République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 juin 2014 à 10h10
1re législature - 1re année - 10e session - 62e séance
PL 11449-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous passons à présent aux PL 11449-A et 11448-A sur l'Hospice général. Je cède la parole à Mme la députée Lydia Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas revenir sur le CASI, puisque nous en avons déjà discuté avant. Par contre, je voudrais rendre attentifs cette assemblée ainsi que le conseiller d'Etat à l'insertion et à la prise en charge des jeunes à l'Hospice général. Même si les assistants sociaux qui travaillent à Point jeunes font du mieux qu'ils peuvent, la prise en charge et l'accompagnement des jeunes causent réellement des soucis. Un grand nombre d'entre eux y sont accueillis, soit plus de six cents. Or, sur ces six cents jeunes, très peu reçoivent de l'aide sociale, ce qui ne signifie pas qu'ils n'ont pas de besoins ou qu'ils ont des moyens. Il s'agit souvent de familles qui se trouvent déjà dans la précarité, qui doivent assumer les charges de leurs jeunes adultes. La surcharge du service et le peu de moyens qui lui sont accordés comparé aux autres font que beaucoup de jeunes restent en attente. C'est quelque chose de grave pour l'avenir, et qui touche surtout des personnes n'ayant déjà pas été beaucoup favorisées dans la vie. Voilà, c'était juste une remarque.
M. Ivan Slatkine (PLR). Je voulais simplement vous dire que le PLR approuvera le rapport de gestion de l'Hospice général. Nous apprécions le fait que l'Hospice général applique le principe de sincérité et de transparence, et qu'il annonce des chiffres corrects, ce que le Conseil d'Etat a malheureusement - avait en tout cas - de la peine à faire. Je vous rappelle, s'agissant du projet de budget 2014, que l'UDC et le PLR avaient déposé un amendement rempli de bon sens appelant à ajuster le budget par rapport à la réalité des chiffres, c'est-à-dire ceux de l'Hospice général. Or une majorité de ce Grand Conseil - bien appuyée par la gauche - a refusé cet amendement, préférant arroser la fonction publique d'annuités complémentaires. Pour nous, il est important qu'au niveau budgétaire, le Conseil d'Etat arrête de jouer avec les chiffres de l'Hospice général et applique réellement le principe de sincérité. Je vous remercie.
M. Patrick Saudan (PLR). Je me permets de prendre la parole très brièvement pour corriger certaines impressions qui ont pu être données à la population genevoise au vu des interventions de ce matin sur les bancs de la gauche quant à la politique sociale à Genève. Je vais aller dans le sens de M. Poggia en parlant d'étalonnage, de «benchmarking», si vous permettez ce néologisme anglais. Selon un rapport publié en 2011 par l'Office fédéral de la statistique, Genève est le canton romand le plus généreux en matière de dépenses sociales. Les budgets n'ayant pas changé dans les cantons romands, je pense qu'il en est toujours de même aujourd'hui.
Deuxièmement, on parle d'inégalités qui seraient croissantes à Genève. Là aussi, j'aimerais vous citer un chiffre. On mesure l'inégalité d'une société par le coefficient de Gini, 0 signifiant la société la plus égalitaire possible et 1 la plus inégalitaire. En 2006, l'indice Gini était de 0,45. Actuellement, si on lit le bilan social de l'Etat de Genève publié en 2012, nous avons un indice Gini de 0,33 dans le privé et de 0,12 à l'Etat. Notre société est donc très égalitaire ! Nous avons un Etat social généreux, qui dépend de la prospérité de l'économie genevoise, elle-même dépendant des conditions-cadres. Je pense qu'il y a passablement de partis dans ce parlement qui ne devraient pas l'oublier.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, Mme Schneider a évoqué tout à l'heure la problématique des jeunes adultes. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que de nombreux adultes ont de la peine à passer la porte des centres sociaux et de l'Hospice général, et que les barrages procéduraux sont particulièrement dissuasifs, alors même que ces personnes sont en difficulté. Le second élément que je voudrais mettre en évidence est le fait que les moyens ne sont pas mis pour faire de la prévention. Je vous rappelle qu'il fut un temps où la maxime de l'Hospice général était: «Mieux vaut prévenir que guérir.» Aujourd'hui, les activités de prévention ne sont pas prises en considération. Les postes qui devraient être dédiés à la prévention ne sont pas pris en compte dans la dotation. C'est un élément que vous devriez retenir, parce que c'est un investissement que de miser sur la prévention. Vous en retireriez un retour sur investissement, ce dont vous vous privez aujourd'hui.
