République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 décembre 2014 à 20h30
1re législature - 1re année - 15e session - 92e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Antoine Droin, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Anne Marie von Arx-Vernon, Gabriel Barrillier, Jacques Béné, Michel Ducommun, Jean-Louis Fazio, Emilie Flamand-Lew, Nathalie Fontanet, Jean-Luc Forni, Jean-François Girardet, Frédéric Hohl et Jean-Charles Rielle, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Geneviève Arnold, Christophe Aumeunier, Alexis Barbey, Maria Casares, Pierre Gauthier, Magali Origa, Françoise Sapin, Charles Selleger, Nicole Valiquer Grecuccio et Yvan Zweifel.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Monsieur Stauffer, vous demandez la parole concernant une modification de l'ordre du jour ? (Remarque de M. Eric Stauffer.) Dans ce cas je vous donnerai la parole tout à l'heure.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Nous poursuivons nos travaux avec le PL 11545-A, qui est classé en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de M. Ivan Slatkine, qui a déjà pris place à la table, et le rapport de minorité est de M. Roger Deneys, qui va venir s'installer en face de son collègue. La parole est au rapporteur de majorité Ivan Slatkine. Je vous avertirai quand vous en serez à trois minutes trente.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous voilà enfin dans le vif du sujet avec ce projet de loi qui pourrait être qualifié d'apéritif ou plutôt de plat de résistance de nos débats relatifs au budget 2015. Ce projet de loi correspond à la mesure 44 du Conseil d'Etat visant à suspendre l'annuité qui, pour rappel, est un mécanisme d'augmentation automatique des salaires de la fonction publique, mécanisme inscrit dans la loi.
En préambule, permettez-moi de dire que notre législation est ainsi faite que le débat budgétaire est coupé en deux: il nous faut d'abord voter sur le principe d'une annuité, et ensuite seulement nous traitons du budget. Quel que soit le sort qui sera réservé à ce projet de loi, il faut souhaiter qu'une majorité de notre parlement soutienne le PL 11428 modifiant la B 5 15 qui est en traitement à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat, car ce projet de loi a pour objectif d'inclure le débat sur l'annuité dans celui du budget afin que cessent ces deux débats distincts qui posent de nombreux problèmes.
Pour en revenir à présent au projet de loi qui nous est soumis ce jour, il faut relever que la commission des finances a passé beaucoup de temps pour savoir quel serait l'impact du vote d'une annuité pleine ou partielle sur le projet de budget. Un avis de droit de maître Bellanger a confirmé la position de la commission, à savoir que si une annuité était finalement votée, complète ou partielle, ce serait bien au Conseil d'Etat d'amender le projet de budget afin de respecter le principe de sincérité budgétaire. Ce point étant éclairci, sur le fond la proposition du Conseil d'Etat qui nous est faite est la mesure la plus importante pour équilibrer le budget cantonal tout en permettant la création de nouveaux postes, tant dans l'enseignement que dans la sécurité, afin de répondre aux demandes de la population. Si l'on peut regretter la manière dont cette mesure a été annoncée et l'absence de négociations en amont avec les syndicats de la fonction publique, il faut reconnaître que cette mesure est raisonnable, cohérente et responsable. Elle ne remet pas en cause les conditions de travail de la fonction publique, et on peut relever aussi que les niveaux de salaire au sein de l'Etat sont bons et que rien ne justifie dans le fond une augmentation salariale pour tous de l'ordre de 2%. L'effort qui est demandé à la fonction publique est un effort raisonnable et qui ne touche pas au pouvoir d'achat vu le contexte économique dans lequel nous nous trouvons, qui est proche de la déflation. Renoncer à cette mesure, c'est alourdir de plusieurs millions les charges de l'Etat et donc fragiliser les prestations. Mais c'est aussi mettre à contribution les établissements subventionnés qui sont liés à ce mécanisme, en les obligeant à financer en partie cette augmentation de charges et, en l'absence de nouvelles ressources financières, à voir la qualité de leurs prestations baisser, avec des risques de licenciements.
Le projet de budget sorti de commission prévoit un boni de 24 millions, incluant une annuité plafonnée sur le salaire médian cantonal de 86 868 F. Cette annuité partielle a un coût de l'ordre de 7,9 millions. Il faut relever que cette annuité partielle ne tient pas compte des effets sur les subventionnés, effets plus importants qu'au niveau du petit Etat, ce qui signifie que des établissements comme les EMS et les HUG seraient contraints de revoir la qualité de leurs prestations. La majorité qui a soutenu cette annuité partielle préfère donc, pour des raisons parfois contradictoires, favoriser la fonction publique plutôt que de garantir la qualité des prestations.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Ivan Slatkine. Ces 8 millions ne devraient-ils pas être prioritairement alloués au social ? A l'école ? A la sécurité ? Poser la question, c'est y répondre. En votant le projet de loi du Conseil d'Etat sans amendement, il y aurait la possibilité d'utiliser ces 8 millions inscrits au budget pour améliorer la qualité des prestations. Même si l'on peut déplorer l'absence de négociations sur ce point entre le Conseil d'Etat et la fonction publique, la majorité estime que c'est un argument insuffisant pour ne pas suivre la proposition qui nous est faite. A ce titre, j'invite les minorités, car il y en a plusieurs, à bien réfléchir aux conséquences de leur vote.
Enfin, avant de conclure, j'engage tous les partis à voter l'entrée en matière sur ce projet de loi. En cas de refus, le message serait clair: une majorité de notre Grand Conseil préférerait le versement d'une pleine annuité au détriment d'un budget pour notre canton, prétéritant alors l'ensemble de la population genevoise pour la seule application d'une loi qui date d'une autre époque. Au surplus, si une autre majorité pense qu'il est possible de voter une demi-annuité ou une annuité décalée, alors le résultat final serait le même qu'un refus d'entrée en matière. Les coupes opérées dans le projet de budget seraient entièrement maintenues, voire augmentées, et au final le projet de budget serait refusé, à n'en point douter. Et sans budget, pas d'annuités ni de création de postes nécessaires pour assurer les prestations. Genève et l'ensemble de sa population seraient les grands perdants de cette situation et, compte tenu des échéances importantes à venir, notre canton a plus besoin de stabilité et de consensus que d'un chaos financier et institutionnel dont il aurait beaucoup de peine à se relever. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut d'abord rappeler que l'annuité n'est pas une augmentation salariale automatique; c'est un contrat de travail entre l'Etat employeur, représenté par le Conseil d'Etat, et les fonctionnaires employés de la fonction publique qui sont au bénéfice de ce contrat de travail. En réalité, l'annuité est un contrat qui vous indique que la première année vous êtes payé tant, la deuxième, un peu plus, la troisième, encore un peu plus, etc. Mais c'est un contrat, c'est un accord ! Aujourd'hui, les fonctionnaires sont en droit d'attendre que leur employeur respecte ses engagements. Et il faut bien se rendre compte que si l'on était non pas dans le cadre d'une loi mais dans le cadre des employeurs et employés du secteur privé, une affaire comme celle-ci finirait dans tous les cas aux prud'hommes, et il n'est absolument pas certain que l'Etat employeur gagnerait... (Commentaires.)
Le président. Chut !
M. Roger Deneys. ...contre la fonction publique. Si le contrat doit être changé, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas à la dernière minute, comme le fait le Conseil d'Etat en déposant un projet de loi en marge du budget au mois de septembre. Comme M. Slatkine l'a dit, il y a un véritable problème de négociations et de partenariat social au sein de l'Etat. Et quand en plus - et j'aimerais bien entendre tout à l'heure M. Dal Busco, voire M. Longchamp - on prétend qu'on va suspendre l'annuité pour 2015, alors qu'en réalité on sait très bien que le Conseil d'Etat ne va pas non plus la proposer pour l'année suivante parce qu'il sera dans l'incapacité d'établir un budget équilibré pour 2016 sans prendre la même mesure... Et si je dis cela, Mesdames et Messieurs les députés, c'est parce que ce Conseil d'Etat fait aujourd'hui payer des augmentations de postes aux fonctionnaires en supprimant l'annuité. En effet, on augmente les effectifs dans la fonction publique, on engage davantage de policiers, davantage de gardiens de prison et davantage d'enseignants, mais on ne se donne pas de moyens supplémentaires ! Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat peut certes souhaiter un autre système de rémunération au sein de la fonction publique dans lequel il n'y ait pas d'annuités. On peut en discuter mais, dans le cadre du budget, prétendre qu'on va geler l'annuité pour une année, c'est tout simplement inadmissible. Pour les socialistes, c'est très clair: on fait payer aujourd'hui à la fonction publique et aux subventionnés les nouveaux postes au sein de l'Etat. Pour nous, ce n'est pas acceptable, d'autant que le Conseil d'Etat crée également un malaise par la façon dont il argumente son projet de loi et en faisant croire que ce n'est que pour une seule année.
Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes pensent fondamentalement qu'un budget doit présenter l'annuité intégrale jusqu'à changement du système, mais cela signifie qu'il faut s'en donner les moyens au moment du budget et donc prévoir les recettes qui permettent de la financer, ou alors prévoir un budget déficitaire si on refuse de se donner des moyens supplémentaires. Aujourd'hui, le Conseil d'Etat fait un choix absurde, en disant: «J'engage davantage de fonctionnaires, je veux maintenir un certain nombre de prestations, mais je ne veux pas de nouvelles recettes, alors qu'est-ce que je fais ? Je coupe dans l'annuité et dans les subventions sociales en faveur des plus défavorisés.» Pour les socialistes, ce marché n'est pas acceptable. J'aimerais de plus rappeler que, depuis la baisse d'impôts de 2009, dont on a déjà eu l'occasion de parler, la dette du canton - et cela figure en dernière page du rapport - a explosé ! Elle est passée de 10,5 à 13 milliards...
Le président. Vous parlez à présent sur le temps de votre groupe.
M. Roger Deneys. Pour cette simple raison et par cette simple démonstration, on peut voir aujourd'hui que l'Etat ne se donne pas les moyens d'assumer les prestations qu'il doit à la population et à la fonction publique. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes vous invitent à refuser la suppression de l'annuité. Mais il est vrai que dans le cadre d'un budget où les dés sont pipés parce que le Conseil d'Etat nous propose un projet de budget qu'on ne peut pas péjorer, eh bien nous sommes prêts à accepter un amendement qui a fait l'objet de longues négociations, mais ce n'est franchement pas de gaieté de coeur, et ce sera avec un très grand malaise si nous l'acceptons au final.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la «Nuit des longs couteaux» est terminée. Aujourd'hui, la partie de poker est finie et tout le monde met ses cartes sur la table. J'aimerais dire ici à l'endroit des socialistes et des Verts qu'il ne faudrait pas se tromper en prenant le MCG pour ce qu'il n'est pas. En effet, vous avez tenté aujourd'hui, de manière absolument scandaleuse, de faire une tractation de dernière minute avec le Conseil d'Etat, mais le MCG va vous démontrer ce soir qu'il est bel et bien la deuxième force politique du canton de Genève. Avec 20 MCG, 11 PDC et 24 PLR, le débat sur le budget, je vous en donne ma parole, sera terminé demain à 19h. Et je vous le dis - Monsieur le président, veuillez prendre note - le MCG retire tous ses amendements sur le projet de loi concernant les annuités. Ne restera que l'amendement du Conseil d'Etat visant à verser une annuité complète aux employés gagnant moins que le salaire médian du privé, c'est-à-dire les plus bas salaires de l'Etat. Ce que vous avez fait aujourd'hui n'est pas acceptable, et j'invite les députés PLR et PDC à voter le budget 2015 tel qu'il est sorti de commission, avec les quelques aménagements que nous avons négociés. Les amendements ont déjà été déposés et il en manque encore deux, pour un total de 800 000 F, qui concernent le département du conseiller d'Etat Mauro Poggia. J'ai dit ! (Applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). On entre dans le coeur du débat: on n'a pas commencé à traiter le budget, mais c'est tout de même le coeur du débat budgétaire, puisque tout dépend de ce que l'on va voter maintenant. Le PDC a toujours dit qu'il ne voulait plus d'annuité, et si nous n'en voulons plus, c'est que nous désirons qu'une réforme de l'Etat soit effectuée durant la législature en cours et qu'on diminue la dette. Or pour qu'une réforme soit faite, il faut que les annuités disparaissent, quitte à ce que le Conseil d'Etat discute par la suite d'un autre type de rémunération pour la fonction publique, dans le cadre d'un projet X ou Y, ou de SCORE. Les annuités représentent 40 à 50 millions qui reviennent chaque année, et on ne peut pas établir un budget équilibré avec ces annuités. (Remarque.) Non, on ne peut pas !
Il faut aussi que la fonction publique se rende compte qu'il y a un monde réel en dehors d'elle-même. (Commentaires.) Ce monde réel, ce sont les gens qui ne font pas partie de la fonction publique, et je peux vous dire que, cette année où l'inflation est négative - on sera à -0,1% à la fin de l'année - les gens n'auront pas d'augmentation de salaire dans le monde réel, ou alors une hausse de maximum 1%. Ici, on propose 2,5% d'augmentation de salaire ! Même l'extrême gauche en a pris conscience, puisqu'elle a déposé un amendement visant à décaler l'annuité. Vous vous rendez donc compte que vous allez accorder une augmentation de salaire de 2,5%, alors que le coût de la vie a diminué de 0,1%. Ça ne va pas ! Si on veut avoir un budget sincère, si on veut avoir des finances qui tiennent la route, il faut supprimer cette annuité. Par conséquent, le PDC est clair: il n'y a pas d'annuité, de quart d'annuité, de demi-annuité ou d'annuité donnée au rabais.
En outre, il faut aussi que vous vous rendiez compte que l'annuité que vous voulez accorder au petit Etat sera aussi donnée dans le grand Etat et dans les organes subventionnés, comme l'a très bien dit M. Slatkine. Or on y trouve des employés qui touchent moins que le salaire médian du canton qui se situe à 86 000 F, et c'est là que ces entités devront supporter la plus grande partie de la charge, ce qui risque de poser des problèmes à ces structures. En effet, pour elles, une augmentation de 2,5%, c'est beaucoup ! Pensez donc aussi à ce problème-là.
