République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 4 février 2016 à 14h
1re législature - 2e année - 13e session - 88e séance
PL 11415-A
Premier débat
Le président. Nous passons au rapport sur le projet de loi 11415, classé en catégorie II, soixante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi sur l'Hospice général... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...fait partie d'un train de plusieurs projets de lois, qui concernent notamment Palexpo et la Banque cantonale de Genève et dont les objectifs sont pratiquement les mêmes. Ces différents projets de lois et en particulier celui que nous traitons aujourd'hui visent deux objectifs avoués et un objectif non avoué parce qu'inavouable, tout simplement.
Une voix. Oh !
Une autre voix. Waouh !
M. Jean-Marc Guinchard. Le premier objectif de ce projet de loi est essentiellement, sous prétexte d'un contrôle démocratique accru... (Remarque.) Oui ! ...sous prétexte d'un contrôle démocratique accru, de politiser le conseil d'administration de l'Hospice général. En effet, à nouveau on tente de redonner une place à un député par parti représenté au Grand Conseil, ce qui risque d'avoir pour effet au sein de ce conseil d'administration un copier-coller des débats du Grand Conseil, ce qui évidemment n'apporte guère d'aspects positifs. (Brouhaha.) Ce contrôle démocratique, il faut le rappeler, est de toute façon exercé par le Grand Conseil, soit par le biais de notre plénière, soit par le biais des différentes commissions qui s'occupent de l'Hospice général.
Le deuxième objectif consiste évidemment en une pléthorisation du conseil d'administration dans le sens où, en augmentant le nombre d'administrateurs dont les compétences ne sont d'ailleurs pas toujours avérées, on perd en efficacité et en gouvernance. S'agissant de la gouvernance, que ce soit dans le domaine économique, privé, public, professionnel, voire associatif, il faut rappeler qu'un comité, un organe de direction, un conseil d'administration ne sont efficaces que s'ils ne sont composés que de cinq à onze membres. Au-delà de ce nombre, on assiste régulièrement à des débats sans fin et la première conséquence la plus visible et quasiment systématique qui est observée, c'est que, généralement, le conseil d'administration délègue une partie de ses tâches qu'il appelle «affaires courantes» à un comité restreint qu'il dénomme «le bureau». Or on s'aperçoit petit à petit que ce bureau prend des prérogatives de plus en plus importantes et ne traite pas seulement d'affaires courantes, mais aussi d'éléments de fond qui sont importants, ce qui, évidemment, ne favorise pas la transparence justement recherchée.
De surcroît, le défaut de ce projet de loi... (Brouhaha.)
Une voix. Chut !
M. Jean-Marc Guinchard. Merci ! ...est qu'il supprime purement et simplement la représentation des communes, ce qui est une faille regrettable, lorsque l'on sait l'importance du relais que constituent les communes par rapport aux activités déployées par l'Hospice général.
Quant au troisième objectif que j'ai qualifié d'inavouable, c'est simplement le fait de vouloir plomber le projet de loi 11391 qui traite de l'organisation des institutions de droit public qui est à l'heure actuelle à l'étude auprès de la commission législative et qui, justement, impose à l'ensemble de ces institutions de droit public un certain nombre de règles de gouvernance, de règles uniformes, visant à une gouvernance simplifiée. Sur cette base-là, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vous recommande de suivre la décision de la majorité de la commission et de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, M. Guinchard a dit tout le mal qu'il pensait des propositions de la minorité de la commission législative. Cela étant, il a oublié de mentionner que le modèle qui nous est présenté vise à corriger quelque chose qui est quand même important, à savoir cette sorte d'oubli, d'amnésie du résultat de deux votes sur référendum qui ont donné raison à la minorité en proposant une représentation d'un membre par parti présent au Grand Conseil dans les conseils d'administration. Il est un peu dommage qu'on vienne critiquer ce qu'on appelle la politisation des conseils d'administration et qu'on vienne dire que c'est sous prétexte de contrôle démocratique. D'abord, le contrôle démocratique est une saine activité. Elle permet au moins de savoir ce qu'il se passe dans ces conseils d'administration et de pouvoir finalement prendre les mesures qui s'imposent, si nécessaire. Ensuite, la politisation des conseils d'administration n'est pas un gros mot, à ce que je sache ! On pourrait peut-être davantage discuter de la notion de politisation politicienne ! Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit.