Maintenant, puisque d'aucuns se plaisent à faire des comparaisons, faisons-en ! Référons-nous à la Constitution fédérale par rapport au statut de certaines personnes, et voyons ce qu'elle en dit dans son préambule. La Constitution fédérale indique que la qualité d'une société s'identifie à la manière dont elle traite les plus faibles de ses membres. Alors s'il y a une chose que je vous invite à faire plutôt que de parler dans le vide, c'est d'aller voir comment on vit avec les prestations de l'aide sociale. Allez voir sur le terrain, allez voir les gens, voyez comment ils vivent. Après, vous viendrez nous dire si c'est aussi confortable que vous le pensez. Je vous remercie et, pour ces motifs, nous nous abstiendrons sur cette question.
M. Eric Leyvraz (UDC). L'UDC acceptera ces états financiers et se félicite de la justesse des prévisions de l'Hospice général, malheureusement pessimistes mais qui révèlent la réalité. Le Conseil d'Etat joue un peu sur du velours, parce qu'il sait très bien que la loi impose de prendre en charge les dépenses de l'Hospice général et nous promet que, pour l'année prochaine, nous aurons la sincérité des chiffres. Il n'y a pas de raison que ces chiffres soient à la baisse, parce que les conditions générales ne changent pas. A l'UDC, nous espérons - et nous y serons très attentifs - que ces chiffres ne seront pas ceux du Conseil d'Etat, qui aura dit au directeur de l'Hospice général: «Il est très mal vu que nos chiffres divergent, et les vôtres sont trop élevés. Même s'ils sont proches de la réalité, peu importe. Vous allez prendre les nôtres et vous taire pour que ces casse-pieds de la commission des finances n'interviennent pas trop souvent !» Nous attendons une véritable sincérité des chiffres.
M. François Baertschi (MCG). Au MCG, nous soutiendrons cette politique parce que nous estimons qu'il faut aider ceux qui le méritent. Néanmoins, nous tenons à formuler un avertissement face à tous les fraudeurs de l'aide sociale; il nous revient en effet de nombreux cas qui ne sont pas acceptables. L'Hospice général a fait un effort dans ce sens-là en engageant un certain nombre d'inspecteurs, mais c'est absolument insuffisant. Nous avons de nombreux cas qui ne sont pas tolérables, et il faut mettre davantage de moyens contre tous les fraudeurs et ceux qui déconsidèrent l'aide sociale, afin que l'on ait une aide sociale beaucoup plus crédible. Nous demandons beaucoup plus de rigueur et de sévérité envers ceux qui ne le méritent pas, pour pouvoir aider ceux qui le méritent.
M. Jean-Luc Forni (PDC). J'aimerais juste dire que le groupe démocrate-chrétien suivra l'avis du réviseur dans l'approbation de l'état financier de l'Hospice général et, bien entendu, de son rapport de gestion. Il n'y a aucun élément qui permette d'avoir un doute sur les états financiers de cet établissement. Nous avons aussi pris bonne note du fait que, dès 2014, il y aurait concordance entre les prévisions du Conseil d'Etat et les chiffres réels de l'Hospice général. Enfin, notre dernier souhait serait que l'Hospice général puisse bénéficier du système SIRDU, qui a été adopté lors d'une dernière séance du Grand Conseil début juin. Ce système, je le rappelle, permet d'accéder très rapidement aux informations quant à la situation sociale de chaque citoyen genevois. Pour l'instant, l'Hospice général est exclu de ce système d'information. Je pense que pour la rapidité et le traitement des dossiers, il serait souhaitable qu'il puisse être considéré comme un partenaire suffisamment fiable pour en bénéficier. Je vous remercie.