Enfin, on a beau parler de la baisse des impôts qui revient tout le temps dans la bouche de M. Deneys - on a compris, Monsieur Deneys, qu'on avait diminué les impôts - je rappelle quand même que le peuple a voté cette baisse des impôts ! Le monde réel, Monsieur Deneys, a donné à la fonction publique 6 milliards pour renflouer la caisse de pension de l'Etat. Or ces gens-là, qui sont dans le monde réel, versent aussi des cotisations à leur caisse de pension, qui est dix fois moins bonne que celle de l'Etat. Et pourtant ils paient ! Croyez-vous que quand les CFF ont dû recapitaliser leur caisse de pension, ils ont demandé à la population suisse de payer pour cela ? Ce sont les employés des CFF qui ont repayé leur caisse de pension, et ils n'ont pas fait grève ! Ils ont payé leur caisse de pension et n'ont pas discuté. Là, le monde réel vous donne 6 milliards et vous venez pleurer pour une augmentation de salaire qui est indue ! (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'avais pas l'impression qu'on en était aux déclarations finales qui précèdent le vote du budget, vous me permettrez donc de revenir à l'objet qui nous préoccupe. La question est assez simple: l'employeur, le Conseil d'Etat - le plus gros employeur du canton - respecte-t-il ses engagements ? A l'évidence, Mesdames et Messieurs, la réponse est non. Que d'aucuns s'en réjouissent ici est tout de même assez étonnant, parce que la réalité est bien là: l'annuité, l'augmentation annuelle est un droit, le personnel a le droit de la toucher, or au lieu de cela il reçoit une claque, du mépris, puisque à aucun moment l'employeur n'a discuté avec les syndicats. Il méprise le partenariat social et bafoue, de plus, la réalité, parce que je lis à la page 6 du rapport, Mesdames et Messieurs, que M. Dal Busco relève que «depuis 1995, l'annuité n'a été suspendue que 3 fois [...] Les autres années, soit 17 fois, l'annuité a été octroyée, parfois de manière décalée [...]». C'est ce que j'appelle un mensonge par omission ! En effet, pourquoi remonter à vingt ans ? Pourquoi pas un peu plus, Monsieur Dal Busco ? Car en faisant un petit effort, on voit qu'il y a vingt-deux ans, en 1993, l'annuité a été supprimée, de même qu'en 1995. En 1997 aussi, c'était bien l'intention de l'employeur. Pour finir, il l'a décalée de douze mois, mais je ne sais pas si vous payez vos factures douze mois plus tard... Puis elle a également été supprimée en 2005 et en 2012. De plus, l'annuité a été différée de six mois - ce qui signifie qu'elle n'est pas versée durant cette période - en 1999, 2000, 2001, 2004, 2006, 2007 et 2008. Sans compensation rétroactive, bien entendu.
Quant à la prime de fidélité qui fait partie des mécanismes salariaux, elle existait jusqu'en 2008. Elle a été supprimée en 1993 et 1995; en 1997, elle a été décalée de douze mois, puis en 2005, 2006 et 2007, et réalisée à moitié en 2004. Voilà, Mesdames et Messieurs, la réalité: en gros, pour l'employeur, les annuités ont fait l'objet d'économies douze fois en vingt-deux ans, et la prime de fidélité sept fois en seize ans. Ça veut dire que pratiquement chaque année c'est remis en question, chaque année on essaie de spolier le personnel en lui retirant une partie de son salaire à laquelle il a droit, et ça, Mesdames et Messieurs, on ne peut pas le tolérer.
Je remercie par ailleurs les bancs d'en face d'avoir retiré leur série d'amendements, parce qu'ils n'étaient pas forcément bénéfiques. Pour le groupe Ensemble à Gauche et moi-même, c'est l'annuité pleine et entière qui devrait être versée à tout le personnel, et c'est cette garantie-là qui devrait être donnée année après année, car le Conseil d'Etat, l'employeur, n'a aucune raison de la barrer unilatéralement avant la moindre discussion et avant de chercher la moindre solution. C'est ça qui est grave ! Toutefois, comme je ne me fais pas trop d'illusions, nous avons quand même déposé un amendement. J'ai repris celui de mon camarade hélas absent aujourd'hui, M. Michel Ducommun, qui l'avait déposé à la commission des finances, et c'est un amendement qui demande ma foi une fois de plus de bien vouloir différer de six mois le versement de cette annuité.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Olivier Baud. Cela permet quand même au personnel d'avoir une perspective et de progresser, parce que c'est essentiel, de même qu'il est important que le personnel au sein de l'Etat soit bien traité. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe des Verts tient au versement de l'annuité pour la fonction publique, parce que celle-ci fait partie intégrante des mécanismes salariaux de l'Etat. L'annuité est un droit acquis inscrit dans la loi, elle fait partie des conditions de rémunération de la fonction publique et c'est un engagement de l'Etat employeur envers ses employés. Renoncer à verser une annuité est donc un acte extrêmement important et extrêmement grave, qui doit être motivé par une très mauvaise situation financière de l'Etat. Or les Verts considèrent que nous ne sommes pas actuellement dans cette situation-là; le projet de loi du Conseil d'Etat tend en réalité à faire porter aux fonctionnaires actuels le coût des augmentations de postes au sein de l'Etat. Pour les Verts, cela n'est pas acceptable, d'autant que le budget qui nous est présenté n'est pas un budget d'austérité, au vu des augmentations de postes - qui s'élèvent à plus de 300 - qui nous sont proposées.
Cependant, afin de chercher un compromis acceptable et de trouver un accord possible dans cette salle, les Verts sont d'accord de verser une annuité réduite, une annuité accordée à tous les fonctionnaires gagnant moins que le salaire médian. Nous estimons que c'est là un bon moyen de verser quelque chose à ceux qui en ont le plus besoin et de faire un pas dans la bonne direction pour trouver dans cet hémicycle un compromis sur le budget.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, on discute en ce moment de l'annuité, mais je crois que, dans la république, avec ce qu'on a vu encore aujourd'hui devant le Grand Conseil, de même qu'il y a deux jours et quinze jours, des questions se posent au-delà de l'annuité par rapport à la fonction publique, laquelle a un employeur qui est l'Etat, le Conseil d'Etat. Cette fonction publique vit actuellement des heures difficiles parce que dialogue ou négociations il y a peu, non seulement sur l'annuité - et ça se voit dans ce budget, où elle n'était pas incluse - mais dans d'autres espaces également, concernant d'autres pans des relations de travail pour la fonction publique.
Mais revenons-en à l'annuité. D'entrée de jeu, vu le mécanisme qui existe entre l'annuité et le budget, lorsque le budget est créé par le Conseil d'Etat et que l'annuité n'est pas comprise dedans, c'est vrai qu'en tant que parlement et en tant que députés, même si on peut appeler de nos voeux que l'annuité soit versée entièrement, à un moment donné il faut se rendre compte que si l'on veut l'annuité, on doit couper ailleurs. Mais pour ce qui est de couper ailleurs aujourd'hui à l'Etat, alors que ça fait six ans ou plutôt huit ans que je siège dans ce Grand Conseil et que depuis lors le Conseil d'Etat vient chaque année avec des mesures d'économies, il est clair que quand on doit prendre des mesures d'économies sur un budget, ça signifie qu'on coupe non seulement dans du gras, mais également dans du muscle, voire dans l'os, au niveau des prestations qui sont offertes à la population via la fonction publique. En effet, moins d'instituteurs, c'est plus d'élèves dans les classes, moins d'assistants sociaux, ce sont des gens qui ne peuvent pas rebondir, et on peut le voir aussi au niveau de la construction ou des routes: on a voté aujourd'hui un train de lois de budgets d'investissement, mais s'il n'y a pas le personnel à l'Etat pour mettre en route tout ça, on a beau voter des crédits, à un moment donné la machine se bloque.
Par conséquent, pour en revenir à l'annuité, vu tous les éléments contraignants du budget et la situation qui est la nôtre quand on en arrive à la présentation de celui-ci, le groupe socialiste a d'emblée dit qu'il s'orientait vers une annuité relative au revenu, c'est-à-dire une annuité solidaire plutôt qu'une annuité ou une demi-annuité pour tout le monde, de sorte que les personnes les moins favorisées parmi les fonctionnaires puissent quand même voir leur salaire progresser, quelles que soient les restrictions par ailleurs imposées aux autres. C'est une sorte de solidarité, et je crois qu'elle sera comprise - du moins je l'espère - dans la fonction publique. C'est mieux que rien, dirons-nous, et c'est pour cette raison que nous irons vers une annuité relative au revenu médian cantonal. Nous l'avons très vite dit, nous avons continué à le dire et ce soir nous voterons cet amendement et aucun autre...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...en espérant que nous pourrons ensuite travailler de manière intéressante et concluante sur le budget. (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Mesdames et Messieurs, le député Deneys a raison: l'annuité était inscrite dans la loi et le Conseil d'Etat n'avait pas le droit de la supprimer. Si le Conseil d'Etat avait été correct, il aurait présenté un projet de budget avec des chiffres rouges à 40 millions en nous disant: «Mesdames et Messieurs, l'annuité est comprise, mais nous, nous estimons qu'on ne doit pas la verser. Si vous voulez avoir un budget à l'équilibre, supprimez ces annuités afin d'y parvenir !» Il ne l'a pas fait, et c'est regrettable. Cependant, force est de reconnaître que si l'on prend l'indice de la vie 2010, on s'aperçoit qu'on était à 100 et qu'en 2014 on est toujours à 100. Une annuité ne se justifie donc pas. C'est pour cette raison que l'UDC refusera toute annuité dans ce projet, mais si l'annuité minimale est acceptée, cela ne nous empêchera pas d'entrer en matière sur le projet de loi suivant.
M. Cyril Aellen (PLR). J'aimerais faire quelques petites rectifications en préambule. D'abord pour dire que les fonctionnaires ne sont pas soumis à des contrats de travail mais à des lois, et que pour changer leurs conditions de travail il faut modifier les lois. C'est ce dont on discute aujourd'hui, et toute autre analogie est erronée. Ensuite, j'entends la gauche râler ou en tout cas pester quant au fait qu'on traite séparément l'annuité et le budget, ce qui créerait des tensions. Or j'ai déposé un projet de loi visant à modifier cette situation et vous ne le soutenez pas ! Je voulais mettre en avant cette contradiction.
Je suis allé voir ma voisine pour savoir ce qu'elle pensait de ce budget... (Exclamations.) Elle m'a dit que c'était très simple: il y a trois blocs et il faut apprendre le livret de 9, le livret de 10 et le livret de 11. Je lui ai demandé pourquoi et elle m'a répondu ceci: si à l'Etat il y a un service de 10 personnes qui coûte 1 million en 2014 et qui fait très bien son travail, l'Entente dit alors merci à ces 10 collaborateurs et renouvelle sa confiance à ces derniers. Le MCG remercie aussi les collaborateurs et dit qu'il faut préserver les acquis, mais préserver les acquis signifie là procéder à une augmentation de 10%, ce qui revient donc à 1 100 000 F. Du coup, il faut alors réduire, il n'y a plus que 9 personnes, c'est le livret de 9 et le livret de 11. Ensuite, la gauche remercie également ces collaborateurs et a la même notion des acquis, soit une augmentation du salaire. Mais alors il faut qu'ils soient plus nombreux pour effectuer ce même travail, et ça c'est le livret de 11. Cela fait donc 1 210 000 F pour ce même travail et pour ce même service. Alors là il y a trois écoles, me dit-elle. Il y a une petite moitié de la gauche qui dit qu'il faut s'endetter, il y a une petite moitié de la gauche qui dit qu'il faut augmenter les impôts, et puis il y a M. Roger Deneys qui dit qu'il faut faire les deux ! (Rires. Applaudissements.)
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, les négociations salariales dans le secteur privé sont à la hauteur des indices du coût de la vie. L'indice du coût de la vie est à zéro. Dans la métallurgie du bâtiment, on a vu cette année des syndicats venir nous trouver, sans demander de hausse salariale. Par contre, c'est vrai qu'on est en renégociations pour une nouvelle convention salariale.
Le président. Il vous reste vingt secondes.
M. Olivier Cerutti. Celles-ci ne sont pas toujours de même nature. Elles ne sont pas basées que sur l'argent, car il y a effectivement d'autres prestations. Aujourd'hui, les prestations de l'Etat se situent au niveau des places de travail...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît !
M. Olivier Cerutti. ...au niveau du logement, au niveau de bien d'autres services, dont la police. Et c'est dans ce secteur-là que nous devons faire des efforts. Je parle aussi des caisses de pension qui ont été alimentées...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député !
M. Olivier Cerutti. Oui, Monsieur le président, je vous remercie.
Le président. Merci à vous ! Je passe la parole à M. le député François Baertschi, à qui il reste deux minutes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Le MCG trouve inacceptable que l'on coupe cette annuité, parce que c'est vraiment inadmissible de le faire. Mais c'est le Conseil d'Etat qui nous a mis dans cet embarras, et depuis plusieurs mois nous avons essayé de sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvions en faisant des propositions de coupes qui permettaient de maintenir tout ou partie de l'annuité. Nous n'avons pas réussi à trouver le tout, mais nous sommes parvenus à trouver une partie, la moitié environ. Malheureusement, il n'y a pas de volonté politique, autant au niveau de la gauche qu'au niveau de l'Entente, de couper dans les dépenses de l'Etat, un Etat qui est trop gros et trop gras. Et comme il n'y a pas cette volonté politique de payer convenablement les fonctionnaires, nous sommes obligés d'aller dans la vision minimaliste du Conseil d'Etat. Nous sommes contraints d'y aller tout simplement parce que des gens tiennent un double discours dans cette enceinte. J'en veux pour preuve notamment les Verts, qui disaient aujourd'hui dans un communiqué de presse qu'ils étaient en faveur de l'annuité pour les revenus inférieurs à 85 000 F, et qui viennent maintenant nous dire dans cette enceinte qu'ils sont pour l'annuité complète. Et je ne vais pas parler, car on le voit, des déclarations de certains autres partis qui disent une chose et font le contraire. Mais je crois qu'à un moment donné, il faut que chacun prenne ses responsabilités. Nous, le MCG, nous les prenons, parce que nous ne voulons pas une situation catastrophique. Bien payer les fonctionnaires, c'est possible, c'est ce qu'a montré l'étude du budget. Avoir des prestations sociales est également possible, il faut seulement une bonne organisation et mettre fin au gaspillage, parce que ce qui détruit notre Etat, ce qui détruit le fonctionnement de notre administration, c'est le gaspillage et la mauvaise gestion. C'est ce contre quoi le MCG se bat. Nous ne sommes pas suivis, nous en prenons acte, mais nous sommes réalistes et responsables. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Jean-Michel Bugnion, à qui il reste deux minutes vingt.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Merci, Monsieur le président. Je voulais dire ici, Mesdames et Messieurs les députés, en reprenant les propos de mon préopinant UDC concernant une autre thématique, qu'il n'y a pas de monopole d'un parti pour une quelconque frange de la population. Il n'y a pas de monopole des pauvres, il n'y a pas de monopole de la fonction publique, mais il y a un désir partagé par tous les partis, c'est le bien commun. Le budget est peut-être l'acte le plus important que ces partis doivent accomplir, et la question n'est pas de savoir si on défend la fonction publique, la population ou Dieu sait quoi, mais bien de savoir ce qu'on fait pour le bien-être de la majorité de notre population, et j'espère que la suite des travaux ira dans ce sens-là.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut tout d'abord rappeler ici - et on en est tout à fait fier - que notre fonction publique cantonale genevoise fournit des prestations d'excellente qualité et que, pour les réaliser, elle perçoit un traitement, un salaire qui est excellent. Les conditions salariales au sein de l'Etat de Genève sont de tout haut niveau en comparaison intercantonale, et évidemment - vous pouvez l'imaginer - en comparaison internationale également. Voilà le premier élément que je voulais rappeler.