Ce que nous vous proposons, c'est effectivement la mise en place d'un contrôle démocratique, par le biais d'une représentation des partis représentés au Grand Conseil dans les conseils d'administration. On nous parle de politisation, mais finalement, la politisation semble quand même être l'arbre qui cache la forêt d'une prise de pouvoir du Conseil d'Etat sur les régies autonomes. Parce qu'on nous parle beaucoup d'autonomie, mais finalement, qui commande ? On nous dit que les bureaux prennent une part trop importante de pouvoir dans les conseils d'administration actuels. Ce qu'on ne dit pas, c'est que la formule restreinte à neuf membres supprime les bureaux et finalement, qu'est-ce qu'on obtient ? Une personnalisation de la gestion des régies publiques, parce que c'est le président du conseil d'administration qui détient en mains toutes les informations, qu'il est en tractation directement avec le conseil de direction ou la direction générale et que les membres de ces conseils d'administration, que ceux-ci soient restreints ou larges, s'ils ne sont pas insistants, ont souvent toutes les peines à obtenir les informations pertinentes pour exécuter la fonction qui est la leur.
Aussi, ce n'est pas tant le nombre qui fait la qualité d'un conseil d'administration, mais c'est d'une part, la faculté de contrôle qu'ont réellement les membres qui le composent et leurs compétences et, d'autre part, la possibilité qu'ils ont de s'engager effectivement pour pouvoir obtenir des réponses à leurs questions. On nous fait l'apologie de la gabegie, mais enfin ! Toute une série de régies autonomes fonctionnent aujourd'hui avec des conseils d'administration comprenant déjà la représentation que nous proposons et ils fonctionnent à satisfaction ou en tout cas, pas plus mal, ou pas moins bien que d'autres qui ont un conseil d'administration restreint.
Enfin, j'aimerais préciser que notre proposition est de passer de neuf à treize membres en incluant deux membres représentant les communes genevoises, parce que les communes sont des partenaires importants et prépondérants de l'action sociale déployée par l'Hospice général et leur absence serait une faute. Nous vous proposons donc de rajouter deux membres désignés par les communes genevoises ainsi que, principalement, un membre par parti représenté au Grand Conseil et désigné par ce dernier, et enfin une représentation telle qu'elle est définie dans l'amendement qui vous est proposé dans notre rapport de minorité. Je vous remercie de votre attention.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas revenir sur les excellents propos tenus par ma collègue Jocelyne Haller qui a dit tout ce que j'aurais souhaité dire, mais en mieux. J'ajouterai simplement que je suis quand même assez estomaqué par les propos très retors du rapporteur de majorité, lorsqu'il dit que les rapporteurs de minorité ont des intérêts personnels ou partisans dans le cadre de ce projet de loi. Je rappelle simplement, Jocelyne Haller l'a d'ailleurs relevé tout à l'heure, que la seule volonté que nous avons avec ce projet de loi est de faire en sorte que le vote de la population qui s'est exprimée à deux reprises soit respecté, et non pas, comme notre camarade rapporteur de majorité l'a dit de manière assez perfide, de faire en sorte que des députés soient représentés au sein de ces conseils. Il s'agit bel et bien d'avoir un représentant par parti politique représenté au sein de cet hémicycle, ce qui n'est clairement pas la même chose !