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Les comptes de l'Hospice général sont un peu le marqueur de l'efficacité de la politique du Conseil d'Etat, respectivement de la bonne santé ou non de notre République et canton de Genève. Dans les autres politiques publiques, nous avons pu constater que nous avons une économie florissante, avec un taux de croissance moyen de 2,5% ces dix dernières années. Nous avons un taux de chômage relativement stable, qui a même officiellement baissé. Or, le résultat des courses, c'est que le budget de l'Hospice général a crû de 100 millions de francs en dix ans ! Une question se pose donc: comment se fait-il que dans une république où l'économie est prospère, où le taux de chômage baisse et où nous devons faire appel à de la main-d'oeuvre étrangère, autant de personnes doivent avoir recours à l'Hospice général ? On pourrait comprendre si nous avions une économie en déflation, si nous nous trouvions dans les situations des économies qui nous entourent. Il y a une sorte de paradoxe que personne n'explique aujourd'hui. On donne la préférence aux personnes qui se trouvent au chômage. Mais qu'en est-il des demandeurs d'emploi, du jeune qui n'arrive pas au chômage parce qu'il est encore demandeur d'emploi ? La seule chose que l'on propose à une personne qui a quitté les chiffres du chômage mais se retrouve malgré tout demandeur d'emploi - dans tous les projets de lois qui nous ont été proposés, y compris par le MCG - c'est l'Hospice général. Pour moi, la politique publique de l'Hospice général est un marqueur, et il conviendrait d'expliquer pourquoi nous en sommes à 250 millions de francs de budget aujourd'hui.
M. Ivan Slatkine (PLR). Je ne comptais pas intervenir une deuxième fois, mais je dois dire que ce matin, Ensemble à Gauche nous surprend et nous réjouit: après avoir prôné des baisses fiscales, voilà que nous avons entendu Mme Haller prôner une réduction des effectifs administratifs pour avoir plus d'impact sur le terrain. Nous nous en réjouissons et espérons que vous conserverez cette ligne lors du vote budgétaire, que vous soutiendrez les propositions du PLR... (L'orateur s'adresse en aparté à un collègue.) 1-0 ! ...les propositions du PLR qui seront faites dans ce cadre. Je vous remercie.
Mme Marion Sobanek (S), députée suppléante. Mesdames et Messieurs, je suis vraiment choquée par l'arrogance et le mépris dont vous faites preuve à l'égard de personnes qui se trouvent parmi les plus faibles. On tombe très rapidement à l'Hospice général ! Imaginez un peu la situation si vous étiez chômeur dans la cinquantaine. Je vous mets au défi de décrocher un emploi. Cherchez des stages ou un travail quand vous sortez de l'école - même quand vous êtes bien formé - vous ne trouvez rien. Demandez à des gens qui cherchent un emploi, et vous verrez. Genève est l'une des villes les plus chères, la troisième sauf erreur. Il est évident qu'on a besoin de plus d'argent ici. Si vous cherchez un logement, vous ne trouvez pas d'appartement bon marché comme dans les autres cantons, avec lesquels vous vous plaisez à comparer les prestations sociales. Les loyers ici sont tout simplement beaucoup plus chers. Il y a certainement plus de fraudes dans le domaine fiscal et qui coûtent beaucoup plus cher à la communauté, car elles nous privent des rentrées qui nous permettraient de redistribuer un peu de cette richesse dont vous dites, à juste titre, que Genève procure beaucoup. Vous ne devriez pas parler ainsi des gens à l'Hospice général. Un peu plus de respect, Mesdames et Messieurs de la droite ! Merci.
