République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Antoine Droin, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet, Mauro Poggia et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco et Luc Barthassat, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Beatriz de Candolle, Edouard Cuendet, Emilie Flamand-Lew, Cyril Mizrahi, Salima Moyard, Ivan Slatkine, Salika Wenger et Daniel Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Christophe Aumeunier, Alexis Barbey, Delphine Klopfenstein Broggini, Marion Sobanek, Nicole Valiquer Grecuccio, Georges Vuillod et Yvan Zweifel.

Annonces et dépôts

Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:

Pétition pour la préservation du caractère historique de la cour du Collège Calvin : Non à la destruction d'un site classé ! (P-1896)

Pétition 1896

Le président. Avant de poursuivre notre ordre du jour, je vous informe que la séance de 20h30 est annulée; nous finirons donc à 19h. (Commentaires.)

Une voix. Bravo !

PL 10982-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Jacques Jeannerat, Edouard Cuendet, Gabriel Barrillier, Pierre Weiss, Guillaume Barazzone, Christophe Aumeunier, Jean Romain, Stéphane Florey, Jacques Béné, Antoine Barde, Serge Hiltpold, Daniel Zaugg, Antoine Bertschy, Charles Selleger, Eric Bertinat, Frédéric Hohl, Michel Ducret, Alain Meylan, Eric Leyvraz, Bernhard Riedweg, Nathalie Schneuwly, Fabiano Forte, Philippe Morel, Anne Marie von Arx-Vernon, Serge Dal Busco, Guy Mettan modifiant la loi sur les heures d'ouverture des magasins (LHOM) (I 1 05)
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Serge Hiltpold (PLR)
Rapport de première minorité de M. Roger Deneys (S)
Rapport de deuxième minorité de M. François Lefort (Ve)

Suite du premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos travaux sur le projet de loi 10982. Je prie... (Remarque.) Monsieur Aellen, ça concerne le projet de loi ?

M. Cyril Aellen.  Ça concerne la séance de 20h30 !

Le président. Je n'ouvre pas le débat là-dessus, Monsieur Aellen. (Commentaires.) Je n'ouvre pas le débat là-dessus, nous travaillons sur le projet de loi 10982 !

Une voix. Motion d'ordre !

Le président. Non, il n'y a pas de motion d'ordre là-dessus ! (Protestations. Commentaires.) Non, je ne fais pas voter de motion d'ordre, c'est une prérogative du Bureau, je ne discuterai pas. Nous avons eu une réunion avec le Bureau et les chefs de groupe... (Commentaires.) ...le sujet est clos !

Une voix. C'est quoi qui a été décidé ? On n'a pas compris ! (Brouhaha.)

Le président. J'ai dit qu'il n'y aurait pas de séance à 20h30, Monsieur. (Protestations.) Je passe la parole à M. François Lefort. Non, pardon, à M. Michel Amaudruz.

M. Michel Amaudruz (UDC). Je vous remercie, Monsieur le président. Les esprits sont un peu agités parce qu'on n'aura pas le plaisir de se revoir ce soir à 20h30, mais je sais que je vous reverrai prochainement...

Le président. Certainement !

M. Michel Amaudruz. ...donc je me sens tout sauf marri !

Je reviens à la question de ce projet de loi. Je pense, Monsieur le président, qu'il est peut-être essentiel de souligner une chose, c'est que la boulangerie-pâtisserie vit actuellement des heures particulièrement difficiles, ce qui semble avoir échappé à un certain nombre d'intervenants, dont aux deux orateurs qui présentaient le rapport de minorité. Il faut quand même savoir qu'aujourd'hui, en Suisse, au cours de ces dernières années... (Brouhaha.) ...cent boulangeries ont été fermées...

Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le député !

M. Michel Amaudruz. Pardon, Monsieur le président ?

Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur. (Commentaires.)

M. Michel Amaudruz. Je disais, cent boulangeries ont été fermées par an. Donc, il est vital que pour cette branche de l'économie, on laisse la plus grande autonomie possible et la plus grande flexibilité. Moyennant quoi - puisqu'il me reste dix secondes - je dirai que les amendements proposés par les rapporteurs de minorité sont totalement irréalistes, et qu'il faut approuver ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Danièle Magnin, pour cinq secondes !

Mme Danièle Magnin (MCG). Merci, Monsieur le président. La convention collective de travail nationale de travail sur la boulangerie-pâtisserie prévoit, en son article 15, que la durée de travail hebdomadaire est de 42 heures...

Le président. Il vous faut conclure ! (Commentaires.)

Mme Danièle Magnin. ...et la semaine de 5 jours ! Donc l'amendement des Verts n'a pas de raison d'être.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Marion Sobanek. (Remarque.) Ah, alors ce sera à Mme Schneider Hausser.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la concurrence déloyale dont il a été question jusqu'à maintenant a bon dos, dans ce débat. Ce qui est en jeu, in fine, c'est l'ouverture totale, sans limites, de tous les commerces, c'est-à-dire ce qui est désiré par les bancs de droite. D'un côté, nous avons la non-limite de la consommation - ici du gluten - et derrière cela le profit. De l'autre, nous avons une valeur sociétale revendiquée de tout temps par les travailleurs, soit un jour de repos dans la semaine. Et au milieu de cela, nous avons la volonté du parti socialiste de privilégier les artisans boulangers locaux via les amendements que nous avons proposés. Alors vous avez le choix d'une solution qui promeut le travail et les artisans locaux, ou le choix d'un projet de loi complètement libéral qui promeut le libéralisme total dans le domaine de la boulangerie, et qui tuera, à terme, justement, les boulangers locaux, qui ne pourront pas concurrencer des grandes entreprises industrielles de boulangerie. Merci beaucoup de voter nos amendements.