Il a également évoqué la question de la transparence. Quelle hypocrisie lorsqu'il parle de transparence ! Il aborde ce sujet en disant que, plus les membres d'un conseil sont nombreux, moins la transparence est appliquée et plus les secrets sont dévoilés. C'est faux ! Parce qu'aujourd'hui, certains conseils d'administration ont un nombre important de membres, bien plus important que ce que nous souhaiterions avoir dans le cadre de ce projet de loi, à savoir treize personnes - entre parenthèses, naturellement, nous soutiendrons l'amendement proposé par Jocelyne Haller - je pense par exemple aux TPG, aux HUG et à l'Aéroport pour ne nommer qu'eux, dont les conseils ont un nombre bien plus important de membres. Naturellement, aucun secret, aucun mot ne sort de ces conseils d'administration, ce qui veut bien dire que cela fonctionne très bien, même si M. le rapporteur de majorité veut nous faire croire le contraire.
Enfin, il soutient que nous voulons plomber le projet de loi 11391. Bien au contraire ! Nous voulons simplement nous rapprocher de la réalité du rapport 11391, lequel, par ailleurs, implique et adjoint au sein du conseil d'administration des HUG ce que nous demandons aujourd'hui dans ce présent rapport. En aucun cas nous ne voulons plomber, saboter ou autres mots fallacieux ce projet de loi 11391 ! Nous voulons simplement, une fois de plus, que la volonté populaire qui est sortie des urnes à deux reprises soit respectée. Pour ces différents motifs, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à refuser ce projet de loi et à l'accepter uniquement avec l'amendement que nous proposerons par la suite.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de troisième minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, que dire après les deux excellents rapports de mes collègues de la minorité ? Je vais essayer d'ajouter deux ou trois éléments, sans avoir la prétention de répéter les excellentes interventions de mes collègues. Tout d'abord, s'agissant de l'accusation selon laquelle nous voudrions torpiller le projet de loi 11391, rien n'est plus faux ! Il s'agit, au contraire, d'aller dans son sens, dans cette logique d'uniformisation au sein des conseils d'administration. C'est sur la nature des règles d'uniformisation que nous, la minorité - minorité qui est en réalité la majorité au niveau populaire, il faut quand même le rappeler ! - sommes en désaccord avec la majorité. Nous souhaitons simplement que cette majorité populaire... (Remarque.) ...qui s'est exprimée à deux reprises soit aujourd'hui respectée. Cette majorité s'est exprimée par deux votations, Mesdames et Messieurs, en 2008 et en 2012, avec une grande clarté ! Nous souhaitons allier la vision politique, la légitimité démocratique et les compétences au sein de ces conseils d'administration, car ce ne sont pas des entreprises comme les autres: il s'agit de gérer des régies de service public, au premier rang desquelles se trouve la mission de l'Hospice général qui consiste à accorder les prestations d'aide sociale et à mener une politique sociale. C'est une mission éminemment politique, dans le bon sens du terme, et on ne peut pas prétendre qu'elle soit confiée simplement à des technocrates. On nous parle de politisation, mais où est la politisation ? Pour ma part, je pense que la politisation, Mesdames et Messieurs, chers collègues, est du côté des partis qui veulent monopoliser les sièges de ces régies de service public de sorte à rendre leurs conseils d'administration plus technocratiques. (Commentaires.) Pour ces raisons-là, Mesdames et Messieurs, chers collègues, je vous invite à soutenir la minorité, à voter l'amendement proposé par ma collègue Jocelyne Haller et finalement à approuver le projet de loi ainsi amendé. Je vous remercie de votre attention.
M. Murat Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, tout d'abord, au nom du groupe PLR, j'aimerais remercier M. le député Jean-Marc Guinchard pour son excellent rapport et son intervention aussi synthétique qu'excellente. (Commentaires.) Vous le savez, le parti libéral-radical est farouchement opposé à la politisation des conseils d'administration des entités publiques autonomes. Il convient au contraire de simplifier leur gouvernance en rendant celle-ci plus efficace et plus transparente. La réduction du conseil d'administration de l'Hospice général à neuf membres a permis une gestion beaucoup plus efficiente de cette institution. Or, que nous propose ce projet de loi ? Que les communes ne soient plus représentées au conseil d'administration de l'Hospice général et que le nombre de représentants politiques passe de deux à autant qu'il y a de groupes au Grand Conseil, c'est-à-dire de deux à sept, sept pour cette législature. Cela signifie que, s'il y a huit ou neuf groupes dans les années à venir au Grand Conseil, il y aura autant d'administrateurs, ce qui représente une augmentation substantielle du nombre de membres du conseil d'administration. Le contrôle démocratique de ces institutions existe déjà: c'est le Grand Conseil qui le fait. Mais, une fois de plus, certains dans cet hémicycle, qui ont à coeur la consultation, la concertation la plus large possible... (Commentaires.) ...et qui voudraient en quelque sorte ériger les conseils d'administration en «Landsgemeinde»...
