République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 29 janvier 2016 à 15h
1re législature - 2e année - 13e session - 83e séance
P 1946-A
Débat
Le président. A présent, nous passons au traitement de la P 1946-A en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole au rapporteur de majorité, M. Alexis Barbey.
M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission s'est penchée avec attention sur cette pétition qui comprend trois volets. Il est à remarquer, comme je l'avais déjà mentionné à propos d'un rapport précédent, qu'il s'agit ici de ce que je qualifierais d'une pétition à sous-munitions, c'est-à-dire qu'elle cherche à atteindre plusieurs objectifs à travers un même texte, ce qui ne favorise généralement pas l'aboutissement de telles demandes.
La première partie de la pétition sollicite la suppression de la classe 4 sous prétexte qu'elle ne serait plus pratiquée aux HUG, ni à l'Etat, ni dans les EMS - la vérification de ces dires a montré que la classe 4 existe en réalité encore, non seulement dans les EMS mais également aux Hôpitaux universitaires de Genève. Le but de cette classe 4, aussi bien à l'Hôpital cantonal qu'au sein des EMS, est d'utiliser des collaborateurs à faible formation mais extrêmement utiles à ces établissements; s'ils changeaient de classe, il y aurait fatalement des conséquences soit de hausse des subventions pour ces établissements, soit de baisse du nombre de postes afin de rester à périmètre financier constant, ce qui n'est pas souhaité.
La deuxième partie de cette pétition vise une application pleine et entière de l'initiative 125 pour un certain ratio de personnel par classe d'activité dans les EMS. La commission a constaté que ce n'est pas le désir d'appliquer cette initiative qui manque, mais les moyens financiers: une explication pour ce manque de budget est d'avoir alloué des moyens supplémentaires à l'IMAD et donc d'avoir donné la priorité au maintien à domicile, ce qui ne nous paraît pas une idée trop mauvaise.
Enfin, ce texte demande que tous les membres du personnel des établissements médico-sociaux puissent choisir d'adhérer à la caisse de pension des employés de l'Etat, un processus qui se révélerait extrêmement lourd et compliqué puisque, normalement, l'adhésion devrait être décidée établissement par établissement mais que les intérêts de chacun des employés sont extrêmement différents, en particulier selon leur ancienneté. La caisse de prévoyance de l'Etat de Genève étant en priorité des prestations...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Alexis Barbey. Oui, merci ! ...cela prétériterait les employés à la faible ancienneté: si ceux-ci désiraient quitter la profession, ils seraient désavantagés.
S'agissant des trois volets, la commission a jugé qu'il valait mieux déposer cette pétition sur le bureau. Comme commentaire supplémentaire, je dirais que le canton de Genève a montré encore dernièrement qu'il était à la tête du processus de partenariat social, et il est regrettable qu'à travers des pétitions comme celle-ci on essaie de faire en sorte que les députés et les commissions parlementaires se substituent aux partenaires sociaux habituels. Je vous remercie.
M. Christian Frey (S), rapporteur de minorité. Voici une pétition signée par 907 personnes, membres du personnel ainsi que des syndicats, qui est parfaitement légitime et pose trois questions, certes, mais trois questions tout à fait importantes. Il est d'ailleurs regrettable de constater que la commission des pétitions, dès qu'elle est confrontée à une requête émanant des syndicats, montre une certaine méfiance en commençant par se demander si elle va la traiter, la garder, ce qu'elle va en faire. La pétition est un droit légitime qu'il faut pouvoir exercer en toute liberté.
La première demande concerne la suppression de la classe 4 dans les EMS, partant de la constatation que celle-ci disparaît progressivement aux HUG. Pour preuve: seules 42 personnes sur 11 000 employés se trouvent encore dans cette classe ! Si la classe 4 n'était pas en voie de disparition aux HUG, il y aurait davantage que 42 employés dans cette classe sur 11 000. Il ne s'agit donc pas d'un fantasme mais d'un constat fait par le personnel, lequel, n'obtenant pas de réponse à sa question de savoir si elle existe toujours et ne pouvant pas s'adresser au service d'évaluation des fonctions - celui-ci ne répond plus puisqu'on se trouve actuellement dans l'attente de l'hypothétique SCORE, cette arlésienne ! - pose ses questions par voie de pétition, ce qui est légitime et justifié.
Deuxièmement, les pétitionnaires demandent l'application de l'initiative 125 pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS. Quoi de plus légitime pour le personnel des EMS, Mesdames et Messieurs, que de solliciter l'application de cette initiative acceptée par une confortable majorité de 60% des électeurs en 2007 ? A cette occasion, la minorité a requis l'audition de M. Mauro Poggia, chargé du DEAS, pour obtenir des informations et un point de situation sur cette initiative populaire ainsi que sur les taux d'encadrement actuellement pratiqués dans les EMS. Tout le monde a déjà vu ce personnage en chaise roulante et muni d'une sonde urinaire au Bourg-de-Four: il s'agit peut-être d'un exemple caricatural, n'empêche que cela peut préfigurer ce qui va se passer dans ce domaine si le DEAS ne surveille pas attentivement les taux d'encadrement dans ces institutions. Malheureusement, la demande d'audition de M. Poggia a été refusée sous prétexte que les moyens manquaient de toute manière pour accéder aux objectifs de cette initiative populaire...
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe.
