République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du samedi 17 mai 2014 à 10h
1re législature - 1re année - 8e session - 51e séance
M 2205
Débat
Le président. Nous passons au second point de notre ordre du jour, soit la proposition de motion 2205. Nous sommes toujours en catégorie II, soixante minutes. Je cède la parole au premier signataire, M. Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Je parle effectivement en tant que premier signataire. Mesdames et Messieurs les députés, ce matin, vous avez refusé la première demande de commission d'enquête parlementaire... (Brouhaha.)
Le président. Un peu de silence !
M. Eric Stauffer. Je dois dire que le MCG et l'UDC sont extrêmement surpris que le parti socialiste et Ensemble à Gauche déposent des amendements qui sont acceptés, puis refusent le texte in fine. (Exclamations.) Dans le genre de l'incohérence, on ne fait pas mieux pour un samedi matin ! (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Cela étant dit, je corrige maintenant certains propos qui sont exactement les mêmes s'agissant de cette demande de commission d'enquête parlementaire sur les Services industriels. Par exemple ceux de M. Béné, qui prétend que j'ai dit que la commission d'enquête parlementaire était quelque chose de confidentiel, alors que c'est justement le contraire ! Lorsqu'une commission d'enquête parlementaire rend son rapport, il est évidemment public. Ensuite, il a été fait état des rapports de l'ICF. Ceux-ci sont frappés de la confidentialité et ne sont pas publics. Le MCG et l'UDC veulent évidemment la transparence pour la population, non pas pour les députés. Nous avons accès à des informations que le public n'a pas. Or le public doit être informé.
Monsieur le président, vous transmettrez également ce qui suit à une députée socialiste, qui a confondu les textes puisqu'elle a parlé des Services industriels dans le débat sur le CEVA, et qui vient dire que cette institution est à protéger et que, lorsque j'étais administrateur, je l'ai mise à mal. Laissez-moi vous rappeler ce que j'ai mis à mal, Mesdames et Messieurs et cher public qui nous regardez: j'ai mis à mal le fait qu'un membre du parti socialiste, qui était président du conseil d'administration, gagnait 420 000 F par année pour un poste à 40%, et en plus, touchait une aide de 900 F par année pour payer ses primes d'assurance-maladie ! Voilà ce que j'ai dénoncé ! J'ai dénoncé le fait que les Services industriels voulaient importer des déchets de la ville de Naples, alors que l'Etat italien n'avait jamais consenti à ces exportations, et que cela passait par l'Allemagne pour générer des commissions pour des intermédiaires mafieux ! Voilà ce que j'ai dénoncé ! Bien m'en a pris... (Applaudissements.) ...bien m'en a pris, Mesdames et Messieurs, car les déchets qui sont partis en Allemagne ont été bloqués quatre fois par les douanes allemandes, parce qu'ils étaient radioactifs ! Voilà ce que j'ai évité au canton de Genève ! Mais évidemment, sous prétexte que c'est une institution, il faut tout laisser faire. Maintenant, Mesdames et Messieurs... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...les Services industriels ont vraiment les mains dans le cambouis, mais jusqu'à la lie ! Ils sont empêtrés dans des affaires plus incroyables les unes que les autres. Chaque année, Mesdames et Messieurs, il y a une dévaluation qui est faite sur les actifs des Services industriels. Pour les comptes 2013 - vous l'avez lu dans la presse - il s'agissait de moins 188 millions ! Je vous le déclare, Mesdames et Messieurs, qu'une régie d'Etat - qui a un monopole d'Etat - se permette de perdre des centaines de millions par année sur le dos des Genevois - c'est-à-dire de vous tous, Mesdames et Messieurs, qui payez vos factures d'électricité - ce n'est pas acceptable ! Ici, quand on doit boucler un budget pour le Grand Conseil, on perd parfois quatre séances pour 20 millions, afin d'être à l'équilibre ! Tandis que de l'autre côté, on a les «gamblers», les boursicoteurs, qui n'en ont que faire - parce que ce n'est pas leur argent - et qui dilapident des centaines de millions ! Ça, ce n'est pas acceptable ! (Applaudissements.) Mesdames et Messieurs les députés, je reviendrai ensuite sur des dossiers plus concrets concernant ce sujet, mais je vous demande déjà d'avoir le courage politique de faire toute la lumière sur les Services industriels et d'arrêter de dire que les commissions actuelles seront capables d'assurer dans un temps raisonnable cette transparence que nous devons à la population.
Des voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
M. Jean Sanchez (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, au vu du vote précédent, je vais me permettre de rappeler le règlement du Grand Conseil, notamment l'article qui concerne la CEP: «Si des faits d'une gravité particulière survenus au sein des autorités cantonales, d'un établissement ou d'une corporation de droit public cantonal ou de leurs administrations le justifient, le Grand Conseil peut nommer une commission d'enquête parlementaire [...]» Je poserai juste quatre questions, même s'il y a cent bonnes raisons de créer une CEP par rapport à l'objet qui nous occupe ce samedi.
Première question: au vu du montant du préjudice subi par les citoyens de ce canton, ne faut-il pas compléter l'audit de la Cour des comptes ? Deuxième question: n'y a-t-il pas assez de compétences au sein de ce parlement pour diligenter une enquête et surtout dans des délais raisonnables ? Troisième question: comment s'est fait l'engagement de M. Hurter et est-ce que les deux anciens employeurs ont été consultés ? Quatrième question: est-ce que le landerneau politique a quelque chose à cacher ? Je ne pense pas que nous trouverons toutes les réponses dans l'audit de la Cour des comptes - ce n'est pas une critique - car elle investigue sur des aspects financiers. Dans ce cas-ci, il s'agit de faire toute la lumière sur les tenants et aboutissants de cette catastrophe financière et d'en tirer des enseignements pour améliorer notre gouvernance. En ce qui concerne l'enquête, je me tiens à disposition pour donner des cours.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je regrette que l'opacité, et non la lumière, ait gagné en ce qui concerne le CEVA. Il n'y aura donc pas de commission d'enquête. J'espère qu'il y en aura une s'agissant du problème des SIG et que nous saurons faire preuve d'un peu plus de lucidité. La gestion des risques et des finances aux Services industriels est gravement problématique. Quant à la rétention d'informations, qui dure depuis si longtemps à l'interne, ceux qui n'ont rien dit hier ne peuvent quasiment plus parler aujourd'hui, car ils se rendraient aussi coupables que ceux qui n'ont pas agi lors des faits. Seule une commission d'enquête peut apporter les réponses nécessaires, car lors des auditions - et c'est si important ! - les auditionnés peuvent s'exprimer en toute confidentialité. Cette confidentialité, nous ne l'aurons pas d'une autre manière. Et les faits avérés, dont tout le monde pourra parler, nous ne pourrons pas les avoir sans une commission d'enquête. Il faut être conscient de cela. Je me rends bien compte qu'avec le sort réservé à la commission d'enquête sur le CEVA, celle sur les SIG n'a pas beaucoup de chances de passer. Néanmoins, il s'agit quand même de nos intérêts, et aussi de ceux des SIG ! Imaginez-vous que nous avons tout intérêt à ce que la direction des Services industriels travaille en bonne harmonie et que tout se passe bien. Or, en ce moment, ça ne va pas. Il y a un grave problème dans le management des risques et des finances. Alors je vous demande de bien vouloir accepter la création d'une commission d'enquête pour que nous puissions régler les problèmes.