Une voix. «Landsgemeinde» ! (Commentaires.)
M. Murat Julian Alder. ...préfèrent malheureusement encore et toujours que les conseils d'administration soient pléthoriques. Ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, est un nébulogène: on essaie de nous enfumer en empêchant la commission législative de faire son travail en examinant le projet de loi 11391... (Remarque.) ...sur l'organisation des institutions de droit public. Ce projet de loi est un retour en arrière parfaitement insensé vers le conseil d'administration pléthorique du passé. C'est pourquoi nous refuserons ce projet de loi et vous invitons à en faire de même. (Quelques applaudissements.)
M. Boris Calame (Ve). Merci, Monsieur le député. Euh, merci, Monsieur le président. Pardon ! (Rires. L'orateur rit.) Mesdames et Messieurs les députés, il est sans doute urgent d'attendre ! En effet, le 14 février 2014, le Conseil d'Etat a déposé le projet de loi 11391 sur l'organisation des institutions de droit public... (Remarque.) ...qui traite notamment de l'Hospice général. Curieusement, en avril 2014, ont été déposés trois projets de lois, à savoir les 11412, 11414 et 11415 qui traitent respectivement de Palexpo, de la BCG et de l'Hospice général. L'agenda de la commission législative puis du Grand Conseil a fait passer ces projets de lois en traitement en amont de la loi-cadre, ce qui ne semble pas opportun au groupe des Verts, car les principes de base de la gouvernance et la composition des conseils d'administration n'ont pas été globalement tranchés. Les Verts ne veulent pas de gouvernance politisée, mais plutôt qu'elle soit efficiente et efficace. Nous souhaitons alors que le Grand Conseil soit représenté par trois personnes qu'il désigne en son sein, et non un représentant par parti politique. De plus, nous souhaitons que le cumul des mandats soit proscrit. Nous vous invitons alors à refuser ce projet de loi 11415 dans l'attente des travaux de la commission législative. Je vous remercie d'avance.
Une voix. Bravo !
M. André Pfeffer (UDC). Les motifs exposés et débattus nous semblent peu convaincants et insuffisants. Il est dommage qu'après un changement aucun bilan ou évaluation digne de ce nom n'ait été réalisé. Quels aspects positifs ? Quels aspects négatifs ? Il n'y a pas de réponse claire. Une gouvernance est-elle réellement plus efficace avec un conseil d'administration réduit à neuf personnes ? Egalement, aucune réponse claire ! Est-ce que seules les économies réalisées constitueraient un critère déterminant ? D'un autre côté, une présence de tous les partis fait sens dans un institut traitant des sujets éminemment politiques. Pour cette raison, l'UDC accepte ce projet.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, on considère que l'efficacité d'un conseil d'administration est inversement proportionnelle au nombre de représentants qui le composent. (Commentaires.) Cela semble être une vérité pour le conseil d'administration de l'Hospice général qui a l'air d'être en tout cas plus efficace depuis que son nombre a été réduit. Augmenter de manière pléthorique le nombre de membres du conseil d'administration, comme on l'a entendu, en fonction du nombre de groupes politiques paraît déraisonnable, en ce sens que, plus il y a de monde, moins le contrôle de chaque administrateur est important. Cela signifie que l'on renforcerait par là même la puissance du conseil de direction, voire même la puissance du Conseil d'Etat.