M. Cyril Aellen (PLR). Monsieur le président, je souhaiterais faire application de l'article 79A, qui dit qu'un député peut en tout temps interrompre le débat pour inviter le Bureau à faire appliquer le règlement ! Et selon le règlement, il est de la compétence du Grand Conseil de pouvoir trancher ou non son ordre du jour; l'article 6 - auquel il n'a même pas été fait référence officiellement, mais on le sait par nos chefs de groupe - précise que la convocation doit être envoyée par le Bureau, précisément parce qu'on ne peut pas réunir le Grand Conseil pour envoyer des convocations, cela paraîtrait totalement ridicule. Mais si on peut, nous, disposer de notre ordre du jour, on peut disposer de notre ordre du jour et de la problématique de nos sessions, et je souhaiterais que vous puissiez rappeler ce règlement et que le Grand Conseil valide, ou non, la session de 20h30 ! (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. S'il vous plaît ! Monsieur le député, je vous rappelle les deux premiers alinéas de l'article 7 de notre loi portant règlement du Grand Conseil:

«Art. 7 Contenu des convocations

1 Chaque session comprend une ou plusieurs séances.

2 Les convocations adressées à chaque député pour une ou plusieurs séances doivent contenir:

a) l'indication du lieu, des jours et des heures des séances prévues;

b) l'ordre du jour de ces séances.»

Les motions d'ordre ne concernent que l'ordre du jour, c'est pour cela qu'il y a deux lettres. (Remarque.) Le Bureau l'a décidé, il en sera ainsi. (Huées. Applaudissements.) Je passe la parole à M. Lionel Halpérin.

M. Lionel Halpérin (PLR). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. M. Lionel Halpérin s'interrompt.)

Le président. Monsieur Halpérin, allez-y !

M. Lionel Halpérin. Merci, Monsieur le président. En application de l'article 79A de la loi portant règlement du Grand Conseil, je souhaite interrompre les débats... (Commentaires.) ...pour permettre l'application correcte du règlement. Vous avez lu à juste titre l'article 7 du règlement, qui prévoit effectivement que la convocation indique le lieu, les jours et les heures des séances prévues. A partir du moment où cette heure est indiquée dans la convocation, il n'y a pas de changement possible sans que le Grand Conseil se détermine. (Brouhaha.) Et le Bureau ne peut agir que sur délégation légale, et en l'absence de toute délégation légale, le Bureau n'a pas cette compétence ! Par conséquent, nous sommes tenus de siéger à 20h30, et ceux qui s'abstiendront de siéger, dans ce cas-là, ne participeront pas aux débats; nous serons peut-être tout seuls, mais à ce moment-là les lois seront votées... (Remarque.) ...et elles seront votées valablement parce qu'il n'y aura personne pour s'y opposer. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Murat Julian Alder (PLR). Je crois que le règlement du Grand Conseil est extrêmement clair. (Exclamations. Commentaires.) On lit, à l'article 97, alinéa 1: «Le Grand Conseil est maître de son ordre du jour.» Ce n'est pas écrit que le Bureau est maître de l'ordre du jour ! La conséquence, c'est que la décision de tenir séance ce soir ou pas appartient à tout cet hémicycle, et pas seulement au Bureau. Je vous remercie de votre attention ! (Applaudissements. Exclamations.)

Le président. Je passe la parole à M. le rapporteur de deuxième minorité, François Lefort.

M. François Lefort (Ve), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. (Brouhaha.) Chers collègues, je vous prie de revenir au sujet qui nous occupe, soit la modification de la loi sur les heures d'ouverture des magasins. Alors d'abord, Monsieur le président... Monsieur le président ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je vous remercie d'abord de faire régner un peu de calme, et ensuite je vous prie de rassurer mon cher collègue Barrillier: quand je parle d'une vieille baderne grincheuse du PLR, ce n'est pas à lui que je pense ! Nous ne sommes pas heurtés par ce projet de loi, Monsieur Barrillier, nous pensons qu'il est inutile car il n'aidera pas les boulangers. Et comme M. Vanek, j'apprécie quand M. Medeiros nous explique les bonnes combines ! C'est instructif ! Mais derrière, il n'y a pas de proposition constructive.

Enfin, comme souvent, l'UDC, dans ses différentes interventions, est prise en flagrant délit de schizophrénie politique: soutenir les shops, les boulangers et les agriculteurs en même temps, par ce projet de loi, eh bien je suis désolé, mais c'est impossible. Revenez un peu à la raison ! La seule façon de mettre fin à la concurrence déloyale des shops, la seule façon de soutenir les boulangers, c'est d'exclure la vente des produits de boulangerie des shops !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le rapporteur de première minorité. (Remarque.) Ah, il ne vous reste qu'une seconde, Monsieur le rapporteur. La parole est donc au rapporteur de majorité.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste revenir sur quelques points qui ont été évoqués lors des débats fructueux ayant précédé cette séance du Bureau et des chefs de groupe.

Premièrement, pour les rapporteurs de minorité, en face, et particulièrement M. Deneys: je crois que ce n'est pas le PLR qu'il faut attaquer. Ce projet est également porté par l'UDC, par le MCG, par le PDC, et je pense que vous vous trompez de cible. Je suis là en tant que rapporteur d'une majorité, pas en tant que représentant du groupe PLR.

S'agissant des termes de vieille baderne, j'aimerais bien, Monsieur le président, que l'on fasse preuve d'une certaine décence dans les propos.

Le président. Oui, j'aimerais bien aussi !

M. Serge Hiltpold. J'aime bien m'amuser, mais je pense que l'expression «vieille baderne» n'a pas sa place ici et n'a pas lieu d'être dans ce parlement. Si vous ne cadrez pas un minimum les interventions pour que règne une certaine courtoisie, on va arriver à un dérapage. Je n'aimerais donc pas que ce terme de vieille baderne revienne dans le débat; il en va du respect de chacun.

S'agissant du contenu, on a beaucoup parlé de l'ouverture du dimanche. (Brouhaha.) Or, nous ne sommes pas en train de prôner l'ouverture le dimanche, nous discutons d'ouvrir un jour supplémentaire ! Si vous avez écouté, ou pris la peine de lire le rapport, vous verrez... (Brouhaha.) Ecoutez, c'est insupportable, Monsieur le président ! (Commentaires.)

Le président. Allez-y, Monsieur le député.

M. Serge Hiltpold. Je disais, on pourrait ouvrir un jour supplémentaire, par exemple le mercredi pour les boulangeries. Il y a des activités qui ont été citées, qui ont été évoquées, par exemple la possibilité, dans les laboratoires, de faire des ateliers de fabrication de macarons pour les enfants, de confection de chocolat, et ce n'est absolument pas pour faire...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Serge Hiltpold. ...la promotion des shops ! Donc j'aimerais simplement revenir sur les fondamentaux, et dire qu'on ne travaillera pas le dimanche mais un jour supplémentaire.

Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce que le Conseil d'Etat veut se prononcer sur l'entrée en matière ? (Le président est interpellé par M. Cyril Aellen.) Non, il n'y a pas de motion d'ordre sur la séance de 20h30, Monsieur, je vous l'ai déjà dit. (M. Cyril Aellen s'exprime hors micro.) Non, il n'y a pas de motion d'ordre sur cette question-là. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 10982 est adopté en premier débat par 42 oui contre 27 non. (Exclamations et huées durant la procédure de vote.)

Deuxième débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, on ne peut pas travailler dans ces conditions-là. S'il n'y a pas le calme immédiatement et qu'on ne peut pas poursuivre, je lève la séance, je vous préviens ! (Commentaires.) Nous sommes en deuxième débat.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 6, proposé par M. François Lefort. Je vous le lis:

«Alinéa 2 modifié

La vente, à titre accessoire, d'articles qui ne sont pas en rapport direct avec les activités mentionnées à l'alinéa 1 peuvent bénéficier d'un régime d'exception prévu par l'article 4, lettre d, dans les limites des conditions posées par le règlement concernant la limitation des horaires de vente, de la surface de vente, ainsi que du type d'articles vendus, à l'exception des produits de boulangerie.»

Nous sommes également saisis de deux amendements de M. Deneys à l'article 11. Je vous lis le premier:

«Art. 11 (nouvelle formulation; ajout)

Les boulangeries, pâtisseries et confiseries équipées d'un laboratoire peuvent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h.»

Voici le second:

«Art. 11 (nouvelle formulation; ajout)

Les boulangeries, pâtisseries et confiseries dont le personnel, en vertu d'une convention collective ou d'un contrat individuel, est au bénéfice de la semaine de 5 jours de travail, peuvent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h.»

Je cède la parole à M. Lefort pour une présentation de son amendement. Vous avez quatre minutes, Monsieur Lefort.

M. François Lefort (Ve), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je n'aurai pas besoin de quatre minutes... (Brouhaha.) ...puisque je l'ai déjà présenté. L'amendement consiste à rajouter une phrase à l'alinéa 2, et à terminer ce dernier par «à l'exception des produits de boulangerie». Cet alinéa 2 est donc celui qui permet un régime d'exception aux shops, et nous modifions ce régime d'exception en précisant ce qui peut être vendu ou pas, et ce qui ne peut pas être vendu dans les shops ce sont des produits de boulangerie. C'est le sens de cet amendement.

M. Cyril Aellen (PLR). Je sollicite une motion d'ordre selon l'article 79, alinéa 1, lettre b, pour suspendre ou lever la séance, Monsieur le président, et j'aimerais que ça soit mis aux votes. (Exclamations.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets cette motion d'ordre. (Un instant s'écoule.) Cette motion d'ordre est acceptée par 47 oui... (Exclamations. Commentaires.) Non, excusez-moi, elle est refusée, il faut la majorité des deux tiers ! (Commentaires.)

Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée par 47 oui contre 42 non (majorité des deux tiers non atteinte).

Le président. Nous poursuivons nos débats. La parole est à M. Thierry Cerutti.

M. Thierry Cerutti (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe aimerait quand même avoir une réponse par rapport aux articles mis en avant par le groupe PLR au sujet de votre prérogative, ou pas, d'annuler la séance de 20h30. Nous aimerions avoir une position, c'est notre droit; nous sommes ici en séance plénière, nous sommes des élus - tout comme vous d'ailleurs - et nous aimerions connaître les raisons qui font que nous ne siégeons pas à 20h30. Merci ! (Applaudissements.)

Le président. La parole est à Mme Danièle Magnin.

Mme Danièle Magnin. C'est une erreur, Monsieur le président.

Le président. Très bien, merci. La parole est donc à M. Cyril Aellen.

M. Cyril Aellen (PLR). Je sollicite un renvoi du projet en commission ! (Exclamations. Applaudissements. Le président agite la cloche.)

Le président. Est-ce que les rapporteurs veulent s'exprimer ? (Commentaires.) Les rapporteurs, est-ce que vous voulez vous exprimer sur le renvoi en commission ? (Brouhaha.) Monsieur Deneys, vous avez la parole.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je remercie le PLR d'avoir un sursaut de sagesse concernant ce projet de loi et de proposer son renvoi en commission, notamment pour une raison particulière qui n'a pas encore été évoquée à ce stade du débat: dès le début de cette année 2014, la commission des mesures d'accompagnement a sollicité l'OCIRT pour mener une enquête à la demande des patrons et des syndicats du secteur de la boulangerie... (Commentaires.) ...pour vérifier les conditions de salaire et... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...les conditions de travail dans ce secteur. Et Mesdames et Messieurs les députés, les résultats de cette enquête doivent être portés à la connaissance du Grand Conseil pour que nous puissions prendre une décision en connaissance de cause et voir si des abus existent. Donc oui... (Brouhaha.) ...il faut renvoyer en commission, c'est important d'avoir les résultats de cette enquête avant de voter sur le fond ! (Applaudissements.)

Le président. S'il vous plaît ! Je crois savoir que M. Aellen retire sa demande de renvoi en commission. (Commentaires.) Est-ce que c'est le cas ? (Commentaires.) Elle est reprise, donc je cède la parole au rapporteur de majorité.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Monsieur le président... (Brouhaha.)

Le président. Poursuivez, Monsieur le rapporteur !

M. Serge Hiltpold. Monsieur le président, je crois qu'on arrive à un seuil d'énervement maximum. Que se passe-t-il dans une séance qui n'est pas gérée ? Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur le président, il serait temps de mettre de l'ordre dans ce parlement. Nous en arrivons à des demandes de mon propre groupe qui sont parfaitement inconsidérées, donc je demande qu'un certain respect dans ce débat soit maintenu par tous les députés, par tous les groupes, et qu'il y ait une certaine retenue dans les propos. Ce message s'adresse à la présidence et au Bureau; il faut donner des ordres clairs, un ordre du jour précis. Je vous invite à ne pas renvoyer ce projet en commission, parce qu'on n'est pas là pour faire du théâtre et créer des artifices, et je crois qu'il n'y a pas de raison valable de renvoyer cet objet en commission. (Applaudissements.)