Effectivement, ce projet de loi constitue un point central du projet de budget 2015. Son impact financier se monte à plus de 41 millions, et les discussions au sein du Conseil d'Etat au sujet de la suspension éventuelle de l'annuité ont été très nourries. Elles ont du reste été engagées dès le début de ce processus budgétaire, c'est-à-dire au début de l'année 2014. La question qui s'est posée et qu'on doit se poser à ce stade consiste à savoir, bien que les dispositions figurent dans la loi, si dans le contexte économique actuel - je parle bien du contexte économique - dans une inflation qui est égale à zéro, voire même sur le dernier mois dans une déflation, une augmentation automatique et généralisée des salaires est justifiable ou justifiée, non pas au sens de la loi, évidemment, parce que cela figure dans celle-ci, mais notamment au niveau de ce que l'on peut penser d'un point de vue d'une augmentation ne serait-ce que pour compenser une éventuelle perte de pouvoir d'achat. Pour le Conseil d'Etat, la réponse à cette question a été claire: non, rien ne le justifie, en tout cas d'un point de vue économique. Et s'agissant des prestations que l'Etat offre à ses collaborateurs, notamment en matière de retraite, est-ce que là aussi le système ou le collaborateur est prétérité ? La réponse est de toute évidence non, et je ne veux pas rappeler les débats très importants qui ont eu lieu et le fait que le peuple se soit déterminé à ce sujet, avec les conséquences financières que vous connaissez, s'agissant de la caisse de retraite, dont l'essentiel des prestations - pour ne pas dire la totalité - a été maintenu, et des prestations d'un tout haut niveau. Voilà pour le deuxième aspect.
Dans cette affaire, et si l'on considère également la question du pouvoir d'achat, dans tous les cas de figure force est de constater que rien d'un point de vue économique ou financier ne peut justifier l'octroi d'une annuité, et d'une annuité complète, de surcroît, qui coûte environ 41 millions de francs à cet Etat. On pense que l'effort qui serait de ce fait demandé à notre fonction publique est totalement supportable et doit être supporté, parce qu'il s'inscrit, Mesdames et Messieurs - mais je ne veux pas anticiper sur un débat qui va nous occuper de longues heures - dans un effort généralisé de maîtrise des charges. Le programme qui vous est proposé par le Conseil d'Etat se monte à 154 millions de francs de mesures, avec 44 mesures qui sont quasiment toutes intégrées dans ce projet de budget. C'est donc un effort équilibré qui est demandé à la fonction publique, et il est faux de prétendre que l'effort est demandé uniquement à cette fonction publique: ça fait partie d'un tout, d'un équilibre que le Conseil d'Etat a veillé à assurer.
Nous vous demandons par conséquent d'entrer en matière sur ce projet de loi. Vous le savez, suite à des discussions et à des propositions d'amendements faites à ce parlement au cours de ces derniers jours et de ces dernières semaines, le Conseil d'Etat a déposé un amendement. Celui-ci a été évoqué par certaines et certains d'entre vous et on en discutera dans le cadre du deuxième débat, mais pour l'heure nous vous invitons bien évidemment à entrer en matière sur ce projet de loi. Je vous en remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais donc mettre aux voix l'entrée en matière de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11545 est adopté en premier débat par 87 oui contre 9 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.
Le président. A l'article 2, nous sommes saisis d'un amendement de M. Olivier Baud, que vous avez tous trouvé sur vos tables. Le voici:
«Art. 2 Report du versement des annuités (nouvelle teneur)
Les augmentations annuelles au sens de l'article 12, alinéa 1, de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973, sont différées de 6 mois (au 1er juillet 2015 pour le personnel administratif, au 1er mars 2016 pour le personnel enseignant).»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 79 non contre 8 oui et 7 abstentions.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté.
Le président. A l'article 3, nous sommes saisis d'un amendement présenté par le Conseil d'Etat, que vous avez tous reçu. Je vous le lis:
«Art. 3 Dérogation à la réduction des annuités (nouveau, les art. 3 et 4 anciens devenant les art. 4 et 5)
En dérogation à l'article 2 de la présente loi, les augmentations annuelles sont accordées, pour l'année 2015, aux membres du personnel dont le traitement annuel brut, au sens de l'article 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973 (B 5 15), 13e salaire inclus, déterminé selon l'échelle 2014, sans indemnités, en équivalent temps plein, est inférieur à 86 868 F.»
Je passe la parole au rapporteur de majorité, puis au rapporteur de minorité, et ensuite aux députés qui la demanderont, pour trois minutes.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'invite cette assemblée à refuser l'amendement du Conseil d'Etat, et je vais essayer de vous expliquer rapidement pourquoi. D'abord, en votant le plafonnement du versement de l'annuité au salaire médian cantonal, vous pouvez voir combien de personnes sont touchées puisque, en termes de francs, sur le petit Etat, on parle de 2,3 millions de charges, c'est-à-dire quasiment rien, car cela représente 0,01% des charges de personnel de l'Etat. Vous êtes donc en train, pour une certaine majorité d'entre vous, de soutenir un amendement qui est purement symbolique mais qui ne va strictement rien apporter à la fonction publique, et parallèlement, en votant cet amendement, vous allez priver certaines prestations de 8 millions qui sont disponibles dans le budget. Or avec 8 millions dans le budget, vous pouvez, par exemple, réintégrer ou du moins atténuer la mesure 18 du Conseil d'Etat concernant la suppression du complément d'intégration. Eh bien non, Mesdames et Messieurs, pour une mesure purement symbolique vous êtes prêts à faire une croix sur davantage d'aide en faveur des plus démunis dans ce canton, et je dois dire que ça m'étonne que la gauche soutienne une mesure qui est purement symbolique et qui va être prise au détriment de la population. Le rapporteur de majorité qui est en face de vous s'engage au nom de son groupe, si cet amendement est refusé, à reverser intégralement ces 8 millions à l'ensemble des politiques sociales que vous déciderez. Il s'agit, Mesdames et Messieurs, de savoir ce qu'on préfère: être dans le symbole et purement le politique ou vraiment faire de la politique pour les Genevois, pour les Genevois qui en ont le plus besoin. C'est la raison pour laquelle je vous invite à refuser cet amendement. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que les déclarations de M. Slatkine sont embarrassantes et expriment bien en quelque sorte le malaise dans lequel nous nous trouvons ce soir. Le Conseil d'Etat a malheureusement une vision partielle et partiale de la situation genevoise, puisqu'il propose dans un premier temps de supprimer l'annuité et dans un deuxième temps d'engager de nouveaux collaborateurs, mais que parallèlement il dit que c'est une répartition équitable des efforts et ne propose pas d'augmenter les recettes, même en diminuant ne serait-ce qu'un tout petit peu les effets de la baisse d'impôts, car il ne s'agit pas forcément de supprimer complètement cette baisse d'impôts.
En l'occurrence, on est face ici à une proposition qui maintient le principe de l'annuité, et moi j'aimerais dire qu'il ne s'agit pas seulement - comme l'a indiqué un député PLR tout à l'heure - du fait que c'est la loi qui l'a créée qui la supprime, mais il existe bel et bien une loi, qui présente la grille de l'évolution des annuités: il est dit que telle année on gagne tant, que telle année suivante on gagne un peu plus, etc. Les règles du jeu sont donc connues pour les fonctionnaires qui s'engagent dans la fonction publique.
Ici, en acceptant cet amendement, les socialistes tiennent surtout à indiquer à la fonction publique qu'on reconnaît d'abord la validité du principe de l'annuité et que de plus les collaborateurs qui sont nouveaux et qui perçoivent les salaires les moins élevés de la fonction publique ont aussi droit à une progression salariale qui a été accordée par l'employeur dans un premier temps. C'est un système que l'employeur a fait connaître à ses collaborateurs quand il les a engagés. Respectons donc cet accord. L'effort est déjà énorme ! Le coût d'une annuité est de l'ordre de 40 millions, il faut par conséquent à un moment donné rester proportionné, si l'on veut une répartition des efforts équitable: moi je suis pour les compromis et je pense que ces 7 millions - c'est le dernier chiffre qu'on a en notre possession - sont raisonnables et que c'est déjà peu par rapport à tout ce que la fonction publique genevoise fait pour notre population au quotidien, avec une pression démographique, structurelle et économique très forte. Nous devons donc aujourd'hui essayer de donner un signal qui n'est pas celui de dire qu'on ne veut pas entendre parler de la reconnaissance du travail de la fonction publique. En conséquence, il est important pour nous de garder l'annuité, même dans une proportion réduite, malheureusement, mais selon nous le Conseil d'Etat doit être plus sérieux et proposer de nouvelles recettes, sinon il n'est pas correct vis-à-vis de la fonction publique.
M. Alberto Velasco (S). Je trouve que ce que vient de nous dire le rapporteur de majorité est un peu dégueulasse... (Commentaires.) Franchement, dire que ce petit surplus d'annuité ne va rien apporter aux gens... Mais il ne tient qu'à vous de voter la totalité de l'annuité ! Vous ne l'avez pas voulue depuis le début. Et ce qui est plus dégueulasse, Mesdames et Messieurs, je vous le dis et j'insiste sur les mots... (Exclamations. Commentaires.) Oui !
Le président. Chut !
Une voix. C'est quoi qui est dégueulasse ?
M. Alberto Velasco. ...c'est que dès le début des travaux à la commission des finances vous avez opposé les travailleurs du privé à ceux du public, en disant que les travailleurs du public exploitaient les travailleurs du privé et qu'effectivement il fallait enlever l'annuité...
Une voix. On n'a jamais dit ça ! Stop !
M. Alberto Velasco. Monsieur le président, est-ce que je peux m'exprimer ?
Le président. Allez-y, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Merci, Monsieur le président. Ça, ce n'est pas normal et c'est ce discours qui est gênant.
Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez dit tout à l'heure - vous transmettrez, Monsieur le président - que, puisque l'inflation était à zéro, et qu'il s'agissait même d'une déflation, ce qui est grave pour notre pays, eh bien les fonctionnaires n'avaient pas droit à l'annuité. Mais l'annuité n'est pas une compensation liée à l'indice du coût de la vie, Monsieur le conseiller d'Etat ! L'annuité s'inscrit dans un plan de carrière, c'est-à-dire que, contrairement au privé où les gens peuvent passer d'un poste à l'autre, quand on est instituteur on s'engage pour la vie dans la fonction publique afin de servir la république, et de ce fait on doit réajuster les salaires en cours de carrière. C'est ça, l'annuité, Mesdames et Messieurs !
Or le projet dont nous discutons en ce moment concerne en fait la fin de cette annuité pour les fonctionnaires. En effet, aujourd'hui c'est un petit bout que vous donnez, parce que la gauche s'est battue et qu'il faut sauver l'honneur, mais ce qui vient l'année prochaine, c'est la fin des annuités ! C'est ce dont on discute ici, et c'est ça qui est grave, Mesdames et Messieurs, parce que le projet de loi de M. Cyril Aellen qui est en cours de traitement à la commission ad hoc veut aller dans ce sens-là. Voilà ce dont on discute aujourd'hui, Monsieur le rapporteur de majorité, on ne parle pas de donner 7,8 millions. En réalité, c'est 40 millions qu'il fallait verser à la fonction publique, or on leur pique déjà 30 millions. Voilà l'injustice ! Alors, Mesdames et Messieurs, il est évident que nous allons voter ces 7,8 millions, on y est obligé, on ne va pas refuser ça, même si c'est un pis-aller, mais je relève quand même que vous n'avez pas voulu voter la fin du 14e salaire, et là c'est une injustice...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco. Là c'est une injustice ! Le 14e salaire, Mesdames et Messieurs, la droite ne veut pas y toucher, par contre on touche à l'annuité des travailleurs de la fonction publique. Il y a donc quand même une injustice crasse là-dedans. Donc, oui, malheureusement - ou heureusement, je n'en sais rien - nous, nous voterons les 7,8 millions, parce qu'ainsi les petits salaires de la fonction publique au moins connaîtront une augmentation. (Quelques applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, si aujourd'hui la fonction publique n'a pas une annuité complète, c'est la pleine et entière responsabilité de la gauche. (Exclamations. Applaudissements.) Et je serais tenté de dire que les socialistes sont les Grecs de ce parlement. (Exclamations.)
Une voix. Bravo !
M. Eric Stauffer. Pourquoi ? Parce que, année après année, l'Etat enfle, comme en Grèce où, sur un lac asséché depuis quarante ans, il y avait 1250 gardiens, payés par l'Etat. Et ça, Mesdames et Messieurs de la gauche, ce n'est pas acceptable. (Commentaires.) Nous, au MCG, nous voulons que l'Etat respecte sa parole envers ses employés, mais quand vous avez un gâteau d'une certaine grandeur et que vous agrandissez la liste des invités chaque année, eh bien à un moment donné il n'y a plus assez à manger pour tout le monde. Et qu'est-ce qu'on entend dans la bouche des socialistes ? On entend: «Oui, il y a un manque de recettes. Les impôts ont baissé.» Moi je ne sais plus comment vous l'expliquer ! Le peuple genevois a voté une baisse d'impôts, et le corollaire c'est que les recettes ont augmenté de 2,9% entre 2008 et 2011 - ou 2012, M. Dal Busco me corrigera. Donc il n'y a pas de relation entre une baisse d'impôts et une baisse de recettes, puisque les recettes ont augmenté ! (Commentaires.)
