République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 19 mars 2015 à 8h
1re législature - 2e année - 3e session - 19e séance
M 2249
Débat
Le président. Pour la proposition de motion 2249 de Mme Lisa Mazzone et consorts, nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je donne la parole à l'auteure de la motion.
Mme Lisa Mazzone (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le 18 mai 2014, la construction de notre agglomération franco-valdo-genevoise se heurtait à l'écueil du vote populaire. Les P+R en France voisine se sont en effet vus sanctionnés. Cela en a secoué plus d'un et en a conforté d'autres. Le message populaire, qui portait sur un projet particulier, n'est toutefois pas à surinterpréter. Il s'agit d'un message particulier et circonscrit, portant sur un crédit déterminé, et non d'un vote sur le bien-fondé du projet d'agglomération. C'est la raison d'être de cette motion qui demande de remettre l'ouvrage sur le métier sans plus tarder avec le soutien de notre parlement.
Pourquoi cela nous semble-t-il indispensable ? Envisager nos politiques publiques, par exemple celles de l'aménagement du territoire ou de la mobilité, par le prisme des frontières, est un déni pur et simple de la réalité. Notre agglomération est en voie d'atteindre le million d'habitants et représente l'un des territoires les plus dynamiques de Suisse et d'Europe. Cela ne va pas sans générer un certain nombre de points de friction, évidemment. Le déséquilibre régional qui réside dans l'éloignement croissant des lieux d'habitat et de travail engendre tant un mitage du territoire qu'une explosion de la mobilité et du trafic de transit, causant des nuisances et des souffrances aux populations. Nous déplorons également la sous-enchère salariale féroce qui est pratiquée.
Il s'agit donc de mettre en place des politiques d'urbanisme, d'aménagement, de mobilité et d'emploi qui soient concertées car nous partageons une communauté de destin avec nos voisins et nous avons tout intérêt, nous-mêmes, à Genève, à avancer conjointement. L'objectif de cette motion est donc d'asseoir le soutien de ce parlement à la concrétisation de l'important travail réalisé jusqu'à présent et de donner corps aux nombreux et ambitieux projets qui se sont d'ailleurs vus primés. Les deux générations du projet d'agglomération ont mobilisé 211 communes pour un bassin de vie de 2500 kilomètres et de 850 000 habitants. 2,5 milliards ont jusqu'alors été affectés par la Confédération aux projets urgents, comme le CEVA, le TCMC, c'est-à-dire le tram en direction de Meyrin, ou le TCOB en direction de Bernex. A nous de poursuivre en mettant enfin en oeuvre les mesures du projet d'agglomération 2 et en élaborant le projet d'agglomération 3, initiant les études nécessaires. Il s'agit également de faire entendre un discours autre que celui du populisme ambiant, un discours assumé... (Brouhaha.) Je vous remercie de m'écouter. (Un instant s'écoule.)
Le président. Poursuivez.
Mme Lisa Mazzone. Merci, Monsieur le président. ...un discours assumé et déterminé qui doit être repris par celles et ceux qui le portent afin qu'il se répande dans la population. Il nous semble que le Conseil d'Etat a un rôle central... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à jouer dans la diffusion de ce projet enthousiasmant, c'est pourquoi nous vous invitons à lui renvoyer cette motion. (Quelques applaudissements.)
M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien soutiendra la proposition de renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Mme Mazzone a déjà expliqué le contenu et les enjeux liés au projet d'agglomération et je n'y reviendrai donc pas. J'aimerais simplement souligner que si le vote du mois de mai de l'année dernière était effectivement négatif, il s'agissait toutefois d'un vote portant sur un objet précis; la dynamique de l'agglomération, elle, doit se poursuivre et qu'on le veuille ou non, elle continue à être portée par un projet d'envergure non seulement pour notre canton mais aussi pour le canton de Vaud et naturellement pour les régions françaises. Il est donc vraiment de notre responsabilité de continuer à agir en faveur de la construction de cette agglomération, tout en tenant compte évidemment des résistances et des problèmes qui ne manquent pas de surgir lorsqu'on se lance dans un tel projet.