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, derrière l'entreprise des Services industriels, il y a plus de mille collaborateurs qui, au quotidien, effectuent une mission publique de haut niveau, de qualité, et en toute sécurité. Cette mission est le fruit d'investissements de plusieurs générations qui représentent plusieurs dizaines de milliards. Je me rappelle avoir été à la commission Etat-Ville-communes-SIG, où l'on a évalué le réseau secondaire des Services industriels appartenant aux communes. Il y a plus de quinze ans, ce réseau était estimé à un 1,2 milliard de francs. Je vous laisse donc deviner à quel niveau nous avons investi dans cette entreprise. La situation géo-économique de l'Europe est très complexe. Nous assistons aujourd'hui au retrait du nucléaire. Nous avons une économie en berne. Il y a le gaz de schiste qui arrive sur le marché et l'Allemagne qui produit de l'électricité avec du charbon. De plus, nous avons réalisé énormément d'investissements dans le photovoltaïque, ce qui nous amène aujourd'hui à une chute de la valeur de l'électricité vendue. Oui, Mesdames et Messieurs, cette situation est exceptionnelle. Aujourd'hui, lorsqu'on veut investir dans ce domaine, il est très difficile de comprendre de quoi l'avenir sera fait. C'est pourquoi l'évaluation des risques n'est effectivement pas une science exacte. Les investissements que nous avons réalisés, les pertes que nous constatons aujourd'hui ne sont certainement pas des pertes pour demain. Ces pertes sont peut-être nécessaires aujourd'hui pour mieux comprendre le marché, pour mieux comprendre son évaluation. Voilà pourquoi je vous demanderai un tout petit peu de recul par rapport à tout ça. Sans minimiser les problèmes, je vous invite à la réflexion. Je vous demande d'arrêter de regarder seulement dans votre rétroviseur. Regardons en avant ! Dans cet état d'esprit, le parti démocrate-chrétien a déposé une motion où il pose un certain nombre de questions sur les différentes possibilités de voir évoluer cet outil magnifique pour Genève. Je vous invite à lire cette motion. Pour le contrôle, la commission de contrôle de gestion est déjà en train d'évaluer les risques qui ont été pris par les Services industriels et ce qui en découle. C'est pourquoi je vous invite, au nom du parti démocrate-chrétien, à rejeter cette motion. Merci, Mesdames et Messieurs.
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, tout à l'heure, le député Lussi parlait d'une pièce de théâtre. Encore eût-il dû la qualifier ! S'agit-il d'une face ou d'une pantalonnade ? En l'occurrence, il me semble que la séance de ce matin ressemble plus à une pantalonnade qu'à autre chose. Mais puisque nous voici assistant à cette triste pièce de théâtre, Monsieur le président, laissez-moi partager avec vous quelques inquiétudes. La première concerne nos institutions. Objectivement, celles-ci - et en particulier celle qui siège maintenant - sont mises à mal par celles et ceux qui ne comprennent pas les... (Brouhaha. Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
M. Renaud Gautier. Je suis fâché, Monsieur Velasco, de vous interrompre dans vos propos. Si vous me permettez juste de continuer... (Remarque.) Merci. Ces institutions sont mises à mal - et en particulier cette assemblée - par des propositions totalement hors de propos, par la proposition de faire usage d'instruments très clairement définis, qui sert simplement dans le cas présent à poursuivre des buts électoraux et non pas à faire en sorte que ce parlement puisse mieux travailler. Le deuxième point qui est mis à mal, c'est la gouvernance. Faut-il rappeler ici que par deux fois, ce parlement a proposé que les commissions officielles soient gérées d'une manière plus liée à ce que l'on appelle la gouvernance ? Problème que l'on a d'ailleurs relevé aux SIG. Mais voilà qu'une fois de plus, cette gouvernance est mise à mal par ceux qui l'ont refusée publiquement par deux fois en vote populaire. Cette absence de cohérence se retrouve dans le fait que celles et ceux qui n'ont pas voulu la gouvernance ont voulu des conseils d'administration politiques. Et les politiques viennent maintenant nous dire qu'ils sont incapables de faire leur travail dans les conseils d'administration, et ils viennent pleurer chez papa et maman - à savoir ce parlement - pour que celui-ci fasse le travail qu'ils sont censés avoir fait dans les conseils d'administration ! Une fois encore, voilà nos institutions mises à mal. (Remarque.) Je suis désolé de vous interrompre, Monsieur le député. Je sais bien que c'est une habitude chez vous, mais c'est un peu fâcheux.
Des voix. Oh là là ! (Protestations.)
Le président. Poursuivez, Monsieur.
M. Renaud Gautier. S'agissant des compétences, venir dire ici qu'il y a des pertes... Mais, Dieu du ciel, allez donc prendre des cours de comptabilité ! Même pas à l'université: peut-être que dans le cadre de l'enseignement postobligatoire, quelques cours vous expliqueront que l'utilisation ou la création de réserves ne constituent pas une perte ! Pour autant faudrait-il se rappeler la fameuse résolution 700, qui a été déposée en 2012... (Brouhaha.)
Le président. Chut !
M. Renaud Gautier. ...par un certain nombre de députés - j'en faisais partie - qui, très objectivement à l'époque, ont refusé les comptes des SIG parce que cette problématique des réserves n'avait justement pas été traitée comme il faut. Cette année, nous voyons en effet les SIG peut-être très légèrement exagérer les réserves qu'ils font. Ce ne sont pas des pertes ! Venir dire ici que l'on escroque les Genevois ou que les SIG ont mal travaillé est un abus de langage, non seulement faux par rapport aux SIG, mais également par rapport à celles et ceux à qui vous vous adressez, Mesdames et Messieurs ! Avant de mettre à mal les institutions, utilisez ce pour quoi vous avez plaidé, à savoir que celles et ceux d'entre vous qui êtes dans les conseils fassiez votre travail et ne veniez pas polluer ce parlement avec des questions qui devraient être résolues au niveau du conseil d'administration et non pas dans cette salle.
Mesdames et Messieurs, cette CEP est une ineptie ! La seule chose que vous pouvez faire est de la renvoyer là d'où elle n'aurait jamais dû sortir et de laisser travailler les commissions dans lesquelles on peut imaginer que certains représentants des partis - peut-être pas de ceux qui ont signé ces demandes de CEP - seront capables de faire le travail qui est attendu de ce parlement. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jacques Béné, à qui il reste deux minutes et six secondes.
M. Jacques Béné (PLR). Merci, Monsieur le président. S'il est vrai qu'il y a un problème - et il y a certainement un problème de gouvernance aux SIG - ce n'est pas avec une commission d'enquête parlementaire qu'on va arriver à régler le problème. Pourquoi est-ce que je dis ça ? Je ne sais pas qui, dans ce parlement, va participer à cette éventuelle commission d'enquête. Mais qui est vraiment spécialisé dans le domaine pour pouvoir traiter de la problématique actuellement en cours aux Services industriels ?
Une voix. On nommera des experts !
M. Jacques Béné. Je rappelle qu'il y a actuellement une vingtaine d'audits qui ont été demandés aux Services industriels de Genève, que la Cour des comptes est déjà en charge de cette problématique, qu'elle devrait rendre son rapport assez rapidement - j'ai entendu dire que c'était pour le mois de juin ou durant l'été, donc j'espère qu'on aura des conclusions - et que la justice est aussi en train de traiter certains cas qui posent problème. Je ne vois pas en quoi une commission d'enquête parlementaire pourrait apporter quelque chose. Surtout qu'actuellement, la commission de contrôle de gestion s'est aussi saisie de cette problématique. Nous avons une bonne partie des documents. La commission de contrôle de gestion attend simplement la suite qui sera donnée à cette motion pour savoir si nous reprenons la main et continuons à investiguer sur les Services industriels ou si c'est la commission d'enquête parlementaire qui le fera. Contrairement à ce que M. Stauffer a dit, la commission de contrôle de gestion est tout à fait capable de traiter ce problème-là le cas échéant et n'est absolument pas débordée.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Jacques Béné. Et s'il le fallait - comme ç'a été le cas récemment concernant par exemple la LGAF - la commission de contrôle de gestion pourrait très bien augmenter un peu son temps de travail hebdomadaire pour pouvoir traiter cela. Je termine en disant que je trouve quand même surprenant que M. Leyvraz et M. Medeiros, eux-mêmes administrateurs des Services industriels, se permettent de... (Protestations.)