M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais juste faire deux remarques, d'abord sur les fraudeurs. Je crois que l'argument des fraudeurs s'agissant de l'Hospice général ou de l'assurance-invalidité est une légende. Une étude a été faite par l'assurance-invalidité, qui a démontré que les cas de fraude existants sont absolument marginaux. Prétendre que la majorité des gens à l'Hospice sont potentiellement des fraudeurs est inadmissible.
Deuxièmement, je voudrais revenir sur une remarque faite précédemment quant à la contradiction entre notre économie florissante et une augmentation de l'aide à l'Hospice général. Il existe peut-être une façon de répondre à cette question. Prenons l'exemple de l'assurance-invalidité, qui a serré la vis et accorde beaucoup moins de rentes. Les personnes qui auraient peut-être pu bénéficier d'une rente auparavant se retrouvent ainsi à l'Hospice et doivent demander de l'aide parce que l'assurance-invalidité ne les prend plus en charge. L'Etat doit prendre en charge beaucoup plus de choses au niveau cantonal, ce que faisait avant la Confédération. Il y a là des transferts de budget qui sont à discuter et à reprendre. On le voit de plus en plus, surtout au niveau des troubles psychiatriques: en effet, l'assurance-invalidité ne prend plus en charge les individus souffrant de troubles psychiatriques. Certaines maladies ont même été exclues du catalogue de l'assurance-invalidité. Voilà tout autant de gens qui tombent à l'Hospice général. Je vous remercie.
Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, je regrette que le représentant MCG ne soit pas là, parce que son discours était très représentatif, comme d'habitude. On a entendu hier M. Stauffer défendre le capital et, aujourd'hui, on entend M. Baertschi se plaindre des pauvres. Nous savons maintenant exactement de quel côté de l'hémicycle ils se trouvent, en tout cas politiquement. Par rapport à ce qui a été dit, je veux tout d'abord remercier M. Buchs pour son intervention tout à fait représentative de notre propre position et rappeler que c'est là l'une des fonctions de l'Etat. C'est l'une des fonctions de l'Etat que de rendre la dignité à des personnes en difficulté. Contrairement à ce qui a été dit, on n'a pas besoin de le mériter ! On nous doit cette dignité ! Ce n'est pas quelque chose qui se gagne, ce n'est pas quelque chose qu'il faut prouver, ce n'est rien de tout cela. Toute personne a droit au respect de sa dignité, même - et surtout ! - si elle se trouve en difficulté. En l'occurrence, le travail qui est fait par l'Hospice général, même si c'est le minimum syndical, participe de cette reconnaissance de la dignité de chacun. J'entends bien que, sur certains bancs, on ait davantage de respect pour ceux qui ont - je mets des guillemets - «réussi». Et ceux qui ont réussi socialement ont moins de respect pour ceux qui ont participé à cette réussite sans en recevoir les fruits. Arrêtons aujourd'hui de parler des méchants profiteurs de l'aide sociale ! Pour ce que j'en sais, personne n'aime être à l'aide sociale. Personne ! C'est une démarche extrêmement difficile pour n'importe quel humain. Demander de l'aide n'est pas une chose facile. Le fait que l'on puisse stigmatiser une population parce qu'elle est trop modeste, qu'elle a trop de difficultés et qu'elle demande de l'aide, que l'on puisse d'une part lui refuser cette aide et d'autre part la soumettre à des conditions incroyables tout en lui réservant un jugement moral, est pour moi parfaitement indigne de n'importe quel homme ou femme politique ! (Applaudissements.)