Le président. Chut !
M. Eric Stauffer. Sans économie forte, vous n'avez plus rien à dépenser ! (Remarque de M. Roger Deneys.)
Le président. Monsieur Deneys, s'il vous plaît ! (Chahut.)
M. Eric Stauffer. Donc aujourd'hui, comme je l'ai dit dans ma déclaration initiale, nous allons voter cette annuité pour les employés qui touchent les salaires les plus bas, mais qui ont toujours la sécurité de l'emploi, ce qui n'est pas le cas dans le secteur privé, et vous le savez ! Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, il faut que l'Etat réduise sa voilure, nous l'avons dit, et c'est la raison pour laquelle le MCG s'est opposé au projet de budget lorsque le Conseil d'Etat est venu avec un boni de 800 000 F.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Eric Stauffer. Je vais conclure, Monsieur le président ! Nous voulons un boni qui nous permette d'avoir un avenir plus radieux, de jouir d'une économie forte et de redistribuer l'argent aux plus faibles, mais de façon efficace et non pas à la manière socialiste, c'est-à-dire en mode arrosoir. Le MCG a toujours été clair sur ce sujet: il faut une économie forte pour un social efficace !
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Eric Stauffer. En conclusion, nous voterons l'amendement proposé par le Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Cyril Aellen (PLR). Si vous le permettez, Monsieur le président - et vous transmettrez - j'aimerais d'abord rappeler à nos collègues Velasco et Deneys que le projet de loi que j'ai déposé propose de discuter des annuités en même temps que le reste du budget, mais pas du tout de les supprimer. Il suffit de le lire; je pense qu'ils devraient y arriver !
Maintenant je voudrais dire deux choses précises sur l'amendement qui a été déposé, et ce sont juste des chiffres. En réalité, le chiffre de 86 868 F qui est donné correspond au salaire médian de l'entier de la population, mais non pas du privé. En effet, le salaire médian du privé est inférieur, puisqu'il se monte à 81 300 F. Et s'il y a 5000 F de plus en moyenne, c'est exclusivement en raison du salaire médian du public, qui lui s'élève en 2013 à 112 775 F, et cela ressort du bilan social du Conseil d'Etat. C'est donc cette moyenne-là qui donne 86 000 F. Mais ce n'est pas le plus important. Le plus important, c'est que l'octroi de l'annuité à ceux qui gagnent moins que 86 000 F va avoir une répercussion immense sur les établissements autonomes comme les EMS. Une répercussion immense, parce que les employés de ces établissements gagnent moins que dans le petit Etat. Alors en réalité ce qui va se passer, c'est qu'on ne va pas le financer en entier, parce que les mécanismes sont ainsi faits. Ces établissements vont donc devoir subir des baisses de prestations et des diminutions de personnel. En conséquence, il faut être clair: si vous votez l'amendement du Conseil d'Etat, vous baissez par exemple les prestations pour tous les EMS du canton et vous touchez 3000 employés. (Applaudissements.)
M. Olivier Cerutti (PDC). Je vais pouvoir terminer mes propos d'il y a un instant. J'ai entendu mardi matin à la radio des plaintes de la fonction publique, et notamment une plainte qui m'a un peu hérissé le poil. Je vais vous la relater: le souci était de recevoir des enfants handicapés dans nos classes d'école. Oui, Mesdames et Messieurs, j'ai entendu cela à la radio ! La dernière grande avancée sociale et humaine de notre société, après le mariage pour tous, c'est bien de recevoir nos frères handicapés dans des classes d'école qui les acceptent et les reçoivent. Moi je pense, Mesdames et Messieurs, qu'il y a un malaise au sein de la fonction publique, plus que des problèmes d'argent. Il y a un problème de reconnaissance, de reconnaissance du travail, de reconnaissance au travers de leurs collègues de travail, peut-être, parce qu'ils ne sont pas assez nombreux, et je crois que le projet de budget du Conseil d'Etat vise cela.
Je rejoins totalement la position de M. Slatkine tout à l'heure: pour moi, voter ces 8 millions, c'est effectivement se faire un croche-patte. En effet, nous aurons une annuité pour un coût de 8 millions, mais nous toucherons tout le domaine subventionné du grand Etat, et cela, je crois que nous ne pouvons pas nous le permettre. Mesdames et Messieurs, je vous demande donc de refuser l'amendement du Conseil d'Etat.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts voteront cet amendement déposé par le Conseil d'Etat. En effet, comme nous l'avons déjà dit, il instaure une annuité pour les employés de l'Etat qui gagnent moins que le salaire médian genevois. Et ici je voudrais dire qu'il ne s'agit pas d'opposer prestations et annuité. Le budget tel qu'il a été déposé par le Conseil d'Etat n'est pas un budget d'austérité. C'est un budget qui prévoit une augmentation de plus de 300 postes au sein de l'Etat. Donc le calcul qui a été fait, c'est que pour pouvoir engager ces 300 personnes - notamment au département de la sécurité - il fallait supprimer l'annuité pour le reste des fonctionnaires. Et c'est cela, pour nous, qui n'était pas acceptable.
D'autre part, cet amendement du Conseil d'Etat nous convient parce qu'il n'est pas négligeable pour les personnes qui perçoivent les salaires les plus bas de la fonction publique. Pour ces dernières, toucher une annuité est important, et c'est notamment le cas pour les jeunes qui viennent de rentrer dans la fonction publique ainsi que pour les petits salaires. Je pense là en particulier aux HUG, où l'on sait qu'il y a beaucoup de nettoyeurs et d'employés qui ne gagnent pas un salaire mirobolant. Pour ces personnes-là, les Verts voteront cet amendement qui est important à leurs yeux, car il répond à un souci exprimé effectivement mardi lors de manifestations de la fonction publique. C'est donc une manière pour nous de répondre à ce souci et d'entrer en discussion avec la fonction publique.
Enfin, je voudrais ajouter un mot au sujet de ce que vient de dire M. Cerutti. Moi je n'ai pas entendu des enseignants dire qu'ils ne voulaient pas intégrer des personnes handicapées en classe: j'ai simplement entendu des enseignants dire que, pour que cet accueil se fasse dans de bonnes conditions, que ces jeunes handicapés puissent être intégrés dans la classe et qu'un travail sérieux puisse être réalisé, ils avaient besoin d'un meilleur encadrement. Un enseignant ne peut pas gérer une classe normale et accueillir en plus un enfant qui a des difficultés dans sa classe. Tout ce qu'il demande, c'est un soutien plus intense de notre part et que nous soyons cohérents: si nous voulons l'école intégrative, comme vous semblez le souhaiter et comme nous le désirons aussi, il faut donner les moyens à l'école de pouvoir le faire dans des conditions qui soient honorables. (Applaudissements.)
M. Olivier Baud (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, M. Dal Busco a fait la démonstration tout à l'heure que cette annuité ne se justifiait pour personne, si j'ai bien entendu, et maintenant tout d'un coup on voudrait la distribuer aux plus défavorisés du service public, soit en gros leur donner l'aumône. Alors, évidemment, il est difficile de refuser cette aumône, mais j'aimerais simplement dire que le Conseil d'Etat se trompe: ça fait longtemps qu'on demande de relever les bas salaires, mais pour l'instant il n'y a rien; longtemps qu'on demande de supprimer les plus basses classes salariales, c'est-à-dire les classes 4, 5 et 6, mais personne ne répond à ce sujet. De plus, toutes les organisations syndicales et professionnelles demandent le retrait du projet SCORE - Système COmpétences Rémunération Evaluation - qui, je le rappelle, vise à augmenter les hauts cadres et surtout pas les basses classes salariales. (Remarque.)
Voilà, Mesdames et Messieurs, la politique du Conseil d'Etat. Pour ce qui est du groupe Ensemble à Gauche, nous pensons qu'il faut une politique égalitaire en matière salariale, qu'il faut réduire l'écart entre le plus haut et le plus bas salaire et que ce n'est pas cette mesure qui va arranger les choses. J'attire aussi votre attention sur le fait que cette mesure qui va sûrement passer est totalement inédite et qu'on ne connaît pas vraiment les conséquences d'une telle mesure pour la suite. Aujourd'hui, on consacre donc une sorte d'inégalité de traitement, une fonction publique à deux vitesses, où les plus petits peuvent avancer. Ce n'est pas une bonne mesure, et il conviendrait plutôt de supprimer le 14e salaire qui est versé automatiquement, sans que là personne ne s'en offusque, aux classes salariales 27 et supérieures, et d'abolir également les primes automatiques pour heures supplémentaires qui sont payées sans même que l'on ne doive justifier ces heures supplémentaires, parce que, Mesdames et Messieurs, il est bien entendu que, lorsqu'on est un haut cadre, on bosse forcément plus que les autres... En conclusion, le Conseil d'Etat se trompe un peu avec cette mesure, mais le groupe Ensemble à Gauche la votera comme pis-aller, parce qu'il n'y a pas de meilleure solution pour l'instant.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à... (Remarque.) Non, Monsieur Baertschi, je ne peux pas vous la donner, car votre groupe a épuisé son temps de parole. Je cède donc le micro à M. Thomas Bläsi.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, les annuités résultent d'un mécanisme salarial et c'est un engagement contractuel qu'a l'Etat. Effectivement, supprimer les annuités touche à la crédibilité de l'Etat, ça je pourrais l'entendre de la part des bancs d'en face. Cependant, quand vous proposez de rétablir les annuités pour les personnes qui gagnent moins de 86 000 F, vous proposez en réalité de les rétablir pour ceux que vous considérez comme les plus défavorisés - je viens de l'entendre en face - les plus paupérisés, or si l'on divise ce salaire de 86 000 F par 12, on arrive à 7200 F environ, ce qui constitue à peu de choses près le salaire médian dans le milieu du privé, où il n'y a aucune sécurité. Vous devriez quand même avoir conscience de cela quand vous votez, parce que cela a véritablement une importance et je pense que la population en a marre de cette situation. Ça signifie aussi qu'en fait vous proposez que nous sauvions les salaires de ceux que vous considérez comme paupérisés et que vous suggérez qu'une majorité qui gagne beaucoup moins se sacrifie finalement pour cette minorité. Alors j'aimerais juste vous dire que c'est exactement le contraire que vous nous dites durant toute l'année ! Toute l'année, vous défendez les minorités, vous défendez ceux qui gagnent le moins, et en l'occurrence là vous êtes en train de faire une guerre de castes et d'avantager ceux qui gagnent beaucoup. Voilà, je souhaiterais que vous gardiez quand même cela à l'esprit en votant. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Michel Amaudruz pour une minute vingt-huit.
M. Michel Amaudruz. C'est une erreur, Monsieur le président !
Le président. Très bien, dans ce cas je cède la parole aux rapporteurs ainsi qu'au conseiller d'Etat, puis nous voterons. Monsieur Deneys, il vous reste trente-quatre secondes.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais rappeler qu'effectivement il y a un malaise avec ce projet de loi, parce que le Conseil d'Etat est prêt à sacrifier l'annuité au dernier moment alors qu'il ne veut pas toucher au 14e salaire des cadres supérieurs, qui coûte 7 millions de francs par année, et que surtout il n'envisage pas de nouvelles recettes fiscales pour son financement, ce qui est bien le problème. Je voudrais en outre rappeler, s'agissant de la baisse d'impôts...
Le président. Il vous faudra conclure.
M. Roger Deneys. ...que les 34 000 contribuables qui gagnent le plus ont eu la même baisse que les 234 000 qui gagnent le moins, avec 180 000 F de différence.
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. C'est donc un problème ! Par ailleurs, M. Dal Busco n'a pas répondu à ma question concernant l'an prochain...
Le président. C'est terminé, Monsieur.
M. Roger Deneys. Que ferez-vous pour l'annuité ?
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de majorité pour deux minutes trente.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Permettez-moi d'abord de corriger certains propos qui ont été tenus lors du débat de ce soir. En commission des finances, il n'a jamais été question pour le PLR d'opposer le secteur privé au secteur public: le PLR a le plus grand respect pour le secteur public et, comme je l'ai dit en introduction de mon intervention, nous regrettons comme vous l'absence de dialogue entre le Conseil d'Etat et la fonction publique, et nous ne pouvons qu'encourager le Conseil d'Etat à aller négocier avec la fonction publique pour trouver des solutions qui soient correctes pour tous, qui tiennent la route et qui nous permettent de faire un autre travail que de débattre aujourd'hui d'une mesure qui, je l'ai dit, représente 0,01% de la masse salariale du petit Etat. Alors une majorité fait le choix du symbole contre celui des priorités, nous en prenons note, mais nous nous étonnons que la gauche - et M. Bläsi l'a très bien dit - considère que quelqu'un qui gagne 70 000 F est dans la précarité... Parce qu'alors une personne à l'aide sociale, elle, où se situe-t-elle ? Dans l'extrême précarité ?!
Aujourd'hui, en refusant l'amendement du Conseil d'Etat, je l'ai dit, nous conservons 7,9 millions; c'est environ 65 postes que l'on peut créer à l'Etat ou encore réintroduire, avec ce montant, le complément d'intégration; bref, c'est énormément de choses que l'on peut faire pour le social. Mais non, une majorité a décidé d'être figée dans ses symboles. Nous en prenons acte, mais en ce qui concerne le PLR, nous voterons le budget tel que sorti de commission; il n'y a pas d'autre solution parce que, pour nous, l'absence d'annuité et un budget équilibré sont la base de toute discussion au niveau budgétaire. (Applaudissements.)
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais formuler quelques remarques au nom du Conseil d'Etat à l'issue de ce débat, et en premier lieu je vais répondre à la question de M. Deneys concernant l'année prochaine: c'est bien de l'an prochain qu'on est en train de discuter maintenant, mais j'imagine que vous pensiez au budget suivant ! Eh bien on verra... Le Conseil d'Etat va attaquer le processus budgétaire au début de l'année prochaine, comme il l'a fait cette année, et on verra bien quelles seront les mesures, puisque nous allons effectivement poursuivre avec un certain nombre de mesures. Vous savez que nous vous en avons proposé 44 cette année mais, en tout cas pour ce budget 2015, toutes n'ont pas été retenues; alors finalement cela dépendra de la part qui sera retenue par ce parlement sur l'ensemble de ces mesures que nous allons continuer à vous proposer. En effet, notre volonté est véritablement de rétablir, d'assainir, de maîtriser et de diminuer notre dette.