Il ne vous aura pas échappé que ce parlement s'est déjà beaucoup activé en faveur de ce projet. Il y a maintenant cinq ans, nous avons lancé des assises transfrontalières qui ont été glorieusement poursuivies par mes successeurs, comme M. Barrillier qui sourit, mais qui en a organisé une édition. Notre parlement s'est donc déjà beaucoup investi. Il ne vous aura pas non plus échappé qu'un groupe de citoyens militants a lancé un manifeste en faveur de la région; certains d'entre eux sont présents dans cette salle. Des forces s'engagent donc en faveur de la région. Le Forum d'agglomération, bien que s'étant quelque peu assoupi, va être relancé. Par ailleurs, des projets se poursuivent: le GLCT, le Groupement local de coopération transfrontalière qui est actuellement le comité de pilotage de cette région, va être transformé prochainement en un groupement euro-régional de coopération, et un projet de loi va sans doute se préparer - c'était l'objet de la dernière réunion. On constate donc que ce GEC est important; M. Stauffer était d'ailleurs présent puisque je siégeais à côté de lui à Nyon, n'est-ce pas ? Cette transformation est également importante car elle permettra aux Etats d'être partie prenante, c'est-à-dire d'élargir encore la représentativité...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Guy Mettan. Merci, Monsieur le président. ...du pilotage de l'agglomération. Bref, pour toutes ces raisons, nous pouvons voir qu'il existe quand même un mouvement portant cette agglomération, et je ne peux donc que vous inviter, Mesdames et Messieurs, à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat qui, j'en suis sûr, s'en saisira pour relancer une dynamique de coopération transfrontalière.
M. Gabriel Barrillier (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai été nourri par la pensée de Denis de Rougemont. Je ne sais pas si tout le monde ici...
Une voix. Non !
Une autre voix. Oui !
M. Gabriel Barrillier. Denis de Rougemont, décédé à Genève il y a trente ans, était le champion de l'Europe des régions. Que disait-il ? Les Etats-nations, y compris les fédérations, sont trop grands pour régler les problèmes des citoyens; ils manquent de proximité. Quant aux communes, elles sont souvent trop petites également pour répondre aux besoins de leurs habitants. Il a donc fait un plaidoyer pour la région, les régions à taille humaine qui s'adaptent aux circonstances, à la géographie et à l'histoire. Cette note simplement pour essayer de replacer un peu cette problématique du Grand Genève dans ce contexte.
En ce qui concerne les faits, qu'on le veuille ou non - notre collègue du MCG va peut-être ensuite dire tout le mal qu'il pense de la région, je dis bien peut-être - nous sommes un million environ; la périphérie est bientôt plus importante que le centre. Genève a 480 000 habitants, voire 490 000, peut-être 500 000 avec les clandestins. La population de la périphérie va être plus nombreuse que la nôtre. Le problème est donc de savoir si nous allons nous arranger avec la périphérie ou si nous allons ériger de nouvelles fortifications, comme jusqu'en 1848 ! Je vous rappelle que c'est James Fazy qui les a détruites et qui a permis à Genève de rayonner. Ce sont les faits. Deuxième constatation: cette région, comparée à des régions européennes, voire mondiales, est bénie des dieux ! Il faudrait vraiment être complètement fou pour se faire hara-kiri et détruire cette région parce que nous n'arrivons pas à négocier et à discuter avec nos voisins ! C'est vraiment un fait important. Evidemment, nous faisons une autocritique; jusqu'à maintenant, on a mis au point des dispositifs compliqués et technocratiques... (Remarque.) ...oui, technocratiques, il y a un défaut démocratique. Et c'est le moment maintenant, je dis bien maintenant, le moment psychologique pour...