Maintenant, si on veut parler du contrôle démocratique par le parlement, il suffit de regarder aujourd'hui dans l'ordre du jour: trois thèmes concernent l'Hospice général et on demande des informations sur le fonctionnement en matière d'asile et en matière de réinsertion. Je peux aussi vous affirmer que, dans le cadre de la commission des affaires sociales, pas un seul mois ne s'écoule sans que nous parlions de l'Hospice général et d'un service relié à une problématique aiguë. Mesdames et Messieurs, je crois qu'il faut rester raisonnable et qu'il faut aller dans le sens du rapporteur de majorité en refusant ce projet de loi; c'est ce que fera en tout cas le groupe démocrate-chrétien et c'est ce qu'il vous conseille de faire.
M. François Baertschi (MCG). C'est quand même assez curieux de voir certains groupes politiques demander une dépolitisation des conseils d'administration. (Commentaires.) C'est assez surréaliste ! Surtout quand on voit leur composition et quand on voit que ces mêmes partis sont très bien représentés en général dans ces institutions. Il y a quelque chose d'assez curieux dans ce raisonnement... (Commentaires.) ...à savoir que ces mêmes partis sont en faveur d'une politisation, une politisation excessive, même une politisation absolue du pouvoir judiciaire. En effet, pour être juge, on doit avoir une carte de parti, on n'est pas neutre ! On est nécessairement un représentant politique et partisan et non pas une personne qui peut être choisie en fonction de ses seules compétences. Ce dernier cas de figure est impossible à Genève actuellement. Cela l'a été à une autre époque où on pouvait être hors parti. Maintenant il y a, j'imagine, deux ou trois exceptions, mais celles-ci font partie d'un marchandage entre partis. Ce raisonnement est donc complètement surréaliste.
Quant au bon fonctionnement et à l'idée selon laquelle deux ou trois personnes supplémentaires dans un conseil d'administration vont améliorer... (Remarque.) Péjorer, excusez-moi ! ...vont péjorer le fonctionnement, j'ai les plus grands doutes ! Il faudrait qu'on me l'explique et je n'y crois pas. Si on augmentait de dix, quinze, vingt ou trente personnes, OK, on pourrait imaginer qu'il y ait une péjoration de la situation. (Commentaires.) Mais ce n'est absolument pas le cas ! Quand on parle de personnalités apolitiques, il y a les représentants des communes. Je veux bien ! Mais, en fait, les tâches au sein de l'Hospice sont des tâches cantonales et non pas des tâches communales. Il y a donc là quelque chose d'absurde. Je veux bien que, pour faire plaisir à certains partis politiques bien représentés dans les communes, on leur donne un ou deux sièges supplémentaires. OK ! Mais c'est un petit hochet qu'on va donner comme ça... (Commentaires.) ...et je crois qu'il faut d'une certaine manière être sérieux et, contrairement aux apparences pour certains, le sérieux, c'est ce projet de loi. Je vous demande de le soutenir.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais relever que le nombre de personnes à l'aide sociale a augmenté de 8% en 2015 et que les prestations fournies par cette institution sont donc hautement sociétales, voire politiques. Nous avons là affaire - ce n'est la faute de personne - à un véritable défi sociétal, un véritable problème de paupérisation, à des difficultés pour ces personnes de rebondir, de pouvoir trouver des espaces sociaux ou professionnels pour sortir définitivement de l'aide sociale. Le conseil d'administration actuel - il était d'abord grand - a diminué et travaille actuellement avec une certaine efficience et une certaine efficacité; bien sûr qu'il y a une efficience et une efficacité en termes de suivi financier, administratif, statistique, et en matière de processus de gouvernance ou, disons, de procédure et de hiérarchie. Ça d'accord ! (Brouhaha.) Mais globalement, pour le moment, ce conseil d'administration, à part ces chiffres qu'il peut nous fournir, n'a pas trouvé et a du mal à trouver la solution, des solutions, des pistes qui permettent de dynamiser autrement l'Hospice général de sorte que celui-ci ne serve pas que de dernier filet, comme c'est souvent le cas, où on en reste là pour de plus en plus de personnes à Genève. Pour ces raisons, nous sommes convaincus que le fait d'avoir des personnes qui viennent de tendances et de groupes différents, qui amènent des débats et par conséquent certainement quelquefois, selon nous, de la pertinence dans ces débats que le conseil d'administration pourrait tenir sur les politiques en cours, voire les politiques futures, pourrait effectivement amener des pistes de résolution ou en tout cas des pistes de réflexions différentes. Pour ces raisons et d'autres encore qui ont été évoquées par les rapporteurs de minorité, nous allons voter ce projet de loi et nous vous enjoignons d'en faire de même.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, l'équation en lien avec ce projet de loi est relativement simple: y a-t-il véritablement une raison pour que le conseil d'administration de l'Hospice général ne soit pas comme les autres conseils d'administration, comme celui de l'Aéroport, de l'Hôpital, des TPG ou des Services industriels où il y a un représentant par parti ? Est-ce que cela ne fonctionne pas dans ces conseils d'administration ?