J'aimerais maintenant revenir sur un deuxième élément, mentionné également par M. Deneys, à savoir les baisses d'impôts qu'il évoque toujours. Je rappelle simplement qu'en moyenne, au cours de ces dix dernières années, les revenus de l'Etat de Genève et donc des impôts ont augmenté annuellement de plus de 3%. (Commentaires.)
J'en viens à présent au troisième élément sur lequel je voudrais rebondir. Effectivement, le salaire moyen dans la fonction publique genevoise s'élève à 117 000 F: il est donc nettement supérieur au salaire moyen des Genevois, qui se monte pour sa part à 87 000 F. Cela montre bien quand même une certaine différence !
Pourquoi le Conseil d'Etat - à qui on le reproche finalement, en tout cas du côté des tenants du maintien de l'intégralité de l'annuité - a-t-il quand même proposé une annuité partielle ? Eh bien tout simplement parce que le Conseil d'Etat, lors de l'entretien qu'il a eu précisément dans le cadre de l'étude du budget avec les différents partis - vous vous en souvenez, c'était il y a deux semaines - a cru comprendre qu'une majorité de ce parlement était prête à voter un budget - puisque c'est l'objectif du Conseil d'Etat - s'il y avait une annuité avec une géométrie un peu plus variable. C'est pour cette raison et uniquement pour cette raison que le Conseil d'Etat l'a suggéré, parce que, sur le fond, vous le savez, nous proposons la suspension de l'annuité, pour les motifs que je vous ai indiqués tout à l'heure. C'est donc avec le souhait de trouver un compromis et une certaine concorde dans ce parlement que nous sommes venus avec cet amendement, qui vise évidemment les salaires les plus bas de la fonction publique, lesquels - on l'aura compris - ne sont pas aussi bas que cela, en tout cas pour certains d'entre eux, si on les compare aux salaires pratiqués dans notre canton.
J'aimerais conclure en évoquant un dernier élément: effectivement, avec une annuité même partielle comme celle-ci, on met potentiellement dans l'embarras les entités subventionnées, puisqu'elles devront trouver elles-mêmes le financement de cette annuité pour la part non subventionnée. Or dans la mesure où l'on sait que les recettes sont limitées, elles devront bel et bien faire un effort, dont on espère qu'il ne portera pas atteinte à la qualité des prestations.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous indiquer. Je vous invite à voter cet amendement du Conseil d'Etat, et je vous ai expliqué dans quelles circonstances nous avons été amenés à vous le proposer.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais à présent mettre aux voix cet amendement du Conseil d'Etat, que je vous relis:
«Art. 3 Dérogation à la réduction des annuités (nouveau, les art. 3 et 4 anciens devenant les art. 4 et 5)
En dérogation à l'article 2 de la présente loi, les augmentations annuelles sont accordées, pour l'année 2015, aux membres du personnel dont le traitement annuel brut, au sens de l'article 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973 (B 5 15), 13e salaire inclus, déterminé selon l'échelle 2014, sans indemnités, en équivalent temps plein, est inférieur à 86 868 F.»
Mis aux voix, cet amendement (nouvel article 3) est adopté par 53 oui contre 34 non et 9 abstentions.
Mis aux voix, l'article 4 est adopté, de même que l'article 5.
Troisième débat
Le président. Le troisième débat étant demandé, je vous soumets l'entier de ce projet de loi tel qu'amendé.
La loi 11545 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11545 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 44 oui contre 42 non et 11 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il est 21h37 et nous poursuivons nos travaux avec le PL 11536-A... (Le président est interpellé.) Madame Schneider Hausser, vous avez demandé la parole ?
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Oui, merci, Monsieur le président. Nous avons pas mal travaillé aujourd'hui et, comme il est presque 21h45, je propose une motion d'ordre afin que nous commencions le budget demain matin en étant un peu plus frais, de façon que nos travaux avancent mieux. (Commentaires.)
Le président. Chut !
Mme Lydia Schneider Hausser. La motion d'ordre que je propose consiste donc à reporter le premier débat à demain matin ou plutôt à suspendre la séance maintenant. (Brouhaha.)
Le président. Vous souhaitez donc lever la séance, si j'ai bien compris ! Je vais donc faire voter l'assemblée sur cette motion d'ordre, en rappelant qu'il faut la majorité des deux tiers.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée par 56 non contre 34 oui et 5 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous allons donc aborder le PL 11536-A, selon les procédures qui ont été adoptées. Je précise que le rapporteur de troisième minorité, M. Ducommun, est remplacé par M. Vanek. Pour le premier débat, le temps de parole est de cinq minutes par rapporteur et par groupe. Je passe la parole au rapporteur de majorité Edouard Cuendet.
Présidence de M. Antoine Barde, premier vice-président
M. Edouard Cuendet (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le privilège d'être le rapporteur de majorité sur ce budget... (Brouhaha.) Une majorité pas silencieuse, en tout cas ! Tout d'abord, je tiens à adresser mes remerciements appuyés au département des finances, et notamment à M. Pierre Béguet, qui a accompagné la commission durant ses très longs travaux et répondu aux innombrables questions et caprices des commissaires. Je crois donc que l'on peut être très reconnaissant envers M. Béguet et son équipe ! Je voudrais évidemment remercier également le secrétariat général du Grand Conseil, et tout particulièrement M. Laurent Koelliker, pour l'aide apportée à la rédaction de ce tentaculaire rapport de majorité. Pour rappel, ce rapport comporte quelque 640 pages et a dû être rédigé en deux jours top chrono, ce qui doit constituer un record en termes de production littéraire. Je demanderai d'ailleurs à mon collègue Ivan Slatkine de me confirmer cet exploit qui mérite presque de figurer au Guinness Book !
Après ces remarques préliminaires, je vais rentrer dans le vif du sujet, à savoir le budget 2015. On remarquera que jusqu'à présent on a surtout discuté de la rémunération de la fonction publique - et c'est vrai que c'est l'un des sujets qui nous a le plus occupés en commission durant les dizaines d'heures de débats - et qu'au fond on a assez peu parlé des prestations. Et s'agissant de cette rémunération, on ne peut évidemment pas passer sous silence les débrayages qui ont eu lieu ces derniers jours, avec un lancinant refrain de démantèlement de l'Etat et la mise en avant d'une prétendue situation difficile de la fonction publique en termes de rémunération. Mais ce n'est pas parce que l'on répète à l'envi ad nauseam une affirmation fausse que cela a pour effet de la rendre exacte si elle se fonde sur des chiffres à la base erronés !
Ce sera peut-être un peu aride, malheureusement, mais vous ne m'en voudrez pas d'apporter à titre préliminaire quelques chiffres, parce que je pense qu'il faudra qu'on les garde à l'esprit durant tous les débats qui vont nous occuper. Pour que les gens se rendent bien compte, il est question ici d'un budget de fonctionnement qui atteint le montant stratosphérique de 7,8 milliards de francs, pour une communauté d'environ 500 000 âmes. Je pense que par habitant cela doit être un record du monde absolu, et il ne faut donc pas perdre cela de vue. D'autre part, en ce qui concerne le petit Etat, s'agissant des entités non subventionnées - ce qui exclut donc l'hôpital, les EMS, etc. - on parle d'une masse salariale supérieure à 2,3 milliards de francs. En effet, dans le budget présenté par le Conseil d'Etat - et cela nous a frappés - il est question d'une masse salariale certes de 2,3 milliards, mais qui est en augmentation de 4,2% par rapport au budget 2014, comme on peut le voir à la page 464 du projet de budget. Si l'on met cette augmentation de 4,2% de la masse salariale du petit Etat en regard des prévisions les plus optimistes en termes de croissance économique, on s'aperçoit que ces prévisions indiquent 2%, 2,5%, voire plus récemment 2,8%, mais on est loin de ces 4,2% d'augmentation de la masse salariale. Je crois donc que cette augmentation n'est pas réaliste, qu'il n'est pas réaliste d'avoir une augmentation plus élevée que la croissance économique.
Comme cela a été relevé par le chef du département des finances, on a aussi constaté que, en termes salariaux, on ne peut pas parler de précarité pour ce qui est de la situation de la fonction publique, compte tenu du fait que le salaire médian se monte à 112 000 F et le salaire moyen à 117 000 F, alors que dans le privé le salaire médian s'élève à 86 000 F...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Edouard Cuendet. ...et le salaire moyen à 87 000 F. J'imagine que lors de toutes nos discussions on va nous rabâcher sans arrêt que l'on est face à un démantèlement de l'Etat, mais je pense que ces chiffres nous démontrent exactement le contraire. Ainsi, pendant cette soirée et la journée de demain, nous devrons sans cesse revenir sur ces chiffres pour rappeler ces vérités qui ont la dent dure par rapport à une versatilité politique qui est beaucoup moins exacte.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le travail budgétaire est chaque année un exercice difficile: le Conseil d'Etat présente son budget en septembre, à la rentrée, pour que nous le votions en décembre, ce qui représente une période de trois mois durant laquelle nous devons étudier un budget, qui tourne effectivement aux alentours des 8 milliards de francs pour le fonctionnement. Cet exercice est délicat, parce que les députés essaient d'une part de recueillir des informations - qu'ils ont déjà en partie au moment des comptes - d'autre part de vérifier quels sont les projets du Conseil d'Etat, ou encore de contrôler si les montants proposés sont bien réalistes. Au final, ils se retrouvent donc face à un exercice extrêmement délicat: le Conseil d'Etat propose un chiffre, un résultat final, et ils ne peuvent le péjorer. Ainsi, si l'excédent se monte à 4 millions de francs sur 8 milliards, eh bien les députés ne peuvent pas proposer un budget qui au bout du compte n'aurait que 3 millions de francs de résultat. C'est cette logique, qui a été voulue par la majorité de la droite et de l'extrême droite de ce Grand Conseil, qui fait que l'exercice budgétaire est toujours extrêmement pénible, parce que lorsqu'on veut proposer ne serait-ce que 20 000 F de dépenses supplémentaires pour une subvention, par exemple, eh bien on doit trouver 20 000 F d'économies ailleurs. C'est un exercice complètement absurde, en réalité, parce qu'il est bien entendu que si tout était égal - le nombre d'habitants, la situation économique, etc. - on pourrait copier-coller le budget d'une année à l'autre, sans se prendre la tête, et ça marcherait toujours ! Mais le problème c'est que la réalité change, Mesdames et Messieurs les députés.
En l'occurrence, dans ce projet de budget - M. Cuendet l'a évoqué, et pour une fois je serais presque d'accord avec lui... (Remarque.) C'est presque la première fois ! Si vous prenez la page 626 du rapport sur le budget - cela figure dans l'une des annexes à mon rapport de minorité - vous verrez l'évolution des postes du projet de budget 2015 par rapport aux budgets 2013 et 2014, et on s'aperçoit que le Conseil d'Etat propose la création de 305 nouveaux postes. M. Cuendet et la droite viennent alors dire que l'Etat est donc en train de croître de façon démesurée et se demandent ce qui se passe, mais le problème c'est qu'en réalité le PLR ne s'oppose pas à ces postes ! Il les vote ! Il va peut-être même voter des amendements tout à l'heure pour augmenter le nombre de postes créés, parce que ces postes, où sont-ils ouverts ? Eh bien, je vous le donne en mille: il s'agit notamment de 116,3 nouveaux postes - équivalent temps plein - dans le domaine de la sécurité, à savoir au niveau de la police et des gardiens de prison. Ce sont 116 nouveaux postes créés ! Il y en a également 37,1 pour la justice - où de plus ce ne sont pas spécialement des bas salaires - et 85,6 pour la formation, mais ça on le savait en partie. Il y a donc trois politiques publiques dans lesquelles l'Etat décide de créer massivement des nouveaux postes, ce qui est peut-être une bonne chose que l'on peut souhaiter, car une partie de ce Grand Conseil l'a voté, une grande majorité de ce parlement s'est prononcée en faveur du mercredi matin, pour un coût connu de 20 millions de francs par an, mais toutes ces dépenses, certains les remettent en cause en partie au moment du budget, et d'autres pas. Ils viennent dire: «Oui, mais l'Etat est en train de croître de façon démesurée !» Mesdames et Messieurs du PLR et de la droite, venez donc couper les postes créés dans la sécurité et pour les gardiens de prison, si vous n'en donnez pas les moyens ! En effet, le paradoxe de cet exercice budgétaire, c'est que la création de 300 nouveaux postes ne se fait pas avec de nouvelles recettes. Or comment voulez-vous financer 300 nouveaux postes sans nouvelles recettes ? Alors on supprime l'annuité et on diminue les prestations aux plus démunis, typiquement le subside de l'assurance-maladie, qui est versé à des personnes dont le revenu annuel est inférieur à 29 000 F à Genève. Eh bien on va supprimer ces 40 F pour pouvoir financer de nouveaux postes de policiers et de gardiens de prison ! C'est ça la réalité de ce budget, Mesdames et Messieurs les députés, c'est la réalité de ce budget du Conseil d'Etat, et c'est ce qui pose problème. Si les députés ont des velléités de nouvelles dépenses, ils doivent trouver des économies; ici, le Conseil d'Etat nous propose une équation de départ qui n'est pas correcte, qui n'est pas respectueuse des enjeux de Genève, parce qu'on voit très bien où mène l'exercice et, M. Dal Busco l'a évoqué tout à l'heure...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Roger Deneys. ...c'est à des coupes encore plus grandes l'année prochaine que mènent la reprise de ce plan de mesures pour amplifier ces effets envers les classes moyennes et la fonction publique ainsi que l'engagement de nouveaux postes dans la sécurité, notamment de gardiens de prison et de policiers. Donc sans nouveaux moyens, ce budget n'est pas réaliste, il n'est pas réaliste à long terme, et je vous invite par conséquent à refuser l'entrée en matière sur ce projet de budget.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, laissez-moi tout d'abord me joindre aux remerciements exprimés par M. Cuendet à l'égard des collaborateurs du département des finances et du secrétariat général. La qualité du travail de ces personnes est un point sur lequel nous sommes effectivement d'accord !