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Gabriel Barrillier. Oui, je vais terminer en trente secondes. ...donner un coup, un soutien aux élus, au président du Conseil d'Etat et du GLCT ainsi qu'aux élus français pour apporter un supplément démocratique dans la construction de cette région. Si nous ne le faisons pas, nous allons nous détruire ! Je vous remercie et je propose à mon groupe de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Vous voyez, c'est vraiment un sujet d'actualité. La manchette du «Matin», que vous avez tous vue en venant, dit: «Avocat cherche secrétaire française à sous-payer». Voilà. Un avocat genevois qui cherchait une secrétaire maîtrisant les langues l'a payée 1700 euros, bien entendu sur le territoire genevois et pas français. Trêve de plaisanterie. (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, une fois n'est pas coutume, je vais vous faire la lecture de l'article publié dans la «Tribune de Genève» aujourd'hui sous ma plume. (Exclamations. Commentaires.) Cela relate exactement la position du MCG et ainsi elle figurera au Mémorial de ce Grand Conseil: «Il faut être simplet pour penser que le terme "Grand Genève" est rassembleur. Il est arrogant et contradictoire. Si une construction régionale veut avoir une chance de voir le jour, il appartient aux autorités qui nous bordent de se faire entendre et d'obtenir une exception aux règles de l'Etat jacobin et centralisateur qu'est la France actuelle. Or les signes donnés sont contraires, notamment en élargissant la région au Massif central dont les préoccupations sont aux antipodes de celles d'une métropole internationale comme est Genève.
«Depuis la fin de l'occupation napoléonienne, les relations entre Genève et son arrière-pays sont complexes. (Rires.) Au début, pour des raisons confessionnelles intérieures, l'arrivée de Genève dans la Confédération a entraîné un découpage territorial totalement erratique. Les zones franches furent créées, qui avaient pour mission de façonner cet arrière-pays genevois. Ces zones ont d'abord été réduites à leur minimum puis contestées par Paris. Or, c'est précisément dans les zones à régime fiscal particulier qu'il est possible de créer une communauté de destin régional.
«Le MCG, contrairement à ce que disent ses adversaires qui ont perdu la notion même du mot, est souverainiste. Notre vision est celle de l'équilibre entre le dynamisme économique bienvenu et l'afflux de population qui l'accompagne. Si nos voisins français veulent partager l'extraordinaire prospérité que génère la Genève internationale, ils doivent militer pour que les zones franches existantes soient actualisées, voire étendues aux départements de l'Ain et de la Haute-Savoie, et ensemble nous agirons pour que le pays genevois soit toujours plus performant. Dans la mesure où elles en sont capables, ces autorités doivent penser "pays genevois"»...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Eric Stauffer. ...«et non plus comme sujets des cliques parisiennes qui ne voient en Genève qu'un coffre-fort qui doit être pillé. Le MCG est totalement contre les eurofrontaliers qui fuient les désastres de l'Union européenne et le dumping salarial qu'ils traînent derrière eux tel un chaland qui racle les fonds marins.
«Le MCG est prêt à travailler sur un vrai projet d'autonomie régional sur la base des zones franches qui existent, même si l'hydre bruxelloise tente de les détruire.»
Le président. Il vous faut conclure.
M. Eric Stauffer. Je vais conclure, il me reste un paragraphe. «La balle est dans le camp des autorités»...
Le président. Monsieur le député ?
M. Eric Stauffer. ...«françaises. Qu'elles cessent de vouloir nous affronter en permanence»...
Le président. S'il vous plaît, c'est terminé.
M. Eric Stauffer. (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue de parler hors micro.) ...«et qu'elles mettent leur énergie à vouloir une région dans laquelle Genève n'est plus la vache à lait, et son arrière-pays un dortoir toujours plus grand.» (Rire. Commentaires.)