M. François Lefort (Ve), rapporteur de deuxième minorité. Normalement, seuls les rapporteurs s'expriment après une demande de renvoi en commission. En ce qui concerne le groupe des Verts, il saisit obligeamment la proposition du PLR de renvoyer en commission... (Commentaires.) Non, non, elle n'a pas été retirée parce qu'après une demande de renvoi en commission il n'y a que les rapporteurs qui s'expriment et qui se prononcent sur cette demande de renvoi. (Remarque.) Monsieur Stauffer, vous avez un bouton qui se trouve là-bas, vous n'avez qu'à appuyer dessus ! (Protestations. Exclamations.)

Le président. S'il vous plaît !

M. François Lefort. Donc nous nous exprimons... (Protestations.) ...sur une demande de renvoi en commission obligeamment déposée par le PLR, et le groupe des Verts la soutiendra ! (Exclamations.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10982 à la commission de l'économie est rejeté par 59 non contre 31 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons notre débat. La parole est à M. Ronald Zacharias.

M. Ronald Zacharias. Je renonce, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Cyril Aellen... (Remarque.) ...qui renonce. La parole est à M. François Baertschi... (Remarque.) ...qui renonce également. La parole est donc à M. Renaud Gautier.

M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, cette assemblée est censée dire et faire le droit, par exemple à travers le projet de loi dont nous avons à débattre maintenant. Cela suppose effectivement que les règles ou le droit qui régissent cette assemblée soient aussi respectés; sans ça, comme on l'a vu tout à l'heure, les choses dérapent. Ainsi, lorsque le coq Vert vient nous dire qu'après une demande de renvoi en commission qui a été retirée, il est le seul à pouvoir parler, on se met évidemment dans une situation délicate.

Sur le fond, on peut évidemment décider de parler pendant longtemps de cette loi. En l'occurrence, la proposition initiale est bonne et les amendements ne tendent qu'à la pénaliser ou à l'amoindrir. Mais je vous rends attentif au fait, Monsieur le président, que si vous ne faites pas un effort pour vous tenir au plus près du droit, je doute que cet après-midi, ce soir, voire demain, nos travaux se fassent dans la sérénité nécessaire à la prise de bonnes décisions. Cela dépend de vous, Monsieur le président, comme de votre Bureau, comme de nous. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Effectivement, c'est un travail collectif. La parole est à M. le député Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, je souhaitais m'exprimer sur mes amendements, je ne sais pas si c'est le moment opportun... (Rires.)

Le président. Vous pouvez !

M. Roger Deneys. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut être clair ce soir: si vous voulez défendre les petits artisans, les petits commerçants du secteur de la boulangerie, eh bien il faut voter les amendements socialistes; seuls ceux-là ont pour but de préciser que cette loi ne concerne que les vrais artisans, et que par ailleurs des conventions collectives qui garantissent une semaine de travail de cinq jours s'appliquent. Ce que vous avez dit tout à l'heure, c'est que vous vouliez défendre les petits commerçants, les artisans, les commerces de proximité. Si c'est vrai, vous ne devez pas soutenir des dispositions qui concernent toutes les activités commerciales dans le secteur de la boulangerie, c'est-à-dire l'activité des chaînes, qui ont des succursales et qui ne sont pas des boulangeries. C'est ça, la vérité ! En revanche, si vous voulez démanteler la loi sur les horaires d'ouverture des magasins, la LHOM, eh bien ça veut dire que vous voulez laisser la porte ouverte à tout le monde et donc vous ne votez pas les amendements socialistes. Mais si vous voulez défendre les artisans, les vrais, qui travaillent à Genève, c'est seulement les boulangeries - et c'est le premier amendement - qui ont un laboratoire et qui produisent elles-mêmes des produits de boulangerie qui doivent pouvoir ouvrir sept jours sur sept. Mais pas tous ! C'est ça, la cohérence; soit vous voulez démanteler, et là vous laissez la loi ouverte à tout le monde, soit vous voulez favoriser les artisans, les vrais, et vous dites que la loi concerne seulement ceux qui ont un laboratoire.

L'autre chose, c'est que certains ont dit tout à l'heure qu'il y avait déjà une convention collective; je vous rappelle que la commission des mesures d'accompagnement, la CMA, a lancé une enquête avec l'OCIRT début 2014 concernant les rémunérations dans le secteur de la boulangerie, parce que justement il y a des cas d'abus et de sous-enchère salariale qui sont signalés. Alors avant d'aller de l'avant et de dire que tout va très bien, Madame la marquise, il s'agirait de vérifier qu'il n'y a pas, aujourd'hui, d'abus.

Enfin, si vous pensez qu'il y a une convention collective, qu'elle fonctionne et que tout va très bien, l'autre amendement socialiste demande d'ajouter que seules les boulangeries, pâtisseries ou confiseries dont le personnel, en vertu d'une convention collective ou d'un contrat individuel, est au bénéfice de la semaine de cinq jours de travail, puissent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h. Si vous vous dites qu'il y a déjà des conventions collectives, alors vous devez aussi voter cet amendement ! Sinon, c'est que vous vous en fichez complètement des conventions collectives, et que la seule chose qui vous intéresse c'est d'ouvrir tous les commerces le plus longtemps possible. Mais ce n'est pas de soutenir les artisans ! Parce qu'en l'occurrence, vous soutenez aussi les shops qui font de la concurrence vingt-quatre heures sur vingt-quatre, maintenant, aux boulangeries. Donc il faut voter les amendements socialistes si ce que vous prétendez, dans ce projet de loi, est vrai ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Pascal Spuhler (MCG). Monsieur le président, c'est vrai que les boulangers ont attendu M. Deneys pour avoir des conventions collectives... (Commentaires.) ...alors que c'est un métier qui est aussi vieux qu'Hérode ! Monsieur Deneys, merci, grâce à vous les boulangers sont sauvés ! Evidemment, Mesdames et Messieurs, les boulangers ont des conventions collectives et ils n'ont pas besoin de cet amendement pour rajouter une couche au mille-feuille, si je peux me permettre.

