République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 14 février 2014 à 17h
1re législature - 1re année - 5e session - 26e séance
R 755
Débat
Le président. Nous passons à la première urgence, soit la proposition de résolution 755. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Avant de passer la parole au premier intervenant, je souhaite un bon anniversaire à M. Pierre Weiss ! (Applaudissements.) La parole est à M. Serge Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, dimanche dernier, une assez courte majorité a approuvé l'initiative populaire fédérale contre l'immigration de masse, dessinant ainsi deux visages de la Suisse: d'une part, les cantons romands et alémaniques avec de grands centres urbains et, d'autre part, le canton du Tessin et les cantons alémaniques ruraux. Les récentes interventions méprisantes à l'égard des Romands, notamment avec la citation de «conscience nationale plus faible», alimentent un climat qui n'a pas lieu d'être dans un Etat fédéral, dont le principe fondamental est le respect de ses minorités. Souvenons-nous d'ailleurs que le conflit du Sonderbund fut réglé par le Genevois Guillaume-Henri Dufour, intégrant l'esprit de Genève dans un patriotisme bien différent, plus pacificateur que diviseur. N'oublions évidemment pas non plus Elie Ducommun et Henri Dunant, des Genevois avec une certaine conscience de la nation.
A Genève, les conséquences de l'acceptation de cette initiative vont nous plonger dans une période d'incertitude et sont le résultat d'une crise de croissance paradoxalement enviée par nos voisins. L'incertitude, le manque de vision et l'instabilité sont les pires ennemis de l'entreprise. Considérez l'entreprise intégrant les employeurs et les employés dans une même barque, avec un cap bien défini. Depuis toujours, la Suisse a misé sur une politique de formation solide, tant sur le plan des apprentissages que celui du monde académique. Mais ce n'est pas suffisant en termes d'emploi. Le partenariat social comme la main-d'oeuvre qualifiée ont contribué à la croissance et à la création de 80 000 postes de travail par an, avec la levée des contingents depuis 2006. Comment allons-nous attribuer ces contingents ? Par secteur économique, par région, par classe salariale ? Sur quels critères ? C'est le flou artistique ! Je pense notamment au secteur agricole et à ceux de la construction et de l'hôtellerie, qui ont peine à trouver du personnel et seront certainement les parents pauvres de ces nouvelles mesures. Qui l'UDC défend-elle ? Je me le demande bien.
Genève a toujours su diversifier son économie et ne pas opposer les différents secteurs entre eux, consciente de leur interdépendance. La survie et le développement de ceux-ci passent par leur capacité à innover, à rebondir. Les entreprises, c'est sûr, relèveront le défi, mais avec des conditions de stabilité et une fiscalité acceptables, dont le monde politique est désormais responsable. Nous avons trois ans pour relever ce terrible défi des contingents, véritable chausse-trape pour Genève, qui devra absolument maintenir sa dimension internationale et ses pôles de recherche. Une incertitude de trois ans est bien trop longue. C'est la raison pour laquelle il est indispensable d'accorder notre soutien au Conseil d'Etat, afin qu'il plaide auprès du Conseil fédéral une répartition des contingents tenant compte de nos besoins prépondérants, comme il l'a démontré dès dimanche soir.
S'agissant des amendements qui ont été proposés, je trouve assez paradoxale la quatrième invite de celui de l'UDC qui suggère d'entreprendre une concertation avec les milieux «économique» - sans «s», peut-être n'y en a-t-il qu'un ? - afin d'évaluer et de prévoir les contingents. Je suis également assez surpris de ne pas avoir entendu votre collègue UDC, le conseiller national Jean-François Rime, qui est président de l'USAM - Union suisse des arts et métiers - dont je fais partie en tant qu'entrepreneur de PME. Ce dernier se montre relativement discret depuis dimanche dernier. Il est vraisemblablement dans ses petits souliers par rapport à l'acceptation de cette initiative et aux attentes des PME. Au nom du PLR ainsi que des entrepreneurs et artisans que je défends, je vous demande de bien vouloir renvoyer cette proposition de résolution au Conseil d'Etat. Merci.