M. Alberto Velasco (S). Le parti socialiste bien sûr se positionne positivement par rapport à cette motion. Je tiens à relever une phrase de la page 6: «Aujourd'hui, c'est sur la mise en oeuvre que butent les projets d'agglomération.» Cela veut tout dire. Pourquoi ? Monsieur le président du Conseil d'Etat, comme vous le savez, nous avons été nommés au début de la législature à des commissions franco-genevoises et pour autant que je sache, nous ne nous sommes toujours pas réunis. Je ne sais pas si mes collègues se sont réunis, mais après presque deux ans, niet ! J'ai assisté il y a quatre ans à ces commissions et elles étaient d'une inutilité invraisemblable. Il est vrai qu'on rencontre des problèmes avec le CEVA. Il existe deux problèmes fondamentaux, à savoir que notre système démocratique est décentralisé et le système français est centralisateur, et c'est bien là que cela bute, Monsieur le président. Par contre, effectivement, il faut mettre en place cette agglomération. Il existe des problèmes de mobilité, de logement et d'aménagement du territoire très importants. Mais comment passer l'écueil de ce système démocratique où nous, au niveau cantonal, nous pouvons prendre certaines décisions alors qu'en France la région a très peu de pouvoir ? Quand nous rencontrons des élus de la région voisine, on constate en effet que nous, nous pouvons nous adresser directement à vous, le Conseil d'Etat, ou à la Confédération, et eux, ma foi, il leur faut des semaines, voire des mois. Monsieur le président, il suffit de constater les problèmes rencontrés pour le matériel du CEVA: nous avions pris des décisions sur ce point une année à l'avance, et les Français n'avaient toujours rien décidé. Ces problèmes ont pour conséquence que nous pouvons difficilement mettre en place ce système. M. Barrillier a soulevé à juste titre la problématique démocratique et cela a effectivement un lien, mais je pense que le Conseil d'Etat devrait prendre langue avec la Confédération et avec les autorités françaises... (Brouhaha.) ...pour mettre en place un système qui permette un dialogue et la construction de voies démocratiques ou de voies de décision, de sorte que nous puissions justement construire cette agglomération.
En ce qui concerne le parti socialiste, nous sommes tout à fait d'accord de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat car je crois que la motion telle que rédigée est parfaitement explicite, Monsieur le président.
Mme Christina Meissner (UDC). Désolée, Mesdames et Messieurs les Verts, mais cette motion à l'ordre du jour depuis 2014 arrive trop tôt. Monsieur Barrillier... Mais où est-il ? Il est là. Monsieur Barrillier, l'Europe des régions, vous avez raison ! C'est l'Europe qu'il nous faut ! Malheureusement, concernant justement cette Europe des régions, je vous rappelle que la région qui nous côtoie maintenant est celle qui va jusqu'en Auvergne. Nous allons même avoir des volcans dans notre région. Je ne sais pas si nous avons encore quelque chose... (Remarque de M. Gabriel Barrillier) ...en commun avec cette région, parce qu'en tout cas nos volcans à nous ne sont pas encore éteints. Cela étant, je vous le rappelle, des élections auront également lieu très bientôt en France voisine, et nos interlocuteurs vont changer. Certains ne veulent pas de mise sous tutelle par Genève. D'autres réclament la collaboration. Attendons ! (Brouhaha.) Attendons de voir qui seront nos interlocuteurs et comment nous pourrons travailler avec eux. M. Mettan évoque le GLCT, l'instance avec laquelle nous avons trouvé un moyen de collaborer. Eh bien, Monsieur Velasco, vous avez raison: que s'est-il passé depuis ? Rien ! Le GLCT est un phénakistiscope. Eh oui, rien d'autre. Alors demander de créer d'autres structures d'information pour la sensibilisation... Mais, Mesdames et Messieurs, au niveau de la région, les gens n'ont pas attendu que nous inventions de nouvelles structures pour mettre en oeuvre des projets qui les motivent, sur lesquels ils sont partants; et c'est comme cela que fonctionnent les régions: au moyen des personnes motivées, et non par la création d'une nouvelle structure au-dessus du CRFG ou du GLCT ou d'autres structures encore donnant l'illusion du mouvement.