Quant au fait de dire que seules les boulangeries équipées d'un laboratoire peuvent ouvrir, c'est juste ridicule ! Ça veut dire que seul un petit artisan qui n'aurait qu'un seul commerce pourrait ouvrir ! Mais l'artisan qui a deux commerces ne pourra pas le faire ! En tout cas pas pour les deux ! Vous faites des sélections qui sont tout à fait aléatoires, Monsieur Deneys, et votre amendement, il ne vaut pas pipette !

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous soumettre...

Une voix. Monsieur le président, je demande le vote nominal pour les amendements socialistes !

Le président. Est-ce que vous êtes soutenu ? (Des mains se lèvent.) Oui, très bien. (Commentaires.) Mais pour le moment on en est au vote sur l'amendement de M. Lefort, qui complète la fin de l'alinéa 2 de l'article 6 par «à l'exception des produits de boulangerie».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 27 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous passons à l'article 11 et aux amendements du parti socialiste. Je vous soumets celui qui stipule que «les boulangeries, pâtisseries et confiseries équipées d'un laboratoire peuvent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h». La parole est à M. Serge Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Brièvement, sur cet amendement: comme je l'ai expliqué tout à l'heure, il y a des petits commerces qui ont un laboratoire mais qui desservent deux points de vente; donc cet amendement n'est déjà pas réaliste.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets donc aux voix cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 27 oui et 2 abstentions (vote nominal). (Brouhaha durant la procédure de vote.)

Vote nominal

Le président. S'il vous plaît ! Nous avons un deuxième amendement à l'article 11: «Les boulangeries, pâtisseries et confiseries dont le personnel, en vertu d'une convention collective ou d'un contrat individuel, est au bénéfice de la semaine de 5 jours de travail, peuvent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h.» La parole n'étant pas demandée... Monsieur Hodgers, vous voulez vous exprimer sur l'amendement ? (Remarque.) C'est une erreur, très bien, merci.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 27 oui et 2 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, l'article 11 (nouvelle teneur) est adopté.

Le président. Nous sommes également saisis d'un amendement de M. Deneys à l'article 22, que vous trouvez à la page 27 du rapport. Le texte est le suivant: «Les boulangeries, pâtisseries et confiseries équipées d'un laboratoire sur site et dont le personnel, en vertu d'une convention collective ou d'un contrat individuel, est au bénéfice de la semaine de 5 jours de travail, peuvent être ouvertes le samedi et le dimanche jusqu'à 19h.» La parole n'étant pas demandée, je mets aux voix cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 28 oui et 1 abstention (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, l'article 22 (nouvelle teneur) est adopté.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

Le président. Monsieur le rapporteur Roger Deneys, vous avez la parole.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aurais souhaité que le Conseil d'Etat ou que le conseiller d'Etat en charge de l'économie s'exprime concernant cette fameuse enquête de l'OCIRT demandée par la commission des mesures d'accompagnement. Parce que j'aimerais bien qu'on soit au clair, aujourd'hui, avant de voter ce projet de loi et de savoir quand cette loi entrera en vigueur, sur les cas - signalés ou hypothétiques, je ne sais pas - de sous-enchère salariale dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie. Et j'aimerais savoir aussi si le Conseil d'Etat entend prendre en considération les conclusions de l'enquête qui doit être en cours avant de faire entrer en vigueur cette loi, ou s'il compte simplement appliquer cette dernière sans se préoccuper des conditions salariales dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. En général, je réponds volontiers aux interpellations dans le cadre des commissions, mais là on est dans un dossier un peu particulier, à cheval sur deux législatures, et la question est parfaitement légitime.

Ce que je peux vous dire, hérité de mon prédécesseur puisque c'est lui - et il faut le saluer - qui a finalisé la nouvelle convention collective de travail, c'est que cet élément dont s'est réjoui, à l'époque, le Conseil d'Etat - je ressors ici les communiqués de presse du mois de novembre 2013 - ne suffit pas, en tant que tel, à nous rassurer, d'autant moins que les conditions ont encore changé depuis la votation de l'automne passé. Donc je peux vous confirmer ici que c'est une des préoccupations du Conseil d'Etat, à travers l'action de l'OCIRT qui est en cours. Nous n'avons donc pas de résultats à vous donner aujourd'hui, et pour cause, une nouvelle convention collective de travail, qui intervient en novembre, doit déployer ses effets. Mais nous serons évidemment attentifs à ces résultats, parce que c'est un secteur parmi la branche du commerce de détail qui nous cause également du souci. Si c'est ce que vous vouliez entendre, j'espère que cela vous satisfait; si ce n'est pas le cas, tant pis pour vous parce que c'est en tout cas la position du Conseil d'Etat... (Rires. Exclamations.) ...mais nous allons la maintenir indépendamment de cette loi. Cette loi nous semble - et je le défends ici, dans la continuité de mon prédécesseur - une loi opportune, une loi qui de toute façon, ces prochains mois, va faire l'objet d'intenses discussions en amont du parlement. Les partenaires sociaux sont autour de la table, ils sont très réticents, vous le savez, à entrer en matière, mais ils vont devoir s'y résigner parce que nous avons de véritables enjeux sur les heures d'ouverture des magasins, sur la capacité à faire face à cette concurrence; nous avons également des commerçants de détail qui ont déploré à réitérées reprises une forme de tourisme d'achat. Alors on sait qu'une partie de la réponse à ce tourisme réside dans l'assouplissement des conditions ici, mais c'est aussi la capacité de développer un certain protectionnisme de notre place genevoise. Tout cela forme un tout, et c'est ce tout que nous allons développer en amont, dans le respect du partenariat social, avec les patrons et les syndicats d'un côté, et que j'espère pouvoir vous présenter dans le courant de cette année, si possible au deuxième semestre, à la faveur de propositions qui auront recueilli le consensus le plus large. Mais soyez certains, en conclusion, Mesdames et Messieurs, que nous allons faire des contrôles - c'est déjà le cas dans plusieurs branches, notamment dans celle-ci - que nous allons être très attentifs au déploiement des conventions collectives, en particulier celles qui ont été récemment négociées et adoptées, et puis que nous aurons à coeur, au-delà de ça, d'ouvrir le débat et la discussion sur ce qui fait aujourd'hui les conditions-cadres d'un secteur particulièrement touché, celui du commerce de détail.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter l'ensemble de ce projet de loi.