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai pas dit qu'il fallait supprimer des postes administratifs, mais qu'il fallait réduire les procédures administratives. Il vaudrait mieux que vous soyez plus attentif, Monsieur Slatkine - vous lui transmettrez, Monsieur le président. Ce que j'aurais également souhaité rappeler, c'est que si les chômeurs en fin de droit n'ont aujourd'hui pas d'autres perspectives que l'aide sociale, c'est parce que cela a été voulu par la LIASI, qui a été votée par ce même parlement le 11 février 2011. Ceci tout en sachant pertinemment qu'un certain nombre de demandeurs d'emploi seraient laissés sur le carreau parce qu'ils ne remplissent pas la condition de ressources permettant d'accéder aux prestations de l'Hospice général.
En ce qui concerne l'AI évoquée par M. Buchs, j'aimerais également rappeler - cela a été mentionné dans les rapports qui nous sont soumis - que l'Hospice général pratique des avances sur l'assurance-invalidité mais que très peu de rentes viennent compenser ces avances. Cela dit, ce n'est pas parce que l'AI a dit non qu'il faut en rester là. Dans la pratique de terrain, on constate que lorsqu'on fait recours contre les décisions de l'AI, dans un certain nombre de cas - et pas forcément une minorité des cas - on obtient gain de cause. Ces personnes peuvent d'une part être reconnues dans leur atteinte à la santé et à leur capacité de gains et d'autre part rembourser les avances qui leur ont été faites par l'Hospice général. Je vous remercie.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Il y a quelques décennies, quelqu'un avait dit: «Vous n'avez pas le monopole du coeur.» Personnellement, je dirais du coeur et de l'esprit ! Jouer sur les mots - vous transmettrez à Mme ma préopinante, Monsieur le président - c'est facile. Dans l'action, vous n'êtes pas autorisée à dire et à conclure dans un amalgame... Tout amalgame est une hérésie ! Il est ridicule de dire que le MCG ou la droite n'en ont rien à faire de la question des besoins - et non pas des droits - de personnes en difficulté. Je vous mets au défi de discuter de cela en tête-à-tête avec nous.
Vous parlez de droits. Je suis d'accord sur le fait que l'on n'a pas à parler de méritocratie, on n'est pas dans une multinationale pour voir qui est le meilleur et aura le plus haut salaire. Nous sommes bien d'accord que l'on est dans un champ social. Dans un champ social, il y a des besoins. Ces besoins, nous les avons reconnus, nous les connaissons. Ces besoins font l'objet d'une évaluation. Là, on peut discuter. Quelle évaluation faisons-nous ? Je souhaiterais que l'Hospice général facilite les démarches, pas seulement pour les assistants sociaux ou les administratifs, mais aussi pour les personnes qui en ont besoin. Quel accueil proposons-nous ? Quelquefois, il faut accompagner des personnes qui n'osent pas demander de l'aide à l'Hospice général. Ce n'est pas normal ! Pour comprendre les documents que l'on doit retourner en 45 exemplaires, on a l'impression qu'il faut avoir étudié cinq ans à l'université. Ce n'est pas normal ! Alors, rendons les choses plus faciles sur une base de reconnaissance des besoins, Madame la députée. Le droit que l'on a, c'est la dignité. La dignité n'est pas seulement une valeur, c'est un droit que l'on doit défendre. Tout le monde peut le faire ! Vous n'avez pas à juger les personnes ni les groupes là-dessus. C'est inacceptable et contraire à la philosophie que vous défendez par rapport à l'Hospice général. J'en ai terminé. (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je rebondis sur les propos qui viennent d'être tenus par Mme Engelberts - vous lui transmettrez, Monsieur le président. L'attaque est tout de même venue de son groupe ! Quand on se permet de parler de méritocratie en matière d'aide sociale, il est juste que certaines voix s'élèvent - et si possible la moitié des voix de ce parlement - pour s'insurger contre de pareils propos. Laisser traîner de telles pensées, à savoir qu'il faut être méritant et montrer patte blanche pour obtenir de l'assistance alors que c'est un droit garanti par notre constitution, Mesdames et Messieurs les députés, est tout simplement inadmissible. Il faut savoir que le