Cela étant, vous le savez aussi, une autre chose est importante et il faut l'avouer: les meilleurs moments, les meilleures actions se passent souvent dans la douleur. Que s'est-il passé avec les parkings transfrontaliers ? Tout d'un coup, parce que nous avons dit non, les Français ont retrouvé des ressources à l'intérieur d'eux-mêmes pour mettre en oeuvre ces parkings transfrontaliers. Alors doit-on passer par la douleur ? Certainement, nous avons une douleur financière de notre côté par rapport à ce projet d'agglomération.
Le président. Il vous reste vingt secondes.
Mme Christina Meissner. Mon mot de la fin sera: attendons de voir ce qui se passe en France voisine avec les élections et cette nouvelle région. Et, ensuite, collaborons mais dans la mesure de nos moyens et de nos ressources, et non à travers des structures inutiles.
Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, à nouveau, le projet du Grand Genève est exactement la raison pour laquelle j'ai décidé de revenir au parlement. Je trouvais ce projet exaltant et plus qu'intéressant. Il est un plus pour notre ville de Genève. L'agrandissement de notre région et l'agglomération existent de fait; qu'elles doivent être régulées et que nous devions un peu débrouiller cet écheveau sont des nécessités; que cela engendre des coûts de part et d'autre de la frontière est un fait. Mais nous y sommes confrontés et nous devons nous souvenir que notre système n'est pas le même système qu'en France et qu'en effet le système français extrêmement centralisé prend beaucoup de temps pour les décisions. Le changement des nouvelles régions va probablement entraîner un retard supplémentaire, encore une fois. Cela dit, je crois que la demande de cette motion est légitime dans le sens où nous bénéficions d'un système politique qui permet d'informer les députés de manière plus claire. Aujourd'hui, c'est un peu le reproche que je fais à ce projet: personne ne sait plus où on en est. Disposer d'un rapport qui nous renseigne sur le point où en sont les discussions, sur les projets, etc., me semble effectivement une nécessité. C'est en cela que je trouve que cette motion est importante. Quant à l'attitude de M. Stauffer, Monsieur le président, vous transmettrez, compte tenu de son intervention... (Remarque.) ...je lui conseille de présenter sa motion directement au gouvernement français. Parce que pour l'instant, il n'a pas parlé de la Suisse et de l'avantage que Genève a d'être au centre. Or, si nous ne bougeons pas, ces centres vont bouger. Il se peut que l'agglomération se transforme et que, ne faisant pas le travail en première ligne...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Salika Wenger. ...nous nous retrouvions, nous, à la traîne d'un projet qui était initialement le nôtre et dans lequel nous voulions occuper une place prépondérante. Je crois donc qu'il faut effectivement renvoyer cette motion au Conseil d'Etat afin qu'il informe les députés de manière claire et précise, de sorte que nous puissions poursuivre ce travail.
Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite revenir sur les invites de cette motion. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle instance institutionnelle dans l'agglomération transfrontalière; il s'agit de clarifier les instances, de les rendre plus efficaces, simplement de les convoquer comme cela a été évoqué et de les utiliser à bon escient puisque en effet la région est une réalité qu'il faut prendre en compte. Il faut agir en conséquence en mettant en place des politiques concertées. M. Stauffer déplorait la sous-enchère salariale, tout comme moi, et justement le projet d'agglomération sert à mettre en place des politiques publiques qui peuvent répondre à ces problèmes. En outre, il me semble important de créer un autre discours, et c'est sur ce point que nous avons aussi mis l'accent, comme l'illustre notre dernière invite: «mettre en place des espaces d'informations et d'échanges permettant de sensibiliser la population aux enjeux et aux projets du Grand Genève afin qu'elle s'approprie ce processus régional». Il nous semble qu'actuellement cet autre discours enthousiasmant face à la région fait défaut. C'est aussi l'objectif de cette motion que de rallier la population à l'enthousiasme de ce projet d'agglomération, car il est effectivement enthousiasmant. D'ailleurs, comme j'ai pu le dire auparavant, un certain nombre de projets précis ont été primés pour leur qualité et il s'agit maintenant de les réaliser en concertation avec nos voisins et de pouvoir les concrétiser rapidement sur le terrain, d'une part en réalisant le projet d'agglomération de deuxième génération et d'autre part en mettant l'ouvrage sur le métier quant au projet d'agglomération de troisième génération. (Quelques applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Monsieur Stauffer, vous ne disposez plus de temps de parole, mais vous pouvez m'indiquer la commission à laquelle vous souhaitez renvoyer la motion.