Une voix. Très bien ! (Applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Depuis dimanche, il est clair que le pays est en crise. Il faut une réaction forte. Genève doit défendre ses emplois, ses étudiants, sa dimension internationale, ses emplois précaires. Genève a besoin d'emplois. On ne peut pas remettre en question la solidité économique de Genève. Le Conseil d'Etat, dont la réponse a été immédiate dès dimanche après-midi, soulignait qu'il serait proactif et s'associerait avec les autres cantons ayant voté non à l'initiative de l'UDC. Voilà une réponse adéquate. En cas de crise et d'instabilité, le parlement doit faire corps avec le Conseil d'Etat. Le parlement doit soutenir le Conseil d'Etat, parce que c'est ce dernier qui ira négocier les contingents à Berne. Il est certain, au vu des cantons qui ont voté contre cette initiative, qu'il s'agit en grande partie de cantons contributeurs, à savoir ceux qui paient pour les autres cantons et ont une bonne santé économique. Il est certain qu'il faudra que ces cantons se mettent d'accord pour obtenir le maximum de contingents. C'est cela que nous devrons soutenir, c'est là-dessus qu'il faudra être attentifs et, lorsque ce sera nécessaire, intervenir pour montrer notre soutien. Il n'est pas normal que certains cantons comme celui du Tessin, qui n'a fait aucun effort pour soutenir ses propres employés ou contrôler son marché du travail, viennent maintenant demander un maximum de contingents. Cela n'est pas normal ! Je crois que le canton de Genève doit le dire et le répéter. Maintenant, le parti démocrate-chrétien sera extrêmement attentif à une chose: il n'y aura pas de disparition du regroupement familial. Si le regroupement familial disparaît, le parti démocrate-chrétien décidera de ne pas soutenir cette loi et demandera au canton de Genève de ne pas l'appliquer. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). Ce que je viens d'entendre à l'instant même - à savoir que le législatif que nous sommes va demander de ne pas appliquer la loi - a quelque chose d'extrêmement choquant. Quel que soit le sujet, cela ouvre un véritable danger pour notre système. Cela étant, revenons à la résolution elle-même et à ce qu'elle demande. Elle ne demande d'ailleurs pas cela. Que demande-t-elle ? Elle demande que le canton défende ses intérêts. C'est tout à fait légitime qu'un canton défende ses intérêts ! Dans ce sens, il n'y a pas de raison de voter contre une telle résolution. Le problème, c'est que vous, vous pensez «intérêts économiques» et «Genève internationale» tandis que nous, nous pensons «le peuple». Eh oui ! Parce qu'en l'occurrence, 50% du peuple a voté cette initiative que vous critiquez tant. Ce n'est pas uniquement l'UDC, c'est le peuple. C'est le peuple lui-même ! Respectez aussi cet aspect-là. Si on en revient à Genève, vous pensez aux 60% qui l'ont refusée, mais que dire des 40% qui l'ont acceptée ? Ces 40%, c'est la Genève des habitants qui souffrent aujourd'hui, qu'ils soient étrangers ou suisses. Ce sont des gens qui ont effectivement besoin de logements, d'emplois, de mobilité. Et qui souffrent ! Cette souffrance - souvenez-vous-en - ne date pas de l'initiative de l'UDC, mais de bien avant. Elle date de bien avant, parce que nous vivons sur un trop grand pied à Genève. Cette initiative doit être un signal pour faire attention. Il s'agit maintenant de voir dans quelle mesure nous pouvons retrouver un développement raisonnable. Cet aspect-là, qui touche aux habitants et à un développement raisonnable, est totalement absent de votre réflexion, de votre résolution. Par contre, les amendements que nous avons déposés avec le MCG en tiennent compte. C'est la raison pour laquelle cette résolution ne sera valable que si on tient compte non seulement des intérêts économiques ou de la Genève internationale...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Christina Meissner. ...qui, au demeurant, ne risque rien, mais surtout des habitants. Je vous rappelle quand même que les Avanchets et Châtelaine ont voté oui à l'initiative !