peuple suisse de manière générale - et le peuple genevois en particulier - répugne à faire valoir ses droits sociaux; je puis vous le confirmer, moi qui travaille sur le terrain. Aux difficultés que vient d'évoquer Mme Engelberts sur l'accès aux prestations d'assistance s'ajoute aussi la honte d'en être arrivé là. Cessons de faire courir le bruit qu'il y a des fraudeurs. Il y en aura toujours, certes, mais à quel pourcentage ? Un pourcentage minime. Je puis vous dire que le service des enquêtes s'active et que vous n'avez pas droit à une prestation de la part de l'Hospice général sans être passé par sa maniclette. Le travail est effectué. Or à quel moment fait-on la demande de prestations d'assistance ? Bien souvent au dernier moment. En attendant, vous les recevrez dix, quinze jours voire trois semaines plus tard, parce qu'on ne peut pas exiger que le service des enquêtes s'active du jour au lendemain. Que se passe-t-il alors ? Ces personnes sont contraintes de s'adresser aux services sociaux privés pour mendier quelques sous en attendant que leurs droits puissent être reconnus ! Je vous en prie, rendons la dignité à ces gens, saluons le fait qu'il y ait un filet social et que le travail se fasse et, si possible, accueillons-les en les déculpabilisant de leur situation, car ils n'y peuvent rien. Tout est effectivement lié dans les différentes politiques qui sont menées à travers ce canton: l'emploi, le logement...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
Mme Frédérique Perler. ...et l'enseignement. Je vous remercie.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, l'Hospice général est une institution remarquable qui fait un excellent travail, souvent difficile. Les chiffres qui vous sont présentés sont sans doute le symptôme d'un mal - comme cela a été relevé - plus que le mal lui-même. Il s'agit évidemment de faire en sorte que les prestations diminuent non pas parce que ceux qui les reçoivent ne les méritent pas, mais parce que le nombre de ceux qui les reçoivent diminue. Nous avons besoin de moyens pour combattre le mal à la racine, pour que les personnes ne «finissent» pas - comme on le dit trop souvent - à l'Hospice général. Je me permets de reprendre Mme Wenger: il ne s'agit pas de rendre leur dignité à ces personnes, puisqu'elles ne l'ont jamais perdue. Ce sont des personnes dignes. Il s'agit simplement de leur permettre de trouver la place qu'elles méritent dans la société ainsi que la reconnaissance, parce que nous pouvons tous, un jour ou l'autre à cause de coups du sort, «finir» - comme on dit - à l'Hospice général.
Voilà, Mesdames et Messieurs, vous aurez par ailleurs relevé que les frais de fonctionnement, eux, n'augmentent pas. Il y a une belle maîtrise, avec une valorisation du parc immobilier, tout en maintenant une partie de ce parc immobilier à destination des plus démunis. Néanmoins, lorsque l'on dispose d'appartements de cinq pièces en Vieille-Ville, on peut difficilement faire du social avec cela. Je pense qu'il faut plutôt rentabiliser et que cette rentabilité serve les plus démunis.
Quant au reste, j'ai bien entendu votre message. Vous voulez que l'on cesse de venir en cours d'année devant la commission des finances vous demander des rallonges alors que l'on a une vision suffisamment claire de ce que risque d'être l'aide sociale dans notre canton. Nous vous l'avons dit, nous vous le répétons: le Conseil d'Etat a entendu votre message, et nous ne devrions plus avoir de mauvaises surprises dans ce sens pour l'année 2015. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons passer au vote sur le projet de loi 11449.
Mis aux voix, le projet de loi 11449 est adopté en premier débat par 72 oui et 1 abstention.
L'article unique de la loi 11449 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11449 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 8 non et 5 abstentions.
Le président. Pour finir, je fais voter l'assemblée sur le PL 11448-A.
Mis aux voix, le projet de loi 11448 est adopté en premier débat par 69 oui et 4 abstentions.
L'article unique de la loi 11448 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11448 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 60 oui contre 1 non et 11 abstentions.