Lors du dépôt du projet de budget par le Conseil d'Etat, les Verts avaient déjà exprimé un grand mécontentement par rapport à ce projet. En effet, ce budget, qui nous était annoncé comme un budget d'austérité, faisait et fait peser le poids des économies sur la classe moyenne - en particulier les familles - et sur les personnes les plus démunies de Genève, à savoir celles qui sont au bénéfice de l'aide sociale. Les Verts dénoncent donc le fait que ce budget, qui n'est pas un budget d'austérité, prévoie des coupes aussi dures pour ces classes-là de la population. Car, je le répète, ce n'est pas un budget d'austérité, puisqu'il comprend une augmentation de plus de 300 postes au sein des employés de l'Etat, comme vient de l'indiquer M. Deneys.
Les Verts ont donc dénoncé un projet inéquitable: la rigueur pour les uns et l'opulence pour les autres, en particulier pour les politiques liées à la sécurité et au domaine pénitentiaire. Nous déplorons vivement les mesures antisociales qui ont été décidées, à savoir les baisses des subsides de l'assurance-maladie, la division par deux du supplément d'intégration de l'aide sociale et l'augmentation des taux d'effort pour le logement subventionné. Les Verts déplorent également la coupe linéaire de 1% qui affecte les entités subventionnées et font remarquer ici que ce point est totalement lié au débat que nous venons d'avoir sur l'annuité. En effet, vous dites que voter une annuité, c'est faire peser de manière démesurée l'effort sur les entités subventionnées, or on réduit chaque année leur subventionnement ! Nous avions convenu d'une méthode dans ce parlement, à savoir des contrats de prestations sur quatre ans, mais nous ne tenons pas nos promesses: nous votons un contrat de prestations sur quatre ans et chaque année nous réduisons de 1% les subventions allouées aux entités subventionnées. Cela ne peut pas durer ! C'est non seulement regrettable pour ces entités, mais cela représente aussi une absence de choix politique, un manque de courage dans les décisions qu'il faut prendre au sein de ce parlement.
Les Verts ont également souligné au moment du dépôt du projet de budget le déséquilibre entre les coupes et la recherche de nouveaux revenus. Cet écart est d'autant plus frappant que les mesures qui nous sont proposées sur les revenus sont très souvent des artifices comptables et quelques réévaluations des émoluments. Comme nous étions déjà insatisfaits du projet de budget déposé par le Conseil d'Etat, nos griefs n'ont pu qu'augmenter suite aux travaux de la commission des finances, qui a manié avec beaucoup d'ardeur le ciseau. Aujourd'hui, les Verts s'opposent donc au projet de budget tel que sorti de commission. Tout d'abord, nous déplorons l'absence d'engagement écrit de la part du Conseil d'Etat à revenir sur un certain nombre de niches fiscales uniques en Suisse, et parfois même contraires au droit fédéral. De plus, nous ne pouvons accepter la coupe transversale qui a été votée en commission des finances. En effet, cette coupe transversale de 16 millions sur les charges de personnel pèse très durement sur le domaine de la formation au DIP, ainsi que sur les plus petits départements qui eux ont peu de postes à disposition.
Les coupes relatives à la politique du logement opérées par la commission des finances sont pour nous complètement incompréhensibles et également inacceptables. En effet, je crois que chaque parti dans ce parlement reconnaît qu'il y a une crise du logement à Genève et qu'il faut faire en sorte de pouvoir construire davantage, et voilà qu'une politique qui a déjà réalisé des efforts en matière d'économies subit encore en commission des finances une coupe de plus de 2 millions dans ses moyens lui permettant de mener à bien des projets importants pour l'avenir de Genève et de construire enfin. Si l'on veut que le canton puisse mener une politique foncière réelle et efficace, il ne faut pas commencer par couper dans ces moyens-là, c'est totalement inacceptable ! Les Verts déposeront donc un certain nombre d'amendements, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, lors du deuxième débat...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Sophie Forster Carbonnier. C'est parfait ! Je termine ! ...et nous vous invitons à les suivre pour que ce budget devienne un tout petit peu plus social et plus responsable. (Quelques applaudissements.)
Présidence de M. Antoine Droin, président
M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur de troisième minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés... (L'orateur s'interrompt.) Est-ce que ce micro fonctionne ? (Remarque.) Il faut que j'utilise celui-ci ? Très bien. Excusez-moi, je me sers d'un micro qui n'est pas le mien: il s'agit du micro qui est situé en face, mais les propos que je vais tenir seront bien les miens.
Le groupe Ensemble à Gauche a une position très claire dans cette affaire: dès le début nous avons dit que ce budget était un budget antisocial, un budget qui s'en prenait aux prestations sociales, qui s'en prenait au service public et aux travailleurs du service public, et notre posture n'a pas varié. On a entendu tout à l'heure un pitoyable show visant à justifier le non-respect par le premier employeur du canton - le canton lui-même - de ses engagements salariaux. J'ai parlé récemment avec un excellent ami à moi qui a la faiblesse d'être libéral et, puisque l'un de mes préopinants a cité sa voisine, je vais vous relater ce que cet ami m'a dit: «Mais jamais aucun employeur dans le secteur privé ne se permettrait de traiter ses employés de cette manière et de rayer d'un trait de plume les aspects contractuels auxquels il est engagé pour faire des économies !», comme on vient de le faire dans cette salle à raison d'une trentaine de millions sur les salariés de la fonction publique. Evidemment, ces coupes ne portent pas seulement sur les salaires et les postes de la fonction publique, mais également sur les prestations à la population, on l'a vu tout à l'heure, et je ne répéterai pas tous les éléments que ma collègue Jocelyne Haller a mentionnés bien mieux que moi s'agissant du refus de ces coupes dans certaines prestations sociales.
D'autre part, on nous fait des grands discours sur le secteur privé, on nous parlait tout à l'heure de salaire médian, etc., mais, bon Dieu, Mesdames et Messieurs, vous ne regardez pas ce qui se passe dans le secteur privé ! J'ai par exemple ici un document, qui se trouve être le bilan publié en septembre concernant les 300 plus riches personnes de Suisse. M. Cuendet, qui est en face de moi et qui s'y connaît en matière de personnes fortunées pour les fréquenter et pour être directeur de Genève Place Financière, n'est-ce pas, me disait qu'il s'agissait d'une saine et excellente lecture. Oui, mais ces lectures, que nous disent-elles ? Elles nous indiquent qu'à Genève il y a environ un millier de personnes - 982 - qui possèdent une fortune dépassant les 10 millions de francs. A combien, Monsieur Cuendet, ascende globalement la fortune de ce millier de multimillionnaires ? Je n'ai pas calculé le chiffre, je ne l'ai pas, car il est effectivement secret et clandestin, mais il est question de montants qui n'ont absolument rien à voir avec ceux dont on discute, avec les 30 millions qu'on vole ici aux travailleurs du secteur public, lesquels correspondent probablement à la fortune d'une ou deux de ces personnes. Il y a donc un flot d'argent à Genève, et on n'entend pas l'affecter ! On n'entend pas l'affecter à du travail utile, dans l'enseignement, dans la santé et dans l'ensemble des domaines dont s'occupe le secteur public, mais on entend raboter, mégoter et faire des économies. Alors évidemment ça suscite des mobilisations et des protestations, qui s'expriment massivement, notamment dans la rue. J'ai participé avant-hier à la manifestation non pas seulement des fonctionnaires mais également d'usagers, de citoyens solidaires avec la fonction publique et qui défendent leurs prestations sociales. Cette manifestation fait l'objet d'un tract de soutien qui est ici et dont je vous donnerai quelques extraits: ce sera plus intéressant pour vous que de m'entendre, puisque vous savez à peu près ce que je risque de dire ! Et ce tract est signé bien entendu par le PS, les Verts et Ensemble à Gauche, mais aussi par des associations d'usagers, l'AVIVO, des associations de retraités, des syndicats, la CGAS - soit la Communauté genevoise d'action syndicale, qui regroupe l'ensemble des syndicats, y compris du secteur privé - ainsi que par le SSP, le SIT, Unia, le SEV et toute une série d'associations et de bénéficiaires de prestations qui se sont mobilisés pour les défendre. Et ces gens-là disent qu'ils refusent ce qui constitue à leurs yeux - je suis désolé de contredire ma préopinante Verte - un budget d'austérité. Alors certes, si on le mesure...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. ...à l'échelle de l'austérité qu'on nous promet, si on laisse faire le Conseil d'Etat avec sa baisse de l'imposition des entreprises qui va creuser un trou de 400 à 600 millions dans les caisses publiques, eh bien en effet ce sera pire, mais ce n'est pas une raison pour accepter cette austérité qu'on commence à nous imposer aujourd'hui.
Il faut donc évidemment s'opposer à ce budget, comme l'ont fait dans la rue des milliers de personnes et comme le feront dans la rue des dizaines de milliers de personnes probablement dans les semaines et les mois qui viennent, parce que ce bras de fer n'est effectivement pas fini. Certains d'entre vous croient qu'il se terminera dans cette salle ce soir, demain ou après-demain, mais non, Mesdames et Messieurs, ce bras de fer social ne s'achèvera pas dans cette salle ce soir, demain ou après-demain: il se finira aussi par la mobilisation des citoyens, du personnel de la fonction publique, bien sûr, mais surtout et avant tout des usagers et des bénéficiaires de prestations sociales. Cette bataille-là, Mesdames et Messieurs, si nous ne la gagnons pas aujourd'hui, nous la gagnerons demain, parce que c'est une bataille au service de la majorité de la population, au service de ses intérêts, et c'est une bataille que nous menons de manière conséquente, contrairement à certaines autres forces comme le MCG. D'ailleurs, Mesdames et Messieurs, vous m'avez fait rire ! En effet, votre chef... Où est-il ? Il n'est pas là, dommage... (Commentaires.)
Une voix. Il est déjà parti en vacances !
M. Pierre Vanek. Ah, il est parti en vacances ! (Commentaires.) Alors pourquoi m'a-t-il fait rire ? Eh bien, en commission des finances où j'ai eu le plaisir d'assister à la dernière séance, ce garçon est venu et m'a littéralement fait rire de bon coeur et de bonne foi en expliquant qu'il allait s'opposer à ce budget détestable et rédiger un rapport de minorité pour exprimer son opposition, malgré le fait que son parti allait le voter. Puis il a changé d'avis, certains sont venus le calmer, etc., et on les a vus déposer des amendements et dire qu'ils défendraient les mécanismes salariaux de la fonction publique. Or tout à l'heure, cette brochette d'amendements du MCG - combien y en avait-il, Mesdames et Messieurs ? Un, deux, trois, quatre, cinq... (Remarque.) - est descendue à zéro ! Tout ça n'est donc pas très sérieux, Mesdames et Messieurs... Soyons-le un peu plus ! En tout cas, de notre côté, nous avons le mérite de la cohérence, de la continuité, mais aussi de faire par rapport à ce budget des propositions très constructives, très pratiques et très concrètes de recettes et de nouvelles recettes, un point sur lequel ma collègue Magali Orsini interviendra tout à l'heure. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est précisément à Mme Magali Orsini. Il vous reste deux minutes cinquante-deux, parce que votre préopinant a déjà bien entamé le temps de votre groupe.
Mme Magali Orsini (EAG). Oui, ça ne m'étonne pas de lui ! J'en suis tout à fait consciente ! (Rires.) Je vais donc tâcher de parler très vite pour quand même arriver à glisser deux ou trois mots.
Ensemble à Gauche a constaté d'emblée le caractère antisocial du budget 2015 présenté par le Conseil d'Etat et a trouvé inacceptables les propositions de mesures d'économies touchant l'aide sociale, telles que la diminution de 150 F, etc. Le Conseil d'Etat et quelques partis ont certes déposé plusieurs amendements, concernant notamment l'octroi d'une annuité partielle et l'amoindrissement de coupes dans le secteur social, mais cela n'a évidemment pas permis à notre groupe de voter en commission ce projet de loi, même amendé, tant reste criant le fait que tous les sacrifices sont demandés à la même catégorie de la population, c'est-à-dire les plus démunis. (Commentaires de M. Pierre Vanek.) Je suis vraiment désolée pour M. Vanek qu'on l'ait privé de parole au point qu'il se croie obligé de continuer à parler en même temps que moi... (Rires. Applaudissements.) Ça c'est pour faire plaisir à M. Cuendet, cette fois !
Le groupe Ensemble à Gauche répétera inlassablement que la situation actuelle des finances cantonales est due pour l'essentiel à des baisses d'impôts successives en faveur des plus fortunés du canton, qui peuvent être chiffrées à 8 milliards cumulés au cours des dix dernières années. Nous ne pouvons voter un budget qui ne propose aucun élément d'augmentation des ressources fiscales en lien avec les dépenses. Une fois de plus, une politique des caisses vides est manifeste de la part de la droite afin de réduire les prestations publiques. En effet, la droite a systématiquement refusé des sources de recettes faciles et immédiates, telles qu'une réévaluation des villas et appartements en PPE, laquelle aurait procuré plusieurs dizaines de millions et corrigé des inégalités flagrantes de traitement.
Et quant au fait que M. Slatkine nous a reproché de ne pas nous être jetés sur le contreprojet du Conseil d'Etat en matière de forfaits fiscaux, je voudrais lui rappeler que de toute façon il y avait des dispositions fédérales qui supposent désormais que le loyer soit multiplié par sept. Il est donc totalement inutile d'agir au niveau cantonal, puisque nous serons de toute manière obligés de le faire au niveau fédéral, en raison du droit supérieur.
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.
Mme Magali Orsini. Je n'en doute pas un seul instant ! Je voulais parler longuement du projet de loi fiscale 11557 déposé par Ensemble à Gauche, qui revient dans un premier temps sur la baisse d'impôts de 12% survenue en 1999, mais j'expliquerai à une autre occasion d'où sortent les 8 milliards cumulés de baisse, c'est-à-dire 400 millions par an entre 2000 et...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
Mme Magali Orsini. Exactement ! C'est donc pour ces raisons que le groupe Ensemble à Gauche ne votera pas le projet de budget qui lui est proposé aujourd'hui. (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Pour l'UDC, la discussion sur le budget en commission montre les limites de notre système: trop de temps passé à discuter, à modifier et à amender. Il faudrait que les partis - si une majorité peut se dégager sur l'essentiel, ce qui paraît pensable - donnent un message plus clair au Conseil d'Etat sur les objectifs à atteindre afin que ce dernier nous concocte son menu. Et c'est avec un certain sourire que l'UDC, qui réclame en vain depuis des années des coupes linéaires dans le fonctionnement des départements, constate que le Conseil d'Etat, qui a toujours dénoncé ces coupes comme étant une fausse bonne idée, les trouve tout à coup intelligentes, puisque c'est lui qui les propose... Enfin, le résultat positif de 24 millions n'est peut-être pas brillant, mais c'est un petit pas encore modestissime dans la bonne direction.