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Le vote de ce week-end a plongé la Suisse dans une grande période d'incertitude. Un péril est désormais clairement identifié quant aux accords bilatéraux que nous avions conclus avec l'Union européenne. Que nous pensions au domaine de la formation, de la recherche ou aux obstacles techniques au commerce, c'est tout autant d'accords qui menacent d'être dénoncés par l'Union européenne. Les Verts ont donc accepté de signer cette résolution, car il en va de l'intérêt de Genève et de notre économie. Nous devons trouver une solution qui nous permette de pouvoir continuer à engager de la main-d'oeuvre étrangère. Je voudrais également rebondir sur les propos de ma préopinante, qui nous parlait du peuple. Mais, Madame, si nous appliquions à la lettre vos solutions, le peuple serait le premier à en pâtir ! Il est évident que l'impact sur l'emploi sera considérable. Dans ce canton, vous avez aujourd'hui des entreprises qui ne savent plus si elles pourront continuer à engager, à créer de l'emploi. Il est vrai qu'il y a un réel problème et une certaine précarisation des places de travail, mais les solutions que vous nous proposez ne résolvent rien. (Remarque.) Au contraire, elles ne font qu'augmenter la précarité des travailleurs. (Commentaires.) Ensuite, je voudrais souligner un autre point que cette résolution - si vous pouviez vous taire, ça m'arrangerait - ne mentionne pas, mais qui tient à coeur aux Verts, à savoir tout ce qui a trait au danger du retour du statut de saisonnier. (Commentaires.) En Suisse, nous avons eu ce statut-là pendant...
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
Mme Sophie Forster Carbonnier. ...des décennies et n'avions pas de quoi être fiers, Monsieur le président. (Remarque.) Rappelons-nous les baraquements et les gens maltraités...
Le président. Monsieur Catelain, s'il vous plaît ! Monsieur Catelain ! Poursuivez, Madame.
Mme Sophie Forster Carbonnier. Je n'ai pas interrompu votre collègue, j'espère que vous pourrez en faire de même avec moi, cher Monsieur. (Remarque.) Je parlais donc du statut du saisonnier. Je demande au Conseil d'Etat de lutter fermement contre le retour de ce statut infamant pour la Suisse. Renier le regroupement familial, qu'est-ce que ça a comme conséquence ? C'est retrouver les années durant lesquelles nombre de jeunes enfants italiens et espagnols étaient cachés dans les maisons, n'avaient pas le droit de sortir de chez eux de peur d'être arrêtés par la police, des enfants qui ne pouvaient même pas être scolarisés ! Est-ce digne de la Suisse ? Non, Monsieur le président. J'invite donc le Conseil d'Etat à agir fermement pour ne pas en revenir au statut du saisonnier et pour que le regroupement familial soit conservé. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont évidemment souhaité s'associer à cette résolution. Au-delà des divergences que nous pouvons avoir quant à l'avenir économique de ce canton - ou en tout cas quant à la façon d'assurer sa prospérité, notamment en matière fiscale ou économique - nous devons quand même constater que Genève est une ville internationale accueillant bon nombre d'étrangers, qui sont également partie prenante de notre prospérité. C'est aussi une ville universitaire - je crois qu'il faut le rappeler - qui vit des échanges et des possibilités d'ouverture avec l'Union européenne, notamment dans le cadre des échanges d'étudiants et de professeurs. Le risque est que Genève se retrouve ramenée au rang de ville de province, ce que probablement personne ne souhaite ici. Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont d'abord pragmatiques et constatent que cette initiative a été acceptée au niveau fédéral mais refusée à Genève. Il est donc légitime de demander au Conseil d'Etat de tout faire pour que le souhait de la population genevoise - à savoir des solutions qui ne passent certainement pas par des quotas ou un nombre limité d'étrangers - soit défendu au niveau fédéral. Certes, cette initiative va être mise en oeuvre. Il n'y a pas de triomphalisme ni d'esprit revanchard ici, mais bien la volonté de mettre en oeuvre une politique qui rassure la population. Si les partisans de cette initiative ont triomphé, il faut rappeler qu'ils sont aussi divisés. Il y a des gens d'extrême droite - des racistes ! - qui ont défendu cette initiative... (Exclamations.) ...mais aussi des personnes qui souffrent de la situation économique et estiment que la prospérité vantée par certains ne les atteint pas.