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Jacques Béné. Ils vont pouvoir valider les comptes qu'ils ont eux-mêmes votés au sein du conseil, et ils voudraient encore aller dans une commission d'enquête parlementaire...
Le président. Vous avez terminé, Monsieur.
M. Jacques Béné. ...en plus de la commission de contrôle de gestion ? Ne croyez-vous pas qu'il y a un peu confusion des genres ?
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont extrêmement préoccupés par ce qui se déroule aux Services industriels de Genève, mais ne prétendent pas forcément que tout ce qui s'y passe pose problème. Je crois qu'il faut rappeler une chose - et j'aimerais d'abord insister là-dessus - à savoir la question de la forme, dans la proposition du MCG et de l'UDC de créer une commission d'enquête parlementaire. Question de forme qui est extrêmement importante ! Il s'agit de savoir pourquoi et dans quel but réel on veut créer une commission d'enquête parlementaire. A la lumière des débats d'hier soir - je prendrai ceci à titre illustratif - on peut s'interroger quant aux motivations et à l'objectif réels d'un tel projet. Hier soir, il y avait un projet de loi MCG visant prétendument à lutter contre l'énergie fossile. Or, en même temps, le président du MCG roule en 4x4 et est en totale contradiction avec les propositions qu'il fait dans son projet de loi. (Exclamations.) Dans la suite des débats d'hier soir, on a eu un projet de loi socialiste sur l'éclairage public. (Commentaires.) Un projet de loi socialiste soutenu par le MCG en commission ! Le chef du parti MCG traite les députés MCG d'abrutis, parce qu'ils ont soutenu ce projet de loi. Nous sommes comparés à des représentants de la Corée du Nord quand on propose de faire des économies, économies que vous avez soutenues en commission ! D'une certaine façon, il y a donc la question de la bonne foi qui se pose. Pour nous, c'est une question de forme, de bonne foi. Si l'on crée une commission d'enquête parlementaire, elle va arriver à un certain nombre de conclusions qu'il faudrait accepter, si l'on était honnête. Si l'on fait le travail ensemble, c'est pour en prendre compte et reconnaître ensemble les conclusions. Le problème, c'est que le MCG semble malheureusement incapable d'avoir la moindre bonne foi dans ses propositions et dans l'analyse des résultats de tout ce qu'il propose. (Commentaires.) On l'a vu encore récemment - c'est bien la question de forme - avec les P+R en France. Le MCG utilise des propos mensongers et en dehors de la réalité pour défendre ses positions.
Pour les socialistes, il y a la question de la forme qui est un problème. Mais cela ne nous empêche pas de nous poser la question du fond. La question du fond, c'est de savoir s'il y a des interrogations concernant ce qui s'est déroulé aux SIG ces dernières années. J'aimerais d'abord rappeler qu'il y a moins de trois ans, les socialistes ont demandé la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les Services industriels de Genève quand ceux-ci ont décidé d'investir dans EDH et d'abandonner la centrale chaleur-force du Lignon. Ce sont les socialistes qui l'ont demandée, et le MCG l'a refusée. Pourquoi cette commission d'enquête n'a-t-elle pas vu le jour ? Non pas parce que vous auriez éventuellement eu une question sur EDH ! Mais parce que ça vous arrangeait bien... (Brouhaha.)
Le président. Chut !
M. Roger Deneys. ...parce que ça vous arrangeait bien que la CCF ne soit pas réalisée. Il faut simplement se poser la vraie bonne question. S'agit-il d'enjeux électoralistes ou de règlements de compte ou est-ce que, sur le fond, vous pensez qu'il y a des interrogations ? (Remarque.) Eh bien justement, quand on lit la motion, on peut se dire qu'un certain nombre d'affirmations faites ici sont tout simplement inexactes. De plus, on a déjà les réponses. Les socialistes sont prêts à aller en commission pour que ces questions soient posées et qu'on ait les réponses. C'est pour cela que nous avons déposé un amendement visant à supprimer la commission d'enquête parlementaire et à laisser l'ensemble des questions... (Commentaires.) ...afin que la commission de contrôle de gestion - par exemple ! - puisse y répondre et donner les faits qui sont déjà connus aujourd'hui. Si des éléments doivent encore être éclaircis par la suite, ce sera le cas en commission, et ça ne pose aucun problème. Pour les socialistes, il faut simplement être très clair sur l'objectif. J'aimerais bien que le MCG, pour une fois, soit capable de bonne foi et que s'il va en commission, ce ne soit pas pour proférer des mensonges après les conclusions des travaux parlementaires.
Voici encore une question qui pourrait aussi être posée - c'est d'ailleurs un député PLR qui m'en a fait part, parce qu'il était aussi surpris que moi: pourquoi ne posez-vous pas la question des relations entre le conseiller d'Etat qui s'occupait de l'énergie l'année passée - M. Maudet - et le représentant du MCG, qui va tout à coup négocier des accords avec Ennova sans qu'on sache pourquoi ni comment ? Voilà une interrogation qu'on aurait pu ajouter à votre liste de questions à poser en commission. Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont pour que les questions soient posées et sont convaincus que les réponses seront données, parce que nous en avons déjà la plupart. Nous invitons simplement le MCG à se montrer de bonne foi pour une fois dans sa carrière politique. (Applaudissements. Commentaires.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Les Services industriels ont connu une période extrêmement difficile, et il faut reconnaître que l'épisode Ennova était une véritable catastrophe pour cette entreprise. L'ancien conseil d'administration n'a pas eu les informations nécessaires. Il y a eu des rétentions d'information, des faits extrêmement graves qui se sont passés. Quand le nouveau conseil d'administration a été mis en place au mois de novembre 2012 sous l'excellente direction de M. Peyrot, les choses ont été reprises en main. Nous avons demandé des explications, nous avons rempli notre devoir d'administrateurs, car je vous rappelle quand même qu'il y a eu un tsunami dans cette entreprise. Le directeur général s'en est allé, il y a deux enquêtes administratives contre deux autres directeurs. Ce sont des choses extrêmement graves. Nous attendons évidemment les résultats de la Cour des comptes, qui s'est penchée sur les Services industriels, ainsi que de l'ICF. On peut donc dire que le travail a été fait, et ce qui aurait pu occasionner la demande et le maintien de cette CEP aujourd'hui, c'est le fait que nous n'aurions pas pu régler le problème Ennova. Je vous rappelle qu'au mois de janvier, Ennova déposait une plainte contre les Services industriels, leur réclamant 176 millions de francs. Actuellement, nous venons de racheter l'entreprise entière - voilà quatre jours - pour 12,1 millions. Nous allons pouvoir contrôler cette entreprise qui a des compétences dans l'éolien, ce que les SIG n'avaient pas. Nous avons bel espoir de récupérer une partie de l'argent que nous avons investi, en faisant de l'éolien de façon beaucoup plus modeste que celle prévue au départ, mais certainement de l'ordre de 50 gigawatts par année, ce qui ne sera pas rien.