La loi 10982 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10982 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 29 non et 1 abstention.

Loi 10982

R 731
Proposition de résolution de Mmes et MM. François Lefort, Christian Bavarel, Sophie Forster Carbonnier, Olivier Norer, Anne Mahrer, Brigitte Schneider-Bidaux, Esther Hartmann, Miguel Limpo, Magali Origa du Grand Conseil genevois au Conseil fédéral : Instauration de conditions-cadres minimales nationales dans l'agriculture
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».

Débat

Le président. Nous passons aux urgences qui ont été demandées aujourd'hui, en commençant par la proposition de résolution 731. Il s'agit du point 146 de l'ordre du jour. Nous sommes en catégorie II, avec trente minutes de parole. Je passe la parole à M. François Lefort.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. C'est sur la proposition de nombreux groupes de ce parlement que nous avons demandé, au nom de la commission de l'environnement et de l'agriculture, l'urgence sur ce point à l'ordre du jour maintenant. Quelle est la situation qui nécessite, par cette résolution, de relancer le débat sur les conditions-cadres minimales nationales dans l'agriculture ? Ce sont les fortes disparités cantonales entre salaires minimaux prévus dans les contrats types de travail. Ces disparités sont accrues par les grandes différences cantonales en matière d'horaire hebdomadaire de travail, ce qui pénalise les entreprises agricoles des cantons aux meilleurs contrats types comme celui de Genève, tant du point de vue de leur compétitivité que de leur viabilité. Finalement, cela procure un avantage concurrentiel indu aux entreprises agricoles des cantons qui pratiquent les salaires minimaux les plus bas et les horaires les plus élevés. Genève a les meilleures conditions-cadres, ce qui est une bonne chose. En comparaison, le salaire horaire zurichois est inférieur de 21%, celui du Valais de 26% et celui de Glaris de 34%. Pour ce dernier cas, cela signifie que la production est finalement 34% moins chère à Glaris qu'à Genève.

Or cette situation n'est pas synonyme de sous-enchère salariale. Ça y ressemble, mais ce n'en est pas. Ce serait le cas dans toute autre branche mais pas dans l'agriculture, qui n'est pas soumise à la loi sur le travail. Si ce n'est pas synonyme de sous-enchère salariale, c'est parce qu'il y a un contrat type glaronnais qui stipule un salaire horaire de 11,10 F pour 66 heures de travail hebdomadaires. Tant que ce n'est pas synonyme de sous-enchère salariale prouvée et répétée, la commission tripartite de la Confédération ne pourra proposer un contrat type prévoyant des salaires minimaux au niveau national. De 2005 à 2008, cette commission tripartite a pourtant observé le marché du travail agricole au niveau fédéral et effectivement constaté de la sous-enchère salariale. Mais elle a conclu que ces pratiques n'étaient pas suffisantes pour justifier l'édiction de salaires minimaux nationaux, justement parce qu'il existe un contrat type à 66 heures par semaine et 11,10 F de l'heure.

Cette sous-enchère salariale s'est aggravée depuis 2008. Elle entraîne des disparités très fortes entre les cantons aux meilleurs contrats types et à la meilleure surveillance du marché du travail - comme Genève - et ceux aux contrats types pratiquant les salaires minimaux les plus bas. Cette situation n'est plus tenable, ni pour les employés de l'agriculture, ni pour les entreprises agricoles des cantons comme Genève qui pratiquent les meilleurs salaires et se voient pénalisées sur le marché national. Le coût du travail a des conséquences sur le prix des produits, et les mauvaises conditions salariales ou la sous-enchère introduisent une concurrence déloyale sur le marché agricole en tirant les prix vers le bas. Cette situation inacceptable met en danger des entreprises agricoles pourvoyeuses d'emplois locaux et d'une nourriture produite localement. Elle porte donc avec elle le risque de voir disparaître une partie de la production agricole locale au profit des importations. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous serions reconnaissants de soutenir cette résolution. Par un amendement, nous vous proposons d'ailleurs de la renvoyer non pas au Conseil fédéral mais à l'Assemblée fédérale, de façon qu'un contrat type national instaure un salaire minimum dans l'agriculture basé sur les conditions du canton de Genève. La référence au niveau national doit être Genève, et non pas Glaris. C'est ce que demande cette résolution, et je vous remercie de la renvoyer directement à l'Assemblée fédérale.

M. Lionel Halpérin (PLR). J'espère qu'on peut discuter des choses de manière un peu plus sereine que tout à l'heure. Conformément à l'article 79A de la loi portant règlement du Grand Conseil, un député peut en tout temps interrompre le débat. Aujourd'hui, la difficulté - et je pense que la responsabilité du Bureau est engagée à ce sujet - c'est que... J'ai eu l'occasion de demander, il y a deux heures environ, quelle était la base légale qui avait permis au Bureau de modifier la convocation qui a été adressée valablement. A ma connaissance et jusqu'à présent, la seule réponse qui nous a été donnée est une référence à l'article 7 de la LRGC, qui ne donne aucune base légale pour ce faire. A moins que vous n'ayez effectivement une base légale à nous exposer qui donne une compétence particulière au Bureau à ce sujet - mais comme je vous ai dit, j'ai lu cette loi à l'endroit et à l'envers et n'y ai absolument rien trouvé - je pense qu'il serait sain pour nos débats qu'on puisse faire voter cette plénière à la majorité simple afin de déterminer si nous siégeons ce soir ou non. La modification en question ne peut pas être de la compétence du Bureau ! Si on applique ce raisonnement et que le Bureau peut changer à lui seul les convocations, cela signifie aussi qu'il peut à un moment ou à un autre ajouter des sessions, où il y aurait dix personnes présentes ! Puis on voterait et on ferait passer des articles pour des lois qu'on a envie de faire voter à ce moment-là ! Ce serait là un pouvoir complètement exorbitant donné au Bureau, et je ne peux pas imaginer une seule seconde que ce pouvoir-là soit effectivement entre les mains du Bureau.

Mme Martine Roset (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je reviens à notre résolution sur les contrats de travail. Le PDC soutiendra cette résolution. Le débat de ce matin a démontré qu'il y a une volonté de ce parlement de biffer les inégalités. Les différences entre cantons quant aux conditions de travail des employés agricoles en sont une. Notre canton du bout du lac a souvent été précurseur et presque toujours frondeur. En renvoyant cette résolution à l'Assemblée fédérale, nous ne faillirons pas à notre réputation. Les employés agricoles suisses et les agriculteurs genevois vous en remercient d'avance.