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Roger Deneys. La diversité des opposants fait que nous voulons davantage de contrôles. Nous demandons donc au Conseil d'Etat de renforcer la politique de contrôle auprès des entreprises pour que la sous-traitance et le dumping salarial ne soient plus permis aujourd'hui. Je pense que la meilleure façon de mettre en oeuvre cette initiative au niveau genevois est de demander des contingents proportionnés aux besoins de Genève...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Roger Deneys. ...et de renforcer les contrôles pour garantir la prospérité, ainsi que les socialistes la souhaitent.
M. Pierre Vanek (EAG). Nous n'avons pas été associés à cette résolution, on ne nous a pas demandé. Il s'agit là d'une résolution signée par les partis gouvernementaux, et elle nous pose quelques problèmes. Non pas parce que nous soutenons l'initiative: non, nous avons au contraire milité pour que Genève en particulier ait le résultat qu'elle a eu, à savoir le rejet franc et massif de cette initiative xénophobe. Pourquoi ? Parce que, comme l'expliquait Christoph Blocher - c'était dans les colonnes de l'hebdomadaire de la Migros - il y a deux options: on peut réguler la migration par une mesure simple ou alors on sera obligé de verser dans toute une série de mesures compliquées et bureaucratiques, telles qu'un salaire minimum ou des conventions collectives de travail, qui détruisent le libre marché. Cette initiative est présentée par son inspirateur principal comme une machine de guerre contre les droits des travailleurs. Or dans cette situation difficile, il ne s'agit pas juste de se mettre tous ensemble - avec le PLR et d'autres - et supplier le Conseil d'Etat d'aller supplier des quotas et de parler simplement en termes de contingents, de main-d'oeuvre. Ce qu'il s'agit de faire, quand on est à gauche - mon ami Roger Deneys a terminé un petit peu dans ce sens et il en aurait dit plus encore si on ne lui avait pas coupé la parole, donc je vais moi-même en dire plus encore - c'est d'agir dans le sens des droits des travailleurs, et d'agir avec énergie. Il s'agit d'agir pour l'inspection des entreprises. Je rappelle qu'il y a une initiative qui a été validée par ce parlement, qui est en rade devant le Tribunal fédéral depuis près de deux ans. Il s'agit de renforcer - et non pas de détruire, comme le voudraient Christoph Blocher et ses disciples - les mesures d'accompagnement. Dans ce sens, cette résolution est parfaitement insuffisante. Les syndicats ont pris position en demandant un programme d'urgence en matière de renforcement des droits des travailleurs. Le Conseil de surveillance du marché de l'emploi nous a fait parvenir - tous les députés l'ont reçue - une prise de position datant d'hier, qui demande une extension facilitée des conventions collectives, qui demande un assouplissement des quorums d'employeurs dans le cadre de ces extensions, qui demande que le dispositif de contrat-type de travail soit renforcé et que les dispositions impératives d'une telle CCT ne concernent pas exclusivement les aspects salariaux mais aussi d'autres aspects...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. ...sur lesquels il y a du dumping. Cette prise de position demande aussi un renforcement du contrôle de l'application de ces conventions. Elle demande aussi - et peut-être surtout, car c'est très important - un renforcement des sanctions en cas de problèmes par rapport au marché du travail, en cas de non-respect des conventions collectives, des dispositions légales et des usages.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Pierre Vanek. Je conclus sur le fait que ces éléments qui nous ont été communiqués dans un mail reçu aujourd'hui du Conseil de surveillance du marché de l'emploi sont décisifs. Ils devraient aussi figurer dans la résolution. De ce point de vue là, nous ne la voterons pas en l'état. Nous ne la voterons pas, parce qu'elle est carentielle, déficiente...