Une voix. Oui !
M. Daniel Sormanni. Vous plaisantez ou bien ?! Ne serait-ce que pour cela, il n'y a pas de raison de ne pas avoir un représentant par parti dans une institution aussi importante que l'Hospice général. (Remarque.) D'ailleurs, cela a été dit et je le relève encore une fois, le peuple s'est prononcé sur la problématique des conseils d'administration, deux fois ! N'est-ce pas suffisant pour une partie de ce parlement ? En tout cas, certains partis sont largement représentés et largement surreprésentés, notamment le PDC, il faut le dire, dans tous ces conseils ! (Remarque.) Alors soit on joue le jeu démocratique et chaque parti est représenté proportionnellement, soit on se moque du vote du peuple ! Parce que c'est cela que vous êtes en train de faire: vous vous moquez du vote du peuple qui, deux fois, a exprimé qu'il voulait une représentation démocratique ! Et justement, plus elle est large par rapport aux partis représentés ici au Grand Conseil, meilleure elle sera et meilleure sera la transparence. Nous, nous voulons pouvoir savoir ce qu'il se passe dans tous ces conseils d'administration; quand ils seront restreints, on ne saura plus ce qu'il s'y passe, on n'y contrôlera plus rien du tout ! Si c'est cela que vous voulez et puis si vous pensez que vous allez améliorer la gouvernance en mettant des soi-disant professionnels... Ne sommes-nous pas tous ici des professionnels ? Pas de la politique ! Nous avons tous aussi des professions que nous avons exercées ou que nous exerçons encore, avec des qualifications et des diplômes. Les députés sont-ils donc forcément des incompétents ? Non ! Vous vous trompez complètement et on voit d'ailleurs, dans de nombreuses sociétés privées ou autre, comment ces grands soi-disant professionnels gèrent les choses; on voit au bout du compte les catastrophes causées. Alors oui aux compétences désignées par les partis représentés au Grand Conseil, oui à une transparence et oui à un contrôle démocratique qui est nécessaire ! Je vous invite à voter ce projet de loi.
Une voix. Bravo !
Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, nous sommes devant un problème beaucoup plus large que le strict problème de l'Hospice général. C'est un peu la différence qu'il y a entre se dire, d'une part, que la démocratie prend du temps et qu'on est obligé d'en référer à beaucoup de monde et, d'autre part, qu'une dictature c'est plus rapide: un PDG, par exemple, qui prend les décisions tout seul. En l'occurrence, c'est cela que nous sommes en train d'opposer. Vous expliquez que la démocratie prend du temps, c'est vrai ! Mais c'est plus efficace. Toutefois, il y a un autre problème: avec l'Hospice général, il y a quelque chose qui est sous-tendu et qui me rend mal à l'aise. Pendant très longtemps, trop longtemps, cette institution a dépendu exclusivement d'une seule classe sociale à Genève, comme si c'était un peu sa bonne conscience. Aujourd'hui, j'ai l'impression qu'elle ne veut pas lâcher les rênes, qu'elle veut garder ce pouvoir qui est, je dirais... Mmh...
Une voix. Discrétionnaire !
Mme Salika Wenger. Comment ?
Une voix. Discrétionnaire !