M. Eric Leyvraz (UDC). Le groupe UDC va évidemment soutenir cette résolution. Dans l'agriculture, nous avons déjà beaucoup de peine à lutter contre la concurrence étrangère. C'est quand même extraordinaire que dans le même pays, on ait une concurrence d'environ 25% entre deux villes similaires comme Genève et Zurich ! Ce n'est tout simplement pas possible. Je crois que si on veut garder une agriculture dans ce canton, si on veut surtout garder des maraîchers... Les maraîchers exportent dans toute la Suisse, ils sont reconnus pour leurs performances, ce sont d'excellents paysans. Mais ils vendent aussi beaucoup dans la région de Zurich et ont perdu des parts de marché à cause de la différence de prix. Quand on vend des salades ou des tomates, ce sont parfois quelques centimes qui font la différence. Ces gens-là sont prétérités de façon totalement injuste. On vous demande donc de soutenir cette résolution. Je vous rappelle qu'à Genève, nous avons les salaires les plus élevés et les horaires les plus favorables de Suisse dans le domaine de l'agriculture. Voilà qui pourrait franchement être un modèle pour toute l'agriculture - ceux de la gauche doivent être d'accord. Alors soutenez cette résolution, ce sera bien pour tous les travailleurs agricoles. Merci.

M. François Baertschi (MCG). Nous avons eu tout à l'heure un bel exemple d'une sorte de - comment dire ? - culture bolchevik ! (Exclamations.) Il y a eu le «social-bolchevisme», le «Vert-bolchevisme», les communistes de bénitier ou encore le «PLR-bolchevisme» s'agissant des taxis. (Protestations.) Eh oui ! S'agissant des taxis, on veut une centrale unique, on veut... (Commentaires.) ...on veut à tout prix étatiser certaines tâches qui doivent être du domaine du privé. Autant nous voulons que le public soit respecté et occupe une place importante, autant certaines dérives de ce parlement et de ce canton sont inquiétantes. Bien évidemment, la résolution que nous avons aujourd'hui a une autre couleur. Elle est aussi beaucoup plus douce du fait qu'il s'agit de personnes... Comment dire ? Il y a une sorte de traitement à plusieurs vitesses dans la Genève que nous connaissons. Les chauffeurs de taxi sont les mal-aimés, d'aucuns sont un peu plus favorisés, notamment certains médecins. Quand on entend des donneurs de leçons dans cette enceinte, c'est un peu l'hôpital qui se fout de la charité ! On défend certains lobbys, mais qui ne défend pas des lobbys dans cette salle ? J'aimerais bien le voir, j'aimerais bien l'entendre et j'aimerais en avoir la preuve. Mais il n'y a pas grand-monde, assurément. Il est certain que cette résolution ne va rien changer pour Genève. Ça ne va rien changer, puisqu'on garde les conditions-cadres des CCT. On va juste faire un peu la leçon aux autres cantons, ce qui ne nous change pas. En revanche, la première invite me semble tout à fait inacceptable. Si nous sommes d'accord pour un développement des conventions collectives et sociales dans l'agriculture et dans les autres professions, il serait intéressant de renvoyer cette résolution en commission pour étude. Je vous remercie.

M. Frédéric Hohl (PLR). Je suis désolé, Monsieur le président, de revenir sur l'article 79. Je ne veux pas polémiquer non plus. Voilà neuf ans que je suis député. C'est vrai que le Bureau a quelquefois décidé de nous relâcher le soir du budget ou le soir des comptes, et nous en étions tous très heureux. C'est vrai que c'est une tradition, vous l'avez fait très souvent. Mais malheureusement, je crois que cette tradition ne tient juridiquement pas la route. Voici la seule chose qu'on vous demande, Monsieur le président, puisque vous nous avez convoqués à 20h30: est-ce que nous avons formellement le droit de siéger à 20h30 ? N'ayez pas peur de faire voter à la majorité simple. Si on perd, ce n'est pas grave. On rentre dans les rangs et on finit notre session sans aucun problème. Mais vous ne nous répondez pas ! Du coup, on revient forcément sur cet article 79. On aimerait bien avoir des réponses.

M. Georges Vuillod (PLR), député suppléant. J'aimerais juste spécifier encore une fois un certain nombre de points concernant la concurrence et la distorsion de concurrence qu'il y a actuellement. L'ensemble du parlement souhaite préserver la zone agricole. Je l'ai bien compris et je m'en réjouis. Mais qui dit préserver la zone agricole dit également soutenir les entreprises qui travaillent la terre. Il me semble donc que si on veut garder une agriculture nourricière et concurrentielle dans ce canton, il faudrait quand même arriver à avoir une uniformisation des conditions de travail au niveau national. Par conséquent, je vous remercie de bien vouloir soutenir cette résolution.

M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cet objet présente quand même un fond technique. J'ai entendu mon préopinant M. le député Baertschi demander le renvoi de cette résolution à la commission de l'environnement et de l'agriculture. Je pense en effet qu'elle ne presse pas à ce point. On peut très bien en expliquer les tenants et aboutissants pour obtenir un soutien unanime de ce Grand Conseil. Une fois qu'elle aura été étudiée à la commission de l'environnement et de l'agriculture, on pourra ainsi la soutenir et la renvoyer ensuite aux Chambres fédérales ou au Conseil fédéral. Je vous remercie de soutenir le renvoi en commission.

M. François Lefort (Ve). Je m'exprimerai brièvement sur le renvoi en commission. La commission de l'environnement et de l'agriculture est bien sûr tout à fait inutile. Vous transmettrez à mes préopinants du MCG que leurs qualificatifs ont été un peu exagérés. Comme ils étaient extrêmement exagérés, ils sont devenus extrêmement insignifiants. Nous n'avons pas besoin d'être unanimes. Nous avons juste besoin d'une majorité pour envoyer cette résolution à l'Assemblée fédérale. Et c'est ce que je vous demande. C'est ce que je demande à la majorité - raisonnable et non insignifiante - de ce parlement de faire ce soir.