Le président. Merci, Monsieur le député, c'est terminé.
M. Pierre Vanek. ...et ne va pas au fond du problème. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci beaucoup. La parole est à M. le député Renaud Gautier pour deux minutes et onze secondes.
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, quel privilège nous avons de siéger dans le parlement de la République et canton de Genève ! En Suisse, huit millions de personnes se demandent quelles sont les conséquences du texte voté dimanche. A Genève, nous avons la réponse. C'est absolument extraordinaire ! Nous sommes les seuls ! Nous allons expliquer au reste de la Suisse ce qui a été voté et pourquoi. Je voudrais juste m'arrêter quelques instants sur les solutions telles qu'elles figurent dans l'amendement proposé par l'UDC et le MCG. On me permettra juste de rappeler en passant que le problème des enfants clandestins a été réglé au niveau du droit supérieur comme étant une situation inacceptable. Je crois qu'à l'époque, Genève a pu s'enorgueillir de l'utilisation d'une église sur la plaine de Plainpalais, qui accueillait les enfants indésirables en Suisse pendant la période des frontaliers. (Remarque.) Mais qu'on me laisse juste vous faire une petite lecture de l'amendement proposé. Première invite: on parle de mesures d'urgence pour l'octroi de permis G. Deuxième invite: on parle de filtrer l'arrivée des nouveaux travailleurs. Troisième invite: il faut empêcher l'arrivée massive avant la finalisation des lois. Mesdames et Messieurs, est-ce que ça ne vous rappelle pas quelque chose ? (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Vous pouvez effectivement applaudir M. Gautier. Personnellement, ça ne me fait pas rigoler. Si la protection de tous les résidents genevois ne vous intéresse pas, laissez ça au MCG. Rappelez-vous que malgré votre fusion, vous n'avez que 24 députés, alors que nous sommes 20.
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons aujourd'hui entendu des propos inadmissibles. Monsieur le président, vous transmettrez ceci à M. Deneys, qui vient traiter de racistes ceux qui ont soutenu cette initiative: laissez-moi m'offusquer ! Cela veut dire que dans les rangs du parti socialiste, il y a un raciste, puisque Alberto Velasco... (Rire. Applaudissement.) ...a publiquement soutenu l'initiative de l'UDC !
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Voilà pour le premier point. Vous transmettrez, Monsieur le président. Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, on ne vous demande pas de commenter une votation populaire, on vous demande - et surtout à l'exécutif - d'appliquer la volonté du peuple ! Vous faites partie de la Confédération helvétique, et la majorité du peuple suisse a décidé. Tous les députés qui viendraient aujourd'hui appeler à la désobéissance civique violent le serment qu'ils ont prêté. Vous devez allégeance à la Confédération suisse. Vous transmettrez également à M. Buchs que le fait de dire qu'il faut désobéir à une votation populaire pourrait être un motif de révocation de sa fonction de député. Mesdames et Messieurs, que l'on soit clair: aujourd'hui, le MCG demande au gouvernement de cesser de jouer les pleureuses en critiquant cette initiative et de se remonter les manches, d'aller discuter avec les milieux économiques afin de préparer les quotas. S'ils sont intelligents, nous aurons peut-être plus de travailleurs immigrés que nous n'en avons aujourd'hui... (Exclamations.) ...puisque l'initiative mentionnait «après consultation des milieux économiques» ! Mais vous ne voulez pas voir le bon sens, vous vous cantonnez à des citations historiques à la Renaud Gautier ! C'est du reste certainement pour ça qu'il a écrit un bouquin sur la politique intitulé «Le Bal des eunuques». Sachez qu'au MCG, nous avons de la suite dans les idées, nous continuerons à veiller à ce que ce gouvernement applique les dispositions qui ont été votées de manière démocratique. Si l'Europe n'est pas contente, c'est son problème ! J'appelle l'Europe à respecter ses partenaires - et quand je dis ses partenaires, c'est la Suisse. Nous savons que les différences de niveau de vie et de salaires avec l'Union européenne sont telles que nous devons aménager une transition...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur.