Comme nous sommes inquiets pour notre république, car les nuages des difficultés financières commencent à obscurcir le ciel, nous n'avons pas refusé en commission des finances un budget largement amendé et tenant compte enfin des coupes que nous avions demandées. L'UDC n'a cessé de répéter qu'elle désirait un Etat fort mais qui s'occupe de ses tâches régaliennes avec le but qui lui est assigné: être au service de la population pour favoriser le développement de notre société dans le respect des lois et des règlements applicables à tous. Or force est de constater que les gouvernements, par confort et par paresse, ont transformé cet Etat en une machine monstrueusement compliquée, dévorant l'énergie de ses collaborateurs dans une multitude de tâches qui devraient leur être épargnées. Nous avons fabriqué un Frankenstein qui échappe à son maître...
J'ai entendu, stupéfait, sur les bancs de la gauche que la population doit s'adapter aux demandes de l'Etat. Eh bien l'UDC réplique que l'Etat doit se plier à la réalité du terrain et répondre aux besoins des citoyens. Voilà le vrai sens du service public.
D'autre part, la Cour des comptes met hélas souvent le doigt là où ça fait mal, en dénonçant des dérives et des dépenses qui coûtent inutilement des fortunes aux contribuables. Il n'y a qu'à voir le dernier rapport de la Cour des comptes sur l'organisation du cycle d'orientation, c'est un véritable scandale !
De plus, l'UDC avait averti il y a des années que les caisses de pension étaient largement sous-capitalisées, mais on ne nous a pas écoutés. Dix ans plus tard, on voit le résultat. De la même manière et depuis des années, nous disons que nous allons droit dans le mur si nous ne sommes pas capables de réduire la voilure de l'Etat. Ce à quoi on nous rétorque: «Oui, mais la population a augmenté !» Or elle a augmenté de 13% en treize ans, alors que le budget de l'Etat s'est gonflé de 37% dans le même laps de temps. L'argent manque encore, et la dette explose. Où est la cohérence ? Quelle autre communauté dans le monde avec 470 000 citoyens a un tel budget ? Sommes-nous mieux servis qu'il y a treize ans ? Nous sommes à la croisée des chemins, et c'est le dernier moment pour choisir la bonne voie. Le Conseil d'Etat cherche sincèrement à sortir nos finances de l'ornière, nous voulons bien le reconnaître, et ce n'est pas parce que nous ne sommes pas représentés à l'exécutif que nous allons bêtement et systématiquement le critiquer. Genève a ses problèmes budgétaires et nous sommes tous dans le même bateau. Mais il faut impérativement que le Conseil d'Etat se rende compte que sa volonté de retrouver des équilibres ne pourra se réaliser sans une réforme en profondeur, où chaque service devra analyser la pertinence de ses actions et leur véritable utilité pour la population. Des choix douloureux devront être faits, des tâches abandonnées et confiées à d'autres entités. Sinon, c'est toute la fonction publique qui va se retrouver dans la plus grande difficulté, au détriment et des fonctionnaires et de la population. La dure réalité nous le dit clairement, nous n'avons plus d'autre choix.
En conclusion, l'UDC va entrer en matière sur ce projet de loi, mais son vote final dépendra des chiffres définitifs, lesquels doivent rester clairement dans le noir. L'UDC est disposée à faire preuve d'un peu de souplesse pour sauvegarder l'image du canton et, même si les comptes ne couvrent pas les investissements et augmentent encore la dette plus qu'abyssale du canton, nous sommes prêts à discuter. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG l'a dit dès le début, nous voulons réduire la voilure de l'Etat. Avec près de 8 milliards de budget et environ 2,2 milliards de masse salariale pour le petit Etat, pour un canton-ville de 500 000 habitants, nous n'avons pas d'équivalent à travers la planète. Si l'on y ajoute les communes et les établissements publics, nous arrivons quasiment à 5,5 milliards de masse salariale, toujours pour un canton-ville d'un demi-million d'habitants. Je vous le dis, Mesdames et Messieurs les députés, lorsque je donne ces chiffres à l'étranger, on ne me croit pas ! Nous avons, pour une ville d'un demi-million d'habitants, je le répète, plus d'argent que beaucoup de pays entiers dans leur budget de fonctionnement. (Remarque.) Certes, la Suisse a toujours eu cette gestion rigoureuse qui a fait notre fierté et qui aujourd'hui procure à Genève notamment un rayonnement international, lequel attire beaucoup d'entreprises. Mais, comme nous l'avons dit au Conseil d'Etat, puisqu'une révision est en cours au niveau de la Confédération, si la fiscalité des personnes morales, c'est-à-dire des entreprises, est harmonisée avec un taux d'imposition à 13%, cela va se traduire, à l'horizon 2017 - au maximum 2018 - par une baisse d'un demi-milliard pour le canton de Genève. (Remarque.)
Cela étant, que nous dit la gauche ? «C'est scandaleux de baisser les impôts ainsi !» Mais, sur un point, ils ne voient pas qu'ils sont en train d'abattre l'arbre sur lequel ils sont perchés. En effet, si les impôts pour les entreprises sont harmonisés à 20 ou 25% - ou 24%, comme c'est le cas aujourd'hui pour une partie d'entre elles - eh bien le jour où s'en iront les multinationales situées à Genève, lesquelles fournissent, en plus des emplois directs dans lesdites multinationales, 27 000 emplois indirects, notamment aux artisans et aux petites entreprises, que dira la gauche ? «Il faut encore augmenter les impôts ! Regardez, les multinationales sont parties, les méchantes, parce qu'elles devaient payer des impôts !» Et qui va trinquer, Mesdames et Messieurs ? Eh bien c'est la classe moyenne ! Or cette classe moyenne n'en peut plus aujourd'hui, et elle regarde avec anxiété ce qui se passe en France. Allez discuter avec des gens de la classe moyenne - s'il reste encore des personnes de cette espèce rare en France - et vous nous direz si le modèle socialiste est encore d'actualité ou si c'est un modèle du passé qui est définitivement révolu !
Alors oui, le MCG veut que le budget du Conseil d'Etat finisse avec un excédent, mais pas un excédent à la retirette qui se monterait à 200 000 F ou 800 000 F: avec un excédent de plusieurs dizaines de millions ! En effet, on le dit, gouverner c'est prévoir, alors prévoyez, Messieurs et Madame du Conseil d'Etat ! Et prévoyez à l'horizon 2017-2018, où vous devrez trouver ce demi-milliard. Le paradoxe que nous vend la gauche c'est que, s'il y avait une disposition cantonale pour harmoniser la fiscalité à 13% et que l'on se retrouvait avec 500 millions en moins pour Genève, ce seraient les impôts sur les personnes physiques qui viendraient compenser la baisse des impôts sur les personnes morales. Mais quel paradoxe ! Et là ce serait le triomphe d'une gauche qui dirait: «Vous voyez, les modèles économiques ultralibéraux ne fonctionnent pas !» Mais quand vous n'encaissez plus d'argent, vous n'avez plus rien à dépenser ! S'il n'y avait pas des entreprises florissantes, des personnes devenues riches ou des nantis venus à Genève, vous n'auriez pas un franc à redistribuer aux pauvres ! A part vos boniments, mais ils ne nourrissent pas les êtres humains...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs: aujourd'hui il nous faut faire des économies, nous devons prévoir ces économies, et j'invite les partis gouvernementaux responsables, comme le fait le MCG, à voter un budget juste. Nous, MCG, nous avons donné notre parole au Conseil d'Etat que, si les coupes opérées venaient à bloquer un service, nous octroierions des crédits extraordinaires en cours d'année par le biais de la commission des finances.
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président ! Et là le signal donné au Conseil d'Etat sera clair et sans appel: gouverner c'est prévoir, alors prévoyons ensemble ! (Quelques applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Je ne vais pas revenir sur tout ce qui a été dit. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, pour le parti démocrate-chrétien ce premier budget de la législature doit être une pierre angulaire pour la suite. Ça signifie qu'il est clair que nous voulons une réforme de l'Etat, une réforme des communes et une réforme de la fiscalité. On ne pourra pas faire moins, sinon on va droit à la catastrophe, et j'appelle tous les partis à suivre et à voter un budget. En effet, on est tous dans le même bateau et il ne s'agit pas de questions idéologiques. On doit être dans le même bateau pour soutenir la croissance économique de Genève et les emplois, qu'ils soient dans la fonction publique ou dans le privé. Il n'y a qu'une chose à faire, c'est suivre ce que dit M. Dal Busco depuis longtemps. En effet, s'il y a un ministre des finances qui se bat au niveau suisse pour essayer de faire comprendre aux autres cantons qu'on paie trop au titre de la RPT et que, au niveau de la réforme de la fiscalité des entreprises, il faut aussi aider le canton de Genève, c'est bien lui ! C'est un ministre qui se rend deux, trois, quatre fois par semaine à Berne et dans le reste de la Suisse allemande pour expliquer le particularisme de Genève, et il faut lui tirer notre chapeau. C'est quelqu'un qui est en train de préparer l'avenir et il vous demande de voter un budget. Ce dernier doit effectivement être positif, et là je rejoins tous les autres partis de droite: on ne peut pas accepter un budget négatif ! On doit avoir un budget positif, mais il n'empêche qu'on a la possibilité d'élaborer ce budget. Il faut donc arrêter de pleurer et de dire qu'on est dans une situation catastrophique ! On a une chance immense de vivre dans ce canton, de vivre en Suisse, on a une chance immense de toucher des salaires qui sont plus qu'intéressants, et pourtant les gens n'arrêtent pas de pleurnicher et de dire qu'il faut défendre ceci ou qu'ils ne sont pas d'accord avec cela. C'est comme pour le logement ! «Pas chez moi, un peu plus loin ! Non, je ne veux pas cela, etc.» Mais est-ce qu'on se responsabilise, Mesdames et Messieurs ? Est-ce qu'on veut aller plus loin ? Est-ce qu'on veut penser à l'avenir de nos gamins ? A force de vouloir toujours tout, le beurre et l'argent du beurre ainsi que tous les avantages possibles et imaginables, eh bien dans cinq ou dix ans on ne sera pas là à discuter de millions - du moins moi je ne serai plus là - mais à parler des 500, 600, 1000 ou 2000 postes qu'on supprimera à l'Etat, à la hache et sans discussion.
Quand on voit comme l'argent est dépensé au niveau de l'Etat mais aussi au niveau des communes - je m'excuse - on se dit que, nom de bleu, on n'a pas de soucis à Genève ! On n'a pas de soucis ! Alors moi je rejoins ce qu'ont dit MM. Leyvraz et Stauffer: maintenant on change ! Tout le monde critique le Conseil d'Etat en disant qu'il n'est pas courageux et qu'il ne sait pas faire les choses, mais on a la chance d'avoir un Conseil d'Etat qui nous propose un budget qui est sincère ! Les sept conseillers d'Etat ont décidé de faire un effort chacun dans leur département. Alors on tombe sur M. Poggia parce qu'il va supprimer des prestations sociales, on attaque X ou Y parce que ça ne va pas, mais là vous avez un Conseil d'Etat qui vous propose une clé, une solution ! Or vous ne débattez pas de cette solution et vous refusez de discuter, parce que certains partis restent dans leur dogme, lequel prescrit qu'il faut faire cela et qu'on ne peut pas agir autrement. Alors sortez de vos dogmes ! Pensez à la suite, pensez à l'avenir du canton ! En effet, on a renfloué les caisses de pension, mais on va continuer à le faire, ne vous inquiétez pas ! Si une fois ce n'est pas assez, vous mettrez probablement une deuxième fois la main à la poche pour les caisses de pension ! Et il y a également la fiscalité des entreprises. On n'a pas le choix ! Donc maintenant il faut réfléchir à la façon d'agir, et ce faisant on doit prendre des décisions et procéder à une réforme de l'Etat. Voilà le premier budget de réforme de l'Etat; il sera suivi par quatre autres budgets, et dans cinq ans on pourra faire le bilan. (Applaudissements.)
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Lisa Mazzone. (Exclamations. Rires.)
Mme Lisa Mazzone (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'avoue que j'ai manqué m'étrangler en entendant que le MCG se qualifiait lui-même de parti gouvernemental responsable. On aura tout vu ce soir mais, en même temps, j'en ai entendu d'autres ! (Commentaires.)
Commençons par tordre le cou à une idée reçue: le budget de l'Etat de Genève n'est pas un budget d'austérité. C'est un budget qui prévoit plus de 100 millions de francs supplémentaires en charges de fonctionnement, ainsi que la création de 350 nouveaux postes. On ne peut donc pas parler de budget d'austérité. Alors, Monsieur le ministre des finances, arrêtez de pleurer dans les chaumières ou derrière les vitres du Titanic - je me permets de vous emprunter une métaphore que vous affectionnez - mais assumez vos choix politiques, choix qui sont faits au détriment des prestations et de la population, notamment la plus précaire. Pourquoi parle-t-on de population précaire ? Car aujourd'hui on essaie de retirer de la bouche une modeste cuillère de la soupe des bénéficiaires de l'aide sociale. Or couper chez les plus pauvres, c'est simplement mesquin et bas. Et pourquoi aller couper chez les plus pauvres ? Pour gonfler la politique de sécurité. Pourtant, faut-il le rappeler, le sentiment de sécurité ne s'est pas amoindri ces dernières années, alors que le nombre de délits justement diminuait. C'est bien la preuve que le sentiment de sécurité ne repose pas que sur l'engagement que l'on peut mettre dans une politique de sécurité, mais aussi largement sur le filet social dont bénéficie la population, ou sur d'autres mesures telles que l'aménagement.