M. Eric Stauffer. Merci, Monsieur le président.
Le président. Juste la commission.
M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr. (Rire. Commentaires.) J'étais en train d'y réfléchir justement...
Le président. Très bien. (Brouhaha. Rires.)
M. Eric Stauffer. Je me demandais si...
Le président. Puisque vous ne savez pas, malheureusement vous n'avez plus de temps de parole.
M. Eric Stauffer. (Le micro de l'orateur est coupé.) ...commission des affaires sociales.
Le président. A la commission des affaires communales, régionales et internationales ? (Remarque de M. Eric Stauffer.) Monsieur le député, vous n'avez plus de temps de parole. Vous voulez donc renvoyer cette motion à la commission des affaires communales, régionales et internationales.
M. Eric Stauffer. Ce n'est pas ce que j'ai dit. (Commentaires.) J'ai dit que je me demandais si la commission des affaires sociales, au vu de l'état de...
Le président. Très bien. (Commentaires. Rires.) Monsieur le député, c'est terminé. Je passe la parole à M. le président du Conseil d'Etat, François Longchamp.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, lorsque nous traversons des difficultés, la première des responsabilités est d'essayer d'analyser pourquoi nous les traversons. Nous avons eu quelques difficultés, vous le savez, avec le projet d'agglomération, notamment en raison d'une votation populaire. A la suite de celle-ci, les instances du GLCT, dont je vous assure qu'elles ont été régulièrement convoquées, n'ont pas vu la présence des partenaires français pendant quelque temps, ce qui rendait évidemment leur travail difficile. Nous avons repris le dialogue et sommes arrivés à des conclusions provisoires qui feront l'objet, comme je m'y suis engagé, d'un rapport avec une stratégie et avec certaines modifications qui vous seront proposées pour rendre les éléments plus lisibles. Il s'agit d'abord d'alléger les structures. Plusieurs d'entre vous ont indiqué combien elles étaient illisibles; je mets au défi quiconque dans cette salle ou ailleurs de comprendre l'articulation entre le GLCT, ses sous-commissions, le Forum d'agglomération, ses sous-commissions, le CRFG, ses sous-commissions et certaines instances qui lui sont extérieures. Tout ceci est parfaitement illisible et cela fait partie aussi des raisons pour lesquelles les Genevois n'ont pas manifesté leur confiance, confiance qu'ils avaient en revanche exprimée dans d'autres circonstances, en l'occurrence quelques semaines auparavant en votant encore plus massivement pour la libre circulation le 9 février 2014 qu'ils ne l'avaient fait lors du premier vote sur les bilatérales.
Nous avons déjà avancé d'une part avec nos partenaires français et d'autre part avec Mme Mazzone et nos partenaires vaudois. Je suis étonné de constater que dans la teneur de cette motion, à l'exception d'une citation du discours de Saint-Pierre, à aucun moment il n'est fait mention des partenaires vaudois, qui sont des partenaires essentiels dans le projet d'agglomération; je rappelle que 30 000 pendulaires vaudois se déplacent tous les jours à Genève et qu'il existe certains projets essentiels avec la région de Nyon et de Gland. Nous avons décidé d'abord de concentrer le GLCT sur sa mission fondamentale qui doit être les thématiques liées à l'aménagement, au transport et à l'environnement à l'exclusion de toutes les autres. Nous avons décidé ensuite de concentrer le CRFG sur des questions politiques et sur des questions ponctuelles de nature politique, par exemple des points concernant la santé ou d'autres traités dans ce cadre. Nous avons ensuite demandé à nos partenaires français davantage de transparence. L'utilisation des fonds frontaliers - 270 millions de francs, tout de même - n'est pas satisfaisante dans l'explication qui nous est donnée par nos partenaires français. Nous avons déjà obtenu certains chiffres d'un des deux départements et nous en obtiendrons d'autres. Par ailleurs, dans le rapport que je déposerai au nom du Conseil d'Etat, vous aurez toute la ventilation de l'utilisation et des effets des fonds frontaliers sur certains investissements et sur certaines dépenses nécessaires au bon équilibre de la région.