En ce qui concerne les administrateurs, je veux bien qu'on critique le fait que deux administrateurs aient accepté qu'on discute aujourd'hui, parce que c'est un droit démocratique. Si la gauche avait demandé qu'on se réunisse aujourd'hui pour discuter de la possibilité d'une CEP, j'aurais également accepté. Et pourquoi, en tant qu'administrateurs - M. Medeiros a fait la même chose - avons-nous accepté ? Si nous disions non, nous sous-entendions par là que nous avons quelque chose à cacher. Or les SIG n'ont rien à cacher ! Comme l'a dit le nouveau directeur M. Brunier - qui, entre parenthèses, commence son mandat extrêmement bien et de façon très claire - nous serons clairs sur Ennova, nous serons clairs sur le réseau FTTH - la fibre optique, donc - nous serons clairs sur tous les problèmes des SIG sur lesquels vous vous posez des questions. A ceux qui ont critiqué, je dirai que critiquer et faire la morale, c'est très bien, mais que réfléchir un petit peu plus loin que le bout de son nez, c'est mieux. Et puis je leur rappellerai ce vieux proverbe batave: les Hollandais ont de belles tulipes, car ils s'occupent de leurs oignons. (Rires.)
S'agissant de la diminution des actifs, ce qu'a dit M. Stauffer est absolument hallucinant ! Nous avons diminué les actifs de 180 millions. C'est en effet un gros chiffre. Mais enfin, quand on diminue les actifs d'EDH, les barrages sont toujours présents ! Il faut toujours de l'électricité ! Peut-être l'achat à 300 millions était-il un peu élevé...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur.
M. Eric Leyvraz. ...mais rappelons simplement que sur ces 300 millions, nous avons touché 15 millions l'année passée. Cela fait 5% de rendement, ce qui n'est pas mal. Je terminerai simplement en disant que les SIG représentent 1600 personnes qui ont souffert de cette situation, qu'il s'agit maintenant de tourner la page, que dans les métiers qu'elle connaît, cette entreprise fait un travail extraordinaire. Vous avez la meilleure eau du monde, vous avez le moins de pannes d'électricité au monde - quatre minutes par personne par année, ce n'est rien du tout ! - vous avez un réseau de gaz remarquable, vous avez un réseau de chaleur à distance remarquable...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Eric Leyvraz. ...et des économies d'énergie remarquables. Tournons la page et laissons les SIG avancer. Ne faisons pas de CEP. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je prie la personne debout à la tribune de bien vouloir s'asseoir. Merci. La parole est à Mme la députée Salika Wenger.
Mme Salika Wenger (EAG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je vais vous dire une chose: ce matin, j'ai l'impression d'être cocue ! (Exclamations.) J'ai accepté de venir siéger lors d'une séance extraordinaire un samedi matin pour des motions ! Nous savons tous que les motions ne sont pas contraignantes. J'ai donc imaginé, dans mon innocence première, que le MCG et l'UDC avaient des éléments nouveaux à nous présenter sur ces deux objets, qui auraient justifié la convocation. Or, au bout du compte, nous avons deux objets qui ne servent strictement à rien et nous sommes là en train de perdre notre temps mais, surtout, nous sommes en train de faire la campagne du MCG ! Premier amendement: je me demande si cette assemblée ne devrait pas facturer cette séance à l'UDC et au MCG, qui est en train de faire sa campagne ! (Brouhaha. Commentaires.) Une campagne sur deux objets qui, somme toute, auraient parfaitement pu être traités en commission. Nous demander en plus la création de commissions extraordinaires alors que nous avons tous les outils pour traiter de ces objets, c'est une mauvaise plaisanterie ! Nous perdons notre temps ! Nous dépensons l'argent des contribuables, nous faisons la campagne d'un groupe qui est malhonnête ! Vraiment malhonnête ! Vous êtes en train, Mesdames et Messieurs du MCG et de l'UDC, de dénoncer la politique populiste que vous menez en permanence, et maintenant vous venez en pleurer ! (Huées.) Vous venez pleurer les conséquences de cette politique !
Le président. Silence, s'il vous plaît !
Mme Salika Wenger. Alors, de grâce, on arrête les frais, je ne discuterai pas sur le fond... (Exclamations.) ...et le fait d'être venus ici est une pure arnaque !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Baud, si vous voulez bien vous retirer. Monsieur Cerutti, vous voudrez bien aller discuter dehors, ce serait gentil, merci. La parole est à M. Carlos Medeiros.
M. Carlos Medeiros (MCG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, en tant que député, j'ai aussi été élu administrateur des Services industriels. Je commencerai par rendre hommage aux 1700 collaborateurs de cette entreprise qui travaillent tous les jours, qui font que vous avez de l'électricité, que vous pouvez boire de l'eau, que vous avez du gaz. Ce n'est pas à eux de payer les pots cassés et les erreurs commises tout en haut de la pyramide, par la direction générale notamment. Qu'est-ce que nous demandons aujourd'hui ? Nous demandons que cette commission se penche sur le rôle joué notamment par le Conseil d'Etat de l'époque, parce que je tiens quand même à vous dire qu'à l'époque, il y a eu une discussion politique. Cette décision, c'est un magistrat Vert - M. Cramer - qui l'avait prise en insufflant 250 millions dans les énergies renouvelables, mais - M. Velasco, qui était là à l'époque, pourra vous le dire - sans pour autant prendre de précautions d'usage et déterminer si oui ou non les Services industriels étaient en mesure de pouvoir appliquer ce montant à bon escient. Or les Services industriels - je l'ai appris par des gens de l'intérieur - se sont retrouvés coincés par le pouvoir politique qui disait: «Allez-y, vous avez l'enveloppe, débrouillez-vous.» Ils se sont retrouvés dans une situation un petit peu - comment dirais-je ? - ahurissante, et disaient: «Nous n'avons ni les compétences ni les moyens en ressources humaines, et on nous oblige à y aller.» Résultat des courses ? Il y a eu des errements, de grosses - et très grosses - erreurs au niveau dans la gestion, que nous payons aujourd'hui très cher. Voilà la première chose que je voulais dire.