M. Eric Stauffer. ...sur la durée. Ne pas vouloir reconnaître ceci, ce n'est pas respecter la Suisse, et donc la Suisse n'a pas besoin de l'Europe !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Medeiros, vous avez dix secondes. (Rire.)
M. Eric Stauffer. Vingt secondes, selon mon chronomètre, Monsieur le président.
M. Carlos Medeiros (MCG). Merci, Monsieur le président. Je vais être très bref. Je dois être le seul ancien saisonnier de cette illustre assemblée, alors je tiens à vous dire ceci: si le système n'était pas parfait, je le préférais quand même à l'économie domestique actuelle...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.
M. Carlos Medeiros. ...reposant entièrement sur des travailleurs au noir. Les saisonniers, ça veut dire une main-d'oeuvre...
Le président. C'est terminé, Monsieur. (Remarque.) Monsieur Medeiros, c'est terminé. Merci. La parole est à M. Deneys pour dix secondes.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président.
Le président. Dix secondes !
M. Roger Deneys. Vous relirez le Mémorial, j'ai dit que certaines des personnes ayant soutenu cette initiative sont des racistes et que les autres sont des personnes souffrant des conditions économiques et sociales liées à la libre circulation, c'est tout. Je vous propose de relire le Mémorial et de ne pas travestir mes propos.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Olivier Cerutti pour cinquante-cinq secondes.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président, ce sera suffisant. Je voudrais simplement rappeler qu'on est ici dans une république et canton. Nous avons donc des devoirs vis-à-vis de la «vox populi». A 60%, la «vox populi» à Genève a dit très clairement non à l'initiative, même si c'était 50-50 au niveau national. Ce ne sont pas 19 000 personnes de plus ou de moins qui changent aujourd'hui l'aspect du problème. (Commentaires.)
Le président. Chut, s'il vous plaît !
M. Olivier Cerutti. Aujourd'hui, je pense qu'il est important de rassurer l'économie, notamment le monde des PME. Il faut savoir que dans ce canton, nous avons besoin de travailler, et de travailler en toute quiétude. La formule qui est demandée ce soir, c'est simplement de rassurer...
Le président. Il vous reste dix secondes.
M. Olivier Cerutti. ...et de demander au Conseil d'Etat d'intervenir et de faire en sorte qu'on puisse poursuivre la prospérité de notre canton.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le président du Conseil d'Etat François Longchamp.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons là d'un problème qui a occupé le Conseil d'Etat de manière quasi permanente depuis dimanche soir. Je rentre à l'instant d'une séance à Berne avec les principaux cantons concernés par les conséquences de l'initiative. Autant vous le dire d'emblée: le fait que votre Grand Conseil s'apprête peut-être à voter une résolution qui déclare vouloir soutenir le Conseil d'Etat est évidemment quelque chose qui nous agrée. Mais, pour élargir le débat, j'aimerais quand même vous indiquer quelques-uns des éléments dans lesquels nous nous trouvons désormais.