M. Christian Frey. Très rapidement, la troisième invite concerne l'adhésion du personnel des EMS à la caisse de pension de l'Etat de Genève. La loi sur la gestion des établissements pour personnes âgées de 2009 prévoit, à l'alinéa 3 de son article 17, que tous les EMS sont rattachés à la caisse de prévoyance de l'Etat de Genève; or un projet de loi a été déposé qui propose l'abrogation de cet article. Ce que vise la pétition, c'est un processus de consultation EMS par EMS, sachant que le personnel de sept établissements fait déjà partie de la CPEG.
En résumé, cette pétition demande premièrement la suppression progressive de la classe 4 aux HUG et dans le secteur de la santé: il faut clarifier cette question et le département peut nous répondre, ce qui est une raison pour renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Deuxièmement, il faut des réponses de l'office du personnel de l'Etat s'agissant de l'évaluation des fonctions: la classe 4 est-elle encore pratiquée, que se passe-t-il avec cette classe ? Le DEAS doit prendre position sur l'application de l'initiative 125 et informer quant aux taux d'encadrement pratiqués dans les EMS. Enfin, le texte demande la mise en place, dans les meilleurs délais, d'un processus de consultation du personnel dans chaque EMS qui n'est pas encore affilié à la CPEG. Pour toutes ces raisons et afin de traiter cette pétition à fond, et non pas de manière superficielle avec un goût d'inachevé, la minorité vous recommande de la renvoyer au Conseil d'Etat.
Mme Magali Orsini (EAG). Le groupe Ensemble à Gauche, lui aussi, demandera le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, en tout cas concernant les deux points sur la classe 4 et sur l'application de l'initiative populaire. En ce qui concerne l'adhésion à la CPEG, nous avons eu l'occasion de traiter ce point à la commission des finances, EAG a déposé un rapport de minorité dans ce sens, ce sera donc fait. Cela dit, s'agissant de l'ensemble de la pétition, nous sommes d'accord pour un renvoi au Conseil d'Etat.
M. Guy Mettan (PDC). J'aimerais juste dire que le parti démocrate-chrétien soutiendra le rapport de majorité. Concernant le problème de la classe 4, il a été répondu tout à l'heure qu'il y a effectivement encore un reliquat de classe 4, mais on a vu qu'il s'agissait de chiffres tout à fait minimes. Il faut ainsi attendre que ce problème soit réglé, et je ne crois pas qu'il y ait lieu de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat juste pour cela. Pour le reste, les arguments ont été donnés et expliqués, je vous propose donc simplement d'accepter le dépôt.
M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de majorité. J'aimerais rapidement ajouter deux précisions. En ce qui concerne cette fameuse classe 4, on a entendu dire qu'elle était en voie de disparition totale. Or selon les chiffres que nous a fournis le service du personnel de l'Etat, 783 employés de différentes institutions sont encore situés dans cette classe 4, tandis que dans l'administration centrale, à l'université et à la FASE, 192 autres personnes en font partie. Aussi, on voit bien qu'il s'agit d'une typologie de collaborateurs qui reste encore très utile aux établissements publics, et je pense que le coût d'une telle suppression serait extrêmement élevé.
Deuxièmement et finalement, s'agissant du processus de consultation pour une adhésion à la CPEG, il est ressorti des auditions que le seul bénéficiaire d'une éventuelle adhésion serait en fait la CPEG même, dont les affiliés sont en général relativement âgés; s'il est vrai que cette caisse de pension aurait bien besoin d'un rajeunissement de ses membres, cela aurait en revanche comme incidence de créer des coûts supplémentaires à l'Etat puisque...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alexis Barbey. ...le processus d'une caisse de pension en primauté de prestations, nous le savons tous maintenant, est extrêmement coûteux.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au rapporteur de minorité, M. Christian Frey.
M. Christian Frey (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Combien me reste-t-il de temps ?
Le président. Vous disposez encore d'une minute et quinze secondes.
M. Christian Frey. Merci. J'aimerais, Mesdames et Messieurs, revenir sur la question de la classe 4. Vous avez entendu les chiffres: plusieurs centaines de personnes, au sein du grand Etat ainsi que dans d'autres structures, sont encore en classe 4. Auprès du plus grand employeur du canton, c'est-à-dire les HUG, il y en a 42 sur 11 000 employés, ce qui montre bien qu'un processus est en cours et que nous ne parlons pas d'un fantasme.
L'autre élément, c'est la FEGEMS, soit la Fédération genevoise des établissements médico-sociaux. Nous avons auditionné ses responsables - nous en avons eu trois devant nous - qui nous ont dit qu'ils discutaient du passage de la classe 4 à la classe 5 depuis une année en commission paritaire ! Ils en parlent depuis une année, ce qui est bien la preuve qu'un processus est en cours. A ce sujet, les représentants de la FEGEMS ont aussi précisé qu'à leur avis - pour eux, c'est une question de moyens, pas de volonté manquante - la classe 5 se justifiait, par exemple pour le personnel de maison...
Le président. Il vous reste dix secondes.
M. Christian Frey. ...à qui on demande des compétences relationnelles en plus du reste, et ces compétences supplémentaires...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Christian Frey. ...méritent la classe 5. C'est la raison pour laquelle il faut renvoyer...
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur.
M. Christian Frey. ...cette pétition au Conseil d'Etat !
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous prie de bien vouloir voter sur les conclusions du rapport de majorité, soit le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1946 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 49 oui contre 29 non.