Concernant ensuite le rôle du conseil d'administration, pour ceux notamment - vous transmettrez à M. Gautier, Monsieur le président - qui exigent de dépolitiser les conseils d'administration et de les professionnaliser, je répondrai très simplement ceci: que vous soyez un professionnel des conseils d'administration - si ça existe - que vous soyez un élu du peuple ou que vous soyez nommé par le Conseil d'Etat, vous vous prononcez selon le degré d'information qu'on vous donne ! Je n'ai ni la compétence ni les autorisations nécessaires pour aller fouiller dans les tiroirs de la direction générale, pour aller voir les contrats qui ont été très, très mal négociés - quand on dit mal, c'est à la limite de l'incompétence totale - je n'ai pas ce pouvoir-là. Je me prononce sur des objets qui sont mis sur la table lors de discussions qui durent moins de dix minutes. Que vous soyez un professionnel ou un élu de milice, vous êtes exactement au même niveau d'information. Oui, Mesdames et Messieurs, aujourd'hui nous avons besoin de cette commission ! Nous avons besoin de cette commission pour que toutes les responsabilités soient établies tant au niveau de la direction générale qu'au niveau du pouvoir politique qui a créé cette situation conduisant à la perte de millions et de millions de francs suisses pour les contribuables genevois.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG et l'UDC nous demandent d'ouvrir une commission d'enquête parlementaire au sujet des SIG, et en particulier de ses investissements à risque, dans un mélange des genres assez cocasse, où l'on voit des super-députés administrateurs réaliser un numéro d'équilibrisme en jonglant avec leurs casquettes. Si nous reconnaissons que, par le passé, il y a plus de 18 mois, les SIG ont eu une approche téméraire sur certains dossiers et des pratiques peu transparentes, l'outil proposé ne nous semble pas pertinent. Pour quelles raisons ? Tout d'abord parce que la Cour des comptes planche actuellement sur ces questions et devrait rendre prochainement les conclusions de six mois de travail. Nous accordons une grande importance à notre rôle de haute surveillance et nous engageons à nous saisir des conclusions de la Cour des comptes pour prendre les mesures nécessaires. Toutefois, alors que l'on parle de bon usage des deniers publics, ouvrir aujourd'hui une commission d'enquête parlementaire est irrationnel ou relève plus simplement de l'opportunisme politique. En effet, ce serait un doublon du travail réalisé par la Cour des comptes, mais avec un calendrier différé. Est-ce que cela signifie que le MCG et l'UDC souhaitent en réalité repousser le moment où nous nous occuperons de ce sujet à janvier 2015 - c'est en effet la date qu'ils retiennent pour que la CEP rende son rapport - alors que nous pourrions nous pencher sur le dossier immédiatement ? Le MCG et l'UDC souhaitent-ils engager de nouveaux frais pour effectuer un travail déjà réalisé ? Par ailleurs, est-il pertinent que les parlementaires se chargent eux-mêmes de mettre leur nez dans ces investissements alors que des compétences très pointues sont nécessaires, notamment financières ou en matière de droit contractuel ? Dans ces conditions, nous serons forcés de faire appel à des experts, et la commission d'enquête parlementaire coûtera une jolie somme. Une dépense pour faire un doublon, c'est ridicule !
Mais venons-en plus précisément au sujet qui nous intéresse, à savoir le rôle des Services industriels de Genève. Je tiens d'abord à rappeler que les missions de base des Services industriels de Genève sont réalisées au quotidien, et ce parfaitement. La vaste opération de décrédibilisation de cette institution oublie que tous les jours, nous sommes éclairés, nous recevons de l'eau, et nos déchets sont traités. Elle écarte aussi le rôle de pionniers qu'ont joué les SIG en matière d'énergie verte et de programmes d'économies d'énergie. Concernant les investissements à risque, je tiens à rappeler ici que le Grand Conseil s'est engagé à atteindre la société à 2000 watts sans nucléaire. Des investissements à risque doivent être effectués dans cette orientation pour réaliser cet objectif, afin de permettre la transition énergétique. Il s'agit là d'une mission de service public. Cela signifie notamment investir dans les nouvelles énergies renouvelables, investir dans l'efficacité énergétique et les économies d'énergie. Il est essentiel que les SIG poursuivent cette mission de service public qui est seule à pouvoir garantir notre approvisionnement énergétique à long terme, alors que les ressources sont limitées. C'est également cet engagement qui garantira une souveraineté en matière énergétique. Les Verts rappellent ici leur engagement pour la transition énergétique et la nécessité de poursuivre ces investissements en faveur des nouvelles énergies renouvelables. En la matière, il reste passablement de pain sur la planche... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
Mme Lisa Mazzone. Je vous remercie. Il reste passablement de pain sur la planche, notamment pour développer le solaire photovoltaïque. Il nous semble important que notre Grand Conseil discute du fond. C'est pourquoi nous avons déposé des amendements, qui visent non pas à ouvrir une commission d'enquête parlementaire, mais à se pencher sur le fond en analysant le dossier en commission de contrôle de gestion. En particulier, nous remettons en question la proposition faite dans cette motion de donner la possibilité au Grand Conseil d'amender les budgets des SIG. En effet, il s'agit ici d'une institution de droit public autonome, et il est essentiel qu'elle maintienne son autonomie. C'est la raison pour laquelle nous proposons ce deuxième amendement. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Bertrand Buchs pour trois minutes.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Je suis un peu déçu par ce débat, parce qu'on devrait discuter du fond de la question. Ce n'est pas une question d'enquête parlementaire ou pas: il s'agit de savoir à quoi servent les conseils d'administration. Je remercie M. Leyvraz d'avoir pris la parole pour dire qu'il ne veut pas d'enquête parlementaire parce que le nouveau conseil d'administration a fait son travail. Mais alors pourquoi a-t-il signé ? On ne serait pas là s'il n'avait pas signé. Il y aurait eu 29 signataires, et nous ne nous serions pas réunis. Voici la question que pose le PDC: à quoi servent les conseils d'administration ? Ayez le courage de demander la suppression des conseils d'administration ! Ayez le courage de dire que le parlement veut avoir une gestion des régies en direct ! On supprime les régies, et le parlement a une gestion en direct ! A ce moment-là, vous pourrez faire les critiques et les attaques nécessaires. Mais, nom de bleu, vous avez des conseils d'administration, tous les partis sont représentés dans ces conseils d'administration ! Vous pouvez poser des questions. Monsieur Medeiros, en tant qu'administrateur, il ne faut pas venir dire que vous n'aviez pas les informations. Le rôle d'un administrateur, c'est d'exiger les informations ! Le rôle d'un administrateur, c'est de ne pas dormir durant les séances ! (Rires.) C'est tout ! Vous pouviez avoir ces informations, mais vous ne les avez pas demandées. Maintenant, vous venez dire que c'est au parlement de faire ce travail. Non ! Si le conseil d'administration ne fait pas son travail, alors le Conseil d'Etat doit décider de supprimer les conseils d'administration, qui coûtent cher et ne servent à rien. Le PDC, lui, a été plus loin. Il a réfléchi en se demandant ce qui ne marchait pas dans cette histoire. Et je remercie M. Renaud Gautier, ainsi que M. Eric Stauffer, de nous dire depuis des années que les risques sont mal mis en avant. Les risques ne sont pas dans le budget. Il n'y a pas de réserves pour les risques. M. Gautier le dit et répète depuis des années. C'est là qu'il y a un problème. Le PDC a déposé une motion, qui demande que le gouvernement réfléchisse à l'idée de scinder les Services industriels en deux sociétés, une pour les services et une autre qui prend les risques. Ainsi, l'Etat n'a pas à assumer tous les risques avec les communes. Je vous remercie.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, on a entendu beaucoup de choses. On a entendu beaucoup de bêtises aussi, notamment de la part de mon dernier préopinant, qui prétend que les conseils d'administration ne servent à rien. Un conseil d'administration sert à quelque chose pour autant que l'opérationnel, la direction générale, donne les bonnes informations aux administrateurs, afin qu'ils puissent prendre les bonnes décisions. Mais quand on voit que dans l'affaire Ennova, j'ai eu entre les mains le contrat Juel III - celui qui engageait le canton de Genève au travers des SIG pour pratiquement un milliard de francs - avant les administrateurs des Services industriels eux-mêmes - et pas en tant que député ! - et qu'on leur a demandé de se prononcer sur ce contrat sans avoir les éléments, je trouve cela préjudiciable pour le fonctionnement des institutions. Ce n'est pas la faute du conseil d'administration, entendons-nous bien. C'est la faute des Services industriels. Vous croyez, Mesdames et Messieurs, que les Services industriels...