Le vote populaire de dimanche a amené des résultats contrastés. A Genève, le vote en faveur des accords bilatéraux et de la libre circulation a été plus net qu'il ne l'était lors de la signature des accords bilatéraux, puisque 60% des Genevois - avec une participation très forte - ont accepté de soutenir les accords bilatéraux là où ils étaient 58% en 2005. Nous sommes l'un des rares cantons - à vrai dire le seul canton - où ce chiffre a progressé d'une votation à l'autre. A l'inverse - vous l'avez vu - un certain nombre de cantons ont pris des chemins différents, qui ont amené le résultat que nous connaissons. Le Conseil d'Etat a déclaré de la manière la plus nette qui soit qu'il allait bien évidemment respecter ce vote - même si le vote de la population genevoise était différent - et que les initiatives et les textes votés par le peuple étaient là pour être respectés. Je ne sais d'ailleurs pas où vous avez entendu le Conseil d'Etat faire partie du choeur des pleureuses, puisque nous avons, dès dimanche après-midi, indiqué que nous allions manifester toute notre énergie pour être à la fois offensifs et proactifs pour défendre la situation du canton dans les éléments qui le concernent désormais.
Pour que vous preniez l'ampleur de la mesure des difficultés auxquelles nous allons être confrontés, j'aimerais vous donner quelques chiffres. Mesdames et Messieurs, si l'année dernière, l'initiative avait été en vigueur et que nous avions dû obtenir des contingents pour tout ce qui s'est passé en 2013 dans notre canton, nous aurions dû obtenir, Mesdames et Messieurs, 34 881 contingents, alors même que l'initiative explique que 80 000 contingents sont déjà trop élevés pour l'ensemble de la Suisse ! A nous tout seuls, nous avons obtenu un cinquième des permis B qui ont été accordés dans toute la Suisse - les seuls qui sont contingentés, les permis extra-européens - alors même que nous représentons 5,5% de la population ! Notre particularité est importante, parce que nous avons des entreprises avec un tournus amenant à avoir des besoins de contingents qui ne sont pas à considérer en termes de stock mais de flux. Evidemment, il s'agit là de quelque chose de très particulier pour le canton de Genève. Comme je l'ai dit, alors même que 4000 personnes supplémentaires habitent le canton, nous aurions eu un besoin de 35 000 contingents simplement pour obtenir ce que nous avons obtenu l'année dernière.
Les différents cantons suisses se trouvent dans des situations moindres, mais qui ont aussi leurs particularités. Dans les régions touristiques, vous comprendrez bien volontiers qu'il faut des permis de courte durée. Or si on les contingente et qu'on applique les règles actuelles des contingents - c'est-à-dire qu'ils sont liés intrinsèquement à une personne et non à un poste - une personne venant travailler dans l'hôtellerie touristique quatre mois dans une année occupe un contingent. Si, l'année suivante, ce poste est occupé par une autre personne, c'est un nouveau contingent qu'il faut ouvrir, multipliant ainsi le nombre de contingents, alors qu'une personne occupant le même poste dix ans de suite n'occuperait qu'un seul contingent. Enfin - et je m'en suis aperçu avec une certaine surprise encore ce matin, puisque le conseiller d'Etat tessinois en charge de ces affaires était présent à la séance bernoise - il y a un certain nombre de cantons - je pense au Tessin qui, à lui tout seul, par son écart de voix, a fait basculer le vote de dimanche - qui viennent maintenant nous expliquer qu'ils doivent être traités en priorité pour avoir plus de contingents que les autres cantons, alors même qu'il y a quatre jours, 70% de la population tessinoise a décidé de fermer la porte à la libre circulation !