Mme Salika Wenger. Oui, un pouvoir discrétionnaire et que cette classe sociale dont je parle serait gênée de voir de quelle manière elle est capable de contourner les décisions et ce ne serait pas la première fois.
Alors là, je vais parler directement au PLR, parce que les images c'est bien, mais quand c'est plus clair, c'est mieux ! Le PLR est un parti qui nous rebat les oreilles avec la transparence, les audits, les rapports de rapports. C'est bien simple: on devrait tout contrôler, tout ! Mais quand c'est un contrôle démocratique et que c'est un contrôle du peuple, alors là cela devient un petit peu gênant et c'est pléthorique. Pléthorique qu'il y ait sept personnes au lieu de deux, cela me paraît être un tout petit peu vaseux comme démonstration ! Alors dites-nous, une bonne fois pour toutes: «Nous ne voulons pas de représentants politiques du tout ! Nous ne voulons que des technocrates dans ces institutions !» (Commentaires.) A ce moment-là, nous comprendrons. Mais arrêtez de nous prendre pour des imbéciles en nous disant que seulement deux personnes représenteraient toutes les nuances politiques qui coexistent au sein de cette assemblée et qui ont le droit absolu de siéger dans ces conseils d'administration, comme vous, Messieurs ! (Brouhaha.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Franchement, nous ne serons jamais d'accord et - c'est comme pour la traversée du lac ou d'autres sujets... (Remarque.) ...même si le peuple a voté deux fois, nous reviendrons pour vous dire que les conseils d'administration des entités publiques ne fonctionnent pas ! La preuve: dès qu'un problème sérieux surgit au sein d'une entité publique, quelles sont les commissions qui se mettent à turbiner à fond ? Les commissions du Grand Conseil ! On l'a constaté avec les SIG. (Remarque.) C'est la commission de contrôle de gestion qui a fait un gros boulot pour les SIG, et pourtant, il y a un conseil d'administration. Qu'est-ce qu'on constate ? Que ce sont les mêmes membres qui siègent dans les conseils d'administration qui saisissent les commissions du Grand Conseil pour discuter des problèmes dont ils auraient dû discuter dans leurs conseils d'administration ! Alors à quoi servent ces conseils d'administration ? (Commentaires.) A strictement rien ! A faire des jetons de présence et à permettre à certaines personnes de gagner quelques sous supplémentaires chaque mois. (Commentaires.) Si ces conseils d'administration étaient utiles, des tas de problèmes ne seraient pas discutés au sein de ce parlement. Comme l'a très bien dit M. Forni, c'est quasiment à chaque séance que nous discutons de l'Hospice général, ainsi que des TPG et des SIG. Il n'y a pas de contrôle démocratique ! On se moque de nous. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Une autre voix. Bravo !
Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Je crois que le cas de l'Hospice général illustre bien l'effet de balancier, puisque cette institution a connu pendant des années une présidence très marquée à gauche et qu'actuellement c'est un peu le contraire. On ne peut donc pas dire que ce sont toujours les mêmes au sein de l'Hospice général. Il y a eu véritablement deux périodes très distinctes ces vingt dernières années. Cela étant dit, la représentation des partis est légitime et la complexité des situations actuelles engagerait à ce que chaque parti soit représenté. Par contre, il serait intéressant aujourd'hui de se poser la question et d'associer la légitimité d'une représentativité à la compétence, parce que quelquefois des personnes tombent effectivement un peu comme un cheveu sur la soupe dans le conseil d'administration dans lequel elles ont été nommées. Si on arrivait à faire le lien entre les compétences des députés et la représentativité des partis, cela pourrait apporter une amélioration. La question du nombre deviendrait ainsi moins impérative, puisqu'on aurait affaire à des personnes compétentes. (Brouhaha.)