Venons-en au budget tel que sorti de commission, une commission qui a su employer le karcher et tirer dans tous les sens, à l'aveugle, sans aucune vision. Le budget de la détention a effectivement été augmenté de plus de 10 millions, alors qu'on accuse pour l'année 2014 un non-dépensé de près de 10 millions également, ce qui revient donc à une somme de 20 millions supplémentaires. Or au lieu de s'attaquer à ce domaine, que fait-on ? On s'attaque à des politiques publiques qui sont emblématiques pour la mise en oeuvre d'un projet écologique. Et pourquoi un projet écologique ? Parce qu'on voit dans le budget tel que sorti de commission que l'on diminue les montants dans les politiques publiques de l'énergie, de la mobilité et de l'environnement. L'Entente, lors de chaque élection, nous sert le refrain du développement durable, mais elle oublie constamment de descendre de son arbre, de cesser de pousser la chansonnette et de passer des paroles aux actes, si elle veut sa part du fromage. Concrètement, aujourd'hui dans le budget on coupe des subventionnements aux énergies renouvelables, aux études consacrées au développement des axes de mobilité douce - qui visent donc à mettre en oeuvre la volonté populaire et à permettre justement le libre choix du mode de transport dont on a parlé tout à l'heure - et on coupe également des fonds dans les politiques de l'environnement.
Relevons en outre le revirement sans précédent en matière de transports publics: alors que les douze dernières années ont vu le réseau se développer, avec une augmentation de pas moins de 100% qui a permis de réduire le trafic motorisé et ses nuisances - 20% de moins, par exemple, sur une route emblématique comme celle du pont du Mont-Blanc - on voit aujourd'hui que ce budget baisse dans le projet tel que sorti de commission.
J'aimerais enfin souligner un élément important. C'est un budget qui se fait sur le dos de la population, mais pas seulement: sur le dos de la planète également ! Et la planète c'est qui ? Ce sont nos enfants - enfin pas les miens, car je n'en ai pas... (Exclamations.) ...mais les vôtres ! Nos enfants et nos petits-enfants. C'est un budget au détriment de la qualité de vie, un budget qui creuse les inégalités et qui s'assied sur la cohésion sociale. Mais soyez rassurés, il y aura des caméras dans les rues, nous n'avons rien à craindre... Mesdames et Messieurs les députés, soyez donc raisonnables. Vous savez bien où se trouvent les niches fiscales, de même que vous connaissez les amendements que nous vous proposons. Nous vous invitons en conséquence à voter en faveur de la population dans son entier, en faveur de la cohésion sociale, en faveur d'une politique environnementale et pour le vivre-ensemble, en acceptant les amendements déposés par le groupe des Verts. (Commentaires. Applaudissements.)
M. Cyril Aellen (PLR). Déjà le 18 septembre 2014 le Conseil d'Etat annonçait un changement de cap majeur: des comptes à l'équilibre, une absorption du déficit structurel et un plan de mesures améliorant le résultat de 154 millions. Une certaine gauche dénonçait un budget de rigueur fondamentalement antisocial. Une certaine droite, dont le PLR, s'inquiétait de l'augmentation continuelle de la dette. On pouvait alors imaginer un soulèvement à l'encontre des prétendues coupes sociales, mais la réalité a été différente: les gauches de ce parlement ont fait un casus belli de l'annuité et de supposés licenciements. Et vous connaissez la règle valable pour ce parlement: le projet de budget du Conseil d'Etat ne peut pas être péjoré par le Grand Conseil. Alors une grande annuité signifiait obligatoirement de grandes coupes, une moyenne annuité signifiait au moins de moyennes coupes et une petite annuité signifiait au moins de petites coupes.
Mais s'agissant du projet de budget initial, il convient en premier lieu de souligner que les charges augmentent de plus de 100 millions - 109 millions dans le premier projet - soit 1,4%. C'est plus que l'inflation, qui est nulle, et plus que l'augmentation moyenne de la population résidente qui se situe à moins de 1%. Comme l'ont souligné les représentants des Verts, déjà à ce stade il ne s'agit en aucun cas d'un budget d'austérité ni d'un budget de rigueur. C'est un budget qui fait un certain nombre de choix, qu'il faut assumer.
Pour parvenir à l'équilibre - et c'est peut-être ça le plus important - le Conseil d'Etat compte sur des revenus fiscaux beaucoup plus conséquents, soit une augmentation de 2,3%. Et ceux qui disent que les impôts et les rentrées fiscales baissent devraient lire le budget ! C'est 69 millions supplémentaires pour les impôts sur les personnes physiques - un petit peu corrigés durant ces derniers mois, ce qui devrait nous inciter à être encore plus prudents - et 87 millions supplémentaires, soit 6,5%, pour les impôts sur les personnes morales. Mais attention, Mesdames et Messieurs: pour ces augmentations fiscales le Conseil d'Etat se fonde sur des pronostics qui ne sont pas les siens - il faut le reconnaître - mais ceux d'un groupe d'experts, qui tablent sur une croissance unique en Europe de 2,5%. Alors si ce budget-là est un budget d'austérité, Mesdames et Messieurs de la gauche - à l'exception des Verts, je le reconnais - que se passera-t-il quand la croissance deviendra plus européenne ? Que se passera-t-il ? (Commentaires.)
Le président. Chut !
M. Cyril Aellen. Le Conseil d'Etat fait grand cas de son plan de mesures qui, selon ses dires, améliorait grandement le budget et surtout permettait 154 millions d'économies. Ce n'est pas tout à fait vrai. En réalité, il s'agit pour moitié de rentrées fiscales supplémentaires via les taxes ou autres et pour moitié de choix budgétaires de réductions. Mais il y a aussi eu des priorités et des dépenses supplémentaires, qui se montent à près de 100 millions.
Mesdames et Messieurs, le principal élément qu'il faut retenir, c'est que le budget tel qu'il a été présenté et même tel qu'il ressort de la commission des finances accroît la dette de plus de 150 millions. C'est un budget qui, avec nos investissements, fait payer aux générations futures notre train de vie actuel. Il faudra faire attention, parce qu'en plus c'est un budget de beau temps ! Mais malgré cela, on a voulu augmenter les salaires de personnes qui gagnaient déjà confortablement leur vie comparativement au reste de la population, et ceux qui ont souhaité cela, plutôt que d'accepter un budget raisonnable ou en tout cas équilibré - mais sans doute pas assez sévère, aux yeux du PLR - ont ouvert les feux d'un budget qui sera probablement moins souhaitable et moins acceptable pour ceux mêmes qui l'ont remis en cause. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune notre ancien collègue M. Roger Golay. (Applaudissements.) La parole est à Mme Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, même si cela a déjà été fait, je tenais à remercier l'administration, en particulier le département des finances, qui a non seulement concocté ce budget mais qui a également suivi les débats en commission et apporté beaucoup d'éléments afin d'améliorer les travaux, ce qui les a fait avancer. J'aimerais aussi adresser mes remerciements aux personnes qui travaillent à Genève, cette Genève que M. Stauffer qualifiait d'incroyable s'agissant de son volume de fonctionnaires. Mais cette Genève est aussi incroyable et unique en termes de melting-pot de la population, en termes d'institutions internationales et en termes de rayonnement, non seulement en Europe mais dans le monde. Et tout cela a aussi un coût ! Un coût lié à la cohésion sociale et aux institutions qui doivent fonctionner et être présentes, au niveau international mais aussi local, afin de répercuter les besoins, d'aller de l'avant et d'être en évolution constante.
Un budget d'Etat n'est jamais facile à élaborer et même à accepter à Genève, et cette année encore moins en raison de la composition, dirons-nous, de ce Grand Conseil. On n'a pas encore véritablement entamé le budget, on le fera demain, mais en tout cas en commission des finances il a fallu nonante-huit heures, cela a été dit, pour parvenir à 24 millions de boni. Et durant ces nonante-huit heures - c'est la première fois que je voyais ça, c'était incroyable - on a assisté à des coupes, des coupes dans les postes, des coupes dans les politiques publiques indispensables pour la population, etc. Et quand M. Stauffer - mais en réalité je ne sais pas si c'est M. Stauffer ou le MCG - dit: «Nous, nous voulons faire des économies, nous voulons couper, nous voulons un Etat moins grand et qui s'amaigrisse au niveau de la fonction publique», et qu'on sait qu'en même temps il a dit également: «Mais vous savez, si c'est vraiment nécessaire, vous pouvez revenir durant l'année avec des crédits complémentaires, on pourra peut-être les voter !», eh bien j'ai envie de répondre qu'il faut faire preuve d'un peu de cohérence ! En tout cas j'espère qu'il y en aura plus dans cette enceinte que dans la commission des finances.
Pour ce qui est des socialistes, dès la présentation en septembre de ce budget 2015 nous avons dit qu'il ne nous convenait pas sur le fond. En effet, il contenait des économies déclinées en 25 mesures, lesquelles touchaient principalement les personnes les plus pauvres de ce canton. Il y avait également des mécanismes qui n'étaient pas respectés au niveau de la fonction publique, et pour nous il n'y avait pas suffisamment de recherche de revenus supplémentaires. Compte tenu de cela, le parti socialiste a très rapidement proposé, en dehors du budget, deux projets de lois en parallèle pour amener des nouvelles recettes: l'un vise spécifiquement à pouvoir rembourser plus vite la dette, via des centimes additionnels attribués uniquement à ce mécanisme de remboursement de la dette, tandis que l'autre s'attaque à une niche fiscale qu'on connaît bien, c'est-à-dire la diminution de la réduction possible pour la LAMal.
Maintenant c'est vrai que ce budget présentait déjà - cela a été dit - 154 millions d'économies et qu'il affiche un boni. Pour nous, tel que sorti de commission, le budget sera inacceptable. C'est pour cette raison que nous n'entrerons pas en matière sur le budget tel qu'il est ressorti du troisième débat de la commission des finances. C'est impossible, avec 24 millions de boni sur des postes coupés ! En revanche, nous sommes prêts à travailler demain et à nous diriger, nous l'espérons, vers un budget. Il ne sera pas forcément comme nous le souhaitons et nous devrons certainement - nous en avons déjà fait beaucoup - faire de nombreuses concessions...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...mais nous appelons de nos voeux qu'il y ait un budget qui soit le moins pire possible pour une grande partie de la population qui est souvent oubliée quand on doit établir des priorités dans des coupes. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je vais passer la parole à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco, puis nous voterons.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord vous exprimer ma reconnaissance, au nom de mes collaborateurs, pour vos remerciements et témoignages quant à l'excellence de leur travail. Je leur transmettrai bien volontiers.
Mesdames et Messieurs, le budget que nous avons eu l'honneur de vous présenter en septembre n'est effectivement pas un budget d'austérité, le Conseil d'Etat en convient tout à fait. Comme cela a été dit, il est en augmentation de plus de 100 millions s'agissant des charges, soit de plus de 1,4%. C'est moins que les années précédentes, même nettement moins, mais nous sommes toujours dans une augmentation et de postes de travail et de charges, il ne s'agit donc pas d'un budget d'austérité. Cette caractéristique est tout simplement due à une volonté populaire, notamment pour ce qui est du mercredi matin, ainsi qu'à une volonté populaire et à des choix politiques - nous en convenons - exprimés entre autres dans le domaine de la sécurité, de la chaîne sécuritaire - soit en ce qui concerne la police, la justice et le secteur pénitentiaire - et ce sont des choix qui sont totalement assumés.
En démarrant la préparation de ce projet de budget à la fin du mois de janvier 2014, le Conseil d'Etat s'est trouvé confronté à une augmentation de près de 200 millions - 180 millions - des charges qu'on pouvait qualifier d'obligatoires. Par conséquent, dans la mesure où il n'était pas question pour le Conseil d'Etat, au terme du processus, de présenter un budget déficitaire, pour les raisons que vous connaissez - à savoir bien entendu la situation générale de nos finances et en particulier de notre dette - tout le travail a consisté à présenter des mesures à hauteur de 154 millions. L'essentiel ou plutôt une part supérieure à 50% concerne des diminutions de charges et une part un peu moindre concerne des augmentations de recettes.
Mesdames et Messieurs, ce processus est enclenché, et il ne s'arrêtera pas à l'exercice 2015. Ça va continuer ! Le Conseil d'Etat vous a présenté 44 mesures, dont certaines ont suscité des sourires narquois, voire des quolibets, mais il y en aura d'autres. En effet, 25 autres sont déjà en préparation, et il s'agit de mesures à plus long terme, qui nécessitent un travail accru de notre administration pour les mettre en oeuvre. Nous continuerons donc comme ça au cours de cette législature, j'en prends l'engagement, non pas pour pratiquer des coupes aveugles, mais tout simplement pour formuler des propositions qui amélioreront le fonctionnement de cette administration et qui permettront de continuer à délivrer des prestations de qualité, mais à des coûts et avec des charges moindres. C'est un engagement que nous prenons et ce processus est en cours.
C'est la raison pour laquelle il faut considérer ce projet - je me limite à parler du budget tel que le Conseil d'Etat l'a présenté - comme un premier budget, lequel prévoit des mesures, je l'ai dit, à hauteur de 154 millions de francs, et on doit agir dans la continuité et dans un certain effort. On ne peut pas rétablir une situation du jour au lendemain; ça prendra un certain nombre d'années.
Voilà, Mesdames et Messieurs, sur quoi le budget est fondé. Pour le Conseil d'Etat, il est nanti d'un équilibre, et il s'agit d'un équilibre non seulement en matière de finances, mais également dans les mesures qui ont été proposées et qui ont fait l'objet de discussions très profondes au sein du Conseil d'Etat. Nous avons donc considéré que les efforts demandés ici et là étaient tout à fait supportables, et on continuera ainsi, je peux vous le garantir.
S'agissant maintenant du projet qui est sorti de la commission des finances, eh bien le Conseil d'Etat déposera dans le cadre du deuxième débat toute une série d'amendements qui viseront peu ou prou, mais de manière déterminée, à revenir - c'est du moins ce que nous vous suggérerons - avec les propositions que nous vous avions faites dans le cadre budgétaire, à notre projet initial, à quelques modifications près. Je vous remercie donc par avance d'y réserver demain un très bon accueil. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous allons maintenant procéder au vote d'entrée en matière. (Le vote électronique ne fonctionne pas. Un instant s'écoule.) Le scrutin devrait s'ouvrir... (L'écran d'affichage des votes n'indique aucun résultat. Exclamations. Applaudissements. Quelques secondes s'écoulent.) Voilà, cette fois le scrutin est réellement ouvert !
Mis aux voix, le projet de loi 11536 est adopté en premier débat par 65 oui contre 18 non et 12 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande encore une petite seconde d'attention avant que je ne lève la séance. J'aimerais remercier M. le conseiller d'Etat Luc Barthassat, chef du département de l'environnement, des transports et de l'agriculture, qui vous remet à la salle Petitot un petit panier genevois que vous êtes priés d'aller chercher ! (Applaudissements.) A demain et bonne nuit !
La séance est levée à 22h40.