Il s'agit ensuite de suivre de très près les évolutions qui se passent en France. Je l'ai dit tout à l'heure, la France ne nous appartient pas; elle est maîtresse de son destin institutionnel et c'est fort bien ainsi. Cependant, elle est en train, vous le savez, de procéder à certaines réformes qui nous interpellent. La première est le regroupement de certaines régions: aujourd'hui la région Rhône-Alpes, notre partenaire historique, se voit adjoindre quatre départements auvergnats qui sont éloignés, qui se trouvent dans des situations économiques difficiles et qui rendent cette région complexe. Elle est à la fois maintenant plus peuplée et plus grande que la Suisse. Dans le cadre des fonds frontaliers, nous avons toujours eu des relations avec les départements français pour une politique locale de coopération, à savoir avec le département de la Haute-Savoie et même, plus précisément, la partie genevoise de ce département, et dans le département de l'Ain, en gros le Pays de Gex, et une partie du pays de Bellegarde. Il se trouve qu'aujourd'hui, dans les faits, les départements français ont disparu. Il y a certes des élections ce week-end et le week-end prochain, mais certaines compétences essentielles des départements, telles que, tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs, le transport scolaire des élèves, relèveront de l'organisation de l'ensemble de la région et même pas d'une compétence départementale. Qui imaginerait qu'aujourd'hui à Berne, on organise les transports scolaires pour l'ensemble de la Suisse, pour des régions de montagne comme les Grisons, pour des régions urbaines comme Genève, pour des régions rurales comme d'autres cantons ? C'est évidemment quelque chose que nous devons suivre de près. Nous avons fait passer le message, et vous l'avez entendu, auprès de nos partenaires français en indiquant que non seulement notre lecture du texte, mais aussi le texte même de l'accord de 1973 constitue un texte de collaboration régionale; c'est un texte franco-suisse avec nos partenaires naturels, qui sont les communes, les départements avoisinants, mais non le Cantal, l'Allier, le Puy-de-Dôme ou la Haute-Loire, départements fort sympathiques mais pour lesquels évidemment le processus de collaboration ne peut pas être celui-ci.
Nous devons enfin trouver des éléments qui permettent de poursuivre le projet d'agglomération. Celui-ci a déployé certains effets. Il a été jugé par Berne comme l'un des deux meilleurs de Suisse parmi les quarante-cinq projets d'agglomération: c'est au projet d'agglomération franco-valdo-genevois, malgré sa complexité institutionnelle - deux pays, deux départements français, deux cantons suisses - que Berne a accordé les moyens les plus substantiels. Ces moyens permettent de réaliser au quotidien des équipements qui font le bonheur de nos citoyens, mais cela, personne ne le sait et c'est précisément pour cette raison que je vous invite aussi à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, afin que je puisse vous présenter à la rentrée un rapport complet, une stratégie, et afin que ce Grand Conseil formule clairement ce qu'il entend faire, quelle politique il entend porter: une politique d'ouverture avec notre région, ce que le gouvernement genevois souhaite, ou une politique de repli dont il faudra assumer les conséquences.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Si je ne m'abuse, nous avons été saisis d'une demande de renvoi à la commission des affaires sociales. Je vous fais donc voter sur le renvoi de la motion à cette commission.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2249 à la commission des affaires sociales est rejeté par 69 non contre 22 oui.
Le président. L'assemblée est maintenant invitée à se prononcer sur la motion elle-même.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes.
Mise aux voix, la motion 2249 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 68 oui contre 20 non et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)