M. Pascal Spuhler (MCG). Je m'excuse, mais je vais juste différer un peu le débat. J'aimerais aussi revenir sur certains propos, notamment ceux de M. Frédéric Hohl que je soutiens entièrement. Monsieur le président, vous avez pris une décision qui n'est pas correcte par rapport au règlement. Je m'en réfère maintenant à l'article 7 de la LRGC - qui précise ce que comporte la convocation, à savoir les horaires et les séances - ainsi qu'à l'article 32, qui définit les compétences du Bureau. Or les compétences du Bureau ne sont pas de décider si une séance va être supprimée ou non alors qu'elle a été convoquée. Enfin l'article 79, Monsieur le président, stipule par analogie que la levée de séance peut être décidée par les deux tiers suite à une motion d'ordre. Monsieur le président, je vous demande formellement de passer à cette motion d'ordre qui a été demandée à multiples reprises par nos camarades du parti libéral-radical. Je fais encore formellement cette demande. Je demande un vote pour la séance de ce soir, Monsieur le président, selon l'article 79 de la loi portant règlement du Grand Conseil.

Le président. Messieurs Spuhler, Hohl et autres intervenants, je vous ai bien entendus. Nous allons finir ce point à l'ordre du jour. Je réunirai ensuite le Bureau. (Commentaires.) La parole est à M. Eric Leyvraz.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Je pense que s'il y avait plus de viticulteurs et moins d'avocats dans cette assemblée, ça irait peut-être un peu mieux ! (Applaudissements.) En ce qui concerne la résolution, je trouve évidemment dommage de la renvoyer en commission. Mais, Monsieur Lefort, je pense que si on veut qu'elle ait du poids, il faut vraiment avoir l'unanimité de ce parlement. Sinon, elle perd de sa valeur. Si on pouvait la renvoyer à la commission de l'environnement, la traiter rapidement pour convaincre ceux qui ne sont pas convaincus et ensuite avoir une approbation totale de ce parlement, ce serait quand même mieux.

M. Jean-François Girardet (MCG). J'ai entendu les grandes explications de M. Lefort...

Le président. Il vous reste trois secondes, en fait.

M. Jean-François Girardet. Oui, trente secondes, Monsieur le président.

Le président. Trois secondes !

M. Jean-François Girardet. Trois secondes ? Alors, en trois secondes: j'ai tout compris parce que j'ai relu l'exposé des motifs. On aura bien un salaire minimum national mais basé sur les CCT-Agri de Genève et adapté aux cantons, et ceci canton par canton. J'imagine que c'est correct, et c'est ça qu'il fallait...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Jean-François Girardet. ...préciser. Je vous remercie. (Remarque.)

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), députée suppléante. Le groupe socialiste a entendu avec intérêt les préopinants MCG qualifier les membres de cette enceinte de bolcheviks. Si c'est être bolchevik que de proposer un salaire mensuel de 3300 F et un salaire horaire de 16,90 F pour 45 heures de travail hebdomadaires, il s'agit là d'un qualificatif que l'on peut collectivement tout à fait assumer. (Brouhaha.) On constate que Genève, après énormément de discussions, a édicté un contrat type de travail qui a mis d'accord...

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Merci, Monsieur le président. Vous savez, le sort des ouvriers agricoles passionne généralement les foules ! Si Genève a réussi à édicter un contrat type de travail pour 45 heures à 3300 F en misant sur le partenariat, il faut quand même souligner que c'est largement, largement un minimum, qui reste bien en dessous du salaire minimum légal de 4000 F revendiqué par le parti socialiste. Mais il vaut mieux ce contrat type que pas de contrat type du tout. Nous saluons donc la proposition et la présentation qui ont été faites par M. Lefort. Nous aimerions également vous rendre attentifs au fait que, dans la plupart des cantons, ces personnes travaillent entre cinquante et cinquante-cinq heures par semaine pour des salaires de misère, qui oscillent entre 13 F - voire même 11 F ! - et 14 F de l'heure. Je ne pense pas que demander à la Confédération d'appliquer les minima genevois soit faire offense à un quelconque parti politique. Au contraire, nous devrions tous et toutes être très fiers de dire qu'il y a un minimum que l'on doit appliquer pour offrir des conditions de travail que je n'ose même pas qualifier de dignes - on parle quand même de 3300 F. S'il vous plaît ! Je pense qu'il s'agit là d'un minimum que l'on peut demander aux Chambres fédérales. Oui, au moins ce contrat type ! Si ça ne tenait qu'au parti socialiste, c'est encore bien autre chose que l'on demanderait. (Quelques applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). J'aimerais juste revenir sur l'amendement que mes collègues François Lefort, Simone de Montmollin et moi-même avons présenté. Il faut simplement être juste. Ce n'est pas au Conseil fédéral mais à l'Assemblée fédérale qu'il faut demander de traiter ce problème. Je crois qu'un renvoi en commission est parfaitement inutile. Le but de cette résolution est d'instaurer un salaire minimum national. Ce n'est donc pas une compétence relevant d'une commission parlementaire genevoise. Je pense que si on veut avoir du poids et une étude qui soit correcte, il faut que les Chambres fédérales s'en occupent. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé, avec M. Lefort, de remplacer dans le texte le Conseil fédéral par l'Assemblée fédérale.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous avons une demande de renvoi en commission. Je vous soumets cette proposition.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 731 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejeté par 83 non contre 1 oui et 1 abstention.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de MM. Lefort et Hiltpold et de Mme de Montmollin. Cet amendement consiste à changer le destinataire de la proposition de résolution en remplaçant le Conseil fédéral par l'Assemblée fédérale, ce qui modifiera également le titre.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 83 oui et 4 abstentions.

Mise aux voix, la résolution 731 ainsi amendée est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 85 oui et 2 abstentions.

Résolution 731

Le président. Je suspends la séance cinq minutes pour réunir le Bureau dans la salle Nicolas-Bogueret.

La séance est suspendue à 17h55.

La séance est reprise à 18h22.

Le président. Veuillez regagner vos places. (Un instant s'écoule.) Mesdames et Messieurs les députés, en vertu de l'article 93 de notre LRGC, je lève la séance et vous convoque demain matin à 8h. (Applaudissements. Huées. Brouhaha.)

La séance est levée à 18h25.