M. Vincent Maitre. C'est quoi, la différence ?
M. Eric Stauffer. L'opérationnel, Monsieur Maitre - il faudrait évidemment que vous soyez dans un conseil d'administration pour le comprendre - s'occupe de l'opérationnel, tandis le conseil d'administration s'occupe des impulsions stratégiques mais n'est pas dans l'opérationnel. Vous verrez, quand vous grandirez, vous aurez plus d'expérience de vie, et vous saurez ce qu'est un conseil d'administration ! (Quelques applaudissements.) Maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, vous pensez que tout se passe bien aux Services industriels, qu'ils ont compris la leçon. Je vous le dis, et je vous le démontrerai dans les semaines qui viennent: les Services industriels continuent à dysfonctionner ! J'ai ici, Mesdames et Messieurs, la copie d'une nouvelle plainte contre les Services industriels déposée par l'un de leurs partenaires. J'ai demandé à ce qu'ils sursoient au dépôt de cette plainte pour qu'on puisse essayer de régler le problème en amont. Le dossier est là ! Je me suis permis d'impliquer aussi le président de la commission de contrôle de gestion dans cette discussion, parce que les Services industriels continuent à jouer aux cow-boys ! Ils violent leur obligation contractuelle, ils demandent des audits alors qu'ils savent très bien d'où sont venues les réponses et les erreurs, puisqu'elles viennent d'eux-mêmes. Je vous le dis, Mesdames et Messieurs, on peut faire la politique de l'autruche, mettre la tête dans le sable et dire que tout va bien...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Eric Stauffer. Eh bien, non ! Tout ne va pas bien aux Services industriels. Cette régie dysfonctionne. Nous avons voulu M. Brunier comme directeur général et nous avons confiance en lui. Mais rappelez-vous qu'une commission d'enquête parlementaire ne nuira pas aux Services industriels.
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Eric Stauffer. Au contraire, elle va pérenniser l'institution et faire table rase du passé pour repartir sur de bonnes bases, car les Services industriels le méritent.
Le président. C'est terminé. Merci, Monsieur le député. Je rappelle aux personnes qui sont à la tribune qu'il est interdit de photographier. Merci. La parole est à M. le député Rémy Pagani.
M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, nous ne voyons pas la nécessité d'une commission d'enquête, d'autant plus que j'ai déposé, en décembre 2013 et au nom du Conseil administratif de la Ville de Genève, une demande à la Cour des comptes pour investiguer sur l'ensemble des points que vous avez soulevés. La Cour des comptes va nous répondre avant l'été, notamment sur l'affaire Ennova et les problèmes de gouvernance. Je ne vois donc pas non plus l'utilité d'une invite visant à amender les budgets des SI, d'autant plus que nous, Grand Conseil et Conseil d'Etat, ne sommes pas les seuls actionnaires, d'autant plus que le Tribunal fédéral a déjà sanctionné plusieurs fois - ou en tout cas une fois - les agissements de la commission des finances qui mettait la main dans la caisse pour prendre de l'argent aux Services industriels. Je vous propose de supprimer ces invites-là. Toutefois, Mesdames et Messieurs, je suis pour que chacun fasse son boulot. En l'occurrence, nous sommes dans une république. Le Grand Conseil doit contrôler le Conseil d'Etat, et le Conseil d'Etat est notre exécutif. Mesdames et Messieurs, je prends juste un petit exemple mais il y en a d'autres, et ces exemples sont publics: je crois que quand Mme Rochat, magistrate de tutelle - parce que c'est inscrit dans la loi - n'est pas là pour contrôler les activités des Services industriels - au même titre d'ailleurs que nous le sommes ou que je le suis comme actionnaire minoritaire - il y a une responsabilité du gouvernement. J'entends bien avoir des explications sur la responsabilité du gouvernement. Pourquoi M. Maudet, par exemple, a-t-il validé toute une série d'investissements ? Il est responsable, non seulement au même titre que l'administrateur, mais aussi au titre d'autorité de surveillance. Pourquoi le Conseil d'Etat a-t-il renoncé à la centrale chaleur-force à gaz ? J'entends avoir des explications. Je sais que le Conseil d'Etat prend des décisions sous forme d'arrêtés - ou alors il ne fait pas son boulot. J'ai besoin d'avoir ces arrêtés, et c'est à ce titre-là que nous restons dans notre rôle de Grand Conseil, qui est un organe de contrôle du gouvernement, et que nous ne dérapons pas en nous mettant à la place de l'opérationnel ou à celle de l'exécutif. Je vous propose donc un amendement que j'ai formulé, qui est soutenu à l'heure actuelle par les socialistes. Je crois qu'il est de bonne politique de garder les uns et les autres d'une part la tête froide, d'autre part le rôle qui nous est assigné par la constitution. Je vous remercie de votre attention. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pierre Vanek, à qui il reste quarante-sept secondes.
M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais relever deux choses. Il est évidemment indispensable de supprimer la possibilité pour le Grand Conseil d'amender les budgets des SIG, simplement parce que nous ne sommes actionnaires des SIG qu'à hauteur de 55%. D'un autre point de vue, on peut être d'accord avec la velléité de considérer qu'il faut limiter l'autonomie d'un certain nombre de régies publiques, qu'il faudrait à la limite les rapatrier et qu'il faudrait un rôle plus fort de l'Etat. Mais là, ce n'est pas très sérieux.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Pierre Vanek. Sur le fond du sujet, je l'ai dit lors de ma première intervention, nous sommes contre la commission d'enquête parlementaire mais pour que toutes les questions soient posées et que cette motion soit - comme nous l'avons voté pour la précédente - renvoyée...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Pierre Vanek. Je conclus, Monsieur le président. ...renvoyée à la commission de contrôle de gestion qui est outillée pour répondre à ces questions-là et à un certain nombre d'autres en complément de la Cour des comptes.
Le président. Merci, Monsieur le député, c'est terminé. Je cède la parole à M. le député Roger Deneys. Il vous reste cinquante-deux secondes, Monsieur.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont en faveur du renvoi de cette proposition de motion avec les amendements à la commission de contrôle de gestion. Cela permettra de faire un état des lieux, et j'espère qu'il sera serein. Je pense qu'il ne faut pas non plus vouloir détruire cette entreprise qui génère à peu près 100 millions de bénéfices par année, et qui a un chiffre d'affaires d'un milliard par année. D'une certaine façon, faire croire que cette entreprise dysfonctionne au moindre souci sur un investissement à long terme, ce n'est pas correct et même mensonger.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Bertrand Buchs pour cinquante-deux secondes.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Ce sera court. Pour répondre à M. Eric Stauffer, M. Vincent Maitre, lorsqu'il aura grandi, dans quelques années, offrira à M. Eric Stauffer le code des obligations. Il pourra ainsi y lire certains éléments importants.
