? (L'orateur rit.) Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, certainement, il faudra beaucoup d'objets de ce type, des aliénations, pour pouvoir, grâce à elles... (Brouhaha persistant.)

Le président. Excusez-moi, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît ! J'attends que vous repreniez vos places et que le silence revienne. (Un instant se passe.) Merci. Poursuivez, Monsieur le conseiller d'Etat.

M. Serge Dal Busco. Merci, Monsieur le président. Il faudra assurément beaucoup d'objets comme ceux-là pour résorber véritablement la dette; nous sommes parfaitement au clair avec cela, Madame et Monsieur les rapporteurs de minorité. Toujours est-il que la question qu'il faut se poser en pareille circonstance est celle que de nombreuses personnes se sont déjà posée: pourquoi, quelle est la logique de garder des objets de ce type dans notre portefeuille ? Il y a plus de deux mille objets dans le portefeuille de l'office des bâtiments, du service de la gérance. Certains revêtent évidemment une grande importance, puisqu'ils sont utilisés pour la délivrance de nos prestations publiques, mais pour d'autres, comme ceux-là, ce n'est absolument pas le cas. Cela a été dit et redit, ce sont des objets isolés, dont on n'a aucune utilité...

Une voix. Une salle de sport ! (Exclamations.)

M. Serge Dal Busco. ...il n'y a donc pas d'intérêt pour l'Etat à les garder, pas d'intérêt à occuper des collaborateurs et collaboratrices, à assurer l'entretien de ces objets, à investir dans leur entretien, d'autant plus que comme on l'a dit, le rendement est loin d'être mirifique. Ainsi, c'est la logique, et c'est la politique que nous appliquons pour ces objets-là; il y en aura peut-être d'autres. Dans certaines circonstances, lorsqu'il y a véritablement un intérêt, voire une obligation, parfois, à les garder dans notre patrimoine, on peut en effet procéder par l'octroi de droits de superficie, cession de bâtiments, etc., ce qu'on a fait notamment au 11 de la rue Jean-Calvin.

Mesdames et Messieurs, je ne peux que vous encourager au nom du Conseil d'Etat à accepter ces deux textes. J'ajoute, à l'intention de ceux qui s'en étaient inquiétés, que je confirme l'engagement que j'ai pris à la commission des finances de procéder à des enchères publiques pour l'aliénation et la mise en vente de ces objets, et je vous encourage donc à entrer en matière et à voter ces deux projets de lois. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée...

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Nous votons d'abord sur le PL 11599.

Mis aux voix, le projet de loi 11599 est adopté en premier débat par 67 oui contre 23 non (vote nominal).

Vote nominal

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article unique, nous sommes saisis d'un amendement de M. Jean Batou visant à créer un alinéa 2, l'alinéa unique devenant alinéa 1. Je passe la parole à M. Jean Batou.

M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, nous sommes minoritaires à nous être opposés à cette aliénation d'un bien qui appartient à l'Etat; nous allons voter maintenant sur un second bien, et je suis certain que nous allons voter de nombreuses fois à l'avenir, car c'est l'ouverture d'une braderie des biens publics au domaine privé, on en parlera tout à l'heure. Je pense, sans répéter les arguments de notre opposition de fond, puisque le vote a eu lieu, que si l'Etat doit se dessaisir d'un bien, et si le Grand Conseil décide d'une aliénation, alors il faut proposer ce bien aux caisses de retraite du domaine public du canton de Genève, qui... (Remarque.) Non, elles n'ont pas toutes été sollicitées ! J'ai entendu dire que la CAP cherchait des investissements immobiliers, je ne suis pas sûr qu'elle ait été contactée. Je demande donc, et ce sera dans le futur une demande permanente de notre part, que quand l'Etat aliène un bien, les caisses de pension publiques soient sollicitées d'abord, avant que ce bien ne soit mis aux enchères publiques.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je lis l'amendement: «Avant son aliénation sur le marché, ce bien doit être proposé aux caisses de pension publiques ayant leur siège dans le canton de Genève et cédé, le cas échéant, au mieux-offrant d'entre elles.»

Une voix. C'est pas très bon !

Le président. C'est pas très bon, non ! (Commentaires.) Bien, Mesdames et Messieurs, je vais vous faire voter sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 31 oui.

Mis aux voix, l'article unique est adopté.

Troisième débat

L'article unique de la loi 11599 est adopté en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11599 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 23 non.

Loi 11599

Le président. C'est le moment de se prononcer sur le PL 11600.

Une voix. Vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous passons donc au vote nominal.

Mis aux voix, le projet de loi 11600 est adopté en premier débat par 67 oui contre 23 non (vote nominal).

Vote nominal

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Jean Batou qui est le même que celui présenté tout à l'heure. Il s'agit, à l'article unique, d'un alinéa 2 nouveau, l'alinéa unique devenant alinéa 1. Voici cet amendement: «Avant son aliénation sur le marché, ce bien doit être proposé aux caisses de pension publiques ayant leur siège dans le canton de Genève et cédé, le cas échéant, au mieux-offrant d'entre elles.» (Brouhaha.) S'il vous plaît ! Nous passons au vote sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 31 oui.

Mis aux voix, l'article unique est adopté.

Troisième débat

L'article unique de la loi 11600 est adopté en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11600 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui contre 21 non (vote nominal).

Loi 11600 Vote nominal

Le président. Je considère que nous avons bien travaillé ce soir et que nous sommes au terme de notre ordre du jour. Je vous donne rendez-vous demain pour les extraits à 14h. Excellente nuit !

La séance est levée à 22h25.