Maintenant, dans ce but, je voudrais simplement que nous puissions arriver à nouveau à une situation d'équilibre. Je voudrais aussi souligner que les budgets sont votés par les députés et qu'à un moment donné, c'est aussi mettre les institutions publiques autonomes en porte-à-faux, quand il n'y a pas de représentativité de députés et que ce sont eux qui soutiennent, expliquent ou dégagent des propositions à la commission des finances ou en plénière pour les institutions dans lesquelles ils sont représentés. C'est donc un petit peu comme si on se tirait une balle dans le pied. Pour ma part, je tiens beaucoup à la représentativité des partis, mais pour autant qu'elle soit liée à une compétence, parce qu'il y a vraiment trop de personnes à qui il faut tout réexpliquer... (Remarque.) ...et qui ne saisissent pas les enjeux. Un conseil de fondation ou d'administration par définition fait de la politique. Il développe des plans stratégiques, il n'agit pas au niveau opérationnel. (Brouhaha.)
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. Par qui est représentée la politique ? Je vous le donne en mille, je pense que les députés ont leur place au sein de ces conseils. Je vous remercie.
Une voix. Pas mal, ça ! (Commentaires.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Murat Julian Alder pour quatre minutes.
M. Murat Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président. Plusieurs d'entre nous ont évoqué la perspective de régler d'une manière globale la gouvernance des régies publiques au travers de la loi sur l'organisation des institutions de droit public qui est actuellement en traitement à la commission législative. Je pense qu'il est largement prématuré de traiter ce projet de loi de manière définitive ici aujourd'hui et je vous propose par conséquent un renvoi à la commission législative. (Exclamations.)
Une voix. Bien essayé ! (Commentaires.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi. Seuls les rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer sur cette demande. Les rapporteurs souhaitent-ils... (Remarque. Commentaires.) Je vous remercie de faire mon travail à ma place. Je suis un grand garçon, je me débrouillerai ! Les rapporteurs souhaitent-ils s'exprimer ? Je passe donc la parole tout d'abord au rapporteur de troisième minorité, M. Cyril Mizrahi.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de troisième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, concernant cette histoire de lien avec le PL 11391, honnêtement à un moment donné il faut juste dire les choses telles qu'elles sont: soit cela relève de la pure rhétorique, parce que franchement, le PL 11391 ne va ni épuiser la question, ni uniformiser le nombre de membres dans les conseils d'administration, soit cela relève - je crois que c'est également le cas - de la manoeuvre dilatoire, parce que tout à coup le PLR se rend compte qu'éventuellement il ne serait pas majoritaire, ce qui l'énerve beaucoup... (Remarque.) ...comme on l'imagine puisqu'il est souvent majoritaire dans les conseils d'administration. (Exclamation.) Pour tout dire, je vous invite, Mesdames et Messieurs, chers collègues, à simplement refuser le renvoi en commission. Le travail en commission a été mené et bien mené. Je pense qu'il s'agit maintenant de trancher.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, en ma qualité de rapporteur de deuxième minorité, je refuse de renvoyer ce projet en commission puisque, comme l'a relevé Cyril Mizrahi, tout a été dit et fait, même très bien fait, et qu'il n'y a pas de raison de le renvoyer simplement pour donner satisfaction au PLR qui va peut-être, voire certainement, se prendre une fessée dans quelques minutes. (Commentaires.)
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de première minorité. Eh bien, nous voilà rassurés: pour ceux qui avaient quelques doutes, nous savons maintenant que M. Alder sait compter et il a bien mesuré quelle serait la majorité pour ce projet de loi ! Nous nous opposerons au renvoi en commission et j'aimerais simplement dire qu'en ce qui concerne... (Commentaires.) ...le projet de loi 11391, il fait l'objet du même type d'amendements, parce que nous sommes cohérents et que ce que nous demandons pour l'Hospice général, nous le demandons pour l'entier des régies autonomes. Je vous remercie de votre attention. (Commentaires. Remarque de Mme Jocelyne Haller.)
M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vous encourage à accepter le renvoi en commission... (Protestations.) ...dans la mesure où, comme l'a dit Mme Haller, il existe effectivement une certaine cohérence entre les principes du PL 11391 et ceux qui devraient être appliqués à l'Hospice général. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous fais voter sur le renvoi de ce projet de loi à la commission législative.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11415 à la commission législative est adopté par 53 oui contre 41 non.