Je n'aime pas qu'on vienne chaque fois nous dire, en intervenant: «J'ai des preuves que ça ne va pas ! Moi, je sais, et j'ai des preuves que ça ne va pas !» Monsieur Stauffer, vous nous faites le coup à chaque fois, avec vos preuves. Lundi, à la commission de contrôle de gestion, je demanderai l'audition de M. Eric Stauffer, comme je l'ai déjà fait une fois, pour qu'il dépose toutes ses preuves sur le bureau de la commission de gestion. La dernière fois que je l'ai fait - je n'ai toujours pas compris son intervention ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, en reprenant le département de l'aménagement et du logement, joint à l'énergie, je savais que je reprenais une régie publique qui est l'instrument principal de notre politique énergétique, qui connaissait et qui connaît toujours certaines difficultés. Je m'en suis rapidement ouvert à vous lors de l'adoption du budget des SIG au mois de décembre, avec un engagement qui était celui de stabiliser le fonctionnement de cette entreprise, notamment au niveau de la direction. Le deuxième engagement était de faire la vérité sur les difficultés que nous avons connues et que nous connaissons encore. Ce processus est en cours, Mesdames et Messieurs, mais nous avançons. Tout d'abord, nous avons actuellement un nouveau directeur général. M. Brunier, que beaucoup d'entre vous connaissent, est quelqu'un qui connaît extrêmement bien la maison. Il a assumé différents rôles à l'interne, et c'est à une très large majorité - voire à l'unanimité - qu'il a été choisi dès le premier tour au sein du conseil d'administration, ce qui lui donne une assise confortable. A M. Brunier vient maintenant s'ajouter une nouvelle présidence du conseil d'administration, celle de Michel Balestra, un homme d'expérience qui connaît le monde des industries privées, mais également celui des régies publiques - il a présidé avec succès aux destinées des Hôpitaux universitaires de Genève - un homme qui connaît aussi le monde politique, car ce n'est pas rien de présider une régie publique dans cette république. C'est avec ces deux personnes et votre serviteur comme nouveau magistrat que nous entamons une démarche de clarification, de vérification et de mise à plat des difficultés que les SIG ont connues. Ces difficultés sont réelles, et le premier pas est de le reconnaître. C'est pourquoi... (Brouhaha.) S'il vous plaît, Messieurs !
Des voix. Chut !
M. Antonio Hodgers. Merci. C'est pourquoi nous avons tenu à ce que les comptes 2013 intègrent une forte dépréciation des actifs des SIG ainsi que, plus particulièrement, une provision de 30 millions pour l'éolien. Voilà un acte de vérité. C'est un choix, parce que, comme il a été dit, il ne s'agit pas d'une perte. Le fonctionnement n'a pas perdu d'argent. Le contribuable n'est absolument pas touché par cette décision. Les SIG ont fait 129 millions de bénéfice. Cette dépréciation d'actifs est un premier acte de vérité, un acte de prudence qui vient compenser des années d'euphorie dans ce qu'on estimait - ce qu'on estime toujours - être de nouveaux marchés prometteurs. Aujourd'hui, nous venons réguler ce qui a peut-être été une bulle dans le marché de l'éolien. On a cru qu'on allait pouvoir construire rapidement beaucoup d'éoliennes: eh bien non, ce n'est pas le cas; le marché ne va pas aussi vite. C'est une nouvelle industrie qui, comme toute nouvelle industrie - pensez à l'histoire du nucléaire, qui s'est faite de manière beaucoup plus chaotique et beaucoup plus lente - nécessite du temps et met beaucoup d'années à être rentabilisée. C'est l'un des premiers éléments forts que nous avons voulu marquer. La vérité, c'est cette dépréciation très prudente de 188 millions. Est-ce que cela mérite une enquête ? Non, c'est un choix; c'est un choix du conseil d'administration d'être prudent. Il y a quelques années, quand les SIG ont reçu une soulte de 92 millions d'Alpiq - 92 millions qui sont venus s'ajouter à l'actif - le parlement a-t-il dit qu'il fallait une commission d'enquête, parce que le marché nous donnait soudain 90 millions ? Non, cela fait partie des mécanismes usuels d'une entreprise. J'insiste encore une fois là-dessus: c'est un principe de vérité qui nous a conduits à faire cette dépréciation.
Cela a été dit et je le répète: les SIG, ce n'est pas que ces affaires-là. Les SIG, ce sont 1700 collaborateurs qui, chaque jour de l'année, amènent de l'eau, de l'électricité, du gaz dans certains foyers, gèrent les déchets. Les Genevois n'ont été touchés en rien par ces affaires et bénéficient au quotidien de ces prestations publiques. Je tiens à rendre ici hommage à l'ensemble des collaborateurs des SIG, qui sont salis par toutes ces dénonciations - ou pseudo-dénonciations - et qui ne méritent pas autant, car ils font un métier important dont la population bénéficie.
Maintenant, j'aimerais faire quelques commentaires sur les trois domaines concernés par ces dépréciations. Tout d'abord, EDH, à savoir les investissements des SIG dans l'électricité d'origine hydraulique. Mesdames et Messieurs, il s'agit là d'une dépréciation que tous les électriciens connaissent. Nos compatriotes valaisans, beaucoup plus que nous, subissent aujourd'hui de plein fouet la baisse du prix de l'électricité européenne qui, elle-même, est liée à l'explosion du gaz de schiste aux Etats-Unis. Vous savez qu'en Allemagne, les mines de charbon ont été rouvertes, que l'hydraulique est concurrencé par un prix du kilowatt-heure très bon marché au niveau européen, ce qui a amené une dépréciation de nos actifs dans l'hydraulique. Voilà. C'est pareil pour toutes les entreprises d'électricité de Suisse et même d'Europe. Il s'agit d'une affaire relativement simple. On peut regarder les détails, on peut regarder les chiffres, mais globalement, ce domaine est simple.
La fibre optique ? Voilà un autre sujet, qui pose des questions de gouvernance. En effet, si l'on peut considérer que l'électricité, l'eau, le gaz et les nouvelles énergies renouvelables sont des objectifs publics, appartient-il à une entreprise publique - c'est-à-dire à l'Etat et à son extension - de livrer du réseau haut débit pour que les ménages puissent voir des films à très haute qualité d'image ? On peut se poser la question. Pour ma part, je n'ai pas de religion faite là-dessus, mais je considère que la nature de cette activité n'est pas à mettre au même niveau que celle des activités de base des SIG. Mais cela a fait l'objet d'un choix du conseil d'administration, d'un choix politique. A nouveau, cet investissement a été surestimé, et l'on vient aujourd'hui le revoir à la baisse, parce que les objectifs commerciaux de vente de cette fibre ne sont pas au rendez-vous.
Enfin vient l'éolien. Dans ce cas, il y a des raisons structurelles que j'ai expliquées: l'éolien prend plus de temps en Suisse, parce que tout prend du temps en Suisse, c'est la démocratie directe. Les autorisations de construire et tous les processus font que tout l'éolien suisse est en retard par rapport à ce qu'on avait prévu. Ceci est vrai tant pour l'éolien jurassien que pour l'éolien alpin ou celui de Suisse alémanique. Or, là-dessus vient se greffer un autre problème très clair, celui que nous avons connu dans le cadre de nos investissements dans la société Ennova. On se trouve là clairement dans des enjeux de gouvernance qu'il ne faut pas minimiser.