Nous mettrons donc toute notre énergie pour faire valoir les intérêts particuliers du canton de Genève, pour expliquer qu'on ne peut pas agir ainsi dans un canton qui a 26 000 personnes travaillant dans les organisations internationales... Quand on utilise la notion de Genève internationale au sens large, c'est-à-dire avec les organisations non gouvernementales et avec les conjoints et conjointes - puisque le regroupement familial est maintenant concerné par les problèmes de contingents - nous parlons aujourd'hui de 50 000 personnes rien que dans notre canton ! Il faudra bien que nous trouvions, avec les autorités fédérales, une solution pour pouvoir faire en sorte qu'il y ait une solution particulière non seulement pour la Genève internationale, mais aussi pour la Lausanne internationale qui, elle, a beaucoup de fédérations sportives, comme vous le savez. C'est la raison pour laquelle, dès lundi, nous avons décidé de faire front commun avec le canton de Vaud pour donner plus de poids et de force à notre discours et aux interventions que nous pourrons faire au niveau fédéral.
Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat sera offensif, fera valoir les intérêts de notre canton, les défendra avec la dernière énergie, car il en va de la prospérité de notre canton. Mais j'aimerais simplement vous indiquer qu'aujourd'hui, même dans les cantons qui ont accepté cette initiative, même avec des magistrats à la tête de partis ayant appelé à voter pour cette initiative, nous nous trouvons dans le même bateau, à savoir une grande inquiétude. Les soutiens qui nous parviendront seront donc les bienvenus, et notamment peut-être celui de la présente résolution, si vous lui donnez un sort favorable. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vais suspendre la séance pendant trois minutes. Nous avons en effet reçu un sous-amendement à un amendement qu'il nous faut imprimer et distribuer aux chefs de groupe, afin de pouvoir voter tranquillement tout à l'heure.
La séance est suspendue à 17h36.
La séance est reprise à 17h42.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos travaux. Veuillez vous rasseoir, s'il vous plaît. (Un instant s'écoule.) Monsieur Deneys, Monsieur Hiltpold, Monsieur Vanek, je vous remercie de bien vouloir prendre place. (Un instant s'écoule.) Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît ! Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis de plusieurs amendements. (Brouhaha.) Je vous demande votre attention. Nous allons voter dans l'ordre les demandes d'amendements... (Le président agite la cloche.) Nous allons voter dans l'ordre les demandes d'amendements, en commençant par celui du... (Brouhaha.) Madame Meissner, s'il vous plaît ! Nous commençons par la demande d'amendement présentée conjointement par l'UDC et le MCG, qui stipule que toutes les invites de la résolution sont remplacées par le texte suivant:
«- A prendre les mesures d'urgence pour contingenter d'ores et déjà l'octroi des permis G pour les travailleurs frontaliers;
- A remettre en activité le principe de l'ancienne commission tripartite pour filtrer l'arrivée de nouveaux travailleurs frontaliers;
- A empêcher l'arrivée massive de frontaliers avant la finalisation des lois d'application découlant du vote populaire du 9 février contre l'immigration de masse;
- A entreprendre une concertation avec les milieux économiques afin d'évaluer et prévoir le contingentement.»
Je vous soumets l'entier de ces invites comme un amendement unique.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 31 oui.
Le président. Nous sommes maintenant saisis d'un sous-amendement de MM. Hiltpold et Barrillier à l'amendement déposé par Mme Salika Wenger et M. Vanek, dont voici la teneur: «Approuve le renforcement des mesures d'accompagnement, notamment en mettant en oeuvre les propositions présentées dans la prise de position du CSME du 13 février 2014 et en travaillant à renforcer l'action des partenaires sociaux.» Le dernier segment de la phrase - «à renforcer l'action des partenaires sociaux» - remplace le texte initial d'Ensemble à Gauche, qui mentionnait: «à renforcer les droits des travailleurs et de leurs syndicats». Je vous soumets d'abord le sous-amendement PLR.
Mis aux voix, ce sous-amendement est adopté par 52 oui contre 34 non et 5 abstentions.
Le président. Nous votons à présent l'entier de l'amendement d'Ensemble à Gauche tel que modifié par le sous-amendement du PLR.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 63 oui contre 28 non et 2 abstentions.
Mise aux voix, la résolution 755 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 62 oui contre 31 non et 1 abstention.