Il y a une vingtaine d'audits en cours au sein des SIG, qui seront terminés d'ici cet été, notamment celui de la Cour des comptes, qui aboutira avant la pause estivale et sera rendu public. Globalement, il est évident que les cadres et les directeurs ont en partie manqué à leur devoir de contrôle, de vérification et de diligence par rapport aux informations qui ont été remontées à la hiérarchie. C'est juste. Je dirais qu'en termes de gouvernance, les entrepreneurs nécessaires à toute entreprise - ceux qui vont chercher les nouveaux marchés, qui prennent les risques - n'ont pas été assez compensés par les financiers, ceux qui contrôlent et qui freinent un peu les ardeurs. Une entreprise doit avoir un bon équilibre entre ces deux profils. Dans ce cas-là, le profil enthousiaste, entrepreneurial a pris le dessus sans les contrôles nécessaires. Mais, Mesdames et Messieurs, l'histoire n'est pas aussi simple. J'ai en ma possession la note qui a été remise au conseil d'administration des SIG pour le fameux contrat Juel III. Cinq pages en taille de police huit, très détaillées ! Le comité d'audit et risques, délégation du conseil d'administration des SIG, s'est penché avant le conseil d'administration sur le contrat Juel III. Il a fourni toutes les recommandations positives. Je ne peux pas dire grand-chose à propos de ce document, mais le fameux prix contesté de 800 000 F le mégawatt y était indiqué ! Il y avait aussi le prêt contesté de 33 millions ! Les administrateurs ont donc eu toutes ces informations. Ils ont pu poser des questions quant aux informations qui ne figuraient peut-être pas dans ce document. L'unanimité des administrateurs a voté le contrat Juel III. Je ne les critique pas, parce que j'aurais peut-être fait de même à leur place; ce sont des choix difficiles, qui impliquent que l'on peut parfois se tromper. Mais quand on se trompe, il faut assumer qu'on a pu se tromper, que ce soit sur le choix stratégique de conclure le contrat Juel III ou tout simplement parce qu'on n'a pas posé les bonnes questions. Permettez-moi de répondre au député Sanchez, qui veut donner des cours sur les commissions d'enquête: peut-être pourrait-il plutôt donner des cours sur ce que c'est que d'être administrateur ! Etre administrateur, ce n'est pas être une caisse d'enregistrement ! Ce n'est pas juste dire oui ou non aux informations qu'amène la direction ! Etre administrateur, c'est challenger la direction ! C'est demander plus d'informations quand on n'est pas convaincu ! Etre administrateur, c'est refuser de voter des documents qui viennent trop tard ! Voilà ce que c'est, être administrateur. Mais c'est aussi prendre des risques. Parce que la conséquence de tout cela, c'est que maintenant, certains administrateurs ne votent plus rien; ils s'abstiennent à chaque décision. Evidemment, la société continue de tourner, et il faut prendre des décisions. Mais ils se disent: «Politiquement, c'est risqué de voter ce contrat. Je n'ai rien à dire maintenant, parce que tout a l'air bien, mais qui sait ce qui peut se passer dans trois ans ?» S'abstenir à chaque décision, ce n'est pas non plus être administrateur. Etre administrateur, c'est en premier lieu défendre l'intérêt de l'entreprise dans laquelle on siège. Voilà où va la première loyauté des administrateurs.
Concernant la suite, nous attendons les résultats des audits avec impatience, moi le premier. Mais sachez que j'ai déjà entrepris un certain nombre de mesures depuis mon arrivée dans le département, la première étant de vouloir rétablir la confiance du conseil d'administration, de le restaurer dans son autonomie. Je n'aime pas le terme «ministre de tutelle»; je vous demanderai de ne plus l'utiliser. Les SIG ne sont pas une pupille, ils n'ont pas besoin de tuteur. C'est une grande entreprise avec un conseil d'administration et une direction générale. Le Conseil d'Etat - et mon département en particulier - est l'autorité de surveillance, comme vous êtes celle du Conseil d'Etat. Ce sont des rapports normaux. A mon sens, le terme de tutelle est mal choisi et illustre peut-être un peu trop la vision infantilisante que l'on donne de ce conseil d'administration. Ce n'a pas été mon choix. Mon choix, dès le mois de janvier, a été de mener une politique de responsabilisation des administrateurs, ce qu'ils ont fait dans le cadre d'Ennova. Le Conseil d'Etat leur a imposé un cadre général, à savoir celui de ne pas renoncer à l'éolien comme instrument de nouvelles énergies renouvelables, et de trouver un accord avec Ennova. En quatre mois, Mesdames et Messieurs, cet accord a été trouvé. Il a été trouvé à un prix qu'on n'aurait jamais imaginé auparavant, puisque toutes les tentatives précédentes évaluaient l'entreprise entre 40 et 70 millions. En quatre mois, les administrateurs et l'équipe de négociateurs de la direction des SIG ont réussi à trouver un accord qui fait de Genève, virtuellement et sur le papier, le premier possesseur de parcs éoliens de Suisse. Tout cela est évidemment très théorique. Il nous appartient maintenant d'évaluer ces parcs, de déterminer ceux qui peuvent être réellement fonctionnels et ceux qui ne le peuvent pas. Il s'agit d'une nouvelle orientation politique et je dis ceci très clairement: autant je suis attaché au développement de l'éolien en Suisse, autant j'estime que le canton de Genève n'a pas à porter seul cette politique éolienne. Si, sur le papier, Genève possède aujourd'hui presque 70% des parcs éoliens suisses, j'entends que demain, ces parcs soient partagés avec des partenaires publics des autres cantons qui, eux, construisent les mâts, installent dans leurs communes ces éoliennes, et, par conséquent, qu'on ait par la suite un partage de l'énergie éolienne.
Pour la suite de la gouvernance, Mesdames et Messieurs, je vous ai dit les orientations que j'entends prendre. Mais, finalement, l'essentiel de la gouvernance vous appartient. Le Conseil d'Etat nomme quatre administrateurs, dont le magistrat et le président. Vous, Grand Conseil, en nommez sept. Le Grand Conseil a ainsi plus de responsabilités que le Conseil d'Etat dans le conseil d'administration des SIG. Si l'on ajoute les quatre élus municipaux de la Ville de Genève et les trois élus municipaux des autres communes, on constate qu'il y a quatorze représentants des législatifs genevois contre quatre plus un - pour la Ville de Genève - soit cinq des exécutifs. En réalité, l'entreprise SIG est avant tout dirigée par les parlements de ce canton. C'est le choix du législateur, c'est le choix du peuple d'ailleurs, qui a refusé de voir cela. Vous comprendrez donc que, dans ces conditions, il est difficile de venir après coup demander des comptes au Conseil d'Etat, qui ne possède finalement qu'une toute petite minorité d'administrateurs.
Mesdames et Messieurs, s'agissant de la création d'une enquête parlementaire, l'instrument vous appartient. Pour ma part, j'ai le sentiment que cela pourrait devenir une usine à gaz dans laquelle on va brasser du vent pour finir par se noyer dans un verre d'eau. Peut-être que d'autres instruments d'enquête, comme la commission de contrôle de gestion, sont suffisants. Pour ma part, j'entends établir la vérité. Je serai à votre disposition pour vous fournir tout ce qui ne relève pas du secret de l'entreprise, quelle que soit la forme que vous choisirez de prendre pour la suite de vos travaux. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La demande de renvoi en commission étant retirée, nous passons au vote sur les amendements.
M. Eric Stauffer. Je demande le vote nominal sur tous les sujets !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous voterons nominalement sur tous les sujets. Le premier amendement a été déposé par Ensemble à Gauche et consiste à supprimer la première phrase - soit «à nommer une commission d'enquête parlementaire chargée notamment» - de même que les deux dernières invites, c'est-à-dire «de se prononcer sur une modification de la LSIG conférant au Grand Conseil la possibilité d'amender les budgets des SIG» et «de rendre rapport au Grand Conseil sur le résultat de ces investigations d'ici au 30 janvier 2015».
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 18 non (vote nominal).
Le président. Par conséquent, l'amendement proposé par le parti socialiste, consistant également à supprimer la première phrase, est caduc. Nous passons au second amendement d'Ensemble à Gauche, qui demande l'ajout de l'invite suivante: «de contrôler toutes les décisions du Conseil d'Etat comme organe de tutelle des SIG et d'identifier sa responsabilité quant aux investissements de cette régie publique».
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 51 oui contre 39 non (vote nominal).
M. Eric Stauffer. Je demande le renvoi à la commission de contrôle de gestion !
Le président. Très bien, nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission de contrôle de gestion, que je soumets à vos votes.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2205 ainsi amendée à la commission de contrôle de gestion est adopté par 70 oui contre 17 non et 3 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
La version amendée porte le numéro M 2205-I.